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Rapport | Doc. 12497 | 25 janvier 2011

La situation en Tunisie

Commission des questions politiques et de la démocratie

Rapporteure : Mme Anne BRASSEUR, Luxembourg, ADLE

Origine - Renvoi en commission: Renvoi 3728 du 24 janvier 2011. 2011 - Première partie de session

Résumé

Le rapport rend hommage au courage et à la détermination du peuple tunisien qui, malgré la violence de la répression, a montré sa volonté de faire de la Tunisie un pays libre, ouvert et démocratique.

Les forces politiques tunisiennes ne doivent pas décevoir les attentes du peuple et devraient engager sans tarder des réformes politiques. Les Tunisiens attendent la démocratisation complète de la société et exigent de vastes réformes politiques qui rendraient les changements irréversibles.

Le rapport encourage toutes les forces politiques à contribuer de manière constructive à établir le programme de réformes et suggère quelques éléments que les autorités tunisiennes pourraient envisager dans ce cadre. Il encourage également les autorités tunisiennes à intensifier et à élargir la coopération avec le Conseil de l’Europe, et à mettre à profit l’expérience de l’Organisation dans la transition de leur pays vers la démocratie.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			.
Projet de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 25
janvier 2011.

(open)
1. Ces dernières semaines, la Tunisie, l’un des plus proches voisins méditerranéens de l’Europe, a connu des changements considérables. Des troubles locaux provoqués par les mauvaises conditions économiques et sociales ont débouché sur un mouvement de protestation national, qui a finalement contraint l’ancien Président Ben Ali à fuir le pays. La situation en Tunisie reste fragile et incertaine et les manifestations de rues se poursuivent.
2. L’Assemblée parlementaire rend hommage au courage et à la détermination du peuple tunisien qui, malgré la violence de la répression, a clairement montré sa volonté de mettre fin au régime autoritaire et de faire de la Tunisie un pays libre, ouvert et démocratique. Il faut aussi louer l’attitude de l’armée tunisienne, qui a offert sa protection au peuple pendant les troubles sans intervenir dans la politique.
3. L’Assemblée condamne sans équivoque le recours à la violence contre les manifestants, regrette la perte de dizaines de vies humaines et exprime sa sympathie aux familles des victimes et aux blessés. L’utilisation des armes contre des citoyens pacifiques et les agissements de la police doivent faire l’objet d’une enquête approfondie et les responsables devront en rendre compte. Elle déplore aussi les actes de violence, les pillages et la destruction de biens commis par certains éléments dans les rangs des protestataires.
4. Même si les causes premières des événements de Tunisie trouvent leur origine dans la politique de M. Ben Ali, l’Europe a également une part de responsabilité car elle n’est pas arrivée à condamner la nature de ce régime et qu’elle a préféré en utiliser l’apparente stabilité pour faire des affaires.
5. Les forces politiques tunisiennes ne doivent pas décevoir les attentes du peuple et devraient engager sans tarder des réformes politiques. Le pluralisme politique devrait pouvoir s’exprimer. Dans ce contexte, l’Assemblée prend note de la formation d’un gouvernement provisoire, qui comprend plusieurs responsables de l’opposition. Elle observe aussi avec satisfaction que les personnalités politiques et publiques exilées peuvent maintenant regagner le pays.
6. Les premières mesures annoncées par le gouvernement provisoire, comme la libération des prisonniers politiques, la levée des restrictions aux activités des partis politiques et des groupes de défense des droits de l’homme, ainsi que la promesse de garantir la liberté des médias, sont les bienvenues.
7. Cependant, les Tunisiens attendent la démocratisation complète de la société et exigent des réformes politiques beaucoup plus vastes, qui rendraient les changements irréversibles. De plus, beaucoup de Tunisiens, aussi bien dans le pays qu’à l’étranger, sont déçus de constater que des membres de l’ancien parti au pouvoir, le RCD, conservent des positions clés dans le gouvernement provisoire, même s’ils ont maintenant tous quitté ce parti.
8. Les autorités provisoires de Tunisie doivent avancer rapidement sur la voie de la libéralisation politique afin de créer les conditions propices à un processus politique pluraliste incluant toutes les sensibilités de la société tunisienne. Il faut notamment qu’elles fixent rapidement une date pour la tenue d’élections libres et équitables, pleinement conformes aux normes internationales. L’Assemblée encourage toutes les forces politiques à participer de manière constructive à l’établissement du programme de réforme.
9. A maintes reprises, l’Assemblée a appelé à la transformation démocratique des pays voisins, dont la Tunisie, et exprimé son soutien à cette transformation. Elle a une expérience hors pair de l’accompagnement des pays en transition et des jeunes démocraties sur la voie de la réforme, expérience qu’elle est prête à offrir à la Tunisie. A cet égard, le statut récemment créé de «partenaire pour la démocratie» offre un cadre concret permettant de partager cette expérience avec les parlements des pays voisins de l’Europe.
10. L’Assemblée espère que la transformation politique de la Tunisie pourrait déclencher des processus similaires dans d’autres pays de la région.
11. Elle rappelle sa Résolution 1731 (2010) «Euro-Méditerranée: pour une stratégie du Conseil de l’Europe», dans laquelle elle affirmait que la paix et la stabilité dans la Méditerranée ne peuvent être garanties que sur la base de la démocratie, du respect des droits de l’homme et de la prééminence du droit. A cet égard, l’Assemblée se félicite de l’offre de l’Union européenne d’assister la Tunisie dans le processus de réforme et en particulier de l’aider à organiser des élections et renouvelle son appel pour que les activités de l’Union pour la Méditerranée soient élargies de manière à inclure la promotion de la démocratie, des droits de l’homme et de la prééminence du droit. Elle appelle, en outre, l’Union européenne et ses Etats membres ainsi que les Etats membres du Conseil de l’Europe qui font partie de l’Union pour la Méditerranée à associer le Conseil de l’Europe aux activités de cette dernière.
12. L’Assemblée, consciente que des éléments extrémistes sont susceptibles de tirer profit de tout vide politique et pour, entre autres, éviter tout risque d’ingérence des militaires dans la politique, appelle les autorités tunisiennes provisoires à répondre à l’aspiration du peuple à des réformes démocratiques et, en priorité:
12.1. à garantir les libertés politiques fondamentales telles que la liberté de réunion, la liberté d’association, la liberté de religion, la liberté d’expression et la liberté des médias, ainsi que la protection des droits individuels;
12.2. à abolir la peine de mort et, dans l’intervalle, à maintenir le moratoire sur les exécutions;
12.3. à mettre en place une Commission Vérité et réconciliation pour établir les faits et déterminer les responsabilités des individus impliqués dans les abus commis par le régime précédent et pour définir les modalités de réparation applicables aux victimes de ces abus;
12.4. à créer les conditions de la participation des citoyens à la vie politique et publique;
12.5. à s’engager dans une vaste réforme constitutionnelle dans le but de créer des institutions politiques véritablement représentatives et de consolider l’Etat de droit et la justice;
12.6. à prendre des mesures fermes pour endiguer la corruption et le népotisme, pour enquêter sur les abus de pouvoir commis par les anciennes élites dirigeantes et pour mettre en œuvre des réformes économiques et sociales urgentes visant à créer des conditions normales et équitables pour les acteurs économiques.
13. L’Assemblée encourage les autorités tunisiennes à intensifier et élargir la coopération avec le Conseil de l’Europe et à tirer parti de son expérience pour la transition du pays vers la démocratie et, en particulier:
13.1. à adhérer aux instruments juridiques du Conseil de l’Europe qui sont ouverts aux pays non membres, en particulier dans les domaines de la démocratie, des droits de l’homme et de la primauté du droit;
13.2. à exploiter pleinement l’adhésion de la Tunisie à la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) dans le processus de réforme constitutionnelle à venir;
13.3. à adhérer aux accords partiels élargis du Conseil de l’Europe tels que le Centre Nord-Sud et l’Accord européen et méditerranéen sur les risques majeurs (EUR-OPA);
13.4. à établir des contacts entre le Conseil de l’Europe et les autorités tunisiennes chargées des questions de justice, de développement durable, de culture, d’éducation et d’enseignement supérieur, de jeunesse et de sport, d’égalité entre les sexes et de droits des enfants;
13.5. à étudier et utiliser, dans leurs activités respectives, l’expérience des institutions des droits de l’homme et des mécanismes de suivi du Conseil de l’Europe, notamment de la Cour européenne des droits de l’homme et du Commissaire aux droits de l’homme;
13.6. à favoriser les contacts entre les représentants parlementaires et ceux de la société civile tunisiens et européens;
13.7. d’examiner les perspectives de dialogue parlementaire offertes par le statut de «partenaire pour la démocratie» récemment créé par l’Assemblée.
14. L’Assemblée s’engage à suivre attentivement l’évolution politique en Tunisie, à renforcer son dialogue avec le parlement de ce pays et, en particulier, avec les nouvelles institutions qui suivront les élections à venir que l’Assemblée espère libres et équitables et à trouver des moyens appropriés pour l’assister dans sa progression vers la démocratie.

B. Exposé des motifs, par Mme Brasseur, rapporteur

(open)
1. Le 14 janvier 2011, le Président de la Tunisie, M. Ben Ali, s’est enfui du pays par avion pour Djeddah, en Arabie saoudite. Son départ a été le point culminant de ce que les Tunisiens appellent maintenant la «révolution de jasmin».
2. Dans le présent exposé des motifs, je fournirai tout d’abord une rétrospective des événements qui, partis de troubles locaux liés aux mauvaises conditions sociales et économiques, se sont transformés en un mouvement de protestation d’ampleur nationale qui a mis fin aux vingt-trois ans de pouvoir de M. Ben Ali en Tunisie:
  • le 17 décembre 2010, un jeune vendeur de fruits ambulant, Mohamed Bouazizi, s’est immolé par le feu à Sidi Bouzid, une ville du centre de la Tunisie, pour protester contre la saisie de sa marchandise par la police. Ce geste désespéré a déclenché une vague de protestations parmi la jeunesse locale. M. Bouazizi a été emmené à l’hôpital dans un état critique;
  • le 19 décembre, les manifestations prenant de l’ampleur à Sidi Bouzid, la police a utilisé des gaz lacrymogènes pour disperser la foule;
  • le 24 décembre, les manifestations ont gagné l’ensemble du pays, et la police a ouvert le feu sur des manifestants à Bouziane (centre de la Tunisie), faisant un mort;
  • le 27 décembre, les manifestations massives se sont propagées jusqu’à Tunis, la capitale du pays. La police a violemment dispersé un rassemblement d’un millier de jeunes chômeurs diplômés;
  • le 28 décembre, le Président Ben Ali a fait une première intervention télévisée et a déclaré que les manifestants étaient «une minorité d’extrémistes et d’agitateurs à la solde d’autrui et contre les intérêts de leur pays»;
  • le 29 décembre, le Premier ministre Ghannouchi a révoqué quatre ministres, parmi lesquels le ministre de l’Information. Cependant, le mouvement de protestation a continué de s’étendre à travers le pays;
  • le 31 décembre, le Président Ben Ali a fait une nouvelle intervention télévisée et a promis «de mieux prendre en compte les besoins des catégories de population vulnérables» et «d’entamer en 2011 un nouveau cycle de négociations sociales». Entre-temps, un autre manifestant a été tué dans un face-à-face entre la police et les manifestants;
  • le 4 janvier 2011, Mohamed Bouazizi est mort à l’hôpital;
  • le 6 janvier, des milliers d’avocats se sont mis en grève pour protester contre la répression policière. En plus de demander des emplois, les manifestants ont commencé à scander des slogans politiques, demandant des libertés publiques;
  • les 9 et 10 janvier, les affrontements violents entre la police et les manifestants se sont étendus à plusieurs régions du pays, et des dizaines de morts ont été signalées. Le gouvernement a fait état de 14 décès. Le Président Ben Ali s’est une nouvelle fois exprimé à la télévision et a dénoncé des «actes terroristes commis par des éléments étrangers», tout en promettant de créer 300 000 emplois dans les deux années à venir;
  • le 11 janvier, alors que les manifestations touchaient la banlieue de Tunis, le gouvernement a fait état de 21 décès depuis le début des troubles;
  • le 12 janvier, le Président Ben Ali a révoqué le ministre de l’Intérieur et a instauré un couvre-feu à Tunis et dans sa banlieue;
  • le 13 janvier, les manifestations continuant de gagner du terrain, le Président Ben Ali est de nouveau intervenu à la télévision et a promis de ne pas briguer un nouveau mandat après 2014. Il a aussi ordonné à la police de ne pas ouvrir le feu sur les manifestants et a promis de garantir la liberté des médias;
  • le 14 janvier, contrairement aux attentes du Président, une nouvelle manifestation de grande ampleur s’est tenue dans la capitale, appelant M. Ben Ali à la démission. Celui-ci a révoqué le gouvernement, dissous le parlement et annoncé la tenue d’élections législatives anticipées dans les six mois à venir. Il a ensuite proclamé l’état d’urgence et instauré un couvre-feu dans tout le pays. En fin d’après-midi, le Premier ministre Ghannouchi a annoncé que le Président Ben Ali était «dans l’incapacité d’exercer ses fonctions». La rumeur s’est répandue dans la capitale que Ben Ali avait quitté la Tunisie;
  • le 15 janvier, le président du parlement Foued Mebazaa a été proclamé Président par intérim et a demandé à l’ancien Premier ministre Ghannouchi de former un «gouvernement d’union nationale». Plusieurs membres de l’entourage de M. Ben Ali ont été arrêtés. Des heurts ont éclaté entre l’armée et la garde présidentielle dans la banlieue de Tunis. Des villas et des magasins ont par ailleurs été pillés;
  • le 17 janvier, M. Ghannouchi a annoncé la composition du nouveau gouvernement. Pour la première fois, des dirigeants de trois grands partis d’opposition ont été invités à y participer. Cependant, plusieurs personnalités majeures de l’ancien pouvoir dont les ministres de l’Intérieur et des Affaires étrangères sont restées en place. Pendant ce temps, les manifestations ont continué à Tunis et dans d’autres villes, demandant la révocation des responsables politiques liés à l’ancien pouvoir et le démantèlement de l’ancien parti du pouvoir, le RCD.
3. Je tiens à rendre hommage au courage et à la détermination du peuple tunisien qui, malgré une répression violente, a affirmé clairement sa volonté de mettre fin à un régime autoritaire et de faire de la Tunisie un pays libre, ouvert et démocratique. Je souhaite aussi saluer l’attitude de l’armée tunisienne qui a offert sa protection à la population pendant les troubles, sans ingérence dans les affaires politiques. En revanche, le rôle joué par la police et la garde présidentielle nécessite d’être minutieusement examiné.
4. Les premières mesures annoncées par le chef du gouvernement provisoire incluaient la libération des prisonniers politiques, la levée des restrictions sur les activités des partis politiques et des associations de défense des droits de l’homme (telles que la Ligue tunisienne des droits de l’homme) et l’engagement à garantir la liberté des médias. La dissolution du ministère de l’Information, qui combinait précédemment des fonctions de censure et de propagande, a été annoncée.
5. A cet égard, nous devons insister sur l’importance d’une libre circulation de l’information, y compris sur l’internet, et d’un accès plein et sans entrave à l’information. L’internet a contribué notablement à la mobilisation des Tunisiens dans tous les pays.
6. Le retour d’un certain nombre de personnalités politiques et publiques qui s’étaient exilées est un signe encourageant du changement que connaît la Tunisie.
7. Cela dit, depuis sa mise en place, il y a une certaine confusion au sujet du gouvernement de transition du fait que plusieurs ministres nouvellement nommés ayant déclaré qu’ils démissionnaient. Le gouvernement s’est réuni pour la première fois il y a quelques jours et on ne sait pas précisément si tous ses membres ont effectivement participé à cette réunion.
8. Les autorités ont annoncé qu’au cours des quatre semaines de troubles, 78 personnes au total avaient été tuées et elles ont décrété un deuil national de trois jours en l’honneur des victimes. Cependant, d’après le haut commissaire aux droits de l’homme des Nations Unies, plus d’une centaine de personnes ont été tuées lors de ces événements.
9. Nous devons condamner sans équivoque le recours à la violence contre les manifestants. Nous regrettons que des dizaines de vies aient été perdues et nous exprimons notre compassion aux familles des victimes et aux personnes qui ont été blessées. L’utilisation des armes contre des citoyens pacifiques devra faire l’objet d’enquêtes approfondies et les responsables devront en rendre compte. Les incidents de violence, de pillage et de destruction de biens de la part de certains manifestants sont évidemment aussi à regretter, parce que de tels actes desservent la cause du mouvement de protestation.
10. Les autorités provisoires doivent, à présent, œuvrer rapidement à la libéralisation politique du pays afin de créer les conditions d’un processus politique pluraliste associant tout le spectre de la société tunisienne. Il convient notamment d’annoncer dans les meilleurs délais une date pour les élections et d’organiser des élections libres et équitables pleinement conformes aux normes internationales.
11. Nous devons encourager toutes les forces politiques à contribuer de manière constructive à établir le programme de réformes. En me basant sur notre expérience, et sans intention d’ingérence dans les affaires tunisiennes, je suggère, dans le projet de résolution, quelques éléments que les autorités tunisiennes pourraient envisager dans le cadre des réformes.
12. Nous ne devons pas non plus perdre de vue le fait que la transformation politique en cours en Tunisie pourrait déclencher des mouvements similaires dans d’autres pays de la région.
13. Je dois souligner que, même si les causes premières des événements de Tunisie trouvent leur origine dans la politique de M. Ben Ali, l’Europe a également une part de responsabilité car elle n’est pas arrivée à condamner la nature de ce régime et qu’elle a préféré en utiliser l’apparente stabilité pour faire des affaires.
14. A cet égard, je rappelle que dans la Résolution 1731 (2010), «Euro-Méditerranée: pour une stratégie du Conseil de l’Europe», adoptée en avril 2010 (rapport de M. Badré, France, ADLE), l’Assemblée a déclaré que la paix et la stabilité dans la région de la Méditerranée ne peuvent être garanties que sur la base de la démocratie, du respect des droits de l’homme et de la prééminence du droit, relevant que ces aspects étaient pratiquement absents dans le cadre du processus de Barcelone et de l’Union pour la Méditerranée.
15. Après la chute de M. Ben Ali, l’Union européenne s’est déclarée prête à assister la Tunisie dans le processus de réforme et, en particulier, à l’aider à organiser des élections. Au vu de cette offre, nous devrions rappeler l’appel figurant dans la Résolution 1731 (2010) pour que les activités de l’Union pour la Méditerranée soient élargies de manière à inclure la promotion de la démocratie, des droits de l’homme et de la prééminence du droit. Nous devrions en outre appeler l’Union européenne et ses Etats membres ainsi que les Etats membres du Conseil de l’Europe qui participent à l’Union pour la Méditerranée à faire participer le Conseil de l’Europe aux activités de cette dernière.
16. Il est utile de rappeler que la Tunisie coopère avec le Conseil de l’Europe dans plusieurs domaines et qu’elle est partie à quatre conventions du Conseil de l’Europe. Elle est membre de la Commission de Venise et participe au réseau méditerranéen de coopération sur les drogues et les addictions (MedNET) mis en place dans le cadre du Groupe Pompidou.
17. Pour sa part, l’Assemblée a appelé à maintes reprises à la transformation démocratique des pays voisins, dont la Tunisie, et exprimé son soutien à cette transformation. Le statut récemment créé de «partenaire pour la démocratie» offre un cadre concret qui permet à notre Assemblée de partager avec les parlements des pays voisins de l’Europe son expérience unique de l’accompagnement de pays en transition et de jeunes démocraties sur la voie de la réforme.
18. Dans le projet de résolution, je suggère d’encourager les autorités tunisiennes à intensifier et à élargir la coopération avec le Conseil de l’Europe, et à mettre à profit l’expérience de l’Organisation dans la transition de leur pays vers la démocratie et en particulier:
  • à adhérer aux instruments juridiques du Conseil de l’Europe qui sont ouverts aux pays non membres, en particulier dans les domaines de la démocratie, des droits de l’homme et de la prééminence du droit;
  • à exploiter pleinement l’adhésion de la Tunisie à la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) dans le processus de réforme constitutionnelle à venir;
  • à adhérer aux accords partiels élargis du Conseil de l’Europe tels que le Centre Nord-Sud et l’Accord européen et méditerranéen sur les risques majeurs (EUR-OPA);
  • à établir des contacts entre le Conseil de l’Europe et les autorités tunisiennes chargées des questions de justice, de développement durable, de culture, d’éducation et d’enseignement supérieur, de jeunesse et de sport, d’égalité entre les sexes et de droits des enfants;
  • à étudier et utiliser, dans leurs activités respectives, l’expérience des institutions des droits de l’homme et les mécanismes de suivi du Conseil de l’Europe, notamment de la Cour européenne des droits de l’homme et du Commissaire aux droits de l’homme, du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance, du Comité consultatif de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales et du Comité européen des Droits sociaux;
  • à favoriser les contacts entre représentants de la société civile tunisiens et européens.
19. Je rappelle aussi que le Parlement tunisien a engagé un dialogue avec l’Assemblée sur plusieurs sujets d’intérêt mutuel, en particulier par l’intermédiaire de sa commission des questions politiques. Ce dialogue est devenu plus ou moins régulier depuis l’adoption, en janvier 2008, de la Résolution 1598 (2008) de l’Assemblée, «Renforcer la coopération avec les pays du Maghreb», présentée par cette commission (rapporteur: Mme Josette Durrieu, France, SOC). Depuis, les députés du Parlement tunisien sont systématiquement invités aux sessions de l’Assemblée et participent aussi à des réunions de commission. Il est à noter que le Président de notre Assemblée était en visite officielle en Tunisie il y a seulement deux semaines, du 10 au 12 janvier 2011.
20. Au vu des derniers développements, je crois néanmoins que ces contacts devraient être renforcés. C’est pourquoi je suggère que nous continuions à suivre de près l’évolution politique en Tunisie, que nous renforcions notre dialogue avec le parlement de ce pays et, en particulier, avec les nouvelles institutions qui suivront les élections à venir, élections que nous espérons libres et équitables.
21. Nous devrions aussi trouver des moyens appropriés pour assister la Tunisie dans sa progression vers la démocratie. A cette fin, je pense que la commission des questions politiques devrait organiser, à l’une de ses prochaines réunions, une audition à laquelle participeraient, entre autres, des représentants de la société civile et des militants des droits de l’homme de Tunisie, dans le but de définir des actions prioritaires pour les mois à venir.