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Rapport | Doc. 15786 | 05 juin 2023

L’inclusion sociale des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées internes par le biais du sport

Commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées

Rapporteure : Mme Nigar ARPADARAI, Azerbaïdjan, CE/AD

Origine - Renvoi en commission: Doc. 15277, Renvoi 4587 du 21 juin 2021. 2023 - Troisième partie de session

Résumé

Les mouvements de population dans les pays européens appellent une vision stratégique pour l’inclusion sociale des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées internes. A ce titre, le sport favorise le bien-être physique et psychologique et représente un formidable potentiel d’intégration sociale pour les migrants, les réfugiées et les personnes déplacées, dans le pays hôte ou la société d’accueil. S’il est utilisé à bon escient, le sport véhicule des valeurs positives et renforce la cohésion des communautés. Il permet également de transmettre des valeurs et de déconstruire les stéréotypes, en particulier lorsqu’il s’agit d’individus vulnérables au sein des communautés migrantes, réfugiées et déplacées internes.

Bon nombre de politiques et de bonnes pratiques d’inclusion sociale existent au niveau des communautés d’accueil ainsi qu’aux niveaux local, régional, national et international. Toutefois, des programmes de soutien sont nécessaires dans plusieurs domaines. Les États membres et les organisations sportives devraient être encouragés à développer leurs propres initiatives nationales et locales, et devraient rejoindre les instruments et initiatives internationaux, notamment ceux du Conseil de l’Europe, tels que la Charte européenne du sport et l’Accord partiel élargi sur le sport. Il conviendrait également de poursuivre le travail de sensibilisation du public à la contribution du sport comme outil favorisant l’inclusion sociale des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées internes. Les États devraient également soutenir le renforcement des structures sportives nationales dans l’optique de mieux inclure ces populations.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 11 mai 2023.

(open)
1. L’Assemblée parlementaire se félicite de l’universalité du sport. Elle note qu’il peut être un fantastique catalyseur de l’empouvoirement et du bien-être physique et psychologique. Le sport peut guérir et faire ressortir le meilleur de soi-même et participe au renforcement de l’estime de soi. Le sport peut contribuer à élaborer une vision positive et nouvelle de la vie, à rassembler les communautés ainsi qu’à les aider à se construire. La pratique du sport peut renforcer le respect mutuel et encourager l’esprit d’équipe.
2. L’Assemblée note que le sport, qui génère d’importantes valeurs positives, présente de nombreux avantages et peut jouer un rôle déterminant dans l’intégration des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées internes, dans le pays hôte ou la société d’accueil. Le sport peut également procurer un sentiment de sécurité aux personnes qui ont été confrontées à de nombreuses difficultés au cours de leur voyage migratoire.
3. Tout en notant que le sport est souvent considéré comme un instrument de politique sociale efficace qui atténue les comportements antisociaux et renforce la cohésion des communautés, l’Assemblée souligne l’importance de la participation active des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées internes, ainsi que des autorités d’accueil aux niveaux central, régional, local et communautaire, à l’élaboration de politiques et de mécanismes facilitant l’inclusion de ces groupes vulnérables par le biais du sport.
4. L’Assemblée est bien consciente des efforts déployés aux niveaux national et international à cet égard, notamment dans le cadre du Pacte mondial sur les réfugiés et de l’invitation faite à l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), aux États et aux entités sportives de signer des partenariats pour faciliter l’accès aux installations sportives, en particulier dans les zones d’accueil des réfugiés. Elle salue les efforts du Comité international olympique (CIO) visant à promouvoir des activités sportives à l’intention des réfugiés et à soutenir la participation d’athlètes réfugiés aux Jeux olympiques de Paris 2024 grâce à l’équipe olympique des réfugiés. Elle se félicite également du lancement de la Fondation olympique pour les réfugiés par le HCR et le CIO.
5. Enfin et surtout, l’Assemblée souligne le rôle actif du Conseil de l’Europe dans la promotion du sport comme moyen d’inclusion et de paix grâce à l’adoption d’instruments juridiques tels que la Charte européenne du sport et de recommandations pertinentes du Comité des Ministres aux États membres, notamment la Recommandation Rec(2001)6 sur la prévention du racisme, de la xénophobie et de l’intolérance raciale dans le sport, la Recommandation Rec(2003)6 pour améliorer l’accès à l’éducation physique et au sport des enfants et des jeunes dans tous les pays européens, la Recommandation CM/Rec(2015)2 sur l’approche intégrée de l’égalité entre les femmes et les hommes dans le sport, ainsi que la Recommandation CM/Rec(2012)10 sur la protection des enfants et des jeunes sportifs contre des problèmes liés aux migrations.
6. Si la création de l’Accord partiel élargi sur le sport (APES) par le Comité des Ministres en 2007 a constitué une nouvelle étape essentielle dans la promotion du sport dans les États membres du Conseil de l’Europe et au-delà, l’Assemblée se félicite des conclusions de la conférence du Conseil de l’Europe des ministres responsables du sport qui s’est tenue à Antalya le 26 octobre 2022, au cours de laquelle les ministres ont appelé l’APES, entre autres, à «utiliser le sport comme un moyen d’intégration sociale des groupes défavorisés, tels que les migrants, les réfugiés, les personnes handicapées et les personnes âgées; développer une boîte à outils fondée sur les meilleures pratiques pour l’inclusion des groupes défavorisés dans tous les aspects du sport, et concevoir un plan de communication pour la promouvoir à grande échelle» (Résolution no 1). L’Assemblée salue également la décision du Comité de direction d’organiser la conférence sur la diversité de l’APES 2023 sur le thème de l’inclusion des enfants migrants et réfugiés par le biais du sport.
7. Consciente des obstacles qui entravent le succès des programmes en faveur de l’inclusion des migrants par le sport, l’Assemblée appelle les États membres du Conseil de l’Europe:
7.1. à tenir dûment compte des valeurs et des principes énoncés dans la Charte européenne du sport;
7.2. à adhérer à l’Accord partiel élargi sur le sport, pour ceux qui ne l’ont pas encore fait, afin d’améliorer la mise en œuvre de la Charte européenne du sport et de bénéficier d’une coopération internationale plus efficace;
7.3. à adopter une législation interdisant toute discrimination dans le sport en raison de la nationalité, du genre, de l’orientation sexuelle, de l’appartenance ethnique, de la langue ou du handicap, ou de toute autre forme de discrimination, et à veiller à son application;
7.4. à faciliter, par des mesures juridiques et pratiques, les déplacements des athlètes réfugiés aux manifestations sportives internationales au même titre que les athlètes non-réfugiés;
7.5. à veiller à ce que toute personne ait la possibilité de pratiquer un sport et à prendre des mesures spécifiques pour que les personnes les plus vulnérables, y compris les migrants, les réfugiés et les personnes déplacées internes, aient un accès adéquat aux installations et activités sportives, en tenant dûment compte des coûts financiers requis, mais aussi de l’âge, du genre, des capacités et d’autres besoins liés à la diversité;
7.6. à veiller à ce que les entraîneurs soient formés pour pouvoir détecter les vulnérabilités des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées, et à les surmonter et à mettre en place des services d’assistance pour permettre aux migrants de se sentir en sécurité et protégés dans les centres sportifs;
7.7. à contribuer à faire en sorte, en organisant des cours de langues, que les différences linguistiques ne soient plus un obstacle à l’inclusion.
8. Conformément au Pacte mondial sur les réfugiés, l’Assemblée encourage les États, les entités sportives, le HCR et le CIO à signer de nouveaux partenariats pour favoriser l’accès aux installations sportives, notamment dans les zones d’accueil des réfugiés, pour promouvoir des activités sportives pour les réfugiés, pour soutenir la participation d’athlètes réfugiés aux Jeux olympiques de Paris 2024 et pour exploiter la Fondation olympique pour les réfugiés lancée par le HCR et le CIO.
9. Consciente que les obstacles structurels et culturels sont plus difficiles à surmonter pour les migrants vulnérables, les réfugiés et les personnes déplacées, notamment les femmes, les enfants, les membres de la communauté LGBTQI+ ou les personnes handicapées, l’Assemblée invite instamment les États membres du Conseil de l’Europe à élaborer des mesures ciblées spécifiques pour promouvoir leur inclusion sociale dans les sociétés d’accueil avec la participation de ces groupes cibles dans les processus de prise de décision.
10. Étant donné que les femmes peuvent être empêchées de pratiquer un sport en raison de préjugés et également pour des raisons logistiques, l’Assemblée recommande:
10.1. l’organisation de vastes campagnes et couvertures médiatiques du sport féminin dans le but de convaincre un plus grand nombre de jeunes filles qui hésitent à s’inscrire à des activités sportives en raison d’obstacles culturels ou psychologiques, ainsi que de déconstruire les stéréotypes et les récits discriminatoires;
10.2. la mise en place de services de garde d’enfants au sein des organisations sportives afin de permettre aux athlètes féminines de disposer de temps pour la pratique sportive.
11. Afin de lutter contre la discrimination, notamment à l’encontre de la communauté LGBTQ+ et des personnes handicapées, l’Assemblée appelle les États membres du Conseil de l’Europe et les organisations sportives à élaborer des campagnes de sensibilisation diffusant des messages de tolérance et d’inclusion tout en déconstruisant les stéréotypes, et en particulier à s’associer au projet du Conseil de l’Europe «Combattre le discours de haine dans le sport».
12. L’Assemblée estime que l’intensification des déplacements de personnes dans les pays européens nécessite une vision stratégique favorisant l’inclusion sociale des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées internes. À cette fin, elle considère que les États membres du Conseil de l’Europe devraient privilégier les projets à long terme et durables, en investissant dans des initiatives intersectorielles conduisant à une meilleure inclusion des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées internes dans les sociétés d’accueil, notamment la mise en place d’activités sportives parallèlement à des programmes éducatifs. Pour y parvenir, l’Assemblée appelle les États membres du Conseil de l’Europe à consacrer davantage de ressources à l’élaboration de politiques efficaces d’inclusion sociale afin d’éviter que les coûts soient supportés par les organisations sportives, qui pourraient envisager, au vu de leur montant excessif, de limiter les activités sportives. Par conséquent:
12.1. les migrants, les réfugiés et les personnes déplacées internes devraient se voir accorder le libre accès aux installations et aux activités sportives, y compris la fourniture de tenues sportives en cas de besoin;
12.2. compte tenu des effets thérapeutiques des activités sportives, les organisations sportives devraient disposer de ressources suffisantes en matière d’assistance psychologique et sociale afin d’aider toutes les personnes inscrites, en particulier les migrants;
12.3. l’égalité d’accès aux installations sportives, notamment pour les personnes handicapées, devrait être garantie.
13. Des ressources supplémentaires devraient être allouées pour promouvoir la collaboration entre organisations sportives et non sportives pour mettre en place des mécanismes de coopération et des actions sociétales intersectorielles.
14. L’Assemblée est convaincue que la sensibilisation du public aux avantages du sport en tant que moyen de promotion de l’inclusion sociale des migrants devrait être poursuivie. À cette fin, elle invite les États membres et les organisations sportives:
14.1. à mettre en place des campagnes de sensibilisation efficaces pour souligner l’importance d’inclure les migrants dans la société, réduisant ainsi les cas de racisme, de discrimination et de discours de haine;
14.2. à organiser des campagnes de communication ciblant les migrants, les réfugiés et les personnes déplacées internes afin que ces personnes sachent qu’il existe des projets spécifiques axés sur leur inclusion sociale.
15. Étant donné l’importance de l’échange de connaissances et d’expériences, l’Assemblée invite les États membres du Conseil de l’Europe à allouer des ressources financières suffisantes pour assurer la pérennité de la plateforme du Conseil de l’Europe de l’intégration des migrants par le sport. Elle les encourage par ailleurs à y télécharger leurs projets afin de pouvoir bénéficier d’une plus grande visibilité au niveau international mais aussi de créer une émulation entre d’autres organisations sportives locales, régionales, nationales et internationales en vue de mettre en place davantage de programmes axés sur le sport visant à inclure des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées internes.
16. Conformément aux approches participatives et communautaires globales du HCR en matière de protection et d’assistance aux réfugiés, l’Assemblée encourage toutes les parties prenantes à collaborer avec les athlètes réfugiés et les organisations dirigées par des réfugiés dans le domaine du sport et à soutenir financièrement ces organisations. En outre, l’Assemblée demande instamment que les organisations sportives nationales ainsi que les comités olympiques et paralympiques soient suffisamment financés pour soutenir les athlètes réfugiés.

B. Exposé des motifs par Mme Nigar Arpadarai, rapporteur

(open)

1. Introduction

1. Les migrants, les réfugiés et les personnes déplacées internes sont confrontés à de multiples défis au cours du périple qu’ils entreprennent pour trouver un lieu plus sûr, ce qui peut compromettre leur aptitude à s’adapter à un environnement inconnu lors de l’installation dans un nouveau pays. Outre l’absence de tout soutien familial et social, les migrants nouvellement arrivés peuvent avoir du mal à s’intégrer dans leur communauté d’accueil et risquent d’être rapidement marginalisés.
2. La pratique du sport et d’une activité physique peut offrir aux migrants, aux réfugiés, aux demandeurs d’asile et aux personnes déplacées internes des possibilités de faire partie d’un milieu où ils trouveront du soutien et de renforcer plus facilement des liens sociaux. Comme le souligne le Code révisé d’éthique sportive du Comité des ministres du Conseil de l’Europe de 1992, «Le sport est également considéré comme une activité qui, exercée de manière loyale, permet à l’individu de mieux se connaître, de s’exprimer et de s’accomplir; de s’épanouir, d’acquérir un savoir-faire et de faire la démonstration de ses capacités; le sport permet une interaction sociale, il est source de plaisir et procure bien-être et santé. 
			(2) 
			 <a href='https://rm.coe.int/native/09000016804cf6b3'>Recommandation
n° R(92)14rév.</a> du Comité des Ministres aux Etats membres sur la Charte
européenne du sport révisée, adoptée par le Comité des Ministres
le 24 septembre 1992 lors de la 480e réunion
des Délégués des Ministres et révisée lors de la 752e réunion
le 16 mai 2001, dans la section «Définition du fair play».» Plus récemment, le Livre blanc sur le sport de la Commission européenne de 2007 soulignait que le sport «véhicule des valeurs importantes telles que l’esprit d’équipe, la solidarité, la tolérance et la loyauté, contribuant à l’épanouissement et à l’accomplissement personnel 
			(3) 
			 COM(2007)391, «<a href='https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=CELEX%3A52007DC0391'>White
Paper on Sport</a>», 11 juillet 2007, paragraphe 1.». Il encourage également les personnes à prendre part à la vie de la communauté où ils sont installés et les aide à développer une citoyenneté active.
3. En raison de ses effets bénéfiques sur le bien-être mental et physique, le sport est souvent considéré comme un instrument efficace de politique sociale qui atténue les comportements antisociaux, améliore la cohésion au sein des communautés et contribue à développer l’estime de soi 
			(4) 
			Russell
Hoye, Matthew Nicholson et Kevin Brown, «<a href='https://research.monash.edu/en/publications/involvement-in-sport-and-social-connectedness'>Involvement
in sport and social connectedness</a>», International Review for
the Sociology of Sport, 50(1),
21 February 2015, pages 3–21.. L’inclusion des migrants par le biais du sport est donc envisagée comme un processus exigeant la participation des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées internes, mais aussi des membres de la communauté d’accueil 
			(5) 
			ISCA, <a href='https://irts.isca.org/pdf/IRTS_Implementation_Guide_Final.pdf'>https://irts.isca.org/pdf/IRTS_Implementation_Guide_Final.pdf</a>..
4. Plusieurs pays d’Europe, mais aussi des clubs sportifs et des fédérations sportives, ont mis en œuvre des projets facilitant l’inclusion des migrants par le biais du sport, tant au plan national que local. Des membres de la société civile, tels que des organisations non gouvernementales et des associations locales, sont également à l’origine de la mise en œuvre de nombreux projets et initiatives visant à améliorer l’inclusion sociale des migrants par le biais du sport.
5. Les organisations internationales et européennes jouent aussi un rôle essentiel en encourageant et en favorisant la mise en œuvre de telles mesures. De ce point de vue, le Conseil de l’Europe a été particulièrement actif dans la promotion de projets visant à faciliter l’inclusion sociale des migrants, notamment dans le cadre de l’Accord partiel élargi sur le Sport. Par ailleurs, la Plate-forme de l’intégration des migrants par le sport a été mise en place comme un réseau de porteurs de projets visant à promouvoir l’inclusion sociale des migrants par le biais du sport. Mise en œuvre dans le cadre du Plan d’action du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants réfugiés et migrants en Europe (2017-2019) et en coopération avec l’Union européenne des associations de football (UEFA), la plate-forme est un moyen utile de partager des bonnes pratiques et de rapprocher des initiatives sur ce sujet. L’Union européenne et le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) jouent également un rôle moteur dans la mise en œuvre de mesures inclusives axées sur le sport au niveau international.
6. Le présent rapport fera l’inventaire des bienfaits du sport en tant qu’outil d’inclusion sociale, des bonnes pratiques en la matière et des solutions contribuant à la réalisation effective de l’inclusion des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées internes par le biais du sport.

2. Le sport comme moyen d’inclusion sociale des migrants

7. Les processus migratoires peuvent être très difficiles à vivre sur le plan personnel, car ils contraignent souvent les migrants à quitter leur famille et leurs amis et à se familiariser avec de nouvelles cultures. Leur connaissance limitée des lois du pays d’accueil et leur statut de vulnérabilité peuvent les rendre vulnérables aux abus, à l’exploitation ou à la marginalisation sociale 
			(6) 
			UNHCR, IOC et Terre
des Hommes, «<a href='https://www.unhcr.org/media/sport-protection-toolkit'>Sport
for Protection Toolkit. Programming with Young People in Forced Displacement
Settings »</a>, 2018, p. 14.. Dans ce contexte, les communautés locales conservent un rôle important dans la promotion de l’inclusion sociale des nouveaux arrivants, par exemple en nouant des relations interpersonnelles, en favorisant l’accès des migrants aux services publics et en les incluant dans la vie quotidienne de la communauté en identifiant leurs principales vulnérabilités. Le sport peut donc être un outil crucial dans ce cadre.
8. L’inclusion sociale devrait être renforcée dans le cadre d’une approche à double sens. Si les migrants gagnent à mieux comprendre les traditions locales et à développer un sentiment d’appartenance à la communauté d’accueil, les locaux qui les accueillent s’enrichissent également au contact d’autres cultures et bénéficient de la contribution humaine et financière que les migrants peuvent apporter à la communauté. Il est donc essentiel de planifier des approches de proximité favorisant l’inclusion sociale des migrants par le sport, dans lesquelles les activités sportives ne sont pas uniquement conçues pour renforcer les relations interpersonnelles et briser les barrières de l’intolérance, mais aussi pour inclure efficacement les migrants dans les sociétés. En d’autres termes, les organisations sportives et non sportives locales devraient coopérer afin que les migrants puissent utiliser les activités sportives pour partager leurs connaissances, accéder aux services sociaux et contribuer au marché de l’emploi sans être victimes de réseaux abusifs. La coopération entre les acteurs locaux s’avère également fructueuse pour mieux s’attaquer aux problèmes qui peuvent survenir dans le contexte de l’inclusion sociale des migrants.

2.1. Le sport en tant que thérapie efficace des traumatismes et moyen d’empouvoirement

9. Les migrants, les réfugiés et les personnes déplacées internes sont susceptibles d’avoir subi des traumatismes dans leur pays d’origine, au cours du processus de migration et lors de leur installation dans le pays d’accueil. Ces traumatismes ont généralement un impact à long terme sur leur santé mentale, qui peut même s’aggraver en cas d’exclusion sociale, d’incapacité à trouver un emploi ou à comprendre les coutumes locales dans la société d’accueil. En effet, en 2019, le Comité pour la santé des exilé·e·s (Comede) constatait que 64% des personnes exilées examinées par des psychologues et des médecins en France entre 2013 et 2017 souffraient de syndromes psycho-traumatiques dus à des violences verbales et physiques ou à une incapacité à s’intégrer dans les communautés 
			(7) 
			Comité pour la santé
des exilés, «<a href='https://www.comede.org/rapport-dactivite-et-dobservation-2019/'>La
santé des exilés. Rapport d'activité et d'observation 2019</a>», 2019, p. 82.. La combinaison de tous ces facteurs peut avoir des effets néfastes sur la confiance et le bien-être psychologique des migrants.
10. Cependant, les activités sportives peuvent avoir un effet thérapeutique sur le bien-être des migrants. Tout d’abord, le sport permet aux gens d’échapper aux problèmes quotidiens ou, au moins, de ne pas penser constamment aux expériences traumatisantes précédentes 
			(8) 
			IRTS, «<a href='https://irts.isca.org/updates/sport-and-humanitarian-partnerships/'>Barriers
and future opportunities for sport and non-sport organisations to
use sport and physical activities for inclusion of refugees</a>», 18 juin 2020, p. 7.. Les contacts noués avec des membres de la communauté locale permettent également d’exporter ces effets thérapeutiques dans la vie quotidienne, car briser les barrières de l’isolement constitue la première étape pour surmonter les difficultés personnelles. En outre, la présence d’entraîneurs, de formateurs ou de bénévoles dans les centres sportifs peut être un cadre rassurant pour les personnes ayant besoin d’une assistance psychologique, car parler avec ces personnes peut être un moyen de surmonter des perceptions erronées ou de partager des difficultés et des craintes. En d’autres termes, les associations sportives peuvent devenir des lieux où les migrants se sentent en sécurité et protégés.
11. Outre leur impact positif reconnu sur le bien-être physique, la participation à la réduction du stress et l’amélioration de la santé, les activités sportives peuvent également renforcer la capacité de résilience personnelle aux difficultés 
			(9) 
			UNHCR, IOC et Terre
des Hommes (2018), op. cit., pp.
17-18.. Elles peuvent aider les migrants et les locaux à se comprendre et à comprendre les autres, en attirant l’attention sur les faiblesses et les forces. Elles favorisent également le renforcement de compétences non techniques, notamment la capacité à s’adapter à de nouveaux environnements ou à prendre des décisions réfléchies. Enfin, la réussite sportive renforce les aptitudes de leadership et la confiance en soi 
			(10) 
			Chiara D’Angelo, Chiara
Corvino & Caterina Gozzoli, «<a href='https://www.mdpi.com/2075-4698/11/2/44'>The Challenges
of Promoting Social Inclusion through Sport: the experience of a
sport-based initiative in Italy</a>», Societies 2021,
11(2), 12 mai 2021..
12. Le renforcement de l’estime de soi peut donc avoir des répercussions sur l’autonomisation des migrants. La réussite sportive crée un sentiment de prestige au sein d’une communauté sportive, lequel est encore plus grand lorsqu’il s’agit de postes à responsabilité. Par exemple, les entraîneurs, les bénévoles ou les assistants migrants sont respectés par les locaux et peuvent devenir des modèles pour les migrants nouvellement arrivés, qui seront enclins à participer à des activités sportives socialement inclusives. En outre, les effets de l’inclusion sportive sur l’employabilité peuvent s’avérer être des formes cruciales d’empouvoirement des migrants 
			(11) 
			Commission européenne,
«<a href='https://ec.europa.eu/migrant-integration/library-document/mapping-good-practices-relating-social-inclusion-migrants-through-sport_en'>Mapping
of good practices relating to social inclusion of migrants through
sport</a>», 30 juin 2016, p. 10.. En fait, la participation à des activités sportives peut ouvrir la voie à des projets de volontariat ou à des stages en tant qu’entraîneurs, conseillers en matière de politiques socialement inclusives, etc. Enfin, les activités sportives peuvent être intégrées dans les programmes éducatifs et offrir ainsi aux migrants davantage de possibilités de s’intégrer dans la société, d’obtenir des diplômes et de gagner de nouveaux amis. En d’autres termes, le sport permet aux personnes de devenir maîtres de leur propre vie et de combler les différences culturelles avec les autres.

2.2. La valeur du sport dans une approche de proximité

2.2.1. Les liens avec la communauté d’accueil

13. Dans la mesure où une approche de proximité suppose une coopération entre les acteurs locaux et la participation de migrants dans des projets socialement inclusifs, ses avantages peuvent être ressentis par les deux parties. Du point de vue des migrants, ces avantages concernent la possibilité de s’intégrer dans la société d’accueil, de bénéficier des effets d’entraînement découlant des réseaux sociaux et de développer un sentiment d’appartenance.
14. Le sport peut souvent aider les migrants à briser la glace 
			(12) 
			IRTS (2020), op. cit., p. 8; voir aussi Commission
européenne (2016), op. cit.,
p. 7.. En effet, la participation régulière à des activités sportives peut les aider à mieux se faire connaître auprès de la communauté locale et à franchir les premières étapes d’une inclusion sociale effective. Nouer des liens d’amitié permet aux migrants de faire connaissance avec d’autres personnes. Ainsi, les liens de confiance peuvent favoriser l’accès des migrants au marché de l’emploi local et à d’autres activités éducatives (par exemple, des cours de langue, etc.), réduisant ainsi les différences perçues avec les locaux.
15. Le sport peut également être un véhicule de transmission de valeurs et de coutumes 
			(13) 
			Mabillard
Vincent, «<a href='https://sportdiplomacy.files.wordpress.com/2012/10/sport-intc3a9gration-fr.pdf'>Le
sport: un facteur d’intégration ou d’exclusion sociale?</a>», septembre-octobre 2012, p. 9. Grâce aux activités sportives, les migrants peuvent éprouver un sentiment d’appartenance aux communautés locales et s’habituer à la culture des clubs ou aux traditions locales 
			(14) 
			UNHCR, IOC et Terre
des Hommes (2018), op. cit.,
p. 16.. Dès lors, la persistance de perceptions erronées réciproques dues à des différences culturelles diminue et laisse la place à des perspectives communes.
16. Cela étant, une approche de proximité de l’inclusion sociale par le sport peut également apporter des avantages importants aux sociétés et aux organisations sportives concernées sur le plan de la cohésion sociale, à savoir «les liens qui unissent les personnes au sein d’une communauté (y compris le degré d’interaction, de partage des caractéristiques et des intérêts culturels, religieux ou sociaux communs, et/ou la capacité d’atténuer les disparités et d’éviter la marginalisation)» 
			(15) 
			Idem.. En fait, la poursuite collective d’objectifs communs permet aux individus de compter les uns sur les autres et de créer ainsi des liens de confiance. Si la réussite sportive peut être un moyen important de renforcer la confiance et le respect des migrants au sein d’une société, les environnements concurrentiels peuvent également être préjudiciables à l’inclusion sociale, et les scénarios gagnants-perdants peuvent finir par attiser la haine et renforcer les stéréotypes entre les différents groupes. Il est donc fréquent de promouvoir des activités sportives qui visent à favoriser la coopération au sein d’une équipe afin de surmonter ces difficultés et de nouer des liens interpersonnels 
			(16) 
			ISCA
(2018), op. cit., p. 18..
17. Cependant, les effets les plus concrets de la création de liens inclusifs entre les migrants et la société d’accueil par le biais du sport concernent la capacité d’élargir les points de vue personnels grâce à la rencontre de différentes cultures 
			(17) 
			IRTS (2020), op. cit., p. 10.. Les sociétés d’accueil peuvent ainsi comprendre les vulnérabilités des migrants et mettre en place des solutions communes efficaces pour les éliminer. En outre, le sport réduit les écarts entre les personnes, atténue la discrimination et combat les stéréotypes. Des projets d’inclusion efficaces peuvent ainsi changer à long terme la position et le discours de la société d’accueil à l’égard des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées internes 
			(18) 
			UNHCR, IOC et Terre
des Hommes (2018), op. cit.,
p. 16; voir aussi IRTS (2020), op. cit.,
p. 11..

2.2.2. L’inclusion des personnes vulnérables

18. Parfois, les projets sportifs inclusifs ciblent des catégories spécifiques de migrants, de réfugiés et de personnes déplacées internes pour mieux identifier leurs vulnérabilités et trouver des solutions de proximité 
			(19) 
			 Voir à cet égard la
Recommandation CM/Rec(2021)5 du Comité des Ministres aux États membres
sur la Charte européenne du sport révisée (adoptée par le Comité
des Ministres le 13 octobre 2021 lors de la 1414e réunion
des Délégués des Ministres), Article 6.2, d..
19. Deux facteurs principaux contribuent à expliquer la faible participation des femmes aux activités sportives. Premièrement, des barrières culturelles peuvent les empêcher de participer à des projets sportifs. En effet, elles ont parfois besoin de l’autorisation de leur père ou d’autres pairs masculins, et certaines cultures peuvent considérer que le sport n’est pas approprié pour les femmes. Ces obstacles culturels à l’inclusion des femmes sont parfois même renforcés par les activités sportives locales elles-mêmes car elles reposent souvent sur une culture de la masculinité et sur des mécanismes patriarcaux. En outre, par rapport aux garçons, les filles sont souvent dépeintes comme introverties et repliées sur elles-mêmes, ce qui diminue d’autant la tentative de les inclure socialement par le sport. Deuxièmement, les sports féminins souffrent souvent d’une couverture médiatique limitée, ce qui réduit la possibilité de développer des modèles qui pourraient inciter les femmes migrantes à participer à des activités sportives 
			(20) 
			Mabillard
Vincent (2012), op. cit.,
p. 8.. Ces facteurs combinés peuvent donc amener les femmes à garder le silence et à ne pas demander qu’une plus grande attention soit prêtée à leur inclusion sociale par le biais du sport.
20. Si les vulnérabilités des femmes migrantes sont correctement identifiées, le sport peut contribuer à favoriser leur empouvoirement et leur visibilité dans les sociétés. Les associations sportives peuvent ainsi élaborer des programmes ciblant spécifiquement les femmes migrantes. Il serait bon également que les femmes entraîneures bénéficient d’une plus grande visibilité afin de jouer un rôle de catalyseur du changement et de modèle pour les jeunes femmes migrantes 
			(21) 
			David Ekholm, Magnus
Dahlstedts et Julia Rönnbäck, «<a href='https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/17430437.2018.1505870'>Problematizing
the absent girl: sport as a means of emancipation and social inclusion</a>», Sport in Society,
vol. 22, n° 6, 13 janvier 2019, pp. 1053-1055.. Dans le premier scénario, les programmes fondés sur l’égalité des genres pourraient répondre plus efficacement aux besoins spécifiques liés au genre. Dans le deuxième cas, une plus grande visibilité des sportives pourrait avoir des répercussions sur la reconnaissance sociale et l’empouvoirement.
21. Les activités sportives peuvent également être un moyen utile de transmettre des valeurs aux enfants 
			(22) 
			Delphine Rouilleault,
«<a href='https://www.france-terre-asile.org/toutes-nos-publications/details/1/268-le-sport-sur-le-podium-de-l-insertion'>Le
sport sur le podium de l’insertion</a>», La lettre de l’asile et
de l’intégration, N. 96, janvier 2022, p. 7.. En effet, comme toute société, le sport est fondé sur le respect de règles communément admises et transmet donc des principes qui sont au cœur de la vie quotidienne. En outre, le fait d’apprendre aux enfants à ne pas discriminer des personnes sur la base de leurs différentes caractéristiques et à déconstruire les stéréotypes permet aux associations sportives de jeter les bases d’une société plus inclusive.
22. Les cas enregistrés de discrimination dans les milieux sportifs concernent souvent la communauté LGBTQ+. En conséquence, la peur de la violence verbale et physique pousse environ 20 % des personnes LGBTQ+ à s’abstenir de participer à des sports qui les intéressent 
			(23) 
			OutSport, «<a href='https://www.sporthumanrights.org/library/outsport-toolkit-supporting-sport-educators-in-creating-and-maintaining-an-inclusive-sport-community-based-on-diversity-of-gender-identities-and-sexual-orientations/'>Outsport
Toolkit. Supporting sport educators in creating and maintaining
an inclusive sport community based on diversity of gender identities
and sexual orientations</a>», 2019, p. 6.. Or les entraîneurs et les formateurs ont une grande responsabilité dans la diffusion de valeurs inclusives. On note à cet égard que des organisations sportives ont commencé à s’attaquer au problème de l’homo/transphobie dans le sport en lançant des campagnes de sensibilisation. En outre, les déclarations de plus en plus fréquentes de professionnels du sport sur leur orientation sexuelle contribuent activement à transmettre un message de tolérance au sein des associations et des organisations sportives.
23. Enfin, le sport peut également être une étape de l’inclusion sociale des personnes handicapées. En fait, ces personnes se heurtent souvent à des obstacles physiques pour accéder au sport, ainsi qu’aux préjugés des communautés locales. De plus, les projets axés sur le sport souffrent souvent d’un financement insuffisant des activités parasportives. Pourtant, une plus grande couverture médiatique des Jeux paralympiques a contribué à modifier la perception des handicaps et les champions paralympiques sont un facteur de changement en faveur d’une plus grande inclusion sociale des personnes handicapées 
			(24) 
			Mabillard Vincent (2012), op. cit., p. 8..

2.2.3. Le sport comme moyen de promouvoir l’égalité des genres

24. Des publications ont démontré que les femmes sont souvent absentes des activités sportives, car elles sont plutôt invitées à «contribuer aux tâches ménagères 
			(25) 
			David Ekholm, Magnus
Dahlstedts et Julia Rönnbäck, op. cit.,
p. 1051.», en nettoyant ou en cuisinant. En outre, des codes de conduite prédéfinis peuvent les pousser à ne se rendre dans des centres sportifs que pour regarder jouer leurs fils. Par ailleurs, lorsqu’elles participent à des sports d’équipe, il est possible qu’elles soient reléguées à des rôles «inférieurs» afin que les garçons puissent jouer sans se soucier de leur participation. La combinaison de tous ces facteurs renforce les déséquilibres de pouvoir dans les sociétés.
25. Cependant, le sport devrait être un moteur de la promotion de l’égalité des genres. Certes, les équipes mixtes peuvent parfois perpétuer des mécanismes de discrimination, mais les entraîneurs et les bénévoles sont à même de promouvoir l’égalité des genres en répartissant équitablement les rôles entre les filles et les garçons. De plus, le fait de modifier des activités sportives pour améliorer la coopération en vue d’atteindre un objectif commun permet de nouer des relations de confiance dans lesquelles chacun assume un certain degré de responsabilité et d’importance. Enfin, une couverture médiatique plus large des sports professionnels féminins contribuerait à modifier la perception sociale des athlètes féminines et à élever les championnes au rang de modèles pour les jeunes filles. C’est en procédant ainsi que la réduction des écarts entre les sports masculins et féminins peut avoir des répercussions bénéfiques sur la vie quotidienne dans la société.

3. Obstacles à la réussite des programmes d’inclusion des migrants

26. Des publications et des acteurs internationaux ont mis en évidence plusieurs facteurs qui peuvent entraver l’inclusion sociale effective des migrants par le biais d’activités sportives. Ces obstacles peuvent être résumés en deux catégories principales: les obstacles structurels et les obstacles socio-personnels. Tous ces facteurs peuvent souvent s’entremêler, créant des environnements hostiles pour les migrants. Il est donc essentiel de les connaître afin de lutter efficacement contre leur incidence négative sur une approche de proximité de l’inclusion sociale des migrants par le biais du sport.

3.1. Obstacles structurels: accès limité et contraintes financières

27. Les obstacles structurels peuvent avoir un impact négatif non seulement sur les migrants mais aussi sur les organisations qui participent à la promotion d’activités sportives favorisant leur inclusion sociale. Du point de vue des migrants, ces obstacles sont principalement l’absence d’activités sportives, ou un accès limité à celles-ci, en raison de l’emplacement des centres sportifs et des besoins de transport, des coûts de participation, ainsi que des contraintes juridiques. En outre, la hiérarchisation des activités constitue un autre obstacle structurel important.
28. Le premier facteur important qui limite la possibilité qu’ont les migrants d’accéder aux activités sportives est l’emplacement des centres sportifs et des projets sportifs d’inclusion sociale. En effet, ces activités sont généralement menées dans les centres-villes et les migrants vivant dans les banlieues ont moins de possibilités de s’y rendre 
			(26) 
			IRTS
(2020), op. cit., p. 13.. L’absence de réseaux de transport efficaces ou leur coût élevé peuvent jouer un rôle essentiel en dissuadant les migrants de participer à des activités sportives situées loin de leur lieu d’hébergement. En outre, l’accès aux installations sportives peut parfois être restreint pour des activités informelles, ce qui réduit encore les possibilités pour les migrants qui ne sont pas inscrits dans un club de sport de jouer avec d’autres membres de leur communauté.
29. Non seulement les migrants doivent faire face à des frais de transport, mais l’inscription dans des clubs de sport peut nécessiter des frais d’entrée. En outre, les activités sportives peuvent impliquer certains coûts cachés comme les tenues sportives obligatoires ou les frais de déplacement pour les compétitions. Si certains clubs sportifs soulignent l’importance d’avoir des tenues communes pour réduire les différences entre les joueurs et renforcer l’appartenance à une communauté, leur coût est souvent élevé, en particulier pour les migrants 
			(27) 
			IRTS
(2020), ibid.. Ces frais, que les migrants sans emploi peuvent considérer comme trop élevés, peuvent finir par renforcer les mécanismes d’inégalités sociales.
30. Des questions juridiques peuvent parfois créer des obstacles à la participation des migrants à des activités sportives de proximité. En effet, des titres de séjour sont parfois nécessaires pour s’inscrire dans des clubs sportifs et participer à des compétitions. Cependant, c’est surtout l’incertitude quant à leur statut, due à la procédure en cours d’obtention d’un titre de séjour, qui peut inciter psychologiquement les migrants à ne pas s’intégrer dans les communautés sportives ou à nouer des relations personnelles, car ils pourraient bientôt être contraints de quitter le pays 
			(28) 
			Jondis Schwartzkopff,
«<a href='https://sportinclusion.net/integration-of-refugees-through-sport-a-review-of-empirical-literature-and-evaluation-studies-2/'>Integration
of Refugees through Sport. A review of empirical literature and
evaluation studies</a>», 20 novembre 2022, p. 13; voir également IRTS (2020), op. cit., p. 12..
31. Enfin, le sport n’est souvent pas une priorité pour les migrants, les réfugiés et les personnes déplacées internes. Le manque d’argent peut les pousser à donner la priorité à des activités essentielles à la subsistance de la famille plutôt qu’aux loisirs. Dans ce contexte, les enfants migrants sont souvent invités à contribuer aux moyens de subsistance de la famille, en s’occupant de leurs frères et sœurs ou en contribuant aux tâches ménagères.
32. Cependant, les obstacles structurels peuvent également limiter les capacités et les possibilités des organisations sportives d’inclure efficacement les travailleurs migrants dans leurs activités. Ces obstacles structurels sont liés à un financement insuffisant, à des lacunes en matière de politiques, à des facteurs organisationnels et à des difficultés à entreprendre des projets de coopération avec d’autres acteurs.
33. Le premier obstacle à l’inclusion sociale des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées internes par le biais du sport est le manque de fonds privés et publics suffisants. Le problème est encore plus aigu dans le cas de projets de bénévolat ou lorsque les migrants ont un accès gratuit aux activités sportives. Trois raisons principales peuvent expliquer l’absence d’un soutien financier suffisant. Premièrement, les activités sportives ne sont souvent pas privilégiées par les acteurs publics et privés. Deuxièmement, ces acteurs ont besoin de données vérifiables sur l’efficacité du sport dans l’inclusion des migrants afin d’être certains que leurs ressources ne seront pas gaspillées 
			(29) 
			UNHCR,
«<a href='https://www.unhcr.org/unhcr-sport-strategy-2022-2026.html'>More
than a game. The UNHCR Sport Strategy 2022-2026</a>», novembre 2022, p. 15.. Cependant, le manque de fonds peut les amener à donner la priorité à d’autres projets. Enfin, le fait que les financements soient souvent affectés à certains types ou thématiques de dépenses impose aux organisations sportives des méthodes et des coûts induits. Partant, les acteurs opérationnels peuvent être limités dans leurs capacités et l’inclusivité des projets sportifs ne peut être que partiellement efficace.
34. Le manque de ressources suffisantes pour les activités sportives peut également s’expliquer par la présence de lacunes dans les politiques ainsi que par des perspectives politiques peu favorables. Les fonds publics dépendent souvent d’objectifs à court terme, qui ont des perspectives de durabilité faibles ou inexistantes et manquent de vision intersectorielle. Ces lacunes réduisent ainsi la possibilité qu’ont les organisations sportives de développer des projets pluriannuels et intersectoriels et de gagner en visibilité. Il en résulte que les migrants nouvellement arrivés ne sont pas systématiquement au fait qu’il existe des activités sportives consacrées à l’inclusion sociale, notamment en raison de leur discontinuité 
			(30) 
			ISCA (2018), op. cit., pp. 28-29.. En outre, le manque de communication entre les différents services publics peut conduire à financer des projets similaires dans le même domaine d’intervention sans vraiment différencier efficacement les activités ciblées 
			(31) 
			IRTS
(2020), op. cit., pp. 18-19..
35. Les lacunes organisationnelles des associations sportives et non sportives peuvent également constituer des obstacles structurels. En particulier, certaines organisations sportives ne sont pas convaincues qu’elles devraient promouvoir l’inclusion sociale des migrants et préfèrent privilégier les compétitions. En conséquence, ces clubs n’acceptent que des personnes qui présentent des capacités physiques et techniques élevées, ce qui exclut les migrants qui ne sont pas familiers avec le sport ou ceux qui hésitent à entrer dans des clubs sportifs 
			(32) 
			IRTS (2020), op. cit., p. 12.. Ces mécanismes d’exclusion sociale sont même exacerbés par le manque de compétences des entraîneurs et des bénévoles en matière de gestion des différentes cultures ou par l’absence d’assistance psychologique aux migrants, aux réfugiés et aux personnes déplacées internes 
			(33) 
			IRTS (2020), op. cit., p. 15..
36. Enfin, les difficultés rencontrées dans la réalisation de projets de coopération entre les organisations locales sportives et non sportives peuvent créer des obstacles structurels qui compromettent leur efficacité. L’existence de liens de confiance est souvent considérée comme une condition préalable au développement de nouvelles collaborations, et l’absence de programmes réunissant différentes parties prenantes dans ce domaine ne facilite pas les activités intersectorielles. Dès lors, les associations et les bénévoles ont tendance à ne concevoir des projets qu’avec des acteurs de confiance, sans s’engager dans d’autres partenariats qui pourraient être fructueux. En outre, des divergences dans les mentalités, les valeurs et les approches peuvent empêcher la création d’activités de proximité. Les écarts qui existent en matière de ressources humaines et financières peuvent même aggraver ces difficultés, car les organisations les mieux financées prétendent généralement diriger les projets 
			(34) 
			IRTS
(2020), op. cit., pp. 18-20.

3.2. Obstacles culturels et personnels

37. Outre les obstacles structurels, les obstacles à l’inclusion sociale des migrants par le sport peuvent également apparaître dans les éléments culturels, interpersonnels et personnels. En fait, l’efficacité et la pérennité des activités sportives visant à favoriser l’inclusion sociale des migrants dépendent non seulement du financement et de l’accès mais aussi de la capacité d’intégrer des valeurs d’inclusion et de tolérance dans les sociétés. De manière plus générale, la pérennité exige qu’une perspective commune soit partagée par la communauté d’accueil et les nouveaux arrivants.
38. Les principaux obstacles à la participation aux activités sportives sont fondés sur des facteurs linguistiques, psychologiques et culturels. Leur impact peut parfois être exacerbé par des comportements hostiles ou le manque de communication et d’activités inclusives de la part des communautés locales.
39. La langue est le premier obstacle à une inclusion sociale effective des migrants dans les communautés locales. L’incapacité à parler la (les) langue(s) locale(s) réduit les chances d’entrer en contact avec les habitants, voire de comprendre les règles d’une activité sportive. Elle peut donc avoir un impact psychologique néfaste sur les migrants, les réfugiés et les personnes déplacées internes, car le fait de ne pas pouvoir se familiariser avec les sports locaux peut renforcer la réticence à l’égard des activités sportives et le sentiment d’être inadapté à ces dernières 
			(35) 
			Mabillard Vincent (2012), op. cit., p. 9; see also UNHCR (2022), op. cit., p. 16..
40. Les traditions culturelles et religieuses peuvent aussi être à l’origine de certains obstacles. En effet, des parents peuvent parfois interdire à leurs enfants de pratiquer un sport parce qu’ils n’en connaissent pas les effets sociaux positifs ou qu’ils n’en sont pas conscients. Cela peut être particulièrement évident lorsque les filles sont impliquées.
41. En outre, les différences culturelles peuvent constituer des obstacles pratiques à la participation des migrants à des activités sportives socialement inclusives. Par exemple, boire ou transpirer peut être considéré comme offensant ou inapproprié dans certaines cultures 
			(36) 
			IRTS
(2020), op. cit., p. 13..
42. Enfin, les communautés locales elles-mêmes peuvent finir par créer des environnements hostiles à l’inclusion des migrants. En effet, les organisations sportives et non sportives ne sont pas toujours engagées dans des projets inclusifs et ne comprennent pas systématiquement les effets sociaux positifs du sport. Elles peuvent dans ce cas se montrer réticentes à aborder différentes cultures et exiger que les migrants, les réfugiés et les personnes déplacées internes assimilent les coutumes nationales et mettent de côté leurs propres traditions culturelles et religieuses. Ces personnes se voient donc imposer un certain nombre d’obligations qui peuvent créer un climat hostile à l’inclusion sociale. 
			(37) 
			IRTS (2020), op. cit., p. 15. D’autres comportements hostiles peuvent se manifester, notamment une discrimination verbale ou des actes d’intimidation et de violence à l’égard des migrants. La combinaison de tous ces éléments peut finir par inciter les migrants à abandonner toute forme d’activité sportive.

4. Politiques et pratiques existantes

4.1. Bonnes pratiques relevées dans les politiques des États

43. En Azerbaïdjan, le sport a toujours été considéré comme un outil essentiel pour améliorer l’inclusion sociale des jeunes et en particulier des réfugiés et des personnes déplacées internes. Ces dix dernières années, le gouvernement a construit 100 ensembles résidentiels modernes et 805 centres sportifs pour les réfugiés et les personnes déplacées internes et érigé des complexes olympiques proposant diverses infrastructures (salles de sport, terrains de football et de volleyball, courts de tennis, gymnases, piscines, etc.) dans les régions les plus peuplées d’Aghdam, Agjabedi, Barda Fuzuli et Tartar. L’Azerbaïdjan a également mis en œuvre dans ses districts le projet international «Football Schools with Fun» de l’Association Cross Cultures Project. Ce projet vise à tisser des liens solides entre les communautés locales et les populations les plus vulnérables et marginalisées, notamment les migrants, les réfugiés et les personnes déplacées internes, en organisant des matchs de football. Au total, environ 30 000 athlètes professionnels déplacés internes, dont 3 839 femmes, ont eu la possibilité de s’entraîner et de participer à des compétitions sportives en Azerbaïdjan 
			(38) 
			Données fournies par
le ministère de la Jeunesse et des Sports de la République d’Azerbaïdjan..
44. En France, l’Agence nationale du sport a été créée en 2019 sous l’égide du ministère des Sports pour développer la pratique sportive sur tout le territoire français et préparer la société à relever les défis à venir. En 2022, elle a versé des subventions d’un montant de 175 000 € à des acteurs locaux et régionaux pour promouvoir l’inclusion sociale des migrants et des personnes défavorisées par le biais du sport 
			(39) 
			Paule
Ignatio, réunion de la commission des migrations, des réfugiés et
des personnes déplacées du 7 décembre 2022.. La France porte une responsabilité d’autant plus grande dans la promotion de l’inclusion des migrants par le biais du sport que les prochains jeux Olympiques se tiendront à Paris en 2024. Deux projets sont à mentionner plus particulièrement ici. Le premier, «Génération 2024», permettra chaque année à 10 000 jeunes de participer à des projets au service de l’impact social et environnemental du sport. Dans ce cadre, le «Plan héritage» sera mis en œuvre en milieu scolaire afin de corriger les inégalités d’accès à la pratique sportive pour les élèves handicapés et primo-arrivants 
			(40) 
			Ministère de l’Éducation
nationale et de la jeunesse, «<a href='https://eduscol.education.fr/document/3543/download?attachment'>Génération 2024.
L’héritage éducatif des jeux Olympiques et Paralympiques</a>», p. 12.. Le second, «Impact 2024», subventionne des organisations sportives et des acteurs régionaux et locaux afin de promouvoir le sport autour de quatre thématiques, dont «le sport pour l’inclusion, l’égalité et la solidarité». En 2022, ce projet a financé huit programmes en faveur de l’inclusion sociale des migrants, pour un montant total de 280 000 € 
			(41) 
			Paule Ignatio, réunion
de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées
du 7 décembre 2022..
45. En Allemagne, le programme «Intégration par le biais du sport» est un programme permanent pour l’intégration des migrants qui a débuté en 1989 et a été étendu aux réfugiés en 2015. Il vise à promouvoir «l’intégration dans le sport», c’est-à-dire la coopération entre la population locale et les migrants pour définir les activités sportives, «l’intégration par le biais du sport», autrement dit la construction de réseaux interpersonnels entre les migrants et la société d’accueil et la sensibilisation aux avantages de l’inclusion sociale, et enfin «l’ouverture interculturelle du sport» – un volet dans le cadre duquel les organisations sportives sont formées à la prise en compte de la diversité culturelle. Financé par le ministère fédéral de l’Intérieur et l’Agence fédérale pour les migrations et les réfugiés, il disposait d’un budget total de 11,4 millions d’euros en 2016 et 2017 
			(42) 
			Pour en savoir plus
sur le programme «Intégration par le sport», voir la plateforme
de l’intégration des migrants par le sport sur le <a href='https://www.coe.int/fr/web/sport-migrant-integration-directory/federal-programme-integration-through-sport-'>site
Web du Conseil de l’Europe</a>..
46. La vaste expérience des entraîneurs et animateurs associés au projet «Le sport pour l’intégration», a pu être mise à profit pour le développement de projets dans d’autres pays, par exemple en Grèce. Le programme de 2021 «les enfants aiment le sport» visait à donner à 4 000 enfants, majoritairement réfugiés, la possibilité de visiter le stade panathénaïque, d’apprendre son histoire et de pratiquer des activités sportives dans les deux années qui ont suivi 
			(43) 
			<a href='https://heyzine.com/flip-book/79296396b9.html'>https://heyzine.com/flip-book/79296396b9.html</a>.. Grâce au soutien de l’Allemagne, le Comité olympique hellénique a également pu mettre sur pied en mars 2021 le programme «Ensemble dans le sport», dans le cadre duquel des entraîneurs formés ont fait découvrir le sport à de jeunes réfugiés non accompagnés en leur transmettant notamment ses principes et valeurs. À la date de septembre 2022, 7 550 enfants, dont 53 % de migrants, avaient participé aux deux projets 
			(44) 
			Spyros Capralos, président
de l’EOC/HOC, réunion de la commission des migrations, des réfugiés
et des personnes déplacées du 19 septembre 2022, Athènes..
47. Renforcer la cohésion sociale des migrants vivant en Türkiye par le biais du sport, tel a été l’objectif d’un projet conçu par le ministère de la Jeunesse et des Sports de la République de Türkiye et mis en œuvre notamment avec le soutien de la Fondation olympique pour les réfugiés, du HCR et du Comité olympique turc, «Social Cohesion Through Sport» (Cohésion sociale par le sport). Mis en œuvre entre 2019 et mi-2022, il a permis à un total de 7 503 enfants et jeunes âgés de 8 à 18 ans de bénéficier d’activités sportives, dont 3503 bénéficiaires étaient des migrants et 4 000 issus de la communauté d’accueil. Compte tenu de son succès, qui a permis de promouvoir la cohésion sociale parmi les migrants et les populations d’accueil vivant dans les zones urbaines de Türkiye et d’améliorer la situation de protection des jeunes migrants grâce à l’engagement dans des activités sportives, une deuxième phase a été lancée, qui durera jusqu’en mai 2025. Des activités, y compris des cours de sport dans différentes branches, des festivals sportifs et des camps de jeunes, des séminaires de sensibilisation sur des sujets tels que la santé, la nutrition, l’hygiène, les droits des enfants, la conscience de soi, les méthodes de contrôle de la colère, la sensibilisation à l’environnement, les Jeux olympiques, la culture sportive et l’éthique, se déroulent dans les provinces d’Ankara, Bursa, Mersin, Şanlıurfa, Adana, İzmir et İstanbul.

4.2. Initiatives locales

48. Plusieurs initiatives locales sont menées par des ONG, des organisations de la société civile et des associations privées pour prôner la tolérance et l’inclusion des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées internes. Il serait impossible de mentionner ici tous les programmes mis en œuvre, tant ils sont nombreux. Nous n’en décrirons donc que quelques-uns. Les projets suivants figurent tous sur la plateforme du Conseil de l’Europe de l’intégration des migrants par le sport, une base de données qui permet aux organisations sportives de partager des connaissances et de présenter des projets et des politiques efficaces dont d’autres pourront s’inspirer 
			(45) 
			Au
1 mars 2022, la plateforme comptait 68 projets
de plusieurs États membres du Conseil de l’Europe, dont 28 avaient
une dimension locale. Pour en savoir plus, voir le <a href='https://www.coe.int/fr/web/sport-migrant-integration-directory/home'>site
web du Conseil de l’Europe</a>..
49. En Italie, l’association LiberiNantes œuvre depuis 2007 pour assurer aux migrants et aux réfugiés vivant dans la région de Rome un accès gratuit au sport grâce à plusieurs projets d’inclusion. Elle a par exemple permis à une équipe de football composée de réfugiés et de personnes déplacées internes de participer à des compétitions, monté un projet de randonnée pour faire découvrir aux migrants le territoire sur lequel ils résident et son histoire, et mis en place des cours pour migrants. LiberiNantes donne aux migrants un accès gratuit à des activités sportives et aux équipements nécessaires pour pouvoir les pratiquer. Enfin, l’association contribue à la mise en œuvre de projets internationaux comme le programme FIRE+ financé par l’Union européenne, qui vise à favoriser l’inclusion des migrants et des réfugiés au sein des communautés locales et leur socialisation par le football 
			(46) 
			Pour
en savoir plus sur LiberiNantes, voir la plateforme de l’intégration
des migrants par le sport sur le <a href='https://www.coe.int/fr/web/sport-migrant-integration-directory/liberi-nantes'>site
web du Conseil de l’Europe</a>..
50. «Movi Kune – Moving Together» est un autre programme intéressant mené depuis 2013 par l’Université de Vienne et l’ONG Hemayat. Il s’adresse aux migrants, aux réfugiés et aux personnes déplacées internes, souffrant de traumatismes psychologiques. Dans le cadre de ce projet, le sport permet aux migrants de tisser des liens d’amitié avec la population locale et entraîne leur empouvoirement. Il peut leur apporter des outils pour relever les défis à venir. En complément des activités pratiques, les porteurs du projet mènent des recherches scientifiques sur les moyens de favoriser le bien-être psychologique par une meilleure utilisation du sport, à partir des résultats de leurs programmes sportifs 
			(47) 
			Pour
en savoir plus sur Movi Kune – Moving Together, voir la plateforme
de l’intégration des migrants par le sport sur le <a href='https://www.coe.int/fr/web/sport-migrant-integration-directory/movi-kune-moving-together'>site
web du Conseil de l’Europe</a>..
51. Enfin, à Paris, le programme Liberfoot de l’association Les Dégommeuses œuvre spécifiquement pour l’inclusion des femmes migrantes et membres de la communauté LGBTQ+. L’association a créé une équipe de football principalement composée de migrantes LGBTQ+ et leur a fourni les équipements nécessaires pour pratiquer leur activité sportive. Le programme contribue à la diffusion de messages d’inclusivité et de tolérance. Les Dégommeuses partagent également les acquis de leur expérience avec les acteurs concernés et mènent des activités de mobilisation 
			(48) 
			Pour
en savoir plus sur Liberfoot, voir la plateforme de l’intégration
des migrants par le sport sur le <a href='https://www.coe.int/fr/web/sport-migrant-integration-directory/liberfoot'>site
web du Conseil de l’Europe</a>..

4.3. Coopération internationale

4.3.1. Conseil de l’Europe

52. Ces dernières décennies, le Conseil de l’Europe a œuvré de manière particulièrement active à la promotion du sport comme facteur d’inclusion et de paix. Le Comité des Ministres a rappelé, à plusieurs occasions, l’attention qu’il portait à cette question et recommandé aux États membres de prendre des mesures dans différents domaines connexes, notamment par ses recommandations Rec(2001)6 sur la prévention du racisme, de la xénophobie et de l’intolérance raciale dans le sport, Rec(2003)6 pour améliorer l’accès à l’éducation physique et au sport des enfants et des jeunes dans tous les pays européens, et CM/Rec(2015)2 sur l’approche intégrée de l’égalité entre les femmes et les hommes dans le sport. Plus particulièrement, la Recommandation CM/Rec(2012)10 sur la protection des enfants et des jeunes sportifs contre des problèmes liés aux migrations invite les États à «encourager les organisations sportives à élaborer et à appliquer toutes les mesures appropriées relevant de leur compétence pour éviter toute forme d’abus concernant les migrations de jeunes sportifs, en particulier d’enfants, et à adopter des règles régissant l’activité des agents, comprenant des dispositions déontologiques transparentes sur leurs tâches et leurs responsabilités» (par. 1), ainsi qu’à prendre des dispositions en faveur de l’inclusion sociale des jeunes athlètes: (a) en facilitant leur intégration; (b) en leur offrant une double formation (sportive et professionnelle ou scolaire); (c) en orientant les sportifs ayant échoué vers d’autres activités; (d) en assurant un logement convenable aux jeunes sportifs; (e) en les aidant à s’intégrer professionnellement en fin de carrière ou de contrat (par. 6).
53. Outre le Comité des Ministres, l’Accord partiel élargi sur le sport (APES) joue également un rôle essentiel dans la promotion du sport au sein des États membres du Conseil de l’Europe. Créé le 11 mai 2007 pour une période initiale de trois ans par la CM/Res(2007)8 du Comité des Ministres, il a ensuite été confirmé par la Résolution CM/Res(2010)11 du 13 octobre 2010. Ses missions s’articulent autour de trois grands axes. Tout d’abord, il contribue au travail normatif sur les activités sportives et donne des conseils aux États pour l’élaboration de politiques inclusives, éthiques et sûres dans le domaine du sport. Dans ce contexte, il tient compte des avis des représentants d’organisations sportives. En second lieu, il s’occupe du suivi de l’application de la Charte européenne du sport et des recommandations pertinentes du Conseil de l’Europe. Enfin, il mène des actions dans le cadre du mouvement «Sport pour tous».
54. L’APES encourage également la coopération européenne en organisant des réunions au niveau ministériel. Au cours de leur dernière conférence en date tenue à Antalya du 25 au 27 octobre 2022, les ministres du Sport ont invité les États membres à «promouvoir et sauvegarder les droits de l’homme dans et par le sport, à fournir les ressources financières et humaines adéquates et à mobiliser toutes les parties prenantes clés afin de relever rapidement les défis restants et émergents», en l’occurrence assurer l’égalité entre les femmes et les hommes dans le sport, garantir la protection des enfants et améliorer l’inclusion sociale des populations les plus défavorisées. Ils ont appelé l’APES, entre autres, à «utiliser le sport comme un moyen d’intégration sociale des groupes défavorisés, tels que les migrants, les réfugiés, les personnes handicapées et les personnes âgées, développer une boîte à outils fondée sur les meilleures pratiques pour l’inclusion des groupes défavorisés dans tous les aspects du sport, et concevoir un plan de communication pour la promouvoir à grande échelle» 
			(49) 
			Le texte des résolutions
adoptées à la 17e Conférence du Conseil
de l’Europe des ministres responsables du Sport peut être consulté
sur le <a href='https://rm.coe.int/msl17-10f-resolutions/1680a8bd14'>site
web du Conseil de l’Europe</a>..
55. Depuis sa première adoption en 1992, la Charte européenne du sport 
			(50) 
			Le texte
de la Charte européenne du sport peut être consulté sur le <a href='https://rm.coe.int/prems-126022-fra-2584-revised-european-sports-charter-txt-web-bat-a6/1680a831c9'>site
web du Conseil de l’Europe</a>. est une pierre angulaire de la promotion du sport dans tous les États membres du Conseil de l’Europe. Elle garantit à toute personne le droit au sport et fournit aux États des orientations sur la manière d’élaborer leurs politiques dans le domaine du sport, notamment pour faire en sorte que «le développement du sport soit inclusif» (art. 1(c) de la Charte européenne du sport). En ce qui concerne plus spécifiquement l’approche du sport fondée sur les droits humains à l’égard des groupes vulnérables, la Charte dispose que «l’approche relative à la diligence raisonnable en matière de droits de l’homme dans le sport requiert le respect des droits de l’homme des personnes qui participent ou qui sont exposées à des activités liées au sport et devrait donc: […] appliquer une politique de tolérance zéro face à la violence et à toutes les formes de discrimination, en accordant une attention particulière aux personnes et aux groupes en situation de vulnérabilité, comme les enfants, les migrants et les personnes handicapées [...]» (art. 6.2 (d) de la Charte). Un processus de révision de la Charte européenne du sport a été engagé à la 15e Conférence du Conseil de l’Europe des ministres responsables du sport tenue à Tbilissi (2018). Le 13 octobre 2021, le Comité des Ministres a adopté la Recommandation CM/Rec(2021)5 sur la Charte européenne du sport révisée, qui invite les États à fonder leurs politiques en matière de sport sur la Charte révisée et les parties prenantes concernées à tenir compte des principes énoncés dans celle-ci.

4.3.2. HCR

56. Ces dernières années, le HCR a été particulièrement actif dans la promotion du sport en tant qu’outil d’inclusion sociale des réfugiés. En effet, depuis 2020, 72 % des 96 opérations menées sur le terrain ont mis en œuvre des projets axés sur le sport 
			(51) 
			HCR
(2022), op. cit., p. 9.. Le HCR a également pris d’importantes dispositions pour encourager le recours au sport comme moyen d’obtenir des résultats positifs sur le plan social dans le monde entier.
57. Le Pacte mondial sur les réfugiés adopté en décembre 2018 est aujourd’hui devenu un document essentiel pour l’inclusion sociale des réfugiés. Le texte appelle les États à entreprendre des actions concrètes de «partage de la charge et des responsabilités pour mieux protéger et assister les réfugiés, et soutenir les pays et communautés d’accueil» 
			(52) 
			Par. 5
du Pacte mondial sur les réfugiés. Pour en savoir plus sur le Pacte
mondial sur les réfugiés, voir le <a href='https://globalcompactrefugees.org/about-digital-platform/global-compact-refugees'>site
web dédié</a>.. Reconnaissant le rôle que peut jouer le sport dans l’inclusion sociale des réfugiés, il invite le HCR, les États et d’autres entités à établir des partenariats pour améliorer l’accès aux installations et activités sportives, en particulier dans les zones d’accueil de réfugiés (paragraphe 44). Dans le cadre du Pacte, au 2 mars 2023, des États, des organisations sportives et de la société civile du monde entier ont annoncé des contributions à 25 projets en faveur de l’inclusion sociale par le biais du sport et d’autres activités de loisirs, dont 40 % prévoient la mise à disposition de matériel sportif ou d’une assistance technique 
			(53) 
			La liste complète des
engagements est disponible sur le <a href='https://globalcompactrefugees.org/pledges-contributions'>site
web du Pacte mondial sur les réfugiés</a>..
58. Par l’intermédiaire du Forum mondial pour les réfugiés, le HCR encourage le dialogue et le partage de connaissances entre les acteurs qui œuvrent à la diffusion des valeurs consacrées par le Pacte mondial sur les réfugiés. Le premier forum a eu lieu en décembre 2019 et a accueilli 3 000 participants; 1 400 contributions ont été annoncées avant ou pendant l’événement 
			(54) 
			Données
disponibles sur le <a href='https://globalcompactrefugees.org/about/global-refugee-forum'>site
web du Pacte mondial sur les réfugiés</a>.. Une réunion officielle de haut niveau s’est tenue deux ans plus tard pour faire le point sur les progrès accomplis.
59. Par ailleurs, le HCR a publié en partenariat avec le Comité international olympique et l’association Terre des Hommes une boîte à outils destinée aux acteurs du sport et aux acteurs humanitaires assurant la promotion du sport comme outil de protection et notamment d’amélioration de l’inclusion sociale. La boîte à outils «Sport pour la protection: planification avec des jeunes en situation de déplacement forcé» vise à renforcer l’inclusion sociale, la cohésion sociale et le bien-être psychologique des réfugiés et des personnes déplacées internes en apportant des changements positifs dans leur vie grâce au sport, dans le but de construire une société plus sûre fondée sur le respect des droits 
			(55) 
			HCR,
CIO et Terre des Hommes (2018), op. cit.,
p. 12..
60. Enfin, reconnaissant le rôle majeur que peut jouer le sport dans la réponse à la crise des réfugiés, le HCR a publié sa première stratégie sur le sport pour 2022-2026, intitulée «More than a Game» 
			(56) 
			HCR (2022), op. cit.. Cette dernière vise principalement à améliorer par le sport le bien-être et les perspectives des populations dont s’occupe le HCR. Au-delà de ce but général et tout en s’alignant sur les stratégies internes relatives à la protection de l’enfance, à la lutte contre la violence fondée sur le genre, à la santé et à l’éducation, cette stratégie indique comment, dans cinq domaines d’action interdépendants, le sport peut contribuer aux objectifs du Pacte mondial sur les réfugiés et aux Orientations stratégiques du Haut-Commissaire.

4.3.3. Union européenne

61. Depuis le Livre blanc sur le sport de 2007, l’Union européenne reconnaît le rôle primordial du sport «au service de l’inclusion sociale, de l’intégration et de l’égalité des chances» 
			(57) 
			Par. 2.5.
du <a href='https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A52007DC0391'>Livre
blanc de l’UE</a>, 11 juillet 2007.. Concrètement, le Livre blanc souligne la capacité du sport à favoriser le dialogue interculturel et à créer un sentiment d’appartenance. Il conclut que «la mise à disposition d’espaces réservés au sport et le soutien aux activités liées au sport sont essentiels pour permettre aux immigrés et à la société d’accueil d’interagir positivement» 
			(58) 
			Ibid.. Après cet engagement explicite, l’Union européenne a pris d’importantes mesures pour promouvoir l’inclusion sociale des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées internes.
62. Selon le plan de travail de l’Union européenne en faveur du sport (période du 1er janvier 2021 au 30 juin 2024), les objectifs directeurs de l’Union européenne dans le domaine du sport sont notamment de renforcer une pratique sportive fondée sur l’intégrité et la transmission de valeurs et d’accroître la participation à des activités sportives pour favoriser la cohésion sociale. Le plan de travail de l’Union européenne porte également une attention particulière au volet «sport» du programme Erasmus+ qui finance des projets visant à promouvoir les valeurs européennes et l’inclusion par le biais du sport.
63. L’initiative SHARE vise quant à elle à faire prendre conscience de la contribution du sport au développement local et régional. La Commission européenne ayant en fait constaté l’impact des investissements dans la cohésion sociale et l’inclusion sociale sur le développement territorial 
			(59) 
			Pour
en savoir plus sur l’initiative SHARE, voir le <a href='https://sport.ec.europa.eu/policies/sport-and-economy/share-initiative'>site
web</a> de la Commission européenne., SHARE recueille des données sur les projets de développement local et régional axés autour du sport pour permettre des échanges de bonnes pratiques et de connaissances sur la question entre les États membres et les parties prenantes.
64. Enfin, les prix européens du sport #BeInclusive reconnaissent l’importance du sport pour l’inclusion sociale des populations les plus défavorisées, notamment les réfugiés et les migrants, et la lutte contre la discrimination à leur égard. Chaque année, un prix de 10 000 € récompense les idées les plus innovantes dans trois catégories, en l’occurrence en 2022: «promouvoir l’égalité des sexes dans le sport», «le sport pour la paix» et «briser les barrières dans le sport» 
			(60) 
			Pour
plus d’informations, voir le <a href='https://sport.ec.europa.eu/initiatives/beinclusive-eu-sport-awards'>site
web de la Commission européenne</a>.. Cette initiative entend donner de la visibilité à des projets novateurs dont les autres acteurs du sport pourront s’inspirer pour bâtir de nouveaux programmes d’inclusion sociale par le biais du sport.

4.3.4. Autres instances

65. De nombreuses autres instances, qu’il s’agisse d’organisations internationales, d’ONG ou d’organisations de la société civile, mettent en œuvre des activités axées autour du sport pour favoriser l’inclusion des migrants. Devant l’impossibilité de les mentionner toutes, nous en présenterons ici une sélection limitée.
66. Le Comité international olympique (CIO) est un pionnier de la promotion des activités sportives pour les réfugiés et a notamment créé l’Équipe olympique des réfugiés qui a fait ses débuts officiels à Rio en 2016 en défilant sous la bannière olympique 
			(61) 
			Pour plus d’informations,
voir le site web de <a href='https://olympics.com/cio/equipe-olympique-des-refugies'>l’équipe
olympique des réfugiés</a>.. Des athlètes réfugiés ont aussi participé aux jeux Paralympiques de Rio sous la bannière paralympique, mais pas en tant qu’équipe officielle. La première Équipe paralympique des réfugiés a pris part aux Jeux de Tokyo en 2021. Dans le cadre du programme de bourses olympiques pour athlètes réfugiés mis en place après les Jeux de Rio, la Solidarité olympique a soutenu 56 athlètes réfugiés prometteurs de 13 pays. L’équipe olympique des réfugiés formée par le CIO pour les jeux Olympiques de Tokyo 2020 se composait de 29 athlètes concourant dans 12 sports. À ce jour, 42 athlètes réfugiés bénéficient des fonds du CIO et visent une qualification pour les jeux Olympiques de Paris 2024 
			(62) 
			Paule Ignatio, réunion
de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées
du 7 décembre 2022..
67. Le CIO a également renforcé sa coopération de longue date avec le HCR par le lancement de la Fondation olympique pour les réfugiés (Olympic Refuge Foundation, ORF) en 2017. Celle-ci entend assurer aux réfugiés et aux personnes déplacées internes un accès à des installations sportives et des possibilités de prendre part à des activités sportives. L’ORF mène actuellement des projets au Bangladesh, en Colombie, en France, en Jordanie, au Kenya, en Türkiye et en Ouganda 
			(63) 
			On
trouvera les spécificités de chaque programme sur le <a href='https://olympics.com/en/olympic-refuge-foundation/'>site
web de la Fondation</a>.. La fondation a en outre consolidé ses capacités en signant d’importants partenariats comme le Protocole d’accord avec le HCR 
			(64) 
			ORF,
«<a href='https://olympics.com/en/olympic-refuge-foundation/news/olympic-refuge-foundation-strengthens-support-to-refugees-worldwide'>Olympic
Refuge Foundation strengthens support to refugees worldwide</a>», 25 octobre 2022. et a créé, en coopération avec le HCR et la Fondation Scort, la Coalition sportive au service des réfugiés, composée de plus de 80 organisations sportives, de la société civile et des secteurs public et privé ayant pris l’engagement mutuel d’accroître l’accès au sport organisé pour les réfugiés et les personnes déplacées internes. En 2019, ces acteurs se sont engagés à «promouvoir et assurer l’accès de tous les réfugiés, sans aucune distinction, à des installations sportives sûres et inclusives; à accroître l’offre et l’accès aux initiatives sportives ou axées autour du sport pour les réfugiés et leurs communautés d’accueil, en tenant dûment compte d’éléments comme l’âge, le sexe, les capacités et tout autre besoin lié à la diversité; [et] à promouvoir et favoriser l’égalité d’accès et de participation des réfugiés aux manifestations et compétitions sportives de tous niveaux» 
			(65) 
			HCR, «<a href='https://www.unhcr.org/what-we-do/publications/sports-coalition-joins-unhcr-and-international-olympic-committee-help-young'>A
Sports Coalition joins UNHCR and the International Olympic Committee
to help young refugees discover their potential through sport</a>», 9 décembre 2019..
68. Les 50 comités olympiques nationaux d’Europe sont regroupés au sein d’une organisation, les Comités olympiques européens (COE), qui travaille en étroite coopération avec eux en les conseillant dans les processus décisionnels, en organisant des événements (Jeux européens, Festival olympique de la jeunesse européenne) et en diffusant les valeurs du sport en Europe. Lors de la préparation des Jeux de Tokyo, 21 des 29 athlètes de l’Équipe olympique des réfugiés ont été accueillis par des comités olympiques nationaux européens. Par ailleurs, le soutien des COE a été particulièrement utile pour l’inclusion sociale des athlètes ukrainiens ayant fui leur pays après le début de la guerre dévastatrice de la Russie contre l’Ukraine’. Dans ce contexte, en partenariat avec le CIO et Solidarité olympique, les COE ont créé un fonds de solidarité doté d’un budget initial de 2 millions $US destiné à couvrir l’ensemble des coûts nécessaires à l’entraînement des athlètes ukrainiens et à leur participation à des compétitions sportives. En avril 2022, les CEO ont fait un don supplémentaire de 500 000 $US au fonds.
69. En juin 2022, les COE ont signé un accord de coopération avec la Commission européenne, dans le cadre duquel ils se sont engagés à promouvoir les valeurs de l’Union européenne et les valeurs olympiques ainsi que les échanges culturels et à adopter des stratégies à long terme pour lutter notamment contre la discrimination, l’intolérance et les inégalités entre les femmes et les hommes.
70. L’UEFA finance plusieurs projets de soutien aux réfugiés mis en œuvre par ses associations nationales et a organisé en 2022 aux côtés du HCR un nouveau tournoi pour les réfugiés, la Coupe UNITY EURO 
			(66) 
			Pour plus
d’informations, voir: <a href='https://www.uefa.com/insideuefa/news/0276-156ed4d65ffc-32f0489d5dcf-1000--world-refugee-day/'>World
Refugee Day 2022: European football’s widespread support</a>., dans le but de construire un meilleur avenir pour les réfugiés et les personnes déplacées en Europe en utilisant le pouvoir rassembleur du football. À cette fin, l’UEFA a signé un protocole de coopération avec le HCR pour favoriser l’accès des réfugiés au sport et améliorer l’inclusion sociale dans le cadre de la stratégie de durabilité de l’UEFA, appelée «l’Union fait la force». Depuis 2017, l’UEFA gère également le programme de subventions Football et réfugiés qui finance des projets dans toute l’Europe et apporte un soutien financier aux associations nationales pour leurs programmes de travail avec les réfugiés. Le 29 juin 2022, l’UEFA a accueilli la première Coupe UNITY EURO, nouveau tournoi opposant huit équipes nationales mixtes composées à 70 % de joueurs réfugiés et à 30 % de joueurs non réfugiés, pour montrer et saluer la capacité du football à renforcer les liens entre les communautés d’accueil et les personnes déplacées, en faisant tomber les barrières et en créant un esprit d’inclusion.

5. Recommandations

71. Bien qu’un grand nombre d’activités axées autour du sport aient déjà été menées aux niveaux local, régional, national et international pour promouvoir l’inclusion sociale des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées internes, des interventions restent nécessaires dans plusieurs domaines, comme l’a montré le présent rapport.
72. Tout d’abord, les États et les acteurs impliqués dans les activités fondées sur le sport devraient tenir dûment compte des valeurs et principes énoncés dans la Charte européenne du sport. La Recommandation CM/Rec(2021)5 invite les États à fonder leurs politiques dans le domaine du sport sur les principes contenus dans la Charte du sport et aux parties prenantes à tenir compte de ces mêmes principes lors de l’élaboration de leurs programmes axés autour du sport. Dans ce contexte, les États sont invités à adhérer à l’Accord partiel élargi sur le sport pour améliorer la mise en œuvre de la Charte européenne du sport et bénéficier d’une coopération internationale plus efficace.
73. Par ailleurs, il est primordial que les États adoptent ou assurent l’application de la législation interdisant toute forme de discrimination dans le sport fondée sur la nationalité, le sexe, l’orientation sexuelle, l’origine ethnique, la langue ou le handicap. Le droit au sport devrait être garanti à toute personne et des actions spécifiques devraient être engagées pour que les plus vulnérables, et notamment les migrants, disposent d’un accès adéquat à des activités et installations sportives. Il conviendrait d’encourager la formation des entraîneurs à la détection et à la résolution des situations de vulnérabilité des migrants et de mettre en place des services d’assistance de manière à ce que les migrants se sentent protégés et en sécurité dans les centres sportifs. Des cours de langues pourraient également être proposés parallèlement aux programmes fondés sur le sport, afin que les différences linguistiques ne soient plus un obstacle à l’inclusion. Par ailleurs, les responsables politiques devraient veiller à ce que les migrants, les réfugiés et les personnes déplacées internes puissent participer aux compétitions sportives de la même manière que tout autre athlète non migrant.
74. La littérature scientifique montre que les barrières culturelles et structurelles sont encore plus difficiles à franchir pour les migrants lorsque ce sont des femmes, des enfants, des membres de la communauté LGBTQ+ ou des personnes handicapées. Des actions concrètes et ciblées doivent donc être menées pour promouvoir l’inclusion de ces personnes dans la société d’accueil. De ce point de vue, les migrants ou des groupes spécifiques de migrants devraient être associés aux processus décisionnels pour trouver des solutions ciblées répondant à leurs vulnérabilités. Une meilleure couverture médiatique des sports féminins permettrait de toucher un plus grand nombre de jeunes femmes qui hésitent à pratiquer un sport du fait de barrières culturelles ou psychologiques. L’image de championnes et d’athlètes féminines migrantes pourrait être un moteur de changement en contribuant à réduire les stéréotypes et les discours discriminatoires dans la société d’accueil. Par ailleurs, des services de garde d’enfants pourraient être mis en place au sein des organisations sportives afin que les athlètes féminines puissent disposer d’un temps à elles, consacré à la pratique sportive.
75. Des cas de discrimination à l’égard de migrants handicapés et de migrants membres de la communauté LGBTQ+ ont été enregistrés. Par conséquent, les États et les organisations sportives devraient engager des campagnes de sensibilisation et promouvoir la tolérance pour déconstruire les stéréotypes et véhiculer des messages d’inclusion. Des programmes d’éducation ciblés pour les enfants ou des programmes de formation des entraîneurs pourraient être utiles pour atteindre cet objectif. Une plus grande couverture médiatique des parasports pourrait également contribuer à améliorer l’inclusion.
76. Les déplacements de personnes dans les pays européens appellent une vision stratégique pour l’inclusion sociale des migrants. Il conviendrait de privilégier des programmes construits sur la durée plutôt que sur le court terme. Les États devraient investir par ailleurs dans des initiatives intersectorielles pour l’inclusion des migrants dans la société d’accueil, en menant par exemple des activités sportives parallèlement aux programmes éducatifs, notamment pour les enfants migrants. Des fonds publics supplémentaires sont essentiels pour atteindre cet objectif et élaborer des politiques d’inclusion sociale efficaces. Les migrants, les réfugiés et les personnes déplacées internes devraient bénéficier d’un accès gratuit à des installations et activités sportives, ce qui inclut la mise à disposition de tenues de sport le cas échéant. Par ailleurs, étant donné les effets thérapeutiques des activités sportives, les organisations sportives devraient être dotées de services d’assistance sociale et psychologique accessibles à tous les affiliés, y compris les migrants. Enfin, des fonds supplémentaires consacrés à la promotion de la collaboration entre organisations sportives et non sportives sont nécessaires pour mettre en place des mécanismes de coopération et des actions sociales intersectorielles. Sans financement public, tous ces coûts seraient supportés par les organisations sportives, avec le risque que leur montant excessif contraigne ces dernières à limiter les opérations autour du sport. Un soutien public accru aux activités sportives visant l’inclusion sociale des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées internes semble donc essentiel.
77. Il conviendrait de poursuivre le travail de sensibilisation du public à la contribution du sport comme outil favorisant l’inclusion sociale des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées internes. Les États et les organisations sportives pourraient lancer des campagnes de sensibilisation à l’importance d’inclure les migrants dans la société et réduire par la même occasion le racisme et la discrimination, et des campagnes de communication pourraient être menées auprès des migrants pour les informer des projets existants en faveur de leur inclusion sociale.
78. Enfin, le partage de connaissances et d’expériences et la création de bases de données sont des outils importants pour favoriser la mise en place de programmes d’inclusion sociale par le sport. Dans ce cadre, les États et autres parties prenantes sont encouragés à présenter leurs projets sur la plateforme du Conseil de l’Europe consacrée à l’intégration des migrants par le sport. Cela leur permettrait de bénéficier d’une meilleure visibilité au niveau international et d’accroître ainsi leurs chances de trouver des investisseurs tout en augmentant la participation des migrants, mais surtout d’échanger des connaissances et des bonnes pratiques avec d’autres organisations sportives locales, régionales, nationales et internationales pour mettre en œuvre un plus grand nombre de programmes axées autour du sport au service de l’inclusion des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées internes.

6. Conclusion

79. Après le début de la guerre dévastatrice de la Russie contre l’Ukraine, plus de 6 millions d’Ukrainiens ont trouvé refuge dans bon nombre d’États membres du conseil de l’Europe. Des mesures ont été prises à différents niveaux pour favoriser leur inclusion et les activités sportives peuvent jouer un rôle essentiel de ce point de vue.
80. Dans ce contexte, les prochains jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 seront une formidable tribune pour la diffusion des valeurs d’inclusion et de tolérance. Les équipes olympiques et paralympiques de réfugiés participeront aux Jeux et les champions olympiques seront des sources d’inspiration pour nombre de jeunes filles et garçons migrants. Cela dit, l’inclusion sociale doit être favorisée partout, tout le temps et à tous les niveaux. Un accès libre et non discriminatoire aux centres sportifs et aux activités sportives doit être assuré aux migrants, aux réfugiés et aux personnes déplacées internes, pour que les nouveaux arrivants comme les sociétés d’accueil puissent s’enrichir au contact de cultures différentes.
81. Les États membres du Conseil de l’Europe disposent à cet effet de plusieurs instruments, allant de la Charte européenne du sport à l’Accord partiel élargi sur le sport en passant par la Plateforme de l’intégration des migrants par le sport. Des engagements supplémentaires sont toutefois nécessaires sur le plan des ressources financières, des interventions intersectorielles et de la coopération internationale. Il y a lieu de combler les lacunes structurelles, de lever les obstacles et de promouvoir activement le sport comme outil d’inclusion sociale des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées internes.