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Rapport | Doc. 15681 | 09 janvier 2023

Le Sommet de Reykjavik du Conseil de l'Europe: Unis autour de valeurs face à des défis hors du commun

Commission des questions politiques et de la démocratie

Rapporteure : Mme Fiona O'LOUGHLIN, Irlande, ADLE

Origine - Renvoi en commission: Doc. 15533, Renvoi 4650 du 31 mai 2022. 2023 - Première partie de session

Résumé

L’Europe est confrontée à des défis extraordinaires.

Le retour d’une guerre d’agression à grande échelle en Europe souligne que la solidité et la résilience des démocraties européennes, leur respect des droits humains et leur adhésion à l’État de droit sont les meilleures garanties pour la prospérité, la sécurité et l’avenir pacifique de chacune d’entre elles. Les États membres du Conseil de l’Europe, représentés par leurs chef·fe·s d’État et de gouvernement au Sommet de Reykjavik, devraient réaffirmer leur unité autour de valeurs communes et leur engagement indéfectible en faveur du multilatéralisme fondé sur le droit international.

Tout en exprimant son soutien ferme à l’Ukraine et en veillant à ce que la Fédération de Russie soit tenue responsable de ses actes, le Sommet devrait définir un programme tourné vers l’avenir pour le Conseil de l’Europe, replaçant les intérêts, les préoccupations et les attentes des citoyen·e·s au premier plan de la mission de l’Organisation, y compris leur droit à un environnement sain et la lutte contre le changement climatique.

A. Projet de recommandation 
			(1) 
			Projet
de recommandation adoptée à l’unanimité par la commission le 13
décembre 2022.

(open)
1. L’Europe fait face à des défis hors du commun. L'agression de grande envergure, prolongée et brutale de la Fédération de Russie contre l'Ukraine est un affront à tous les principes défendus par le Conseil de l’Europe et aux fondements mêmes de l’architecture multilatérale européenne édifiée pour éviter que les atrocités de la seconde guerre mondiale ne se répètent.
2. Le retour d’une guerre d’agression à grande échelle en Europe démontre la solidité et la résilience des démocraties européennes, leur respect des droits humains et leur adhésion à l’État de droit sont les meilleurs garants de la prospérité, de la sécurité et de l’avenir pacifique de chacun. Dans ce moment crucial de l’histoire européenne, les États membres du Conseil de l’Europe se doivent, au plus haut niveau politique, de réaffirmer leur unité autour de ces valeurs communes et leur attachement indéfectible au multilatéralisme fondé sur le droit international.
3. L’Assemblée parlementaire se félicite par conséquent de la décision du Comité des Ministres de convoquer le 4e Sommet des chefs d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe à Reykjavik les 16 et 17 mai 2023. Elle salue les efforts déployés par les présidences irlandaise et islandaise du Comité des Ministres pour parvenir à ce résultat et remercie vivement la Secrétaire Générale pour le rôle qu’elle a joué, et en particulier pour son initiative de créer, à l’invitation du Comité des Ministres, un groupe de réflexion de haut niveau. L’Assemblée accueille avec satisfaction le rapport de ce groupe, qui apporte une contribution majeure à la réflexion en cours pour préparer le Sommet, et valide ses orientations générales et ses principales propositions.
4. Si l’Ukraine et les Ukrainien·ne·s sont les victimes directes de l’agression illégale, injustifiée et injustifiable de la Fédération de Russie, les répercussions de celle-ci sont mondiales. Les Européen·ne·s ont commencé à payer le prix de la guerre, avec l’augmentation du coût de la vie et la récession économique imminente qui affectera leurs vies alors qu’ils se remettent tout juste des premières vagues de la pandémie de covid-19. Ceci risque d’éroder davantage la confiance dans la démocratie et les institutions publiques, accentuant ainsi une tendance négative observée depuis quelques années.
5. La question de savoir comment combler le fossé qui existe entre les attentes de la population et la prestation publique est un test supplémentaire pour les démocraties européennes. La population demande la protection de ses droits, y compris contre les abus de ses propres autorités. Elle exige un environnement sain et des actions contre le changement climatique. Elle veut que la technologie améliore sa vie sans la contrôler. Elle exige d’avoir davantage son mot à dire dans la prise de décisions politiques et de participer aux processus démocratiques au-delà des élections. Elle s’attend à ce que la politique et les institutions publiques soient exemptes de corruption. Elle attache de l’importance à la justice et souhaite plus d’égalité et d’inclusion, ainsi que de meilleures perspectives socio-économiques pour elle-même et pour les générations futures.
6. Le 4e Sommet devrait avoir pour ambition de définir un programme tourné vers l’avenir pour le Conseil de l’Europe, replaçant les intérêts, les préoccupations et les attentes des populations au cœur de la mission de l’Organisation.
7. L’Assemblée recommande par conséquent au Comité des Ministres de préparer une déclaration politique et un plan d’action qui seront adoptés par les chef·fe·s d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe lors du Sommet à venir, afin d’apporter une nouvelle vision stratégique, un nouvel élan politique et de nouvelles réponses aux défis hors du commun qui se posent aujourd’hui.
8. Unis autour de valeurs communes, les chef·fe·s d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe devraient:
8.1. affirmer leur soutien inconditionnel à la souveraineté, à l’indépendance et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine dans ses frontières internationalement reconnues et leur solidarité avec l’Ukraine et les Ukrainiens;
8.2. condamner l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine, qui constitue une violation grave du droit international et une menace pour la paix et la sécurité internationales;
8.3. adopter une approche globale de l’obligation de la Fédération de Russie de répondre de ses actes d’agression contre l’Ukraine, et en particulier:
8.3.1. apporter un soutien politique à l’initiative visant à créer un tribunal pénal international ad hoc chargé d’enquêter sur le crime d’agression commis par les dirigeants politiques et militaires de la Fédération de Russie et d’engager des poursuites à leur encontre;
8.3.2. soutenir le travail des juridictions internationales ayant pour mandat d’enquêter sur les génocides, les crimes de guerre, les violations du droit international humanitaire et les crimes contre l’humanité perpétrés dans le cadre de l’agression et d’en poursuivre les auteurs;
8.3.3. soutenir la mise en place d'un mécanisme de compensation international global incluant un registre des dommages causés par l’agression russe;
8.4. réaffirmer que la consolidation de la paix fondée sur la justice et la coopération internationale est d’un intérêt vital pour la préservation de la société humaine et de la civilisation;
8.5. réaffirmer leur attachement au multilatéralisme fondé sur des règles, qui constitue le pivot de l’ordre international;
8.6. réaffirmer leur engagement mutuel à faire de l’Europe un vaste espace de sécurité démocratique, pour reprendre les termes de la Déclaration de Vienne qui a conclu le 1er Sommet des chefs d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe en 1993.
9. Le 4e Sommet devrait veiller à ce que le Conseil de l’Europe intensifie son soutien à l’Ukraine, immédiatement et après la fin de la guerre d’agression. Le bon fonctionnement des institutions démocratiques, le respect de l’État de droit et la conformité aux normes démocratiques, ainsi qu’une intégration européenne plus forte, sont les meilleurs garants de la sécurité démocratique de l’Ukraine et de l’Europe et sont aussi essentiels que l’effort de reconstruction. Des mesures devraient être prises pour accroître le profil et la visibilité de l'assistance substantielle à l’Ukraine et de sa coopération avec le Conseil de l'Europe, ainsi que pour assurer une coordination et une coopération accrues avec les autres organisations internationales concernées, par la mise en place d'un coordinateur spécial, sous l'autorité de la Secrétaire Générale.
10. Le 4e Sommet devrait également exiger que la Fédération de Russie se retire des territoires de la Géorgie, de la République de Moldova et de l’Ukraine qui sont illégalement sous son contrôle; réaffirmer la pleine applicabilité de la Convention européenne des droits de l'homme (STE no 5) et d’autres traités relatifs aux droits humains dans ces territoires; encourager le Conseil de l’Europe à maintenir des contacts avec la société civile, les organisations non gouvernementales, les défenseurs des droits humains et les journalistes indépendants sur le terrain et à soutenir les mécanismes internationaux des droits humains accessibles aux populations de ces régions, notamment sous l’égide de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et des Nations Unies.
11. Réaffirmant la position du Conseil de l’Europe en tant qu’organisation intergouvernementale chef de file en Europe pour toutes les questions relatives aux droits humains, à la démocratie et à l’État de droit, les chef·fe·s d’État et de gouvernement devraient rappeler sa vocation paneuropéenne et sa nature de communauté de valeurs, pouvant guider tous ceux qui défendent ou aspirent à la démocratie, aux droits humains et à l’État de droit, où qu’ils se trouvent. Dans ce contexte, le Sommet devrait exprimer son soutien en faveur d’une politique d’ouverture à l’égard des personnes, groupes et organisations russes et bélarusses qui prônent sans équivoque les valeurs et principes du Conseil de l’Europe.
12. Le Sommet devrait continuer à développer le rôle du Conseil de l’Europe en tant que communauté politique, en accentuant la dimension politique de ses travaux et en assurant une articulation efficace de ses fonctions et responsabilités avec d’autres institutions de l’architecture multilatérale. À cet égard, il devrait viser à renforcer le partenariat stratégique entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne, conformément à la Résolution 2430 (2022) de l'Assemblée «Au-delà du Traité de Lisbonne: renforcer le partenariat stratégique entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne»:
12.1. en donnant une impulsion décisive à la finalisation des négociations d’adhésion de l’Union européenne à la Convention européenne des droits de l’homme;
12.2. en invitant l’Union européenne à adhérer à d’autres instruments du Conseil de l’Europe et notamment à la Charte sociale européenne révisée (STE no 163), à la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique (STCE no 210, «Convention d’Istanbul») et à l'accord partiel et élargi établissant le Groupe d’États contre la corruption (GRECO);
12.3. en renforçant le dialogue politique et la coopération, en particulier dans le domaine de l’État de droit;
12.4. en appelant l’Union européenne à envisager un rôle structuré pour le Conseil de l’Europe dans le cadre du processus d’élargissement de l’Union européenne;
12.5. en jetant les bases d’une révision du Mémorandum d’accord entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne.
13. Le Sommet devrait reconnaître la contribution du Conseil de l’Europe à la gouvernance mondiale et encourager l’Organisation à faire rayonner ses valeurs et ses normes au-delà de ses membres, en renforçant sa coopération avec les États et organisations intéressés, dans son voisinage géographique ou dans sa proximité politique. Il devrait chercher à faire du Conseil de l'Europe un partenaire plus proche des Nations Unies, de ses agences et de ses mécanismes, en vue de soutenir la gouvernance mondiale, le multilatéralisme fondé sur des règles et la réalisation des objectifs de développement durable.
14. Si la démocratie, les droits humains et l’État de droit doivent rester ses principaux objectifs et domaines de compétence, le Conseil de l’Europe devrait être renouvelé, renforcé et doté de nouveaux moyens pour avoir un impact et demeurer à l’avant-garde, en s’adaptant à l’évolution de la société et aux demandes des citoyen·ne·s.
15. En ce qui concerne les droits humains, les chef·fe·s d’État et de gouvernement devraient s’engager à sauvegarder et à renforcer le système de la Convention, notamment:
15.1. en réaffirmant la nature contraignante des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme et des décisions relatives aux mesures provisoires et leur primauté par rapport à celles des juridictions nationales;
15.2. en continuant à renforcer l’exécution des arrêts par l’introduction d’une procédure de dialogue politique en cas de non-conformité;
15.3. en assurant la reconnaissance et la promotion du rôle des parlements nationaux, des institutions nationales des droits humains et des organisations de la société civile dans le suivi du respect de la Convention et des arrêts de la Cour.
16. Afin de répondre aux demandes pressantes et répandues de l’opinion publique qui exige que les pouvoirs publics s’attaquent au problème du changement climatique et fassent passer la viabilité à long terme de l’environnement avant les préoccupations économiques immédiates, le changement climatique devrait être un point distinct à l'ordre du jour du Sommet, permettant aux chef·fe·s d’État et de gouvernement:
16.1. de prendre l’initiative, en tant que Conseil de l’Europe, d’établir la protection de l’environnement comme un droit tout en réitérant l'engagement à réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre afin de limiter l'augmentation de la température mondiale, conformément à l'Accord de Paris;
16.2. de soutenir l’élaboration d’un cadre juridiquement contraignant du Conseil de l’Europe pour garantir le droit à un environnement propre, sain et durable, conformément à la Résolution 2396 (2022) de l’Assemblée «Ancrer le droit à un environnement sain: la nécessité d'une action renforcée du Conseil de l'Europe»;
16.3. de demander la création d’un comité du Conseil de l’Europe servant de plateforme d’échange d’informations, de promotion des meilleures pratiques et de conseil juridique sur la protection de l’environnement et la lutte contre le changement climatique.
17. Les chef·fe·s d’État et de gouvernement devraient reconnaître et donner une nouvelle impulsion au rôle précurseur du Conseil de l’Europe dans la protection des droits humains et à sa capacité à élaborer des normes juridiques, à mettre en avant de bonnes pratiques et à soutenir les efforts de réforme nationaux dans de nouveaux domaines de préoccupation, dont les droits de nouvelle génération. Ils devraient appuyer le travail du Conseil de l’Europe dans les domaines de l’intelligence artificielle, de la protection des données, de l’égalité femmes-hommes et la protection contre la violence fondée sur le genre et la discrimination.
18. En mettant davantage l’accent sur les droits sociaux, qui forment une partie indivisible des droits humains, le Conseil de l’Europe pourrait s’attaquer à l’une des causes profondes de la tendance préoccupante au recul de la démocratie observée ces dernières années. Pour répondre à ce phénomène, le Sommet devrait également soutenir une extension des activités du Conseil de l’Europe visant à accroître la confiance des citoyen·ne·s dans les processus démocratiques et les institutions publiques, notamment en ce qui concerne:
18.1. le renforcement de la bonne gouvernance et le respect de l’État de droit;
18.2. l’amélioration de la qualité et du professionnalisme de l’administration publique;
18.3. le renforcement de l’indépendance du pouvoir judiciaire;
18.4. la lutte contre la corruption;
18.5. le renforcement de la démocratie locale;
18.6. l’extension des possibilités de participation des citoyen·ne·s et de démocratie délibérative dans la prise de décisions publiques;
18.7. l’intégrité des processus électoraux.
19. Par ailleurs, pour accroître la cohérence, l’impact et la visibilité des activités de l’Organisation dans le domaine de la démocratie, le Sommet devrait:
19.1. demander l’élaboration d’une liste de critères de la démocratie qui définirait les critères essentiels présidant au bon fonctionnement d’une démocratie, à utiliser comme document de référence par les États membres et autres;
19.2. envisager la mise en place d’un Commissaire à la démocratie du Conseil de l’Europe, en tant qu’organe indépendant élu par l’Assemblée et doté de moyens et de la capacité de s'engager systématiquement dans un dialogue permanent avec les États membres, de donner l'alerte et de réagir rapidement, ainsi que d'offrir une assistance pertinente, en étroite coopération avec les secteurs clés du Secrétariat et des institutions du Conseil de l’Europe, afin de contribuer au renforcement du modèle démocratique dans toute l'Europe.
20. Le Sommet devrait veiller à ce que le Conseil de l’Europe place les citoyen·ne·s au centre de son action:
20.1. en intégrant les questions relatives à la jeunesse dans toutes ses activités;
20.2. en mettant en place des nouveaux canaux permettant à la société civile, aux organisations non gouvernementales et aux institutions nationales de défense des droits humains de contribuer utilement au travail d’élaboration des normes, de suivi et de coopération de l’Organisation;
20.3. en faisant preuve d’une ouverture et d’une transparence accrues dans ses méthodes de travail;
20.4. en adoptant une politique de communication efficace pour exposer au grand public la mission, les objectifs et l’impact du Conseil de l’Europe.
21. Pour que le Conseil de l’Europe puisse compter sur des ressources financières qui lui permettent de s’acquitter efficacement de son mandat, les chef·fe·s d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe devraient:
21.1. prendre l’engagement politique d’augmenter le budget ordinaire du Conseil de l’Europe, en croissance réelle;
21.2. charger le Comité des Ministres de revoir les barèmes des contributions des États membres en vue de relever la contribution minimale et d’assurer une plus grande équité dans la manière dont les États membres financent l’Organisation;
21.3. inviter le Comité des Ministres à étudier la possibilité que l’Union européenne contribue au budget ordinaire du Conseil de l’Europe, eu égard au partenariat stratégique entre les deux Organisations.
22. L’Assemblée invite le Comité des Ministres et la Secrétaire Générale, dans le cadre de leurs compétences respectives, à traduire les orientations politiques du Sommet en mesures de mise en œuvre et en réformes administratives adéquates.
23. L’Assemblée recommande au Comité des Ministres de l’associer étroitement au processus de réflexion et de préparation du Sommet et à son suivi, en maintenant le climat de dialogue et de coopération avec le Comité des Ministres, la Secrétaire Générale et les autres organes et institutions du Conseil de l’Europe.
24. Pour sa part, l’Assemblée continuera à soutenir le processus et prendra en compte les orientations politiques du Sommet dans ses travaux.

B. Exposé des motifs par Mme Fiona O’Loughlin, rapporteure

(open)

1. Introduction

1. Lors de la fondation du Conseil de l’Europe en 1949, la protection des droits humains et le rejet des régimes totalitaires revêtaient une signification profonde pour les Européen·ne·s qui commençaient à peine à se remettre des souffrances, de la pauvreté et de la destruction provoquées par la seconde guerre mondiale. Les populations comme les pouvoirs publics lançaient des appels en faveur de la paix, de la prospérité, de la démocratie et des droits humains. Le Conseil de l’Europe était une réponse à ces demandes instantes du public.
2. Les événements politiques sur le continent européen et la nécessité de combler les attentes du public ont façonné l’Organisation tout au cours de sa longue histoire. En 1989, le mur de Berlin, symbole de la division politique de l’Europe, est tombé. Les gens sont descendus dans la rue pour réclamer l’unité, des libertés et des droits. Leurs appels ont été entendus. En 1993, réunis lors de leur 1er Sommet, les chef·fe·s d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe ont confié à l’Organisation une nouvelle mission, celle de créer un espace paneuropéen commun où la démocratie, les droits humains et l’État de droit peuvent prospérer, pour le bien de tous les Européen·ne·s enfin unis sous un seul et même toit: la maison européenne commune.
3. Par la suite, deux autres Sommets se sont tenus, en 1997 après une vague d’élargissement qui a vu arriver six nouveaux membres au sein de l’Organisation, dont la Fédération de Russie, puis en 2005 au lendemain d’une série d’attentats terroristes qui ont gravement menacé la sécurité et ont profondément affecté les Européen·ne·s sur le plan émotionnel.
4. En 2022, l’Europe se trouve à nouveau à un carrefour de son histoire. La guerre d’agression menée actuellement par la Fédération de Russie contre l’Ukraine est un affront à tous les principes défendus par le Conseil de l’Europe. Cette guerre constitue un défi majeur pour l’architecture européenne née sur les cendres de la seconde guerre mondiale mais n’est pas la seule épreuve que l’Europe ait à affronter aujourd’hui.
5. Le fossé entre les demandes de la population et la prestation publique est immense. La population réclame la protection de ses droits, y compris contre les abus de ses propres autorités. Elle veut se prémunir contre les menaces. Elle exige un environnement sain et des actions contre le changement climatique. Elle veut que la technologie améliore sa vie sans la contrôler. Elle exige d’avoir davantage son mot à dire dans la prise de décisions politiques et demande que sa participation aux processus démocratiques ne se limite pas aux élections. Elle s’attend à ce que la politique et les institutions publiques soient exemptes de corruption. Elle attache de l’importance à la justice et souhaite plus d’égalité et d’inclusion, ainsi que de meilleures perspectives socio-économiques pour elle-même et pour les générations futures.
6. Le 4e Sommet des chefs d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe est l’occasion de prendre fermement position face à ces enjeux déterminants, de répondre aux demandes de la population et de replacer les intérêts, les préoccupations et les attentes de cette dernière au cœur de la mission du Conseil de l’Europe.

2. L’Europe à la croisée des chemins

7. Aux prises avec la guerre d’agression à grande échelle qui s’est installée sur son sol, l’Europe est à la croisée des chemins. Si les Ukrainien·ne·s subissent une violence brutale, tous les Européen·ne·s paient désormais un tribut à la guerre et sont confrontés, dans leur quotidien, à la hausse du prix de l’énergie, aux pénuries de produits alimentaires et autres produits de base et à l’impact de la récession économique. Les conséquences de l’agression de la Fédération de Russie affectent d’autant plus les sociétés européennes que celles-ci émergent tout juste des premières vagues de la pandémie de covid-19. L’instabilité risque d’éroder encore plus la confiance dans la démocratie et dans les institutions publiques, accentuant ainsi la tendance négative observée depuis quelques années.
8. Cette agression, en plus d’engendrer d’immenses souffrances et des destructions massives, ébranle également le multilatéralisme. Profitant de la protection que lui confère son véto au Conseil de sécurité des Nations Unies, la Fédération de Russie compromet la paix et la sécurité, menace de recourir aux armes nucléaires et appelle à la création d’un nouvel ordre mondial.
9. Vingt-six ans après son adhésion, la Fédération de Russie a été exclue du Conseil de l’Europe, une mesure sans précédent qui en dit long sur la gravité des violations du droit international commises 
			(2) 
			Avis 300 (2022) de l’Assemblée
parlementaire; décision du Comité des Ministres. Les travaux de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) sont quant à eux sérieusement entravés par l’impossibilité de trouver un consensus sur les décisions importantes. On a ainsi vu apparaître une fracture profonde entre ses États participants concernant leurs attentes vis-à-vis de l’organisation lors du 29e Conseil ministériel tenu à Łódź les 1er et 2 décembre 2022 
			(3) 
			<a href='https://www.osce.org/event/mc_2022'>29e Conseil
ministériel de l’OSCE.</a>. Dans le même temps, l’attrait de l’Union européenne a augmenté, l’Ukraine, la Géorgie et la République de Moldova ayant formellement exprimé leur désir d’y adhérer. L’Union européenne a également pu prendre des sanctions d’une ampleur sans précédent contre la Fédération de Russie et certaines personnalités russes et adopter un vaste ensemble de mesures en soutien à l’Ukraine.
10. À la lumière de ces événements historiques, la tenue d’un Sommet des chef·fe·s d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe – le quatrième à peine de l’histoire de l’Organisation – constitue un impératif politique et un geste hautement symbolique qui ne peut plus être retardé.

3. Ambitions du 4e Sommet

11. Le 4e Sommet doit être ambitieux. Son importance historique devrait être comparable à celle du Sommet de Vienne qui, en 1993, a confié au Conseil de l’Europe la mission de devenir une maison commune pour tous les Européen·ne·s, un espace paneuropéen partageant les mêmes valeurs et normes juridiques.
12. Trente ans plus tard, l’ambition du 4e Sommet devrait être double: réaffirmer l’unité autour des valeurs et des engagements et définir une vision d’avenir pour le Conseil de l’Europe dans le nouveau contexte historique.
13. Les chef·fe·s d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe devraient rappeler que la consolidation de la paix fondée sur la justice et la coopération internationale est d’un intérêt vital pour la préservation de la société humaine et de la civilisation 
			(4) 
			Préambule du <a href='https://rm.coe.int/1680306052'>Statut du
Conseil de l’Europe</a> (STE no 1), paragraphe 2. et que le multilatéralisme reposant sur des règles constitue le pivot de l’ordre international.
14. Ils devraient également réaffirmer la position du Conseil de l’Europe en tant qu’organisation intergouvernementale chef de file en Europe pour toutes les questions touchant aux droits humains, à la démocratie et à l’État de droit et redéfinir le mandat, le rôle et les outils d’un Conseil de l’Europe renouvelé, dynamisé et renforcé, capable de relever les enjeux présents et futurs.
15. Les résultats du Sommet devront être à la hauteur de l’événement. Comme ils l’ont déjà fait en d’autres occasions similaires par le passé, les chef·fe·s d’État et de gouvernement devraient adopter solennellement une déclaration politique assortie d’un plan d’action. Ce dernier ne doit pas être confondu avec les documents stratégiques ou programmatiques qui sont régulièrement préparés par le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe sur la base des propositions de la Secrétaire Générale. De même, il ne faut pas attendre du plan d’action qu’il couvre l’ensemble des activités menées par le Conseil de l’Europe, ni en déduire que les activités qui en sont absentes revêtent une importance moindre.
16. Les réunions au niveau des chef·fe·s d’État et de gouvernement sont pour le Conseil de l’Europe des événements exceptionnels qui ont pour but d’apporter une nouvelle vision, un nouvel élan et de nouvelles réponses face à des défis hors du commun. La déclaration politique et le plan d’action connexe devraient être axés sur l’obtention de ces résultats ciblés.

4. Mettre l’accent sur les trois piliers

17. Le Sommet devrait confirmer l’accent mis par l’Organisation sur ses trois piliers: les droits humains, la démocratie et l’État de droit. Il devrait cependant également faire en sorte que le Conseil de l’Europe puisse avoir un plus grand impact dans ces domaines fondamentaux, car dans cette nouvelle page de l’histoire européenne où la paix ne peut être tenue pour acquise, le respect, par chaque État membre, des normes relatives à la démocratie, aux droits humains et à l’État de droit constitue la meilleure garantie de sécurité pour les autres États et leurs citoyen·ne·s. Le Sommet devrait réaffirmer la volonté mutuelle des États membres du Conseil de l’Europe de veiller à ce que l’Europe soit un vaste espace de sécurité démocratique, au sens de la Déclaration de Vienne 
			(5) 
			<a href='https://search.coe.int/cm/Pages/result_details.aspx?ObjectId=0900001680536c83'>Déclaration
de Vienne</a>, premier Sommet, 1993..

5. Droits humains

Objectif 1: Sauvegarder et renforcer le système de la Convention

18. La Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5) est le premier instrument au monde visant à donner effet à certains droits énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et à les rendre contraignants. Sa ratification est obligatoire pour tous les États membres du Conseil de l’Europe. À ce jour, il s’agit du dispositif supranational le plus avancé en matière de protection des droits humains, qui offre aux particuliers le droit de porter une affaire devant une cour internationale. Il s’applique à toute personne relevant de la juridiction d’un État membre, indépendamment de sa nationalité.
19. En tant que principale réalisation internationale dans le domaine de la protection des droits humains ayant un impact direct et tangible sur la vie de tous les Européen·ne·s, la Convention européenne des droits de l’homme et le système de la Convention doivent être préservés et renforcés.
20. L’une des grandes difficultés observées ces dernières années réside dans le fait que l’efficacité du système de protection fondé sur la Convention européenne des droits de l’homme est menacée par des tentatives visant à saper l’autorité de la Cour européenne des droits de l’homme 
			(6) 
			<a href='https://www.coe.int/en/web/human-rights-intergovernmental-cooperation/echr-system/future-of-convention-system'>L’avenir
à plus long terme du système de la CEDH (coe.int)</a>.. En outre, bien que le nombre d’affaires en instance ait considérablement diminué entre 2011 et 2021, l’exécution des arrêts de la Cour continue de se heurter à un certain nombre de problèmes, notamment l’absence de volonté politique de mettre en œuvre certains d’entre eux et les obstacles rencontrés dans l’exécution des arrêts rendus dans des affaires interétatiques ou présentant des caractéristiques interétatiques 
			(7) 
			Résolution 2358 (2021) et <a href='https://pace.coe.int/pdf/452ed7039b7cdefe3dc9545c29a8a0e663662f86f31cd90a8c53b55458038d5a/recommendation 2193.pdf'>Recommandation 2193 (2021)</a> sur la mise en œuvre des arrêts de la Cour européenne des
droits de l’homme..
21. Le Sommet devrait:
  • réaffirmer l’attachement des États membres au caractère central du système de la Convention;
  • réaffirmer la nature contraignante des arrêts de la Cour et des décisions relatives aux mesures provisoires;
  • réaffirmer d’une part, la prééminence des arrêts et décisions de la Cour sur celles des juridictions nationales et d’autre part, qu’en cas de conflit entre la Convention et la jurisprudence de la Cour et le cadre juridique national, y compris au niveau constitutionnel, les États membres devraient accorder la priorité aux solutions conformes à la Convention;
  • rappeler la pertinence de la procédure en manquement au titre de l’article 46 de la Convention, telle qu’amendée par le Protocole no 14 (STCE no 194);
  • continuer à renforcer l’exécution des arrêts en introduisant une procédure de consolidation du dialogue politique lorsque l’État concerné ne fait pas preuve de la volonté politique nécessaire pour mettre en œuvre les arrêts clés. L’Assemblée devrait jouer un rôle dans cette procédure, avec le Comité des Ministres et la Secrétaire Générale;
  • reconnaître et promouvoir le rôle des parlements nationaux 
			(8) 
			Résolution 2358 (2021) «Mise en œuvre des arrêts de la Cour européenne des
droits de l’homme», paragraphe 10., des institutions nationales des droits humains et des organisations de la société civile dans le suivi du respect de la Convention et des arrêts de la Cour.

Objectif 2: Adhésion de l’Union européenne à la Convention européenne des droits de l’homme

22. Dès 2007, le Traité de Lisbonne stipulait l’obligation pour l’Union européenne d’adhérer à la Convention européenne des droits de l’homme. Un premier accord a été trouvé en 2013 mais la Cour de justice de l’Union européenne a conclu que certains de ses aspects étaient incompatibles avec le droit de l’Union européenne. Les négociations sur l’adhésion de l’Union européenne à la Convention européenne des droits de l’homme ont repris en 2020 et continuent de progresser au sein du groupe 46+1.
23. L’adhésion de l’Union européenne doit être une priorité absolue. Elle contribuera à garantir la cohérence et l’homogénéité entre le droit communautaire et les normes de la Convention et conduira à la création d’un espace juridique unique dans lequel les institutions de l’Union européenne seront également soumises à la Convention européenne des droits de l’homme, dans l’intérêt de l’Union européenne, du Conseil de l’Europe, de tous leurs États membres et de leurs citoyen·ne·s. Cela signifie par ailleurs que chaque organisation contribuera à l’efficacité de l’autre.
24. Selon le stade auquel les négociations seront parvenues au moment du Sommet, les chef·fe·s d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe pourront en saluer la réussite et prendre les décisions nécessaires pour la suite du processus, ou donner une impulsion décisive pour les finaliser dans les meilleurs délais. La possibilité pour l’Union européenne d’adhérer à d’autres instruments du Conseil de l’Europe, comme la Charte sociale européenne révisée (STE no 163), devrait également être étudiée en amont du Sommet.
25. Depuis sa création, le Conseil de l’Europe a été un précurseur dans le domaine de la protection des droits humains, en fixant des normes pour combler d’importantes lacunes juridiques et notamment en élaborant des conventions visionnaires au moment de leur adoption. Ces traités ont eu un impact tangible dans la vie de nombreuses personnes en Europe, en particulier dans les domaines de la prévention de la torture, de la lutte contre la traite des êtres humains, de la protection des enfants contre les violences sexuelles ou de la protection des femmes contre les violences fondées sur le genre ou les violences domestiques.
26. Il convient de préserver et de promouvoir la capacité de l’Organisation à élaborer des instruments juridiques dans les nouveaux domaines de préoccupation. L’Europe peut, à juste titre, être saluée pour son rôle de précurseur en matière de droits humains dans le monde entier, grâce à sa clairvoyance dans l’élaboration de normes juridiques. Elle devrait poursuivre dans cette voie car face à l’évolution rapide de nos sociétés, un système de protection des droits humains qui ne progresserait pas au même rythme deviendrait très vite obsolète et inadapté. Le Conseil de l’Europe devrait donc se consacrer aux nouvelles générations de droits humains.
27. Le renforcement de la capacité de l’Organisation à élaborer de nouvelles normes juridiques ne doit pas être considéré comme une alternative à l’évolution de la jurisprudence de la Convention, telle qu’interprétée par la Cour européenne des droits de l’homme, qui est également un moyen important par lequel le Conseil de l’Europe contribue au développement des droits humains.
28. À cet égard, on ne peut rester sourd aux appels de l’opinion demandant aux pouvoirs publics de s’attaquer au problème du changement climatique et de faire passer la viabilité à long terme de l’environnement avant les préoccupations économiques immédiates. On peut difficilement imaginer comment il sera possible, une fois le point de basculement du changement climatique atteint, d’assurer la paix, la sécurité et la prospérité sans lesquels la démocratie, les droits humains et l’État de droit deviendront de plus en plus difficiles à garantir.
29. Faisant suite à une initiative de l’Assemblée demandant au Conseil de l’Europe d’adopter des instruments juridiquement contraignants pour garantir le droit à un environnement propre, sain et durable 
			(9) 
			Résolution 2396 (2021) et Recommandation 2211
(2021) «Ancrer le droit à un environnement sain: la nécessité d’une
action renforcée du Conseil de l’Europe»<a href=''>.</a>, une étude de faisabilité est en préparation dans le cadre du mandat du Comité directeur pour les droits de l’homme (CDDH).
30. Le Sommet devrait afficher son ambition, exposer une vision stratégique pour l’avenir et apporter le soutien politique nécessaire à la mise en place d’un cadre juridique contraignant conformément aux recommandations de l’Assemblée. Il devrait également envisager un rôle pour le Conseil de l’Europe en tant que plateforme d’échange d’informations, de promotion des meilleures pratiques et de conseil juridique sur la protection de l’environnement et la lutte contre le changement climatique, à l’appui de réformes à l’échelon national. La Commission européenne pour l’efficacité de la justice (CEPEJ) ou la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) pourraient être des modèles intéressants pour cette nouvelle structure du Conseil de l’Europe, compte dûment tenu de leurs différences.
31. Que ce soit dans le domaine du développement des droits humains, du suivi ou de la mise en œuvre des normes existantes, les nouveaux domaines prioritaires devraient inclure l’intelligence artificielle, la protection des données, les droits sociaux, l’égalité femmes-hommes et la protection contre la violence fondée sur le genre et la discrimination.

6. Démocratie

Objectif 1: Lutter contre le recul de la démocratie et ses causes profondes

32. La tendance au recul de la démocratie qui avait été observée par plusieurs groupes de réflexion et institutions faisant autorité s’est accentuée sous l’effet des mesures prises en réponse à la pandémie de covid-19 
			(10) 
			<a href='https://www.idea.int/news-media/news/democratic-backsliding'>Democratic
backsliding | International IDEA</a> (2018); IDEA, the <a href='https://idea.int/democracytracker/gsod-report-2022'>Global
State of Democracy report</a>, 2022; the Economist Intelligence Unit, <a href='https://www.eiu.com/n/campaigns/democracy-index-2021/'>Democracy
Index 2021</a> (anglais seulement). Voir aussi la Résolution 2437 (2022) «Sauvegarder et promouvoir la démocratie véritable en
Europe».. Comme l’a expliqué la Secrétaire Générale du Conseil de l’Europe dans ses récents rapports sur la situation de la démocratie, des droits de l’homme et de l’État de droit 
			(11) 
			<a href='https://www.coe.int/fr/web/secretary-general/reports'>Rapports
annuels de la Secrétaire Générale.</a>, l’Europe ne fait pas exception.
33. Le Sommet devra donc donner un élan aux activités de l’Organisation visant à inverser cette tendance tout en s’attaquant à ses causes profondes, au premier plan desquelles figurent le creusement des inégalités et la protection insuffisante des droits sociaux. Le Conseil de l’Europe devrait être un ambassadeur de l’indivisibilité des droits humains, rappelant qu’il ne devrait y avoir aucune hiérarchie entre droits civils-politiques et droits socio-économiques.
34. Face au recul de la démocratie, une attention particulière doit être portée au renforcement de la confiance des citoyen·ne·s dans les processus démocratiques. À cette fin, le Conseil de l’Europe devrait consacrer davantage d’efforts au renforcement de la bonne gouvernance, à l’amélioration de la qualité et du professionnalisme de l’administration publique et à la consolidation de la démocratie locale, tous ces secteurs étant déterminants dans la confiance que les citoyen·ne·s accordent aux pouvoirs publics.
35. Par ailleurs, il conviendrait de promouvoir de nouveaux mécanismes afin d’accroître la participation des citoyen·ne·s aux décisions publiques. Cela dit, s’il est nécessaire d’envisager des méthodes novatrices d’implication plus directe des citoyen·ne·s dans les processus démocratiques, il n’en demeure pas moins que les élections restent la colonne vertébrale de la démocratie. L’intégrité des processus électoraux doit être protégée et renforcée pour garantir la légitimité et la crédibilité des institutions représentatives. Le Sommet devrait par conséquent induire une réorganisation des activités du Conseil de l’Europe dans le domaine des élections, afin d’améliorer leur cohérence et leur impact.
36. Les États membres du Conseil de l’Europe gagneraient à disposer d’une liste de critères de la démocratie. En s’appuyant sur la Convention européenne des droits de l'homme, sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et les travaux de la Commission de Venise et du Comité européen sur la démocratie et la gouvernance (CDDG), le Conseil de l’Europe devrait s’atteler à la tâche de recenser les critères essentiels qui président au bon fonctionnement d’une démocratie 
			(12) 
			Cette
proposition découle de la recommandation formulée par le groupe
de réflexion de haut niveau, de produire un Indice de la démocratie,
page 16 du <a href='https://rm.coe.int/rapport-du-groupe-de-reflexion-de-haut-niveau-du-conseil-de-l-europe/1680a85cf0'>rapport</a>.. Cette liste de critères de la démocratie n’aurait aucunement pour but de noter les performances des États membres mais viserait à combler l’absence d’instrument juridique international définissant clairement les contours d’un système démocratique et les lignes rouges à ne pas franchir.

Objectif 2: Améliorer l’alerte précoce et la réaction rapide

37. La guerre d’agression à grande échelle qui se déroule actuellement au cœur de l’Europe montre combien il est important que le Conseil de l’Europe fasse un meilleur usage de ses organes et mécanismes pour donner l’alerte précocement et accroître sa flexibilité et sa capacité de réaction rapide. L’Organisation pourrait ainsi inverser les tendances négatives observées dans le domaine de la démocratie, des droits humains et de l’État de droit, qui risquent de se détériorer davantage avec parfois des retombées au-delà des frontières nationales.
38. L’Assemblée a déjà formulé à ce sujet un certain nombre d’idées 
			(13) 
			Recommandation 2235 (2022) «La sécurité en Europe face à de nouveaux défis: quel
rôle pour le Conseil de l’Europe?»., qui pourraient être précisées en coopération avec le Comité des Ministres lors de la préparation du Sommet. On peut notamment citer les suivantes:
  • mettre en place une initiative pour la résilience démocratique qui suivra l’évolution de la démocratie dans les États membres et servira de base à une alerte rapide et à un dialogue politique renforcé pour aider les États membres à faire face aux situations préoccupantes, en s’appuyant sur les travaux des organes et mécanismes existants au sein du Conseil de l’Europe;
  • accroître l’échange de bonnes pratiques dans tous les domaines touchant la démocratie et la gouvernance démocratique;
  • créer un mécanisme de suivi des évolutions liées à la société civile, à la liberté d’association, à la participation et à l’engagement des citoyen·ne·s dans les États membres du Conseil de l’Europe;
  • renforcer et étendre les activités du Conseil de l’Europe relatives aux mesures de confiance et à la prévention des conflits, notamment en ce qui concerne la société civile et la coopération transfrontalière;
  • renforcer les capacités d’alerte précoce et de réaction rapide des mécanismes existants du Conseil de l’Europe.
39. Le Conseil de l’Europe devrait tirer les leçons de son expérience récente, qui a démontré l’efficacité limitée des procédures en vigueur. L’alerte précoce fondée sur des critères objectifs et vérifiables devrait s’accompagner de la capacité à réagir promptement et efficacement au plan politique pour avoir un impact sur les États membres avant qu’une situation préoccupante atteigne un degré de sévérité tel qu’elle devient constitutive d’une violation grave des obligations statutaires.
40. Le pilier de la démocratie est clairement celui qui nécessite davantage d’innovation pour imprimer un véritable changement d’orientation. Il pourrait également être envisagé de mettre en place un·e Commissaire à la démocratie du Conseil de l’Europe en tant qu’organe indépendant élu par l’Assemblée et doté de moyens et de la capacité de s'engager systématiquement dans un dialogue permanent avec les États membres, de donner l'alerte et de réagir rapidement, ainsi que d'offrir une assistance pertinente, en étroite coopération avec les secteurs clés du Secrétariat et des institutions du Conseil de l’Europe, afin de contribuer au renforcement du modèle démocratique dans toute l'Europe.

Objectif 3: Une démocratie novatrice

41. La démocratie évolue à un rythme rapide. Les technologies numériques, par exemple, ont transformé l’engagement des citoyen·ne·s, mais aussi la prestation des services publics et le travail de l’administration publique. D’immenses progrès ont été faits dans ce domaine en réponse à la pandémie de covid-19 et pourraient devenir des solutions durables. De nombreux États membres du Conseil de l’Europe ont compris cette évolution de la société et ont acquis de l’expérience dans l’utilisation de mécanismes de consultation publique en ligne, de gouvernance électronique et de démocratie électronique. Certains États membres ont également expérimenté des formes de démocratie participative et délibérative telles que les assemblées de citoyen·ne·s, les réunions publiques, les budgets participatifs et les référendums, pour n’en citer que quelques-unes.
42. Le Conseil de l’Europe devrait être en mesure de suivre et même d’anticiper ces évolutions. Le Sommet devrait encourager l’Organisation à jouer un rôle de plateforme permettant de partager de nouvelles pratiques dans le domaine de la démocratie, de prévoir les difficultés qui pourraient se poser et de tirer parti des avantages de l’innovation.

7. État de droit

43. L’État de droit est une notion complexe, plus facile à décrire qu’à définir, comme le reconnaît la Commission de Venise 
			(14) 
			CDL-AD(2016)007-f, <a href='https://www.venice.coe.int/webforms/documents/?pdf=CDL-AD(2016)007-f'>Liste
des critères de l’État de droit</a>, adoptée par la Commission de Venise lors de sa 106e session
plénière (Venise, 11-12 mars 2016).. Ses éléments fondamentaux sont la sécurité juridique, la prévention des abus et détournements de pouvoir, l’égalité devant la loi et la non-discrimination, et l’accès à la justice. L’État de droit est lié à la protection et à la promotion des droits humains et à la démocratie, et fournit un environnement propice aux deux.
44. Le 4e Sommet devrait réaffirmer que le renforcement de l’indépendance du pouvoir judiciaire et la lutte contre la corruption devraient être des priorités essentielles pour le Conseil de l’Europe. Il devrait également recommander d’accorder une plus grande importance à la bonne gouvernance. L’administration publique est l’interface la plus directe entre les citoyen·ne·s et les institutions publiques. Son efficacité, sa réactivité, son professionnalisme, sa conduite conforme à l’éthique, son équité et son respect de la loi sont déterminants pour la confiance dans la démocratie.

8. Rétablir le contact avec les Européennes et les Européens

45. Le Conseil de l’Europe devrait être plus proche des citoyen·ne·s et répondre davantage à leurs attentes en termes d’ouverture, de transparence et de participation active.
46. Des changements sociétaux majeurs ont eu lieu au cours des dernières décennies et requièrent un plus grand accès aux institutions publiques, notamment aux organisations internationales. Le Sommet devrait donner le coup d’envoi d’une réforme des méthodes de travail du Conseil de l’Europe dans ce sens, afin que l’Organisation mette en pratique ce qu’elle prêche. Parmi les mesures envisageables, on peut citer:
  • la retransmission publique d’un plus grand nombre de réunions et l’accès public à un plus grand nombre de documents;
  • la création de possibilités de tenir des consultations publiques sur des questions essentielles;
  • la mise en place de nouveaux canaux permettant à la société civile, aux organisations non gouvernementales et aux institutions nationales de défense des droits humains de contribuer davantage au travail d’élaboration de normes, de suivi et de coopération de l’Organisation.
47. Une plus grande ouverture permettrait au Conseil de l’Europe de mieux communiquer ses objectifs et d’expliquer son impact sur la vie des gens, tout en renforçant sa visibilité. Il appartient aux organisations internationales d’aider les citoyen·ne·s à comprendre leur pertinence.
48. Les jeunes sont le principal groupe cible de cette volonté de renouer avec les citoyen·ne·s. Le Sommet devrait demander la prise en compte de leur contribution et l’intégration d’une dimension «jeunesse» dans l’ensemble des travaux du Conseil de l’Europe. Cette approche permettrait de mieux faire connaître les valeurs fondamentales du Conseil de l’Europe auprès de la jeune génération et aiderait l’Organisation à élaborer un programme plus inclusif, plus dynamique et tourné vers l’avenir.

9. Le Conseil de l’Europe, une communauté politique

49. Le Conseil de l’Europe n’est pas seulement le gardien des droits humains, de la démocratie et de l’État de droit, ou une Organisation dotée de l’expertise technique nécessaire pour élaborer des normes juridiques. C’est aussi une communauté politique, comme le rappelle la Déclaration de Vienne de 1993. Il ne peut en être autrement puisqu’il s’occupe de questions de la plus haute importance politique pour la préservation de la paix et de la sécurité dans les États membres et en Europe.
50. Le 4e Sommet devrait réaffirmer le rôle joué par le Conseil de l’Europe en sa qualité de communauté politique et continuer à développer son potentiel. Cela passe par une approche à deux volets. En ce qui concerne son propre fonctionnement, le Conseil de l’Europe devrait renforcer la dimension politique de ses travaux, par exemple:
  • en mettant en place des mécanismes de dialogue interinstitutionnel pour améliorer le respect par les États membres des obligations qu’ils ont contractées lors de leur adhésion et des normes du Conseil de l’Europe. La procédure dite «conjointe» relative aux violations de l’article 8 du Statut du Conseil de l’Europe est un exemple de mécanisme de ce type 
			(15) 
			Procédure complémentaire conjointe
entre le Comité des Ministres et l’Assemblée parlementaire en cas
de violation grave par un État membre de ses obligations statutaires.. Cela dit, les trois organes impliqués dans ce dialogue – le Comité des Ministres, l’Assemblée et la Secrétaire Générale – devraient communiquer avec les États membres pour améliorer la conformité bien avant d’en arriver à ce scénario extrême. En outre, comme nous l’avons déjà mentionné, une procédure de dialogue politique renforcé devrait être mise en place pour l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme, ainsi que dans le cadre de la création de mécanismes d’alerte précoce/de réaction rapide;
  • en veillant à ce que les présidences à la tête du Comité des Ministres puissent avoir un impact politique plus fort, par exemple en coordonnant leurs priorités sur une période donnée;
  • en continuant à renforcer le dialogue et l’action concertée entre les organes statutaires de l’Organisation;
  • en se fixant pour objectif la tenue d’une conférence ministérielle pour chaque présidence du Comité des Ministres, avec la présence de ministres;
  • en organisant régulièrement des Sommets des chef·fe·s d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe, éventuellement en lien avec l’approbation du cadre stratégique quadriennal de l’Organisation.
51. En leur qualité d’organes politiques représentant les citoyen·ne·s européens, l’Assemblée et le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux devraient jouer un rôle plus important en prenant part aux activités générales de l’Organisation et en servant de multiplicateurs de ses normes et valeurs au niveau national. À cet égard, il importe de souligner que l’Assemblée et le Congrès comptent des représentants élus de diverses sensibilités politiques, y compris de l’opposition, ce qui leur permet de mieux connaître la situation de leur pays et de s’adresser à un public plus large.
52. L’approche à deux volets qui vise à renforcer le poids politique de l’Organisation a également une dimension extérieure. Un Sommet au niveau des chef·fe·s d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe permet de garantir la prise en compte du rôle du Conseil de l’Europe en tant que communauté politique dans l’architecture multilatérale européenne et d’éviter qu’il soit fragilisé ou copié inutilement par d’autres initiatives.
53. À cet égard, il convient de réfléchir sérieusement à la manière de conjuguer le champ d’action et les compétences du Conseil de l’Europe avec ceux de la Communauté politique européenne qui a tenu sa première réunion à Prague le 6 octobre 2022 et qui a rassemblé 43 États membres du Conseil de l’Europe. Le Conseil de l’Europe est une communauté politique qui traite de questions revêtant une importance vitale pour les citoyen·ne·s, les États membres, l’Europe dans son ensemble et la gouvernance mondiale. À l’image d’une famille partageant les mêmes valeurs, principes et normes, il réunit sur un pied d’égalité 46 États européens, dont tous les États membres de l’Union européenne. Bien qu’il soit prématuré à ce stade de faire des recommandations, il faudra continuer à suivre cette question et l’aborder dans les décisions du Sommet.

10. Le Conseil de l’Europe dans l’architecture multilatérale européenne

54. Grâce à ses conventions et à son rôle normatif, ainsi qu’à tout son dispositif reposant sur le dialogue politique, le suivi et la coopération, le Conseil de l’Europe est la pierre angulaire de l’ordre multilatéral fondé sur des règles en Europe. Il exerce ce rôle en coopération très étroite avec l’Union européenne qui a compétence législative dans un grand nombre de domaines et compte 27 États membres en commun avec lui.
55. Le Sommet devrait intensifier les relations entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne, en renforçant le partenariat stratégique entre les deux organisations sur la base de leurs valeurs communes et de leur engagement en faveur de la promotion de la paix, de la sécurité et de la stabilité sur le continent européen et de la défense du multilatéralisme dans le monde.
56. Le processus d’intégration européenne représente un facteur de stabilité en Europe, surtout dans le nouveau contexte historique. Un certain nombre d’États membres du Conseil de l’Europe, dont l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Géorgie, la République de Moldova, le Monténégro, la Macédoine du Nord, la Serbie, la Türkiye et l’Ukraine, bien qu’étant à des stades différents de la procédure, ont exprimé leur désir d’adhérer à l’Union européenne.
57. Sur la base d’un accord formel avec l’Union européenne, un mécanisme devrait être mis en place pour que le Conseil de l’Europe joue un rôle politique et technique plus visible et plus structuré, afin de permettre aux États membres qui souhaitent adhérer à l’Union européenne de faire des progrès tangibles et mesurables pour remplir les critères requis, conformément aux valeurs et aux normes du Conseil de l’Europe.
58. Par ailleurs, le Conseil de l’Europe devrait continuer à jouer un rôle décisif dans le maintien de normes élevées en matière de démocratie, de droits humains et d’État de droit dans tous ses États membres, y compris ceux qui sont également membres de l’Union européenne, et ce rôle devrait être reconnu par l’Union européenne.
59. L’État de droit illustre bien ce point car c’est un domaine pour lequel il y aurait lieu de renforcer le dialogue politique entre les deux organisations et de recourir davantage à l’expertise, à l’analyse comparative et aux conclusions du Conseil de l’Europe dans le large éventail de mécanismes et d’outils dont dispose l’Union européenne en la matière. Il conviendrait d’étudier la possibilité de déléguer certaines compétences au Conseil de l’Europe sur la base d’un accord formel, par exemple en ce qui concerne l’élaboration du rapport sur l’État de droit. La coopération entre les deux organisations dans ce domaine devrait être plus régulière, formelle, structurée et visible, et reposer sur un dialogue politique plus approfondi.
60. L’adhésion prévue de l’Union européenne à la Convention européenne des droits de l’homme et les progrès de l’élargissement de l’Union européenne conduiront probablement à l’établissement de relations plus étroites entre les deux organisations. Cela pourrait également déclencher une réflexion sur l’éventuelle adhésion à part entière de l’Union européenne au Conseil de l’Europe.
61. Le 4e Sommet devrait jeter les bases d’une révision du Mémorandum d’accord entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne, dans le sens précisé ci-dessus. Ce texte devrait confirmer la position du Conseil de l’Europe en tant qu’organisation intergouvernementale chef de file en Europe pour toutes les questions relatives aux droits humains, à la démocratie et à l’État de droit, notamment comme plateforme politique et organisme normatif.
62. L’Assemblée elle-même devrait chercher à renforcer son partenariat avec le Parlement européen. Elle a exposé, dans plusieurs textes récents et rapports pertinents, la voie à suivre et les initiatives concrètes envisageables, notamment la Résolution 2430 (2022) «Au-delà du Traité de Lisbonne: renforcer le partenariat stratégique entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne» et la Résolution 2456 (2022) «Soutenir une perspective européenne pour les Balkans occidentaux» 
			(16) 
			Résolution 2430 (2022) et Recommandation 2226
(2022) «Au-delà du Traité de Lisbonne: renforcer le partenariat stratégique
entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne»; Résolution 2456 (2022) et Recommandation
2237 (2022) «Soutenir une perspective européenne pour les Balkans
occidentaux»..

11. Faire rayonner les valeurs et les normes du Conseil de l’Europe au-delà de ses États membres

63. Si la mission du Conseil de l’Europe doit rester géographiquement centrée sur l’Europe, le Sommet doit reconnaître la contribution du Conseil de l’Europe à la gouvernance mondiale et encourager l’Organisation à faire rayonner ses valeurs et ses normes au-delà de ses membres.
64. Le Conseil de l’Europe devrait renforcer sa coopération avec les États et organisations qui le souhaitent, non seulement dans son voisinage géographique mais aussi dans sa proximité politique, comme l’a déjà recommandé l’Assemblée 
			(17) 
			Résolution 2369 (2021) «La vision de l’Assemblée sur les priorités stratégiques
du Conseil de l’Europe<a href=''>».</a>. Une coopération plus solide avec les Nations Unies, ses agences et ses mécanismes contribuerait également à promouvoir la gouvernance mondiale, le multilatéralisme fondé sur des règles et la réalisation des objectifs de développement durable. La récente visite de la Sous-Commission des relations extérieures au siège de l’ONU et les échanges fructueux tenus avec de hauts responsables illustrent la nécessité de continuer à mettre en avant le profil du Conseil de l’Europe en tant que partenaire régional des Nations Unies dans tous les domaines où il apporte une valeur ajoutée, et notamment la sécurité démocratique.
65. Le Sommet des chef·fe·s d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe devrait réaffirmer la vocation paneuropéenne du Conseil de l’Europe et sa nature de communauté de valeurs, qui peut servir de référence à tous ceux qui aspirent à la démocratie, aux droits humains et à l’État de droit, où qu’ils se trouvent. En ce sens, aux conditions déjà définies par l’Assemblée 
			(18) 
			Résolution 2433 (2022) et Recommandation 2228
(2022) «Conséquences de l’agression persistante de la Fédération
de Russie contre l’Ukraine: rôle et réponse du Conseil de l’Europe»., le Conseil de l’Europe devrait maintenir une politique d’ouverture à l’égard de la société civile bélarusse et russe, en particulier à l’égard des personnes, groupes et organisations qui risquent d’être persécutés par les autorités pour avoir défendu les valeurs et principes du Conseil de l’Europe.

12. Soutien à l’Ukraine

66. Le 4e Sommet offrirait une plateforme aux chef·fe·s d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe pour réaffirmer leur soutien total à la souveraineté, à l’indépendance et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine et s’engager à ne pas reconnaître, de jure ou de facto, l’annexion illégale de territoires ukrainiens par la Fédération de Russie.
67. Le Sommet devrait veiller à ce que le Conseil de l’Europe continue à apporter son soutien sans réserve à l’Ukraine, immédiatement, comme le prévoit le Plan d’action ajusté du Conseil de l’Europe pour l’Ukraine 2018-2022 adopté par le Comité des Ministres à Turin 
			(19) 
			<a href='https://www.coe.int/fr/web/programmes/-/adjusted-council-of-europe-action-plan-for-ukraine-2018-2022-adopted-by-the-committee-of-ministers'>Adoption
par le Comité des Ministres du Plan d’action ajusté du Conseil de
l’Europe pour l’Ukraine 2018-2022 – News (coe.int).</a>, et après la fin de la guerre d’agression. Des institutions démocratiques solides, le respect de l’État de droit et la conformité aux normes démocratiques, ainsi qu’une intégration européenne plus forte, sont les meilleurs garants de la sécurité démocratique de l’Ukraine et de l’Europe.
68. Des mesures devraient être prises pour accroître le profil et la visibilité de l'assistance substantielle et de la coopération du Conseil de l'Europe avec l'Ukraine, ainsi que pour assurer une coordination et une coopération accrues avec les autres organisations internationales concernées, par la mise en place d'un coordinateur / d’une coordinatrice spécial·e, sous l'autorité de la Secrétaire Générale. Les États membres devraient être encouragés à contribuer financièrement aux initiatives de coopération du Conseil de l’Europe en Ukraine et à la reconstruction du pays.

13. Responsabilité de la Fédération de Russie

69. Même si la Fédération de Russie a été exclue du Conseil de l’Europe, la question de sa responsabilité devrait figurer au cœur du Sommet, car elle est étroitement liée à l’État de droit: les crimes commis par la Fédération de Russie, contre un État membre du Conseil de l’Europe et ses citoyen·ne·s et en violation du droit international, ne devraient pas rester impunis.
70. Cette question de responsabilité doit être envisagée de manière globale. Entre autres recommandations, l’Assemblée a appelé les États membres et observateurs du Conseil de l’Europe à créer un tribunal pénal international ad hoc chargé d’enquêter sur le crime d’agression perpétré par les dirigeants politiques et militaires de la Fédération de Russie et d’engager des poursuites à leur encontre 
			(20) 
			Résolution 2436 (2022) et Recommandation 2231
(2022) «L’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine: faire
en sorte que les auteurs de graves violations du droit international
humanitaire et d’autres crimes internationaux rendent des comptes<a href=''>».</a>. Le 4e Sommet devrait apporter son soutien politique sans équivoque à cette initiative, qui revêt une forte signification politique.
71. En outre, les chef·fe·s d’État et de gouvernement devraient manifester leur soutien aux activités des juridictions internationales qui ont pour mandat d’enquêter sur les génocides, les crimes de guerre, les violations du droit humanitaire international et les crimes contre l’humanité et d’en poursuivre les auteurs. Ils devraient également réaffirmer que le Conseil de l’Europe est disposé à aider les procureurs ukrainiens et tout tribunal hybride (composé de juges nationaux et internationaux) pouvant être mis en place pour enquêter et poursuivre les auteurs de ces graves crimes internationaux. La constitution d’un registre des dommages causés par l’agression russe devrait également être appuyée. La Fédération de Russie devrait être rendue responsable de la réparation des dommages qu’elle a causés.
72. Le fait qu’un État européen ait osé mener une invasion totale contre un État voisin, la plus destructrice depuis la seconde guerre mondiale, devrait susciter une réflexion plus large sur la responsabilité. Bien que l’agression soit le crime des crimes, il est rare que les auteurs de tels faits soient traduits en justice et des obstacles juridiques et politiques entravent l’exercice d’une compétence effective. Le Conseil de l’Europe devrait prendre la tête de la réflexion sur les moyens de promouvoir l’exercice effectif d’une compétence universelle sur le crime d’agression, peu importe son auteur.

14. Zones relevant de la souveraineté des États membres du Conseil de l’Europe se trouvant sous le contrôle de facto de la Fédération de Russie

73. Si la Fédération de Russie peut être tenue responsable des violations de la Convention européenne des droits de l’homme qu’elle a commises jusqu’au 16 septembre 2022, elle n’est plus liée par la Convention après cette date. En conséquence, des millions d’Européen·ne·s sont privés de la protection de la Convention car ils se trouvent dans des territoires qui relèvent de la souveraineté d’États membres du Conseil de l’Europe – l’Ukraine, la Géorgie et la République de Moldova – mais sont sous le contrôle de facto de la Fédération de Russie. Le même type de privation s’applique aux autres traités par lesquels la Fédération de Russie n’est plus liée du fait de son exclusion du Conseil de l’Europe.
74. Le Sommet devrait exiger que la Fédération de Russie se retire des territoires des États membres du Conseil de l’Europe qui sont illégalement sous son contrôle. Parallèlement, il devrait soutenir l’action des mécanismes internationaux de protection des droits humains accessibles à ces Européen·ne·s, par exemple sous l’égide de l’OSCE et des Nations Unies. Le Conseil de l’Europe devrait veiller à ce que les arrêts et décisions de la Cour européenne des droits de l’homme concernant la Fédération de Russie soient utilisés par ces organisations partenaires dans leurs travaux.
75. Dans la perspective du Sommet, il conviendrait d’étudier la possibilité d’instituer un·e représentant·e spécial·e / correspondant·e de la Secrétaire Générale dans ces domaines 
			(21) 
			Cette proposition a
également été faite par le groupe de réflexion de haut niveau dans <a href='https://rm.coe.int/rapport-du-groupe-de-reflexion-de-haut-niveau-du-conseil-de-l-europe/1680a85cf0'>son
rapport</a>.. En tout état de cause, les contacts avec la société civile, les organisations non gouvernementales, les défenseur·e·s des droits humains et les journalistes demeurent essentiels pour recueillir des informations concernant la situation sur le terrain. De même, le Comité des Ministres devrait continuer à examiner régulièrement la question.

15. Viabilité financière du Conseil de l’Europe

76. L’exclusion de la Fédération de Russie et son refus de payer ses arriérés de contribution ont placé le Conseil de l’Europe dans une situation budgétaire difficile, que de nombreux États membres ont promis de combler à court terme. Toutefois, assurer la viabilité financière de l’Organisation va bien au-delà du court terme et il est indispensable de combler le déficit budgétaire laissé par la Fédération de Russie.
77. Un Conseil de l’Europe renouvelé, amélioré et renforcé a besoin des ressources financières nécessaires pour s’acquitter efficacement de son mandat 
			(22) 
			<a href='https://assembly.coe.int/nw/xml/XRef/Xref-XML2HTML-en.asp?fileid=29101&lang=en'>Résolution 2369
(2021)</a> «La vision de l’Assemblée sur les priorités stratégiques
du Conseil de l’Europe», paragraphe 28.. À titre de comparaison, en 2021, le budget ordinaire du Conseil de l’Europe était de 258 millions d’euros. Son budget total ajusté s’élevait à 521 millions d’euros, principalement grâce aux contributions volontaires/ressources extrabudgétaires. L’Union européenne est le principal contributeur aux ressources extrabudgétaires du Conseil de l’Europe par le biais des programmes conjoints UE-Conseil de l’Europe. En 2021, cela représentait 57 % de l’ensemble des contributions extrabudgétaires et un volume total de 36,5 millions d’euros 
			(23) 
			<a href='https://search.coe.int/cm/Pages/result_details.aspx?Reference=CM(2022)62-final'>CM(2022)62-final</a> – Rapport de synthèse sur la coopération entre le Conseil
de l’Europe et l’Union européenne (mai 2021 – mai 2022)..
78. S’il faut se féliciter de l’augmentation régulière des ressources extrabudgétaires au cours des dernières années et poursuivre dans cette voie, les chef·fe·s d’État et de gouvernement devraient prendre l’engagement politique d’augmenter le budget ordinaire du Conseil de l’Europe, en valeur réelle, comme le demande l’Assemblée 
			(24) 
			Voir Avis 298 (2021) «Budgets et priorités du Conseil de l’Europe pour la
période 2022-2025» (rapporteur: M. Tiny Kox, Pays-Bas, GUE), paragraphe 8.. En parallèle, le Sommet devrait soutenir la révision des barèmes des contributions des États membres – qui ont été fixés pour la dernière fois en 1994 – en vue de relever la contribution minimale et d’assurer une plus grande équité dans la manière dont les États membres financent l’Organisation.
79. Il ressort des discussions menées au sein du groupe 46+1 qu’après son adhésion à la Convention européenne des droits de l’homme, l’Union européenne versera une contribution au budget ordinaire du Conseil de l’Europe qui, d’après les derniers calculs, pourrait être égale à 36 % de la contribution d’un gros payeur. Cette contribution sera essentielle pour financer les coûts supplémentaires liés au fonctionnement de la Cour européenne des droits de l’homme.
80. Indépendamment de cette contribution, comme l’a déjà proposé l’Assemblée, il conviendrait d’étudier la possibilité pour l’Union européenne de verser des contributions non affectées au budget du Conseil de l’Europe, compte tenu du solide partenariat stratégique qui existe entre les deux organisations et dont on espère qu’il se renforcera encore 
			(25) 
			Résolution 2430 (2022) «Au-delà du Traité de Lisbonne: renforcer le partenariat
stratégique entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne<a href=''>»</a>, paragraphe 10.11..

16. Conclusions

81. L’Europe traverse une période d’incertitude et de bouleversements. Le changement climatique, la pandémie de covid-19 et la guerre d’agression brutale au cœur du continent, qui risque une nouvelle escalade, sont autant de catastrophes qui ont renforcé le sentiment d’insécurité et de vulnérabilité au sein de la population.
82. S’il n’existe pas de solution facile à ces problématiques, on peut affirmer que les valeurs, les normes et le multilatéralisme font partie de la réponse. La solidité et la résilience des démocraties européennes, leur respect des droits humains et leur adhésion à l’État de droit sont les meilleures garants de la prospérité, de la sécurité et de l’avenir pacifique de chacun. Les chef·fe·s d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe, réunis à l’occasion du 4e Sommet de l’Organisation, doivent réaffirmer leur détermination, leur unité autour de ces valeurs et leur attachement indéfectible au multilatéralisme fondé sur le droit international.
83. Le Sommet devrait réaffirmer son soutien total à la souveraineté, à l’indépendance et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine, demander une aide financière pour sa reconstruction et exiger que la Fédération de Russie soit tenue responsable de la violation du droit international et des dommages qu’elle a causés. Le fait qu’un État européen ait osé mener une invasion totale contre un État voisin, la plus destructrice que l’Europe ait jamais connue depuis la seconde guerre mondiale, devrait susciter une réflexion sur la manière d’assurer une compétence effective sur le crime d’agression, peu importe son auteur.
84. Le Sommet devrait indiquer clairement qu’en renforçant la démocratie, les droits humains et l’État de droit, le Conseil de l’Europe contribue non seulement à améliorer la vie des Européen·ne·s, mais également à maintenir la paix et la sécurité internationales, au sens de la Charte des Nations Unies.
85. Comme n’importe quelle autre organisation internationale, le Conseil de l’Europe ne peut avoir que le poids politique, les prérogatives et l’impact que ses États membres sont prêts à lui donner. C’est pourquoi il est crucial d’organiser un Sommet au plus haut niveau politique qui revalorisera le rôle de l’Organisation, renforcera ses moyens politiques, financiers et techniques et redéfinira sa place et son poids dans l’architecture multilatérale européenne, notamment par rapport à l’Union européenne.
86. Le Conseil de l’Europe qui émergera du Sommet devra avoir adopté une vision d’avenir. Si ses principaux objectifs et domaines de compétence doivent rester les mêmes – la démocratie, les droits humains et l’État de droit – il devrait se voir attribuer davantage de moyens pour conserver son influence et demeurer à l’avant-garde, en s’adaptant à l’évolution de la société et aux demandes des citoyen·ne·s.
87. Les orientations politiques issues du Sommet devraient être suivies de mesures de mise en œuvre et d’une réforme administrative visant à rendre le Conseil de l’Europe plus dynamique, plus efficace, plus visible, plus transparent et plus proche des citoyen·ne·s et de la société civile.
88. L’Assemblée doit être prête à continuer de soutenir le processus conduisant au Sommet, être représentée lors du Sommet et contribuer aux actions qui seront menées dans le prolongement de celui-ci.

Annexe 1 – Tableau synoptique – synthèse des propositions pour le 4e Sommet

(open)

PILIER/DOMAINE

OBJECTIFS

RÉSULTATS ATTENDUS

RÉSULTATS SPÉCIFIQUES

Droits humains

sauvegarder et renforcer le système de la Convention

- préserver l’autorité de la Cour européenne des droits de l’homme

- renforcer l’exécution des arrêts

mettre en place un mécanisme de dialogue politique renforcé pour l’exécution des principaux arrêts

adhésion de l’Union européenne à la Convention européenne des droits de l’homme

donner une impulsion déterminante pour achever les négociations/se féliciter de la conclusion des négociations

adhésion de l’Union européenne à la Cour européenne des droits de l’homme

assurer le rôle de pionnier du Conseil de l’Europe en matière de protection des droits humains

- renforcer la capacité du Conseil de l’Europe à élaborer des instruments juridiques dans les nouveaux domaines de préoccupation

- renforcer le travail du Conseil de l’Europe dans des domaines tels que la protection des données, les droits sociaux, l’égalité femmes-hommes et la protection contre la violence fondée sur le genre et la discrimination

- instrument juridique contraignant du Conseil de l’Europe consacrant le droit à un environnement propre, sain et durable

- Commission/plateforme du Conseil de l’Europe pour le partage d’informations, la promotion de bonnes pratiques et l’appui aux réformes nationales dans le domaine du changement climatique et de la protection de l’environnement

- instrument juridique contraignant du Conseil de l’Europe sur l’intelligence artificielle

Démocratie

lutter contre le recul de la démocratie et ses causes profondes

- accroître la confiance des citoyen·ne·s dans les processus démocratiques

- renforcer la participation démocratique et améliorer la bonne gouvernance à tous les niveaux de gouvernement

- renforcer la démocratie locale

- renforcer l’intégrité du processus électoral

- renforcer les droits sociaux et lutter contre les inégalités

- donner la priorité à ces domaines et rationaliser les activités du Conseil de l’Europe en vue d’en maximiser l’impact

- liste de critères de la démocratie du Conseil de l’Europe

améliorer l’alerte précoce et la réaction rapide

repérer et répondre aux tendances négatives pouvant influer sur la sécurité démocratique

- mettre en place une initiative pour la résilience démocratique qui suivra l’évolution de la démocratie dans les États membres et servira de base à une alerte rapide et à un dialogue politique renforcé pour aider les États membres à faire face aux situations préoccupantes, en s’appuyant sur les travaux des organes et des mécanismes existants au sein du Conseil de l’Europe

- accroître l’échange de bonnes pratiques dans tous les domaines liés à la démocratie et à la gouvernance démocratique

- créer un mécanisme de suivi des évolutions liées à la société civile, à la liberté d’association, à la participation et à l’engagement des citoyen·ne·s dans les États membres du Conseil de l’Europe

- renforcer et étendre les activités du Conseil de l’Europe relatives à l’instauration de la confiance et à la prévention des conflits, y compris dans leurs composantes société civile et coopération transfrontière

- mettre en place un·e Commissaire du Conseil de l’Europe à la démocratie, en tant qu’organisme indépendant élu par l’Assemblée

une démocratie novatrice

- utiliser la technologie pour faire participer les citoyen·ne·s et améliorer l’efficacité et la réactivité de l’administration publique

- élargir les possibilités de consultation publique et de démocratie délibérative/participative

- donner la priorité à ces domaines et rationaliser les activités en vue d’en maximiser l’impact

État de droit

- renforcement du pouvoir judiciaire

- lutte contre la corruption

- renforcement de la bonne gouvernance

- créer un environnement propice à la démocratie et aux droits humains

- accroître la confiance des citoyen·ne·s

- donner la priorité à ces domaines et rationaliser les activités en vue d’en maximiser l’impact

Rétablir le contact avec les Européen·ne·s

 

- accroître la pertinence

- améliorer la visibilité

- maintenir la vocation paneuropéenne

- réforme des méthodes de travail pour assurer une transparence et une accessibilité accrues

- réforme des méthodes de travail pour mettre en place des possibilités de consultations publiques

- intégration de la question de la jeunesse dans les travaux du Conseil de l’Europe ;

- appui au maintien de canaux de communication ouverts avec la société civile bélarusse et russe, dans le respect des valeurs du Conseil de l’Europe

Renforcer le rôle joué par le Conseil de l’Europe en sa qualité de communauté politique

 

accroître l’impact et le suivi

- mise en place d’un certain nombre de mécanismes politiques au sein du Conseil de l’Europe pour accroître l’impact et le suivi

- participation accrue de l’Assemblée et du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux en tant que multiplicateurs des valeurs et des normes du Conseil de l’Europe

- répartition claire des compétences avec les autres initiatives multilatérales

Promotion du multilatéralisme et des relations extérieures

- mettre en avant la contribution du Conseil de l’Europe à un ordre fondé sur des règles en Europe

- renforcer le partenariat stratégique entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne

- renforcer la coopération avec les Nations Unies

- ouverture à la coopération avec les États non membres et les autres organisations internationales intéressés

- donner aux États membres qui souhaitent adhérer à l’Union européenne les moyens de réaliser des progrès tangibles et mesurables pour satisfaire aux critères requis, conformément aux valeurs et aux normes du Conseil de l’Europe

- renforcer le dialogue et la coopération avec l’Union européenne sur les questions relatives à l’État de droit

- faire rayonner les valeurs et les normes au-delà de ses États membres

- réviser le Mémorandum d’accord entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne

Soutien à l’Ukraine

   

- soutien politique à la souveraineté, à l’indépendance et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine

- instruction de veiller à ce que le soutien du Conseil de l’Europe à l’Ukraine reste une priorité et mise en place d’une coordinatrice ou d’un coordinateur spécial·e

- mobilisation pour soutenir l’action du Conseil de l’Europe en Ukraine

- mobilisation en faveur de l’assistance à l’Ukraine et de la reconstruction

Responsabilité de la Fédération de Russie

 

adopter une approche globale de l’obligation de rendre des comptes

- soutien politique à la création d’un tribunal ad hoc pour enquêter et engager des poursuites sur le crime d’agression du pouvoir russe contre l’Ukraine

- soutien à la mise en place d’un registre des dommages causés par l’agression russe

- soutien politique aux juridictions internationales existantes

- soutien du Conseil de l’Europe aux enquêtes et aux poursuites menées par des tribunaux ukrainiens ou hybrides

- réflexion sur les moyens de garantir une compétence effective sur le crime d’agression, en évitant les vides juridiques

Zones placées sous le contrôle de facto de la Fédération de Russie

 

- réaffirmer la souveraineté des États membres du Conseil de l’Europe sur ces territoires

- maximiser l’accès à la protection des droits humains pour les personnes vivant dans ces zones

- soutien à l’action des mécanismes internationaux pertinents de défense des droits humains

- possibilité d’instituer un·e représentant·e spécial·e /correspondant·e de la Secrétaire Générale dans ces domaines

- saluer la collecte de preuves par la société civile, les organisations non gouvernementales, les défenseur·e·s des droits humains et les journalistes

Assurer la pérennité financière du Conseil de l’Europe

   

- prendre l’engagement politique d’augmenter le budget ordinaire du Conseil de l’Europe, en valeur réelle

- charger le Comité des Ministres de revoir les barèmes des contributions des États membres en vue de relever la contribution minimale et d’assurer une plus grande équité dans la manière dont les États membres financent l’Organisation

- étudier la possibilité pour l’Union européenne de contribuer au budget ordinaire du Conseil de l’Europe

Annexe 2 – Aspects procéduraux et documents de référence de l’Assemblée

(open)

1. Origine du rapport et procédure qui en découle

1. Le présent rapport a pour origine une proposition de recommandation intitulée «Un 4e Sommet pour un Conseil de l’Europe renouvelé, amélioré et renforcé», qui a été adoptée par la commission des questions politiques et de la démocratie lors de sa réunion à La Canée, en Grèce, les 16 et 17 mai 2022 
			(26) 
			Doc. 15533<a href=''>.</a>. Le Bureau a renvoyé la proposition à la commission pour rapport. Suite à un appel à candidatures, la commission m’a désignée comme rapporteure le 23 juin 2022.
2. En vue de contribuer à ce rapport, lors de sa réunion du 24 juin 2022, le Bureau de l’Assemblée a décidé de créer une commission ad hoc sur le 4e Sommet des chefs d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe 
			(27) 
			Le mandat de la commission ad hoc se trouve dans le document <a href='https://assembly.coe.int/committee/BUR/2022/BUR011F.pdf'>AS/Bur/CB(2022)11</a>.. La commission ad hoc est présidée par le Président de l’Assemblée parlementaire et se compose des présidents des groupes politiques, des présidents des commissions générales de l’Assemblée, du président de la délégation islandaise et de moi-même.
3. Je tiens à remercier le Président et le Bureau de l’Assemblée pour cette initiative, qui m’a permis de préparer le rapport selon une approche inclusive prenant en compte un éventail de perspectives et de contributions plus large que dans une procédure ordinaire. La Commission ad hoc s’est réunie à trois reprises en 2022: le 24 juin à Strasbourg, le 11 septembre à Paris et le 24 novembre à Reykjavik.
4. Pour la préparation du présent rapport, j’ai pu tirer profit du travail du groupe de réflexion de haut niveau créé par la Secrétaire Générale et présidé par Mme Mary Robinson. Lors de sa réunion à Paris, la commission ad hoc a tenu un échange de vues très intéressant avec M. Evangelos Venizelos, rapporteur du groupe de réflexion. Le rapport a été finalisé peu après et présenté aux Délégués des Ministres. Il apporte une contribution fort utile à la réflexion en cours et j’approuve ses grandes orientations et principales propositions. Mon travail s’étant poursuivi après la publication du rapport du groupe de réflexion de haut niveau, j’ai pu m’appuyer sur les recommandations qui y étaient formulées et en préciser certaines à la lumière de discussions ultérieures.
5. En tant que rapporteure de la commission des questions politiques et de la démocratie, j’ai essayé d’inclure dans mon rapport la plupart des propositions venant de mes collègues. J’ai également eu l’occasion de débattre de certaines idées avec le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe devant lequel j’ai pris la parole lors de sa session plénière le 25 octobre 2022. La coopération avec le Comité des Ministres a été particulièrement intense, dans la ligne des bonnes relations interinstitutionnelles entre les deux organes statutaires. Je tiens à remercier en particulier les présidences irlandaise et islandaise pour le rôle décisif qu’elles ont joué dans l’appel à tenir un 4e Sommet. Le 27 octobre 2022, j’ai eu un échange de vues avec le GT-SOM4 - 4e Sommet des chefs d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe - tandis que la présidente du GT-SOM4, l’ambassadrice Ragnhildur Arnljótsdóttir, est intervenue devant la commission ad hoc du Bureau le 24 novembre 2022.
6. Mon travail a également bénéficié du soutien de la Commission permanente qui a tenu un débat d’actualité sur le 4e Sommet lors de sa réunion à Dublin 
			(28) 
			<a href='https://assembly.coe.int/LifeRay/APCE/pdf/SCs/2022/AS-PER-2022-PV-01-EN.pdf'>AS/Per(2022)PV01</a>., avant d’adopter une déclaration lors de sa réunion à Reykjavik 
			(29) 
			<a href='https://pace.coe.int/fr/news/8896/on-the-roadtoreykjavik-pace-calls-for-a-4th-summit-which-meets-europeans-expectations'>Déclaration.</a>.
7. J’ai reçu par ailleurs plusieurs contributions individuelles de membres de l’Assemblée, de délégations nationales, d’interlocutrices et d’interlocuteurs du Conseil de l’Europe et d’acteurs extérieurs. Elles n’ont pas toutes été intégrées à mes recommandations. Comme je l’ai mentionné dans le rapport, les réunions au niveau des chef·fe·s d’État et de gouvernement sont pour le Conseil de l’Europe des événements exceptionnels qui ont pour but d’apporter une nouvelle vision, un nouvel élan et de nouvelles réponses face à des défis hors du commun. Certaines propositions reçues sont intéressantes et judicieuses mais pourront être mises en œuvre par l’Assemblée ou le Comité des Ministres sans exiger l’aval des chef·fe·s d’État et de gouvernement. Il sera de ma responsabilité de les transmettre aux organes compétents du Conseil de l’Europe afin qu’elles soient prises en compte dans leurs travaux.

2. Textes de référence de l’Assemblée

Renforcer le rôle du Conseil de l'Europe en tant que pierre angulaire de l'architecture politique européenne (Rapporteure: Mme Laima Liucija Andrikienė, Lituanie, PPE/DC). Texte adopté: Résolution 2473 (2022).

Nouvelle escalade dans l'agression de la Fédération de Russie contre l'Ukraine (Rapporteur: Mr Emanuelis Zingeris, Lituanie, PPE/DC). Texte adopté: Résolution 2463 (2022)

La sécurité en Europe face à de nouveaux défis: quel rôle pour le Conseil de l’Europe? (Rapporteur: M. Bogdan Klich, Pologne, PPE/DC). Textes adoptés: Résolution 2444 (2022) et Recommandation 2235 (2022)

L’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine: faire en sorte que les auteurs de graves violations du droit international humanitaire et d’autres crimes internationaux rendent des comptes (Rapporteur: M. Aleksander Pociej, Pologne, PPE/DC). Textes adoptés: Résolution 2436 (2022) et Recommandation 2231 (2022)

Conséquences de l'agression persistante de la Fédération de Russie contre l'Ukraine: rôle et réponse du Conseil de l’Europe (Rapporteur: M. Frank Schwabe, Allemagne, SOC). Textes adoptés: Résolution 2433 (2022) et Recommandation 2228 (2022)

Conséquences de l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine (Rapporteure: Mme Ingjerd Schou, Norvège, PPE/DC). Texte adopté: Avis 300 (2022)

Au-delà du Traité de Lisbonne: renforcer le partenariat stratégique entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne (Rapporteur: M. Titus Corlăţean, Roumanie, SOC). Textes adoptés: Résolution 2430 (2022) et Recommandation 2226 (2022)

Ancrer le droit à un environnement sain: la nécessité d’une action renforcée du Conseil de l’Europe (Rapporteur: M. Simon Moutquin, Belgique, SOC). Textes adoptés: Résolution 2396 (2021) et Recommandation 2211 (2021)

La vision de l’Assemblée sur les priorités stratégiques du Conseil de l’Europe (Rapporteur: M. Tiny Kox, Pays-Bas, GUE). Textes adoptés: Résolution 2369 (2021) et Recommandation 2199 (2021)

Rôle et mission de l’Assemblée parlementaire: principaux défis pour l’avenir (Rapporteur: M. Tiny Kox, Pays-Bas, GUE). Textes adoptés: Résolution 2277 (2019) et Recommandation 2153 (2017)

Appel pour un Sommet du Conseil de l’Europe afin de réaffirmer l’unité européenne, et de défendre et promouvoir la sécurité démocratique en Europe (Rapporteur: M. Michele Nicoletti, Italie, SOC). Textes adoptés: Résolution 2186 (2017) et Recommandation 2113 (2017)

La coopération entre le Conseil de l’Europe et les démocraties émergentes dans le monde arabe (Rapporteur: M. Jean-Charles Gardetto, Monaco, PPE/DC). Texte adopté: Résolution 1831 (2011)

Le suivi de la réforme du Conseil de l’Europe (Rapporteur: M. Jean-Claude Mignon, France, PPE/DC). Textes adoptés: Résolution 1783 (2011) et Recommandation 1951 (2011)

L’avenir du Conseil de l’Europe à la lumière de ses 60 années d’expérience (Rapporteur: M. Jean-Claude Mignon, France, PPE/DC). Textes adoptés: Résolution 1689 (2009) et Recommandation 1886 (2009)