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Rapport | Doc. 16182 | 02 juin 2025

Analyse et lignes directrices pour une transition énergétique durable et socialement juste

Commission des questions sociales, de la santé et du développement durable

Rapporteure : Mme Saskia KLUIT, Pays-Bas, SOC

Origine - Renvoi en commission: Doc. 15515, Renvoi 4653 du 20 juin 2022. 2025 - Troisième partie de session

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 16 mai 2025.

(open)
1. Une énergie propre, sûre et abordable est essentielle pour garantir à l’Europe une prospérité durable. Elle est également au cœur des efforts visant à faire face à la triple crise planétaire (pollution, changement climatique et perte de la biodiversité). Solidaires des efforts déployés par la communauté internationale, les États membres du Conseil de l’Europe se sont engagés à modifier leur législation et leurs politiques pour prendre en compte les Objectifs de développement durable, les traités sur le climat et le Pacte vert pour l’Europe.
2. Cet engagement a été renforcé davantage lors du Sommet de Reykjavík, lorsque les États membres du Conseil de l’Europe ont reconnu que «les droits de l’homme et l’environnement sont intimement liés et qu’un environnement propre, sain et durable est essentiel au plein exercice des droits de l’homme des générations actuelles et futures». L’Assemblée parlementaire considère que la transformation socio-économique, y compris la transition vers un système énergétique plus durable, est indispensable à cet effort collectif et devrait suivre une approche fondée sur les droits humains, car l'objectif d'un système énergétique propre et sûr, et la transition vers celui-ci, affectent fortement les droits humains fondamentaux.
3. L’Assemblée souligne l’importance d’un accès stable à l’énergie propre pour l’exercice des droits sociaux fondamentaux au logement, au travail, à la santé, à l’éducation, à la protection contre la pauvreté et l’exclusion sociale, ainsi que des droits des personnes vulnérables (notamment les enfants, les personnes en situation de handicap et les personnes âgées), tels qu’ils sont consacrés par la Charte sociale européenne (révisée) (STE no 35 et STE no 163). Elle est préoccupée par le fait qu’en Europe, des millions de personnes sont toujours en situation de pauvreté énergétique du fait de la combinaison de faibles revenus, de coûts énergétiques élevés et d’une mauvaise efficacité énergétique des bâtiments, ainsi que le choix de modes de transport. Conformément aux exigences de la Charte, les États ont l’obligation, dans la mesure du possible, de prévenir toute situation de pauvreté énergétique et d’y remédier. Une stratégie nationale de transition énergétique bien conçue avec des dimensions sociale et économique fortes est cruciale à cette fin.
4. L’Assemblée est consciente des défis liés à la mise en place de systèmes énergétiques durables et socialement équitables dans les États membres. La transition vers les technologies d'énergie renouvelable nécessite des investissements solides et stables, une adaptation sociale et des mesures de gouvernance décisives pour guider et soutenir les citoyens et les entreprises dans leur adaptation aux systèmes d'énergie renouvelable. Il est nécessaire d'adopter de nouvelles technologies, d'améliorer l'efficacité énergétique des entreprises, des logements et des modes de transport et de modifier les produits et les procédures, y compris leur localisation. Une attention particulière est nécessaire pour que les citoyens considèrent la transition comme une évolution positive.
5. L’Assemblée considère que la transition vers les systèmes énergétiques propres représente des opportunités réelles pour les pays européens de stimuler la résilience de l’économie nationale face aux chocs extérieurs, de renforcer la sécurité énergétique, d’améliorer la compétitivité grâce aux technologies vertes, de responsabiliser les consommateurs et consommatrices et d’améliorer la santé publique. Cette entreprise complexe nécessite d’adopter une vision globale et de mettre en œuvre des politiques ambitieuses et stables à long terme, des synergies sectorielles et des stratégies d’investissement cohérentes visant à soutenir le déploiement à grande échelle des sources d’énergie renouvelables et à éliminer progressivement les combustibles fossiles qui, selon l’Agence internationale de l’énergie, représentent encore environ 70 % de l’énergie produite en Europe. L’Assemblée souligne qu’il est désormais moins coûteux d’investir dans des projets solaires et éoliens dans l’Union européenne que de continuer à investir dans le charbon et le gaz.
6. L’Assemblée estime que, dans l’exercice de leur responsabilité de garantir l’accès de toutes et tous à une énergie propre, sûre et abordable – ce qui est un objectif clé de la transition – les États devraient agir au moyen d’outils réglementaires et budgétaires sur trois axes principaux: assurer un approvisionnement énergétique adéquat en maximisant les investissements dans des sources d’énergie propres et disponibles localement; concevoir des stratégies de tarification équitables qui sous-tendent une production et une utilisation responsables de l’énergie; et accompagner les utilisateurs et utilisatrices vulnérables dans leur transition vers des systèmes plus durables et plus efficaces sur le plan énergétique. Les mesures prises devraient donner la priorité aux secteurs des transports et du logement, qui sont les plus gros consommateurs d’énergie et les principaux émetteurs de gaz à effet de serre en Europe.
7. L’Assemblée se félicite des objectifs consistant à réduire les émissions nationales de gaz à effet de serre d’au moins 55 % et à augmenter la part des énergies renouvelables afin qu’elle représente 45 % du bouquet énergétique national d’ici 2030 dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe. Elle salue également le Plan d'action de l'Union européenne pour une énergie abordable et elle souligne que le passage à des sources d’énergie plus respectueuses de l’environnement et une utilisation plus efficace de l’énergie relèvent du bon sens économique. En effet, cela permet aux ménages, aux entreprises et aux États de réaliser des économies à long terme et de renforcer la sécurité énergétique grâce à des ressources locales abondantes et gratuites, tout en profitant à la société dans son ensemble en termes d’amélioration de la santé publique et du bien-être, et de réduction de la pollution. Toutefois, au cours de la phase de transition, les États devraient protéger les citoyens, notamment les groupes vulnérables, contre les problèmes coûteux de verrouillage et contribuer à couvrir les coûts élevés de la transition, en particulier dans les zones rurales.
8. L’Assemblée appelle les États membres à orienter leurs choix politiques en matière d’énergie durable pour toutes les parties prenantes au niveau national et à soutenir leur mise en œuvre cohérente à long terme en développant des synergies grâce à la coopération au niveau paneuropéen. Par conséquent, elle recommande aux États membres:
8.1. de consolider leur stratégie nationale de transition vers une énergie propre, sûre et abordable et de la promouvoir par le biais d'une campagne de communication publique soulignant les avantages de l'adoption de sources d'énergie renouvelables;
8.2. de mettre en place plus d’incitations à l’investissement dans la mobilité durable, la rénovation des bâtiments anciens, les technologies vertes et les réseaux intelligents afin d’améliorer l’efficacité énergétique, le cas échéant grâce à des partenariats public-privé;
8.3. considérant que les centres de données et les applications de l'intelligence artificielle augmentent considérablement la consommation d'énergie, de faire un meilleur usage de l'intelligence artificielle en tant qu'outil puissant pour développer des politiques susceptibles de favoriser considérablement la transition énergétique;
8.4. d’examiner les possibilités offertes par la Banque de développement du Conseil de l'Europe pour le financement de projets favorisant une transition énergétique durable et socialement équitable;
8.5. de promouvoir la production locale d’énergie propre par les parties prenantes privées et publiques, notamment par le biais d'initiatives coopératives locales;
8.6. de supprimer les subventions publiques aux combustibles fossiles et de réduire les investissements publics dans ces sources d’énergie;
8.7. de favoriser la mobilité durable en améliorant l’infrastructure, l’accessibilité et le coût des transports publics, en encourageant la marche et le vélo, et en accélérant le passage à la mobilité partagée et aux véhicules propres;
8.8. afin de protéger les membres vulnérables de la société de la pauvreté énergétique, d’envisager l’utilisation de mesures structurelles telles que:
8.8.1. le plafonnement des prix et les réductions fiscales pour compenser l’effet de la flambée des prix de l’énergie;
8.8.2. des aides ciblées et un complément de ressources pour soutenir les personnes les plus vulnérables;
8.8.3. des subventions pour mettre en œuvre des programmes de rénovation de logements et faciliter l’acquisition de véhicules électriques;
8.8.4. l’interdiction de couper l’approvisionnement en énergie aux utilisateurs et utilisatrices vulnérables;
8.8.5. des programmes de formation professionnelle pour permettre aux travailleurs et travailleuses d’acquérir de nouvelles compétences et d’accéder à des emplois verts dans le secteur de l’énergie;
8.9. de faire participer les citoyen·nes et les municipalités à l’élaboration et à la mise en œuvre de partenariats énergétiques locaux afin de les responsabiliser en tant que prosommateurs (producteurs-consommateurs);
8.10. de mettre au point des systèmes de fiscalité verte socialement équitables, qui favorisent la transition vers les énergies propres en stimulant les investissements et en transférant la charge financière des solutions vertes vers les activités polluantes;
8.11. de s’engager dans des projets régionaux transfrontaliers visant à optimiser les interconnexions, à améliorer la stabilité des réseaux et à garantir un soutien mutuel en cas de perturbation de l’approvisionnement énergétique;
8.12. d’investir dans des capacités d’appoint et de stockage pour gérer les fluctuations de l’offre et de la demande d’énergie renouvelable;
8.13. de soutenir la création d’emplois dans les secteurs qui sous-tendent la transition vers un système énergétique durable et mettre en place des fonds de transition sociale pour aider les salariés à passer des secteurs basés sur les énergies fossiles aux secteurs propres;
8.14. de mener des audits énergétiques réguliers et indépendants au niveau national afin de suivre les progrès et de garantir la responsabilité dans la transition vers l’énergie propre.

B. Exposé des motifs par Mme Saskia Kluit, rapporteure

(open)

1. Introduction: la transition vers une énergie propre et abordable est vitale et urgente pour assurer la prospérité de l’Europe

1. Notre civilisation est confrontée à un énorme défi que l’on appelle la triple crise planétaire: lutter contre la crise climatique et la pollution, préserver l’intégrité des écosystèmes et protéger la biodiversité. Le succès de cette lutte est vital pour le développement humain et la prospérité. Solidaires des efforts déployés par la communauté internationale, les États membres du Conseil de l’Europe se sont engagés à modifier leur législation et leurs politiques pour prendre en compte les Objectifs de développement durable, les traités sur le climat et le Pacte vert pour l’Europe. Avec la Déclaration de Reykjavík, nos États membres ont reconnu que «les droits de l’homme et l’environnement sont intimement liés» et qu’«un environnement propre, sain et durable est essentiel au plein exercice des droits de l’homme des générations actuelles et futures». La transformation économique, et en particulier la transition vers un système énergétique plus durable, est au cœur de cet effort commun.
2. Une proposition de résolution (Doc. 15515) a repris cette question 
			(2) 
			La proposition a été
renvoyée à notre commission pour rapport, et j’ai été désignée rapporteure
le 6 décembre 2023, en succession de M. Antón Gómez-Reino (Espagne,
GUE)., en soulignant que «la transition vers une économie durable et socialement juste» et «la recherche d’énergies vertes, propres et renouvelables» ne devraient pas entrer en conflit avec les écosystèmes naturels ni avec les réalités sociales de nos pays, en particulier des zones rurales. L’impact négatif sur la vie humaine et les écosystèmes de l’extraction de minéraux rares utilisés pour fournir des matériaux pour la transition énergétique (comme le lithium pour les batteries), les risques possibles découlant de l’exploitation de mégaparcs éoliens et des forages profonds pour exploiter l’énergie géothermique en Europe sont de plus en plus préoccupants. Cependant, la transition vers l’économie verte s’accompagne également d’avantages socio-économiques, et pas seulement de risques. Il existe un potentiel d’emplois bien rémunérés dans le secteur, y compris des emplois manuels (tels que l’installation et l’entretien de panneaux solaires), ce qui pourrait réduire le chômage de longue durée, par exemple. L’amélioration de l’efficacité énergétique permettrait également de réduire les factures d’énergie des industries et des ménages, de diminuer la pollution et les émissions de gaz à effet de serre, et d’accroître la prospérité.
3. Toutefois, à court terme, le remplacement des combustibles fossiles polluants par des sources d’énergie plus durables et renouvelables implique des investissements massifs et peut entraîner des coûts plus élevés pour tous les consommateurs d’énergie dans les phases initiales de la transition verte. Comme l’ont montré les discussions tenues durant les réunions de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable, les politiques visant à adopter des alternatives énergétiques «plus vertes et plus propres» peuvent entraîner des difficultés économiques majeures pour les ménages à faibles et moyens revenus et les petites entreprises lorsque les politiques publiques ne fournissent pas de soutien ciblé tout au long de la période d’adaptation pour accompagner cette transition énergétique.
4. Dans ce contexte, il convient de rappeler qu’après le lancement du Pacte vert pour l’Europe en 2019 et l’adoption de la «loi européenne sur le climat» au niveau de l’Union européenne en 2021, la Commission européenne a pris une série de mesures législatives et financières pour assurer une transition équitable vers la neutralité climatique. Il s’agit notamment de la création du Fonds social pour le climat «pour soutenir les ménages vulnérables, les usagers des transports et les microentreprises», conformément aux principes d’équité et de solidarité qui définissent le Pacte vert pour l’Europe 
			(3) 
			Voir
COM(2021)801 final, «Proposition de recommandation du Conseil visant
à assurer une transition équitable vers la neutralité climatique».. Il reste cependant à voir si ce financement proposé sera accessible aux pays non-membres de l’Union européenne ayant le statut de candidat à l’adhésion. En outre, nous devrions saluer le plan d'action de l'Union européenne pour une énergie abordable, dévoilé en février 2025, qui vise à accélérer les investissements dans «les énergies renouvelables, les économies d'énergie, l'intégration plus poussée des marchés et de meilleures interconnexions», ce qui profitera à tous les utilisateurs d'énergie.
5. L’Organisation internationale du Travail (OIT) a publié des «Principes directeurs pour une transition juste vers des économies et des sociétés écologiquement durables pour tous» ainsi que le manuel d’utilisation associé. Ces principes directeurs fournissent une feuille de route et un cadre politique pour aider les pays, selon leur niveau de développement, à gérer équitablement leur transition vers des économies plus vertes et plus propres, en tenant compte des principes du développement durable et du travail décent 
			(4) 
			<a href='https://www.ilo.org/actrav/pubs/WCMS_826060/lang--en/index.htm'>www.ilo.org/actrav/pubs/WCMS_826060/lang--en/index.htm</a>.. Ils insistent sur la nécessité d’une protection sociale suffisante pour les segments vulnérables de la population et traitent des mécanismes de dialogue social dans l’élaboration des politiques à tous les niveaux.
6. Au niveau mondial, la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, qui s’est réunie en novembre 2021 (COP-26 à Glasgow, Royaume-Uni), a également adopté la déclaration intitulée «Soutenir les conditions d’une transition juste au niveau international», qui met l’accent sur la transition vers un approvisionnement en énergie propre, durable, abordable et fiable. La déclaration exhorte les pays à abandonner les sources d’énergie très polluantes (charbon et autres combustibles fossiles) et à améliorer l’accès à l’énergie propre pour tous et toutes. L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) estime que la réalisation des objectifs d’émissions nettes nulles et d’économie circulaire d’ici 2050 pourrait nécessiter des investissements annuels supplémentaires représentant entre 1 % et 1,5 % du PIB par an au niveau national 
			(5) 
			OCDE
(2020), «Gérer les transitions environnementales et énergétiques
pour les régions et les villes», Éditions OCDE, Paris, <a href='https://doi.org/10.1787/f0c6621f-en'>https://doi.org/10.1787/f0c6621f-en</a>..
7. Le Conseil pour la transition énergétique (CTE) 
			(6) 
			En 2022, cette structure
était coprésidée par le Royaume-Uni, le président de la COP Alok
Sharma,, et Damilola Ogunbiyi, et ses membres comprennent les principales
institutions financières multilatérales et organisations internationales.
Pour plus d’informations, voir https://ukcop26.org/focus-of-energy-transition-council-etc/. a été créé à la même occasion « pour permettre un dialogue efficace entre les pays qui ont besoin d’un soutien pour leur transition énergétique, d’une part, et les principaux acteurs internationaux offrant un soutien, d’autre part, afin de trouver, de coordonner et de mettre en œuvre plus rapidement des solutions adaptées ». Les domaines d’engagement prioritaires du CTE sont particulièrement pertinents dans le contexte du présent rapport. Il s’agit de la planification énergétique intégrée, des engagements à long terme en faveur des énergies renouvelables, de la sortie progressive des combustibles fossiles, des investissements massifs, de la gestion des fluctuations des réseaux verts, de l’efficacité énergétique, des technologies intelligentes et des stratégies industrielles socialement compatibles.
8. Les circonstances géopolitiques poussent également l’Europe à agir. En raison de la guerre d’agression menée par la Fédération de Russie contre l’Ukraine, l’Europe se détourne des combustibles fossiles russes dans un laps de temps très court. Cela est positif dans la mesure où il est désormais moins coûteux de se tourner vers les énergies renouvelables que de construire, par exemple, une nouvelle centrale au charbon, mais négatif dans la mesure où les délais ont été trop courts pour ne pas avoir recours au gaz naturel liquéfié (GNL) et au nucléaire pour combler le vide.
9. Au niveau du Conseil de l’Europe, les questions relatives à l’énergie durable ont été débattues à l’Assemblée parlementaire dans le cadre de rapports sur la sécurité énergétique de l’Europe 
			(7) 
			Résolution 1774 (2010) «Renforcer la sécurité énergétique de l’Europe en utilisant
davantage le gaz naturel liquéfié»., la diversification de l’énergie 
			(8) 
			Résolution 1977 (2014) «La diversification de l’énergie en tant que contribution
fondamentale au développement durable»., la sûreté nucléaire 
			(9) 
			Résolution 2241 (2018) «La sûreté et la sécurité nucléaires en Europe»., le changement climatique 
			(10) 
			Résolution 2210 (2018) «Changement climatique et mise en œuvre de l’Accord
de Paris»., les combustibles non conventionnels 
			(11) 
			Résolution 2140 (2016) «L’exploration et l’exploitation des hydrocarbures non
conventionnels en Europe». et les sources d’énergie renouvelables 
			(12) 
			Résolution 1737 (2010) «L’énergie géothermique – une réponse locale à un problème
brûlant ?».. Plus récemment, l’Assemblée a défendu le droit à un environnement sain 
			(13) 
			Recommandation 2211 (2021) et Résolution 2396 (2021) «Ancrer le droit à un environnement
sain: nécessité d’une action renforcée du Conseil de l’Europe»., établissant un lien entre les droits humains, les défis environnementaux et la santé publique et appelant l’Organisation à faire «preuve d’ambition et d’une vision stratégique pour l’avenir en se montrant à la hauteur de ce défi majeur porteur de transformations pour les droits humains et en veillant à renforcer la protection de ces droits à l’heure où des menaces environnementales systémiques pèsent sur les générations actuelles et futures».
10. Ce rapport examine la situation actuelle en Europe en ce qui concerne la transition vers les énergies propres. Sur la base des contributions d’experts, des discussions en commission et des auditions organisées par le Réseau parlementaire pour un environnement sain 
			(14) 
			Notamment lors des
réunions tenues à Marrakech et Ben Guerir (Maroc) les 17-18 mars 2023
et à Lisbonne et Cascais (Portugal) les 12-13 septembre 2024., ainsi que de mes propres recherches et investigations, le rapport cherche à évaluer les points forts et les points faibles de la transition de l’Europe vers une énergie propre pour tous et toutes. Il vise à formuler des recommandations aux États membres afin qu’ils intègrent les bonnes pratiques en matière de transition énergétique durable et socialement juste dans leur processus d’élaboration des politiques.

2. Accélérer le passage à une énergie propre pour une mobilité et un logement durables

11. L’Europe a besoin d’un approvisionnement en énergie propre, sûre, fiable et abordable pour assurer sa prospérité durable. Cependant, son bouquet énergétique est encore dominé par les combustibles fossiles qui contribuent de manière significative à la pollution de l’air, aux émissions de gaz à effet de serre et à la dépendance à l’égard de fournisseurs extérieurs. Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), environ 70 % de l’énergie produite en Europe en 2022 provenait des combustibles fossiles; l’énergie nucléaire et les biocarburants ainsi que l’incinération des déchets y contribuaient pour près de 11 % chacun, tandis que l’hydroélectricité représentait environ 3 %. La production d’électricité dépend aussi largement des sources de combustibles fossiles (environ 40 %), le secteur nucléaire en détenant environ 19 %, l’hydroélectricité environ 15 %, l’énergie éolienne environ 14 %, l’énergie solaire environ 6 % et les biocarburants près de 5 %. Les transports et le logement sont les plus gros consommateurs d’énergie en Europe (respectivement 28 % et 25 %), devançant même la consommation d’énergie de l’industrie.
12. Les transports et le logement sont également responsables de la majeure partie des émissions de CO2 en Europe (respectivement 29 % et 11 %) 
			(15) 
			<a href='C:\Users\ramanauskaite\Documents\ Voir'>www.iea.org/regions/europe/energy-mix</a>. Globalement, la production et l’utilisation de l’énergie en Europe sont responsables de la majorité des émissions de gaz à effet de serre. Selon l’AIE, dans la région européenne, les cinq principaux émetteurs de CO2 sont l’Allemagne, la Türkiye, l’Italie, le Royaume-Uni et la Pologne, suivis de la France, de l’Espagne, des Pays-Bas, de l’Ukraine et de la Tchéquie.
13. En termes de pollution atmosphérique, la situation en Türkiye, en Pologne, en République Slovaque, en Tchéquie et en Grèce semble être la pire, et en Suède, en Islande, en Finlande, en Estonie et en Norvège, la meilleure 
			(16) 
			<a href='https://www.greenmatch.co.uk/blog/2018/11/mapped-europes-most-and-least-polluted-countries'>www.greenmatch.co.uk/blog/2018/11/mapped-europes-most-and-least-polluted-countries#Top-Metric</a>.. Si l’on considère ce tableau sous l’angle de la santé publique, la Lettonie, la Hongrie, la Lituanie, la Pologne et la République Slovaque affichent les taux de mortalité les plus élevés imputables à la pollution de l’air, qui est fortement corrélée à l’utilisation de combustibles fossiles en général et de moteurs diesel en particulier. Améliorer la transition énergétique, c’est aussi réduire les risques sanitaires.
14. Étant donné que les 46 États membres du Conseil de l’Europe ont ratifié l’Accord de Paris sur le changement climatique et que ceux qui sont également membres de l’UE sont en outre liés par le Pacte vert pour l’Europe, la transition vers une énergie plus propre est un objectif stratégique et de développement majeur. En effet, les pays de l’UE représentaient à eux seuls la troisième source d’émissions de gaz à effet de serre dans le monde en 2021, derrière la Chine et les États-Unis 
			(17) 
			<a href='https://www.mckinsey.com/capabilities/sustainability/our-insights/five-key-action-areas-to-put-europes-energy-transition-on-a-more-orderly-path'>www.mckinsey.com/capabilities/sustainability/our-insights/five-key-action-areas-to-put-europes-energy-transition-on-a-more-orderly-path</a>.. Réduire les émissions nettes de gaz à effet de serre d’au moins 55 % d’ici à 2030 et parvenir à des émissions nettes nulles d’ici à 2050 est donc un défi de taille pour les pays de l’UE dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe.
15. Le passage à des sources d’énergie plus respectueuses de l’environnement et une utilisation plus efficace de l’énergie relèvent du bon sens économique, car ils permettent de réaliser des économies, et profitent également à l’ensemble de la société en termes d’amélioration de la santé publique et du bien-être. Toutefois, le passage à l’énergie propre nécessite des investissements adéquats (tant publics que privés), des politiques et des mesures d’incitation à long terme afin d’assurer le changement et d’obtenir des résultats tangibles. L’OCDE considère qu’avec la transition environnementale et énergétique les investissements dans les combustibles fossiles deviennent superflus et qu’il faut y mettre fin car tout retard dans l’action entraîne une augmentation des émissions et des coûts globaux 
			(18) 
			OCDE (2020), «Gérer
les transitions environnementales et énergétiques pour les régions
et les villes», op. cit..

2.1. Vers une utilisation plus durable de l’énergie dans les logements

16. Dans le secteur du logement, il apparaît qu’environ 75 % des bâtiments sont peu performants sur le plan énergétique 
			(19) 
			Goyens,
M. (2022) «The cost of living crisis: an opportunity to move to
sustainable lifestyles?», OECD Forum Network, Paris.. Des améliorations sont nécessaires pour renforcer l’isolation des bâtiments (murs, toits et fenêtres), les systèmes de chauffage, de refroidissement et de ventilation, ainsi que l’approvisionnement et l’utilisation de l’énergie en général. Ces mesures ont déjà créé des opportunités économiques considérables pour les ménages et les industries, mais leur accessibilité financière reste incertaine pour les ménages les plus vulnérables. La crise actuelle du coût de la vie pénalise malheureusement la capacité des ménages défavorisés à accéder à un logement de qualité, qui est un droit humain fondamental, comme le souligne le rapport actuellement en préparation de notre collègue Aurora Floridia (Italie, SOC) 
			(20) 
			Le titre provisoire
du rapport en question est «Analyse et lignes directrices pour garantir
le droit au logement et à un logement décent».. Organiser les investissements nécessaires pour réduire les coûts de chauffage et de climatisation d’un logement est financièrement irréalisable en soi pour la plupart des ménages à revenu faible ou moyen.
17. Un aspect majeur de l’utilisation de l’énergie dans les logements touche à la pauvreté énergétique, qui désigne une situation dans laquelle les ménages ont du mal à payer des services énergétiques adéquats, tels que le chauffage, la climatisation, l’éclairage et l’électricité. Elle est généralement due à la combinaison de faibles revenus, de coûts énergétiques élevés et d’une mauvaise efficacité énergétique des bâtiments. En Europe, des millions de personnes sont confrontées à la pauvreté énergétique, en particulier dans les pays d’Europe centrale et orientale, mais aussi en Europe du Sud, où les conditions climatiques extrêmes exacerbent le problème. Selon Eurostat, environ 7 % de la population de l’UE n’a pas les moyens de chauffer convenablement leur logement. Toutefois, ce chiffre varie considérablement d’un pays à l’autre, avec des taux dépassant les 20 % dans certaines régions 
			(21) 
			Par exemple, 22,5 %
en Bulgarie, 19,2 % à Chypre, 18,7 % en Grèce, et 17,5 % en Lituanie
et au Portugal, et 17,1 % en Espagne, selon Eurostat. Voir également
la revue analytique sur les droits sociaux et la crise du coût de
la vie, publiée par le CEDS en mars 2025..
18. La pauvreté énergétique peut entraîner de graves conséquences, notamment des problèmes de santé (dus à des conditions de vie froides et humides), l’exclusion sociale et un stress financier accru. Les groupes vulnérables, tels que les personnes âgées, les familles à faible revenu, les jeunes adultes en transition vers une vie en autonomie et les personnes vivant dans les zones rurales, sont particulièrement touchés. Dans les pays où une grande partie de la population vit dans des logements loués, les locataires n’ont souvent qu’un contrôle limité sur l’amélioration de leur logement, ce qui ne fait qu’exacerber le problème.
19. Le Comité européen des droits sociaux (CEDS) a récemment examiné un cas spécifique de coupures d’électricité pour environ 4 500 habitants (dont environ 1 800 enfants) d’un bidonville de Madrid dans le cadre de la procédure de réclamations collectives (plainte n° 206/2022). Dans sa décision, le CEDS met l’accent sur le lien entre les droits humains et l’accès à l’énergie, tout en soulignant que les populations ont besoin d’un «accès stable, cohérent et sûr à une énergie adéquate» afin de pouvoir jouir de leurs droits au logement, à la santé et à l’éducation tels qu’inscrits dans la Charte sociale européenne (STE no 35). Le CEDS précise notamment que lorsque les États choisissent d’assurer l’approvisionnement en électricité par l’intermédiaire d’entreprises privées, ils ne peuvent pas se soustraire à leur devoir de protéger les droits humains et doivent garantir les droits énoncés dans la Charte qui relèvent de la responsabilité de l’État. La situation de pauvreté énergétique va à l’encontre du droit des personnes à la protection contre la pauvreté et l’exclusion sociale garanti par l’article 30 de la Charte 
			(22) 
			Le CEDS a également
constaté une violation des articles 31§1, 16, 11§1, 11§3, 17§1 et
2, 23 et 15§3 concernant les mesures visant à assurer un logement
de qualité adéquate, à protéger la santé, à garantir la sécurité
alimentaire, à aider les enfants et les jeunes et à protéger les
personnes âgées et les personnes handicapées..
20. La crise énergétique européenne, exacerbée par les tensions géopolitiques et l’abandon progressif des combustibles fossiles, a entraîné une flambée sans précédent des prix de l’énergie. Selon Eurofound (Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail), les coûts de l’énergie ont augmenté de près de 42 % dans les pays de l’UE au premier semestre 2022 par rapport à l’année précédente, avant de diminuer légèrement en 2023 et de se stabiliser à un niveau élevé en 2024. En raison de la volatilité des prix du gaz et de l’électricité, les ménages à faibles revenus ont plus de mal à payer leurs factures d’énergie: environ 9,5 millions de personnes ayant un emploi avaient du mal à payer leurs factures d’énergie en 2022, et 41 millions avaient des difficultés à se chauffer correctement chez elles 
			(23) 
			«The
cost-of-living crisis and energy poverty in the EU: Social impact
and policy responses» – Background paper, Eurofound, 28 octobre 2022.. Malgré les interventions des pouvoirs publics, telles que les subventions et le plafonnement des prix, de nombreuses familles ont encore du mal à satisfaire leurs besoins énergétiques de base.
21. L’AIE estime que près de 20 % du parc immobilier existant en Europe doit être rénové pour réduire de manière significative les émissions de carbone d’ici 2030, étant donné qu’au moins 40 % des bâtiments dans les économies développées ont été construits avant 1980, date à laquelle les premières réglementations thermiques ont été adoptées. Cet objectif de rénovation est ambitieux mais réaliste si des orientations politiques et des partenariats d’investissement public-privé peuvent soutenir ces efforts.
22. Au niveau de l’UE, la pauvreté énergétique est reconnue comme un défi majeur et a conduit à des propositions de cadres politiques tels que le Pacte vert pour l’Europe et REPowerEU, qui visent à réduire la dépendance aux combustibles fossiles et à accélérer l’adoption des énergies renouvelables. La directive sur l’efficacité énergétique et la stratégie de programme de rénovation fixent des objectifs ambitieux pour l’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments, en ciblant les ménages à faibles revenus pour l’obtention d’un soutien financier. Le Fonds social pour le climat, doté de plus de 86,7 milliards d’euros pour la période 2026-2032 et dont le lancement est prévu en 2026, est conçu pour soutenir les ménages vulnérables, les micro-entreprises et les usagers des transports qui sont touchés de manière disproportionnée par la hausse des coûts de l’énergie. Le fonds permettra, entre autres, de fournir une aide directe au revenu, de financer des rénovations des résidences principales et d’encourager l’utilisation d’appareils à haut rendement énergétique, contribuant ainsi à alléger le fardeau des prix élevés de l’énergie.
23. Il existe également de bons exemples d’actions au niveau national. La France, par exemple, a gelé les tarifs (du gaz et de l’électricité) et mis en place un système de «chèques énergie», dans le cadre duquel les ménages à faibles revenus reçoivent une aide financière directe pour payer leurs factures d’électricité et de gaz ou pour investir dans des travaux d’amélioration visant à économiser l’énergie. Cette approche ciblée garantit que l’aide financière parvient à ceux qui en ont le plus besoin, réduisant ainsi le risque qu’on leur coupe l’approvisionnement en électricité. L’Espagne propose un Bono Social (tarif social), qui offre des tarifs d’électricité réduits aux consommateurs vulnérables. Le Gouvernement espagnol a également introduit des mesures d’urgence pour limiter les augmentations de prix et a investi massivement dans la rénovation des logements à faible revenu avec des solutions d’efficacité énergétique. En Allemagne, l’accent a été mis sur des programmes de rénovation à grande échelle dans le cadre du programme d’efficacité énergétique de la KfW, qui fournit des prêts à faible taux d’intérêt et des subventions d’État aux propriétaires et aux bailleurs pour qu’ils améliorent leurs bâtiments. Cette approche permet non seulement de réduire la pauvreté énergétique, mais aussi de contribuer à l’atteinte des objectifs climatiques plus larges du pays. L’Autriche dispose d’un système de Klimabonus («bonus climatique»).
24. La lutte contre la pauvreté énergétique nécessite une approche à multiples facettes qui associe des politiques de protection sociale à des stratégies ambitieuses de transition énergétique. Les gouvernements doivent veiller à ce que les subventions, les réglementations sur les prix de l’énergie et les rénovations de bâtiments ciblent spécifiquement les ménages vulnérables. Parallèlement, les investissements dans les sources d’énergie renouvelables et la production d’énergie décentralisée (comme les projets solaires communautaires) peuvent contribuer à réduire les coûts de l’énergie à plus long terme. En coordonnant les efforts au niveau régional et national, l’Europe peut évoluer vers un système énergétique plus durable et socialement plus juste.

2.2. Les défis de la mobilité durable en Europe

25. La mobilité durable en Europe est confrontée à de multiples défis, notamment les émissions élevées de gaz à effet de serre provenant des transports, la congestion urbaine, la dépendance aux combustibles fossiles et l’insuffisance des infrastructures de transport public dans certaines régions. Le secteur des transports représente environ 29 % des émissions de gaz à effet de serre en Europe et près de 25 % des émissions totales de l’UE, le transport routier étant le principal responsable de ces émissions qui, au lieu de diminuer, n’ont cessé d’augmenter ces dernières années. La transition vers une mobilité durable nécessite de réduire la dépendance à l’égard de la voiture, d’encourager la marche et le cyclisme, d’améliorer les transports publics et d’accélérer le passage à la mobilité partagée et des alternatives énergétiques propres.
26. De nombreuses villes européennes souffrent de niveaux élevés d’embouteillages et de pollution de l’air en raison de l’utilisation excessive de la voiture. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que la pollution de l’air est à l’origine de plus de 300 000 décès prématurés par an en Europe, les transports y contribuant largement. La réduction de l’utilisation de la voiture au profit de la marche, du vélo et des transports publics est essentielle pour améliorer la qualité de l’air et la santé publique. Lorsque l’utilisation de la voiture est inévitable, les véhicules électriques et hybrides (partagés) représentent une bonne solution de compromis, mais ils doivent être encouragés par des incitations publiques adéquates en termes de politiques, de subventions financières ciblées et de réglementations.
27. Le Pacte vert pour l’Europe vise à réduire les émissions des transports de 90 % d’ici à 2050. La stratégie pour une mobilité durable et intelligente définit dix domaines d’action clés, dont le développement de l’utilisation de l’infrastructure des véhicules électriques, l’amélioration de l’efficacité du transport ferroviaire et la promotion du cyclisme et de la mobilité partagée. L’UE investit également dans des solutions numériques pour améliorer l’efficacité des transports et réduire les émissions. Dans le cadre du paquet Fit for 55 («Ajustement à l’objectif 55»), l’UE a fixé des normes d’émission de CO2 plus strictes pour les nouveaux véhicules, et prévoit d’éliminer progressivement les ventes de voitures à moteur à combustion interne d’ici à 2035. Le règlement sur l’infrastructure pour carburants alternatifs (AFIR) vise à garantir que les stations de recharge pour véhicules électriques et les stations de ravitaillement en hydrogène soient largement disponibles dans toute l’Europe 
			(24) 
			Voir <a href='https://commission.europa.eu/strategy-and-policy/priorities-2019-2024/european-green-deal/transport-and-green-deal_en'>https://commission.europa.eu/strategy-and-policy/priorities-2019-2024/european-green-deal/transport-and-green-deal_en</a>.. Il est impressionnant de constater que la possession et l’utilisation d’une voiture électrique reviennent aujourd’hui moins chères que celles d’une voiture à carburant fossile dans 19 des 22 pays européens 
			(25) 
			Fiche
d’information sur la politique de l’UE, mai 2024..
28. En termes de solutions et de bonnes pratiques au niveau national, on peut citer l’exemple de la France qui a mis en place des zones à faibles émissions (ZFE) dans les grandes villes, limitant l’utilisation de véhicules polluants. Paris est allé plus loin en interdisant les véhicules diesel à partir de 2024 et les véhicules à essence à partir de 2030. La ville a également lancé «Paris Respire», qui prévoit des dimanches sans voiture dans plusieurs quartiers. L’Allemagne, après le succès de son billet temporaire à 9 euros en 2022, a introduit le «Deutschlandticket» à 49 euros en 2023 (qui est devenu 58 euros par mois en 2025), permettant des voyages illimités dans les transports publics locaux et régionaux à un prix abordable. Cette initiative vise à encourager l’utilisation des transports publics, à réduire la dépendance à l’égard de la voiture et à diminuer les émissions. L’Espagne possède l’un des réseaux ferroviaires à grande vitesse les plus étendus au monde, qui constitue une alternative rapide et durable aux vols intérieurs. Le Gouvernement espagnol a également mis en place des billets de train gratuits pour les trajets de courte et moyenne distance, afin d’encourager l’utilisation des transports publics plutôt que la voiture.
29. Les Pays-Bas sont un leader mondial en matière de cyclisme, avec plus de 35 % des déplacements dans des villes comme Amsterdam effectués à vélo. Le Gouvernement néerlandais a beaucoup investi dans les pistes cyclables, les parkings pour vélos et les aménagements urbains favorables aux cyclistes. Les employeurs offrent également des incitations financières pour les déplacements à vélo. Avec une indemnité kilométrique pour les cyclistes, versée par les entreprises à leurs employés, des systèmes de partage de vélos (souvent combinés avec les transports en commun pour le premier et le dernier kilomètre) et des investissements massifs dans des infrastructures cyclables sûres et adaptées aux enfants, le vélo est un mode de transport urbain à part entière.
30. Les villes scandinaves comme Oslo, Stockholm et Copenhague sont de bons exemples de mobilité durable, car elles sont à la pointe de l’électrification du parc automobile et du développement des transports publics. Oslo, par exemple, a le taux d’adoption de véhicules électriques le plus élevé au monde, grâce à d’importantes subventions publiques, à des exemptions de péage et à une vaste infrastructure de recharge. De son côté, Copenhague s’est fixé comme objectif la neutralité carbone pour ses transports publics d’ici fin 2025 et promeut le vélo grâce à de nombreuses pistes cyclables et à des signaux de priorité.
31. La réalisation de la mobilité durable en Europe nécessite un effort coordonné à la fois au niveau européen et au niveau national. Les politiques devraient se concentrer sur la réduction de la dépendance à l’égard des voitures à essence, l’amélioration de l’accessibilité financière des transports publics, le développement des infrastructures cyclables et l’électrification des transports. Les investissements dans les solutions numériques, les villes intelligentes et les sources d’énergie propres accéléreront davantage la transition. En partageant les meilleures pratiques et en soutenant des politiques ambitieuses, l’Europe peut montrer la voie en matière de création d’un système de mobilité durable, efficace et inclusif pour l’avenir.
32. Tout comme dans le domaine du logement, la transition vers un système de transport propre peut rendre vulnérables les personnes à faible revenu en raison de coûts ou d’obstacles supplémentaires. Les personnes qui utilisent les transports publics ont par exemple moins accès à l’emploi que celles qui utilisent la voiture. Grâce au faible prix au kilomètre, les personnes qui conduisent des voitures électriques ont un meilleur accès aux emplois que les personnes qui conduisent une petite voiture à carburant fossile. Il est donc très important que l’égalité et l’accessibilité fassent explicitement partie de la prise de décision lorsque des choix politiques sont faits.

3. Garantir la sécurité énergétique pour toutes et tous

33. La sécurité énergétique est devenue une préoccupation stratégique majeure pour l’Europe. Elle est cruciale pour la stabilité socio-économique et l’indépendance politique de l’Europe car elle soutend la fourniture continue d’une énergie abordable aux industries, aux ménages et aux services essentiels. La récente crise énergétique déclenchée par la guerre d’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine, les goulets d’étranglement entre l’offre et la demande d’énergie et la volatilité des prix ont mis en évidence les vulnérabilités associées aux faiblesses structurelles (telles qu’une capacité de stockage insuffisante) et à la dépendance excessive de certains pays européens à l’égard d’un seul fournisseur, soulignant la nécessité d’une solidarité et d’une coopération régionales accrues entre les pays.
34. Les États membres du Conseil de l’Europe s’efforcent de réduire leur dépendance à l’égard des importations de combustibles fossiles, en particulier de la Fédération de Russie qui utilise les approvisionnements en pétrole et en gaz comme outil de pression politique 
			(26) 
			Avant 2022, l’UE importait
de la Fédération de Russie 40 % de son gaz naturel, 27 % de son
pétrole et 46 % de son charbon. À la suite de l’invasion de l’Ukraine
par la Fédération de Russie et de l’imposition de sanctions à ce
pays, les pays de l’UE ont cherché d’autres fournisseurs. En 2023,
les importations de gaz russe dans l’UE étaient tombées à moins
de 10 %, remplacées par des importations de gaz naturel liquéfié
en provenance des États-Unis et du Qatar, ainsi que par une augmentation
de l’approvisionnement par gazoduc en provenance de Norvège et d’Algérie.. Les solutions d’énergie propre et décentralisée présentent également l’avantage d’être difficiles à déconnecter dans un contexte de guerre hybride. Cependant, le gaz naturel reste important pour la production d’électricité, le chauffage et la production industrielle en Europe. Avec le déclin de l’approvisionnement en gaz par gazoduc en provenance de Fédération de Russie, les pays européens se sont tournés vers les importations de gaz naturel liquéfié. Des pays comme l’Allemagne, les Pays-Bas et l’Italie ont construit de nouveaux terminaux de gaz naturel liquéfié, mais cela soulève des inquiétudes quant à la dépendance à long terme vis-à-vis des combustibles fossiles et à la volatilité des prix sur les marchés mondiaux du gaz naturel liquéfié.
35. En 2022, l’énergie éolienne et solaire a dépassé pour la première fois les combustibles fossiles comme principale source de production d’électricité dans les pays de l’UE, marquant ainsi une étape importante dans la transition vers l’énergie propre 
			(27) 
			Fiche d’information
sur la politique de l’UE, op. cit.. L’amélioration des infrastructures énergétiques et de l’interconnexion entre les pays européens reste un défi permanent. L’UE s’est fixé pour objectif d’atteindre une capacité d’interconnexion électrique d’au moins 15 % pour ses États membres d’ici 2030, notamment afin d’améliorer les interconnexions transfrontalières et de renforcer la stabilité du système énergétique avec une part croissante d’énergies renouvelables remplaçant les combustibles fossiles importés 
			(28) 
			<a href='https://energy.ec.europa.eu/topics/infrastructure/electricity-interconnection-targets_en'> Voir
https://energy.ec.europa.eu/topics/infrastructure/electricity-interconnection-targets_en </a>..
36. Les sources d’énergies renouvelables étant de plus en plus considérées comme un pilier essentiel de la sécurité énergétique, de nombreux pays européens ont considérablement augmenté leur capacité de production d’énergie renouvelable. Les pays de l’UE ont pour objectif de produire au moins 42,5 % et idéalement 45 % de leur énergie à partir de sources renouvelables d’ici 2030, l’éolien et le solaire jouant un rôle central. Le Danemark, l’Allemagne et l’Espagne ont pris la tête de cette transition. En dehors de l’UE, l’Islande est sans conteste le pays leader: près de 100 % de son électricité provient déjà de sources renouvelables telles que l’hydroélectricité et les ressources géothermiques. L’expansion des sources d’énergies renouvelables en Europe nécessite des investissements supplémentaires dans les capacités de production et de stockage, l’intégration des réseaux et la gestion de l’intermittence. Grâce aux économies d’échelle, il est désormais moins coûteux d’investir dans des projets solaires et éoliens dans l’Union européenne que de continuer à investir dans le charbon et le gaz.
37. Pour certains pays, l’énergie nucléaire constitue une source d’électricité stable et à faible teneur en carbone. Alors que certains pays comme la France, la Finlande et la Hongrie investissent dans de nouvelles centrales nucléaires, d’autres, comme l’Allemagne, abandonnent progressivement l’énergie nucléaire pour des raisons de sécurité. Les petits réacteurs modulaires apparaissent comme une solution potentielle intéressante pour concilier sécurité énergétique et durabilité. En outre, les investissements dans la production d’hydrogène vert pourraient favoriser la décarbonisation de l’industrie et offrir une alternative aux combustibles fossiles dans le secteur des transports. De plus, la poursuite des investissements dans les mesures d’efficacité énergétique contribuerait à réduire le gaspillage et la demande d’énergie.
38. La crise énergétique de 2022 a entraîné une hausse record des prix de l’électricité et du gaz, obligeant les gouvernements à intervenir au moyen de subventions, de plafonds de prix et de politiques énergétiques d’urgence. Toutefois, la stabilité des prix à long terme reste incertaine, à moins que tous les pays européens ne réduisent leur dépendance à l’égard des combustibles fossiles importés et des perturbations des chaînes d’approvisionnement mondiales. Parallèlement, le passage aux sources d’énergies renouvelables accroît la dépendance à l’égard de matières premières essentielles telles que le lithium, le cobalt et les terres rares, qui proviennent principalement de Chine, de la République démocratique du Congo et du Chili. Il est essentiel de diversifier les chaînes d’approvisionnement et d’intensifier les efforts de recyclage pour récupérer les minéraux rares afin d’assurer la transition énergétique propre de l’Europe.
39. Alors que les décideurs politiques prônent une transition verte, certaines industries, ainsi que certains syndicats et groupes politiques s’opposent à des changements rapides en raison de préoccupations concernant les pertes d’emplois, les coûts élevés et la fiabilité de l’approvisionnement en énergie. Les protestations des agriculteurs français et la résistance aux parcs éoliens dans les zones rurales allemandes soulignent la nécessité d’élaborer des politiques de transition énergétique soigneusement conçues et inclusives. La sécurité énergétique de l’Europe est clairement à un tournant, façonnée par les changements géopolitiques, les politiques climatiques et les avancées technologiques. Si le continent a progressé dans la diversification des approvisionnements énergétiques, l’investissement dans les énergies renouvelables et l’amélioration de l’efficacité, assurer un équilibre entre la sécurité, la durabilité et l’accessibilité financière nécessitera une nouvelle impulsion en matière de réformes politiques, d’investissements dans les infrastructures et de coopération étroite.

4. Le rôle des États en tant que catalyseurs du changement

40. La transition vers une énergie durable et socialement équitable place nos États en pôle position. Les gouvernements, en tant que régulateurs et décideurs politiques, jouent un rôle central dans la définition de politiques claires, l’application des réglementations, la mise en place d’une fiscalité verte et l’incitation aux investissements qui favorisent la transition vers les énergies renouvelables, l’efficacité énergétique et un accès équitable à l’énergie pour l’ensemble de la population. Sans une intervention forte de l’État, les seules forces du marché risquent de ne pas apporter la rapidité et l’équité nécessaires à une transition énergétique juste.
41. Avant tout, les États doivent guider les investisseurs, les industries et les consommateurs et leur offrir une sécurité juridique à long terme en fixant des objectifs clairs en matière de climat, de développement durable et d’énergie. Pour les pays de l’UE, le Pacte vert pour l’Europe et le paquet Fit for 55 constituent des références importantes à cet égard. Ces documents stratégiques établissent des objectifs généraux pour la transition verte visant à réduire les émissions et à augmenter l’utilisation des sources d’énergies renouvelables, mais les gouvernements nationaux sont chargés de traduire ces objectifs en politiques nationales et de les mettre en œuvre par le biais de plans nationaux pour l’énergie et le climat (y compris des feuilles de route précises) afin d’assurer la conformité dans tous les secteurs économiques et la participation pleine et entière de la population. Les pays non membres de l’UE pourraient s’inspirer des objectifs du Pacte vert pour l’Europe et les adapter à leur situation nationale, en fixant des priorités claires et visibles. Je pense que les gouvernements devraient chercher à utiliser plus la «carotte» que le «bâton» pour accompagner le changement et obtenir l’adhésion volontaire la plus large possible à leurs politiques. L’Allemagne, avec son Energiewende, est un bon exemple de mesures incitatives qui donnent des résultats: les investissements incitatifs réalisés par le pays dans l’énergie solaire et éolienne au cours des deux dernières décennies en ont fait un leader européen en matière de capacité d’énergie renouvelable 
			(29) 
			En 2023, les énergies
renouvelables représentaient plus de 50 % du bouquet électrique
allemand.. Dans le même temps, il reste extrêmement important que les États organisent des conditions de concurrence équitables et prévisibles sur le marché de l’énergie en fixant des priorités claires.
42. Un marché de l’énergie modernisé au niveau national est essentiel pour intégrer les énergies éolienne, solaire, géothermique, hydroélectrique et d’autres énergies renouvelables dans le réseau. À cette fin, les gouvernements doivent s’efforcer de supprimer progressivement les subventions aux combustibles fossiles afin de créer des conditions de concurrence équitables, d’encourager les contrats d’achat d’électricité à long terme pour les énergies renouvelables et de promouvoir la production d’énergie décentralisée (tels que les projets solaires, thermiques et éoliens communautaires avec des prosommateurs (producteurs-consommateurs) locaux). Grâce à ces réformes, les États veillent à ce que les énergies propres concurrencent équitablement les sources d’énergie traditionnelles tout en démontrant leurs avantages concurrentiels et leurs bénéfices pour un changement durable. Le Gouvernement danois, par exemple, a supprimé les subventions aux combustibles fossiles tout en subventionnant l’énergie éolienne (qui fournit aujourd’hui plus de 50 % de l’électricité du Danemark) et en garantissant un soutien réglementaire stable au secteur; des partenariats public-privé ont été utilisés pour développer l’éolien en mer (ce qui a également rendu l’énergie éolienne plus efficace et plus rentable), le gouvernement cofinançant les projets. La Pologne, traditionnellement dépendante de ses ressources locales en charbon, investit 30 milliards d’euros dans des parcs éoliens en mer et supprime progressivement les subventions au secteur du charbon; son industrie éolienne en mer devrait générer des dizaines de milliers d’emplois verts pour les travailleurs qui quittent le secteur du charbon.
43. Il convient de redoubler d’efforts pour améliorer l’efficacité énergétique des appareils électriques en Europe. Il est également nécessaire de réduire la consommation passive d’électricité des biens non essentiels. Des mesures d’efficacité énergétique telles que des coupures automatiques d’électricité et des normes progressives d’utilisation de l’électricité pour les équipements électriques peuvent contribuer à garantir que la consommation d’énergie diminue tout en gardant le même niveau de confort.
44. Bien que des efforts soient faits pour découpler la croissance économique et démographique de la consommation d’énergie, il est toujours nécessaire d’investir dans les infrastructures énergétiques. Les États doivent faciliter la modernisation des réseaux, l’interconnexion et la capacité de stockage de l’électricité afin de garantir un approvisionnement stable et résilient en énergies renouvelables. Il est essentiel d’accroître les investissements, y compris par la participation du public, pour les réseaux intelligents afin d’optimiser la distribution de l’énergie; pour les gestionnaires d’interconnexions transfrontalières afin d’assurer un partage régional harmonieux de l’énergie et d’éviter les pannes d’électricité; pour les solutions de stockage de l’énergie (batteries, hydrogène et hydroélectricité pompée) afin d’absorber l’électricité excédentaire pendant les pics de production et de la récupérer lorsqu’elle est nécessaire pendant les pics de consommation. Je pense que les gouvernements devraient envisager de fixer des plafonds tarifaires afin d’éviter les mouvements spéculatifs sur le marché de l’énergie et de protéger tous les utilisateurs.
45. Les gouvernements jouent un rôle clé dans la définition des incitations économiques par le biais de la tarification de la pollution et de la fiscalité verte. Par exemple, le système européen d’échange de quotas d’émission fixe un prix pour les émissions de CO2, encourageant les industries à décarboniser. Les incitations fiscales en faveur des énergies renouvelables, des véhicules électriques, des mesures d’efficacité énergétique et les subventions ciblées pour soutenir l’adoption des énergies propres par tous les utilisateurs accélèrent la transition. En transférant la charge financière des solutions vertes vers les activités polluantes, les États favorisent un changement systémique vers la durabilité. Ces mesures améliorent également l’efficacité et la fiabilité, faisant des énergies renouvelables l’épine dorsale du système énergétique européen. La Suède a ainsi introduit la taxe carbone la plus élevée d’Europe (120 euros par tonne de CO2), incitant les industries à se tourner vers les énergies propres et favorisant le passage à la mobilité verte avec les véhicules électriques (plus de 60 % des nouvelles voitures vendues en Suède en 2023 étaient électriques ou hybrides).
46. Une transition réussie vers l’énergie propre doit être socialement inclusive, en veillant à ce qu’aucun groupe d’utilisateurs d’énergie ne soit laissé pour compte. Les gouvernements devraient protéger efficacement les populations vulnérables de la pauvreté énergétique grâce à des subventions ciblées et à des tarifs sociaux, en ne laissant les coupures de courant et l’exclusion de l’approvisionnement en électricité qu’aux cas d’abus manifestes du système. Les autorités pourraient soutenir les travailleurs des industries des combustibles fossiles par des programmes de reconversion afin qu’ils acquièrent de nouvelles compétences très demandées pour le déploiement et l’entretien des technologies propres. La promotion de projets énergétiques communautaires permettrait aux citoyens de bénéficier pleinement de la transition tout en garantissant que tous les points de vue et les besoins soient dûment pris en compte. Un fonds pour une transition juste a été créé au niveau de l’UE pour soutenir les régions et les secteurs économiques touchés; il pourrait être mieux utilisé par les pays de l’UE et leurs partenaires hors de l’UE pour accélérer l’écologisation des économies nationales grâce à l’axe de l’énergie propre. En outre, les États membres de la Banque de développement du Conseil de l'Europe peuvent bénéficier de prêts avantageux pour des projets faisant progresser la transition vers une énergie plus durable et socialement équitable.
47. Dans ce contexte, l’accélération de l’innovation et du développement des technologies vertes est un autre domaine majeur d’intervention de l’État, en veillant à ce que l’Europe reste un leader mondial en matière d’innovation dans le domaine des technologies vertes. Les États doivent favoriser la recherche, le développement et le déploiement de nouvelles technologies énergétiques propres en finançant des projets pilotes dans les domaines de l’éolien en mer, de l’hydrogène et du stockage avancé dans des batteries; en soutenant les partenariats public-privé pour développer les solutions émergentes; en rationalisant les processus de délivrance des permis pour faciliter le déploiement des capacités de production d’énergie propre. La Finlande a choisi d’avancer avec une nouvelle génération de biocarburants et une économie circulaire avec des réglementations strictes pour soutenir les programmes de valorisation énergétique des déchets, par lesquels les biodéchets sont utilisés pour produire de l’énergie propre. Le succès est tel qu’elle est devenue un leader mondial de la bioénergie durable, avec de grandes entreprises nationales exportant des biocarburants dits avancés dans le monde entier, et le pays a réduit ses émissions dans le secteur des transports de 40 % en seulement dix ans. En combinant une stratégie de l’hydrogène avec un surplus d’énergie solaire, le Maroc et le Portugal sont les fers de lance de la production et de l’exportation d’hydrogène vert à grande échelle. La France développe également la production d’hydrogène vert à partir de l’énergie nucléaire abondante au niveau national dans le cadre du plan d’investissement 2030.
48. La sécurité et la durabilité énergétiques en Europe nécessitent une intensification de la coopération transfrontalière. Les gouvernements devraient poursuivre la diversification des chaînes d’approvisionnement en énergie afin de réduire la dépendance à l’égard des importations de combustibles fossiles instables, développer les partenariats en matière d’énergie propre entre les pays de l’UE et les pays tiers (par exemple, en important de l’hydrogène vert depuis les pays d’Afrique du Nord), harmoniser les réglementations dans toute l’Europe afin de faciliter un marché de l’énergie harmonieux et intégré basé sur la part croissante des énergies renouvelables, et renforcer la coordination locale et internationale dans l’intérêt d’une plus grande sécurité énergétique et d’une meilleure résilience au changement climatique. En Italie, des lois soutiennent les communautés énergétiques infranationales, permettant aux groupes locaux, aux municipalités et aux entreprises de produire et de partager de l’énergie renouvelable. Cela a aidé les communautés rurales et à faibles revenus à bénéficier de la transition énergétique.
49. Enfin, les États doivent veiller à ce que les entreprises énergétiques, les industries et les collectivités locales respectent les objectifs de durabilité en imposant des réglementations plus strictes en matière d’émissions aux industries très polluantes, en réalisant des audits énergétiques réguliers et indépendants pour suivre les progrès, en appliquant des sanctions en cas de non-respect tout en récompensant les leaders en matière de durabilité et en prévoyant des mécanismes transparents de suivi et d’établissement de rapports pour garantir la responsabilité dans la transition vers l’énergie propre.

5. La voie à suivre

50. L’Europe doit agir avec détermination pour construire un avenir énergétique résilient et à faible émission de carbone, tout en veillant à ce que la transition soit socialement équitable et économiquement viable. Les années à venir seront cruciales pour déterminer si le continent peut atteindre l’indépendance énergétique à long terme et la neutralité climatique. Dans leur transition vers une énergie propre, fiable et durable, nos États membres sont confrontés à des défis complexes et multiformes en matière de sécurité énergétique, qui nécessitent une approche globale conciliant les besoins immédiats en matière de sécurité et les objectifs de durabilité à long terme.
51. Bien que des progrès significatifs aient été réalisés dans la diversification des sources d’énergie et l’accélération de la transition vers une énergie propre, des efforts réglementaires et des investissements continus seront nécessaires pour assurer un avenir énergétique sûr, abordable et durable pour l’Europe, fondé sur des ressources énergétiques renouvelables. Les États, en tant que régulateurs suprêmes, devraient utiliser pleinement leurs prérogatives pour aider tous les producteurs et utilisateurs d’énergie à embrasser cet avenir énergétique propre par une approche progressive, des calendriers clairs et un effort collectif.
52. À mesure que l’Europe avance, le succès de sa stratégie pour la durabilité et la sécurité énergétiques dépendra de la mise en œuvre efficace des politiques, de l’optimisation de la réglementation et du renforcement des investissements, notamment dans l’innovation technologique, ainsi que de la poursuite de la coopération entre les États européens, les institutions et les partenaires internationaux. En relevant ces défis de front, l’Europe peut construire un système énergétique plus résilient et plus durable qui soutienne sa croissance économique, son développement social et ses objectifs environnementaux.