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Résolution 1588 (2007)
Déchets radioactifs et protection de l’environnement
1. Les déchets radioactifs sont potentiellement
très dangereux pour la santé de l’homme et l’environnement, et ils
continueront de l’être pour les générations futures, jusqu’à ce
que leur radioactivité ait décru à de faibles niveaux; c’est pourquoi
il importe de surveiller de très près leur gestion, en particulier
leur entreposage et leur stockage. Dans sa Résolution 1435 (2005) sur les systèmes énergétiques et l’environnement, l’Assemblée
parlementaire soulignait la nécessité d’évaluer l’entreposage à
long terme et le stockage des combustibles usés et des autres formes
de déchets nucléaires.
2. Après quelques décennies de stagnation, l’énergie nucléaire
a reçu dernièrement une nouvelle impulsion en Europe, particulièrement
parce qu’en tant qu’énergie «propre» elle contribue à ralentir le changement
climatique et qu’elle répond à la nécessité de réduire la dépendance
énergétique de l’Europe, questions dont l’Assemblée a traité récemment
dans sa Recommandation
1779 (2007) et sa Résolution
1531 (2007) sur le danger de l’utilisation de l’approvisionnement
énergétique comme instrument de pression politique.
3. La Convention commune sur la sûreté de la gestion du combustible
usé et sur la sûreté de la gestion des déchets radioactifs (la convention
commune) de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA)
est entrée en vigueur en 2001. Aujourd’hui, la convention commune,
les normes internationales de sûreté des déchets publiées par l’AIEA
et d’autres organisations internationales, ainsi que les mécanismes
de l’AIEA permettant d’assurer l’application de ces normes ont abouti
à un régime international de facto en
matière de radiation et de sûreté nucléaire. La convention commune
stipule que «chaque Partie contractante prend les mesures appropriées
pour que, à tous les stades de la gestion des déchets radioactifs,
les individus, la société et l’environnement soient protégés de
manière adéquate contre les risques radiologiques et autres».
4. En ce qui concerne les déchets faiblement ou moyennement radioactifs,
une série de solutions à long terme ont été trouvées et sont d’ores
et déjà appliquées, en particulier les sites d’entreposage en surface
ou proches de la surface.
5. Un réacteur nucléaire ordinaire de 1 000 MW produit en moyenne
25 tonnes de combustible usé par an. Le combustible usé fait partie
des déchets hautement radioactifs, qui représentent environ 1 %
du total des déchets nucléaires. Plus de 60 000 tonnes de combustible
usé sont déjà entreposées en Europe sur les sites des réacteurs
ou ailleurs. C’est là une réalité dont il faut s’occuper, indépendamment
des tendances observées dans l’évolution de l’industrie nucléaire
en Europe.
6. S’agissant de la gestion des combustibles usés, on envisage
ou on applique déjà les options suivantes:
6.1. stockage des combustibles usés dans des dépôts géologiques;
6.2. retraitement des combustibles usés, recyclage du plutonium
et de l’uranium retraités, et stockage des déchets résiduels après
les opérations de retraitement;
6.3. politique d’attentisme consistant à entreposer les combustibles
usés et à prendre une décision au sujet de leur retraitement ou
de leur stockage plus tard.
7. La solution généralement préconisée par les experts est le
stockage dans des dépôts géologiques profonds, où le confinement
physique et chimique des déchets est assuré à la fois par des barrières
naturelles et des dispositifs ouvragés. Toutefois, le choix de sites
d’enfouissement s’est avéré difficile dans un certain nombre de
pays européens: plusieurs pays ont des structures géologiques inappropriées
et, dans de nombreux cas, la population continue d’avoir des craintes
quant à la sûreté de cette formule et de se méfier de la technologie
employée, et elle ne connaît pas suffisamment les options en présence.
8. Plusieurs pays ont déjà pris des mesures concrètes en vue
de la conception et de la construction d’installations géologiques
de stockage. Néanmoins, l’état d’avancement de ces projets varie
beaucoup selon les pays, ces derniers ayant retenu des méthodes
et des calendriers différents à la fois pour consulter l’opinion publique
et pour mettre effectivement en pratique les résultats de la recherche.
Les pays les plus avancés à cet égard sont la Suède et la Finlande,
où le stockage en sites d’enfouissement profond deviendra effectif
d’ici à quelques années.
9. La question des déchets nucléaires soulève non seulement le
problème technique posé par la construction des installations de
stockage définitif, mais aussi le problème éthique de nos responsabilités
vis-à-vis des générations futures. Les dépôts destinés à recevoir
les combustibles nucléaires usés et les déchets hautement radioactifs
doivent être construits de telle sorte qu’ils ne nécessitent qu’un
entretien minime, voire aucun, surtout à long terme. Toutefois,
les générations futures devront pouvoir à la fois contrôler et,
si nécessaire, retirer de ces dépôts les combustibles usés et les
déchets hautement radioactifs ainsi stockés (par exemple si, d’ici
là, les progrès de la technologie offrent de meilleures solutions,
ou bien s’il s’est produit entre-temps des incidents – géologiques,
liés à la sûreté, etc. – qui risquent d’affecter la sécurité du
dépôt).
10. L’Assemblée se déclare préoccupée par la gestion inappropriée
des déchets nucléaires que l’on signale dans certains Etats membres
du Conseil de l’Europe.
11. L’Assemblée demande aux Etats membres et observateurs du Conseil
de l’Europe ayant à faire face au problème de la gestion des déchets
nucléaires:
11.1. d’encourager les
tests géologiques pour identifier des sites appropriés (c’est-à-dire
présentant des garanties de stabilité à long terme et autorisant
l’usage de multiples barrières pour empêcher les radionucléides
d’atteindre la surface terrestre) à la construction de dépôts géologiques
profonds pour le stockage des déchets radioactifs (solution considérée
à l’heure actuelle comme la plus appropriée), afin d’assurer la
sauvegarde à long terme de l’environnement et – si de tels sites
sont identifiés – d’y construire ces dépôts;
11.2. de soutenir la recherche et le développement visant à
trouver des solutions alternatives à l’enfouissement des déchets
radioactifs dans des dépôts géologiques profonds (par exemple la modification
de la composition isotopique dans le but de rendre les déchets inoffensifs
plus rapidement);
11.3. d’assurer l’indépendance effective des autorités nationales
chargées du contrôle et de la gestion des déchets nucléaires;
11.4. d’organiser des débats publics et parlementaires sur les
options relatives à la gestion, aux méthodes de stockage et au choix
des sites de stockage des déchets nucléaires;
11.5. de sensibiliser davantage les citoyens à tous les aspects
de la gestion des déchets radioactifs, en promouvant une politique
de transparence au sujet de la production, du transport, de l’entreposage et
du stockage définitif des déchets;
11.6. de veiller à ce que le transport des déchets nucléaires
depuis les sites de production jusqu’aux sites d’entreposage et/ou
de stockage se fasse dans le respect intégral des principes de la
convention commune de l’AIEA;
11.7. de prendre des mesures appropriées pour accroître la sûreté
et la sécurité vis-à-vis d’éventuelles actions de nature terroriste,
que ce soit sur les sites des réacteurs, durant le transport des
déchets radioactifs ou sur les sites actuels d’entreposage;
11.8. de veiller à ce que la construction de tous les sites
d’entreposage et/ou de stockage soit faite sous une stricte surveillance
gouvernementale et internationale, pour que le respect de toutes
les normes de sécurité et de qualité soit garanti;
11.9. de veiller, s’ils construisent des dépôts, à ce que les
générations futures puissent en contrôler les déchets nucléaires
et, si cela s’avère nécessaire, les retirer, tout en ne perdant
pas de vue qu’une telle opération de retrait ne devra être ni trop
facile, ni trop rapide à réaliser;
11.10. de faire participer le plus possible les collectivités
locales, les citoyens et les ONG aux décisions concernant le choix
des sites possibles où construire des dépôts de stockage définitif
ou autres, afin d’accroître la confiance du grand public dans les
méthodes présidant à ce choix comme dans les techniques de gestion
à long terme des déchets nucléaires;
11.11. de permettre aux collectivités locales concernées et aux
citoyens vivant à proximité des dépôts prévus de faire valoir dans
toute la mesure du possible leurs opinions, tout en leur offrant
d’être associés au projet par un contrat de collaboration;
11.12. de permettre aux collectivités locales concernées de prendre
part à la gestion de tout site de stockage situé sur leurs territoires
respectifs;
11.13. de s’assurer que les données sur les sites de stockage
soient centralisées à la fois aux niveaux national et international,
notamment en collaboration avec l’AIEA, afin qu’aucune perte d’informations ne
puisse nuire aux générations futures;
11.14. de ratifier dès que possible, s’ils ne l’ont pas déjà
fait, la Convention commune de l’AIEA sur la sûreté de la gestion
du combustible usé et sur la sûreté de la gestion des déchets radioactifs,
et de se conformer strictement à ses prévisions.
12. Enfin, l’Assemblée invite l’Union européenne à élaborer, en
coordination avec l’AIEA, des normes et principes communs à respecter
dans la gestion des déchets nucléaires, et notamment dans l’établissement ultérieur
de dépôts destinés au stockage définitif des déchets nucléaires
dans ses Etats membres, ces normes et principes pouvant s’étendre,
le cas échéant, à toute la zone géographique paneuropéenne.