Imprimer
Autres documents liés

Rapport | Doc. 16245 | 11 septembre 2025

L'Assemblée parlementaire doit soutenir le Kazakhstan dans la poursuite de ses réformes démocratiques

Commission des questions politiques et de la démocratie

Rapporteur : M. Zsolt NÉMETH, Hongrie, CEPA

Origine - Renvoi en commission: Doc. 15569, Renvoi 4673 du 10 octobre 2022. 2025 - Quatrième partie de session

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 10 septembre
2025.

(open)
1. L’Assemblée parlementaire se réfère à sa Résolution 1506 (2006) «Relations extérieures du Conseil de l’Europe» et réaffirme sa volonté de renforcer le rôle du Conseil de l’Europe dans la promotion de la démocratie, de l’État de droit et du respect des droits humains au-delà de ses frontières, en particulier dans les régions voisines, en tant que contribution essentielle à la sécurité, à la stabilité et au développement.
2. L’Assemblée rappelle ses Résolutions 1526 (2006) «Situation au Kazakhstan et relations avec le Conseil de l'Europe» et 2193 (2017) «Les relations du Conseil de l’Europe avec le Kazakhstan» et réaffirme qu’elle considère le Kazakhstan comme l’un des piliers de la stabilité dans la région euroasiatique. Ce rôle a pris une importance particulière dans un environnement géopolitique de plus en plus tendu à la suite de la guerre d’agression non provoquée menée par la Fédération de Russie contre l’Ukraine. Elle note également le profil international émergent du Kazakhstan, soutenu par sa situation géographique stratégique et sa politique étrangère équilibrée, et se félicite des contributions du Kazakhstan à la diplomatie internationale.
3. L’Assemblée réaffirme son attachement à l’Accord de coopération conclu avec le Parlement du Kazakhstan en 2004 qui, au cours des deux dernières décennies, a servi de pierre angulaire pour renforcer le dialogue interparlementaire et favoriser la compréhension mutuelle entre le Conseil de l’Europe et le Kazakhstan. Elle se félicite de l’engagement du Parlement du Kazakhstan à poursuivre et à développer le dialogue structuré avec l’Assemblée, comme l’ont souligné le Président de l’Assemblée et le Président du Sénat du Kazakhstan dans une déclaration conjointe marquant le 20e anniversaire de l’accord.
4. L’Assemblée salue également l’engagement des responsables politiques du Kazakhstan en faveur de la transformation démocratique de leur pays et prend note avec satisfaction des réformes constitutionnelles et législatives engagées depuis 2019. En particulier, elle félicite le Kazakhstan d’avoir aboli la peine de mort en 2022, ce qui était l’une de ses principales demandes depuis le début de l’établissement de ses relations avec le Parlement du Kazakhstan.
5. L’Assemblée salue la coopération globale entre le Kazakhstan et le Conseil de l’Europe dans le cadre des Priorités de coopération de voisinage, qui constitue un instrument précieux pour aligner la législation kazakhe sur les normes du Conseil de l’Europe. Dans ce contexte, l’Assemblée prend note avec satisfaction de l’adoption des Priorités de coopération de voisinage actuelles pour 2024-2027, qui définissent un éventail élargi de domaines de coopération, tels que la réforme de la justice, les mesures de lutte contre la corruption, la promotion des droits humains et le soutien à la gouvernance démocratique, notamment en coopération avec l’Assemblée. L’Assemblée espère que ce champ d’application élargi permettra de renforcer l’engagement en faveur des normes et des mécanismes du Conseil de l’Europe, et aboutira à des progrès tangibles dans la mise en œuvre des principales réformes.
6. L’Assemblée se félicite vivement du fait que le Kazakhstan soit partie à un nombre croissant de conventions et instruments du Conseil de l’Europe et qu’il ait demandé à adhérer à plusieurs autres. Elle prend note, en particulier, de la demande du Kazakhstan de prolonger de deux ans l’invitation à adhérer à la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (STCE no 210, «Convention d’Istanbul»), dans le but exprimé de continuer à mettre sa législation en conformité puis d’adhérer à la Convention. L’Assemblée est déterminée à assurer le suivi de cette question en temps utile.
7. L’Assemblée rappelle que l’accord de coopération conclu en 2004 avec le Parlement du Kazakhstan vise à promouvoir dans ce pays les principes de la démocratie parlementaire, de l’État de droit, et du respect des droits humains et des libertés fondamentales. Dans ce contexte, elle prend bonne note des rapports faisant état des défis à relever dans ces domaines. Elle souligne notamment l’importance de garantir un véritable pluralisme politique, d’accroître l’indépendance du pouvoir judiciaire, de renforcer la liberté d’expression et de créer un environnement propice à l’épanouissement de la société civile. L’Assemblée souligne également la nécessité de traduire en justice les responsables des violations des droits humains commises par le passé, notamment celles associées aux événements de janvier 2022, et de renforcer davantage les garanties contre la torture et les mauvais traitements.
8. L’Assemblée reste attachée à une coopération avec le Kazakhstan fondée sur des valeurs communes et est déterminée à aider le pays à poursuivre ses réformes démocratiques. Ce soutien devrait être stratégique et fondé sur des principes, encourageant le Kazakhstan à poursuivre la mise en œuvre des réformes et à étudier les moyens d’une coopération plus étroite.
9. Par conséquent, l’Assemblée encourage le Parlement du Kazakhstan:
9.1. à utiliser sa position renforcée dans le cadre institutionnel du pays – un résultat positif des réformes constitutionnelles récentes – pour faire avancer le processus de démocratisation au Kazakhstan;
9.2. à encourager les autorités du pays à élargir la participation du pays à l’espace juridique européen et à adhérer aux conventions pertinentes du Conseil de l’Europe ouvertes aux États non membres, et notamment:
9.2.1. à accélérer l’avancement du processus de ratification de la Convention d’Istanbul;
9.2.2. à envisager de devenir membre du Groupe de coopération internationale du Conseil de l’Europe sur les drogues et les addictions (Groupe Pompidou);
9.3. à accroître sa participation aux travaux de l’Assemblée et de ses commissions.
10. L’Assemblée appelle les autorités du Kazakhstan:
10.1. à poursuivre leur programme de réforme et à traduire les engagements politiques en progrès durables, transparents et mesurables;
10.2. à utiliser pleinement l’expertise et les outils disponibles dans le cadre des Priorités de coopération de voisinage du Conseil de l’Europe, en particulier dans les domaines nouvellement élargis de la réforme de la justice, de la lutte contre la corruption, de la protection des droits humains et de la gouvernance démocratique.
11. L’Assemblée exhorte les autorités du Kazakhstan:
11.1. à reconnaître l’importance d’un discours public ouvert et d’une critique constructive dans une société démocratique, à favoriser un véritable pluralisme politique et à assurer une concurrence et une participation politiques significatives;
11.2. à garantir un environnement médiatique pluraliste et indépendant et à éviter les restrictions disproportionnées imposées au journalisme indépendant et à la société civile, notamment en supprimant les obstacles juridiques et administratifs qui entravent leur fonctionnement;
11.3. à s’aligner sur les normes internationales en matière de droits humains en veillant à ce que sa législation, ses politiques et ses pratiques nationales reflètent ces normes, prennent en compte les avis et les recommandations des organismes nationaux et internationaux de défense des droits humains, y compris le Comité des droits de l’homme des Nations Unies, et à mettre en œuvre l’intégralité de leurs recommandations;
11.4. à faire avancer les réformes visant à renforcer l’indépendance du système judiciaire et l’obligation de rendre des comptes, l’accès à la justice et le droit à un procès équitable;
11.5. à veiller à ce que les auteurs des violations des droits humains commises par le passé, y compris celles liées aux événements de janvier 2022, rendent pleinement compte de leurs actes, et à renforcer les garanties contre la torture et les mauvais traitements dans tous les lieux de détention.
12. L’Assemblée encourage les autorités du Kazakhstan:
12.1. à poursuivre leur engagement constructif avec le Conseil de l’Europe et d’autres organismes internationaux dans le domaine de la protection de la démocratie, des droits humains et de l’État de droit, et à intensifier les efforts visant à répondre aux préoccupations soulevées;
12.2. à développer la participation active du Kazakhstan à la diplomatie internationale en soutenant le dialogue, la stabilité régionale et la coopération dans le respect des normes internationales et des valeurs du Conseil de l’Europe. Il s’agit notamment de s’engager fermement à préserver et à renforcer des principes fondamentaux tels que le respect de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale des États, le non-recours à la force ou à la menace de recours à la force, et la résolution pacifique des désaccords et des différends entre les pays;
12.3. à continuer de défendre une solution pacifique à la guerre d’agression non provoquée contre l’Ukraine, guidée par les principes du droit international, de la souveraineté et de l’intégrité territoriale, et à envisager de se joindre aux efforts internationaux visant à créer une approche globale de l’obligation de rendre des comptes, à garantir la justice pour les victimes et à renforcer le droit international.
13. L'Assemblée devrait évaluer régulièrement la situation au Kazakhstan et son adhésion aux valeurs du Conseil de l'Europe.

B. Exposé des motifs par M. Zsolt Nemeth, rapporteur

(open)

1. Introduction

1. Le Kazakhstan, plus grand pays enclavé au monde et neuvième par sa superficie, est situé en Asie centrale et partage ses frontières avec la Fédération de Russie, la Chine, le Kirghizistan, l'Ouzbékistan et le Turkménistan.
2. Depuis son indépendance de l'Union soviétique en 1991, le Kazakhstan a maintenu une relative stabilité politique et généré une croissance économique mesurable. Le pays a suivi une voie progressive de modernisation politique, les réformes les plus importantes ayant été engagées depuis 2019.
3. L'Assemblée parlementaire a suivi cette évolution avec un mélange d'optimisme prudent et de critique constructive. Dans sa Résolution 1526 (2006) 
			(2) 
			Résolution 1526 (2006) «Situation au Kazakhstan et relations avec le Conseil
de l'Europe», adoptée le 2 octobre 2006., elle a reconnu l'importance stratégique du Kazakhstan et s'est félicitée de son ouverture à la coopération avec les institutions européennes. Elle a toutefois exprimé sa préoccupation face à l’absence de pluralisme politique, la faiblesse des médias indépendants et la concentration excessive des pouvoirs au sein de l'exécutif.
4. Plus de dix ans plus tard, la Résolution 2193 (2017) 
			(3) 
			Résolution 2193 (2017) «Les relations du Conseil de l'Europe avec le Kazakhstan»,
adoptée le 12 octobre 2017. reconnaît des améliorations, notamment l'intérêt exprimé par le Kazakhstan pour les conventions du Conseil de l'Europe et ses efforts pour s'engager auprès de la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise). Néanmoins, le rapport a réitéré un grand nombre des mêmes préoccupations, en particulier en ce qui concerne les libertés civiles, la concurrence électorale et l'indépendance du système judiciaire.
5. Le présent document s'appuie sur une visite effectuée à Almaty et Astana du 3 au 6 mai 2025 et sur l’événement organisé le 10 avril 2025 pendant la deuxième partie de session de l’Assemblée, auquel ont participé la présidente de la Cour constitutionnelle du Kazakhstan et la vice-présidente du Sénat du Parlement du Kazakhstan.
6. Ces deux événements ont montré que des réformes significatives visant à renforcer les normes démocratiques et les libertés au Kazakhstan ont été lancées depuis le dernier rapport. Leur impact n'a pas encore été présenté de manière exhaustive à l'Assemblée.
7. Le présent rapport a donc pour objet de fournir un compte rendu actualisé des évolutions politiques et institutionnelles au Kazakhstan depuis 2019; d'examiner le contenu et l'impact de ces réformes; et de déterminer comment l'Assemblée pourrait soutenir les réformes démocratiques du Kazakhstan, en particulier celles introduites sous la présidence de Kassym-Jomart Tokaïev.
8. Le rapporteur est convaincu qu'il est à la fois opportun et nécessaire que l'Assemblée renforce son engagement auprès du Kazakhstan en tant que partenaire clé de la réforme dans l'espace eurasien.

2. Informations générales

9. Le système politique du Kazakhstan se définit comme une république présidentielle dotée d'un corps législatif bicaméral. Le Président actuel, Kassym-Jomart Tokaïev, a pris ses fonctions en 2019 à la suite de la démission de Noursoultan Nazarbaïev, qui dirigeait le pays depuis son indépendance en 1991. L'arrivée au pouvoir du Président Tokaïev a marqué un tournant dans le paysage politique, ouvrant la voie aux réformes.
10. Le Parlement se compose de deux chambres: le Mazhilis (chambre basse) et le Sénat (chambre haute). Les 98 membres du Mazhilis sont élus au suffrage universel selon un système majoritaire mixte. Les 50 membres du Sénat représentent les intérêts des régions, des communautés nationales et culturelles au niveau national, 40 d'entre eux étant élus par les assemblées législatives régionales et 10 étant nommés par le président.
11. Le pays est administrativement divisé en 17 régions et trois villes d'importance nationale: Almaty, Astana et Chymkent. Le Kazakhstan a depuis longtemps fait du multivectorisme une doctrine de politique étrangère, cherchant à établir des relations équilibrées avec les puissances mondiales et contribuant de manière significative aux travaux des organisations régionales et internationales. L'exemple le plus récent à cet égard est la signature de l'accord de pays hôte entre le Kazakhstan et les Nations Unies, établissant à Almaty le Centre régional des Nations Unies pour les objectifs de développement durable pour l'Asie centrale et l'Afghanistan.
12. Le caractère multivectoriel du Kazakhstan lui permet d'être membre de l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), tout en poursuivant sa coopération avec l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) au sein du Conseil de partenariat euro-atlantique (CPEA). Cela explique également pourquoi le Kazakhstan fait progresser la coopération économique au sein de l'Union économique eurasienne, tout en approfondissant ses liens avec l'Europe, devenant le premier pays d'Asie centrale à signer un accord de partenariat et de coopération renforcé avec l'Union européenne (UE).
13. Acteur important sur les marchés mondiaux de l'énergie en raison de ses riches réserves de pétrole, de gaz et d'uranium, le Kazakhstan a établi des relations étroites avec tous les principaux acteurs économiques. En tant que première économie d'Asie centrale, il a pris des mesures pour promouvoir la coopération régionale, en particulier dans des domaines tels que le commerce, les infrastructures et la connectivité. Bien que ses efforts n'aient pas été exempts de difficultés, le Kazakhstan est souvent considéré comme jouant un rôle de coordination dans la région et au-delà. La participation active du pays à l'Organisation des États turciques est un exemple à cet égard, de même que la participation du Kazakhstan à l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS), où le pays a fait avancer l'agenda en matière de sécurité, d'économie et de connectivité. La situation stratégique du Kazakhstan le long du corridor de l'initiative “la ceinture et la route” amplifie encore son importance géopolitique, ce qui amène des groupes de réflexion, la communauté scientifique et la presse à considérer le Kazakhstan comme une puissance moyenne.
14. Le Kazakhstan est un pays ethniquement diversifié qui compte plus de 130 groupes ethniques 
			(4) 
			Dont
71,3 % de Kazakhs, 14,6 % de Russes, 3,3 % d'Ouzbeks (Office national
des statistiques de l'Agence de planification stratégique et des
réformes de la République du Kazakhstan, mars 2025).. Son engagement à promouvoir l'harmonie interethnique est illustré par des institutions telles que l'Assemblée du peuple du Kazakhstan, un organe consultatif visant à favoriser l'unité nationale.
15. Une particularité réside dans la politique linguistique, le kazakh étant la langue officielle et le russe la langue officielle de communication interethnique 
			(5) 
			Extrait de la <a href='https://www.akorda.kz/en/constitution-of-the-republic-of-kazakhstan-50912'>Constitution
de la République du Kazakhstan</a>: 
			(5) 
			Article 7(1): La langue d'État de la
République du Kazakhstan est la langue kazakhe. 
			(5) 
			Article
7(2): Dans les organismes d'État et les organes locaux d'auto-administration,
la langue russe est officiellement utilisée sur un pied d'égalité
avec la langue kazakhe. 
			(5) 
			Article 7(3): L'État favorise
les conditions d'étude et de développement des langues du peuple
du Kazakhstan., utilisées sur un pied d'égalité dans les institutions publiques.
16. L'utilisation parallèle des deux langues semble fonctionner sans problème dans la plupart des situations de la vie quotidienne, y compris dans la communication avec les autorités publiques. Néanmoins, la politique linguistique reste un exercice d'équilibre entre, d'une part, les droits des minorités et, d'autre part, la promotion de la langue officielle en tant qu'instrument de construction nationale, qui se poursuit encore aujourd'hui.

3. Développements politiques récents

17. Le processus de réforme démocratique du Kazakhstan sous le Président Tokaïev a été à la fois ambitieux et complexe. Depuis 2019, l'administration a lancé une série de réformes – dont le slogan est “un président fort, un parlement influent, un gouvernement responsable” – visant à faire passer le pays d'un système superprésidentiel à un système plus équilibré sur le plan institutionnel, avec des libertés civiles renforcées et un pluralisme politique.
18. Le gouvernement a positionné les réformes comme faisant partie d'un programme plus large pour un "Kazakhstan juste", se concentrant sur une plus grande réactivité politique, l'inclusivité et l'État de droit.
19. Parmi les initiatives les plus notables, on peut citer:
  • les amendements constitutionnels de 2022: un référendum a approuvé 33 amendements qui ont aboli les privilèges de l'ancien président, rétabli la Cour constitutionnelle, interdit la peine de mort et renforcé les pouvoirs du parlement et de la gouvernance locale. Ces changements comprennent également la mise en place d'un mandat présidentiel unique et non renouvelable de sept ans afin d'empêcher la monopolisation du pouvoir, ce qui constitue une décision unique dans la région. Un accent particulier a été mis sur le renforcement de l'autonomie du Commissaire aux droits de l'homme. Les responsabilités, les droits et les devoirs du Commissaire ont été inscrits dans la Constitution, marquant ainsi la transition d'un modèle de médiateur gouvernemental à un modèle qui respecte pleinement le principe d'indépendance. En outre, la possibilité pour le Commissaire de faire appel à la Cour constitutionnelle a été ajoutée à son mandat.
  • Les réformes électorales: les réformes ont réduit le seuil électoral parlementaire de 7 % à 5 %, autorisé les candidatures indépendantes, introduit une option de vote "Aucun des choix ci-dessus" sur les bulletins de vote et simplifié l'enregistrement des partis politiques en abaissant le nombre de membres requis de 40 000 à 5 000;
  • Les mesures relatives aux droits humains: depuis 2021, le Kazakhstan a adopté trois documents majeurs qui définissent le cadre de protection des droits humains, à savoir le plan d'action national pour les droits humains, le plan sur les droits humains et l'État de droit et le plan d'action présidentiel. Les réformes juridiques et les mesures politiques couvrent des domaines clés tels que les droits des personnes handicapées (y compris la ratification du protocole facultatif à la convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées), le soutien aux groupes vulnérables tels que les migrants ou les apatrides, la lutte contre la discrimination, les droits du travail, la réforme de la justice pénale et du système pénitentiaire et l'égalité entre les femmes et les hommes. Les mesures visant à améliorer l'égalité entre les femmes et les hommes ont été décrites, entre autres, dans le plan d'action national 2022-2025 pour la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies sur les femmes, la paix et la sécurité, le plan d'action gouvernemental 2024-2027 et le concept national sur la politique de la famille et de l'égalité entre les femmes et les hommes. D'autres initiatives notables ont porté sur la lutte contre la violence domestique, la torture et la promotion d'une police transparente lors des rassemblements publics.
  • La décentralisation: les maires ruraux (akims) sont désormais élus au suffrage direct et les autorités régionales jouissent d'une plus grande autonomie. L'institution de conseillers en matière de genre auprès des gouverneurs régionaux a été introduite, et un statut juridique a été créé pour les médiateurs régionaux pour les droits de l'enfant.
20. Le gouvernement présente ces réformes comme un tournant majeur vers la gouvernance participative. Le Président Tokaïev a insisté sur la nécessité de créer un «État à l'écoute» qui s'engage de manière constructive à répondre aux préoccupations du public et à améliorer la transparence du gouvernement 
			(6) 
			<a href='https://www.akorda.kz/en/president-kassym-jomart-tokayevs-state-of-the-nation-address-181857'>Discours
du Président de la République du Kazakhstan à la nation</a>, septembre 2022.. Ce concept a été réitéré par le président à de nombreuses reprises depuis lors, servant de ligne directrice pour toutes les actions de l'État.
21. Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe a salué les progrès réalisés en matière de réformes constitutionnelles et politiques lors de sa visite à Astana en mai 2025 
			(7) 
			Salle de presse du
Conseil de l'Europe: <a href='https://www.coe.int/en/web/portal/-/secretary-general-highlights-kazakhstan-council-of-europe-cooperation-as-a-pillar-of-regional-and-european-stability'>«Le
Secrétaire Général souligne que la coopération entre le Kazakhstan
et le Conseil de l'Europe est un pilier de la stabilité régionale
et européenne»</a>..

4. Évaluation des réformes

22. Les efforts de réforme ont produit des changements mesurables, tout en attirant l'attention des acteurs de la société civile et des organisations internationales, qui demandent une mise en œuvre plus solide et plus inclusive.

4.1. Perspective internationale

23. Dans son rapport sur les élections législatives de 2023, le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme (BIDDH) de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a reconnu des améliorations, telles que des changements juridiques qui ont rapproché le Kazakhstan «de la tenue d'élections conformes aux normes internationales et aux engagements de l'OSCE» 
			(8) 
			Mission
d'observation électorale du BIDDH au Kazakhstan, Élections parlementaires
anticipées, 19 mars 2023: <a href='https://www.osce.org/files/f/documents/6/9/548599.pdf'>Rapport
final</a> (anglais uniquement)..
24. Toutefois, il a relevé des préoccupations importantes et a conclu que, si les élections ont marqué un progrès, «de nouvelles modifications du cadre juridique sont nécessaires pour fournir une base suffisante à la tenue d’élections démocratiques».
25. Dans son dernier rapport périodique sur la mise en œuvre par le Kazakhstan des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Comité des droits de l'homme des Nations unies a félicité le Kazakhstan pour l'abolition de la peine de mort et la ratification du deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte. Le président du Comité a conclu que la délégation kazakhe s'était engagée activement dans le dialogue, qui a notamment porté sur l'indépendance de la justice, l'interdiction de la torture et les droits des groupes vulnérables.
26. Dans le même temps, le Comité s'est déclaré particulièrement préoccupé par l'absence de chaîne de responsabilité pour les événements de janvier 2022, et par les restrictions imposées à la société civile et à la liberté de réunion.

4.2. Perspectives de la société civile

27. Si les organisations de la société civile du Kazakhstan reconnaissent l'importance symbolique et structurelle de ces réformes, elles rappellent qu'une véritable démocratisation nécessitera plus que des modifications à la législation.
28. Les ONG de défense des droits humains ont salué cette évolution, mais ont également regretté ce qu'elles considèrent comme une mise en œuvre superficielle des réformes. Elles ont exhorté les autorités à renforcer le pluralisme et à lutter contre les limitations des libertés fondamentales 
			(9) 
			Service
européen d’action extérieure (SEAE), «<a href='https://www.eeas.europa.eu/eeas/kazakhstan-annual-human-rights-dialogue-brussels_en'>16th
EU-Kazakhstan Human Rights Dialogue</a>», (Bruxelles, 6 mars 2025); Human Rights Watch, «<a href='https://www.hrw.org/news/2025/07/22/kazakhstan-journalists-denied-accreditation'>Kazakhstan:
Journalists denied accreditation</a>» (22 juillet 2025).. Les ONG ont salué le fait que le système d'autorisation des rassemblements ait été remplacé par un modèle de notification. Toutefois, dans certains cas, les organisations de défense des droits humains ont fait état de difficultés à obtenir l'autorisation d'organiser des événements publics, ce qui pourrait indiquer des difficultés pratiques dans la mise en œuvre de la procédure de notification. Les observateurs évoquent également la restriction de la liberté d'expression, certaines organisations de défense des droits humains considérant les accusations portées contre certains journalistes et blogueurs comme des manifestations possibles de pression sur les médias indépendants ou critiques 
			(10) 
			Amnesty International,
«<a href='https://www.amnesty.org/fr/documents/pol10/8515/2025/fr/'>La
situation des droits humains dans le monde</a>» (Londres, 2025); Human Rights Watch, «<a href='https://www.hrw.org/world-report/2025/country-chapters/kazakhstan'>World
Report 2025: Kazakhstan</a>» (New York, 2025); Freedom House, «<a href='https://freedomhouse.org/country/kazakhstan/freedom-world/2025'>Freedom
in the World 2025: Kazakhstan</a>» (Washington DC, 2025); Reporters sans frontières, «<a href='https://rsf.org/fr/pays/kazakhstan'>Classement
mondial de la liberté de la presse: Kazakhstan</a>» (Paris, 2025); Conseil des droits de l’homme des Nations
Unies, «<a href='https://www.ohchr.org/fr/hr-bodies/upr/kz-index'>Examen
périodique universel - Kazakhstan</a>» (Genève, janvier 2025)..
29. En ce qui concerne le climat électoral, les acteurs de la société civile ont fait valoir que le système électoral, bien que formellement plus concurrentiel, restait étroitement contrôlé. Bien que les élections législatives de mars 2023 aient été décrites comme «ayant introduit des éléments de concurrence dans l'arène politique», les observateurs ont noté que la participation des forces d'opposition aux élections est restée limitée. La partialité des médias, la radiation des candidats et l'utilisation des ressources administratives ont été citées comme des obstacles majeurs.
30. Les observateurs ont salué le fait que, dans le cadre de la réforme du droit et de la justice, la Cour constitutionnelle ait été rétablie et que les pouvoirs du Commissaire aux droits de l'homme aient été étendus et inscrits dans la Constitution 
			(11) 
			Article 83.1 de la <a href='https://www.akorda.kz/en/constitution-of-the-republic-of-kazakhstan-50912'>Constitution
du Kazakhstan.</a>. Dans le même temps, des inquiétudes ont été exprimées quant à l'influence potentielle du pouvoir exécutif sur l'indépendance du pouvoir judiciaire, en particulier dans les affaires politiquement sensibles.
31. Les conséquences des troubles de janvier 2022 («janvier tragique») restent un sujet sensible en ce qui concerne la justice pénale et la responsabilité de la police: malgré l'amnistie accordée à de nombreux détenus, des représentants de la société civile continuent de souligner la nécessité d'une évaluation indépendante des circonstances liées à ces événements. Des voix s'élèvent également pour accuser les autorités de ne pas avoir suffisamment coopéré aux enquêtes sur les graves violations des droits humains, voire d'y avoir été impliquées 
			(12) 
			BIDDH/OSCE, «<a href='https://www.osce.org/files/f/documents/c/6/590375_1.pdf'>Kazakhstan:
Monitoring of January 2022 protest-related trials (November 2022-December
2023)</a>» (Varsovie, 2025); Parlement européen, résolution du
17 janvier 2024 sur la stratégie de l’Union européenne pour l’Asie centrale
(<a href='https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/TA-9-2024-0027_FR.html'>P9_TA(2024)0027</a>) et résolution du 20 janvier 2022 sur la situation au
Kazakhstan (<a href='https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/TA-9-2022-0012_FR.html'>P9_TA(2022)0012</a>)..

5. Politique linguistique et dynamique linguistique au Kazakhstan

32. Le Kazakhstan est un État bilingue en vertu de sa Constitution. L'article 7 de la Constitution de la République du Kazakhstan stipule que le kazakh est la langue officielle, tandis que le russe est utilisé officiellement sur un pied d'égalité dans les institutions publiques et les organes locaux d'autonomie.
33. Cette dualité juridique reflète la réalité démographique du pays: les Kazakhs représentent environ 71 % de la population, mais le russe reste largement parlé, en particulier dans les zones urbaines et dans le nord du pays, où le Kazakhstan partage avec la Russie une frontière qui s'étend sur plus de 7 500 km 
			(13) 
			<a href='https://www.cia.gov/the-world-factbook/countries/kazakhstan/'>The
World Factbook</a>..
34. Depuis l'obtention de l'indépendance, les gouvernements successifs ont entrepris des efforts pour revitaliser et promouvoir la langue kazakhe, en particulier dans l'éducation, l'administration publique et les médias.
35. L'État a mis en œuvre des politiques d'éducation trilingue – mettant l'accent sur le kazakh, le russe et l'anglais – dans le but d'accroître l’utilisation fonctionnelle du kazakh sans aliéner les citoyens russophones. Les programmes gouvernementaux comprennent également le développement des services publics en langue kazakhe, l'augmentation du contenu kazakh dans les médias et des mesures incitatives pour les fonctionnaires afin qu'ils améliorent leurs compétences linguistiques.
36. Le sujet reste toutefois sensible et contesté. Les minorités ethniques, en particulier les Russes (environ 15 % de la population), craignent que l'accent mis sur le kazakh ne marginalise leurs droits linguistiques.
37. Néanmoins, une grande partie de la majorité kazakhe considère la promotion de la langue officielle – sur la base de son statut constitutionnel – comme une correction attendue depuis longtemps des politiques de l'ère soviétique qui réprimaient l'expression culturelle autochtone.
38. L'évaluation est un peu plus réservée en ce qui concerne le débat sur l'utilisation de l'alphabet latin. Si le gouvernement a globalement fixé le cap de la transition, certaines voix s'élèvent au sein de la société civile pour souligner qu'un changement de système d'écriture rendrait l'apprentissage du kazakh plus difficile, en particulier pour la communauté russophone, et ralentirait ainsi la mise en œuvre globale de la langue kazakhe.
39. Les ONG de défense des droits humains préconisent une approche équilibrée qui protège la diversité linguistique tout en reconnaissant le rôle symbolique et fonctionnel de la langue kazakhe. En général, elles saluent l'approche actuelle du gouvernement, qui privilégie une réforme linguistique progressive, évitant les changements brusques susceptibles de provoquer des tensions ethniques ou de nuire à la cohésion sociale.

6. Résultats des réformes

40. Dans l'ensemble, les réformes récentes du Kazakhstan reflètent un changement important sur le plan rhétorique et juridique en faveur d'une gouvernance démocratique. Le pays a introduit des réformes législatives qui s'alignent sur les normes internationales. Des changements tangibles – en particulier en matière de droit électoral, de structure judiciaire et de décentralisation – témoignent de la volonté politique.
41. Le Kazakhstan a notamment progressé dans la lutte contre la torture et les traitements dégradants. En 2023, l'article 146 du Code pénal a été modifié conformément aux normes internationales, en clarifiant les définitions et en alourdissant les peines. Les enquêtes sur la torture ont été placées sous l'autorité exclusive du Bureau du procureur et la vidéosurveillance obligatoire a été introduite dans les centres de détention. En conséquence, le nombre d'affaires de torture portées devant les tribunaux a augmenté, ce qui témoigne d'une amélioration de la transparence et de la responsabilité. Au total, 98 personnes ont été condamnées, dont près de 79 % à des peines d'emprisonnement effectives. Parmi eux, 33 fonctionnaires ont été poursuivis pour des actes de torture liés aux événements de janvier 2022.
42. En ce qui concerne les efforts visant à aligner l'environnement électoral sur les normes européennes, la Commission électorale centrale de la République du Kazakhstan a fait preuve d'une ouverture constante au dialogue avec le BIDDH de l'OSCE, le Conseil des élections démocratiques du Conseil de l'Europe et la Commission de Venise. La législation électorale, ancrée dans des dispositions constitutionnelles telles que la loi constitutionnelle sur les élections, accorde des droits de vote actifs et passifs égaux. Tous les candidats reçoivent les mêmes ressources financières de la part de l'État; ils bénéficient d'un accès égal aux médias; et les médias sont obligés de diffuser des informations concernant tous les candidats dans des quantités égales d'espace imprimé et de temps d'antenne. Selon la Commission électorale centrale, les amendements législatifs adoptés depuis 2019 ont considérablement élargi l'accès des représentants des médias et des observateurs nationaux aux bureaux de vote le jour de l'élection.
43. Pourtant, le développement démocratique du Kazakhstan reste en transition. Une vigilance constante, une coopération internationale solide et une demande interne émanant des citoyens et de la société civile seront nécessaires pour garantir que les réformes introduites sur papier produisent des changements démocratiques durables et inclusifs.

7. Relations du Conseil de l'Europe avec le Kazakhstan

44. Selon les décisions pertinentes du Conseil de l'Europe 
			(14) 
			 Réponse du Comité des Ministres
à la Recommandation 1247 (1994) relative à l'élargissement du Conseil de l'Europe., le Kazakhstan ne peut pas devenir membre à part entière du Conseil de l'Europe. Toutefois, l'Organisation a cherché à renforcer de plus en plus son engagement avec les pays voisins, et le Kazakhstan est apparu comme un partenaire notable dans ce contexte.
45. Le Conseil de l'Europe a joué à la fois un rôle de référence normative et de partenaire de mise en œuvre, aidant le Kazakhstan à renforcer les droits humains, l'État de droit et la gouvernance démocratique. Cette coopération a joué un rôle déterminant dans l'élaboration des réformes juridiques et institutionnelles du Kazakhstan, contribuant ainsi à son programme de démocratisation plus large.

7.1. Coopération avec l'Assemblée

46. L'engagement du Kazakhstan auprès de l'Assemblée a évolué de manière significative au cours des deux dernières décennies, en particulier depuis la signature de l'Accord de coopération entre l'Assemblée et le Parlement du Kazakhstan en 2004.
47. Cet Accord de coopération a jeté les bases d'un dialogue structuré entre l'Assemblée et le Parlement du Kazakhstan. Il a encouragé le Kazakhstan à s'aligner sur les conventions et les normes du Conseil de l'Europe et a favorisé des interactions régulières entre les organes parlementaires. L'Accord a permis aux parlementaires kazakhs d'assister aux sessions de l'Assemblée et de participer aux travaux des commissions, ce qui leur a permis de se familiariser avec les pratiques parlementaires européennes.
48. À l'occasion du 20e anniversaire de l'accord en 2024, une déclaration conjointe du Président de l'Assemblée et du Président du Sénat du Parlement du Kazakhstan a réaffirmé l'importance de la diplomatie parlementaire dans la consolidation de la démocratie. Les deux parties ont salué la contribution de l'Accord au renforcement des réformes juridiques du Kazakhstan, notamment l'abolition de la peine de mort et la mise en place d'institutions de défense des droits humains 
			(15) 
			<a href='https://pace.coe.int/fr/news/9449/20th-anniversary-of-the-signing-of-the-agreement-on-cooperation-between-pace-and-the-parliament-of-kazakhstan'> Déclaration
conjointe</a> du Président de l'Assemblée et du Président du Sénat
du Parlement du Kazakhstan à l'occasion du 20e anniversaire
de la signature de l'Accord de coopération entre l'APCE et le Parlement
du Kazakhstan, 27 avril 2024..
49. L'Assemblée a suivi de près les progrès de la réforme. Les membres ont saisi à plusieurs reprises l'occasion d'exprimer leurs différents points de vue, parfois contradictoires, sur l'état d'avancement, la mise en œuvre et les perspectives des réformes. Si certains ont critiqué ce qu'ils considèrent comme des violations systématiques des droits humains et des libertés politiques par le biais de la répression judiciaire, financière et transnationale, d'autres ont félicité les autorités pour les progrès réalisés dans le domaine des réformes politiques et ont encouragé le Kazakhstan à poursuivre la coopération fondée sur les résultats des interactions depuis 2004.

7.2. Coopération avec le Comité des Ministres – Priorités de la coopération de voisinage du Conseil de l'Europe avec le Kazakhstan 2024-2027

50. La coopération s'est également renforcée grâce aux Priorités de coopération de voisinage, un cadre stratégique pour un engagement structuré avec des États non-membres. Les Priorités de coopération de voisinage les plus récentes (2024-2027), approuvées en octobre 2023 par le Comité des Ministres, décrivent la collaboration dans des domaines essentiels, notamment:
  • renforcer l'indépendance du pouvoir judiciaire;
  • lutter contre la corruption et le blanchiment d'argent;
  • prévenir la violence à l'égard des femmes et des enfants;
  • renforcer le rôle du parlement dans le contrôle démocratique;
  • promouvoir l'État de droit et les droits humains dans les procédures pénales 
			(16) 
			Comité
des ministres du Conseil de l'Europe, <a href='https://rm.coe.int/prems-007524-fra-1501-actionplankazakhstan-2024-2027-a4-web/1680ae41f7'>«Priorités
de la coopération de voisinage avec le Kazakhstan 2024-2027»</a>, adoptées le 18 octobre 2023..
51. Ces priorités s'appuient sur les progrès réalisés dans le cadre des Priorités de coopération de voisinage 2019-2023, qui ont conduit à l'adhésion du Kazakhstan au Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO) et à des invitations officielles à adhérer à d'autres conventions du Conseil de l'Europe, telles que celles sur la cybercriminalité et la lutte contre la corruption. Le processus des Priorités de coopération de voisinage a permis au Kazakhstan de bénéficier des normes juridiques et du savoir-faire institutionnel de l'Organisation sans être membre officiel.
52. Lors de sa visite à Astana en mai 2025, le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, Alain Berset, a souligné que la coopération entre le Kazakhstan et le Conseil de l'Europe était un pilier de la stabilité régionale et européenne. Il a félicité le Kazakhstan pour les progrès réalisés en matière de réformes constitutionnelles et politiques et mis en lumière le renforcement de la coopération dans le cadre des Priorités de coopération de voisinage qui, dans ses réitérations actuelles, a été élargie et complétée afin d'améliorer l'alignement sur le programme national de réforme du Kazakhstan.

7.3. Participation aux instruments du Conseil de l'Europe

53. Le Kazakhstan a déjà ratifié plusieurs conventions du Conseil de l'Europe, y compris:
  • la Convention culturelle européenne (STE n° 18);
  • la Convention sur la reconnaissance des qualifications relatives à l'enseignement supérieur dans la région européenne (STE n° 165);
  • la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime (STE n° 141);
  • la Convention concernant l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale (STE n° 127) 
			(17) 
			Bureau des Traités
du Conseil de l'Europe, <a href='https://www.coe.int/fr/web/conventions/by-non-member-states-of-the-coe-or-the-european-union?module=treaties-full-list-signature&CodePays=KAZ&CodeSignatureEnum=&DateStatus=06-10-2025&CodeMatieres='>Statut
de la participation du Kazakhstan aux conventions du Conseil de l'Europe</a>, 2025.
54. Le Kazakhstan a été invité par le Comité des Ministres à adhérer à la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale (STE n° 30) le 18 juin 2025. Cette décision est valable cinq ans à compter de son adoption.
55. Le Kazakhstan a également demandé une prolongation de deux ans de l'invitation à adhérer à la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique (STCE n° 210, «Convention d'Istanbul»), ce qui devrait permettre aux autorités kazakhes de continuer à mettre leur législation en conformité. Le soutien politique aux progrès dans ce domaine a été clairement exprimé lors de la visite du rapporteur dans le pays.
56. Le Kazakhstan a le statut d'observateur ou de participant auprès de nombreux organes du Conseil de l'Europe, notamment la Commission de Venise, la Commission européenne pour l’efficacité de la justice (CEPEJ) et le GRECO. Les consultations avec la Commission de Venise ont influencé les réformes constitutionnelles, judiciaires et en matière de droits humains au Kazakhstan, par exemple le rétablissement de la Cour constitutionnelle en 2023.
57. Le Kazakhstan a entretenu une relation évolutive avec la Commission de Venise depuis la fin des années 1990, qui a culminé avec son adhésion en tant que membre à part entière en 2012. Le pays s'est engagé activement dans la coopération avec la Commission à travers diverses formes d'assistance juridique et de consultations d'experts, en particulier dans les domaines de la réforme constitutionnelle et judiciaire. Le Kazakhstan a notamment accueilli et participé à des dialogues de haut niveau et à des conférences régionales, notamment en 2006, 2017, 2021 et 2023, qui ont abordé des questions telles que l'indépendance de la justice et la révision constitutionnelle. Dans le cadre des programmes conjoints de l'UE et du Conseil de l'Europe, y compris l'initiative pour l'État de droit en Asie centrale, le Kazakhstan a reçu et pris en compte un certain nombre d'avis de la Commission de Venise visant à soutenir les réformes législatives. Cette coopération continue d'offrir une plateforme de dialogue sur l'État de droit et les questions de gouvernance entre le Kazakhstan et les institutions européennes.
58. L'évaluation du GRECO a eu un effet catalyseur, en identifiant les vulnérabilités du cadre anticorruption du Kazakhstan et en formulant des recommandations qui ont influencé la politique nationale. Lors du dernier examen de conformité (2024), 4 des 27 recommandations du GRECO avaient été entièrement mises en œuvre, la plupart des autres ayant été partiellement prises en compte 
			(18) 
			GRECO, <a href='https://rm.coe.int/premier-et-deuxieme-cycles-d-evaluation-conjoints-rapport-de-conformit/1680b178aa'>Deuxième
rapport de conformité – Kazakhstan</a> (quatrième cycle d'évaluation), 6 septembre 2024..

7.4. La voie à suivre: un potentiel stratégique

59. L'intérêt constant du Kazakhstan pour l'approfondissement des relations avec le Conseil de l'Europe – en dépit des complexités géopolitiques – est un signe positif. La participation aux conventions et organes du Conseil de l'Europe permet au Kazakhstan d'accéder au cadre juridique européen tout en affirmant ses références réformistes sur la scène internationale.
60. À l'avenir, le Kazakhstan pourrait poursuivre:
  • le renforcement de ses relations avec l'Assemblée afin de permettre un engagement plus structuré;
  • la mise en œuvre intégrale des Priorités de coopération de voisinage 2024-2027 afin d'ancrer les principes démocratiques dans la pratique;
  • l'adhésion à des traités clés tels que la Convention d'Istanbul, la Convention de Budapest sur la cybercriminalité et la mise en conformité totale avec le GRECO;
  • l'élargissement de la coopération technique, en particulier dans les domaines de l'indépendance judiciaire et du développement de la société civile.
61. Pour l'Assemblée, la coopération avec le Kazakhstan représente une opportunité stratégique et politique. En soutenant les réformes de l'intérieur, l'Assemblée peut contribuer à promouvoir un modèle de gouvernance stable et fondé sur les droits dans une région géopolitiquement sensible.

8. Conclusion

62. Depuis 2019, sous la direction du Président Tokaïev, le pays a entrepris un large éventail de réformes visant à rééquilibrer le système politique, à renforcer l'État de droit, à améliorer la protection des droits humains et à créer un espace pour une société plus pluraliste.
63. Ces réformes sont allées au-delà du symbole: elles comprennent des amendements constitutionnels, des modifications des systèmes électoral et judiciaire, des efforts de décentralisation et une meilleure protection juridique des droits civils et politiques.
64. Cependant, la transformation reste un travail en cours. Comme l'ont souligné à plusieurs reprises les acteurs de la société civile, la réforme législative n'est que la première étape vers une véritable démocratisation. Ils avertissent que l'héritage du pouvoir centralisé, du contrôle de l'État sur les médias et des restrictions à la liberté d'expression reste présent, même dans le contexte des réformes en cours.
65. Les observateurs ont demandé au Kazakhstan de relever des défis importants: garantir une véritable indépendance judiciaire, protéger la liberté de réunion et la liberté d'expression, permettre un environnement médiatique ouvert et sauvegarder les droits des voix de l'opposition et des communautés marginalisées.
66. Le Conseil de l'Europe, notamment par l'intermédiaire de l'Assemblée, a joué un rôle de soutien important dans l'orientation et l'évaluation de ces réformes. L'Accord de coopération de l'Assemblée, les Priorités de la coopération de voisinage du Conseil de l’Europe ainsi que l’engagement du Kazakhstan auprès d'organismes tels que la Commission de Venise et le GRECO ont contribué à intégrer les normes juridiques et démocratiques européennes dans le cadre institutionnel en évolution du Kazakhstan.
67. La volonté récente du Gouvernement kazakh d'adhérer à d'autres conventions – sur la corruption, la cybercriminalité et les droits humains – indique que les autorités sont prêtes à faire progresser cette coopération.
68. Le programme de réformes du Kazakhstan n'est pas passé inaperçu et son rôle de pondération géopolitique – entre la Russie, la Chine, l'Europe et la communauté internationale au sens large – souligne l'importance de garantir la légitimité nationale par le biais d'une gouvernance démocratique.
69. Si elle est couronnée de succès, la transformation démocratique du Kazakhstan pourrait servir de modèle pour la région, démontrant qu'une réforme significative est possible même dans un contexte marqué par des héritages autoritaires et impériaux.
70. Le moment est venu de renforcer l'engagement du Conseil de l'Europe, non seulement pour reconnaître les progrès accomplis, mais aussi pour contribuer à garantir la pérennité de ces changements. La réforme démocratique au Kazakhstan n'est pas seulement dans l'intérêt national de son peuple, elle est aussi dans l'intérêt stratégique de l'Europe.
71. Dans ce contexte, il est à la fois opportun et nécessaire que l'Assemblée renforce son soutien aux réformes démocratiques du Kazakhstan. Ce soutien devrait être stratégique et fondé sur des principes, en encourageant le Kazakhstan à poursuivre la mise en œuvre des réformes et en explorant les moyens d'une coopération plus étroite.
72. Plus précisément, l'Assemblée pourrait:
  • encourager le Parlement du Kazakhstan à renforcer ses relations institutionnelles avec l'Assemblée;
  • suivre de près la mise en œuvre des Priorités de la coopération de voisinage du Conseil de l'Europe pour 2024-2027;
  • accroître les échanges et la visibilité de l'engagement du Kazakhstan dans les sessions et les commissions de l'Assemblée;
  • inviter les États membres à contribuer au renforcement des programmes de développement des capacités des juges, des parlementaires, des fonctionnaires et de la société civile.