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Rapport | Doc. 14850 | 25 mars 2019

Création d’un mécanisme de l’Union européenne pour la démocratie, l’État de droit et les droits fondamentaux

Commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles

Rapporteure : Mme Petra De SUTTER, Belgique, SOC

Origine - Renvoi en commission: Doc. 14317, Renvoi 4308 du 30 juin 2017. 2019 - Deuxième partie de session

Résumé

La résolution du Parlement européen de 2016 sur la création au sein de l’Union européenne d’un mécanisme complet, contraignant et permanent pour superviser la situation de la démocratie, de l’État de droit et des droits de l’homme dans les 28 États membres a été l’élément déclencheur pour que l'Assemblée parlementaire lance une nouvelle réflexion sur les moyens de réaliser une plus grande complémentarité entre les deux organisations.

Même si la position selon laquelle le Conseil de l’Europe reste «une référence en matière de droits de l'homme, de primauté du droit et de démocratie en Europe» n’a été aucunement mise en cause, des arrangements pratiques à tous les niveaux et des efforts continus doivent continuer à être déployés pour garantir la synergie d’action et éviter une fragmentation de la compréhension des valeurs fondamentales et de leur mise en œuvre sur le continent européen.

Le rapport propose des mesures concrètes visant à renforcer le dialogue avec les parlements nationaux, dans des conditions favorisant un débat franc sur les recommandations portant sur le respect par les États membres des normes relatives aux droits de l'homme, à l'État de droit et à la démocratie émanant des deux organisations, et à rapprocher les décideurs européens et les représentants des parlements nationaux.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 18 mars
2019.

(open)
1. En octobre 2016, le Parlement européen adoptait une résolution proposant que l’Union européenne crée un mécanisme complet, contraignant et permanent pour superviser la situation de la démocratie, de l’État de droit et des droits de l’homme dans les 28 États membres et assurer le respect des valeurs fondamentales de l’Union consacrées à l’article 2 du Traité sur l’Union européenne et l’exécution des Traités européens dans les États membres.
2. L’Assemblée parlementaire reconnaît qu’une telle initiative est légitime et cohérente du point de vue de l'Union européenne, le Parlement européen constatant lui-même que les instruments existants mis en œuvre à la fois par la Commission européenne et le Conseil européen ont une portée limitée.
3. L’Assemblée considère que l’initiative du Parlement européen, qui reste en discussion, nécessite une réflexion sérieuse dans la mesure où le mécanisme envisagé se réfère expressément au cadre du Conseil de l'Europe et tend à créer des synergies entre les deux organisations. De par sa portée et son contenu, le mécanisme proposé ne manquerait pas d’avoir un impact clair sur le Conseil de l'Europe, son acquis normatif et les mécanismes d'application de ses conventions: ce mécanisme fait référence à l'acquis du Conseil de l'Europe et inclut dans sa «base juridique» plusieurs conventions du Conseil de l'Europe – en particulier la Convention européenne des droits de l'homme (STE no 5) et la Charte sociale européenne (révisée) (STE no 163) – à laquelle l'Union européenne n'est pas Partie; certains organes du Conseil de l'Europe seront appelés à collaborer avec l'Union européenne dans le cadre de ce mécanisme – la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise), le Groupe d'États contre la corruption (GRECO), le Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe et la Commission européenne pour l'efficacité de la justice (CEPEJ).
4. L’Assemblée rappelle que le Conseil de l'Europe et l'Union européenne s'appuient sur des normes strictes en matière de droits de l'homme, d'État de droit et de démocratie pour atteindre leurs objectifs institutionnels respectifs. Depuis le Mémorandum d'accord de 2007, le Conseil de l'Europe et l'Union européenne ont développé un partenariat stratégique fondé sur ces valeurs communes, qui rendent indispensables la synergie et la convergence des actions. Aujourd'hui, les deux organisations ont la responsabilité partagée de maintenir l'efficacité de leurs cadres juridiques respectifs, en veillant à ce que tout chevauchement de compétences ne crée pas de conflit, et que cet ensemble de valeurs fondamentales et de principes communs ne soient pas interprétés de manière autonome ni par l’Union européenne ni par le Conseil de l’Europe, afin d'éviter une fragmentation de la compréhension des valeurs fondamentales et de leur mise en œuvre sur le continent européen.
5. À de nombreuses reprises ces dernières années, l'Assemblée a pris position sur les moyens de réaliser la complémentarité des actions des deux organisations, notamment dans la Résolution 1427 (2005) et la Recommandation 1696 (2005) «Initiative de créer une agence des droits fondamentaux de l’Union européenne», la Recommandation 1744 (2006) «Suivi du Troisième Sommet: le Conseil de l'Europe et l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne», la Résolution 1756 (2010) et Recommandation 1935 (2010) «Nécessité d’éviter la duplication des travaux du Conseil de l’Europe par l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne», la Résolution 1836 (2011) et la Recommandation 1982 (2011) sur l'impact du traité de Lisbonne sur le Conseil de l'Europe, la Recommandation 2027 (2013) «Programmes de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe en matière de droits de l’homme: des synergies, pas des doubles emplois», la Résolution 2029 (2015) et la Recommandation 2060 (2015) sur la mise en œuvre du Mémorandum d’accord entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne et la Résolution 2041 (2015) et la Recommandation 2065 (2015) sur les institutions européennes et les droits de l'homme en Europe.
6. L'Assemblée réaffirme avec force qu’aux termes du Mémorandum d’accord de 2007, «l’Union européenne considère le Conseil de l’Europe comme la source paneuropéenne de référence en matière de droits de l’homme» et que «le Conseil de l'Europe restera la référence en matière de droits de l'homme, de primauté du droit et de démocratie en Europe». Elle se félicite de ce que de nombreuses conventions du Conseil de l'Europe ainsi que des recommandations du Comité des Ministres contiennent des normes considérées aujourd'hui comme des acquis communautaires, sans que la logique opérationnelle de l'Organisation soit remise en question. Le Mémorandum d'accord invitait, en outre, les institutions de l'Union européenne à citer les normes pertinentes du Conseil de l'Europe «comme référence dans les documents de l'Union européenne» et à prendre en compte les décisions et conclusions des organes du Conseil de l'Europe lorsque cela est pertinent.
7. Le Conseil de l'Europe dispose d'un nombre important d'organes habilités à collecter des données auprès des États membres, à évaluer le respect des obligations générales et des engagements spécifiques ou conventionnels par les États membres ou à formuler des observations et recommandations relatives à la gouvernance démocratique, à l'État de droit et aux droits de l'homme à l'attention des États membres. L’Assemblée relève que le Conseil de l'Europe agit en tant que partenaire de l'Union européenne, en fournissant la base au processus décisionnel de l'Union européenne en ce qui concerne les pays qui sont également des États membres du Conseil de l’Europe. La contribution du Conseil de l’Europe aux initiatives actuelles de l’État de droit de l’Union européenne, notamment avec les avis de la Commission de Venise, s’est avérée substantielle.
8. L'Assemblée reconnaît que la coopération mise sur pied entre le Conseil de l'Europe et les institutions et agences de l'Union européenne, en particulier avec l'Agence des droits fondamentaux, s'est révélée positive et a permis de renforcer le cadre européen de promotion des droits fondamentaux et la confiance mutuelle sur laquelle repose la coopération entre les États européens.
9. En réponse aux préoccupations croissantes exprimées au sein de l'Union européenne vis-à-vis du déficit démocratique de plusieurs de ses États membres, divers mécanismes de contrôle et d’application des normes de l'État de droit ont vu le jour, qui impliquent différentes institutions de l’Union, sont basés sur différents paradigmes et diffèrent par leur nature et leurs effets coercitifs.
10. Réagissant aux initiatives antérieures de l'Union européenne visant à instaurer des mécanismes de suivi du respect de l’État de droit ou des droits de l'homme, l'Assemblée a souvent exprimé sa réserve et mis en évidence les risques de duplication des mécanismes et des normes, de fragmentation ou d’incohérence des normes applicables, de «forum shopping», ainsi que de gaspillage des ressources budgétaires limitées, lorsqu'un tel mécanisme existait déjà dans le cadre du Conseil de l'Europe. Elle considère par conséquent qu’il est fondamental de maintenir la primauté du Conseil de l'Europe dans l'évaluation du respect des valeurs fondamentales communes par les États membres de l'Union européenne, de même que pour les États non membres de l’Union européenne.
11. L'Assemblée rappelle également que les procédures actuelles d’application et de contrôle du respect des valeurs des droits de l'homme, de l'État de droit et de la démocratie, qu’elles aient été établies par le Conseil de l'Europe ou l'Union européenne, reposent sur une coopération avec les autorités et institutions nationales. Par conséquent, l'Assemblée se déclare préoccupée par le fait que, si elles sont considérées du point de vue des autorités nationales, les nombreuses recommandations formulées par les diverses institutions européennes, risquent de provoquer une fatigue institutionnelle et de compromettre la capacité d'élaborer une politique publique judicieuse.
12. L’Assemblée estime que le Conseil de l'Europe et l’Union européenne ont exprimé leur engagement politique ferme en faveur d’une utilisation plus efficace des normes et des procédures existantes afin de créer un environnement propice à la réalisation effective des droits et des libertés des citoyens. L'Assemblée estime toutefois qu'un certain nombre d'arrangements pratiques pourraient utilement conforter les engagements politiques susmentionnés, clarifier et optimiser les rôles et missions respectifs, et, parallèlement, éliminer ou minimiser, à long terme, le risque de duplication des normes et des mécanismes, de double emploi dans les actions entreprises.
13. C'est pourquoi l'Assemblée invite l'Union européenne, dans le cadre de ses procédures existantes et ses initiatives visant à assurer le respect des valeurs garanties à l'article 2 du Traité sur l’Union européenne:
13.1. à soutenir la mise en œuvre effective d’indicateurs de référence à l'échelle européenne, en utilisant les «normes de l'État de droit» du Conseil de l'Europe, y compris la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, les recommandations pertinentes du Comité des Ministres, les normes et avis de la Commission de Venise (y compris la «Liste des critères de l’État de droit») et les avis et/ou conclusions des organes consultatifs ou de suivi du Conseil de l’Europe concernés;
13.2. à utiliser les rapports, avis ou recommandations disponibles des organes consultatifs ou de suivi du Conseil de l'Europe, non seulement en les citant comme référence dans les documents produits par les instances de l’Union européenne, mais en prenant en compte les conclusions finales de ces organes dans l'évaluation que les institutions de l'Union européenne conduisent afin de déterminer si des problèmes liés à l'État de droit se posent, ainsi que d’orienter les propositions pour toute action à entreprendre;
13.3. lorsqu'elle évalue si le manquement à l'État de droit a été corrigé ou a cessé d'exister, de se mettre en rapport avec les instances compétentes du Conseil de l'Europe qui ont rendu l'avis ou la recommandation, afin d’assurer la cohérence des points de vue et des conclusions. L’initiative d’une action politique en cas de non-respect présumé du cadre juridique de l’Union européenne incomberait à l’Union européenne, le Conseil de l’Europe offrant une évaluation juridique et technique dans le respect des compétences de ses organes consultatifs ou de suivi;
13.4. à prévoir que tout mécanisme de l’Union européenne comporte des garanties stipulant que l'évaluation ou l'action de l'Union européenne ne portera pas atteinte aux procédures existantes relevant des mécanismes consultatifs ou de suivi du Conseil de l'Europe, à l'instar de l'article 53 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
14. L’Assemblée se félicite de la participation accrue de l’Union européenne aux travaux de plusieurs organes du Conseil de l’Europe, ce qui contribue à renforcer la cohérence des approches des deux organisations dans les domaines abordés et s’agissant des pays concernés. Cette bonne coopération doit se poursuivre sans nécessairement conduire à des arrangements institutionnels formels. Toutefois, dans un certain nombre de cas, l’établissement d’une base formelle contribuerait non seulement à renforcer le concept de valeurs partagées dans le domaine des droits de l’homme, de l’État de droit et de la démocratie, mais également à éviter le risque de fragmentation et de division dans l’application des normes en Europe.
15. Par conséquent, s’agissant de développer la participation de l'Union européenne aux organes de suivi du Conseil de l'Europe, l'Assemblée appelle l'Union européenne:
15.1. à reprendre le processus de négociation en vue de son adhésion à la Convention européenne des droits de l'homme afin d'assurer la convergence des normes relatives aux droits de l'homme dans l'ensemble de l'Europe;
15.2. à adhérer à la Convention pénale sur la corruption (STE no 173) et accélérer les négociations sur sa participation au GRECO, en vue de contribuer à une meilleure coordination de la lutte contre la corruption en Europe.
16. Par ailleurs, la Résolution du Parlement européen sur un mécanisme de l'Union européenne pour la démocratie, l'État de droit et les droits fondamentaux confère aux parlements nationaux un rôle important dans le mécanisme envisagé et appelle à un dialogue interparlementaire renforcé entre le Parlement européen et les parlements nationaux. Comme le Parlement européen, l'Assemblée est convaincue que les parlements nationaux sont, en amont, bien placés pour identifier les lacunes et définir les indicateurs permettant de mesurer le respect des valeurs communes. Mais elle considère également que, en aval, le manque d'informations des parlements nationaux sur les recommandations formulées par les diverses institutions européennes dans le cadre des mécanismes de conformité de l’État de droit est préjudiciable à la consolidation du système de protection des droits de l’homme et de l’État de droit en Europe.
17. L’Assemblée considère qu’en tant que forum paneuropéen de dialogue interparlementaire, dont les textes adoptés fournissent des orientations aux gouvernements et aux parlements nationaux quant aux normes à promouvoir en Europe, elle pourrait être le lieu privilégié d'une interaction régulière entre les institutions de l'Union européenne et les délégations parlementaires nationales qui siègent à l'Assemblée. Ainsi, elle se tient prête à tenir un débat parlementaire annuel sur l’État de droit, qui offrirait un moment opportun pour rapprocher les décideurs et organes de contrôle européens des parlements nationaux.
18. En conséquence, l'Assemblée décide d’inviter l'Union européenne à coopérer à la mise en place d'un débat parlementaire annuel sur l'État de droit, en utilisant la tribune de l’Assemblée parlementaire, visant:
18.1. à permettre de mieux informer les parlements nationaux des conclusions et recommandations des divers rapports portant sur le respect par les États membres des normes relatives aux droits de l'homme, à l'État de droit et à la démocratie produits par le Conseil de l'Europe et l'Union européenne, et à contribuer ainsi à convertir les recommandations, avis et conclusions en politiques nationales de conformité;
18.2. à permettre aux parlements nationaux d'informer les institutions européennes sur leurs questions prioritaires;
18.3. à aider à créer un sentiment commun que la situation d’un pays n’est pas unique et que les mêmes problèmes sont partagés par d’autres.
19. L'Assemblée invite le Parlement européen à renforcer leur coopération mutuelle s’agissant de développer la dimension parlementaire des questions liées à l'État de droit.
20. Enfin, le développement de mécanismes de l'Union européenne concernant l'État de droit, les initiatives en cours et leurs implications pour le Conseil de l'Europe méritent une analyse et une réflexion plus approfondies au niveau de l'Assemblée elle-même en ce qui concerne l'impact potentiel sur son propre mode de fonctionnement en termes de compatibilité avec sa propre procédure de suivi des obligations et engagements souscrits par les États membres.

B. Projet de recommandation 
			(2) 
			Projet de recommandation
adopté à l’unanimité par la commission le 18 mars 2019.

(open)
1. L'Assemblée parlementaire, se référant à sa Résolution … (2019) «Création d’un mécanisme de l’Union européenne pour la démocratie, l’État de droit et les droits fondamentaux», se félicite de la coopération fructueuse entre l'Union européenne et le Conseil de l'Europe visant à assurer un meilleur respect des valeurs communes que sont les droits de l'homme, la démocratie et la prééminence du droit.
2. Elle rappelle que le Mémorandum d'accord conclu en 2007 entre les deux organisations établit des priorités communes en matière de coopération institutionnelle, qui se fondent sur un partenariat renforcé et une complémentarité et sont appelées à être mises en œuvre par des stratégies communes. En outre, le Mémorandum contient un engagement ferme des deux organisations à «établir des normes communes» afin de promouvoir une Europe sans clivages.
3. L'Assemblée note que les domaines de coopération définis par le Mémorandum d'accord ont été progressivement regroupés sous les piliers du dialogue politique, des activités conjointes et de la coopération juridique. En ce qui concerne la coopération juridique dans les domaines liés à l’État de droit, l’Assemblée constate que la Commission européenne et certains organes d’experts du Conseil de l’Europe ont pris diverses dispositions en matière de coopération visant à accroître l’échange et le partage d’informations, de connaissances et d’expériences, permettant ainsi de préserver la cohérence des normes de l'État de droit et la complémentarité des actions.
4. L'Assemblée considère toutefois que, compte tenu du contexte politique et institutionnel dans lequel les initiatives de l'Union européenne en matière d'État de droit sont prises et mises en œuvre, les questions liées à l'État de droit requièrent, outre une coopération juridique au niveau technique, que le Comité des Ministres intensifie son action politique.
5. Plusieurs initiatives et mécanismes de l'Union européenne visant à garantir que les États membres de l'Union respectent les normes de l'État de droit ont vu le jour ces dernières années. Ils impliquent différentes institutions, sont basés sur différents paradigmes et diffèrent par leur nature et leurs effets coercitifs. L'article 7 du Traité sur l’Union européenne a récemment été déclenché par la Commission européenne en ce qui concerne la Pologne et par le Parlement européen en ce qui concerne la Hongrie. Les évaluations fournies par divers organes d’experts du Conseil de l’Europe, qui reposaient sur des normes communes aux deux organisations, ont été largement utilisées pour appuyer les deux propositions.
6. L’Assemblée constate que le Traité de Lisbonne a modifié la base du dialogue politique entre les deux organisations, les relations de l’Union européenne avec le Conseil de l'Europe relevant depuis de la compétence du Haut Représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. Dans la mesure où celui-ci ne participe pas directement à l'élaboration et à la mise en œuvre des initiatives de l'Union européenne relatives à l'État de droit, l’Assemblée regrette que, avec la fin des réunions quadripartites, la voix du Conseil de l'Europe, représentée par la présidence du Comité des Ministres et le Secrétaire Général de l’Organisation, ne trouve plus à se faire entendre, sur ces questions, directement au plus haut niveau politique et institutionnel auprès de la Présidence de l’Union européenne et de la présidence de la Commission européenne.
7. Compte tenu du contexte actuel et malgré le fondement solide de la coopération juridique existante, l'Assemblée se déclare préoccupée par le fait qu'à long terme, la diversité des initiatives liées à l'État de droit impliquant différentes institutions de l'Union européenne risque de compromettre à la fois l'objectif déclaré dans le Mémorandum d’accord de garantir la cohérence du système normatif en Europe, ainsi que la complémentarité et l'efficacité des mécanismes de défense des valeurs partagées des droits de l'homme, de la démocratie et de la prééminence du droit, qui existent au niveau des deux institutions à l'égard des États membres à la fois du Conseil de l'Europe et de l'Union européenne.
8. L’Assemblée réaffirme les termes de sa Recommandation 2060 (2015) sur la mise en œuvre du Mémorandum d’accord entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne, dans laquelle elle soulignait que «l’objectif ultime du partenariat entre les deux organisations, fondé sur l’acquis et les atouts propres à chacune, est de poursuivre la construction d’un espace commun de protection des droits de l’homme et de garantir la cohérence des normes et le suivi de leur application en Europe» et, afin «d’assurer une coopération juridique approfondie, de renforcer la complémentarité et la cohérence des normes juridiques et d’offrir un cadre unique pour les droits de l’homme, la démocratie et l’État de droit en Europe (…) [a demandé au Comité des Ministres] d’assurer une coopération active avec l’Union européenne dans la mise en œuvre du nouveau cadre pour renforcer l’État de droit au sein des États membres de l’Union européenne [et] de continuer de développer des synergies appropriées entre les mécanismes et organes de suivi du Conseil de l’Europe et tout nouveau mécanisme d’évaluation que l’Union européenne mettra en place».
9. L’Assemblée, jugeant qu’il est fondamental de maintenir la primauté du Conseil de l'Europe dans l'évaluation du respect par les États membres de l'Union européenne des valeurs fondamentales communes, recommande au Comité des Ministres:
9.1. de faire régulièrement le point sur l'état d'avancement des différentes initiatives de l'Union européenne en matière d'État de droit et de les évaluer dans le contexte du Mémorandum d'accord et de ses objectifs de maintien de normes communes et de complémentarité;
9.2. de créer un organe de coordination spécifique chargé de faire rapport au Comité des Ministres de manière régulière sur la question susmentionnée;
9.3. de créer, compte tenu des compétences respectives des organisations, une approche plus intégrée de la prise de décision politique, qui impliquerait directement un dialogue avec l'institution de l'Union européenne concernée, chaque fois qu'une évaluation d'un État membre du Conseil de l'Europe et de l'Union européenne est réalisée s'il existe un risque d'infraction grave aux normes communes de l’État de droit ou si le manquement a été corrigé ou a cessé d’exister;
9.4. de promouvoir des garanties analogues à l'article 53 de la Charte des droits fondamentaux, selon lesquelles tout mécanisme de l'Union européenne relatif à l'État de droit doit veiller à ce que l'évaluation ou l'action de l'Union européenne ne portera pas atteinte aux procédures existantes relevant des mécanismes consultatifs ou de suivi du Conseil de l'Europe.

C. Exposé des motifs, par Mme Petra De Sutter, rapporteure

(open)

1. Introduction

1. Le 25 octobre 2016, le Parlement européen adoptait une résolution 
			(3) 
			P8_TA(2016)0409, mécanisme
de l'Union pour la démocratie, l'État de droit et les droits fondamentaux.
Voir également le rapport présenté par la Commission des libertés
civiles, de la justice et des affaires intérieures (Rapporteure: Sophia in 't Veld, ADLE) (A8_0283/2016), <a href='http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-%2f%2fEP%2f%2fNONSGML%2bREPORT%2bA8-2016-0283%2b0%2bDOC%2bPDF%2bV0%2f%2fFR'>www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-%2f%2fEP%2f%2fNONSGML%2bREPORT%2bA8-2016-0283%2b0%2bDOC%2bPDF%2bV0%2f%2fFR</a>; ainsi que le «European Added Value Assessment» préparé
par le service de recherche du Parlement européen (EPRS) (PE 579.328). <a href='http://www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/IDAN/2016/579328/EPRS_IDA(2016)579328_EN.pdf'>www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/IDAN/2016/579328/EPRS_IDA(2016)579328_EN.pdf</a>, et <a href='http://www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/IDAN/2016/579328/EPRS_IDA(2016)579328(ANN2)_EN.pdf'>www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/IDAN/2016/579328/EPRS_IDA(2016)579328(ANN2)_EN.pdf</a>. proposant que l’Union européenne crée un mécanisme complet, contraignant, à long terme et permanent pour superviser la situation de la démocratie, de l’État de droit et des droits de l’homme dans les 28 États membres et assurer le respect des valeurs fondamentales de l’Union européenne et l’exécution des traités européens. Ce mécanisme contraignant permettrait la définition, le suivi et la mise en œuvre des valeurs et principes consacrés à l’article 2 du Traité sur l’Union européenne (TUE) dans les États membres et au sein des institutions de l’Union.
2. Si une telle initiative est légitime et cohérente du point de vue de l'Union européenne, elle soulève des questions quant à sa portée et son contenu, notamment en ce qui concerne le cadre du Conseil de l'Europe, auquel le mécanisme proposé se réfère expressément. La commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles est chargée d'analyser les enjeux à ce stade, avant que le mécanisme ne soit mis en place, et d'évaluer l'impact que pourrait avoir le nouveau mécanisme de l'Union européenne recommandé par le Parlement européen. La commission devrait en particulier examiner toute duplication et contradiction éventuelles entre ce nouveau mécanisme et les mécanismes existants du Conseil de l'Europe, y compris les mécanismes de suivi de l'Assemblée parlementaire 
			(4) 
			La
rapporteure a effectué une visite d’information auprès des institutions
de l’Union européenne à Bruxelles le 27 novembre 2017 et a rencontré
la rapporteure du Parlement européen, Mme In
‘t Veld le 20 décembre 2017. Le 15 janvier 2019, la commission a
tenu une audition à Bruxelles avec la participation de M. Christos
Giakoumopoulos, Directeur Général des Droits de l’homme et de l’État
de droit, Conseil de l’Europe; M. Emmanuel Crabit, Directeur, Direction
C – Droits fondamentaux et État de droit, Direction Générale de
la justice et des consommateurs, Commission européenne; M. Ralph
Kaessner, Chef de l’unité Affaires horizontales, Justice et affaires
intérieures, Conseil de l’Union européenne, et M. Jonas Grimheden,
Senior Policy Manager, Coopération institutionnelle, Agence des
droits fondamentaux de l’Union européenne. La rapporteure exprime
ses vifs remerciements à ces experts pour leur disponibilité..

2. Le cadre actuel de l'Union européenne pour le suivi et l'application des valeurs et des principes de l'Union

2.1. Dispositions du Traité

3. Le cadre actuel de l'Union européenne pour le suivi et l'application par les États membres des valeurs et principes de l'Union repose principalement sur l'article 2 
			(5) 
			Article 2 TUE:
«L'Union est fondée sur les valeurs de respect de la dignité humaine,
de liberté, de démocratie, d'égalité, de l'État de droit, ainsi
que de respect des droits de l'homme, y compris des droits des personnes
appartenant à des minorités. Ces valeurs sont communes aux États
membres dans une société caractérisée par le pluralisme, la non-discrimination,
la tolérance, la justice, la solidarité et l'égalité entre les femmes
et les hommes.» et l'article 7 TUE, ce dernier prévoyant un mécanisme détaillé à cet égard.
4. L'article 7 TUE 
			(6) 
			Article
7 TUE: «1. Sur proposition motivée d'un tiers des États membres,
du Parlement européen ou de la Commission européenne, le Conseil,
statuant à la majorité des quatre cinquièmes de ses membres après
approbation du Parlement européen, peut constater qu'il existe un
risque clair de violation grave par un État membre des valeurs visées
à l'article 2. Avant de procéder à cette constatation, le Conseil
entend l'État membre en question et peut lui adresser des recommandations,
en statuant selon la même procédure. 
			(6) 
			Le Conseil vérifie
régulièrement si les motifs qui ont conduit à une telle constatation
restent valables. 
			(6) 
			2. Le Conseil européen, statuant
à l'unanimité sur proposition d'un tiers des États membres ou de
la Commission européenne et après approbation du Parlement européen,
peut constater l'existence d'une violation grave et persistante par
un État membre des valeurs visées à l'article 2, après avoir invité
cet État membre à présenter toute observation en la matière. 
			(6) 
			3.
Lorsque la constatation visée au paragraphe 2 a été faite, le Conseil,
statuant à la majorité qualifiée, peut décider de suspendre certains
des droits découlant de l'application des traités à l'État membre
en question, y compris les droits de vote du représentant du gouvernement
de cet État membre au sein du Conseil. Ce faisant, le Conseil tient
compte des conséquences éventuelles d'une telle suspension sur les
droits et obligations des personnes physiques et morales. 
			(6) 
			Les
obligations qui incombent à l'État membre en question au titre des
traités restent en tout état de cause contraignantes pour cet État.
(…)» comporte deux parties: un mécanisme de prévention et un mécanisme de sanction. Le mécanisme de prévention de l’article 7.1 TUE ne peut être utilisé que si le Conseil de l'Union européenne (ci-après «le Conseil») détermine un «risque clair de violation grave» des valeurs reconnues par l'article 2 TUE, tandis que le mécanisme de sanction prévu à l’article 7.2 TUE ne peut être activé qu’en cas de «violation grave et persistante» des valeurs par un État membre. Le mécanisme de prévention autorise le Conseil à alerter l’État concerné de l’Union européenne avant que la «violation grave» n’ait eu lieu. Le mécanisme de sanction autorise le Conseil à suspendre certains droits conférés par les traités à l’État membre concerné, y compris le droit de vote au Conseil 
			(7) 
			Par exemple, le 12
septembre 2018, le Parlement européen a adopté une résolution «relative
à une proposition invitant le Conseil à constater, conformément
à l’article 7(1) du Traité sur l’Union européenne, l’existence d’un
risque clair de violation grave par la Hongrie des valeurs sur lesquelles
l’Union est fondée». Lors de la réunion du Conseil des affaires générales
du 18 septembre 2018, le Conseil a officiellement reçu la demande
du Parlement européen d'ouvrir la procédure prévue à l'article 7(1).
Le 16 octobre 2018, le Conseil a ensuite demandé à la Commission
de fournir un aperçu des procédures d'infraction engagées contre
la Hongrie et aux autorités hongroises de fournir une déclaration
écrite sur les points soulevés dans la résolution du Parlement européen
avant la prochaine réunion du Conseil des affaires générales le
12 novembre 2018..
5. Il convient de noter qu’à son origine, le mécanisme de sanction visait potentiellement les candidats des États membres d’Europe centrale et orientale, étant donné qu’il était présumé que de multiples violations pourraient survenir dans les démocraties non consolidées, ce qui aurait compromis la stabilité de l’Union européenne. Cependant, l'introduction de l'article 7 a coïncidé avec la montée des partis populistes et nationalistes dans les «anciens» États membres à la fin des années 90 et au début des années 2000, ce qui a abouti à un consensus sur le fait que certaines actions seraient incompatibles avec les valeurs de l'Union européenne qu’elles soient entreprises par des «anciens» ou des «nouveaux» États membres 
			(8) 
			Sadurski, Wojciech.
«Adding Bite to a Bark: The Story of Article 7, EU Enlargement,
and Jörg Haider», Colum. J. Eur. L. 16
(2009): 385..
6. L'article 7 TUE instaure le (seul) dispositif juridiquement contraignant qui permet aux institutions de l’Union concernées d'agir dans des situations où il existe «un risque clair de violation grave» ou «une violation grave et persistante» par un État membre des valeurs visées à l'article 2 TUE. L'article 7 TUE prévoit une procédure lourde au Conseil qui serait extrêmement difficile, voire impossible, à lancer, en raison du seuil élevé requis pour son activation et sa mise en œuvre: elle est communément appelée «l'option nucléaire» puisqu'elle peut, finalement, entraîner la suspension de certains droits, y compris le droit de vote d'un État membre au Conseil.
7. Il existe donc des lacunes et des insuffisances dans le cadre juridique et politique de l'Union européenne existant entre les droits et les valeurs énoncés dans les Traités et les mécanismes visant à assurer leur respect effectif par les États membres 
			(9) 
			An EU mechanism on
Democracy, Rule of Law and Fundamental Rights, European Added Value
Assessment accompanying the legislative initiative report (EPRS-IDA(2016)579328_EN),
p. 11-17.. Cela est dû à la faiblesse du cadre juridique et politique existant de l'Union européenne en ce qui concerne la portée de la compétence de l'Union pour faire respecter les droits et les valeurs consacrés dans les traités; la répartition des responsabilités entre les institutions de l'Union européenne et entre les institutions de l'Union et les États membres; et l'absence d’un mécanisme d'application efficace. En fait, outre la procédure prévue à l'article 7 TUE, le respect des valeurs consacrées à l'article 2 TUE est assuré pendant le processus d'adhésion. L'article 49(1) TUE fixe les critères d'adhésion («critères de Copenhague»), que tout État demandeur doit s'engager à respecter. Actuellement, le respect des valeurs est contrôlé lors de l'adhésion d'un nouvel État membre, mais pas régulièrement par la suite: les pays candidats sont étroitement surveillés, mais pas les membres de l'Union européenne eux-mêmes. Alors que l'Union européenne est claire sur les conditions d'entrée dans l'Union, sur le respect de la démocratie, des droits de l'homme et de l'État de droit, elle est plutôt mal équipée pour remédier aux insuffisances dans ses propres États membres. C'est ce qu'on appelle le «dilemme de Copenhague». C'est pourquoi la Commission européenne et le Conseil ont développé leurs propres mécanismes, à mettre en œuvre en tant que mécanismes pré-article 7.

2.2. Le cadre pour l’État de droit de la Commission européenne

8. En 2014, la Commission européenne et le Conseil ont mis en place deux nouveaux mécanismes pour traiter les questions liées à l'État de droit: la Commission a adopté un nouveau cadre pour l'État de droit et le Conseil s'est engagé à organiser un dialogue annuel sur l'État de droit avec les États membres.
9. La Commission européenne 
			(10) 
			La Commission européenne,
en tant que gardienne des traités, a le devoir de surveiller et
d'évaluer la mise en œuvre correcte du droit de l'Union et le respect
des principes et objectifs consacrés dans les traités par les États
membres et par tous les institutions et organes de l'Union. a adopté son cadre pour l’État de droit le 11 mars 2014 
			(11) 
			Communication de la
Commission européenne au Parlement européen et au Conseil, «A new
EU Framework to strengthen the Rule of Law», COM/2014/0158 final,
19 mars 2014.. Ce cadre organise un dialogue structuré entre la Commission et un État membre, par étapes successives, dans les cas de «menace systémique à l'État de droit» et lorsqu'une telle situation échappe au droit de l’Union et ne peut donc pas être traitée par des procédures d'infraction à la Cour de justice de l'Union européenne (la CJUE examine la compatibilité des mesures prises au niveau national par les États membres pour appliquer ou se conformer au droit de l'Union). Ce processus comporte trois étapes:
  • une «évaluation de la Commission» (la Commission européenne recueille et examine toutes les informations pertinentes et évalue s'il existe des indications claires d'une menace systémique à l'égard de l'État de droit);
  • une «recommandation de la Commission» si la question n'a pas été résolue de manière satisfaisante, lorsque la Commission européenne recommande à l'État membre de résoudre les problèmes identifiés dans un délai déterminé, et informe la Commission des mesures prises à cet effet;
  • un «suivi de la recommandation de la Commission», où la Commission européenne surveille les suites données par l'État membre à la recommandation.
10. L'ensemble du processus repose sur un dialogue continu entre la Commission européenne et l'État membre concerné. En l'absence de suivi satisfaisant dans le délai imparti, la procédure prévue à l'article 7 TUE peut être déclenchée par une proposition motivée d'un tiers des États membres, du Parlement européen ou de la Commission.
11. La Commission européenne a déclaré que le Cadre, dont l’objectif était de résoudre les menaces à l’État de droit, visait également à contribuer à la réalisation des objectifs globaux du Conseil de l’Europe, dont les indicateurs pourraient être utilisés par la Commission pour évaluer le risque de menaces systémiques.
12. La Commission européenne a lancé pour la première fois ce «cadre pour l'État de droit» contre la Pologne le 13 janvier 2016. En décembre 2017, la Commission a présenté une proposition motivée de décision du Conseil européen relative à la détermination d’un risque clair de violation grave de l'État de droit. Le 1er mars 2018, le Parlement européen a voté en faveur d'une résolution soutenant la proposition de la Commission et invitant le Conseil à déterminer l’existence d’un risque que la Pologne viole gravement les valeurs de l'Union européenne. La question relève à présent du Conseil des affaires générales.

2.3. Le dialogue sur l’État de droit du Conseil européen

13. Le Conseil européen a adopté son «dialogue sur l'État de droit» le 16 décembre 2014; il offre l'occasion d'une discussion au niveau politique sur les questions d'État de droit une fois par an. En tant que débat, il ne débouche ni sur des recommandations spécifiques, ni sur des décisions politiques, ni sur aucune sorte de conclusions du Conseil. Il se déroule au niveau ministériel au sein du Conseil des affaires générales. Le premier dialogue a été organisé le 17 novembre 2015 sous Présidence luxembourgeoise, le deuxième dialogue le 24 mai 2016 sous la présidence néerlandaise et le troisième le 17 octobre 2017 sous la présidence estonienne (autour du thème «Pluralisme des médias et État de droit à l'ère numérique»). L'évaluation de l'expérience, réalisée par la présidence slovaque au Conseil (Affaires générales) le 15 novembre 2016, a confirmé que les États membres souhaitaient poursuivre et renforcer le dialogue. Un «dialogue» sur «la confiance dans les institutions publiques» s’est tenu le 12 novembre 2018 sous la présidence autrichienne.

2.4. Autres mécanismes

14. Différents mécanismes et outils juridiques non contraignants existent au niveau de l'Union européenne pour promouvoir, protéger et sauvegarder les valeurs de l'Union énoncées à l'article 2 TUE.
15. L'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne (FRA) a pour mandat de fournir aux institutions et aux États membres de l'Union européenne, lorsqu'ils mettent en œuvre le droit de l'Union européenne, une assistance et une expertise en matière de droits fondamentaux. La tâche principale de l'Agence est de collecter et de diffuser des données objectives, fiables et comparables sur la situation des droits fondamentaux dans tous les États membres de l'Union européenne dans le cadre du droit de l'Union. La FRA est également chargée de sensibiliser aux droits fondamentaux. Toutefois, l'Agence n'a pas compétence pour examiner des plaintes individuelles ni pour exercer des pouvoirs décisionnels en matière de réglementation 
			(12) 
			<a href='http://ec.europa.eu/justice/fundamental-rights/agency/index_en.htm'>http://ec.europa.eu/justice/fundamental-rights/agency/index_en.htm.</a>.
16. Le tableau de bord de la justice de l’Union européenne (EU Justice Scoreboard), un outil de la Commission européenne, publié pour la première fois en 2013, donne un aperçu annuel comparatif de la qualité, de l'indépendance et de l'efficacité des systèmes de justice dans l'Union européenne. Il vise à aider les États membres à améliorer l'efficacité de leurs systèmes de justice 
			(13) 
			<a href='http://ec.europa.eu/justice/effective-justice/scoreboard/index_en.htm'>http://ec.europa.eu/justice/effective-justice/scoreboard/index_en.htm.</a>. Le tableau de bord utilise principalement des données et la méthodologie de la Commission européenne pour l'efficacité de la justice (CEPEJ) du Conseil de l'Europe avec laquelle la Commission a conclu un contrat pour produire une étude annuelle spécifique.
17. Le Media Pluralism Monitor (MPM) est conçu pour identifier et évaluer les risques pour le pluralisme des médias et la liberté des médias dans les États membres. Il repose sur un ensemble de 20 indicateurs couvrant des domaines juridiques, économiques et socio-politiques. Le MPM est basé sur une étude indépendante financée par la Commission européenne sur les indicateurs du pluralisme des médias dans les États membres publiée en 2009. Elle est réalisée par le Centre pour le pluralisme des médias et la liberté des médias, un centre de recherche et de formation cofinancé par l'Union européenne 
			(14) 
			<a href='https://ec.europa.eu/digital-single-market/en/media-pluralism-monitor-mpm'>https://ec.europa.eu/digital-single-market/en/media-pluralism-monitor-mpm.</a>.
18. En 2011, la Commission européenne a adopté la communication sur la lutte contre la corruption dans l'Union européenne, établissant le rapport anticorruption de l'Union européenne pour suivre et évaluer les efforts des États membres dans ce domaine en vue d'un engagement politique plus fort pour lutter efficacement contre la corruption. Ce rapport fournit une analyse de la corruption au sein des États membres de l'Union et des mesures prises pour la prévenir et la combattre 
			(15) 
			<a href='https://ec.europa.eu/home-affairs/sites/homeaffairs/files/e-library/documents/policies/organized-crime-and-human-trafficking/corruption/docs/acr_2014_en.pdf'>https://ec.europa.eu/home-affairs/sites/homeaffairs/files/e-library/documents/policies/organized-crime-and-human-trafficking/corruption/docs/acr_2014_en.pdf.</a>. Il utilise les données recueillies par le Groupe d’États contre la corruption (GRECO).
19. Dans le cadre du cadre financier pluriannuel, la Commission européenne a présenté une proposition relative à la «conditionnalité de l’État de droit» afin de protéger le budget de l’Union européenne des risques financiers liés à des déficiences généralisées en matière d’État de droit dans les États membres. Selon les propositions, l'Union pourrait suspendre, réduire ou restreindre l'accès au financement de l'Union européenne d'une manière proportionnée à la nature, à la gravité et à la portée des carences.
20. Enfin, la Commission européenne soumet certaines questions à la Cour de justice dans le cadre de la procédure d’infraction. Par exemple, dans le cadre de la procédure d'infraction engagée par la Commission à l’encontre de la Pologne pour violations du droit de l'Union européenne liées aux mesures affectant le pouvoir judiciaire, la CJUE a adopté des mesures provisoires contraignant les autorités polonaises à suspendre l'application de la loi et les enjoignant de transmettre à la Commission des rapports mensuels sur toutes les mesures prises pour se conformer à cette décision. Des procédures similaires ont été lancées contre la Hongrie en ce qui concerne les lois sur les organisations non gouvernementales, l'asile et l'éducation.

3. Présentation du mécanisme recommandé par le Parlement européen

21. Le Parlement européen a soutenu la future mise en place d'un mécanisme plus approprié pour faire respecter et contrôler et les obligations du Traité concernant la démocratie, l'État de droit et les droits fondamentaux dans les États membres et dans les institutions européennes, en reconnaissant que les instruments existants et les mécanismes mis en œuvre à la fois par la Commission européenne et le Conseil ont une portée limitée.
22. La base juridique du mécanisme européen envisagé est un accord interinstitutionnel conclu sur la base de l'article 295 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), à savoir un «Pacte de l’Union pour la démocratie, l'État de droit et les droits fondamentaux» («Pacte DEF»). Ce Pacte DEF, sous la forme d'un accord interinstitutionnel, fixera «des dispositions facilitant la coopération entre les institutions de l’Union et ses États membres dans le cadre de l’article 7 du traité UE». Il vise à établir un mécanisme global et cohérent qui permettrait de combler le fossé entre les droits et les valeurs consacrés dans les Traités et le respect effectif de ces droits et valeurs, tout en intégrant, en alignant et en complétant les mécanismes existants.
23. Le Pacte tel que défini à l'article 1 du projet d'accord proposé par le Parlement européen prévoirait la définition, l'élaboration, la surveillance et l'application des valeurs essentielles et des principes fondateurs de l'Union, à savoir la démocratie, l'État de droit et les droits fondamentaux.
24. Le mécanisme est basé sur les principes suivants:
  • il s'agit d'un mécanisme permanent créé pour assurer le suivi permanent des États membres;
  • il devrait s'appliquer de manière égale à tous les États membres, qui devraient être évalués exactement selon les mêmes règles et normes objectives;
  • il devrait s'appuyer sur les instruments existants (il intégrerait les instruments et mécanismes existants de l'Union européenne), de sorte qu'il n'y aura ni duplication ni création d'un nouvel instrument;
  • il définit des critères clairs et non politiques pour l'évaluation des résultats des États membres de l'Union dans le domaine de la démocratie, de l'État de droit et des droits fondamentaux;
  • il devrait être basé sur des preuves.
25. Plus précisément, le mécanisme consistera en un rapport européen annuel DEF contenant des rapports et des recommandations spécifiques aux pays. Il serait élaboré et adopté par la Commission européenne avec l'aide d'un panel d'experts, sur la base d'un examen quantitatif et qualitatif des données et informations disponibles. Il serait transmis à d'autres institutions de l'Union européenne et aux parlements nationaux. Il serait composé d'observations générales et de rapports et de recommandations spécifiques à chaque pays. Il s'appuierait sur les sources existantes et les outils existants pour l'évaluation, la communication et le suivi des activités des États membres, telles que les contributions des États membres, les institutions et agences de l'Union européenne, la société civile, le Conseil de l'Europe – notamment la Commission de Venise, le GRECO, le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe et la CEPEJ – mais aussi d'autres organisations internationales telles que les Nations Unies, l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Le rapport serait élaboré avec un accent particulier sur 19 aspects (article 7 du projet d'accord).
26. Le panel d'experts sera composé de 28 experts indépendants (27 avec la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne) nommés par les parlements des États membres et de 10 experts nommés par le Parlement européen et choisis parmi une liste d'experts nommés par la Fédération européenne des académies nationales des sciences et des humanités (ALLEA), le Réseau européen des institutions nationales des droits de l’homme (REINDH), le Conseil de l'Europe (y compris la Commission de Venise, le GRECO, la CEPEJ, le Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe), et le Conseil des barreaux européens (CCBE), les Nations unies, l’OSCE et l’OCDE.
27. Les résultats du rapport européen DEF et les recommandations par pays seront abordés dans le cadre d'un débat interparlementaire et d'un débat au Conseil de l'Union européenne:
  • un débat interparlementaire annuel devrait être organisé par le Parlement européen sur la base du rapport européen DEF, qui conduira à l'adoption d'une résolution; ce débat interparlementaire s'inscrirait également dans un dialogue structuré pluriannuel entre le Parlement européen, les parlements nationaux, le Conseil et la Commission européenne, avec la participation des représentants de la société civile, de la FRA et du Conseil de l’Europe;
  • le Conseil de l’Union européenne devrait tenir un débat annuel sur la base de ce rapport, en s'appuyant sur son dialogue sur l'État de droit; il adopte des conclusions invitant les parlements nationaux à fournir une réponse au rapport et aux propositions ou réformes;
  • sur cette base, la Commission européenne peut décider de lancer une action en «violation systémique» au titre de l'article 2 TUE ou de l'article 258 TFUE (éventuellement avec plusieurs cas «regroupés» pour souligner le caractère systématique de la non-conformité); selon les résultats des rapports, il existe quatre scénarios possibles, en fonction de la gravité de la non-conformité 
			(16) 
			Voici quatre scénarios
possibles: l'État membre se conforme aux aspects énumérés à l'article
7 du projet d'accord, aucune autre action n'est alors nécessaire;
si l'État membre manque à un ou plusieurs des aspects énumérés à
l'article 7, la Commission européenne entame sans délai un dialogue
avec cet État membre, en tenant compte des recommandations par pays
(selon le mécanisme du cadre pour l'État de droit mis en place par
la Commission européenne). Troisième scénario, si l'État membre
est clairement exposé à un risque de violation grave des valeurs visées
à l'article 2 TUE et qu'il existe des motifs suffisants d'invoquer
l'article 7(1) TUE, le Parlement européen, le Conseil et la Commission,
discutent chacun de la question sans délai et prennent une décision
motivée, qui devrait être rendue publique. Dans le quatrième scénario,
il existe pour un État membre une violation grave et persistante,
à savoir en augmentation ou sans évolution pendant au moins deux
ans, des valeurs visées à l'article 2 TUE, et il existe des motifs suffisants
pour invoquer l'article 7(2), alors le Parlement européen, le Conseil
et la Commission devraient chacun discuter de la question sans délai
et chaque institution devrait prendre une décision motivée qui devrait
être rendue publique.;
  • après consultation du Parlement européen et du Conseil, la Commission européenne peut décider de soumettre une proposition d'évaluation de la mise en œuvre par les États membres des politiques de l'Union dans les domaines de la liberté, de la sécurité et de la justice conformément à l'article 70 TFUE 
			(17) 
			L'article 70 prévoit
un mécanisme d'examen par les pairs dans le domaine de la liberté,
de la sécurité et de la justice: «le Conseil, sur proposition de
la Commission, peut adopter des mesures établissant des modalités
par lesquelles les États membres, en collaboration avec la Commission,
procèdent à une évaluation objective et impartiale de la mise en œuvre,
par les autorités des États membres, des politiques de l'Union visées
au présent titre (…)»..
28. Un cycle de politiques pour la démocratie, l'État de droit et les droits fondamentaux (cycle politique DEF) au sein des institutions de l’Union leur permettra d'évaluer leur propre travail (application du droit de l'Union européenne entre autres) en ce qui concerne la conformité de la Commission européenne, du Conseil et du Parlement européen à la DEF. Cependant, il est intéressant de noter qu'aucune conséquence claire n'est prévue dans le mécanisme suite au manque de respect d'une institution de l'Union européenne pour le DEF.
29. Enfin, il convient de mentionner le rôle clé du «panel d'experts» indépendant dans le mécanisme envisagé: la décision de la Commission européenne de déclencher le «cadre pour l'État de droit» et la décision d’activer l'article 7 reposent toutes deux sur l’évaluation conduite par le panel indépendant. Par conséquent, le panel devrait offrir des garanties d'indépendance dans l'évaluation qui aboutit au rapport.
30. La proposition du Parlement européen pour un accord interinstitutionnel et le Pacte DEF est actuellement en discussion. Beaucoup s'interrogent sur la volonté de la Commission et du Conseil de conclure un tel accord, ainsi que sur la possibilité d'un suivi positif de la proposition 
			(18) 
			Une réunion interparlementaire
avec les membres des parlements nationaux, présidée par Mme In
't Veld, rapporteur du Parlement européen, s'est tenue à Bruxelles
le 22 juin 2017 sur le mécanisme. Le représentant de la Commission
a rappelé l'appui de la Commission concernant l'objectif général
du mécanisme et l'idée de définir plus avant les valeurs de l'Union,
mais aussi ses préoccupations concernant les notions d'examen par
les pairs et de rapports annuels, ou la duplication des documents. <a href='http://www.europarl.europa.eu/cmsdata/122081/1127861EN_June 21.pdf'>www.europarl.europa.eu/cmsdata/122081/1127861EN_June%2021.pdf.</a>. Tout en soutenant l'approche globale adoptée par le Parlement et se félicitant de l'idée d'un dialogue interparlementaire, la Commission émet de sérieux doutes quant à la nécessité, la faisabilité et la valeur ajoutée du mécanisme suggéré dans la résolution du Parlement européen. Le rôle central attribué à un panel d'experts indépendant soulève également des questions sérieuses de légalité, de légitimité institutionnelle et de responsabilité. En outre, il existe des préoccupations pratiques et politiques qui peuvent rendre difficile la recherche d'un terrain d'entente entre toutes les institutions concernées 
			(19) 
			Follow-up to the European
Parliament resolution with recommendations to the Commission on
the establishment of an EU mechanism on democracy, the rule of law
and fundamental rights, adopted by the Commission on 17 January 2017..
31. Depuis l'adoption du rapport, la Commission et le Conseil n'y ont donné aucune suite, faute d'un accord sur la mesure, notamment en raison de doutes quant à la légalité et à la nécessité d'une telle mesure.

4. Comment l'Union européenne envisage-t-elle l'implication du Conseil de l'Europe dans le mécanisme DEF?

32. Comme indiqué ci-dessus, le mécanisme proposé fait largement référence au Conseil de l'Europe. Les principales réalisations du Conseil de l'Europe (Convention européenne des droits de l'homme (STE no 5), jurisprudence de la Cour, conventions, recommandations, Commissaire aux droits de l'homme, Congrès des pouvoirs locaux et régionaux, GRECO, CEPEJ et Commission de Venise) sont citées dans la résolution du Parlement européen et dans la proposition annexée. La résolution demande également à la Commission de proposer un nouvel accord sur l'adhésion de l'Union européenne à la Convention européenne des droits de l'homme avant juin 2017.
33. En l'état actuel de la situation, l'Union européenne coopère déjà avec plusieurs institutions du Conseil de l'Europe. L'Union européenne a un statut spécial à la Commission de Venise. Le travail de la CEPEJ est déjà intégré dans le tableau de bord de la Justice de la Commission européenne. Bien qu’il existe une coopération étroite entre le GRECO et diverses institutions de l’Union européenne (par exemple, la Commission européenne et le Parlement européen) sur des situations spécifiques à un pays, l'Union européenne n'a toujours pas adhéré au GRECO malgré de nombreuses invitations à le faire, et ne participe pas en tant que telle aux réunions du GRECO.
34. Il ne fait aucun doute qu'un tel mécanisme, s'il devait être créé, aurait, en raison de son contenu et de sa portée, un impact clair sur le Conseil de l'Europe, son acquis normatif et les mécanismes d'application de ses conventions. En fait:
  • ce mécanisme fait référence à l'acquis du Conseil de l'Europe et inclut dans sa «base juridique» plusieurs conventions du Conseil de l'Europe – en particulier la Convention européenne des droits de l'homme et la Charte sociale européenne (révisée) (STE no 163) – à laquelle l'Union européenne n'est pas partie;
  • certains organes du Conseil de l'Europe seront appelés à collaborer avec l'Union européenne dans le cadre de ce mécanisme – la Commission de Venise, le GRECO, le Commissaire aux droits de l'homme, le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux et la CEPEJ. Les «rapports» réalisés par le Conseil de l'Europe, en particulier la Commission de Venise, le GRECO, le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux et la CEPEJ, ainsi que la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, seront incorporés dans le Rapport annuel DEF (articles 2 et 6 du projet d'accord).
35. En outre, le Conseil de l'Europe (Commission de Venise, GRECO et Commissaire aux droits de l'homme) serait habilité à désigner des candidats au panel d'experts désigné par le Parlement européen (article 8.1 du projet d'accord). Enfin, le Conseil de l'Europe ferait partie du débat interparlementaire annuel (article 10 du projet d'accord).
36. Par conséquent, la résolution sur le mécanisme DEF accorde une place importante au Conseil de l'Europe et tend à créer des synergies entre les deux organisations, au-delà de la contribution déjà fournie par le Conseil de l'Europe, bien que cette dernière ne soit pas toujours suffisamment reconnue 
			(20) 
			Le Conseil de l'Europe
pourrait agir à deux titres dans ses relations avec l'Union européenne.
D'une part, il s'agit d'une organisation internationale distincte
qui produit sa propre évaluation en fonction de ses critères et
de son mandat. D'autre part, le Conseil de l'Europe pourrait également
agir en tant que partenaire de l'Union. Dans la deuxième hypothèse,
son rôle est de fournir la base au processus décisionnel de l'Union
européenne en ce qui concerne les pays qui sont également des États
membres du Conseil de l’Europe..
37. Deux études commandées par la Commission européenne dans le cadre du rapport d’évaluation de la valeur ajoutée européenne (ci-après les «études EAVA») 
			(21) 
			Annex
I and Annex II to the European Added Value Assessment report: <a href='http://www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/IDAN/2016/579328/EPRS_IDA(2016)579328(ANN1)_EN.pdf'>www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/IDAN/2016/579328/EPRS_IDA(2016)579328(ANN1)_EN.pdf</a>; <a href='http://www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/IDAN/2016/579328/EPRS_IDA(2016)579328(ANN2)_EN.pdf'>www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/IDAN/2016/579328/EPRS_IDA(2016)579328(ANN2)_EN.pdf</a>. après l’adoption de la résolution par le Parlement européen ont mis en évidence certaines difficultés liées à l’implication du Conseil de l’Europe dans le mécanisme DEF. Si la conclusion de l'EAVA 
			(22) 
			<a href='http://www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/IDAN/2016/579328/EPRS_IDA(2016)579328_EN.pdf'>www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/IDAN/2016/579328/EPRS_IDA(2016)579328_EN.pdf.</a> en appelle toujours à promouvoir «les bonnes synergies» avec d'autres organisations internationales pour réduire les coûts opérationnels 
			(23) 
			Les coûts opérationnels
du mécanisme DEF ont été calculés à l'aide du modèle de la Commission
de Venise, dont le budget opérationnel annuel est estimé à 4 millions
d'euros, auquel il convient d'ajouter un salaire annuel moyen de 90 000 euros
pour chacun des 38 experts du panel., elle souligne également la difficulté d'utiliser des normes, sources, données, méthodes de traitement de données par d'autres institutions sans qu’un exercice méthodologique visant à rendre ces données comparables ait été préalablement effectué 
			(24) 
			Par exemple, la conclusion
de l'EAVA mentionne également qu'en l'absence de tels outils et
de formats comparables, le système d'information européen sur les
droits fondamentaux, actuellement mis en place dans le but de rassembler
les données existantes sur les États membres par les acteurs internationaux
n’aura que peu ou pas d'effet..
38. La principale préoccupation des études est que les organes consultatifs et de suivi du Conseil de l’Europe ne produisent pas de données de la manière requise par une évaluation de l’Union européenne. La résolution du Parlement européen suggère de mettre en place un tableau de bord DEF qui permettrait une image comparative globale de la conformité dans tous les États membres de l'Union européenne comme le tableau de bord de la justice de l'Union européenne, basé sur les données et la méthodologie de la CEPEJ.
39. Pour leur part, les procédures de suivi du Conseil de l'Europe sont spécifiques à chaque pays et sont conformes à différentes procédures et critères d'évaluation établis pour et par chaque organisme. Par conséquent, le chapitre 7 ci-après explore certaines pistes qui, si les deux organisations acceptaient d'aller plus loin, pourraient être développées par le biais d'études de faisabilité.

5. Aperçu global des procédures de collecte, d'évaluation et de suivi des données du Conseil de l'Europe

40. Lors de la réflexion sur la question des modalités de la participation du Conseil de l'Europe à divers mécanismes de l'Union relatifs à l'État de droit, il conviendrait de prendre en compte la raison d'être du Conseil de l'Europe, sa structure, les mécanismes existants et les procédures en usage au sein de ses différents organes.

5.1. Observations générales

41. Les valeurs de la démocratie, de l’État de droit et des droits des citoyens occupent dans le cadre institutionnel du Conseil de l’Europe et de l’Union européenne une place qui n’est pas similaire. Dans le cas du Conseil de l’Europe, ces valeurs ont été au centre de sa logique de fonctionnement depuis la création de l’Organisation. En outre, l'engagement à «reconnaître le principe de la prééminence du droit et le principe en vertu duquel toute personne placée sous sa juridiction doit jouir relevant des droits de l'homme et des libertés fondamentales» (article 3 du Statut (STE no 1)) constitue un engagement ferme que les États membres acceptent en devenant membre du Conseil de l'Europe.
42. Dans le cas de l'Union européenne, ce n'est qu’avec l'adoption du traité de Maastricht en 1992 que les droits de l'homme, l'État de droit et la démocratie ont été officiellement ajoutés à l'agenda de l'Union 
			(25) 
			Pendant
de nombreuses années, le Conseil de l'Europe et en particulier la
Cour européenne des droits de l'homme ont été considérés comme des
opérateurs suffisants en matière de protection des droits de l'homme
en Europe. Dès le début, la raison d'être initiale de l'Union européenne,
en tant qu'organisation internationale, était subordonnée à son objectif
d'intégration économique. Plus tard, lorsque l'Union européenne
a commencé à étendre ses compétences, le Conseil de l'Europe était
encore perçu comme un mécanisme approprié de protection des droits
de l'homme, en particulier dans les «anciens» États membres, étant
donné le système de protection unique qu’il avait établi sur le
continent européen et dont la cohérence aurait été ruinée si l'Union
européenne avait acquis plus de compétences dans le domaine des
droits de l'homme. Williams, Andrew J., EU
human rights policies: a study in irony. Oxford University
Press, 2004.. Même si le discours institutionnel a changé, faisant rétroactivement de la démocratie, de l'État de droit et des droits fondamentaux, des principes fondateurs de l'Union européenne, l'article 2 TUE ne constitue pas une expression d'intention mais plutôt une déclaration 
			(26) 
			Ibid.. Même aujourd'hui, la question du respect des droits de l'homme et des normes de l'État de droit est plutôt abordée par l'Union européenne dans la perspective d'une intégration économique rationnelle.
43. L'élargissement a eu un impact sur le fonctionnement des deux organisations qui y ont répondu en adoptant des approches légèrement différentes. L'Union européenne a fixé les critères de Copenhague, exigeant des pays souhaitant adhérer à se conformer aux valeurs avant leur adhésion. Il était entendu que le Conseil de l’Europe et la Cour européenne des droits de l’homme continueraient à s’assurer du respect par les «anciens» États membres des normes des droits de l’homme. De son côté, le Conseil de l’Europe a invité les États candidats à adhérer à l’Organisation à condition qu’ils souscrivent à un certain nombre d’engagements dont le suivi serait assuré après l’adhésion.
44. En outre, la logique institutionnelle et organisationnelle des deux organisations diffère – organisation internationale classique de coopération intergouvernementale pour le Conseil de l’Europe; organisation d’intégration supranationale pour l'Union européenne – ce qui a eu un impact sur la manière dont les procédures de suivi ont été effectuées et les mesures coercitives pour non-respect ont été mises en place.
45. Le Statut du Conseil de l'Europe prévoit des sanctions impératives en cas de non-respect des principes et valeurs de l'Organisation sous la forme de la suspension du droit de représentation d'un État membre ou, en dernier ressort, de l'expulsion de l'Organisation 
			(27) 
			Article 8 du Statut.
S’y ajoute la procédure spécifique prévue par l’Assemblée parlementaire
en cas de non-respect des obligations et engagements contractés
par les États membres.. Au niveau de l'Union européenne, l'option de l'expulsion a été écartée à partir de 1995 lors des négociations sur le mécanisme de l'article 7 TUE, craignant qu'elle pousse un État membre à quitter l'Union européenne. Toutefois, si l'article 7 TUE ne prévoit aucune sanction «ultime», les dispositions des traités de l'Union européenne investissent la Commission européenne d'un arsenal d'outils lui permettant d'exercer une action coercitive contre les États membres. Par conséquent, si le dialogue échoue, la Commission dispose d'outils institutionnels pour traduire les tensions entre les intérêts nationaux des États membres et l’Union européenne en une action judiciaire.

5.2. Activités de suivi du Conseil de l'Europe

46. Le Conseil de l'Europe dispose d'un nombre important d'organes habilités à collecter des données auprès des États membres, à évaluer le respect des engagements généraux et spécifiques par les États membres ou à formuler des observations et recommandations relatives à la gouvernance démocratique, à l'État de droit et aux droits de l'homme à l'attention des États membres. Seuls quelques-uns d'entre eux ont été mentionnés dans la résolution du Parlement européen sur le mécanisme DEF ou décrits dans les études EAVA, ce qui est loin de refléter la grande diversité des procédures dans le cadre du Conseil de l’Europe.

– Variété des organes de suivi

47. Nombre de ces organes de suivi ont été établis dans le cadre du suivi de conventions du Conseil de l'Europe (par exemple la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (STE no 126) ou la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales (STE no 157)), qui sont des traités internationaux. Dans le cas où des États membres de l'Union européenne y auraient adhéré avant leur adhésion à l'Union, les traités de l'Union européenne (article 351 TFUE) ne sont normalement pas concernés par les engagements découlant de ces traités. Ces engagements ne sont pas non plus incompatibles avec l'ordre juridique de l'Union européenne, auquel cas un État aurait mis fin à sa participation à une convention (article 351(2) TFUE). Par conséquent, il existe une forte présomption selon laquelle les résultats des mécanismes de suivi découlant des conventions du Conseil de l'Europe pourraient être pris en compte par le mécanisme DEF sans que soit soulevée la question d’un conflit éventuel entre les normes conventionnelles et l’ordre juridique de l’Union européenne.
48. En outre, le Conseil de l'Europe mène d’autres activités de suivi des normes de l’Organisation dans le cadre des compétences statutaires, plus spécifiquement mises en œuvre par les organes subordonnés créés par le Comité des Ministres dans un domaine thématique donné (article 17 du Statut) 
			(28) 
			<a href='https://rm.coe.int/ref/CM/Res(2011)24'>Resolution
CM/Res(2011)24</a>. Par exemple, le Comité directeur pour la cohésion sociale,
la dignité humaine et l'égalité (CDDECS), mentionné dans l'étude
EAVA, ou le Comité directeur pour les droits de l'homme (CDDH) et
le Comité directeur sur les médias et la société de l'information
(CDMS), le Comité européen pour les problèmes criminels (CDPC) et
le Comité européen sur la coopération juridique (CDCJ).. Les comités directeurs, dont le nombre varie en fonction des priorités du Conseil de l'Europe, collectent des données auprès des États membres sur la base desquelles ils font régulièrement rapport au Comité des Ministres et suggèrent éventuellement des mesures à prendre.
49. Le Comité des Ministres peut également établir des comités chargés de tâches plus spécialisées et agissant selon des procédures bien établies, tels que la CEPEJ et l'ECRI (tous deux mentionnés dans les études EAVA) 
			(29) 
			Par
exemple, l'ECRI surveille les situations dans les États membres
et formule des lignes directrices dans le domaine de la lutte contre
le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie, l'antisémitisme
et l'intolérance, tandis que la CEPEJ évalue la performance des
systèmes judiciaires des États membres sur la base de données fournies
et vérifiées par les États eux-mêmes..
50. Enfin, il existe au sein du Conseil de l'Europe une autre forme spécifique de coopération permettant aux seuls États membres intéressés à promouvoir un dialogue régulier sur une question spécifique: les accords partiels. La Commission de Venise et le GRECO sont des accords élargis (comprenant tous les États membres du Conseil de l’Europe mais s’étendant au-delà). Cependant, malgré son caractère quasi conventionnel, un accord partiel ou élargi n’est pas un traité international 
			(30) 
			<a href='https://www.coe.int/fr/web/conventions/about-partial-agreements'>www.coe.int/fr/web/conventions/about-partial-agreements.</a>. Cela dit, tout État devenant Partie à la Convention pénale et/ou civile sur la corruption (STE nos 173 et 174) est automatiquement membre du GRECO.
51. Ces organismes du Conseil de l'Europe utilisent les traités internationaux comme référentiel 
			(31) 
			Par exemple, le Comité
directeur pour la cohésion sociale, la dignité humaine et l'égalité
mentionné dans l'étude EAVA applique les normes établies par la
Charte européenne des langues régionales ou minoritaires (STE no 148),
la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales
(STE no 157), la Charte sociale européenne
(révisée), la Convention sur la lutte contre la traite des êtres
humains (STCE no 197), la Convention
sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus
sexuels (STCE no 201) et la Convention
sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes
et la violence domestique (STCE no 210). ce qui rend leurs évaluations vraisemblablement compatibles avec l'ordre juridique de l'Union européenne et, par conséquent, utilisables dans le contexte du mécanisme DEF.

– Champ géographique

52. Certains organes (à savoir les comités directeurs) sont composés de représentants des 47 États membres du Conseil de l’Europe. D’autres, en particulier les organes créés par des accords partiels ou des comités conventionnels, sont soit limités à un certain nombre d’États membres du Conseil de l’Europe (uniquement Parties à une convention), soit au contraire étendent leur appartenance à part entière à des États non européens. Les États-Unis participent sur un pied d’égalité aux réunions plénières du GRECO où les recommandations du GRECO sont discutées et adoptées. La Commission de Venise compte des membres de l'Algérie, de la Corée du Sud, des États-Unis, du Kirghizstan et du Mexique pour ne citer que quelques États non européens. Les experts des États non membres du Conseil de l'Europe participent sur un pied d'égalité aux travaux de la Commission de Venise.

– Procédures de suivi

53. Schématiquement, les mécanismes de suivi du Conseil de l'Europe comportent trois étapes: collecte de données, analyse analytique menant à des recommandations et suivi de la conformité aux recommandations.
54. Certains organes, généralement des comités directeurs, peuvent établir des recueils des dernières évolutions législatives ou pratiques administratives, ainsi que des boîtes à outils avec les meilleures pratiques concernant la mise en œuvre des normes du Conseil de l'Europe dans un domaine thématique donné. Plus un organisme est spécialisé, plus les moyens de collecte des données seront diversifiés et poussées et les procédures de traitement des données seront élaborées.
55. Le GRECO, qui est un organisme spécialisé dans la lutte contre la corruption, met en place des cycles d’évaluation dont chacun porte sur des questions thématiques (par exemple le financement des partis politiques). Des informations sur l'état actuel de la législation et des pratiques des États sont collectées sur place par le biais de sources officielles et d'autres parties prenantes. L'ECRI travaille à la fois sur des recommandations adressées à un pays donné et sur des recommandations générales adressées à tous les États membres.
56. Le mandat du Commissaire aux droits de l’homme, dont le bureau a été créé en tant que mécanisme préventif général pour traiter de manière proactive les problèmes de droits de l’homme avant qu’il y ait violation, ne se limite pas à des domaines spécifiques des droits de l’homme. Cependant, le suivi sur place dans les pays visités se limite généralement à un sujet spécifique ou à un groupe de sujets. Le commissaire assure le suivi de toutes les observations, recommandations ou jurisprudence relatives à un pays donné. Il en va de même de la commission de suivi de l’Assemblée parlementaire qui s'appuie, dans ses recommandations, sur des visites sur place mais aussi, dans une large mesure, sur des observations faites par d’autres organes spécialisés du Conseil de l’Europe (y compris sur les avis qu’elle peut elle-même demander à la Commission de Venise).
57. Une interaction aussi étroite que les mécanismes de suivi ont avec les acteurs nationaux permet d'aller au-delà de la simple collecte de données «linéaires», et permet ainsi l’élaboration, dans un deuxième temps, de recommandations plus détaillées. Les recommandations formulées à l'attention des États membres visent à améliorer le respect par les États membres des normes promues par le Conseil de l'Europe. Chaque année, une synthèse des observations opérées par les divers mécanismes de suivi sur l'état de la démocratie, de l'État de droit et des droits de l'homme dans les États membres figure dans un rapport du Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.
58. La troisième étape concerne le suivi des observations et des recommandations formulées. La manière dont les procédures de suivi sont organisées est également étroitement liée au mandat de chaque organe et à sa justification opérationnelle. Par exemple, le mandat de la Commission de Venise n'implique pas de vérifier le respect d'un avis qu’elle a rendu (bien qu’elle fournisse des informations publiques sur le suivi de ses avis).
59. Cependant, un certain nombre de mécanismes de suivi prévoient que le respect des recommandations soit évalué à l'aide d'une procédure de conformité (GRECO) ou d'un dialogue de suivi régulier (Comité consultatif de la convention-cadre). Dans certains cas, un organe compétent peut adopter une déclaration publique dans le cas où le non-respect d'un engagement par un État est flagrant (GRECO, Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT)) ou faire adopter ses recommandations par le Comité des Ministres. Certains organes de suivi pourraient effectuer des évaluations ad hoc.
60. Comme mentionné ci-dessus, ces mécanismes et procédures découlent de conventions ou d’accords que les États membres ont volontairement conclus et qu’ils se sont engagés à respecter de bonne foi. Toutefois, le Statut du Conseil de l’Europe ne permet pas à ces organes d’agir, ce qui conduirait à placer un État membre dans une position de subordination à un organe du Conseil de l’Europe; le Comité des Ministres étant l’organe statutaire de décision.

6. Mutualisation ou fragmentation?

61. Les relations entre le Conseil de l'Europe et l'Union européenne reposent sur le principe de la coopération et de la synergie. En conséquence, toute modification proposée à leur cadre respectif devrait être évaluée à la lumière de ces principes. Le paragraphe 12 du Mémorandum d'accord entre le Conseil de l'Europe et l'Union européenne (2007) souligne la nécessité de prendre en compte les avantages comparatifs, les compétences respectives et l’expertise des deux organisations, afin d'éviter les doubles emplois et de favoriser les synergies, de rechercher la valeur ajoutée et de faire un meilleur usage des ressources existantes.
62. Les précédents rapports de l'Assemblée concernant des initiatives antérieures de l'Union européenne pour mettre en place des mécanismes de surveillance du respect de l’État de droit ou des droits de l'homme ont mis en évidence le risque de doubles standards et de «forum shopping», ainsi que le risque de gaspiller des ressources budgétaires limitées lorsqu'un tel mécanisme existe déjà dans le cadre du Conseil de l'Europe à plusieurs niveaux 
			(32) 
			Les préoccupations
concernant la nécessité d’éviter toute duplication ont été soulevées
dans plusieurs rapports de l’Assemblée: le rapport sur «Les institutions
européennes et les droits de l'homme en Europe» (rapporteur: M. Michael McNamara,
Irlande, SOC), Doc. 13714, Résolution
2041 (2015) et la Recommandation
2065 (2015); le rapport «Agendas de l’Union européenne et du Conseil
de l'Europe en matière de droits de l'homme: des synergies, pas
des doubles emplois!» (rapporteur: M. Michael McNamara, Irlande,
SOC), Doc. 13321 et Recommandation
2027 (2013); le rapport sur «L’impact du Traité de Lisbonne sur
le Conseil de l’Europe» (rapporteure: Mme Kerstin
Lundgren, Suède, ADLE), Doc. 12713, Résolution
1836 (2011) et Recommandation
1982 (2011); le rapport «Nécessité d’éviter le chevauchement des
travaux du Conseil de l’Europe par l’Agence des droits fondamentaux
de l’Union européenne» (rapporteur: M. Boriss Cilevičs, Lettonie,
SOC), Doc. 12272, Résolution
1756 (2010) et Recommandation
1935 (2010).. Les cas où l'Union européenne, une fois qu'elle a acquis le pouvoir de légiférer dans un domaine donné, demandait à ses États membres de s'abstenir de participer aux conventions du Conseil de l'Europe ont également été abordés 
			(33) 
			Rapport sur «Défendre
l’acquis du Conseil de l'Europe: préserver le succès de 65 ans de
coopération intergouvernementale» (rapporteur: M. Tiny Kox, Pays-Bas,
GUE), Doc. 13322, Recommandation
2114 (2017)..
63. Cependant, malgré une attitude déclarative d'ouverture au droit international, l'Union européenne, en termes d'action concrète, reste souvent cloisonnée dans son propre système en mettant en avant l'argument de l'autonomie du droit de l'Union. Un coup d’œil à la jurisprudence de l’Union européenne ces dernières années révèle qu’il s’agit d’une tendance à la hausse. Par exemple, les conditions relatives à l'effet direct des traités internationaux et du droit coutumier sur le droit de l'Union européenne ont été renforcées et la possibilité de déroger au droit de l'Union européenne pour les accords de préadhésion a été réduite 
			(34) 
			Ziegler, Katja S. «The
relationship between EU law and international law.» A Companion to European Union Law and International
Law (2015): 42-61..
64. Si cette tendance se poursuivait, cela accroîtrait le risque de conflits entre les engagements des États membres en ce qui concerne les principes fondateurs du Conseil de l'Europe et de l'Union européenne. Par exemple, les travaux du Comité européen de coopération juridique du Conseil de l'Europe visant à codifier les normes internationales existantes relatives aux conditions dans lesquelles les migrants sont placés en détention administrative se sont arrêtés lorsque le comité a demandé conseil au Comité des Ministres sur la marche à suivre en ce qui concerne l'interprétation proposée par la Commission européenne de certains concepts fondamentaux liés à la détention, une interprétation qui, de l'avis du comité, impliquerait d'omettre des normes essentielles existantes de l'instrument. Par conséquent, les valeurs communes à l’ensemble du continent européen, telles que la démocratie, l’État de droit et les droits fondamentaux, risquent d’être interprétées de manière autonome par l’Union européenne et le Conseil de l’Europe, respectivement, en créant ainsi une ligne de séparation à l’intérieur du continent européen.
65. Par le passé, l’Union européenne a coopéré avec le Conseil de l'Europe pour évaluer la conformité des pays candidats à l'Union européenne avec les principes de la démocratie, de l'État de droit et des droits fondamentaux. Par exemple, à la fin des années 90, préoccupée par les conséquences du conflit violent dans les Balkans, l'Union européenne a utilisé les textes du Conseil de l'Europe, en particulier la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales, comme références pour les pays candidats. Par la suite, le plan d’action «Agenda 2000», dont l’objectif était de développer les politiques de l’Union au tournant du siècle, a créé des domaines d’investigation thématiques pour les pays candidats – la démocratie et la primauté du droit; droits de l'homme et respect des minorités – dont la base et la méthodologie prévoyaient la possibilité de recourir à l'évaluation d'autres organisations internationales, y compris le Conseil de l'Europe.
66. Des exemples plus récents d'engagement institutionnel de la part de l'Union européenne en faveur d'une collaboration et d'une synergie accrues entre les deux organisations existent. Ainsi, la Commission européenne reconnaît que la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, ainsi que les documents élaborés par le Conseil de l’Europe, définissent le sens fondamental de l’État de droit comme une valeur commune de l’Union européenne conformément à l’article 2 TUE 
			(35) 
			COM/2014/0158
final, op. cit. paragraphe
2.. La Commission s'est engagée à demander l'avis du Conseil de l'Europe et/ou de la Commission de Venise sur une expertise et à aligner son analyse sur eux (par exemple, le GRECO) dans tous les cas où la question est également à l'examen et à l'analyse.
67. Il est donc important de veiller à ce que, si l'élaboration du mécanisme DEF ou toute autre initiative de l'Union européenne visant à contrôler le respect de l'État de droit se poursuivait, la dynamique d'une plus grande implication du Conseil de l'Europe dans l'évaluation du respect par les États membres de l'Union européenne des valeurs fondatrices, examinée par la Commission européenne et soutenue par la résolution du Parlement européen, ne soit pas inversée. Dans cet esprit, que le mécanisme DEF voit ou non le jour, une réflexion analytique conjointe serait souhaitable, si ce n’est indispensable, afin d'éviter une fragmentation de la compréhension des valeurs fondamentales du continent européen.
68. Les pourparlers sur le Brexit ont également suscité des discussions sur un certain nombre de questions épineuses, notamment la question de savoir si et comment les normes relatives aux droits de l’homme et à l’État de droit seront touchées par la loi de retrait de l’Union européenne. Le Livre Blanc sur le projet de loi de Grande Abrogation publié en mars 2017 par le Gouvernement britannique indiquait clairement que, même si l'acquis en matière de droits de l'homme résultant de l'application de la législation européenne allait être préservé, la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne allait être supprimée de la législation britannique et les tribunaux nationaux ne seraient pas liés par les nouvelles décisions de la Cour de Luxembourg. Cependant, le Human Rights Act de 1998, qui protège les droits civils et politiques fondamentaux, similaires à ceux énoncés dans la Convention européenne des droits de l'homme, continuera de s'appliquer après le Brexit.
69. Pour le moment, il est difficile de prévoir l'évolution des normes dans le domaine des droits de l'homme après l'entrée en vigueur du Brexit. Le projet d’accord sur le retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne contient un article exigeant la non-régression des normes sociales et de travail communes existantes définies par l’Union et le Royaume-Uni. Cependant, la manière dont les fondements communs doivent être établis et maintenus si le droit de l'Union ne s'applique plus n’est toujours pas claire. Par conséquent, les préoccupations concernant l’affaiblissement des normes existent toujours. D'autres voix affirment que ces préoccupations sont largement surestimées et le fait que la primauté et l'effet direct du droit de l'Union européenne soient supprimés offrirait même la possibilité de développer des normes plus élevées et mieux adaptées. Il est également prétendu que l'abrogation de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, critiquée pour attribuer trop de pouvoirs aux juges, contribuerait également à renforcer la responsabilité du gouvernement et l'autonomie démocratique, contribuant ainsi à renforcer les normes de l’État de droit 
			(36) 
			O'Cinneide, Colm. «Brexit
and Human Rights» (2018), British Institute of International and
Comparative Law..
70. Par conséquent, la discussion sur des différents mécanismes de l’Union visant à préserver les valeurs fondatrices ainsi que les pourparlers du Brexit représentent une excellente occasion de lancer un débat sur la manière d’élaborer des normes fondamentales dans le domaine de la démocratie, de l’État de droit et des droits de l’homme qui pourraient survivre à des contextes politiques tumultueux. S'il est reconnu que certaines normes ne sont pas une création d'un organisme supranational mais sont déjà devenues des normes nationales en raison de leur application durable dans le système national, cela pourrait potentiellement atténuer les conséquences des mouvements politiques et institutionnels.

7. Contribution éventuelle du Conseil de l'Europe à un futur mécanisme de l'État de droit de l'Union européenne: du partenariat stratégique à une coopération structurelle

71. Depuis le Mémorandum d'accord de 2007, le Conseil de l'Europe et l'Union européenne ont développé un partenariat stratégique fondé sur des valeurs communes. Aujourd’hui, les deux organisations partagent la responsabilité de maintenir l’efficacité de leurs cadres juridiques respectifs, en veillant notamment à ce que des compétences qui se chevaucheraient ne créent pas de conflit.
72. Un certain nombre d'initiatives ont déjà été prises. Par exemple, un accord de coopération entre le Conseil de l'Europe et la Commission européenne encadre la coopération entre cette dernière et l'Agence des droits fondamentaux (FRA) par le biais de mécanismes institutionnels garantissant le maintien de la cohérence des approches. Cela comprend les contacts étroits entre le personnel des deux institutions, la participation du Conseil de l'Europe aux comités exécutifs et de direction de la FRA, par l'intermédiaire de sa personnalité indépendante, l'échange annuel entre le Conseil de l'Europe et le conseil d'administration sur la coopération, l’échange entre le directeur de la FRA et un groupe du Comité des Ministres (GREXT), ainsi que des projets communs. À cet égard, la mise en place par la FRA d'un système d'information sur les droits fondamentaux de l'Union européenne (EFRIS) contribuera à une utilisation plus systématique des évaluations des engagements pris par les pays envers le Conseil de l'Europe. En outre, la contribution du Conseil de l’Europe aux initiatives actuelles de l’État de droit de l’Union européenne, notamment avec les avis de la Commission de Venise, a déjà fait ses preuves. L'évaluation effectuée par divers organes du Conseil de l'Europe a été utilisée par les institutions de l'Union européenne dans plusieurs pays.
73. Les propositions ci-dessous décrivent certaines actions concrètes qui, à long terme, conduiraient à supprimer ou réduire le risque de doubles normes, tant pour les indicateurs de référence que pour les conclusions finales, dans les domaines des droits de l'homme, de la démocratie et de l'État de droit.

7.1. Mise en place d’indicateurs de référence à l'échelle européenne

74. Tout mécanisme de l’Union européenne relatif à l'État de droit devrait être une opportunité d'utiliser, de renforcer et de soutenir la mise en œuvre effective des «normes de l'État de droit» du Conseil de l'Europe, y compris la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, les recommandations pertinentes du Comité des Ministres, les normes et avis de la Commission de Venise (y compris la «Liste des critères de l’État de droit»), les avis et/ou conclusions des organes consultatifs ou de suivi du Conseil de l’Europe concernés, et devrait être complété par tout document pertinent de l’Union européenne.
75. De son côté, le Conseil de l'Europe devrait être disposé à coopérer avec l'Union européenne pour définir les indicateurs à utiliser par une initiative de l'Union européenne dans le domaine de l'État de droit dans le but d'assurer une cohérence. Les normes convenues dans le cadre de la coopération entre pairs assureraient un meilleur changement de conformité au niveau national, tout en renforçant la coopération globale du Conseil de l'Europe et de l'Union européenne.

7.2. Division globale des compétences

– Clause de sauvegarde

76. Au minimum, tout mécanisme de l’Union européenne relatif à l'État de droit devrait comporter certaines garanties, notamment une disposition indiquant que l'évaluation ou l'action de l'Union européenne n'affectera pas les procédures existantes découlant des mécanismes consultatifs ou de suivi du Conseil de l'Europe, à l'instar de l'article 53 de la Charte des droits fondamentaux.

– Séparation de l'évaluation juridique/technique et de la décision politique

77. L’initiative d’une action politique en cas de non-respect présumé du cadre juridique de l’Union européenne incomberait à l’Union européenne, le Conseil de l’Europe offrant une évaluation juridique et technique dans le respect des compétences de ses organes consultatifs ou de suivi. Cependant, il serait préférable que l'Union européenne, lorsqu'elle évalue si le manquement à l'État de droit a été corrigé ou a cessé d'exister, se coordonne avec les instances compétentes du Conseil de l'Europe qui ont rendu l'avis ou la recommandation afin d'assurer la cohérence des points de vue et d’éviter les doubles normes.

7.3. Référence aux conclusions des mécanismes consultatifs ou de suivi du Conseil de l'Europe dans les documents de l'Union européenne

78. Ainsi que l’a suggéré Jean-Claude Juncker dans son rapport de 2006 «Conseil de l’Europe-Union européenne: une même ambition pour le continent européen», il semble «approprié qu’au sein des instances de l’Union européenne, l’esprit de l’article 6.2 du Traité sur l’Union européenne, sur lequel est fondée la coopération avec le Conseil de l’Europe, se concrétise par une règle de travail stipulant que les arrêts, rapports, conclusions, recommandations et avis issus des mécanismes de suivi précités: 1. soient systématiquement considérés comme la première référence continentale en matière de droits de l’homme; 2. soient explicitement cités comme référence dans les documents produits par ces instances de l’Union européenne».
79. Par conséquent, il serait vivement recommandé que, lorsqu'ils sont disponibles, les avis ou recommandations des organes consultatifs ou de suivi du Conseil de l'Europe alimentent toujours l'évaluation des institutions de l'Union européenne afin de déterminer si des problèmes liés à l'État de droit se posent, ainsi que d’orienter les propositions pour toute action à entreprendre.

7.4. Introduction d'une demande d'action ad hoc par un organe consultatif ou de suivi à la demande d'une institution de l'Union européenne

80. Dans le cadre de son évaluation des droits de l'homme, de la démocratie et de l'État de droit, une institution de l'Union pourrait demander l'avis ou la recommandation d'un organe consultatif ou de suivi du Conseil de l'Europe sur un pays donné ou un sujet donné. Toutefois, si une recommandation ou un avis n'est pas disponible à ce moment-là, soit parce qu'un document n'a pas encore été rendu public, soit qu'une évaluation par l'organisme concerné n'a pas été réalisée dans les délais impartis, l'institution de l'Union européenne devrait être autorisée, sous certaines conditions, à demander une telle action (par exemple, une évaluation, une recommandation ou un rapport) par un organe du Conseil de l'Europe. Une telle possibilité existe déjà dans certains cas; dans d'autres cas, des modèles de coopération particuliers devraient être mis au point. Il serait utile d’élaborer un guide spécial dans lequel seraient précisés les modes de coopération et les compétences et capacités des organes.

7.5. Participation de l'Union européenne aux traités et organes de suivi du Conseil de l'Europe

– Participation de l'Union européenne aux traités du Conseil de l'Europe

81. Dans la Recommandation 2114 (2017) «Défendre l’acquis du Conseil de l'Europe: préserver le succès de 65 ans de coopération intergouvernementale», l’Assemblée évoquait l’opportunité d’établir «un mémorandum d’accord entre l’Union européenne et le Conseil de l’Europe sur la participation de l’Union européenne aux conventions du Conseil de l’Europe, de nature à fournir une série de règles de fonctionnement générales (telles que le droit de vote, le droit de parole, l’élaboration des rapports et les arrangements financiers)».
82. L'Union européenne a été associée, ces dernières années, à l’élaboration et à la négociation de certains traités du Conseil de l'Europe, dans le but d’assurer une meilleure cohérence des normes juridiques. Toutefois, l’Union européenne, en tant qu’institution, n’est pas Partie aux conventions du Conseil de l'Europe. La procédure d’élaboration des traités du Conseil de l’Europe doit faire l’objet de certains ajustements de procédure et de fond afin de permettre une pleine participation de l’Union, en tant qu’institution, aux traités du Conseil de l’Europe. Si un tel ajustement doit être effectué, il doit inclure une garantie que le rôle des experts nationaux et leur expertise soient préservés.
83. Ainsi que cela a été déclaré à plusieurs reprises, seule l'adhésion de l'Union européenne à la Convention européenne des droits de l'homme peut assurer la convergence des normes des droits de l'homme dans toute l'Europe. Depuis l'avis 2/13 de la Cour de justice, les institutions et les présidences de l'Union européenne ont poursuivi leur engagement en faveur de l'adhésion sans toutefois présenter de propositions concrètes. Le Conseil de l'Europe est pour sa part prêt à entamer d'éventuelles négociations, que l’Assemblée appelle également de ses vœux 
			(37) 
			Voir les textes les
plus récents adoptés par l’Assemblée: la Recommandation 2114 susmentionnée, la Résolution 2041
(2015) et la Recommandation
2065 (2015) sur les institutions européennes et les droits de l'homme
en Europe, la Recommandation
2060 (2015) et la Résolution
2029 (2015) sur la mise en œuvre du Mémorandum d’accord entre le Conseil
de l’Europe et l’Union européenne, la Résolution 1836 (2011) et la Recommandation
1982 (2011) sur l’impact du Traité de Lisbonne sur le Conseil de
l’Europe, la Recommandation
1834 (2008) sur l’adhésion de l’Union européenne/Communauté européenne
à la Convention européenne des droits de l’homme..

– Participation de l'Union européenne aux organes de surveillance du Conseil de l'Europe

84. L'Union européenne participe déjà à un certain nombre d’organes du Conseil de l'Europe 
			(38) 
			<a href='https://rm.coe.int/CoERMPublicCommonSearchServices/DisplayDCTMContent?documentId=09000016805970c0'>https://rm.coe.int/CoERMPublicCommonSearchServices/DisplayDCTMContent?documentId=09000016805970c0.</a>. Elle est membre de la Pharmacopée européenne et de l'Observatoire européen de l'audiovisuel; la Commission européenne participe aux réunions de la Commission de Venise; et les discussions sur la participation de l’Union européenne au GRECO se poursuivent. Une participation accrue de l'Union européenne aux organes consultatifs ou de suivi du Conseil de l'Europe, conformément à des modalités à définir et pouvant varier d'un organe à l'autre, renforcerait la cohérence des approches adoptées par les organisations respectives en ce qui concerne les questions communes relatives à l'État de droit (et) dans des pays spécifiques.

7.6. Dialogue renforcé avec les parlements nationaux

85. La résolution du Parlement européen sur le mécanisme DEF confère aux parlements nationaux un rôle important dans l’identification des lacunes et la définition des indicateurs du mécanisme. La Commission européenne est également favorable à un dialogue interparlementaire entre le Parlement européen et les parlements nationaux. Il est généralement reconnu que les parlements nationaux doivent être mieux informés des résultats de divers rapports sur le respect par leur pays des normes relatives aux droits de l'homme, à l'État de droit et à la démocratie, mais aussi être capables de convertir ces rapports en politiques nationales de conformité de l’État de droit et des droits de l'homme.
86. Le débat en cours sur un mécanisme d’État de droit offre une occasion opportune de rapprocher les décideurs et les organes de contrôle européens des parlements nationaux. Si le manque d'informations dans les parlements nationaux sur les recommandations des diverses institutions européennes est souvent cité comme un inconvénient du système de conformité de l'État de droit, le problème pourrait être partiellement résolu par le biais d'un débat parlementaire annuel sur l'État de droit organisé par l'Assemblée parlementaire conjointement avec les institutions de l'Union européenne. Le double avantage de cet exercice serait une coordination plus étroite entre le Conseil de l'Europe et l'Union européenne ainsi que la possibilité d'informer les parlementaires nationaux des recommandations et propositions de réformes en cours. L’Assemblée parlementaire est déjà un forum réunissant des parlementaires nationaux représentant tous les horizons politiques.

8. Conclusions

87. Deux ans et demi après son adoption, aucune initiative concrète n’a été entreprise par les institutions européennes (Conseil et Commission) pour donner effet à la résolution du Parlement européen et préparer l’accord interinstitutionnel qu’il appelait de ses vœux. C’est ce que le Parlement européen regrette, dans la résolution qu’il a adoptée le 14 novembre 2018 et par laquelle il entend bien relancer le processus 
			(39) 
			Résolution du Parlement
européen du 14 novembre 2018 sur la nécessité d’un mécanisme approfondi
de l’Union pour la protection de la démocratie, de l’État de droit
et des droits fondamentaux (TA-PROV(2018)0456), <a href='http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//NONSGML+TA+P8-TA-2018-0456+0+DOC+PDF+V0//FR'>www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//NONSGML+TA+P8-TA-2018-0456+0+DOC+PDF+V0//FR</a>..
88. Il existe actuellement plusieurs initiatives en matière d'État de droit dans l'Union européenne, qui sont conduites par différentes institutions, ont des dynamiques différentes et sont basées sur des paradigmes différents. Cependant, certains points convergents peuvent déjà être identifiés, par exemple l'implication accrue des parlements nationaux, ce qui offre à l'Assemblée une occasion de fournir une plate-forme pour un débat européen sur l'État de droit.
89. Le Conseil de l'Europe a été amplement évoqué lors du débat sur les initiatives de l'Union européenne en matière d'État de droit. Il est important de veiller à préserver la dynamique d'une plus grande implication du Conseil de l'Europe dans l'évaluation des États membres de l'Union européenne, que ce soit par le biais d'experts ou par l'établissement d'un socle commun de normes.
90. Une coopération plus étroite, qui pourrait être réalisée par une série d'actions ciblées, constituerait une garantie de cohérence entre les systèmes juridiques. En outre, les discussions en cours sur le respect des droits de l'homme par le Royaume-Uni après le Brexit plaident en faveur d'un dialogue renforcé entre le Conseil de l'Europe et l'Union européenne dans l’optique de préserver le système cohérent de protection des droits de l'homme pour l'Europe dans son ensemble.
91. Le développement des outils et mécanismes au sein de l’Union européenne concernant l’État de droit, les procédures en cours et leurs implications sur le Conseil de l'Europe méritent une analyse et une réflexion approfondies au niveau de l’Assemblée elle-même s’agissant de l’impact potentiel sur son mode de fonctionnement en termes de compatibilité des procédures de suivi du respect des normes et valeurs par les États membres.