1. Introduction
1. Depuis les premiers jours de
la révolution tunisienne début 2011, l’Assemblée parlementaire suit attentivement
les développements politiques dans ce pays, qui ont une grande importance
non seulement pour la Tunisie, mais également pour l’ensemble de
la région du sud de la Méditerranée et du Proche-Orient, ainsi que
pour l’Europe dans son ensemble. En fait, la Tunisie peut être considérée
comme le berceau de toutes les révolutions dans le monde arabe,
qu’on a désormais l’habitude d’appeler «le Printemps arabe».
2. Dans ses
Résolutions
1791 (2011) et 1819 (2011) et sa
Recommandation 1972 (2011) sur la situation en Tunisie, pour lesquelles j’ai eu
l’honneur d’être rapporteure, l’Assemblée a exprimé son ferme soutien
aux aspirations démocratiques du peuple tunisien. Elle a marqué
sa disponibilité pour faire bénéficier les institutions et la société
civile tunisiennes de son expérience en matière d’accompagnement
de transitions démocratiques, et a invité le Comité des Ministres
et le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe à œuvrer pour contribuer
à la réussite de la transition tunisienne.
3. L’Assemblée parlementaire a observé les élections à l’Assemblée
nationale constituante (ANC) tenues le 23 octobre 2011.
4. Comme les transformations initiées par la révolution ne pouvaient
s’opérer du jour au lendemain, il m’a semblé important que notre
Assemblée puisse suivre ce processus dans la durée. J’ai donc déposé,
en octobre 2011, une nouvelle proposition de résolution sur la transition
politique en Tunisie, et j’ai été nommée rapporteure en janvier
2012.
5. Le présent rapport a pour but de fournir des informations
sur les principaux événements politiques en Tunisie depuis la dernière
résolution de l’Assemblée parlementaire (juin 2011), de passer en
revue les contacts et la coopération établis entre le Conseil de
l’Europe et la Tunisie, et de formuler des propositions pour l’avenir.
6. L’Assemblée parlementaire devrait continuer à suivre de près
la situation en Tunisie dans les mois et années à venir, de sorte
que ce rapport ne sera pas le dernier.
2. Développements et défis politiques
en Tunisie
7. Dès le début de la révolution
tunisienne, il était évident que cette dernière ne pouvait pas apporter
de solutions immédiates aux problèmes du pays, et que les espoirs
d’une vie meilleure et digne qui animaient les Tunisiens qui ont
fait tomber l’ancien régime prendraient du temps à se voir réalisés.
La situation socio-économique difficile et qui continuait à s’aggraver
faisait craindre des répercussions pouvant freiner le développement
démocratique.
8. Cependant, en dépit de ces conditions défavorables et de quelques
incidents plus ou moins graves mais plutôt isolés, la situation
politique est restée globalement stable.
2.1. Elections
9. Les élections à l’Assemblée
nationale constituante tenues le 23 octobre 2011 constituent l’événement politique
le plus marquant des douze derniers mois. La manière dont les Tunisiens
ont réussi à gérer ces élections et l’acceptation large de leurs
résultats par la société tunisienne différencient positivement la
Tunisie d’autres pays en transition.
10. Depuis la chute du régime de Ben Ali, la Tunisie vivait dans
une «légitimité révolutionnaire», c'est-à-dire sans institutions
issues d’un processus démocratique. Cette situation ne pouvait perdurer,
au risque de voir l’autorité du gouvernement transitoire fondre
sous les difficultés économiques et les revendications croissantes de
la rue.
11. L’organisation et la conduite des élections ont été confiées
à une structure indépendante, l'Instance supérieure indépendante
pour les élections (ISIE), présidée par M. Kamel Jendoubi. Le cadre
juridique en a été élaboré au sein de la Haute instance pour la
réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et
de la transition démocratique, présidée par M. Yadh Ben Achour.
12. Ces deux instances ont fait un travail d’une qualité remarquable
et méritent d’être félicitées pour l’organisation des premières
élections véritablement transparentes, libres et équitables dans
l’histoire du pays.
13. Il convient également de rendre hommage aux efforts du gouvernement
intérimaire présidé par M. Beji Caïd Essebsi pour assurer un climat
stable et serein pour les élections. Comme nous l’avons noté dans
le rapport précédent, tous les membres des autorités provisoires
ont renoncé à se présenter aux élections, et n’ont pas cherché à
influencer le vote.
14. Les élections ont suscité un vif intérêt dans la société et
dynamisé la vie politique en Tunisie. La libéralisation des conditions
nécessaires pour participer au processus politique a eu pour conséquence l’établissement
de plus de 110 partis politiques. Selon les données officielles
de l’ISIE, 828 listes de partis, 655 listes de candidats indépendants
et 34 listes de coalitions ont été enregistrées pour les élections.
Le nombre total de candidats a été de 11 618 pour 217 sièges. Il
s’agissait donc d’un véritable pluralisme de choix.
15. L’Assemblée parlementaire a été invitée à observer les élections
et j’ai eu l’honneur de faire partie de cette mission d’observation.
J’ai également eu l’occasion de participer aux missions préélectorales
(14-17 septembre 2011) et postélectorale (16-17 janvier 2012).
16. La commission ad hoc de l’Assemblée parlementaire chargée
d’observer les élections a conclu dans son rapport
«que
les citoyens de la Tunisie ont pu concrétiser ce rendez-vous avec
l’histoire. Pour la première fois, ils ont élu librement leur Assemblée
nationale constituante, posant le socle de leur démocratie. Les citoyens
ont ainsi transformé la dynamique de la révolution en une institution
légale et légitime, donnant ainsi un exemple pour toute la région».
17. Le rapport d’observation note aussi les conditions équitables
dont ont bénéficié les candidats, y compris en ce qui concerne la
couverture médiatique de la campagne, et l’enthousiasme et la dignité
des citoyens qui ont participé au vote.
18. Certes, les élections n’ont pas été parfaites: la délégation
de l’Assemblée parlementaire a relevé dans son rapport une série
d’insuffisances et de problèmes qu’il faudrait régler en vue du
nouveau cycle électoral.
19. Le point le plus faible a été l’inscription des électeurs
sur les listes électorales. Selon nos informations, quelque 1,6
million de personnes sur 6,1 millions de citoyens ayant le droit
de voter n’ont pas été inscrits, soit plus d’un quart du corps électoral.
Les autorités tunisiennes doivent résoudre le problème des listes
d’électeurs pour assurer le caractère général des futures élections
afin que chaque citoyen qui a le droit de voter puisse le faire.
20. Cependant, malgré quelques défaillances, les élections ont
été un succès, et leurs résultats ont été généralement bien acceptés
par la société: il n’y a pas eu de contestation majeure, même s’il
y a eu beaucoup de déçus à l’annonce des résultats.
21. Un parti est sorti grand vainqueur du scrutin: le parti islamiste
modéré Ennahdha (la Renaissance), fondé au début des années 1980
et interdit par l’ancien régime, a recueilli le plus grand nombre
de suffrages et a obtenu 89 sièges à l’ANC sur 217.
22. Une dizaine d’autres partis et d’élus indépendants se sont
partagé le reste des sièges.
23. Il convient de rappeler que, dans le cadre de la préparation
des élections, les autorités intérimaires ont cherché à promouvoir
l’égalité entre les femmes et les hommes, et à assurer une représentation
équitable des femmes au sein de l’Assemblée constituante. L’une
des conditions de la recevabilité des listes de candidats a été
d’y inclure le même nombre de candidats des deux sexes dans un ordre
alterné. Cependant, seulement 7 % des listes comportaient une femme
en première position. En conséquence, seulement 59 femmes ont été élues,
ce qui représente 27 % des 217 sièges de l’ANC et constitue une
baisse par rapport au pouvoir législatif précédent (30 %).
2.2. Formation des institutions de l’Etat
24. A la suite des élections, trois
partis – Ennahdha (89 sièges), le Congrès pour la République (CPR) (29 sièges)
et Ettakatol, Forum démocratique pour le travail et les libertés
(20 sièges) – ont formé «la Troïka», une coalition qui détient la
majorité dans l’ANC. Les représentants de ces partis ont, par conséquent,
obtenu les positions clés dans la structure des nouvelles autorités
provisoires. Les présidences des plus hautes instances de l’Etat
ont été réparties entre les trois partis au pouvoir.
25. Le 22 novembre 2011, l’ANC a élu M. Mustapha Ben Jaafar (président
du parti Ettakatol) à sa présidence. Il a obtenu 145 voix (68 %).
La candidate de l’opposition, Mme Maya
Jribi, en a recueilli 32 %.
26. Le 10 décembre, l’ANC a adopté une «mini-constitution»: une
loi en 26 articles organisant provisoirement les pouvoirs publics
tunisiens.
27. Sur cette base, l’ANC a procédé, le 12 décembre 2011, à l’élection
du nouveau Président provisoire de la Tunisie. Sur 10 candidats
présentés, un seul, M. Moncef Marzouki (CPR), ancien secrétaire
général de la Ligue tunisienne des droits de l’homme, remplissait
les conditions d’éligibilité définies par la «mini-constitution».
Il a été élu par 153 voix et a prêté serment le lendemain.
28. La Troïka a ensuite formé un gouvernement provisoire: le 14
décembre, le Président Marzouki a chargé M. Hamadi Jebali, secrétaire
général du parti Ennahdha qui avait obtenu le plus de voix, de constituer
le gouvernement. Celui-ci a pris ses fonctions le 24 décembre 2011
après un vote de confiance à l’ANC.
2.3. Organisation des travaux de l’ANC
29. Les élus membres de l’ANC sont
constitués en sept groupes parlementaires dont trois font partie
de la majorité.
30. Après l’adoption du règlement intérieur en janvier 2012, l’ANC
a constitué ses organes de travail: un bureau et 17 commissions.
31. Six commissions constitutionnelles, composées chacune de 22
membres, sont chargées de la rédaction des différents chapitres
de la future Constitution:
- préambule,
principes généraux et amendement de la Constitution;
- instances constitutionnelles;
- droits de l’homme et libertés;
- pouvoir législatif, pouvoir exécutif et relations entre
les deux pouvoirs;
- juridictions judiciaire, administrative, financière et
constitutionnelle;
- collectivités publiques régionales et locales.
Il s’y rajoute huit commissions législatives:
- droits, libertés et relations
extérieures;
- législation générale;
- finances, planification et développement;
- énergie et secteurs de production;
- secteurs de services;
- infrastructure et environnement;
- affaires sociales;
- éducation;
ainsi que trois commissions spéciales:
- règlement intérieur et immunités;
- victimes de la révolution et amnistie générale;
- réforme administrative et lutte contre la corruption.
32. Par ailleurs, un Comité mixte
de coordination et de rédaction de la Constitution a été créé pour consolider
les travaux des six commissions constitutionnelles.
33. Lors de notre visite à Tunis en janvier 2012, il nous a été
expliqué que les réunions de l’ANC et de ses commissions constitutionnelles
sont retransmises à la télévision, et qu’elles sont ouvertes à la
participation du public et des représentants de la société civile.
Cependant, j’ai été informée que, dans la pratique, l’accès aux commissions
est trop restrictif. Les commissions invitent également différents
experts tunisiens et internationaux.
34. Il existe une incertitude sur la durée des travaux de l’ANC.
A la veille des élections, un accord avait été élaboré et signé
par 11 principaux partis politiques, qui prévoyait que le mandat
de l’Assemblée constituante ne devrait pas dépasser douze mois.
Cependant, le CPR, le 12e parti, qui
devait également participer à cet accord, s’est désisté à la dernière
minute, ce qui a rendu cette disposition de l’accord inopérante.
35. Actuellement, la plupart de nos interlocuteurs au sein de
l’ANC et du gouvernement s’entendent à dire que les travaux de l’ANC
devraient aboutir au plus tard dix-huit mois après les élections
et que les nouvelles élections devraient se tenir au printemps 2013.
Cependant, le texte de la mini-constitution n’a pas mis de limitation
légale à la durée du mandat de l’ANC ni, par conséquent, aux mandats
des organes de l’Etat qu’elle a formés (le Président et le gouvernement).
Certains interlocuteurs ont souligné qu’ils regrettaient la lourdeur des
structures mises en place empêchant ainsi un aboutissement rapide
des travaux.
36. Néanmoins, le président de l'ANC, Mustapha Ben Jaafar, a annoncé
le 10 mai 2012 que la nouvelle Constitution devrait être prête au
plus tard le 23 octobre 2012.
2.4. Restructuration du paysage politique
37. La recomposition de l’échiquier
politique est une autre tâche importante à l’ordre du jour. L’émergence de
plus de 100 partis politiques à la veille des élections était sans
doute utile pour réveiller le sens de participation des Tunisiens
à la définition de l’avenir de leur pays.
38. Cependant, l’une des conséquences de cette fragmentation est
le fait qu’une part importante de la société, qui a voté pour les
petits partis, n’est pas représentée au sein de l’ANC.
39. D’autre part, les formations politiques qui n’ont obtenu que
quelques sièges ont peu d’influence sur les décisions à prendre.
40. Il est donc naturel que les petits partis cherchent à se regrouper.
Au sein de l’ANC, les coalitions se font dans les groupes parlementaires
d’opposition. On assiste également à des fusions entre les partis
selon leurs orientations politiques. Ce processus est à saluer:
même au nom du pluralisme politique, plus de 100 partis semblent
être de trop pour un pays de 10 millions d’habitants.
2.5. Société civile
41. La Tunisie dispose d’une société
civile bien structurée et active qui est très présente dans le débat politique
tunisien. Les différentes associations et organisations civiles
existaient dans le pays avant la révolution de 2011, et sont donc
bien implantées parmi la population. Elles ont joué un rôle majeur
dans la mobilisation des citoyens pendant la révolution, et continuent
à faire entendre leur voix.
42. Par ailleurs, à la suite d’un très fort morcellement des forces
politiques à la veille des élections à l’ANC, un grand nombre d’acteurs
importants de partis politiques et de la société civile n’ont pas
été élus. Pour autant, ils n’entendent pas rester silencieux dans
le processus constitutionnel et cherchent à transférer le débat
autour de la future Constitution des locaux de l’ANC vers l’espace
public.
43. Cette attitude mérite d’être saluée: la future Constitution
doit devenir l’affaire de tous les Tunisiens puisqu’elle est censée
déterminer l’avenir du pays pour les décennies à venir. Il est essentiel
que la Constitution puisse garantir les droits et les libertés qui
ont motivé la révolution tunisienne et permettre l’émergence d’une
Tunisie moderne, ouverte et démocratique.
2.6. Les grands défis de la société tunisienne
2.6.1. Le rôle de l’islam
44. L’un des sujets qui ont mobilisé
les débats aussi bien au sein de l’ANC que dans la société civile
est le rôle de l’islam.
45. Pendant les années du régime Ben Ali, les organisations politiques
d’inspiration islamique ont été interdites et leurs membres sévèrement
persécutés. L’actuel chef du Gouvernement, M. Jebali, a fait plus
de seize ans de prison, dont dix ans en isolement. Plusieurs ministres
et élus à l’ANC ont également passé de longues années en prison,
et certains d’entre eux avaient été condamnés à la peine capitale.
46. La chute de l’ancien régime a libéré l’expression politique
des différents groupes de tendance islamique, dont le parti Ennahdha
qui a obtenu le meilleur résultat aux élections. Cette victoire
légitime mais inattendue pour beaucoup a fait craindre aux partisans
de la laïcité une islamisation du pays.
47. Ces inquiétudes ne sont pas complètement infondées si on prend
en considération l’activisme des groupes islamistes beaucoup plus
radicaux qu’une Ennahdha modérée, notamment le mouvement salafiste. Les
partisans de ce dernier exigent, par exemple, que les femmes tunisiennes
soient obligées de porter le voile intégral (niqab) et
s’attaquent aux journaux et autres médias qui, selon eux, ne respectent
pas les traditions islamiques.
48. Au printemps 2012, ces groupes ont mobilisé des milliers de
manifestants pour exiger l’inscription dans la Constitution de la
référence à la charia en tant que source primaire de la législation.
Les partis laïcs et les organisations de la société civile ont,
à leur tour, organisé des manifestations en faveur de la sauvegarde
des valeurs et libertés démocratiques et du maintien d’un Etat laïc.
49. De plus, les croyants tunisiens font l’objet de tentatives
d’influence externe: on a constaté des visites de plus en plus fréquentes
en Tunisie de prédicateurs étrangers partisans d’un islam radical
qui prêchent la violence et les pratiques contraires aux lois et
traditions tunisiennes.
50. Selon certains experts tunisiens, ce sont l’Arabie saoudite
et le Qatar qui financent, au moins en partie, le salafisme et l’islam
politique en Tunisie.
51. Face à ce phénomène, des associations de la société civile
ont porté plainte contre l’exploitation des mosquées et des lieux
saints à des fins politiques.
52. Plusieurs élus d’Ennahdha se sont prononcés contre la séparation
du politique et du religieux, et ont estimé que la future Constitution
ne devrait pas contenir de dispositions contraires au Coran et à
la Sunna.
53. Les dirigeants d’Ennahdha ont entrepris de calmer les esprits
et de promouvoir le consensus public. Le président du parti, Rached
Ghannouchi, a souligné la nécessité de séparer la prédication de
la politique, et a affirmé que la mosquée n’était pas une tribune
pour les partis.
54. L’instance dirigeante du parti Ennahdha a également, avec
une large majorité, renoncé à insérer dans le texte de la future
Constitution une référence explicite, à la charia en tant que source
primaire du droit. Le parti a marqué son accord à reproduire la
formule de l’article premier de la Constitution de 1959 qui mentionnait l’islam
comme la religion de la Tunisie.
2.6.2. La sécurité
55. Un autre grand défi à la stabilité
politique est de mettre un terme à l’insécurité. Selon les données annoncées
par le ministre de l’Intérieur en février 2012, pendant les douze
mois qui ont suivi la révolution, quelque 400 postes de la garde
nationale et de la police ont été attaqués, 800 véhicules de différents
types ont été incendiés, et 12 000 personnes ont été arrêtées à
la suite d’actes de pillage, de violence et de tentatives de meurtre.
56. Aux crimes de droit commun s’ajoute une nouvelle menace: les
agissements de plus en plus actifs des groupes salafistes. En février
2012, 12 personnes armées ont été arrêtées à Bir Ali Ben Khalifa
(au sud-est du pays) à la suite d’affrontements violents avec les
forces de l’ordre. Un nombre important d’armes a été saisi. Selon
le ministre de l’Intérieur, ces personnes, dont certaines sont venues
de Libye, seraient en liaison avec des organisations extrémistes
basées dans ce pays voisin (Al-Qaeda au Maghreb islamique, AQMI)
et ont pour but l’instauration d’un émirat islamique en Tunisie.
57. D’autres éléments se revendiquant du salafisme se radicalisent
et ont recours à l’intimidation à l’égard des personnalités publiques
connues pour leurs prises de positions en faveur de la laïcité et
des libertés démocratiques. Depuis janvier 2012, plusieurs agressions
ou menaces à l’encontre de journalistes, de chercheurs, d’hommes
et de femmes politiques ainsi que de syndicalistes ont été recensées.
La violence politique est une atteinte aux libertés publiques et
individuelles qui risque de détériorer sérieusement le climat dans
le pays et de nuire au processus politique.
58. La situation est aggravée par l’attitude du public face aux
forces de l’ordre, considérées par beaucoup comme des vestiges de
l’ancien régime. Il faut noter qu’aux yeux d’une grande partie de
l’opinion publique, le comportement de la police n’a guère changé
après la révolution: plusieurs manifestations ont été réprimées par
les policiers avec une violence excessive.
59. De plus, la police est soupçonnée d’être plus tolérante à
l’égard des partisans de la mouvance salafiste qu’à l’égard des
manifestants syndicaux et autres représentants de la société civile.
Ainsi, elle a été accusée d’inaction quand un groupe d’étudiants
proches de la mouvance islamiste fondamentaliste de l’université
de Manouba (Tunis) a bloqué l’université pendant plusieurs jours
fin 2011-début 2012 pour réclamer le droit de se présenter aux examens
pour les étudiantes portant le niqab,
ce qui est contraire au règlement de l’université. Dans un autre
incident survenu dans cette même université en mars 2012, un activiste
proche de la tendance fondamentaliste a enlevé le drapeau national
tunisien et l’a remplacé par un drapeau noir avec des slogans islamiques.
60. Une réforme profonde des forces du maintien de l’ordre est
donc nécessaire pour leur permettre de garantir la sécurité et ainsi
de regagner la confiance de la société, qui a des doutes quant à
la loyauté de la police vis-à-vis des autorités politiques.
61. L’un des moyens d’avancer vers la réforme de la police et
de renforcer son autorité est d’éradiquer l’impunité au sein des
forces de l’ordre. Les Tunisiens ne sont pas prêts d’oublier le
rôle de la police dans la répression de la révolution: au cours
des affrontements, au moins 338 personnes ont perdu la vie et plus
de 2 300 ont été blessées.
62. Un pas important vient d’être fait dans ce sens: fin avril
2012, le tribunal militaire de Sfax a condamné deux policiers coupables
du meurtre d’un manifestant le 14 janvier 2011, à vingt ans de prison
et à des compensations aux proches de la victime. D’autres procès
de ce genre devraient suivre.
63. Le problème d’impunité est, cependant, plus large et ne s’arrête
pas aux petits exécutants d’ordres. Certes, l’ancien chef de l’Etat
Ben Ali et les membres de son «cercle restreint» ont été jugés par
contumace. Toutefois, les Tunisiens s’attendent à ce que d’autres
figures de l’ancien régime soient appelées à répondre de leurs actes.
Le rétablissement d’une justice indépendante et efficace est indispensable
pour gagner la confiance des Tunisiens en leur nouvel Etat.
2.6.3. La tolérance interethnique
64. En dépit des tentatives de
groupes extrémistes, la tolérance interethnique et la cohabitation
pacifique des croyants des différentes religions ne semblent pas
être mises en danger. Ainsi, l’appel du ministre israélien Silvan
Shalom à tous les juifs vivant dans les pays du Printemps arabe
à se rapatrier en Israël n’a pas eu d’écho auprès de la communauté
juive de Tunisie.
2.6.4. La situation des femmes
65. Si la situation des femmes
en Tunisie et leur position au sein de la société semblent être
meilleures à celles de beaucoup de pays de la région
, il n’en est pas moins nécessaire
de veiller à la préservation des acquis dans ce domaine. Ces derniers
temps, il y a eu des signes préoccupants: des partisans d’un islam extrémiste
cherchent à s’attaquer à ces acquis en proposant, par exemple, d’introduire
la polygamie.
2.6.5. Les médias
66. Si la liberté des médias gagnée
au cours de la révolution semble s’enraciner dans les esprits des Tunisiens,
elle n’est pas à l’abri d’attaques venues aussi bien des milieux
extrémistes que, dans une certaine mesure, des milieux proches du
pouvoir.
67. Quelques journalistes ont été poursuivis en justice et arrêtés
pour la publication d’images jugées contraires aux bonnes mœurs
et aux traditions. D’autres ont fait l’objet d’agressions de la
part des milieux extrémistes.
68. Récemment, une chaîne de télévision privée, Nessima, a été condamnée à une amende
pour la diffusion, en automne 2011, du film d’animation Persepolis. Après la diffusion de
ce film, qui montre Allah (ce qui est interdit par la religion islamique),
le directeur de la chaîne a reçu des menaces de mort et son domicile a
été attaqué.
69. Les pouvoirs ont réaffirmé leur appui à la liberté d’expression,
alors que les principaux partis d’opposition se sont prononcés contre
les poursuites en justice des journalistes comme étant contraires
aux objectifs de la révolution et aux aspirations des Tunisiens
à la liberté de la presse.
70. Ceci étant, la qualité des médias et les positions prises
par des journalistes font également l’objet de vives critiques de
la part des membres de l’ANC faisant partie de la majorité (en particulier
Ennahdha et le CPR). Ils sont notamment accusés de minimiser l’effort
du gouvernement, de véhiculer une image négative de la majorité
et d’engager une campagne médiatique tendancieuse au service de
la contre-révolution.
71. De même, la télévision publique Al-Wataniya a
été la cible de pressions de la part d’un groupe de manifestants
considérés comme proches d’Ennahdha, qui l’accusent d’être aux mains
d’anciens membres du Rassemblement constitutionnel démocratique
(RCD), parti de Ben Ali, et qui réclament «l’épuration» de la chaîne.
72. Certains responsables d’Ennahdha ont évoqué la possibilité
de privatiser les chaînes publiques. Ainsi, le président du parti,
M. Ghannouchi, a mentionné, dans une interview aux médias du Qatar
et d’Oman, la possibilité de «prendre des mesures radicales dans
le domaine de l’information dont, éventuellement, la privatisation
des médias publics».
73. Dans un rapport publié à l’occasion de la journée mondiale
de la liberté des médias, le 3 mai 2012, l’Union des journalistes
tunisiens a présenté les défis auxquels les médias tunisiens doivent
faire face. Le rapport note, entre autres, qu’un grand nombre de
journalistes du pays ont été soumis à des pressions physiques et
verbales de la part de la police, des milieux politiques et de citoyens
ayant des affiliations politiques.
2.6.6. La situation socio-économique
74. La crise de l’économie tunisienne
constitue l’une des plus graves menaces pour la réalisation des objectifs
de transition et de stabilité du pays.
75. Contrairement aux attentes euphoriques de certains, la révolution
tunisienne n’a pas amélioré la situation de l’économie nationale.
Bien au contraire, les résultats économiques de l’année 2011 ont
été désastreux.
76. En 2011, les investissements étrangers dans l’économie tunisienne
ont baissé de 32 %. Les revenus du secteur touristique, principale
source de devises, ont baissé de 40 %.
77. La situation économique de la Tunisie a également subi les
retombées du ralentissement économique en Europe – notamment dans
la zone euro – premier partenaire économique de la Tunisie, et de
l’instabilité en Libye, le deuxième partenaire.
78. Le chômage n’a cessé de progresser au cours de l’année 2011,
pour atteindre le chiffre de plus de 740 000 chômeurs fin 2011 (soit
19 % de la population active). A titre de comparaison, ce taux était
de 13 % en mai 2010.
79. Plus de 72 % de chômeurs sont des jeunes de moins de 30 ans.
Le chômage est plus important chez les femmes (28 %) que chez les
hommes (15 %). Plus de 220 000 chômeurs (30 %) sont des diplômés
de l’enseignement supérieur.
80. Les couches de la société les plus engagées dans la révolution
– les jeunes diplômés – se trouvent ainsi les plus défavorisées.
C’est un risque majeur pour leur soutien au processus de transformation.
81. Les libertés politiques nouvellement obtenues, combinées avec
l’incapacité des autorités d’apporter des réponses immédiates à
la crise, ont eu pour conséquence un mouvement social sans précédent
– grèves, sit-in, blocages des entreprises ou des routes – qui,
à son tour, n’a fait que dissuader les investisseurs potentiels.
82. Le mécontentement de la population face à la situation socio-économique
prend parfois des formes violentes. Ainsi, en février 2012, de violents
troubles ont eu lieu à Bou Salem où plusieurs bâtiments officiels ont
été saccagés et incendiés.
83. Dès son élection, le Président Marzouki a lancé un appel à
une trêve politique et sociale de six mois afin de permettre au
nouveau gouvernement provisoire de mettre en œuvre son programme
économique.
3. Coopération avec le Conseil de l’Europe
3.1. Contacts parlementaires et perspectives
pour l’avenir
84. Comme j’ai déjà eu l’occasion
de l’indiquer dans les rapports précédents, l’Assemblée parlementaire
a joué un rôle de pionnier en ce qui concerne le soutien à la transition
en Tunisie et l’établissement de contacts avec les différentes composantes
de la société tunisienne.
85. En l’absence d’une institution parlementaire, ces contacts
ont, au début, visé les autorités intérimaires, les instances spécifiques
telles la «commission Ben Achour» et l’ISIE, les partis politiques
et les acteurs de la société civile. C’était notamment le cas pendant
l’observation des élections du 23 octobre 2011.
86. Dès la mise en place de l’ANC, qui est un organe électif avec
des compétences à la fois constitutionnelles et législatives, nous
avons établi des contacts avec cette assemblée: lors de la visite postélectorale
en janvier 2012, nous avons été reçus par le président de l’ANC,
Mustapha Ben Jaafar, et nous avons eu des entretiens avec des représentants
des principaux groupes politiques de l’ANC.
87. Au cours de la même visite, nous avons évoqué la possibilité
d’inviter M. Ben Jaafar à s’adresser à notre Assemblée et nous avons
discuté de la possibilité d’accueillir des élus tunisiens au sein
de la commission des questions politiques et de la démocratie. Les
deux propositions ont été bien reçues par nos interlocuteurs. Le Président
de l’Assemblée parlementaire, M. Jean-Claude Mignon, les a officiellement
confirmées dans une lettre à M. Ben Jaafar.
88. Le Président de notre commission, M. Pietro Marcenaro, s’est
rendu à Tunis en avril 2012 pour participer à un colloque organisé
par la société civile tunisienne. A cette occasion, il a pu rencontrer
le Président Ben Jaafar et lui a renouvelé notre invitation.
89. Pendant la partie de session d’avril 2012 de l’Assemblée,
nous avons eu l’occasion de recevoir au sein de notre commission
des représentants de l’ANC, y compris Mme Meherzia
Labidi Maïza, 1re vice-présidente. La
délégation tunisienne a également eu de nombreux contacts, aussi
bien à l’Assemblée que dans d’autres secteurs du Conseil de l’Europe,
et a participé à l’audition sur le rôle des femmes dans les révolutions
arabes.
90. J’espère que cette visite marquera le début d’une relation
suivie et fructueuse. En effet, les élus tunisiens ont montré un
vif intérêt pour les travaux de l’Assemblée et de ses commissions
et ont pu recueillir des informations et établir des contacts qui
seront utiles dans leurs activités au sein de l’ANC.
91. Actuellement, les représentants de l’ANC peuvent participer
à nos travaux sur la base de la
Résolution 1598 (2008) «Renforcer la coopération avec les pays du Maghreb».
En même temps, je rappelle qu’aux termes de la
Résolution 1819 (2011) sur la situation en Tunisie, nous avons invité les autorités
tunisiennes «à examiner les perspectives de dialogue parlementaire
offertes par le statut de Partenaire pour la démocratie récemment
créé par l’Assemblée».
92. Je ne peux donc qu’encourager, encore une fois, nos partenaires
tunisiens à profiter de cette ouverture. Je suis confiante que cela
contribuera à la fois à la consolidation du parlementarisme en Tunisie
et au progrès du pays sur la voie vers la démocratie.
3.2. Programme de coopération entre le
Conseil de l’Europe et le Gouvernement tunisien
93. Je rappelle que, dès janvier
2011, l’Assemblée parlementaire avait encouragé les autorités tunisiennes à
intensifier et à élargir la coopération avec le Conseil de l’Europe
et à tirer parti de son expérience pour la transition du pays vers
la démocratie (
Résolution
1791 (2011), paragraphe 13).
94. Six mois plus tard, en juin 2011, l’Assemblée a formulé une
série de propositions au Secrétaire Général du Conseil de l’Europe
(
Résolution 1819 (2011)), ainsi que des recommandations au Comité des Ministres (
Recommandation 1972 (2011)) visant à mobiliser des ressources du Conseil de l’Europe
pour offrir une assistance concrète et efficace à la mise en œuvre
des réformes démocratiques en Tunisie.
95. Je ne peux que me féliciter du fait que ces initiatives deviennent
aujourd’hui une réalité. En effet, dans le cadre des propositions
du Secrétaire Général Jagland relatives à la politique du Conseil
de l’Europe à l’égard de son voisinage immédiat, une série de plans
d’action sont élaborés pour donner forme à une coopération structurée
avec des pays voisins, dont la Tunisie.
96. Ce programme, intitulé «Priorités 2012-2014 pour la Tunisie
dans le cadre de la coopération avec le voisinage», a pour but d’accompagner
la transition démocratique en Tunisie et de l’aider à relever les
défis liés aux droits de l’homme, à l’Etat de droit et à la démocratie.
97. Les principaux objectifs de cette coopération visent:
97.1. à faire bénéficier la Tunisie
de l’expérience du Conseil de l’Europe dans l’instauration de la démocratie
par l’offre d’expertises, de bonnes pratiques, de formations, de
conseils, de parrainages et de stages;
97.2. à consolider la présence de la Tunisie dans les structures
du Conseil de l’Europe avec lesquelles elle a déjà établi une coopération
(Commission de Venise, Pharmacopée européenne, Réseau Med NET du
Groupe Pompidou), et à encourager sa participation à d’autres accords
partiels et mécanismes;
97.3. à rapprocher la législation tunisienne des normes du Conseil
de l’Europe, dans la perspective d’une éventuelle ratification de
certaines conventions ouvertes à des Etats non membres.
98. Les propositions contenues dans ce document sont le résultat
de consultations entre le Conseil de l’Europe et les autorités tunisiennes,
et répondent donc à leurs besoins concrets.
99. En ce qui concerne le volet droits de l’homme, le programme
prévoit des activités pour consolider l’égalité entre les femmes
et les hommes, prévenir et combattre la violence à l’égard des femmes
et des enfants, et promouvoir l’intégration des personnes handicapées
et les droits sociaux de la santé.
100. En matière d’Etat de droit, le programme vise l’accompagnement
de la réforme constitutionnelle, la réforme de la justice, la lutte
contre la corruption, le crime économique et la cybercriminalité.
101. Enfin, les projets dans le domaine de la démocratie prévoient
le soutien au processus électoral et à la réforme des institutions
politiques, et la promotion de la gouvernance démocratique.
102. Ce chapitre contient également un volet parlementaire dans
lequel l’Assemblée sera impliquée.
103. J’estime que nous devons donner notre appui à l’élaboration
et à la réalisation de cette coopération. Mais devons-nous nous
contenter de cela? A mon avis, l’Assemblée parlementaire devrait
trouver la forme appropriée pour se tenir informée de la mise en
œuvre de ce processus, et lui donner un appui politique si nécessaire.
4. Conclusions
104. Un an et demi après la «Révolution
de jasmin» qui a mis fin au régime autoritaire en Tunisie et a ouvert la
voie aux transformations démocratiques dans ce pays, la Tunisie
se trouve bien engagée sur la voie des réformes. Les Tunisiens jouissent
désormais des principales libertés démocratiques dont ils ont été
privés sous l’ancien régime. Cependant, la transition vers la démocratie
et la mise en place des conditions pour une vie digne – objectifs
qui ont inspiré la révolution tunisienne – prendront du temps à
être réalisées.
105. Les élections à l’Assemblée nationale constituante tenues
le 23 octobre 2011 ont conféré la légitimité démocratique au processus
de transition ouvert par la révolution en janvier 2011. L’ANC a
pour mission essentielle d’élaborer et d’adopter, dans un délai
raisonnable, la nouvelle Constitution tunisienne, et exerce également
des responsabilités législatives. Elle a procédé à l’élection du
Président de la République et a voté la confiance au nouveau gouvernement
provisoire de coalition.
106. Il convient de féliciter les Tunisiens d’avoir été les premiers,
parmi les peuples du Printemps arabe, à se doter d’institutions
certes provisoires, mais dont la légitimité est assise sur un processus
démocratique et généralement accepté.
107. La future Constitution, qui définira le système politique
et institutionnel pour les années à venir, devrait refléter au maximum
les attentes du plus grand nombre des Tunisiens et consacrer les
valeurs universelles en matière de respect des droits de l’homme
et des libertés fondamentales, de la démocratie et de l’Etat de
droit. Nous encourageons les élus de l’ANC et la société civile
à s’inspirer des expériences constitutionnelles européennes, et
à profiter de l’expertise et du conseil de la Commission de Venise
dont la Tunisie est membre à part entière.
108. Les résultats des élections d’octobre 2011, où le parti d’inspiration
islamiste modéré Ennahdha a obtenu le plus grand nombre de sièges
à l’ANC, pouvaient faire craindre l’islamisation du pays et la limitation
des libertés. Cependant, les Tunisiens ont appris à faire usage
des libertés politiques gagnées au cours la révolution et sont prêts
à les défendre contre toute tentative de restriction. La vie politique
est très dynamique dans le pays et les différentes forces politiques
et les mouvements populaires se regroupent et font entendre leur
voix.
109. Il faut saluer tout particulièrement le rôle actif de la société
civile tunisienne, qui est un atout important de la transition.
Nous l’encourageons à rester vigilante et positivement engagée dans
le processus de réformes.
110. Les nouvelles autorités transitoires tunisiennes restent confrontées
à plusieurs défis:
110.1. la situation
socio-économique reste extrêmement difficile en Tunisie et continue
à peser lourdement sur la stabilité politique. Réussir le redressement
économique, renverser la progression du chômage et redonner aux
jeunes l’espoir d’une vie digne sont des défis majeurs dont dépend
le succès de la transition politique;
110.2. la réforme profonde des secteurs de la justice et du maintien
de l’ordre public est une nécessité pour rétablir la confiance des
Tunisiens envers les magistrats et la police, pour rendre justice
aux victimes de l’ancien régime, pour vaincre l’insécurité et l’impunité,
et pour rétablir ainsi l’autorité de l’Etat;
110.3. des éléments radicaux se revendiquant de la mouvance islamique
salafiste cherchent à profiter à la fois de la liberté nouvellement
obtenue et d’une certaine instabilité de différentes autorités étatiques pour
imposer à la société tunisienne des choix en matière de religion
et des pratiques fondées sur leur interprétation de la doctrine
religieuse, qui peuvent porter atteinte aux libertés fondamentales.
111. Cependant, malgré ces défis, le processus de transition en
Tunisie est sur la bonne voie. Nous encourageons toutes les forces
politiques et civiles tunisiennes à continuer à contribuer positivement
à la transition démocratique dans le pays en veillant à préserver
la stabilité politique.