Imprimer
Autres documents liés
Recommandation 1633 (2003)
Retours forcés de Roms originaires de l'ex-République fédérale de Yougoslavie, y compris du Kosovo, en Serbie-Monténégro en provenance d'Etats membres du Conseil de l'Europe
1. L’Assemblée parlementaire se réfère
à sa Recommandation 1569 (2002) sur la situation des réfugiés et des
personnes déplacées dans la République fédérale de Yougoslavie;
à sa Recommandation 1588 (2003) sur le déplacement de populations
en Europe du Sud-Est: tendances, problèmes, solutions; à sa Recommandation
1348 (1997) relative à la protection temporaire de personnes obligées
de fuir leur pays; à sa Recommandation 1547 (2002) sur les procédures
d’expulsion conformes aux droits de l’homme et exécutées dans le
respect de la sécurité et de la dignité; et à sa Recommandation
1504 (2001) sur la non-expulsion des immigrés de longue durée.
2. L’Assemblée note avec inquiétude que le problème des populations
déplacées dans les Balkans subsiste. A ce jour, le nombre de personnes
déplacées en quête de solutions durables, dans la région, dépasse
le million; un demi-million d’entre elles vivent en Serbie-Monténégro,
y compris au Kosovo. L’examen de toute question spécifique concernant
les retours exige donc de prendre en considération ce contexte général.
3. La population rom déplacée forme un groupe particulièrement
vulnérable. Au Kosovo, sa sécurité ne peut être garantie. En Serbie-Monténégro,
sa situation économique et sociale, de même que ses conditions de
vie, sont très précaires. Partout dans la région, les Roms sont
confrontés à une discrimination subtile de la part de la population
locale et des autorités locales, qui rechignent souvent à les accepter.
4. Selon les estimations, entre 50 000 et 100 000 Roms originaires
de Serbie-Monténégro, y compris du Kosovo, qui avaient quitté la
région durant le conflit dans les Balkans, demeurent encore dans
les pays européens, sans statut permanent. En majorité, ils vivent
en Allemagne (25 000 à 30 000), aux Pays-Bas (12 000), en Belgique
(3 000), en Suisse (3 000) et au Luxembourg (2 000 à 3 000); ils
entrent dans la catégorie des candidats à la réadmission.
5. Les retours forcés sont menés à bien sur la base d’accords
bilatéraux de réadmission conclus entre la Serbie-Monténégro, d’une
part, et différents pays européens de provenance, d’autre part.
Ils ont été entrepris rapidement, à la suite des changements démocratiques
intervenus dans le sillage de l’élection présidentielle en République
fédérale de Yougoslavie, en septembre 2000. Pour l’instant, quelque
1 000 Roms ont été contraints au retour, en majorité depuis l’Allemagne.
6. Les principaux problèmes relatifs aux retours forcés des Roms
sont essentiellement de trois sortes. Il y a d’abord ceux concernant
la légitimité de certaines décisions d’expulsion prises par les
pays d’accueil. Ensuite, viennent les conditions dans lesquelles
ont lieu des retours forcés. Enfin, il y a la question de la situation
dans laquelle se trouvent les Roms qui ont été contraints de retourner
en Serbie-Monténégro.
7. Il est en particulier très inquiétant que les accords de réadmission
ne définissent pas clairement les conditions d’accueil des personnes
de retour et ne reconnaissent aucune responsabilité à l’Etat d’accueil
quant à la réintégration de ces personnes.
8. L’Assemblée est aussi préoccupée par les retours dits «volontaires»,
qui, dans certains cas, sont si fortement incités qu’ils peuvent
s’apparenter à des retours forcés déguisés.
9. Par conséquent, l’Assemblée recommande au Comité des Ministres:
9.1. d’inviter instamment les Etats
membres du Conseil de l’Europe qui accueillent des Roms venant de
Serbie-Monténégro, y compris du Kosovo, à s’assurer:
a. que toute décision de retour forcé de Roms vers la Serbie-Monténégro est prise au cas par cas, compte tenu de toutes les circonstances pertinentes; ainsi, les arguments humanitaires devraient suffire à justifier la délivrance d’un permis de séjour;
b. que tout Rom demandant la protection internationale a accès à une procédure de demande d’asile juste et efficace;
c. qu’il n’y a aucun retour forcé de Roms originaires du Kosovo, que la destination soit le Kosovo lui-même ou le reste des territoires de Serbie-Monténégro, tant que la situation au Kosovo en matière de sécurité n’est pas propice au retour de Roms;
d. que les représentants de Roms peuvent participer le plus tôt possible, par la formulation de conseils, à la préparation d’un éventuel retour forcé de Roms;
e. que les Roms objets d’une mesure de retour forcé sont munis des documents appropriés leur permettant d’être reconnus comme des citoyens à part entière à leur arrivée;
f. que les procédures d’expulsion sont conformes au droit international et tiennent compte des recommandations énoncées dans la Recommandation 1547;
g. qu’ils contribuent financièrement à l’élaboration et à l’application de programmes de réintégration des Roms de retour. Ces programmes devraient être accompagnés de fonds pour soutenir la nouvelle stratégie relative aux Roms;
9.1. d’inviter instamment les autorités
serbes et monténégrines:
a. à chercher activement le soutien et un financement international pour élaborer et mettre en œuvre des programmes de réintégration des Roms de retour, notamment auprès de la Banque de développement du Conseil de l’Europe;
b. à s’assurer que des représentants des Roms sont consultés et impliqués dans l’élaboration de tout programme de réintégration concernant les Roms;
c. à accorder une attention particulière aux Roms, qui constituent la catégorie la plus pauvre de la population vulnérable, dans le cadre du projet de stratégie gouvernementale pour la réduction de la pauvreté, que soutient la Banque mondiale;
d. à s’assurer que les ministères chargés de l’éducation, du logement, de l’emploi, de la protection sociale et de la santé, et plus particulièrement les autorités locales et municipales, sont correctement informés du processus de réadmission; que les autorités concernées ciblent leur action pour permettre aux Roms d’exercer pleinement leurs droits fondamentaux dans les domaines concernés, à commencer par l’accès à un enregistrement et à des documents personnels appropriés;
e. à adopter, en coopération avec les organisations non gouvernementales représentant des Roms, une politique globale couvrant tous les aspects relatifs aux droits de l’homme pour les Roms renvoyés vers la Serbie-Monténégro et à assurer le financement pour l’application intégrale de la stratégie;
f. à adopter et mettre en œuvre, en priorité, des mesures juridiques contraignantes visant à mettre un terme à l’apatridie des Roms de retour, et notamment à assurer que les autorités locales exécutent les procédures nécessaires pour leur fournir des documents d’identité. Des mesures urgentes devraient être prises pour améliorer l’accès des Roms de retour aux services publics essentiels à la pleine jouissance de leurs droits fondamentaux;
g. à faciliter l’obtention rapide de certificats de scolarisation pour les enfants roms éduqués à l’étranger, afin qu’ils puissent poursuivre leur scolarité en Serbie-Monténégro;
h. à cesser de placer les enfants roms de retour dans des classes qu’ils ont déjà suivies avec succès à l’étranger;
i. à proposer aux enfants roms des classes supplémentaires pour l’apprentissage de la langue serbe;
j. à s’assurer que les enfants de retour ne font pas l’objet de ségrégation ethnique dans leur scolarité