1. Introduction
1. Les horribles attentats perpétrés
successivement à Toulouse, Bruxelles, Paris et Copenhague nous montrent
que l'antisémitisme n'est pas seulement une menace historique ou
théorique. Il trouve son origine dans des préjugés anciens et malheureusement
tenaces, et conduit à des actes de violence.
2. Ces événements traumatisants ont touché des personnes de confession
juive et autre. Les attentats terroristes antisémites commis dans
un supermarché casher de Paris en janvier 2015 et au Musée juif
de Bruxelles en mai 2014 ont à juste titre bénéficié d’une forte
couverture médiatique. Ils ont déclenché une onde de choc en Europe
et nous ont appelés à réfléchir et à réagir. Cependant, ces attentats
ne sont pas des événements isolés: ils doivent être examinés dans
le contexte plus large d’une recrudescence des manifestations de
haine et d’intolérance en Europe.
3. Nous aurions espéré que les horreurs de d’Holocauste aient
mis un terme à l’antisémitisme. Or bien au contraire, les propos
antisémites, la présentation de théories du complot, la justification
voire l’apologie de l’Holocauste ne sont pas encore enrayés, mais
ils connaissent une recrudescence dans plusieurs pays européens
.
4. Les déclarations antisémites peuvent très facilement être
partagées et relayées dans les médias, y compris dans les médias
sociaux. Les incidents antisémites bénéficient d’une meilleure visibilité,
mais celle-ci ne se traduit pas nécessairement par une augmentation
du nombre de plaintes auprès de la police.
5. Les débats sur une montée ou non de l’antisémitisme ne doivent
pas nous faire oublier que la principale question a trait à la persistance
bien réelle de l’antisémitisme aujourd’hui. Les Etats membres du
Conseil de l’Europe ont pris diverses mesures en vue de prévenir
et combattre ce phénomène, mais il nous faut désormais analyser
leur efficacité et examiner toute difficulté rencontrée dans la
mise en œuvre de la législation contre la discrimination sur un
plan général.
6. Pour lutter efficacement contre l’antisémitisme, il convient
d’examiner les conditions préalables à la violence ainsi que ses
causes profondes et d’analyser les manifestations actuelles de préjugés
envers les juifs. Des discussions ont trait à ce que l’on entend
par nouvel antisémitisme versus vieil antisémitisme. Selon des études,
les vieux préjugés perdurent et les manifestations d’antisémitisme
ne sont aujourd’hui pas uniquement liées à l’antisionisme. La persistance
et la montée d’anciens préjugés, renforcées par l’instrumentalisation
de la rhétorique antisioniste, sont le ferment de la haine, de la
violence et de la discrimination.
7. L'Assemblée parlementaire constate depuis quelques années
une augmentation inquiétante du nombre de manifestations de racisme,
de xénophobie et d'intolérance en Europe. Dans ce contexte, l’Assemblée condamne
sans relâche l'antisémitisme, comme elle l’a fait dernièrement dans
sa
Résolution 2069 (2015) «Reconnaître et prévenir le néo-racisme», dans sa
Résolution 2011 (2014) «Faire barrage aux manifestations de néonazisme et d’extrémisme
de droite» et dans sa
Résolution
1967 (2014) sur une stratégie pour la prévention du racisme et de
l'intolérance en Europe.
8. La Commission européenne contre le racisme et l'intolérance
(ECRI) a adopté, le 25 juin 2004, sa Recommandation de politique
générale sur la lutte contre l’antisémitisme et assure le suivi
de sa mise en œuvre à l’occasion de ses visites de pays. Ce rapport
est pour nous l’occasion de réaffirmer le soutien de l’Assemblée
à ce texte et d’appeler à sa mise en œuvre au niveau national.
9. Des manifestations d’antisémitisme ont également été rapportées
dans des Etats observateurs du Conseil de l’Europe et des Etats
dont le parlement a le statut de partenaire pour la démocratie.
Cette question ne s’inscrit pas de façon formelle dans le cadre
du rapport mais j’estime qu’elle mérite une attention sérieuse, en
particulier dans le cadre d’un dialogue avec ces Etats.
2. Buts du rapport et méthodologie
10. La proposition à l'origine
de ce rapport renvoie à la
Résolution
1563 (2007) de l'Assemblée intitulée «Combattre l’antisémitisme
en Europe» dont elle demande une évaluation de la mise en œuvre.
J’ai par conséquent examiné les mesures adoptées par les Etats membres
et me suis efforcé de mettre en avant les bonnes pratiques visant
à prévenir et combattre l’antisémitisme. Mon travail a consisté
aussi, en partie, à formuler des recommandations sur la base de
cette évaluation et à analyser le contexte général de la recrudescence
de l'antisémitisme observée ces dernières années en Europe.
11. Dans le cadre de la préparation de mon rapport, j’ai adressé
un questionnaire aux parlements des Etats membres et observateurs
du Conseil de l’Europe par l’intermédiaire du Centre européen de
recherche et de documentation parlementaires (CERDP). J’ai reçu
les réponses de 31
parlements
d’Etats membres du Conseil de l’Europe et de deux
parlements
d’Etats observateurs. Je tiens à les remercier de leur coopération et
des informations communiquées.
12. Le premier Colloque annuel sur les droits fondamentaux dans
l’Union européenne, organisé à Bruxelles les 1er et
2 octobre 2015, avait pour thème «La tolérance et le respect: prévenir
et combattre l'antisémitisme et l'islamophobie en Europe». J’ai
étudié avec beaucoup d’intérêt les contributions au colloque et
suivi ses conclusions.
13. Le 2 décembre 2015 à Paris, la commission sur l'égalité et
la non-discrimination a tenu une audition avec la participation
de M. Henri Nickels, chef du secteur Egalité à l’Agence des droits
fondamentaux de l'Union européenne (FRA), de Mme Cristina
M. Fich, chef du département Tolérance et Non-discrimination au
Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme de
l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE/BIDDH),
et de M. Vincent Tiberj, professeur associé à l’Institut d’Etudes
politiques de Bordeaux. Le 26 janvier 2016, la commission a tenu
une audition sur le travail de l’ECRI relatif à la lutte contre le
discours de haine avec M. Mirosław Wyrzykowski, membre de l’ECRI
au titre de la Pologne, et M. Michael Whine, expert de la question
de l’antisémitisme et également membre de l’ECRI au titre du Royaume-Uni.
Je voudrais remercier les orateurs invités pour leur participation
à ces échanges avec les membres de la commission ainsi que pour
leurs précieuses contributions à la préparation du présent rapport.
3. Conditions
préalables à la violence et manifestations d'antisémitisme
3.1. Le
poids des préjugés
14. Afin de prévenir et combattre
la violence, nous devons lutter activement et avec détermination
contre les stéréotypes et les préjugés. Nous devons comprendre ce
qui peut nourrir les préjugés et pourquoi le discours de haine antisémite
touche un public aussi large et réfléchir à ces questions.
15. L’antisémitisme trouve souvent son fondement dans l’idée que
les juifs constituent l’élite et ont trop de pouvoir. Devant la
commission sur l’égalité et la non-discrimination, Vincent Tiberj
a indiqué qu’un tiers des Français interrogés dans le cadre d’une
enquête avaient le sentiment que les juifs ont trop de pouvoir. Soixante-quinze
pour cent des personnes interrogées estimaient par ailleurs que
les juifs ont «un rapport particulier à l’argent». Il a néanmoins
précisé que cette communauté est l’une des mieux acceptées en France (80 %
à 90 % des enquêtés ont répondu que les juifs sont «des Français
comme les autres»)
et
que les Français issus de l’immigration ne font pas montre d’un
antisémitisme plus marqué que les autres. Bien que je fasse ici
référence à une étude concernant la France, je tiens à souligner
que les stéréotypes liés au pouvoir économique, médiatique et politique
des personnes juives sont ancrés dans tous les Etats membres du Conseil
de l’Europe. Ce qu’il est convenu d’appeler «le vieil antisémitisme»
reste d’actualité et continue de se propager.
16. Lors de notre audition, Vincent Tiberj a par ailleurs indiqué
qu’une personne antisémite était également souvent islamophobe et
faisait montre de préjugés envers les femmes et les personnes lesbiennes,
gays, bisexuelles et transgenres (LGBT). D’après les enquêtes qu’il
a menées, les catholiques pratiquants sont légèrement plus antisémites
que le reste de la population. Il a de plus constaté que le nouvel
antisémitisme qui serait lié à l’Islam ne constitue qu’une part
infime de l’antisémitisme aujourd’hui.
17. Selon l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne
(FRA)
, les auteurs
d’actes antisémites associent souvent les actions de l’Etat d’Israël
aux communautés juives locales et les tiennent pour responsables.
Le nombre d’incidents enregistrés connaît un pic dès lorsque se
produisent des événements au Proche-Orient, ces derniers affectant
par ailleurs le sentiment de sécurité
.
L’antisémitisme est parfois aussi présenté comme un motif d’actions
violentes pour les jeunes de retour en Europe après être partis
en Irak et en Syrie.
18. L’antisémitisme trouve également son origine dans l’ignorance
de l’Holocauste et de l’importance du respect et de la protection
des droits humains et de la dignité humaine. L’ignorance nourrit
l’intolérance et peut conduire à la violence.
3.2. Sentiment
croissant d'insécurité
19. Les communautés juives manifestent
de plus en plus d'inquiétude et de crainte. Citons à titre d'exemple la
peur de se déclarer juif, ce qui change la vie de tous les jours.
Maurice Sosnowski, président du Comité de coordination des organisations
juives de Belgique, a dit à l'Alliance parlementaire contre la haine
que l'antisémitisme n'avait plus de limites et que la communauté
juive vivait dans la peur. Il a déploré le refus de l'Europe de
reconnaître la montée de l'antisémitisme
.
Des déclarations politiques rejetant fermement toute expression
d’antisémitisme sont indispensables pour rassurer les communautés
juives.
20. Les manifestations d’antisémitisme prennent diverses formes
allant de simples remarques faites dans la rue à des infractions
motivées par la haine. «Dans certains pays comme la France, la Belgique
et la Suède, il est devenu très difficile et angoissant d'être juif,
ce qui est un choc pour la communauté» a déclaré Jane Braden Golay,
ancienne présidente de l’Union européenne des étudiants juifs
. Lors
de certaines manifestations en France, on a pu entendre ou lire
sur des banderoles le slogan «Mort aux juifs»
.
Les attaques contre des synagogues, des cimetières et des œuvres
d'art troublent durablement la sérénité de la population. Ils ont
pour objectif de choquer et de déstabiliser la communauté juive
installée dans une municipalité donnée et au-delà. Les agressions
de personnes portant des symboles religieux ostensibles peuvent
faire craindre une identification fondée sur la religion. A la suite
de l’attaque à l’encontre d’un professeur juif à Marseille le 11
janvier 2016, une organisation juive a recommandé de ne pas porter
de kippa en public
. Je suis fermement
convaincu que personne ne devrait se sentir forcé de cacher son
identité religieuse et s’abstenir de porter des symboles religieux
visibles, à moins que cela ne soit prévu par la loi dans des conditions
particulières.
21. Après les attentats de Paris et l’attaque perpétrée à Toulouse
visant spécifiquement une école juive, les autorités françaises
ont décidé de protéger les synagogues ainsi que les établissements
scolaires et jardins d’enfants juifs en assurant une présence militaire.
Considérant que la menace d'autres attaques terroristes est réaliste,
la police militaire ou armée garde aujourd’hui également les écoles
juives à certains moments dans plusieurs autres Etats membres du
Conseil de l'Europe dont l'Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas
et le Royaume-Uni. Cette présence militaire modifie la manière dont
les enfants se perçoivent par rapport au reste de la population,
celle dont ils communiquent avec les autres et ce qu'ils ressentent
quand ils vont à l'école.
22. Les médias rendent régulièrement compte du départ de juifs
vers Israël et contribuent à la création et la propagation d’un
climat de peur au sein des communautés juives. Selon le ministère
israélien de l’Immigration, quelque 8 000 juifs ont décidé en 2015
de quitter la France pour s’installer en Israël, leur départ étant principalement
motivé par un sentiment d’insécurité
.
23. En Turquie, on observe une peur croissante des attentats antisémites
et une montée du discours antisémite, notamment dans les médias
sociaux
.
24. J’aimerais également mentionner la discrimination et les préjugés
silencieux. Le regard qu’un individu est susceptible de lancer à
un autre, les yeux qui se détournent en croisant un membre d’une
autre confession, la tête qui se tourne ou l’absence de réaction
face à des insultes ou à une agression sont autant d’actes silencieux
pouvant avoir une incidence et contribuer à un climat d’intolérance.
Nous devons prêter une attention accrue à l’indifférence envers
l’intolérance, qui peut conduire à la discrimination et encourager
la violence.
3.3. Données
disponibles sur l'antisémitisme
25. Ce rapport est l'occasion de
partager des informations sur les faits. Les actes antisémites font
la une des journaux, mais les données statistiques sur l'antisémitisme
sont à ce jour limitées. «Les comptes rendus d’incidents antisémites
reposent sur des données de types différents et s'appuient dans
une large mesure sur des témoignages subjectifs»
,
ce qui peut rendre la collecte de données délicate. Selon le dernier
rapport de la FRA sur les données disponibles sur l’antisémitisme
dans l’Union européenne, 20 Etats membres recueillent des données
sur les incidents antisémites
.
26. Le Bureau des institutions démocratiques et des droits de
l'homme de l’OSCE procède également à la collecte d’informations
sur les infractions motivées par la haine auprès des Etats participants
ou d’organisations internationales gouvernementales et d’organisations
non gouvernementales
. En 2014, neuf Etats
participants de l’OSCE ont rendu compte de crimes antisémites enregistrés
par la police (1 883 incidents ont été signalés, dont 321 actes
violents à l’encontre de personnes). Selon Cristina Finch, il est
difficile de tirer des conclusions quant aux tendances compte tenu
du manque de données et du défaut de signalement des incidents
. Si l’existence de
l’antisémitisme ne fait aucun doute, il est d’après elle impossible
de comparer les données d’un Etat à l’autre, voire même au sein
des Etats.
27. Les chiffres officiels ne reflètent pas la prévalence de l’antisémitisme
dans un Etat donné puisqu’ils reposent uniquement sur le nombre
d’incidents signalés aux autorités, dont la police. Les enquêtes
menées auprès de la population, comme celle réalisée par la FRA,
fournissent des informations essentielles et donnent une idée de
la perception de l’antisémitisme et du ressenti de la population
juive dans un pays donné. Vingt-trois pour cent des personnes interrogées
dans le cadre de l’enquête de la FRA ont répondu qu’elles estimaient avoir
fait l’objet de discrimination en raison de leur religion ou origine
ethnique dans l’année précédente (enquête effectuée en septembre
et octobre 2012). En outre, selon l’enquête, deux tiers des 5 847
personnes interrogées dans les huit pays choisis, considéraient
l'antisémitisme comme un problème et près de la moitié d'entre elles
craignaient d'être harcelées ou insultées dans un lieu public.
28. Les réponses au questionnaire communiquées par les parlements
ont fourni des renseignements sur les données recueillies par la
police et d’autres institutions
. Les pays ayant connu
des incidents antisémites ces dernières années ont constaté leur
augmentation sur un plan général. En Belgique, l’organe de promotion de
l’égalité a reçu 83 plaintes relatives à des incidents antisémites
commis en 2013 et 130 en 2014
. Cinquante-trois
incidents antisémites ont été rapportés à l’Organisation pour la
sécurité de la communauté juive du Danemark en 2014, et 40 en 2012.
En Allemagne, la police a recensé 1 596 «crimes à caractère antisémite»
contre 1 275 en 2013. En Pologne, selon les informations reçues,
207 incidents antisémites ont été enregistrés en 2014 et 93 en 2012.
En Espagne, trois incidents antisémites ont été signalés en 2013
et 24 en 2014. En Suède, la police a établi 267 rapports sur des
infractions au caractère antisémite identifié en 2014, et 161 en
2010. Au Canada, 165 infractions motivées par la haine ciblant des
populations juives ont été recensées en 2008 et 181 en 2013.
29. Toutefois, nous relevons une diminution dans certains Etats
membres, même si les chiffres restent très élevés. En France, le
Service de protection de la communauté juive (SPCJ) et le ministère
de l'Intérieur ont enregistré 806 actes antisémites en 2015, une
diminution de 14 % par rapport à 2014
. Au Royaume-Uni, l’organisation Community
Security Trust a enregistré 924 incidents antisémites en 2015, une
chute de 22 %
.
30. Aucun incident antisémite n’a été signalé entre 2007 et 2014
à Chypre, dans «l’ex-République yougoslave de Macédoine» et au Monténégro.
Ni la police ni aucune autre institution ne recueille de données sur
des incidents antisémites en Albanie, Estonie, Géorgie, Islande,
Lituanie, Serbie, République slovaque (les forces de police se contentant
d’un résumé des infractions pénales liées à l’extrémisme et à motivation
raciale), Slovénie et Turquie.
31. Ces chiffres doivent être considérés avec précaution en raison
du faible taux de signalement de la part des victimes et du manque
de confiance à l’égard des forces de l’ordre. D’après les résultats
de l’enquête susmentionnée de la FRA, 76 % des personnes ayant fait
l’expérience d’un harcèlement antisémite dans les cinq dernières
années n’ont pas signalé l’incident le plus grave à la police ou
à une autre organisation.
32. Pour prévenir le défaut de signalement, fréquent dans les
affaires d’antisémitisme, la confiance dans les autorités nationales
doit être renforcée. Il est donc important d’élaborer des programmes
et de dispenser une formation sur la lutte contre la discrimination,
par exemple sur le modèle des programmes de renforcement des capacités
du BIDDH pour les officiers de police et procureurs sur les crimes
de haine.
33. La collecte et la publication de données sont d’une importance
déterminante pour prévenir et combattre efficacement l'antisémitisme.
En comparant les données communiquées par les parlements nationaux,
les rapports de police et les renseignements fournis par les organisations
internationales, j’ai pris conscience qu’il convenait de redoubler
d’efforts pour améliorer la collecte et la coordination des données
sur les infractions motivées par la haine. Une fois les données
recueillies, la police devrait procéder à un classement des plaintes enregistrées
dans son système de collecte de données par motivations ethniques
et religieuses afin de pouvoir dresser un tableau précis du nombre
d’incidents antisémites. Le nombre de plaintes avec indication de
leur motif doit également être publié, ce qui contribuerait à sensibiliser
à ce phénomène. La coopération entre la police, le système judiciaire,
les éducateurs et les organisations de la société civile devrait
être encouragée pour soutenir les victimes et la collecte des données
et des activités de prévention devraient être mises en œuvre dans
la mesure du possible.
4. Evaluation
thématique de la mise en œuvre de la Résolution 1563 (2007)
34. Afin d'évaluer la mise en œuvre
de la
Résolution 1563
(2007), j’ai choisi de classer les 19 points de la résolution
en six groupes thématiques.
4.1. Législation
visant à lutter contre l'antisémitisme dans les Etats membres du
Conseil de l'Europe (points 12.1, 12.5 et 12.6)
35. L’antisémitisme, parmi d’autres,
peut s’inscrire dans la liste des motivations spécifiques du discours
de haine recensées dans la législation nationale. Il peut aussi
ne pas être expressément mentionné mais cependant érigé en infraction
en tant que discours de haine fondé sur des croyances religieuses.
Je suis d’avis qu’une législation générale et inclusive est préférable,
à condition d’en garantir l’application.
36. En règle générale, le Code pénal fait souvent du discours
de haine une infraction pénale en soi (par exemple en Allemagne,
en Autriche, au Danemark, en Espagne, dans «l’ex-République yougoslave
de Macédoine», en Lituanie, aux Pays-Bas, en Norvège, en Pologne,
au Royaume-Uni, en Fédération de Russie, en Serbie, en Slovénie
et en Suisse).
37. L’antisémitisme peut également être mentionné dans une loi
de lutte contre les discriminations (comme par exemple à Chypre,
en France et au Monténégro) ou clairement déclaré inconstitutionnel.
En particulier, en Slovénie, inciter à la discrimination nationale,
raciale, religieuse ou autre, et attiser la haine et l’intolérance nationales,
raciales, religieuses ou autres, sont contraires à la Constitution.
38. Les sanctions prévues varient d’un pays à l’autre et peuvent
aller d’une simple amende à plusieurs années de détention. Toute
incitation à la haine ou à la discorde fondée sur la race, l’origine
ethnique, la religion ou l’orientation sexuelle est passible de
deux à dix ans d’emprisonnement en Albanie. Des peines d’emprisonnement
ou l’imposition d’une amende sont également prévues en Islande,
en Norvège, aux Pays-Bas, en Pologne, au Royaume-Uni, en Serbie,
en République slovaque et en Suisse, entre autres.
39. En Finlande, tout discours menaçant ou insultant quelqu’un
au motif de sa race, de sa couleur de peau, de sa naissance, de
son originale nationale ou ethnique, de sa religion ou de ses convictions,
de son orientation sexuelle ou de son handicap est considéré comme
une «provocation ethnique» et sanctionné en tant que tel par une
amende ou une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à deux
ans. Le concept de «provocation raciale» est fondamental dans la
législation suédoise de lutte contre le racisme et la xénophobie. Il
est interdit de s’adonner à des propos menaçants ou méprisants envers
un groupe national, ethnique ou autre en y faisant allusion à la
race, la couleur ou la religion en dehors de la sphère strictement
privée. La sanction prévue est un emprisonnement d’une durée maximale
de deux ans.
40. Au Monténégro, une amende de € 500 à € 20 000 est infligée
à toute personne morale ayant tenu des propos haineux à l’encontre
d’un individu ou d’un groupe, fondés entre autres sur ses caractéristiques personnelles,
la xénophobie, l’antisémitisme ou la haine raciale. Quiconque incite
publiquement à la violence ou à la haine envers un groupe ou un
membre d’un groupe, pour des raisons, entre autres, de couleur de
peau ou de religion, est passible d’une peine de six mois à cinq
ans d’emprisonnement.
41. En Estonie, aucune loi n’érige le discours de haine en infraction
pénale, sauf lorsque ce discours comporte un danger pour la vie,
la santé ou les biens, ou entraîne la mort d’une personne.
42. Au niveau européen, la Cour européenne des droits de l'homme
exclut de la protection de la Convention européenne des droits de
l'homme (STE no 5, «la Convention») les
discours d’incitation à la haine sur la base de l'article 17 (interdiction
de l'abus de droit) ou établit des limitations à la protection (article
10) afin de protéger les droits et libertés d'autrui, entre autres
raisons. La Cour a statué clairement que l'article 10 de la Convention (liberté
d’expression) ne protège pas les auteurs de discours de haine antisémite
.
43. Dans sa
Résolution
1563 (2007), l’Assemblée appelait les gouvernements des Etats membres
à signer et à ratifier le Protocole no 12
à la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 177),
qui prévoit l’interdiction générale de la discrimination. Au 12
février 2016, 19 Etats membres avaient ratifié le protocole et 19
autres l’avaient signé mais non encore ratifié.
44. Lors de notre audition du 26 janvier 2016, Michael Whine,
membre de l'ECRI au titre du Royaume-Uni, a expliqué comment le
discours de haine a entraîné les horreurs de l'Holocauste. Il a
souligné que le discours de haine a sapé la primauté du droit et
la démocratie et indiqué qu’il importe d'avoir des outils législatifs
solides pour les combattre. Une recommandation essentielle consisterait
donc à s’assurer que le cadre législatif de lutte contre la discrimination,
quel qu’en soit le motif, et le discours de haine soit complet et
mis en œuvre de manière cohérente et persistante
. Comme l’exige la Recommandation
de politique générale de l’ECRI sur la lutte contre l'antisémitisme,
les Etats membres devraient veiller à ce que, dans la lutte contre
le racisme, le droit pénal prenne en compte un vaste éventail de
manifestations d’antisémitisme, dont entre autres choses l’incitation
publique à la violence, à la haine ou à la discrimination, les injures
publiques, les menaces, la dégradation ou la profanation de biens
ou de monuments juifs.
4.2. Condamnation
de l'antisémitisme et exercice de poursuites (points 12.2, 12.3,
12.4 et 12.19)
4.2.1. Condamnations
et poursuites engagées contre des personnalités publiques et des
partis politiques
45. Les poursuites engagées contre
des personnalités publiques et des partis politiques pour propos antisémites
sont des indicateurs patents de la fermeté de l’engagement d’un
Etat à lutter contre les discours de haine antisémites. Dans sa
Recommandation de politique générale sur la lutte contre l’antisémitisme, l’ECRI
recommande d’inclure dans la législation nationale l’obligation
de supprimer le financement public des organisations qui promeuvent
l’antisémitisme, y compris dans le cas de partis politiques et la
possibilité de dissoudre des organisations faisant la promotion
de l’antisémitisme. Dans sa
Résolution
1563 (2007), l’Assemblée appelle les gouvernements des Etats membres
du Conseil de l’Europe à poursuivre en justice tout parti politique
qui prône dans son action, ses manifestes ou ses publications des
thèses antisémites. A ce jour, peu de personnalités politiques ont
été condamnées pour avoir tenu des propos antisémites.
46. En France, Jean-Marie Le Pen, ancien président du Front National,
a été condamné à plusieurs reprises pour des propos minimisant l’importance
de la Shoah, qu’il a qualifiée de «détail de l’histoire». Je tiens
aussi à citer le cas de Dieudonné M’Bala M’Bala, acteur français,
condamné en mars 2015 à une amende de € 22 500 pour s’être livré
à des propos antisémites au cours de son spectacle. Il a depuis
aussi été condamné à une amende de € 10 000 pour avoir invité sur
scène le négationniste Robert Faurisson à recevoir «le prix de l’infréquentabilité»
des mains d’un acteur portant la tenue des juifs déportés dans les
camps de concentration. Le 10 novembre 2015, la Cour européenne
des droits de l’homme a statué que les garanties de la liberté d’expression
ne pouvaient s’appliquer au cas d’espèce, cette protection ne pouvant
être offerte pour des commentaires qui nient l’Holocauste
. La Cour a déclaré
que le spectacle avait perdu son caractère de divertissement pour
devenir un meeting politique prônant la remise en cause de l’Holocauste.
Dieudonné a également été condamné le 25 novembre 2015 à une peine
de deux mois d’emprisonnement assortie d’une amende de € 9 000 pour
antisémitisme, incitation à la haine et diffusion de propos haineux
ainsi que négationnistes, à l’occasion d’un spectacle qu’il a donné
à Herstal (Belgique), le 14 mars 2012.
47. En Lituanie, la Commission électorale centrale (CEC) a demandé
en 2012 au parquet général d’ouvrir une enquête sur le matériel
de campagne du parti de l’Union nationaliste lituanienne (qui contenait
une caricature de juif et un texte évoquant la décision du gouvernement
d’indemniser la communauté juive pour les expropriations subies).
Avant les élections locales de 2015, la CEC a redemandé aux procureurs
d’enquêter sur d’éventuels contenus antisémites dans le tract de
l’alliance électorale «Contre la corruption». Selon les informations
reçues, ces affaires sont restées sans suites.
48. La Constitution polonaise interdit clairement les partis politiques
et autres organisations qui font la promotion de la haine raciale
ou nationale (article 13). Au Royaume-Uni, un parlementaire, George
Galloway, a été interrogé par la police en août 2014 après avoir
déclaré sa circonscription «Israel-free zone» (zone sans Israël).
Il n’a pas été poursuivi.
4.2.2. Négation,
justification ou apologie publiques de crimes de génocide et de
crimes contre l’humanité
49. L’antisémitisme peut s’exprimer
par la négation, la justification ou l’apologie publiques de crimes
de génocide et de crimes contre l’humanité. La minimisation grossière
d’un crime de génocide est probablement l’une des questions les
plus délicates dans la mesure où elle suscite un débat sur les limitations
de la liberté d’expression.
50. La Cour européenne des droits de l’homme a explicitement indiqué
que la négation ou la révision «de faits historiques clairement
établis – tel que l'Holocauste – (…) se verrait soustraite par l'article
17 (interdiction de l’abus de droit) à la protection de l'article
10 (liberté d’expression) de la CEDH»
. Je voudrais également évoquer
la décision
Garaudy c. France . Déclarant la requête
irrecevable, la Cour a précisé que «la contestation de crimes contre
l'humanité apparaît comme l'une des formes les plus aiguës de diffamation raciale
envers les juifs et d'incitation à la haine à leur égard. La négation
ou la révision de faits historiques de ce type remettent en cause
les valeurs qui fondent la lutte contre le racisme et l'antisémitisme
et sont de nature à troubler gravement l'ordre public».
51. Dans sa
Résolution
1563 (2007), l’Assemblée a appelé les Etats membres à ériger en
infractions pénales la négation, la minimisation grossière, la justification
ou l’apologie publiques, dans un but raciste, de crimes de génocide,
de crimes contre l’humanité ou de crimes de guerre. De nombreux
Etats européens ont d’ores et déjà pris des mesures en ce sens.
En France, ces infractions sont sanctionnées d’un an d’emprisonnement
et d’une amende de € 45 000. En Lettonie, la glorification, la négation,
l’acquittement ou la minimisation grossière d’un génocide sont sanctionnés
d’une peine pouvant atteindre cinq ans d’emprisonnement, de travaux
d’intérêt général ou d’une amende. L’invitation publique au génocide
est punie d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à huit
ans.
52. En Croatie, une peine d’emprisonnement maximale de trois ans
est prévue. En Pologne, quiconque incite à commettre un acte visant
à détruire en tout ou en partie un groupe ethnique, racial, politique
ou religieux, ou un groupe ayant une vision différente de la vie,
ou fait publiquement l’éloge de la commission d'un tel acte est
passible d’une peine de privation de liberté de trois mois à cinq
ans. En Roumanie, la négation, la contestation, l’approbation, la
justification ou la minimisation évidente en public, de l’Holocauste
ou de ses conséquences, sont punies de six mois à trois ans d’emprisonnement
ou d’une amende.
53. En Slovénie, quiconque répand publiquement l’idée de la suprématie
d’une race sur une autre, soutient d’une manière ou d’une autre
une activité raciste, ou nie, approuve, ignore ou encourage le génocide, l’Holocauste,
les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre, les agressions
ou autres infractions pénales contre l’humanité, en diminue l’importance
ou les tourne en dérision, sera condamné à une peine d’emprisonnement
pouvant atteindre deux ans. En Suisse, la négation, la justification
et l’éloge publics de crimes de génocide et de crimes contre l’humanité
constituent une infraction pénale et sont criminalisés. Toute personne
niant, minimisant ou cherchant à justifier un génocide ou autres
crimes contre l’humanité est passible d’une peine d’emprisonnement
n’excédant pas trois ans, ou d’une sanction pécuniaire. Au Canada,
la défense ou la promotion du génocide est une infraction passible
d’un emprisonnement pouvant aller jusqu’à cinq ans. En Israël, une
loi érigeant la négation de l’Holocauste en infraction pénale a
été adoptée par la Knesset le 8 juillet 1986.
54. Aux Pays-Bas, un projet de loi érigeant en infraction la négation
publique d’un génocide a été rédigé en 2006, mais demeure en instance.
Au Danemark, ceci ne constitue pas une infraction pénale en soi
mais peut être considéré comme tel si les exigences de l’article
266b du Code pénal sont satisfaites. En Norvège, cet acte n’est
pas davantage une infraction pénale en soi mais peut être punissable
s’il constitue une incitation publique à commettre une infraction
pénale. De tels propos peuvent également constituer un discours
de haine du point de vue pénal.
55. La négation, la justification ou l’apologie publiques de crimes
de génocide et de crimes contre l’humanité ne sont pas constitutives
d’infractions pénales en Estonie et en Suède. Elles ne constituent
pas non plus une infraction pénale au Royaume-Uni, mais dans plusieurs
cas elles ont été poursuivies avec succès lorsqu’elles constituaient
une incitation à la haine raciale.
56. Afin d'envoyer un signal fort aux auteurs potentiels et d’empêcher
une escalade de discours violent de haine antisémite, je crois que
la négation, la justification ou l'éloge publics de crimes de génocide
et crimes contre l'humanité doivent être érigés en infraction pénale
si tel n’est pas déjà le cas.
4.2.3. Les
motivations antisémites comme facteur aggravant dans les affaires
pénales
57. Les motivations antisémites
peuvent constituer un facteur aggravant dans les affaires pénales.
Si l’antisémitisme n’est pas expressément mentionné en tant que
motivation pouvant être considérée comme une circonstance aggravante,
il peut relever de la discrimination fondée sur la religion. En
France par exemple, les motivations antisémites, racistes ou religieuses
constituent un facteur aggravant. C’est également le cas en Suisse.
58. Les motivations raciales et/ou xénophobes sont considérées
comme un facteur aggravant sur le plan pénal à Chypre, en Croatie,
en Grèce, en Lituanie et en Norvège.
59. Si l’infraction est commise pour un motif lié à la race, à
l’origine nationale ou ethnique, à la religion ou aux convictions,
la Finlande, la Lettonie, la Suède et le Royaume-Uni retiennent
la notion de facteur aggravant. Aux Pays-Bas, lorsqu’une personne
est poursuivie pour une infraction également liée à une discrimination,
le ministère public considère l’aspect discriminatoire comme un
facteur aggravant.
60. Cependant, les motivations antisémites ne constituent pas
un facteur aggravant en Albanie et en Estonie.
61. Avec ce rapport, je voudrais également appeler les Etats membres
qui ne l'ont pas encore fait à faire de la motivation fondée sur
la race, l'origine nationale ou ethnique, la religion ou la conviction
une circonstance aggravante d'une infraction pénale.
4.3. Mesures
préventives et protection (points 12.8, 12.9, 12.10, 12.11 et 12.12)
62. Depuis 2007, les Etats membres
du Conseil de l’Europe ont mis en œuvre différentes mesures préventives
et des campagnes de sensibilisation pour lutter contre l’antisémitisme.
Au Danemark, la municipalité de Copenhague a lancé diverses campagnes
de sensibilisation dont une, intitulée «stemplet» (stigmatisé),
portait sur la lutte contre le crime de haine et la discrimination
et s’est traduite par la création d’une application pour smartphone
encourageant les citoyens à signaler des incidents de discrimination.
En 2009, la ville de Copenhague a lancé une autre campagne appelée
«L’antisémitisme et l’islamophobie – pas dans notre ville».
63. En 2008, l'Union des communautés religieuses juives en Pologne
a lancé la campagne «Je suis Polonais», proposant des affiches montrant
des jeunes souriant et représentant des minorités nationales et ethniques.
J’ai également reçu des informations concernant les initiatives
de l'Institut Polonais du Cinéma qui soutient des œuvres cinématographiques
sur l'histoire juive polonaise, menant à des débats publics sur
la diversité, l'assimilation et l'antisémitisme. L'organisation
«Hejt Stop» recueille des informations sur les manifestations du
discours antisémite, à la fois sur internet et dans l'espace public
(arrêts de bus, écoles, lieux de culte, etc.) et essaye de les effacer
avec ses bénévoles.
64. En Lituanie, le Seimas a fait de 2011 l’année dédiée à la
mémoire des victimes de l’Holocauste et a adopté une loi sur une
indemnisation «de bonne foi» pour les biens immeubles confisqués
aux communautés religieuses juives. Des événements commémoratifs
ont été organisés par les municipalités, les organismes d’Etat et
les ministères. La communauté juive lituanienne a mené entre janvier
2014 et juin 2015 une campagne intitulée «Boutique de bagels: une
campagne pour la tolérance et contre l’antisémitisme et la haine publique»,
consistant notamment à surveiller les manifestations de haine et
d’intolérance dans l’espace public et comportant une campagne publique
appelée «Être différent».
65. Le 25 juin 2015, la Commission fédérale suisse contre le racisme
(CFR) a lancé sa campagne nationale intitulée «Une Suisse à nos
couleurs» dans l’objectif de sensibiliser les jeunes à la nécessité
de combattre la discrimination raciale et le discours de haine.
66. L’Association suédoise des collectivités locales et des régions
a constitué un réseau de municipalités partageant les meilleures
pratiques en matière de lutte contre les crimes de haine. Le Forum
de l’histoire vivante a été créé en Suède en 2003 dans le but d’encourager
les citoyens à aspirer à une société égalitaire en concevant des
matériels pédagogiques, en menant des enquêtes sur les mentalités
au sein de la société et en organisant des expositions. Il est encore
très actif aujourd’hui et utilise l’Holocauste et d’autres crimes contre
l’humanité comme point de départ. Le 27 janvier, journée commémorant
la libération du camp de concentration d’Auschwitz, a le statut
de journée nationale du souvenir.
67. Je me félicite de l’établissement d’une Journée de commémoration
de l’Holocauste par, à ce jour, 43 Etats membres du Conseil de l’Europe.
68. L’encouragement au dialogue entre les responsables religieux
et les communautés religieuses est l’un des aspects clés de la prévention
de l’antisémitisme. Au Royaume-Uni, le Community Security Trust
et l’organisation musulmane Tell MAMA coopèrent pour faire le suivi
de la commission d’infractions motivées par la haine. Je tiens également
à souligner le travail de Nisa-Nashim qui rassemble des femmes juives
et musulmanes afin de développer des compétences de leadership,
le Forum musulman juif du Grand Manchester qui regroupe les dirigeants
juifs et musulmans et le Forum des trois confessions qui développe des
compétences de leadership chez les jeunes juifs, musulmans et chrétiens.
Aux Pays-Bas, le Centrum Informatie en Documentatie Israël (CIDI)
assiste le Stichting Platform Islamitische Organisaties Rijnmond (SPIOR)
pour surveiller la haine anti-musulmane. De telles initiatives méritent
d’être encouragées davantage.
69. Je tiens à souligner qu’aucun changement tangible ne pourra
intervenir en l’absence de mesures spécifiques destinées aux jeunes.
Il convient d’inscrire au rang des priorités l’investissement dans
l’éducation et la sensibilisation de la population. Les échanges
entre enfants et jeunes de diverses confessions devraient être encouragés
davantage par le biais d’activités, de programmes culturels et d’événements
sportifs communs.
4.4. Enseignement
de l'histoire et lutte contre l'antisémitisme (points 12.7 et 12.15)
70. Malheureusement, il n’est pas
rare de voir les élèves et les étudiants faire preuve d’indifférence
et afficher un certain désintérêt pour la mémoire de l’Holocauste
ainsi qu’un manque de respect lors de cérémonies commémoratives.
L’ignorance de ces événements historiques tragiques est un terreau
fertile pour l’antisémitisme
71. L’enseignement de l’histoire est un élément déterminant de
la lutte contre l’antisémitisme. Comme l’a souligné Henri Nickels
lors de notre audition, l’enseignement et la mémoire de l’Holocauste,
qui peuvent s’inscrire dans le cadre de l’éducation formelle et
non formelle, ne devraient pas être dissociés de la lutte contre l’antisémitisme.
Il a précisé que bon nombre des auteurs de discours antisémites
ne savaient pas grand-chose de l’Holocauste. L’éducation et les
relations entre communautés sont par conséquent essentielles pour
établir des sociétés tolérantes. La prévention et le combat de l’antisémitisme
à l’école ne se limitent pas à l’enseignement de l’histoire. Ils
supposent également de lutter contre le harcèlement, d’enseigner
la diversité, de mettre en œuvre des activités visant à briser les
stéréotypes et de présenter des récits positifs dans les programmes
éducatifs. Michael Whine, membre de l'ECRI au titre du Royaume-Uni,
a réitéré lors de notre audition qu’il importe de garder vivante
la connaissance du passé en commémorant l'Holocauste et en organisant
des programmes de sensibilisation et de compréhension sur la question.
72. Dans la plupart des Etats membres du Conseil de l’Europe,
l’enseignement de l’Holocauste est un chapitre obligatoire des programmes
scolaires. A titre d’exemple, en Lituanie, l’Holocauste est enseigné
de manière formelle et informelle (dissertations, collecte de documents,
visites et entretien de cimetières et de mémoriaux juifs). Quelque
96 «centres de développement de la tolérance» ont été créés au sein d’établissements
d’enseignement secondaire, de musées régionaux et de centres éducatifs.
73. En 2014, dans le cadre de la Journée internationale dédiée
à la mémoire des victimes de l’Holocauste, des classes virtuelles
ont été organisées par «Citoyenneté et Immigration Canada» et par
l’Office national du film du Canada, dans le but de présenter de
nouvelles approches de l’enseignement de l’Holocauste. Cette journée
a été l’occasion de discuter des enseignements à tirer en matière
de protection des droits humains et des valeurs démocratiques et
de prévention du racisme et du génocide.
74. Le Conseil de l’Europe et d’autres organisations internationales
ont produit du matériel pédagogique consacré à la mémoire de l’Holocauste.
Je tiens à souligner en particulier le manuel pour les enseignants, intitulé
«Excursion vers le passé – leçons pour l’avenir» et publié par la
FRA, qui donne des outils permettant aux enseignants de rattacher
l’Holocauste à l’éducation aux droits humains et leur fournit des
conseils quant à l’organisation de visites de sites se rapportant
à l’Holocauste.
75. Je suis convaincu que le souvenir de l'Holocauste devrait
être rattaché à la lutte contre l’antisémitisme. C’est pourquoi,
les programmes éducatifs devraient mettre en avant le lien entre
les manifestations actuelles de haine et d’intolérance et l’Holocauste.
Il devrait être demandé aux auteurs d’actes antisémites de participer aux
programmes éducatifs sur l’Holocauste et d’assister aux débats.
4.5. Rôle
des médias (points 12.13 et 12.14)
76. Les médias jouent un rôle déterminant
dans la lutte contre l’antisémitisme dans la mesure où ils endossent
une responsabilité spécifique en matière de promotion et de présentation
d’une culture de la diversité. Les médias peuvent, par exemple,
contribuer au renforcement de la visibilité des responsables religieux
qui arborent des symboles religieux visibles. La manière dont les
médias rendent compte du conflit au Proche-Orient peut influencer
considérablement l’opinion publique. Les médias peuvent aussi, selon
moi, jouer un rôle éducatif susceptible de contribuer à développer
le respect et la compréhension ou au contraire attiser les tensions
par des articles tendancieux.
77. Depuis 2007, les Etats membres ont procédé à certaines modifications
des réglementations des médias, élargissant essentiellement leur
champ d’application à internet. La
Résolution 1563 (2007) appelait les Etats membres «à se doter d’instruments
permettant de réprimer les déclarations antisémites sur internet
et donc à signer et à ratifier le Protocole additionnel à la Convention
sur la cybercriminalité, relatif à l’incrimination d’actes de nature
raciste et xénophobe commis par le biais de systèmes informatiques
(STE no 189)». Au 12 février 2016, 24
Etats membres du Conseil de l’Europe l’avaient ratifié.
78. En Croatie, la loi relative aux médias électroniques de 2009
interdit la promotion et la propagation de discours de haine ou
de discrimination, notamment fondés sur la religion, l’antisémitisme
et la xénophobie. Au Monténégro et en Serbie notamment, la législation
sur les médias interdit les discours de haine.
79. En Finlande, le directeur de Magneetti Media a été poursuivi
et condamné pour avoir publié des déclarations antisémites dans
un journal gratuit en 2013. En Islande, un rédacteur ou directeur
d’un fournisseur de services de médias peut se voir infliger une
amende ou être condamné à une peine pouvant aller jusqu’à six mois
d’emprisonnement si son organe de média incite directement à la
haine pour des motifs de race, de nationalité ou de convictions
religieuses (loi sur les médias de 2011).
80. Dans la plupart des Etats membres, les associations et conseils
de presse ont adopté des lignes directrices ou des codes d’éthique
professionnelle à l’usage des journalistes qui interdisent clairement
le discours de haine et la discrimination pour quelque motif que
ce soit (Autriche, Danemark, Grèce, Lituanie, Norvège, Royaume-Uni
et Suisse, pour ne citer qu’eux).
81. Les discours de haine antisémite en ligne se sont multipliés
au cours des dernières années. Des actions spécifiques doivent être
menées avec les fournisseurs de services internet et les médias
sociaux et cibler expressément cette forme de discours de haine.
Des activités de sensibilisation pourraient également être mises
en œuvre avec ces entreprises. En particulier, dans son récent arrêt
Delfi c. Estonie , la Cour européenne des
droits de l’homme a retenu, dans certaines circonstances, que la
société détenant un portail internet pouvait être tenue responsable
de contenus publiés par les internautes.
4.6. Coopération
avec l’ECRI et les organisations de la société civile (points 12.16,
12.17 et 12.18)
82. Dans sa
Résolution 1563 (2007), l’Assemblée appelle les Etats membres à alerter, par
le biais de l’ECRI, les autorités publiques sur les actes antisémites,
à soutenir les travaux de l’ECRI et à donner une suite concrète
à ses recommandations. Je tiens également à réaffirmer le rôle crucial
joué par l’ECRI dans la prévention de l’antisémitisme et la lutte
contre ce fléau et à saluer sa coopération de longue date avec l’Assemblée.
83. La campagne du Conseil de l’Europe «Mouvement contre le discours
de haine» sera poursuivie jusqu’en 2017, avec entre autres priorités
la lutte contre l’antisémitisme. J’appelle les parlementaires à
coopérer avec cette campagne et à organiser si possible des événements
communs au sein de leurs parlements, avec le soutien de l’Alliance
parlementaire contre la haine.
84. Nous ne pouvons pas combattre efficacement l’antisémitisme
sans soutenir les organisations de la société civile œuvrant à la
sensibilisation, à la prévention, à l’aide aux victimes et à la
collecte de données, et leur assurer notre coopération. A titre
d’exemple, le Community Security Trust au Royaume-Uni a conclu un accord
avec la police sur le partage des données relatives aux infractions
motivées par la haine.
85. Plusieurs initiatives intéressantes ont été lancées par des
organisations de la société civile au cours des dernières années.
Je mentionnerai à cet égard la campagne européenne «Facing Facts!»,
qui promeut la prévention des infractions motivées par la haine
et propose aux organisations de la société civile des formations
sur les systèmes de suivi des crimes de haine. La Conférence musulmano-juive
annuelle est une autre initiative remarquable qui réunit des étudiants
et de jeunes professionnels musulmans et juifs du monde entier et
les invite à échanger et dialoguer. Le développement de réseaux
et le partage d’expériences peuvent contribuer à prévenir la haine
et les stéréotypes négatifs.
5. Rôle
des parlementaires dans la lutte contre l'antisémitisme
86. Je suis convaincu que les parlementaires
peuvent jouer un rôle important dans la lutte contre l'intolérance
et la haine. Ils peuvent sensibiliser à l’existence et à la nature
de l’antisémitisme et discuter avec leurs électeurs. En condamnant
publiquement les manifestations d’antisémitisme et en intervenant
dans les médias, ils sont en mesure de contribuer à l'évolution
des mentalités. Les parlementaires peuvent par ailleurs initier
des campagnes de sensibilisation et donner l'exemple. Ils appellent
au dialogue interculturel et l’encouragent, tiennent des auditions
et promeuvent le respect et la compréhension mutuels. Selon Vincent Tiberj,
«les hommes politiques portent une lourde responsabilité dans la
persistance des préjugés au sein de la société»
. Michael Whine a
également souligné que les «parlementaires peuvent apporter une
contribution importante à la lutte contre le discours de haine»
.
87. C’est en leur qualité de législateurs que les parlementaires
peuvent avoir le maximum d’impact, en veillant à l’exhaustivité
du cadre législatif national de prévention de la discrimination
et de lutte contre cette dernière. Il appartient aux parlementaires
de veiller à la prise en compte des crimes à caractère antisémite dans
la législation sur les infractions motivées par la haine et au suivi
de sa mise en œuvre.
88. Plusieurs initiatives ont été lancées au niveau international
par des parlementaires, témoignant de leur détermination à combattre
la discrimination et la haine. L'Alliance parlementaire contre la
haine a tenu une audition sur la lutte contre l'antisémitisme en
Europe lors de sa réunion de lancement, organisée le 29 janvier 2015
à Strasbourg, et elle continuera à se pencher sur cette question.
En signant la Charte des engagements, les membres de l’Alliance
conviennent de prendre position ouvertement, fermement et de manière
proactive contre le racisme, la haine et l’intolérance, quels qu’en
soient les motifs. La lutte contre l’antisémitisme est également
l’une des priorités de l’Alliance pour 2016-2017. J’encourage les
membres de l’Assemblée parlementaire à se joindre à l’Alliance.
Les responsables politiques se doivent de rejeter toute déclaration antisémite
ou xénophobe.
89. L'intergroupe Antiracisme et Diversité du Parlement européen
se consacrera également à la lutte contre l’antisémitisme en 2016.
Ces deux structures sont des forums à l’échelon européen, permettant
d’examiner les actions à entreprendre pour combattre l’antisémitisme.
90. La Coalition interparlementaire de lutte contre l'antisémitisme
a été fondée en 2008. Elle réunit 700 parlementaires de plus de
60 pays, déterminés à combattre l’antisémitisme. Le principal objectif
de la coalition est de permettre le partage d’expériences et de
bonnes pratiques et de soutenir la création de groupes multipartites
au sein des parlements. Selon la coalition, «les parlementaires
et ministres occupent une position unique pour lutter contre l’antisémitisme.
Il est de leur responsabilité de le combattre, de veiller à la mise
en place de la législation pertinente et de son utilisation à bon
escient, à la formation adéquate de l’ensemble des services, afin
de donner aux communautés affectées le sentiment d’être soutenues
et l’assurance de la prise en considération de leurs craintes»
.
91. Il convient également de noter plusieurs initiatives parlementaires
intéressantes en matière de lutte contre l’antisémitisme à l’échelon
national. Une coalition parlementaire canadienne ayant pour but
de lutter contre l’antisémitisme s’est constituée entre 2009 et
2011 afin d’apprécier l’étendue du problème et de formuler des recommandations
concrètes. Cette coalition s’est organisée sous la forme d’un groupe
parlementaire multipartite indépendant. Le Sénat espagnol observe
la journée officielle de commémoration de l’Holocauste depuis 2006.
Le Parlement autrichien accueille chaque année la célébration d’une
journée de commémoration contre la violence et le racisme en mémoire
des victimes du national-socialisme. Il organise de même des activités
éducatives centrées sur la lutte contre les crimes de haine. Le
11 juin 2015, le Parlement norvégien a adopté à l’unanimité une
résolution demandant au gouvernement de proposer pour combattre l’antisémitisme
un plan d’action axé sur la formation des enseignants, la modification
des programmes des écoles primaires et des établissements d’enseignement
secondaire, et l’observation dans toutes les écoles de la journée
annuelle de commémoration de l’Holocauste.
92. Au Royaume-Uni, le groupe parlementaire multipartite contre
l’antisémitisme a commandé une enquête parlementaire multipartite
sur l’antisémitisme, publiée en février 2015. Dans sa réponse, le
gouvernement a réaffirmé sa détermination à combattre l’antisémitisme
et annoncé qu’il prendra des mesures pour améliorer le signalement
des crimes à caractère antisémite et autres infractions motivées
par la haine. Il a par ailleurs mis en place un groupe de travail
interministériel sur l’antisémitisme.
93. Je souhaite encourager de telles initiatives dans tous les
parlements des Etats membres et observateurs du Conseil de l’Europe.
L’engagement de chaque parlementaire dans la lutte contre l’antisémitisme
peut contribuer à changer les choses. Nous devons reconnaître notre
responsabilité politique et agir en conséquence. Rester silencieux
face à l’antisémitisme par craindre de perdre des électeurs peut
s’avérer dangereux. Nous devons prendre conscience de la dimension
de plus en plus multiculturelle de l’Europe qui ne saurait tolérer
des manifestations de haine. Il nous appartient de combattre l’actuel
climat d’intolérance et de faire preuve de leadership politique
en faveur de la promotion et de la protection des droits humains.
6. Conclusions
94. La plupart des Etats membres
ont pris des mesures pertinentes pour combattre l’antisémitisme
et la discrimination depuis l'adoption de la
Résolution 1563 (2007) sur la lutte contre l'antisémitisme en Europe. Mais
à la lumière de la montée de l'intolérance, de la xénophobie et
de l'antisémitisme en Europe, nous devons faire preuve d’une vigilance
accrue et redoubler d’efforts pour répondre aux nouveaux défis.
95. Les gouvernements et les parlements devraient considérer la
lutte contre l’antisémitisme comme une priorité et une responsabilité.
Des plans d’action destinés à prévenir et combattre le racisme,
l’antisémitisme et l’islamophobie devraient être adoptés si ce n’est
déjà fait, et inclure des mesures de sensibilisation à la lutte contre
les stéréotypes négatifs. Je me félicite de la désignation d’une
coordinatrice de l’Union européenne pour la lutte contre l’antisémitisme
et j’attends avec intérêt les actions qu’elle entreprendra au niveau
de l’Union européenne. J’encourage également les parlements à organiser
des événements de sensibilisation à la nécessité de lutter contre
l’antisémitisme au niveau national, avec le soutien de l’Alliance
parlementaire contre la haine, et je les appelle à réagir aux déclarations
et incidents antisémites et à donner l’exemple.
96. Les actions futures devraient viser spécifiquement à renforcer
le cadre législatif afin de prévenir et combattre l'antisémitisme
et redoubler d’efforts pour lutter contre le discours de haine.
Je recommande également de poursuivre les programmes de commémoration
de l'Holocauste et d’investir dans la jeunesse comme moyen le plus
efficace de prévenir les manifestations futures de lutte contre
l'antisémitisme.
97. Si la sécurité de tous les citoyens, y compris les citoyens
juifs, est une priorité, une présence militaire à long terme pour
protéger les lieux de culte n’est pas une solution viable, car elle
contribue également à renforcer un climat de peur. J’encourage les
gouvernements et les parlements à réfléchir aux causes profondes
de l’antisémitisme et de ses violentes manifestions et à en débattre.
98. L'antisémitisme ne revient pas à rétablir la justice pour
les actes répréhensibles, prétendus ou avérés, de l’Etat d’Israël.
Il doit être possible de critiquer les politiques d’Israël sans
être targué d’antisémitisme. Je suis conscient que ce sujet peut
facilement être instrumentalisé et j’espère que l’Assemblée engagera
le dialogue sur cette question avec la délégation d’observateurs
de la Knesset auprès de l’Assemblée parlementaire. Il est cependant
inacceptable que la critique à l’égard d’un Etat soit utilisée afin
d’alimenter des sentiments et une propagande antisémite. Cette question
devrait être soulevée dans le cadre d’un dialogue entre l’Assemblée
et ses partenaires pour la démocratie, y compris le Conseil national
palestinien.
99. L’antisémitisme n’est pas un phénomène isolé et il devrait
également être examiné concomitamment à d’autres formes de haine.
L’Europe est de plus en plus diverse et les interactions entre personnes
de religions différentes pourraient contribuer à réduire les préjugés
et la discrimination. Des campagnes de sensibilisation à la diversité
et au vivre ensemble sont nécessaires partout en Europe. Je compte
à cette fin sur la coopération de l’Alliance parlementaire contre
la haine et sur la campagne «Mouvement contre le discours de haine».
100. La lutte contre l’antisémitisme et la prévention de ce phénomène
sont des questions liées aux droits humains, qui sont au cœur des
valeurs fondamentales du Conseil de l’Europe. Ce combat est important
non pas parce que les juifs méritent plus de protection que les
autres, mais car, dans le passé, l’antisémitisme a montré comment
les préjugés et l’intolérance pouvaient au fil du temps évoluer
en harcèlement et discrimination systématiques, et conduire au final
au génocide et au massacre de personnes au nom de leurs identité
ou origine juive. L’Europe a besoin que sa communauté juive se sente
en sécurité et chez elle.