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A. Projet de
résolution
(open)
Rapport | Doc. 16245 | 11 septembre 2025
L'Assemblée parlementaire doit soutenir le Kazakhstan dans la poursuite de ses réformes démocratiques
Commission des questions politiques et de la démocratie
A. Projet de
résolution 
(open)1. L’Assemblée parlementaire se
réfère à sa Résolution 1506 (2006) «Relations extérieures du Conseil de l’Europe» et réaffirme
sa volonté de renforcer le rôle du Conseil de l’Europe dans la promotion
de la démocratie, de l’État de droit et du respect des droits humains
au-delà de ses frontières, en particulier dans les régions voisines,
en tant que contribution essentielle à la sécurité, à la stabilité
et au développement.
2. L’Assemblée rappelle ses Résolutions 1526 (2006) «Situation au Kazakhstan et relations avec le Conseil
de l'Europe» et 2193 (2017) «Les relations du Conseil de l’Europe avec le Kazakhstan»
et réaffirme qu’elle considère le Kazakhstan comme l’un des piliers
de la stabilité dans la région euroasiatique. Ce rôle a pris une
importance particulière dans un environnement géopolitique de plus
en plus tendu à la suite de la guerre d’agression non provoquée
menée par la Fédération de Russie contre l’Ukraine. Elle note également le
profil international émergent du Kazakhstan, soutenu par sa situation
géographique stratégique et sa politique étrangère équilibrée, et
se félicite des contributions du Kazakhstan à la diplomatie internationale.
3. L’Assemblée réaffirme son attachement à l’Accord de coopération
conclu avec le Parlement du Kazakhstan en 2004 qui, au cours des
deux dernières décennies, a servi de pierre angulaire pour renforcer
le dialogue interparlementaire et favoriser la compréhension mutuelle
entre le Conseil de l’Europe et le Kazakhstan. Elle se félicite
de l’engagement du Parlement du Kazakhstan à poursuivre et à développer
le dialogue structuré avec l’Assemblée, comme l’ont souligné le
Président de l’Assemblée et le Président du Sénat du Kazakhstan
dans une déclaration conjointe marquant le 20e anniversaire
de l’accord.
4. L’Assemblée salue également l’engagement des responsables
politiques du Kazakhstan en faveur de la transformation démocratique
de leur pays et prend note avec satisfaction des réformes constitutionnelles
et législatives engagées depuis 2019. En particulier, elle félicite
le Kazakhstan d’avoir aboli la peine de mort en 2022, ce qui était
l’une de ses principales demandes depuis le début de l’établissement
de ses relations avec le Parlement du Kazakhstan.
5. L’Assemblée salue la coopération globale entre le Kazakhstan
et le Conseil de l’Europe dans le cadre des Priorités de coopération
de voisinage, qui constitue un instrument précieux pour aligner
la législation kazakhe sur les normes du Conseil de l’Europe. Dans
ce contexte, l’Assemblée prend note avec satisfaction de l’adoption
des Priorités de coopération de voisinage actuelles pour 2024-2027,
qui définissent un éventail élargi de domaines de coopération, tels
que la réforme de la justice, les mesures de lutte contre la corruption, la
promotion des droits humains et le soutien à la gouvernance démocratique,
notamment en coopération avec l’Assemblée. L’Assemblée espère que
ce champ d’application élargi permettra de renforcer l’engagement
en faveur des normes et des mécanismes du Conseil de l’Europe, et
aboutira à des progrès tangibles dans la mise en œuvre des principales
réformes.
6. L’Assemblée se félicite vivement du fait que le Kazakhstan
soit partie à un nombre croissant de conventions et instruments
du Conseil de l’Europe et qu’il ait demandé à adhérer à plusieurs
autres. Elle prend note, en particulier, de la demande du Kazakhstan
de prolonger de deux ans l’invitation à adhérer à la Convention
du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence
à l’égard des femmes et la violence domestique (STCE no 210,
«Convention d’Istanbul»), dans le but exprimé de continuer à mettre
sa législation en conformité puis d’adhérer à la Convention. L’Assemblée
est déterminée à assurer le suivi de cette question en temps utile.
7. L’Assemblée rappelle que l’accord de coopération conclu en
2004 avec le Parlement du Kazakhstan vise à promouvoir dans ce pays
les principes de la démocratie parlementaire, de l’État de droit,
et du respect des droits humains et des libertés fondamentales.
Dans ce contexte, elle prend bonne note des rapports faisant état
des défis à relever dans ces domaines. Elle souligne notamment l’importance
de garantir un véritable pluralisme politique, d’accroître l’indépendance
du pouvoir judiciaire, de renforcer la liberté d’expression et de créer
un environnement propice à l’épanouissement de la société civile.
L’Assemblée souligne également la nécessité de traduire en justice
les responsables des violations des droits humains commises par
le passé, notamment celles associées aux événements de janvier 2022,
et de renforcer davantage les garanties contre la torture et les
mauvais traitements.
8. L’Assemblée reste attachée à une coopération avec le Kazakhstan
fondée sur des valeurs communes et est déterminée à aider le pays
à poursuivre ses réformes démocratiques. Ce soutien devrait être
stratégique et fondé sur des principes, encourageant le Kazakhstan
à poursuivre la mise en œuvre des réformes et à étudier les moyens
d’une coopération plus étroite.
9. Par conséquent, l’Assemblée encourage le Parlement du Kazakhstan:
9.1. à utiliser sa position renforcée
dans le cadre institutionnel du pays – un résultat positif des réformes
constitutionnelles récentes – pour faire avancer le processus de
démocratisation au Kazakhstan;
9.2. à encourager les autorités du pays à élargir la participation
du pays à l’espace juridique européen et à adhérer aux conventions
pertinentes du Conseil de l’Europe ouvertes aux États non membres,
et notamment:
9.2.1. à accélérer l’avancement
du processus de ratification de la Convention d’Istanbul;
9.2.2. à envisager de devenir membre du Groupe de coopération
internationale du Conseil de l’Europe sur les drogues et les addictions
(Groupe Pompidou);
9.3. à accroître sa participation aux travaux de l’Assemblée
et de ses commissions.
10. L’Assemblée appelle les autorités du Kazakhstan:
10.1. à poursuivre leur programme
de réforme et à traduire les engagements politiques en progrès durables,
transparents et mesurables;
10.2. à utiliser pleinement l’expertise et les outils disponibles
dans le cadre des Priorités de coopération de voisinage du Conseil
de l’Europe, en particulier dans les domaines nouvellement élargis de
la réforme de la justice, de la lutte contre la corruption, de la
protection des droits humains et de la gouvernance démocratique.
11. L’Assemblée exhorte les autorités du Kazakhstan:
11.1. à reconnaître l’importance d’un
discours public ouvert et d’une critique constructive dans une société
démocratique, à favoriser un véritable pluralisme politique et à
assurer une concurrence et une participation politiques significatives;
11.2. à garantir un environnement médiatique pluraliste et indépendant
et à éviter les restrictions disproportionnées imposées au journalisme
indépendant et à la société civile, notamment en supprimant les
obstacles juridiques et administratifs qui entravent leur fonctionnement;
11.3. à s’aligner sur les normes internationales en matière
de droits humains en veillant à ce que sa législation, ses politiques
et ses pratiques nationales reflètent ces normes, prennent en compte
les avis et les recommandations des organismes nationaux et internationaux
de défense des droits humains, y compris le Comité des droits de
l’homme des Nations Unies, et à mettre en œuvre l’intégralité de
leurs recommandations;
11.4. à faire avancer les réformes visant à renforcer l’indépendance
du système judiciaire et l’obligation de rendre des comptes, l’accès
à la justice et le droit à un procès équitable;
11.5. à veiller à ce que les auteurs des violations des droits
humains commises par le passé, y compris celles liées aux événements
de janvier 2022, rendent pleinement compte de leurs actes, et à
renforcer les garanties contre la torture et les mauvais traitements
dans tous les lieux de détention.
12. L’Assemblée encourage les autorités du Kazakhstan:
12.1. à poursuivre leur engagement
constructif avec le Conseil de l’Europe et d’autres organismes internationaux
dans le domaine de la protection de la démocratie, des droits humains
et de l’État de droit, et à intensifier les efforts visant à répondre
aux préoccupations soulevées;
12.2. à développer la participation active du Kazakhstan à la
diplomatie internationale en soutenant le dialogue, la stabilité
régionale et la coopération dans le respect des normes internationales
et des valeurs du Conseil de l’Europe. Il s’agit notamment de s’engager
fermement à préserver et à renforcer des principes fondamentaux
tels que le respect de la souveraineté, de l’indépendance et de
l’intégrité territoriale des États, le non-recours à la force ou
à la menace de recours à la force, et la résolution pacifique des
désaccords et des différends entre les pays;
12.3. à continuer de défendre une solution pacifique à la guerre
d’agression non provoquée contre l’Ukraine, guidée par les principes
du droit international, de la souveraineté et de l’intégrité territoriale, et
à envisager de se joindre aux efforts internationaux visant à créer
une approche globale de l’obligation de rendre des comptes, à garantir
la justice pour les victimes et à renforcer le droit international.
13. L'Assemblée devrait évaluer régulièrement la situation au
Kazakhstan et son adhésion aux valeurs du Conseil de l'Europe.
B. Exposé des motifs par M. Zsolt Nemeth, rapporteur
(open)1. Introduction
1. Le Kazakhstan, plus grand pays
enclavé au monde et neuvième par sa superficie, est situé en Asie centrale
et partage ses frontières avec la Fédération de Russie, la Chine,
le Kirghizistan, l'Ouzbékistan et le Turkménistan.
2. Depuis son indépendance de l'Union soviétique en 1991, le
Kazakhstan a maintenu une relative stabilité politique et généré
une croissance économique mesurable. Le pays a suivi une voie progressive
de modernisation politique, les réformes les plus importantes ayant
été engagées depuis 2019.
3. L'Assemblée parlementaire a suivi cette évolution avec un
mélange d'optimisme prudent et de critique constructive. Dans sa Résolution 1526 (2006)
, elle
a reconnu l'importance stratégique du Kazakhstan et s'est félicitée
de son ouverture à la coopération avec les institutions européennes.
Elle a toutefois exprimé sa préoccupation face à l’absence de pluralisme
politique, la faiblesse des médias indépendants et la concentration
excessive des pouvoirs au sein de l'exécutif.

4. Plus de dix ans plus tard, la Résolution 2193 (2017)
reconnaît des améliorations,
notamment l'intérêt exprimé par le Kazakhstan pour les conventions
du Conseil de l'Europe et ses efforts pour s'engager auprès de la
Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission
de Venise). Néanmoins, le rapport a réitéré un grand nombre des
mêmes préoccupations, en particulier en ce qui concerne les libertés
civiles, la concurrence électorale et l'indépendance du système
judiciaire.

5. Le présent document s'appuie sur une visite effectuée à Almaty
et Astana du 3 au 6 mai 2025 et sur l’événement organisé le 10 avril
2025 pendant la deuxième partie de session de l’Assemblée, auquel
ont participé la présidente de la Cour constitutionnelle du Kazakhstan
et la vice-présidente du Sénat du Parlement du Kazakhstan.
6. Ces deux événements ont montré que des réformes significatives
visant à renforcer les normes démocratiques et les libertés au Kazakhstan
ont été lancées depuis le dernier rapport. Leur impact n'a pas encore
été présenté de manière exhaustive à l'Assemblée.
7. Le présent rapport a donc pour objet de fournir un compte
rendu actualisé des évolutions politiques et institutionnelles au
Kazakhstan depuis 2019; d'examiner le contenu et l'impact de ces
réformes; et de déterminer comment l'Assemblée pourrait soutenir
les réformes démocratiques du Kazakhstan, en particulier celles
introduites sous la présidence de Kassym-Jomart Tokaïev.
8. Le rapporteur est convaincu qu'il est à la fois opportun et
nécessaire que l'Assemblée renforce son engagement auprès du Kazakhstan
en tant que partenaire clé de la réforme dans l'espace eurasien.
2. Informations générales
9. Le système politique du Kazakhstan
se définit comme une république présidentielle dotée d'un corps législatif
bicaméral. Le Président actuel, Kassym-Jomart Tokaïev, a pris ses
fonctions en 2019 à la suite de la démission de Noursoultan Nazarbaïev,
qui dirigeait le pays depuis son indépendance en 1991. L'arrivée
au pouvoir du Président Tokaïev a marqué un tournant dans le paysage
politique, ouvrant la voie aux réformes.
10. Le Parlement se compose de deux chambres: le Mazhilis (chambre
basse) et le Sénat (chambre haute). Les 98 membres du Mazhilis sont
élus au suffrage universel selon un système majoritaire mixte. Les 50 membres
du Sénat représentent les intérêts des régions, des communautés
nationales et culturelles au niveau national, 40 d'entre eux étant
élus par les assemblées législatives régionales et 10 étant nommés
par le président.
11. Le pays est administrativement divisé en 17 régions et trois
villes d'importance nationale: Almaty, Astana et Chymkent. Le Kazakhstan
a depuis longtemps fait du multivectorisme une doctrine de politique
étrangère, cherchant à établir des relations équilibrées avec les
puissances mondiales et contribuant de manière significative aux
travaux des organisations régionales et internationales. L'exemple
le plus récent à cet égard est la signature de l'accord de pays
hôte entre le Kazakhstan et les Nations Unies, établissant à Almaty
le Centre régional des Nations Unies pour les objectifs de développement
durable pour l'Asie centrale et l'Afghanistan.
12. Le caractère multivectoriel du Kazakhstan lui permet d'être
membre de l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC),
tout en poursuivant sa coopération avec l'Organisation du Traité
de l'Atlantique Nord (OTAN) au sein du Conseil de partenariat euro-atlantique
(CPEA). Cela explique également pourquoi le Kazakhstan fait progresser
la coopération économique au sein de l'Union économique eurasienne,
tout en approfondissant ses liens avec l'Europe, devenant le premier
pays d'Asie centrale à signer un accord de partenariat et de coopération
renforcé avec l'Union européenne (UE).
13. Acteur important sur les marchés mondiaux de l'énergie en
raison de ses riches réserves de pétrole, de gaz et d'uranium, le
Kazakhstan a établi des relations étroites avec tous les principaux
acteurs économiques. En tant que première économie d'Asie centrale,
il a pris des mesures pour promouvoir la coopération régionale, en
particulier dans des domaines tels que le commerce, les infrastructures
et la connectivité. Bien que ses efforts n'aient pas été exempts
de difficultés, le Kazakhstan est souvent considéré comme jouant
un rôle de coordination dans la région et au-delà. La participation
active du pays à l'Organisation des États turciques est un exemple
à cet égard, de même que la participation du Kazakhstan à l'Organisation
de coopération de Shanghai (OCS), où le pays a fait avancer l'agenda
en matière de sécurité, d'économie et de connectivité. La situation
stratégique du Kazakhstan le long du corridor de l'initiative “la
ceinture et la route” amplifie encore son importance géopolitique,
ce qui amène des groupes de réflexion, la communauté scientifique
et la presse à considérer le Kazakhstan comme une puissance moyenne.
14. Le Kazakhstan est un pays ethniquement diversifié qui compte
plus de 130 groupes ethniques
.
Son engagement à promouvoir l'harmonie interethnique est illustré
par des institutions telles que l'Assemblée du peuple du Kazakhstan,
un organe consultatif visant à favoriser l'unité nationale.

15. Une particularité réside dans la politique linguistique, le
kazakh étant la langue officielle et le russe la langue officielle
de communication interethnique
, utilisées sur un pied d'égalité
dans les institutions publiques.




16. L'utilisation parallèle des deux langues semble fonctionner
sans problème dans la plupart des situations de la vie quotidienne,
y compris dans la communication avec les autorités publiques. Néanmoins,
la politique linguistique reste un exercice d'équilibre entre, d'une
part, les droits des minorités et, d'autre part, la promotion de
la langue officielle en tant qu'instrument de construction nationale,
qui se poursuit encore aujourd'hui.
3. Développements politiques récents
17. Le processus de réforme démocratique
du Kazakhstan sous le Président Tokaïev a été à la fois ambitieux
et complexe. Depuis 2019, l'administration a lancé une série de
réformes – dont le slogan est “un président fort, un parlement influent,
un gouvernement responsable” – visant à faire passer le pays d'un système
superprésidentiel à un système plus équilibré sur le plan institutionnel,
avec des libertés civiles renforcées et un pluralisme politique.
18. Le gouvernement a positionné les réformes comme faisant partie
d'un programme plus large pour un "Kazakhstan juste", se concentrant
sur une plus grande réactivité politique, l'inclusivité et l'État
de droit.
19. Parmi les initiatives les plus notables, on peut citer:
- les amendements constitutionnels de 2022: un référendum a approuvé 33 amendements qui ont aboli les privilèges de l'ancien président, rétabli la Cour constitutionnelle, interdit la peine de mort et renforcé les pouvoirs du parlement et de la gouvernance locale. Ces changements comprennent également la mise en place d'un mandat présidentiel unique et non renouvelable de sept ans afin d'empêcher la monopolisation du pouvoir, ce qui constitue une décision unique dans la région. Un accent particulier a été mis sur le renforcement de l'autonomie du Commissaire aux droits de l'homme. Les responsabilités, les droits et les devoirs du Commissaire ont été inscrits dans la Constitution, marquant ainsi la transition d'un modèle de médiateur gouvernemental à un modèle qui respecte pleinement le principe d'indépendance. En outre, la possibilité pour le Commissaire de faire appel à la Cour constitutionnelle a été ajoutée à son mandat.
- Les réformes électorales: les réformes ont réduit le seuil électoral parlementaire de 7 % à 5 %, autorisé les candidatures indépendantes, introduit une option de vote "Aucun des choix ci-dessus" sur les bulletins de vote et simplifié l'enregistrement des partis politiques en abaissant le nombre de membres requis de 40 000 à 5 000;
- Les mesures relatives aux droits humains: depuis 2021, le Kazakhstan a adopté trois documents majeurs qui définissent le cadre de protection des droits humains, à savoir le plan d'action national pour les droits humains, le plan sur les droits humains et l'État de droit et le plan d'action présidentiel. Les réformes juridiques et les mesures politiques couvrent des domaines clés tels que les droits des personnes handicapées (y compris la ratification du protocole facultatif à la convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées), le soutien aux groupes vulnérables tels que les migrants ou les apatrides, la lutte contre la discrimination, les droits du travail, la réforme de la justice pénale et du système pénitentiaire et l'égalité entre les femmes et les hommes. Les mesures visant à améliorer l'égalité entre les femmes et les hommes ont été décrites, entre autres, dans le plan d'action national 2022-2025 pour la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies sur les femmes, la paix et la sécurité, le plan d'action gouvernemental 2024-2027 et le concept national sur la politique de la famille et de l'égalité entre les femmes et les hommes. D'autres initiatives notables ont porté sur la lutte contre la violence domestique, la torture et la promotion d'une police transparente lors des rassemblements publics.
- La décentralisation: les maires ruraux (akims) sont désormais élus au suffrage direct et les autorités régionales jouissent d'une plus grande autonomie. L'institution de conseillers en matière de genre auprès des gouverneurs régionaux a été introduite, et un statut juridique a été créé pour les médiateurs régionaux pour les droits de l'enfant.
20. Le gouvernement présente ces réformes comme un tournant majeur
vers la gouvernance participative. Le Président Tokaïev a insisté
sur la nécessité de créer un «État à l'écoute» qui s'engage de manière constructive
à répondre aux préoccupations du public et à améliorer la transparence
du gouvernement
. Ce concept a été
réitéré par le président à de nombreuses reprises depuis lors, servant
de ligne directrice pour toutes les actions de l'État.

21. Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe a salué les progrès
réalisés en matière de réformes constitutionnelles et politiques
lors de sa visite à Astana en mai 2025
.

4. Évaluation des réformes
22. Les efforts de réforme ont
produit des changements mesurables, tout en attirant l'attention
des acteurs de la société civile et des organisations internationales,
qui demandent une mise en œuvre plus solide et plus inclusive.
4.1. Perspective internationale
23. Dans son rapport sur les élections
législatives de 2023, le Bureau des institutions démocratiques et
des droits de l'homme (BIDDH) de l'Organisation pour la sécurité
et la coopération en Europe (OSCE) a reconnu des améliorations,
telles que des changements juridiques qui ont rapproché le Kazakhstan
«de la tenue d'élections conformes aux normes internationales et
aux engagements de l'OSCE»
.

24. Toutefois, il a relevé des préoccupations importantes et a
conclu que, si les élections ont marqué un progrès, «de nouvelles
modifications du cadre juridique sont nécessaires pour fournir une
base suffisante à la tenue d’élections démocratiques».
25. Dans son dernier rapport périodique sur la mise en œuvre par
le Kazakhstan des dispositions du Pacte international relatif aux
droits civils et politiques, le Comité des droits de l'homme des
Nations unies a félicité le Kazakhstan pour l'abolition de la peine
de mort et la ratification du deuxième protocole facultatif se rapportant au
Pacte. Le président du Comité a conclu que la délégation kazakhe
s'était engagée activement dans le dialogue, qui a notamment porté
sur l'indépendance de la justice, l'interdiction de la torture et
les droits des groupes vulnérables.
26. Dans le même temps, le Comité s'est déclaré particulièrement
préoccupé par l'absence de chaîne de responsabilité pour les événements
de janvier 2022, et par les restrictions imposées à la société civile
et à la liberté de réunion.
4.2. Perspectives de la société civile
27. Si les organisations de la
société civile du Kazakhstan reconnaissent l'importance symbolique
et structurelle de ces réformes, elles rappellent qu'une véritable
démocratisation nécessitera plus que des modifications à la législation.
28. Les ONG de défense des droits humains ont salué cette évolution,
mais ont également regretté ce qu'elles considèrent comme une mise
en œuvre superficielle des réformes. Elles ont exhorté les autorités
à renforcer le pluralisme et à lutter contre les limitations des
libertés fondamentales
. Les ONG ont
salué le fait que le système d'autorisation des rassemblements ait
été remplacé par un modèle de notification. Toutefois, dans certains
cas, les organisations de défense des droits humains ont fait état
de difficultés à obtenir l'autorisation d'organiser des événements
publics, ce qui pourrait indiquer des difficultés pratiques dans
la mise en œuvre de la procédure de notification. Les observateurs
évoquent également la restriction de la liberté d'expression, certaines
organisations de défense des droits humains considérant les accusations
portées contre certains journalistes et blogueurs comme des manifestations
possibles de pression sur les médias indépendants ou critiques
.


29. En ce qui concerne le climat électoral, les acteurs de la
société civile ont fait valoir que le système électoral, bien que
formellement plus concurrentiel, restait étroitement contrôlé. Bien
que les élections législatives de mars 2023 aient été décrites comme
«ayant introduit des éléments de concurrence dans l'arène politique»,
les observateurs ont noté que la participation des forces d'opposition
aux élections est restée limitée. La partialité des médias, la radiation
des candidats et l'utilisation des ressources administratives ont été
citées comme des obstacles majeurs.
30. Les observateurs ont salué le fait que, dans le cadre de la
réforme du droit et de la justice, la Cour constitutionnelle ait
été rétablie et que les pouvoirs du Commissaire aux droits de l'homme
aient été étendus et inscrits dans la Constitution
. Dans le même temps, des inquiétudes
ont été exprimées quant à l'influence potentielle du pouvoir exécutif
sur l'indépendance du pouvoir judiciaire, en particulier dans les
affaires politiquement sensibles.

31. Les conséquences des troubles de janvier 2022 («janvier tragique»)
restent un sujet sensible en ce qui concerne la justice pénale et
la responsabilité de la police: malgré l'amnistie accordée à de
nombreux détenus, des représentants de la société civile continuent
de souligner la nécessité d'une évaluation indépendante des circonstances
liées à ces événements. Des voix s'élèvent également pour accuser
les autorités de ne pas avoir suffisamment coopéré aux enquêtes
sur les graves violations des droits humains, voire d'y avoir été impliquées
.

5. Politique linguistique et dynamique linguistique au Kazakhstan
32. Le Kazakhstan est un État bilingue
en vertu de sa Constitution. L'article 7 de la Constitution de la République
du Kazakhstan stipule que le kazakh est la langue officielle, tandis
que le russe est utilisé officiellement sur un pied d'égalité dans
les institutions publiques et les organes locaux d'autonomie.
33. Cette dualité juridique reflète la réalité démographique du
pays: les Kazakhs représentent environ 71 % de la population, mais
le russe reste largement parlé, en particulier dans les zones urbaines
et dans le nord du pays, où le Kazakhstan partage avec la Russie
une frontière qui s'étend sur plus de 7 500 km
.

34. Depuis l'obtention de l'indépendance, les gouvernements successifs
ont entrepris des efforts pour revitaliser et promouvoir la langue
kazakhe, en particulier dans l'éducation, l'administration publique
et les médias.
35. L'État a mis en œuvre des politiques d'éducation trilingue
– mettant l'accent sur le kazakh, le russe et l'anglais – dans le
but d'accroître l’utilisation fonctionnelle du kazakh sans aliéner
les citoyens russophones. Les programmes gouvernementaux comprennent
également le développement des services publics en langue kazakhe,
l'augmentation du contenu kazakh dans les médias et des mesures
incitatives pour les fonctionnaires afin qu'ils améliorent leurs
compétences linguistiques.
36. Le sujet reste toutefois sensible et contesté. Les minorités
ethniques, en particulier les Russes (environ 15 % de la population),
craignent que l'accent mis sur le kazakh ne marginalise leurs droits
linguistiques.
37. Néanmoins, une grande partie de la majorité kazakhe considère
la promotion de la langue officielle – sur la base de son statut
constitutionnel – comme une correction attendue depuis longtemps
des politiques de l'ère soviétique qui réprimaient l'expression
culturelle autochtone.
38. L'évaluation est un peu plus réservée en ce qui concerne le
débat sur l'utilisation de l'alphabet latin. Si le gouvernement
a globalement fixé le cap de la transition, certaines voix s'élèvent
au sein de la société civile pour souligner qu'un changement de
système d'écriture rendrait l'apprentissage du kazakh plus difficile,
en particulier pour la communauté russophone, et ralentirait ainsi
la mise en œuvre globale de la langue kazakhe.
39. Les ONG de défense des droits humains préconisent une approche
équilibrée qui protège la diversité linguistique tout en reconnaissant
le rôle symbolique et fonctionnel de la langue kazakhe. En général,
elles saluent l'approche actuelle du gouvernement, qui privilégie
une réforme linguistique progressive, évitant les changements brusques
susceptibles de provoquer des tensions ethniques ou de nuire à la
cohésion sociale.
6. Résultats des réformes
40. Dans l'ensemble, les réformes
récentes du Kazakhstan reflètent un changement important sur le
plan rhétorique et juridique en faveur d'une gouvernance démocratique.
Le pays a introduit des réformes législatives qui s'alignent sur
les normes internationales. Des changements tangibles – en particulier
en matière de droit électoral, de structure judiciaire et de décentralisation
– témoignent de la volonté politique.
41. Le Kazakhstan a notamment progressé dans la lutte contre la
torture et les traitements dégradants. En 2023, l'article 146 du
Code pénal a été modifié conformément aux normes internationales,
en clarifiant les définitions et en alourdissant les peines. Les
enquêtes sur la torture ont été placées sous l'autorité exclusive du
Bureau du procureur et la vidéosurveillance obligatoire a été introduite
dans les centres de détention. En conséquence, le nombre d'affaires
de torture portées devant les tribunaux a augmenté, ce qui témoigne
d'une amélioration de la transparence et de la responsabilité. Au
total, 98 personnes ont été condamnées, dont près de 79 % à des
peines d'emprisonnement effectives. Parmi eux, 33 fonctionnaires
ont été poursuivis pour des actes de torture liés aux événements
de janvier 2022.
42. En ce qui concerne les efforts visant à aligner l'environnement
électoral sur les normes européennes, la Commission électorale centrale
de la République du Kazakhstan a fait preuve d'une ouverture constante
au dialogue avec le BIDDH de l'OSCE, le Conseil des élections démocratiques
du Conseil de l'Europe et la Commission de Venise. La législation
électorale, ancrée dans des dispositions constitutionnelles telles
que la loi constitutionnelle sur les élections, accorde des droits
de vote actifs et passifs égaux. Tous les candidats reçoivent les
mêmes ressources financières de la part de l'État; ils bénéficient
d'un accès égal aux médias; et les médias sont obligés de diffuser
des informations concernant tous les candidats dans des quantités
égales d'espace imprimé et de temps d'antenne. Selon la Commission
électorale centrale, les amendements législatifs adoptés depuis
2019 ont considérablement élargi l'accès des représentants des médias
et des observateurs nationaux aux bureaux de vote le jour de l'élection.
43. Pourtant, le développement démocratique du Kazakhstan reste
en transition. Une vigilance constante, une coopération internationale
solide et une demande interne émanant des citoyens et de la société
civile seront nécessaires pour garantir que les réformes introduites
sur papier produisent des changements démocratiques durables et
inclusifs.
7. Relations du Conseil de l'Europe avec le Kazakhstan
44. Selon les décisions pertinentes
du Conseil de l'Europe
,
le Kazakhstan ne peut pas devenir membre à part entière du Conseil
de l'Europe. Toutefois, l'Organisation a cherché à renforcer de
plus en plus son engagement avec les pays voisins, et le Kazakhstan
est apparu comme un partenaire notable dans ce contexte.

45. Le Conseil de l'Europe a joué à la fois un rôle de référence
normative et de partenaire de mise en œuvre, aidant le Kazakhstan
à renforcer les droits humains, l'État de droit et la gouvernance
démocratique. Cette coopération a joué un rôle déterminant dans
l'élaboration des réformes juridiques et institutionnelles du Kazakhstan,
contribuant ainsi à son programme de démocratisation plus large.
7.1. Coopération avec l'Assemblée
46. L'engagement du Kazakhstan
auprès de l'Assemblée a évolué de manière significative au cours
des deux dernières décennies, en particulier depuis la signature
de l'Accord de coopération entre l'Assemblée et le Parlement du
Kazakhstan en 2004.
47. Cet Accord de coopération a jeté les bases d'un dialogue structuré
entre l'Assemblée et le Parlement du Kazakhstan. Il a encouragé
le Kazakhstan à s'aligner sur les conventions et les normes du Conseil
de l'Europe et a favorisé des interactions régulières entre les
organes parlementaires. L'Accord a permis aux parlementaires kazakhs
d'assister aux sessions de l'Assemblée et de participer aux travaux
des commissions, ce qui leur a permis de se familiariser avec les
pratiques parlementaires européennes.
48. À l'occasion du 20e anniversaire
de l'accord en 2024, une déclaration conjointe du Président de l'Assemblée
et du Président du Sénat du Parlement du Kazakhstan a réaffirmé
l'importance de la diplomatie parlementaire dans la consolidation
de la démocratie. Les deux parties ont salué la contribution de
l'Accord au renforcement des réformes juridiques du Kazakhstan,
notamment l'abolition de la peine de mort et la mise en place d'institutions
de défense des droits humains
.

49. L'Assemblée a suivi de près les progrès de la réforme. Les
membres ont saisi à plusieurs reprises l'occasion d'exprimer leurs
différents points de vue, parfois contradictoires, sur l'état d'avancement,
la mise en œuvre et les perspectives des réformes. Si certains ont
critiqué ce qu'ils considèrent comme des violations systématiques
des droits humains et des libertés politiques par le biais de la
répression judiciaire, financière et transnationale, d'autres ont
félicité les autorités pour les progrès réalisés dans le domaine
des réformes politiques et ont encouragé le Kazakhstan à poursuivre
la coopération fondée sur les résultats des interactions depuis
2004.
7.2. Coopération avec le Comité des Ministres – Priorités de la coopération de voisinage du Conseil de l'Europe avec le Kazakhstan 2024-2027
50. La coopération s'est également
renforcée grâce aux Priorités de coopération de voisinage, un cadre stratégique
pour un engagement structuré avec des États non-membres. Les Priorités
de coopération de voisinage les plus récentes (2024-2027), approuvées
en octobre 2023 par le Comité des Ministres, décrivent la collaboration
dans des domaines essentiels, notamment:
- renforcer l'indépendance du pouvoir judiciaire;
- lutter contre la corruption et le blanchiment d'argent;
- prévenir la violence à l'égard des femmes et des enfants;
- renforcer le rôle du parlement dans le contrôle démocratique;
- promouvoir l'État de droit et les droits humains dans les procédures pénales
.
51. Ces priorités s'appuient sur les progrès réalisés dans le
cadre des Priorités de coopération de voisinage 2019-2023, qui ont
conduit à l'adhésion du Kazakhstan au Groupe d’Etats contre la corruption
(GRECO) et à des invitations officielles à adhérer à d'autres conventions
du Conseil de l'Europe, telles que celles sur la cybercriminalité
et la lutte contre la corruption. Le processus des Priorités de
coopération de voisinage a permis au Kazakhstan de bénéficier des
normes juridiques et du savoir-faire institutionnel de l'Organisation sans
être membre officiel.
52. Lors de sa visite à Astana en mai 2025, le Secrétaire Général
du Conseil de l'Europe, Alain Berset, a souligné que la coopération
entre le Kazakhstan et le Conseil de l'Europe était un pilier de
la stabilité régionale et européenne. Il a félicité le Kazakhstan
pour les progrès réalisés en matière de réformes constitutionnelles et
politiques et mis en lumière le renforcement de la coopération dans
le cadre des Priorités de coopération de voisinage qui, dans ses
réitérations actuelles, a été élargie et complétée afin d'améliorer
l'alignement sur le programme national de réforme du Kazakhstan.
7.3. Participation aux instruments du Conseil de l'Europe
53. Le Kazakhstan a déjà ratifié
plusieurs conventions du Conseil de l'Europe, y compris:
- la Convention culturelle européenne (STE n° 18);
- la Convention sur la reconnaissance des qualifications relatives à l'enseignement supérieur dans la région européenne (STE n° 165);
- la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime (STE n° 141);
- la Convention concernant l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale (STE n° 127)
.
54. Le Kazakhstan a été invité par le Comité des Ministres à adhérer
à la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale
(STE n° 30) le 18 juin 2025. Cette décision est valable cinq ans
à compter de son adoption.
55. Le Kazakhstan a également demandé une prolongation de deux
ans de l'invitation à adhérer à la Convention du Conseil de l'Europe
sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes
et la violence domestique (STCE n° 210, «Convention d'Istanbul»),
ce qui devrait permettre aux autorités kazakhes de continuer à mettre
leur législation en conformité. Le soutien politique aux progrès
dans ce domaine a été clairement exprimé lors de la visite du rapporteur
dans le pays.
56. Le Kazakhstan a le statut d'observateur ou de participant
auprès de nombreux organes du Conseil de l'Europe, notamment la
Commission de Venise, la Commission européenne pour l’efficacité
de la justice (CEPEJ) et le GRECO. Les consultations avec la Commission
de Venise ont influencé les réformes constitutionnelles, judiciaires
et en matière de droits humains au Kazakhstan, par exemple le rétablissement de
la Cour constitutionnelle en 2023.
57. Le Kazakhstan a entretenu une relation évolutive avec la Commission
de Venise depuis la fin des années 1990, qui a culminé avec son
adhésion en tant que membre à part entière en 2012. Le pays s'est engagé
activement dans la coopération avec la Commission à travers diverses
formes d'assistance juridique et de consultations d'experts, en
particulier dans les domaines de la réforme constitutionnelle et
judiciaire. Le Kazakhstan a notamment accueilli et participé à des
dialogues de haut niveau et à des conférences régionales, notamment
en 2006, 2017, 2021 et 2023, qui ont abordé des questions telles
que l'indépendance de la justice et la révision constitutionnelle.
Dans le cadre des programmes conjoints de l'UE et du Conseil de
l'Europe, y compris l'initiative pour l'État de droit en Asie centrale,
le Kazakhstan a reçu et pris en compte un certain nombre d'avis
de la Commission de Venise visant à soutenir les réformes législatives.
Cette coopération continue d'offrir une plateforme de dialogue sur
l'État de droit et les questions de gouvernance entre le Kazakhstan
et les institutions européennes.
58. L'évaluation du GRECO a eu un effet catalyseur, en identifiant
les vulnérabilités du cadre anticorruption du Kazakhstan et en formulant
des recommandations qui ont influencé la politique nationale. Lors
du dernier examen de conformité (2024), 4 des 27 recommandations
du GRECO avaient été entièrement mises en œuvre, la plupart des
autres ayant été partiellement prises en compte
.

7.4. La voie à suivre: un potentiel stratégique
59. L'intérêt constant du Kazakhstan
pour l'approfondissement des relations avec le Conseil de l'Europe
– en dépit des complexités géopolitiques – est un signe positif.
La participation aux conventions et organes du Conseil de l'Europe
permet au Kazakhstan d'accéder au cadre juridique européen tout
en affirmant ses références réformistes sur la scène internationale.
60. À l'avenir, le Kazakhstan pourrait poursuivre:
- le renforcement de ses relations avec l'Assemblée afin de permettre un engagement plus structuré;
- la mise en œuvre intégrale des Priorités de coopération de voisinage 2024-2027 afin d'ancrer les principes démocratiques dans la pratique;
- l'adhésion à des traités clés tels que la Convention d'Istanbul, la Convention de Budapest sur la cybercriminalité et la mise en conformité totale avec le GRECO;
- l'élargissement de la coopération technique, en particulier dans les domaines de l'indépendance judiciaire et du développement de la société civile.
61. Pour l'Assemblée, la coopération avec le Kazakhstan représente
une opportunité stratégique et politique. En soutenant les réformes
de l'intérieur, l'Assemblée peut contribuer à promouvoir un modèle
de gouvernance stable et fondé sur les droits dans une région géopolitiquement
sensible.
8. Conclusion
62. Depuis 2019, sous la direction
du Président Tokaïev, le pays a entrepris un large éventail de réformes visant
à rééquilibrer le système politique, à renforcer l'État de droit,
à améliorer la protection des droits humains et à créer un espace
pour une société plus pluraliste.
63. Ces réformes sont allées au-delà du symbole: elles comprennent
des amendements constitutionnels, des modifications des systèmes
électoral et judiciaire, des efforts de décentralisation et une
meilleure protection juridique des droits civils et politiques.
64. Cependant, la transformation reste un travail en cours. Comme
l'ont souligné à plusieurs reprises les acteurs de la société civile,
la réforme législative n'est que la première étape vers une véritable démocratisation.
Ils avertissent que l'héritage du pouvoir centralisé, du contrôle
de l'État sur les médias et des restrictions à la liberté d'expression
reste présent, même dans le contexte des réformes en cours.
65. Les observateurs ont demandé au Kazakhstan de relever des
défis importants: garantir une véritable indépendance judiciaire,
protéger la liberté de réunion et la liberté d'expression, permettre
un environnement médiatique ouvert et sauvegarder les droits des
voix de l'opposition et des communautés marginalisées.
66. Le Conseil de l'Europe, notamment par l'intermédiaire de l'Assemblée,
a joué un rôle de soutien important dans l'orientation et l'évaluation
de ces réformes. L'Accord de coopération de l'Assemblée, les Priorités
de la coopération de voisinage du Conseil de l’Europe ainsi que
l’engagement du Kazakhstan auprès d'organismes tels que la Commission
de Venise et le GRECO ont contribué à intégrer les normes juridiques
et démocratiques européennes dans le cadre institutionnel en évolution
du Kazakhstan.
67. La volonté récente du Gouvernement kazakh d'adhérer à d'autres
conventions – sur la corruption, la cybercriminalité et les droits
humains – indique que les autorités sont prêtes à faire progresser
cette coopération.
68. Le programme de réformes du Kazakhstan n'est pas passé inaperçu
et son rôle de pondération géopolitique – entre la Russie, la Chine,
l'Europe et la communauté internationale au sens large – souligne l'importance
de garantir la légitimité nationale par le biais d'une gouvernance
démocratique.
69. Si elle est couronnée de succès, la transformation démocratique
du Kazakhstan pourrait servir de modèle pour la région, démontrant
qu'une réforme significative est possible même dans un contexte
marqué par des héritages autoritaires et impériaux.
70. Le moment est venu de renforcer l'engagement du Conseil de
l'Europe, non seulement pour reconnaître les progrès accomplis,
mais aussi pour contribuer à garantir la pérennité de ces changements.
La réforme démocratique au Kazakhstan n'est pas seulement dans l'intérêt
national de son peuple, elle est aussi dans l'intérêt stratégique
de l'Europe.
71. Dans ce contexte, il est à la fois opportun et nécessaire
que l'Assemblée renforce son soutien aux réformes démocratiques
du Kazakhstan. Ce soutien devrait être stratégique et fondé sur
des principes, en encourageant le Kazakhstan à poursuivre la mise
en œuvre des réformes et en explorant les moyens d'une coopération
plus étroite.
72. Plus précisément, l'Assemblée pourrait:
- encourager le Parlement du Kazakhstan à renforcer ses relations institutionnelles avec l'Assemblée;
- suivre de près la mise en œuvre des Priorités de la coopération de voisinage du Conseil de l'Europe pour 2024-2027;
- accroître les échanges et la visibilité de l'engagement du Kazakhstan dans les sessions et les commissions de l'Assemblée;
- inviter les États membres à contribuer au renforcement des programmes de développement des capacités des juges, des parlementaires, des fonctionnaires et de la société civile.