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Résolution 1459 (2005)

Abolition des restrictions au droit de vote

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 24 juin 2005 (24e séance) (voir Doc. 10553, rapport de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, rapporteur: rapporteur: M. Eker et Doc. 10577, avis de la commission des questions politiques, rapporteur : Lord Tomlinson)). Texte adopté par l’Assemblée le 24 juin 2005 (24e séance).

1. Conformément à sa Recommandation 1500 (2001) sur la participation des immigrés et des résidents étrangers à la vie politique dans les Etats membres du Conseil de l’Europe, l’Assemblée parlementaire souligne l’importance du droit de vote et d’éligibilité comme condition préalable essentielle à la préservation d’autres droits civils et politiques fondamentaux défendus par le Conseil de l’Europe. Les droits électoraux sont la base même de la légitimité démocratique et de la représentativité du processus politique. Ils doivent donc évoluer en suivant la progression des sociétés modernes vers une démocratie toujours plus inclusive.
2. Conformément à l’avis de la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) adopté en décembre 2004, elle invite par conséquent les Etats membres et observateurs auprès de l’Organisation à réexaminer l’ensemble des restrictions existantes aux droits électoraux et à abolir toutes celles qui ne sont plus nécessaires ni proportionnées à la poursuite d’un objectif légitime.
3. L’Assemblée estime que, en principe, la priorité devrait être donnée à l’octroi de droits électoraux effectifs, libres et égaux au plus grand nombre de citoyens, sans tenir compte de leur origine ethnique, de leur santé, de leur statut de membre des forces armées ou de leur casier judiciaire. Il convient de tenir pleinement compte des droits de vote des citoyens domiciliés à l’étranger.
4. Conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l’Homme, toute exception à cette règle doit être prescrite par la loi, doit poursuivre un objectif légitime et ne doit pas être arbitraire ni disproportionnée.
5. Tous les résidents légaux sont normalement tenus de payer des impôts locaux, et les décisions prises par les autorités locales influent directement sur leurs vies. Le droit de voter et de se présenter comme candidat aux élections locales devrait par conséquent être accordé à tous les résidents légaux qui ont vécu suffisamment longtemps dans le pays, quelle que soit leur nationalité ou leur origine ethnique. A cet égard, l’Assemblée invite instamment les pays concernés à appliquer les recommandations du commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe selon lesquelles ce droit devrait être accordé aux résidents ayant le statut spécial de «non-citoyens», conformément à la Convention sur la participation des étrangers à la vie publique au niveau local (STE no 144).
6. Compte tenu du conflit de loyauté possible entre le pays dont une personne est citoyenne et son pays de résidence, le droit de vote et d’éligibilité aux élections nationales (parlementaires ou présidentielles) devrait généralement être subordonné à la nationalité. Les personnes dotées de plusieurs nationalités devraient avoir le droit de choisir librement le pays dans lequel elles souhaitent exercer leur droit de vote.
7. Etant donné l’importance du droit de vote dans une société démocratique, les pays membres du Conseil de l’Europe devraient permettre à leurs citoyens vivant à l’étranger de voter aux élections nationales en tenant compte de la complexité des différents systèmes électoraux. Ils devraient prendre les mesures appropriées pour faciliter autant que possible l’exercice de ce droit, notamment en considérant le vote par correspondance (par courrier), le vote auprès d’un consulat ou le vote électronique, conformément à la Recommandation Rec(2004)11 du Comité des Ministres aux Etats membres sur les normes juridiques, opérationnelles et techniques relatives au vote électronique. Les Etats membres devraient coopérer entre eux à cette fin et éviter d’entraver inutilement l’exercice effectif des droits de vote des ressortissants étrangers résidant sur leurs territoires.
8. La réinsertion des détenus dans la société – en leur accordant tous les droits dont bénéficient les autres citoyens et en les soumettant aux mêmes devoirs – étant un objectif des sanctions pénales, l’Assemblée regrette que, dans nombre de pays, les personnes condamnées pour infraction pénale n’aient pas le droit de voter, parfois même pendant un certain temps après leur libération. Une approche plus moderne voudrait que l’on limite le retrait du droit de vote aux personnes ayant commis des infractions à l’encontre du processus démocratique (par exemple fraude électorale, pressions illégales sur des électeurs ou des candidats, participation à un coup d’Etat militaire, participation dans des activités terroristes, établie par une décision judiciaire). Dans tous les cas, compte tenu de l’arrêt de la Cour européenne des Droits de l’Homme dans l’affaire Hirst c. Royaume- Uni (30 juin 2004), les parlements nationaux devraient réexaminer les restrictions existantes et déterminer si elles poursuivent toujours un objectif légitime sans être arbitraires ni disproportionnées.
9. Comme souligné par la Commission de Venise, la nécessité d’établir un contrôle démocratique des forces armées ne devrait pas servir d’excuse pour priver automatiquement les militaires de leur droit de vote.
10. L’Assemblée insiste également sur l’importance de protéger les droits de vote des groupes vulnérables tels que les personnes résidant dans des établissements d’hébergement médicalisé, les détenus, les militaires et les personnes handicapées. Des mesures appropriées doivent être prises afin d’éviter toute influence indue des personnes qui les assistent, des superviseurs ou des supérieurs hiérarchiques, notamment en garantissant le secret du scrutin.
11. Par conséquent, l’Assemblée invite:
les Etats membres du Conseil de l’Europe et observateurs concernés:
a. à abaisser l’âge minimal pour les droits électoraux actifs et passifs à 18 ans pour le droit de vote et à 25 ans pour le droit d’éligibilité;
b. à accorder des droits électoraux à tous leurs citoyens (ressortissants), sans imposer de condition de résidence;
c. à faciliter l’exercice des droits électoraux des expatriés en instaurant des procédures de vote par correspondance (par courrier et/ou auprès d’un consulat) et en envisageant l’introduction du vote électronique conformément à la Recommandation Rec(2004)11 du Comité des Ministres, et, à cette fin, à coopérer entre eux;
d. à signer et à ratifier la Convention de 1992 du Conseil de l’Europe sur la participation des étrangers à la vie publique au niveau local, et à accorder des droits électoraux actifs et passifs aux élections locales à tous les résidents légaux;
e. à réexaminer les restrictions existantes aux droits électoraux des détenus, des personnes condamnées pour une infraction pénale et des membres des forces armées, afin d’abolir toutes celles qui ne sont plus nécessaires ni proportionnées à la poursuite d’un objectif légitime;
f. à prendre les mesures appropriées pour protéger les droits électoraux des groupes d’électeurs vulnérables (notamment les personnes vivant dans des établissements d’hébergement médicalisé, les détenus, les membres des forces armées, les groupes nomades), conformément au Code de bonne conduite en matière électorale de la Commission de Venise, adopté en juillet 2003;
le Conseil de l’Europe, et notamment la Commission de Venise, à développer davantage ses activités d’amélioration des conditions permettant l’exercice effectif des droits électoraux, en insistant particulièrement sur la coopération destinée à faciliter l’exercice de ces droits par les citoyens expatriés.