1. Introduction
1. Selon les estimations, il y
aurait aujourd’hui près de 11 millions de Roms et de Gens du voyage

(soit
à peu près l’équivalent de la population de la Belgique, du Portugal
ou de la Grèce) vivant en Europe

. En moyenne, ils sont touchés de
manière disproportionnée par la pauvreté. L’espérance de vie au
sein de ces communautés est de 10 à 15 ans inférieure à celle du
reste de la population

.
Mauvaises conditions de vie, accès insuffisant aux soins de santé,
revenus faibles, chômage élevé, discrimination dans l’accès à l’éducation:
telle est la réalité quotidienne de nombreux Roms et Gens du voyage.
Les préjugés, les propos haineux et la défiance qui existent entre
ces groupes, la population en général et les pouvoirs publics viennent aggraver
la situation et la rendent plus difficile à surmonter.
2. Relayer constamment cette image d’exclusion sociale constitue
néanmoins une arme à double tranchant. Il est certes indispensable
de comprendre les violations des droits de l’homme qui touchent
de nombreux Roms et Gens du voyage si l’on veut élaborer des politiques
efficaces pour y mettre fin, mais il ne faut pas oublier que derrière
les moyennes statistiques se cachent des réalités multiples. Par
ailleurs, l’image d’une situation défavorisée sur le plan socio-économique
alimente les stéréotypes et les préjugés; si la pauvreté est la
seule réalité de la vie des Roms et des Gens du voyage perçue par
les autres, il se crée alors un terreau favorable au développement
du mythe profondément préjudiciable selon lequel les Roms seraient en
quelque sorte intrinsèquement inférieurs, «inadaptables», ou enclins
à ce qu’on appelle une «migration de la pauvreté».
3. Bon nombre d’éléments permettent de montrer que l’exclusion
sociale n’est pas une fatalité pour les Roms et les Gens du voyage.
Beaucoup d’entre eux, hommes et femmes, travaillent déjà en tant qu’universitaires,
enseignants, médecins, infirmiers, avocats, ingénieurs, journalistes,
ainsi que dans le milieu politique, artistique ou sportif, ou sont
des acteurs de la société civile. Au cours de ma visite en Hongrie,
j’ai eu le plaisir de rencontrer de nombreux représentants roms
diplômés de l’enseignement supérieur et menant des carrières fructueuses
en tant qu’avocat, policier ou artisan. Ce sont des modèles qui
peuvent motiver les jeunes. Certains Roms et Gens du voyage occupent
également des postes à responsabilité aux niveaux national et européen,
ainsi qu’au sein des Nations Unies. La question n’est donc pas de
savoir s’il est possible de briser le cercle de l’exclusion mais
plutôt de trouver des moyens pour que toutes les personnes appartenant à
ces communautés puissent avoir les mêmes perspectives.
4. La marginalisation persistante de vastes catégories de la
population – leur exclusion du marché du travail, le fait qu’ils
soient en moins bonne santé, etc. – a un coût immédiat et à long
terme pour l’ensemble de la société. Nous avons par conséquent un
intérêt commun à régler ces problèmes. La promotion de l’inclusion des
Roms et des Gens du voyage ne consiste pas uniquement à mettre un
terme aux injustices qui existent de longue date; il s’agit également
de construire des sociétés plus fortes et des économies plus résistantes, auxquelles
tous participent sur un pied d’égalité sans que leurs perspectives
de vie ne soient déterminées par leurs origines ethniques.
5. Depuis plusieurs dizaines d’années maintenant, le Conseil
de l’Europe joue un rôle de premier plan dans les campagnes de sensibilisation
et les initiatives d’amélioration de la situation des Roms et des
Gens du voyage

. En 2010, un nouvel élan a été donné
aux actions européennes dans ce domaine avec l’adoption par le Comité
des Ministres de la Déclaration de Strasbourg sur les Roms

, qui
a été suivie du Plan d’action thématique sur l’inclusion des Roms
et des Gens du voyage (2016-2019)

et, au niveau
de l’Union européenne, du Cadre pour les stratégies nationales d’intégration
des Roms adopté en 2011

. Par ailleurs, s’appuyant sur les réalisations
de la Décennie pour l’intégration des Roms 2005-2015, l’initiative
pour l’Intégration des Roms 2020 lancée en juin 2016 entend contribuer
à réduire le fossé socio-économique entre la population rom et la
population non rom dans les Balkans occidentaux et en Turquie et
faire en sorte que les mesures de politique générale comportent
des objectifs d’intégration des Roms

. La dynamique créée
par ces initiatives offre une occasion unique de progrès que les
Etats membres se doivent de saisir.
2. But du rapport et questions abordées
6. Le présent rapport examine
les moyens de donner une suite concrète aux déclarations relatives
à l’égalité et l’inclusion des Roms et des Gens du voyage. Je souhaite
également faire connaître et promouvoir ici des exemples de pratiques
dont l’efficacité a déjà été prouvée. Bien entendu, la diversité
des situations qui se présentent dans les Etats membres est telle
que les bonnes pratiques ne peuvent pas toutes être transposées
directement d’un contexte à un autre. Cela dit, il est intéressant
de comprendre les facteurs qui contribuent à la réussite de ces
mesures pour renforcer les efforts déployés ailleurs.
7. Vu la diversité et l’importance des questions en jeu, le présent
rapport ne pourra traiter de manière exhaustive tous les aspects
de l’inclusion. J’ai choisi de me concentrer en particulier sur
l’emploi, puissant outil d’intégration. Je commencerai par examiner
la situation des Roms et des Gens du voyage sur le marché du travail
et les obstacles qu’ils rencontrent dans l’accès à l’emploi, ainsi
que les politiques et programmes qui pourraient être adoptés pour
redresser la situation. Je passerai également en revue les facteurs
transversaux à prendre en considération pour éviter les écueils
habituels et accroître les chances de réussite de l’action menée.
8. Comme n’importe quel autre groupe, les Roms et Gens du voyage
et leurs représentants ont des opinions, des attentes et des priorités
très différentes. Cela n’est d’ailleurs pas sans poser problème
lors de la définition des politiques et des mesures en faveur de
leur inclusion, mais les exclure des discussions portant justement
sur les moyens de promouvoir celle-ci serait un non-sens. C’est
pourquoi j’ai veillé à associer les Roms et les Gens du voyage à
la préparation du présent rapport, notamment en rencontrant leurs représentants
au cours de mes visites sur le terrain en Hongrie et en Bulgarie
en avril 2016, en invitant des représentants des Roms et des Gens
du voyage à s’exprimer lors d’auditions de la Sous-commission sur
les droits des minorités en septembre 2015 et de l’Alliance parlementaire
contre la haine en mai 2016 et en m’appuyant sur des études réalisées
par des chercheurs et des organisations de la société civile des communautés
roms et des Gens du voyage. Je suis également très reconnaissant
d’avoir pu enrichir le contenu du présent rapport grâce à ma rencontre
avec le Représentant spécial du Secrétaire Général du Conseil de
l’Europe pour les questions relatives aux Roms à Strasbourg et à
ma participation à la 11e réunion du
Comité ad hoc d’experts sur les questions relatives aux Roms et
aux Gens du voyage (CAHROM) tenue en Bulgarie en avril 2016.
3. L’emploi
comme chemin d’accès à l’intégration
9. Notre emploi est un aspect
de notre identité et de ce que nous représentons aux yeux des autres.
Il fait partie des éléments qui définissent notre rôle dans la société
et nous permettent de trouver notre place en son sein. Le fait d’avoir
un emploi permet en général d’améliorer nos conditions de vie et
les perspectives offertes à nos enfants. En parallèle, travailler
crée de nouveaux liens entre les personnes et peut contribuer à
la cohésion sociale

.
A l’inverse, être exclu du marché du travail peut nuire à l’estime
de soi et est souvent associé à un niveau de vie moins élevé. Lorsque
certains groupes sont davantage touchés par le chômage, il peut
arriver que les autres les considèrent comme des personnes oisives,
des parasites ou une charge pour la société. Les tensions s’accentuent
alors et la cohésion sociale est menacée

. En résumé, l’accès à l’emploi est
un facteur essentiel de l’intégration sociale.
3.1. La
situation des Roms et des Gens du voyage en matière d’emploi
10. Il n’est pas toujours aisé
de comparer la situation des Roms et des Gens du voyage dans le
secteur de l’emploi et celle des autres membres de la population,
ou de la population dans son ensemble, en raison d’un manque de
données ventilées par origine ethnique. Cela dit, les études menées
en 2011 sur la situation des Roms et des non-Roms sur le marché
du travail dans 18 Etats membres du Conseil de l’Europe comptant
une importante population rom

ont montré que les taux d’emploi des
Roms étaient globalement très inférieurs à ceux des non-Roms vivant
dans les mêmes régions et à ceux de la population générale. Les
Roms sont souvent davantage touchés par la précarité de l’emploi
et surreprésentés dans le secteur informel. Leurs salaires mensuels
moyens sont toujours inférieurs à ceux des non-Roms, y compris pour
les diplômés de l’enseignement secondaire ou supérieur

. Il existe
toutefois d’importantes disparités entre les Etats

.
Les Gens du voyage connaissent eux aussi des taux de chômage bien
plus élevés que le reste de la population

.
11. L’âge et le sexe occupent une place importante dans l’accès
à l’emploi. Il peut y avoir d’énormes différences de situation entre
les hommes et les femmes roms en la matière

, à commencer
par le fait que les premiers entrent en général plus tôt dans la
vie active

. Il existe également
des disparités entre les sexes chez les jeunes roms (âgé de 24 ans
ou moins) économiquement inactifs: dans ce groupe, plus de 50 %
des hommes suivent des études tandis que plus de 70 % des femmes
s’occupent du foyer

. Globalement
– mais à nouveau, il existe d’importantes variations entre les Etats
–, les femmes roms présentent une plus grande vulnérabilité sur
le plan de l’emploi et rencontrent davantage d’obstacles que les
hommes dans l’accès au marché du travail

.
3.2. Obstacles
structurels rencontrés par les Roms et les Gens du voyage
12. Comme l’a noté une étude récente,
«[s]ans emploi, ne possédant pas les compétences requises pour faire
face à la concurrence et ne bénéficiant pas d’un accès équitable
au marché du travail, de nombreux Roms n’ont pas les outils pour
réussir et progresser économiquement»

.
Un certain nombre d’obstacles structurels doivent être surmontés
pour redresser la situation.
3.2.1. Education
et compétences des Roms et des Gens du voyage
13. Les taux d’inscription des
enfants roms et de Gens du voyage à l’école primaire et les aspirations
des parents s’agissant de l’éducation de leurs enfants sont similaires
à ceux de la population majoritaire. Cependant, les résultats scolaires
des Roms et des Gens du voyage sont inférieurs en moyenne et leurs enfants
sont beaucoup moins nombreux à terminer leurs études secondaires.
Les taux d’alphabétisation sont également inférieurs à la moyenne.
De nombreux enfants roms ne bénéficient pas d’un enseignement préscolaire
de qualité; ils sont souvent orientés vers des filières spécialisées
pour enfants handicapés, dont les programmes sont moins exigeants
et offrent en conséquence des perspectives professionnelles restreintes.
Il est également fait état de cas de brimades et de discrimination
à l’égard des élèves roms et Voyageurs. L’absentéisme et les redoublements,
ainsi que l’abandon scolaire précoce, sont plus fréquents chez ces
enfants. La ségrégation entre et au sein des établissements est
également source d’inégalités

.
Je souhaite souligner que la ségrégation n’est pas automatiquement
fondée sur l’origine ethnique: les différentes situations régionales
et sociales jouent aussi un rôle important à cet égard. Les facteurs
susmentionnés ne sont pas tous présents dans la même mesure dans
chaque pays ou région, mais chacun tend à réduire la capacité des
Roms et des Gens du voyage à participer sur un pied d’égalité dans
un marché du travail compétitif et à augmenter la probabilité qu’ils
restent confinés à des emplois non qualifiés ou peu qualifiés. L’accès
à des emplois bien rémunérés est donc restreint et les chances de
trouver un emploi stable en dehors du marché informel limitées

.
14. Dans les pays à économie dirigée, les Roms peu ou pas qualifiés
occupaient souvent des emplois dans l’industrie lourde, emplois
dont la demande a chuté après le passage à une économie de marché.
Les qualifications ont pris plus d’importance dans la procédure
de recrutement et les Roms n’étaient plus suffisamment armés pour
faire face à la concurrence sur le marché du travail

.
Au fil des années, les taux d’emploi ont diminué pour tous dans
ces pays, mais le rapport entre les taux d’emploi des Roms et des
non-Roms s’est aggravé: autrement dit, la baisse du taux d’emploi
a été plus marquée chez les Roms que chez les non-Roms. Il se peut
également que la crise économique ait aggravé les inégalités existantes

.
3.2.2. Discrimination,
préjugés et autres obstacles sur le marché du travail
15. Bien que de nombreux Roms cherchent
du travail, leur expérience professionnelle limitée et le fait qu’ils aient
connu de longues périodes de chômage sont un obstacle à leur employabilité

.
Une enquête menée en 2007 sur les Roms en âge de travailler dans
cinq Etats d’Europe centrale et occidentale a montré que 42 % des
personnes interrogées avaient travaillé en continu pendant cinq
ans ou plus et 78 % pendant au moins un an. Cela dit, au moment
de l’étude, 62 % des personnes interrogées ne travaillaient pas
et 34 % étaient au chômage depuis au moins un an. En d’autres termes,
bien qu’ayant la capacité et la volonté de conserver durablement
leur emploi, les Roms étaient en grande partie touchés par le chômage
de longue durée

.
16. La discrimination à l’égard des Roms et des Gens du voyage
est courante chez les employeurs, notamment dans l’accès à l’emploi.
Il n’est pas rare que des employeurs refusent de recruter des Roms
et des Gens du voyage en raison de leur origine ethnique. Un scénario
classique consiste à répondre à ces candidats au téléphone qu’un
poste est encore vacant; or lorsque le candidat se présente en personne,
on l’informe que le poste vient d’être pourvu. Les pratiques consistant
à imposer des exigences démesurées en termes de diplômes pour un
travail non qualifié constituent également une forme de discrimination
indirecte à l’égard des Roms. La discrimination est quelquefois
manifeste, certaines entreprises refusant ouvertement d’employer
des Roms et d’autres leur expliquant clairement que leur candidature
a été rejetée en raison de leur origine ethnique. Dans certains
cas, les services publics pour l’emploi ferment l’œil sur ces pratiques,
les approuvant tacitement voire ouvertement. Confrontés à leurs
échecs et à ceux de leurs pairs dans leur recherche d’emploi, les
Roms sont pris dans un cercle vicieux de découragement et de désengagement,
ne considérant plus le marché du travail comme un moyen d’améliorer
leur situation

.
17. De manière générale, les Roms ont accès à un nombre limité
d’emplois. Les Roms qualifiés sont souvent contraints d’occuper
des postes ayant un rapport avec leur communauté. Ainsi, les travailleurs sociaux,
enseignants ou journalistes roms diplômés de l’enseignement supérieur
sont quasiment toujours amenés à travailler avec des Roms ou sur
des questions relatives aux Roms. Dans le commerce ou l’hôtellerie-restauration,
certains employeurs semblent délibérément écarter les Roms des tâches
qui impliquent un contact direct avec les clients, alors que ces
postes pourraient offrir de vraies opportunités aux Roms non qualifiés.
Cette «cage de verre» limite les possibilités de progression verticale,
horizontale ou dans de nouvelles directions des Roms qui occupent
un emploi

.
18. Les problèmes de logement et les lieux d’implantation des
communautés roms et de Gens du voyage influent également sur l’accès
à l’emploi. De nombreuses communautés roms marginalisées sont installées dans
des régions où le chômage est structurellement élevé et/ou dans
des lieux isolés, mal desservis par les transports publics. Pour
de nombreux Roms, la ségrégation résidentielle constitue donc un
obstacle supplémentaire à l’emploi. Ses effets sont souvent exacerbés
par l’absence de réseau social créant des liens vers le marché du
travail. Enfin, le manque de moyens financiers est un frein à la
création d’entreprise

. Pour les Gens du voyage, le
fait de ne pas avoir d’adresse permanente peut accroître considérablement
les difficultés à trouver un emploi ou à exercer une activité indépendante,
et les expulsions ne font qu’aggraver la situation. Par ailleurs,
les dispositions régissant l’utilisation des sites où vivent les
Gens du voyage peuvent les empêcher d’exercer leurs professions
traditionnelles, même lorsqu’ils sont propriétaires du terrain sur
lequel ils stationnent

.
3.3. Mesures
spécifiques de promotion de l’accès à l’emploi pour les Roms et
les Gens du voyage
19. Comme indiqué précédemment,
le fait que d’importants groupes de la population soient exclus
du marché du travail est à la fois coûteux et discriminatoire. Promouvoir
l’intégration des Roms et des Gens du voyage par un accès équitable
à l’emploi est une approche «gagnant-gagnant». J’examinerai ci-après
un certain nombre de mesures-phares pouvant être prises à cet effet,
en soulignant les écueils à éviter dans leur conception et leur
mise en œuvre. Je citerai également en exemple quelques-unes des
pratiques visant à améliorer les taux d’emploi des Roms et des Gens
du voyage qui m’ont été présentées dans le cadre de mon travail
de préparation du présent rapport.
3.3.1. Mesures
visant à améliorer le niveau d’instruction et de compétences
20. La réduction des disparités
qui existent en termes de niveaux d’instruction est essentielle
pour améliorer l’accès des Roms et des Gens du voyage à l’emploi.
Les Etats doivent traiter ce problème de manière globale. L’Assemblée
a déjà formulé des recommandations détaillées en ce sens, qui sont
aujourd’hui plus pertinentes que jamais

. Néanmoins, je tiens à souligner
ici que le développement des tout-petits joue un rôle déterminant dans
leurs chances de réussite ultérieure et qu’il est essentiel que
tous les enfants roms et de Gens du voyage aient un accès effectif
à un enseignement préscolaire de qualité. C’est par conséquent avec
grand intérêt que j’ai pris connaissance des mesures adoptées par
la Hongrie et notamment du programme
Sure
Start, qui apporte un soutien aux parents et aux enfants,
principalement entre 0 et 3 ans, et contribue à accroître la confiance
et à lever les obstacles à l’éducation dès le plus jeune âge. L’abaissement
de l’âge obligatoire de scolarisation à l’école maternelle à 3 ans
est également une mesure positive, qui doit cependant s’accompagner
d’aides supplémentaires pour que les familles aux revenus les plus
modestes puissent également se conformer à cette obligation. En
revanche, dans une série d’affaires contre différents Etats, la Cour
européenne des droits de l’homme a constaté que la ségrégation scolaire
était contraire à la Convention européenne des droits de l’homme
(STE no 5)

. Il convient d’y mettre
fin et de créer un environnement éducatif ouvert aux enfants roms
et de Gens du voyage. De même, les brimades et la discrimination
ne doivent pas être tolérées dans le système éducatif. Toutes les
mesures précitées peuvent par ailleurs contribuer à réduire l’absentéisme,
le redoublement et l’abandon précoce de scolarité, qui sont des
causes majeures du faible niveau d’instruction. J’ai pris note avec
satisfaction d’autres initiatives efficaces qui m’ont été présentées lors
de ma visite en Hongrie, telles que le programme de soutien scolaire
Tanoda et le programme Seconde chance dont le but est d’aider les
personnes qui ont abandonné leur scolarité à reprendre leurs études
par la suite.
21. Il y a lieu de souligner que les parents ont aussi un rôle
fondamental à jouer en assurant une présence régulière de leurs
enfants en classe dès l’école maternelle et jusqu’à la fin de la
scolarité obligatoire. Il est essentiel que les programmes qui visent
à améliorer le niveau d’instruction des enfants roms et Voyageurs incluent
également leurs parents, notamment si ces derniers ont eux-mêmes
un faible niveau d’instruction et/ou ne font guère confiance à un
système éducatif qui les a laissés de côté. L’approche hongroise
selon laquelle l’accès aux prestations sociales est lié à l’exercice
des devoirs parentaux (dans les cas d’abandon scolaire) est à mon
avis un instrument approprié et est également mis en œuvre dans
d’autres Etats membres du Conseil de l’Europe.
22. On notera toutefois que les améliorations – certes louables
– intervenues dans la participation des Roms et des Gens du voyage
à l’éducation dans un certain nombre d’Etats ces dernières années
ne se sont pas systématiquement traduites par une augmentation des
taux d’emploi ou de la qualité de l’emploi des Roms et des Gens
du voyage. Les raisons de cette situation ne semblent pas encore
avoir fait l’objet d’une analyse approfondie

,
mais il apparaît clairement que le levier de l’éducation – bien
qu’indispensable – ne suffit pas à lui seul à assurer l’intégration
effective des Roms et des Gens du voyage sur le marché du travail.
23. Dans les pays où s’est opérée une transition entre une économie
dirigée et une économie de marché, l’insuffisance des investissements
publics dans la reconversion des travailleurs roms non qualifiés
ou peu qualifiés peut expliquer en partie que ceux-ci connaissent
une situation de chômage de longue durée

. Par conséquent,
il est essentiel de proposer des formations professionnelles aux
adultes et des possibilités de reprendre et de terminer ses études
secondaires après l’âge de la scolarité obligatoire. Les formations
pour adultes ne devraient pas être limitées aux personnes qui ont
fini leurs études secondaires car cela exclurait de nombreux Roms

.
Un appui supplémentaire est nécessaire pour rendre l’éducation et
la formation accessibles à tous, y compris aux Roms et aux Gens
du voyage.
3.3.2. Mesures
visant à créer un marché du travail plus propice à l’intégration
24. Les lois anti-discrimination
sont une pièce maîtresse de l’arsenal de lutte contre la discrimination
à l’égard des Roms et des Gens du voyage dans le domaine de l’emploi.
Cependant, pour avoir un maximum d’impact et apporter aux victimes
des recours effectifs, ces lois doivent prévoir des procédures accessibles
et des moyens simplifiés de prouver la discrimination (tests de
discrimination et partage de la charge de la preuve), associées
à des sanctions dissuasives contre les employeurs dont il a été
établi qu’ils ont agi de manière discriminatoire. Un renforcement
des capacités est également nécessaire pour que les Roms et les Gens
du voyage aient un accès effectif aux voies de recours existantes

.
25. Cela dit, les obligations légales en matière d’égalité de
traitement ne suffisent pas à assurer l’égalité des chances lorsque
les groupes concernés se trouvent dans des situations radicalement
différentes – et c’est le cas des Roms et des Gens du voyage: il
est clair que pour ceux qui commencent avec un sérieux handicap, la
compétition ne se fait pas à armes égales. Des mesures positives
s’imposent alors si l’on veut promouvoir activement leur intégration.
La solution doit venir en partie des employeurs et il appartient
aux gouvernements d’agir pour qu’il en soit ainsi. Il pourrait être
envisagé par exemple d’imposer aux employeurs publics et privés, à
partir d’un seuil d’effectif donné, une obligation positive de s’assurer
de la diversité de leurs équipes et d’en rendre compte, d’encourager
les candidatures de groupes sous-représentés et de veiller à ce
que leurs pratiques en matière de formation et d’avancement favorisent
l’inclusion

.
De telles mesures encouragent la diversité au travail sous toutes
ses formes et peuvent être bénéfiques à tous les groupes sous-représentés,
y compris les Roms et les Gens du voyage. L’intégration de critères
d’égalité dans les procédures de marchés publics est également un
puissant outil de promotion de l’égalité dans l’emploi.
26. Les gouvernements peuvent également prendre des mesures spécifiques
pour stimuler la création d’emplois et faciliter ainsi l’accès à
l’emploi, comme cela est le cas en Hongrie et en Allemagne. A condition d’être
adaptées aux populations auxquelles elles s’adressent, les politiques
actives du marché du travail peuvent être des instruments utiles
de ce point de vue. Des mesures comme les programmes publics d’emploi

peuvent également être
intéressantes dans des pays où les populations roms et de Gens du
voyage sont concentrées dans des régions frappées par la récession,
car elles peuvent contribuer au développement économique de ces
régions. Elles peuvent également permettre une réinsertion de courte
durée dans des structures de travail ou apporter une solution temporaire
au chômage. Cela dit, des études montrent que dans des économies
de marché ou en transition, ces programmes n’ont que peu d’effet
direct sur l’intégration au marché du travail de leurs bénéficiaires,
qui sont très peu nombreux à trouver un emploi régulier par la suite

. Comme
l’a affirmé la Commission européenne, «au lieu de créer une passerelle
vers le marché du travail ouvert, [ces programmes] ont eu un effet
de verrouillage maintenant les participants dans des emplois de
faible qualité et à bas revenus qui ne permettent pas de sortir
de la pauvreté»

.
Pour devenir générateurs de bénéfices à long terme, les programmes
publics d’emploi doivent donner à ceux qui y participent la possibilité de
suivre une formation complémentaire ou d’obtenir des qualifications
qui favoriseront leur insertion dans le segment primaire du marché
du travail

. Voilà le message fort qui m’a
été adressé par les Roms que j’ai rencontrés en Hongrie et qui avaient
participé à de tels programmes. Ils ont également souligné l’importance de
veiller à ce que les missions s’inscrivant dans le cadre de ces
programmes soient attribuées de manière équitable et suffisamment
rémunérées pour permettre d’améliorer la situation des familles
concernées.
27. Parmi les exemples réussis de promotion de l’emploi des Roms,
on peut mentionner le programme
Acceder,
mis en œuvre depuis 2000 en Espagne par la Fundación Secretariado
Gitano (organisation non gouvernementale (ONG) avec des membres
roms et non roms) avec un soutien financier important du Fonds social
européen. Partant du principe que l’intégration au marché du travail
est la clé de l’intégration sociale, il se concentre sur l’amélioration
de l’employabilité des Roms par un renforcement de leurs compétences
de base et de leurs qualifications professionnelles. Ceux qui y
participent bénéficient d’un soutien et d’un accompagnement personnalisés,
adaptés à leurs besoins et au contexte. Il est organisé en étroite
coopération avec les employeurs pour faire correspondre l’offre
de main-d’œuvre à la demande. Depuis son lancement, il a conduit
à la signature de près de 58 000 contrats d’engagement, dont 53 %
pour des femmes, et permis à plus de 22 000 personnes de trouver
du travail. En 2009, il a été complété par un deuxième volet:
Promociona, un programme de tutorat
et d’orientation scolaire qui a permis à un nombre croissant de
jeunes Roms, garçons et filles, de terminer leur scolarité secondaire
obligatoire et d’obtenir leur diplôme

. Une autre
initiative, en place depuis 2013, est le projet
Aprender trabajando qui propose
un enseignement théorique et une expérience professionnelle concrète
aux jeunes de 18 à 30 ans. Des campagnes de sensibilisation ont
été menées en parallèle pour inciter les Roms à participer à ces
programmes.
28. Parmi les facteurs ayant pu contribuer au succès des programmes
précités en Espagne, il convient de mentionner le financement sur
sept ans, qui permet une planification à plus long terme, ainsi
que l’accent mis sur des objectifs et des résultats mesurables,
pouvant être comparés à ceux du reste de la population. Mis en œuvre
à l’origine dans 30 villes espagnoles, le programme
Acceder a depuis été étendu à près
de 50 villes et a également été lancé en Roumanie (en 2008) et en
Italie (en 2014)

. Le modèle «Fit to job» appliqué
dans plusieurs
Länder allemands
repose également sur une approche individualisée incluant une orientation
et une formation professionnelles, un travail avec les familles
et les services pour l’emploi, et a été cité comme pratique prometteuse
par la Commission européenne

.
29. Les mesures de promotion du travail indépendant ou de l’entreprenariat
sont également à mentionner. On a notamment salué l’intérêt pour
les Roms du programme visant à promouvoir les activités indépendantes et
la régularisation des entreprises mis en œuvre dans «l’ex-République
yougoslave de Macédoine» avec des premiers résultats encourageants.
En effet, il permet de sortir de la situation actuelle caractérisée
par une proportion anormalement élevée de Roms dans l’économie informelle
de ce pays

. Comme cela a
été noté précédemment, l’exclusion financière peut toutefois constituer
un frein à la création d’entreprises par les Roms et les Gens du
voyage. Démarrer sa propre entreprise pouvant se révéler être un
exercice très intimidant, des aides un accompagnement devraient
être prévus tout au long du processus

.
Il conviendra également de faciliter et d’accompagner l’accès aux
programmes de microcrédit, par exemple en assurant une formation dans
le domaine des finances et de la gestion d’entreprise

.
4. Facteurs
transversaux
30. Lors de ma visite en Hongrie,
plusieurs ONG internationales ont attiré mon attention sur le fait
que les stratégies de promotion de l’inclusion des Roms et des Gens
du voyage uniquement axées sur la réduction de la pauvreté omettent
de tenir compte du racisme qui est au cœur de la discrimination
à laquelle ils restent confrontés. Comme l’ont fait ressortir clairement
Soraya Post, députée européenne, et Martin Collins du Pavee Point
Traveller and Roma Centre (Irlande) lors de l’audition sur l’antitsiganisme
organisée par l’Alliance parlementaire contre la haine à Stockholm
en mai 2016, l’antitsiganisme est présent dans tous les domaines de
la vie, que ce soit dans le discours politique ou les appels à la
violence à l’égard de la communauté rom sur les réseaux sociaux,
le logement ou certaines décisions judiciaires. Si l’on occulte
l’antitsiganisme et la discrimination directe ou indirecte des Roms
et des Gens du voyage, les mesures prises pour promouvoir leur inclusion
resteront vides de sens et n’auront aucune efficacité. Les effets
négatifs de l’antitsiganisme sur les perspectives d’emploi des Roms
et des Gens du voyage sont évidents et ont été constatés dans toutes
les études précitées. Par conséquent, la lutte contre l’antitsiganisme
doit faire partie intégrante des efforts de promotion de l’inclusion
des Roms et des Gens du voyage sur le marché du travail. Bon nombre
de stratégies nationales d’intégration des Roms ne portent pas une
attention suffisante à cet aspect, ce qu’il conviendra de corriger
au moment de modifier les stratégies existantes ou d’en concevoir
de nouvelles

.
31. Cependant, l’inclusion des Roms et des Gens du voyage ne se
limite pas à la lutte contre la discrimination à leur égard: il
s’agit également d’assurer leur participation effective. L’une des
principales critiques formulées par les représentants des Roms et
des Gens du voyage au sujet des politiques, stratégies et programmes
déjà mis en œuvre aux niveaux local, régional et national pour promouvoir
leur inclusion est qu’ils sont fréquemment conçus, mis en œuvre
et évalués sans une participation et une contribution suffisantes de
leurs communautés. Dans ce cas, les mesures adoptées reposent souvent
sur des hypothèses qui ne prennent pas en considération ou ne correspondent
pas à la réalité de ce qu’ils vivent. Pour promouvoir leur participation
effective aux processus de décision et d’élaboration des politiques,
il faut que les Roms et les Gens du voyage cessent d’être traités
comme des bénéficiaires passifs d’une aide extérieure pour devenir acteurs
de leur propre destin, tout en assumant cette responsabilité. En
participant ainsi à l’élaboration des politiques et mesures qui
les concernent, ils pourront influer directement sur la capacité
de celles-ci à améliorer leur quotidien. Ils bénéficieront également
de possibilités d’interaction et d’échanges qui permettront de balayer
les stéréotypes et les préjugés et de remédier au manque de confiance
réciproque, qui constitue pour les Roms l’un des plus grands obstacles
à l’égalité.
32. Par ailleurs, pour garantir des résultats à long terme, les
mesures adoptées doivent s’inscrire dans la durée. Il existe une
multitude d’exemples d’initiatives réussies au niveau local grâce
à l’engagement des collectivités locales et d’ONG ou ayant remporté
un succès à court terme, mais des vides sont encore à combler pour
faire en sorte que les mesures mises en œuvre produisent des effets
bénéfiques durables pour les Roms et les Gens du voyage. Qui plus
est, même les programmes et projets manifestement efficaces seront
compromis s’ils dépendent de financements de courte durée nécessitant
un renouvellement constant

. La
période de financement du programme
Acceder présenté
ci-dessus s’étend sur sept années et constitue de ce point de vue
une bonne pratique car elle permet une planification à moyen et
à long termes: une telle mesure peut et doit être reproduite. Dans
le même ordre d’idées, je tiens à attirer l’attention sur la stratégie ambitieuse
d’inclusion des Roms présentée à l’Alliance parlementaire contre
la haine par le ministre suédois de la Culture et de la Démocratie
à Stockholm en mai 2016. Cette initiative des autorités suédoises
entend faire en sorte que tous les Roms nés en 2012, date de son
lancement, disposent d’ici 2032 des mêmes perspectives de vie que
toutes les autres personnes nées en Suède. En prenant cet engagement
sur 20 ans à améliorer la situation des Roms, les autorités suédoises
se sont créé une formidable occasion d’assurer la planification
à long terme et la continuité de leurs actions.
33. La dimension de genre doit également être prise en considération
dans les stratégies de promotion de l’inclusion des Roms et des
Gens du voyage, en particulier dans les communautés où la répartition traditionnelle
des rôles entre les femmes et les hommes est encore prédominante.
Comme l’a souligné Cerasela Bănică du Centre pour la défense des
droits de l’homme (CADO), Roumanie, lors de l’audition tenue par
la Sous-commission sur les droits des minorités en septembre 2015,
si cet aspect est occulté, le financement de programmes éducatifs,
par exemple, risque de n’avoir que peu d’impact sur les filles qui
vivent au sein de ces communautés. Les programmes Acceder et Promociona évoqués
précédemment ont réussi à obtenir une bonne participation des femmes
grâce à des efforts ciblés visant à tenir compte de la dimension de
genre.
34. Pour tous les groupes de population, Roms et Gens du voyage
y compris, l’échelon local – et notamment les maires – sont le pivot
de l’inclusion sociale. En effet, à l’instar des autres minorités,
les Roms et les Gens du voyage ne constituent pas un groupe homogène
– leur situation est variable d’une région à une autre. D’autre
part, ce sont les pouvoirs locaux qui s’occupent de l’intégration
des minorités ainsi que de la mise en œuvre d’une grande partie
des mesures qui ont un impact direct sur la vie de leurs administrés,
et donc également des Roms et des Gens du voyage. Lors de mes visites
sur le terrain, j’ai eu le plaisir de rencontrer des représentants
roms siégeant en tant qu’élus dans leurs conseils locaux en Bulgarie
et dans le nord-est de la Hongrie, ainsi que des membres des instances
autonomes de la minorité rom en Hongrie. Mes interlocuteurs m’ont
également confirmé le rôle déterminant que peuvent jouer les agents
de liaison roms auprès des pouvoirs locaux dans l’instauration d’un
climat de confiance et la promotion de bonnes relations entre la population
rom d’une localité et les autorités. Une autre initiative qui revêt
un intérêt particulier dans le contexte local est le programme ROMACT,
un programme commun de la Commission européenne et du Conseil de l’Europe,
mis en œuvre par ce dernier et qui vise à renforcer les capacités
des pouvoirs locaux à concevoir et mettre en œuvre des politiques
et des services publics ouverts à tous, y compris les Roms.
35. Il est notoire que de nombreux pays ont exprimé des réserves
ou prévu des dispositions constitutionnelles ou législatives restrictives
en matière de collecte de données ethniques, mais le fait est que beaucoup
de stratégies et de programmes en faveur de l’inclusion des Roms
et des Gens du voyage sont pénalisés par le manque de données disponibles,
alors que cela permettrait de les adapter aux besoins de ces groupes
et d’évaluer de manière fiable l’impact des mesures prises

. La mise en œuvre des recommandations qui
ont déjà été formulées au sujet de la collecte de données ethniques
(dans le respect de la réglementation applicable en matière de protection
des données) contribuerait assurément à pallier ce manque

.
36. Un autre aspect important qui a souvent été souligné par les
représentants des Roms et des Gens du voyage que j’ai rencontrés
lors de la préparation du présent rapport est la nécessité de favoriser
au sein de leurs communautés un sentiment d’identité positif, afin
qu’ils n’aient aucune crainte d’exprimer publiquement leur affiliation
ethnique. Sans cela, le pourcentage élevé de Roms et de Gens du
voyage qui ne correspondent pas aux stéréotypes négatifs tenaces
les associant tous à la spirale sans fin de la pauvreté risquent
de manifester une certaine réticence à revendiquer publiquement
leur culture et leurs origines ethniques et il n’y aura que peu
de modèles de réussite roms auxquels les jeunes générations pourront
s’identifier.
37. Dans ce contexte, je tiens à saluer la décision des autorités
allemandes de proposer la candidature de Berlin comme siège d’un
nouvel Institut européen des arts et de la culture roms. Je suis
convaincu que la promotion de la culture et de l’histoire riches
et variées des Roms et des Gens du voyage est essentielle pour briser
le cercle des préjugés, de l’ignorance, des généralisations et de
la stigmatisation qui vont de pair avec l’antitsiganisme et la discrimination.
5. Conclusions
38. Nul ne devrait voir ses perspectives
de vie déterminées par son origine ethnique. Les Etats sont de plus en
plus conscients que l’intégration des Roms et des Gens du voyage
est dans l’intérêt de tous et adoptent des stratégies en ce sens.
Des initiatives majeures visant à promouvoir l’inclusion des Roms
et des Gens du voyage ont par ailleurs été prises ces dernières
années par le Conseil de l’Europe, l’Union européenne et d’autres
organes régionaux. Il ne paraît pas exagéré de dire que les chances
de progresser dans la lutte contre les inégalités et la promotion
de l’inclusion des Roms et des Gens du voyage en Europe n’ont jamais
été aussi grandes. La question n’est plus de savoir si cela se fera,
mais comment.
39. Un changement durable passe nécessairement par les individus.
L’autonomisation est un élément crucial. Les Roms et les Gens du
voyage ne doivent pas se considérer ni être considérés comme les
simples cibles passives de mesures gouvernementales, mais comme
des acteurs de leur propre destin. La réussite des initiatives de
promotion de l’inclusion des Roms et des Gens du voyage ne dépend
pas uniquement de l’engagement des gouvernements (bien que celui-ci
soit indispensable), mais aussi de la capacité des Roms et les Gens
du voyage à prendre leur propre avenir en main. Par conséquent,
les mesures favorisant l’inclusion des Roms et des Gens du voyage
devraient être conçues en concertation avec eux, pour accroître
la volonté d’intégration, créer des réseaux, diffuser des exemples
positifs et faire en sorte que demain, les jeunes qui grandissent
aujourd’hui au sein des communautés rom et des Gens du voyage puissent
prendre part à la vie publique, défendre la cause de leur minorité
et influer sur son destin.
40. La discrimination à l’égard des Roms et des Gens du voyage
existe dans un grand nombre de domaines mais je suis convaincu que
l’accès à l’emploi est une voie essentielle vers l’inclusion. L’emploi
renforce la confiance en soi des individus et améliore la sécurité
financière des familles, tout en contribuant à la cohésion sociale
par la création de nouveaux liens entre les personnes et le renversement
des stéréotypes persistants qui considèrent les chômeurs de longue
durée issus des communautés roms et des Gens du voyage comme des
personnes oisives, des parasites ou une charge pour la société.
41. Pour obtenir des résultats durables en la matière, il faut
investir dans l’éducation et le renforcement des compétences et
prendre des mesures pour éliminer les autres obstacles à la participation
des Roms et des Gens du voyage au marché du travail, et notamment
la discrimination. Les problèmes et les situations varient d’un
Etat et même d’une région à l’autre et il n’existe pas de solution
unique qui conviendrait dans tous les cas. Chaque pays doit surmonter
ses propres difficultés avec ses propres moyens et méthodes, en
s’appuyant sur une analyse détaillée de la situation des Roms et
des Gens du voyage sur son territoire et des causes de cette situation.
Cela étant, j’espère que le présent rapport contribuera à une meilleure
compréhension des principaux facteurs à l’origine des inégalités
auxquelles sont confrontés les Roms et les Gens du voyage dans le
domaine de l’emploi et donnera davantage de visibilité aux bonnes
pratiques mises en œuvre pour favoriser leur inclusion dans ce domaine
essentiel de la vie. Tous ont à y gagner: les Roms et les Gens du
voyage, mais également la société dans son ensemble.