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Résolution 1706 (2010) Version finale

Augmenter la représentation des femmes en politique par les systèmes électoraux

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 27 janvier 2010 (6e séance) (voir Doc. 12097, rapport de la commission sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes, rapporteuse: Mme Err). Texte adopté par l’Assemblée le 27 janvier 2010 (6e séance). Voir également la Recommandation 1899 (2010).

1. La participation égale des femmes et des hommes à la vie politique est l’un des fondements de la démocratie et l’un des objectifs du Conseil de l’Europe, que le Comité des Ministres de l’Organisation a encore réaffirmé en mai 2009.
2. Malheureusement, près de trente-cinq ans après la première Conférence mondiale des Nations Unies sur les femmes tenue à Mexico, et quelque quinze ans après la quatrième, à Pékin, les femmes restent gravement sous-représentées en politique. A ce jour encore, les femmes détiennent moins de 20 % des sièges de parlementaires et des portefeuilles ministériels dans le monde, et moins de 5 % des chefs d’Etat sont des femmes. Cette sous-représentation constitue un gaspillage de talents et fragilise aussi la démocratie et les droits de l’homme.
3. Les facteurs entraînant une sous-représentation des femmes en politique sont nombreux. Le principal facteur étant sans doute les attaques portées depuis une dizaine d’années à l’encontre des droits des femmes. En Europe, les sociétés restent caractérisées par des attitudes, des usages et des comportements qui déresponsabilisent les femmes dans la vie publique, les discriminent et les emprisonnent dans des rôles modèles prescrits et dans des clichés selon lesquels elles «ne sont pas faites» pour la prise de décision et la politique. Des heures indues de réunion et un manque de structures pour la garde des enfants pour les politiciens peuvent en outre dissuader les femmes de poser leur candidature – la politique est faite sur mesure pour les hommes qui n’assument pas une part minimale de leur responsabilité familiale et qui comptent sur leur femme pour assurer l’intendance du ménage.
4. Les attitudes, usages et comportements décrits plus haut influencent un paysage national institutionnel, politique et électoral; mais, inversement, un changement dans ce paysage peut aussi influer sur les attitudes sociétales. Changer le système électoral pour le rendre plus favorable à la représentation des femmes en politique, notamment en adoptant des quotas par sexe, peut conduire à un processus de décision politique et publique plus équilibré entre les sexes et, par là même, plus légitime. Ce fait était déjà reconnu par le Comité des Ministres dans sa Recommandation Rec(2003)3 sur la participation équilibrée des femmes et des hommes à la prise de décision politique et publique, et a été réaffirmé par l’Assemblée parlementaire à diverses reprises, comme, tout récemment, lors de l’attribution de son premier «Prix de l’égalité entre les femmes et les hommes», en septembre 2009.
5. Toutefois, une réforme du système électoral ne saurait suffire: pour être réellement efficace, ce changement doit s’accompagner de mesures telles qu’une éducation civique égalitaire et de l’élimination des clichés sexistes et des préjugés à l’égard des femmes candidates, qui sont ancrés dans les mentalités, notamment au sein des partis politiques, mais aussi dans les médias. Dans certains Etats membres du Conseil de l’Europe il faudrait également modifier la Constitution afin que les mesures en faveur de l’égalité ou antidiscriminatoires soient rendues possibles par des dérogations autorisant une discrimination positive en faveur du sexe sous-représenté sans être pour autant considérées comme une violation du principe de l’égalité.
6. L’Assemblée considère que l’absence de représentation égale des femmes et des hommes dans le processus de prise de décision politique et publique est une menace pour la légitimité des démocraties et une violation du droit fondamental à l’égalité hommes-femmes, et demande en conséquence aux Etats membres de remédier à cette situation en priorité:
6.1. en veillant à assortir les dispositions de leurs Constitutions et de leurs lois électorales relatives à l’égalité des sexes et à la lutte contre la discrimination des dérogations nécessaires pour autoriser des mesures de discrimination positive en faveur du sexe sous-représenté, si ce n’est pas encore le cas, car cette mesure constitue une précondition selon la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) du Conseil de l’Europe;
6.2. en appliquant pleinement les recommandations formulées dans la Recommandation Rec(2003)3 du Comité des Ministres sur la participation équilibrée des femmes et des hommes à la prise de décision politique et publique, dans la Recommandation 1676 (2004) de l’Assemblée parlementaire sur la participation des femmes aux élections, et dans sa Résolution 1489 (2006) sur les mécanismes visant à garantir la participation des femmes à la prise de décision, ainsi que dans la Recommandation 273 (2009) du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe, sur l’égalité d’accès aux élections locales et régionales, en particulier les points concernant la réforme des systèmes électoraux et l’instauration de quotas fondés sur le sexe;
6.3. en réformant leur système électoral pour le rendre plus favorable à la représentation des femmes au parlement:
6.3.1. pour les pays possédant un système électoral de listes proportionnelles, prévoir l’introduction d’un quota légal prévoyant non seulement une forte proportion de candidates (idéalement au moins 40 %), mais également des règles strictes de placement de ces candidates sur les listes (dans le cadre, par exemple, d’un système d’alternance hommes/femmes) et des sanctions effectives en cas de non-respect (de préférence non financières, visant plutôt la non-acceptation de candidats/listes de candidats), idéalement dans une grande circonscription et/ou une circonscription recouvrant l’ensemble du territoire national, en le combinant avec des listes bloquées;
6.3.2. pour les pays possédant un système à scrutin majoritaire, prévoir l’introduction du principe selon lequel chaque parti choisit pour la candidature dans une circonscription uninominale entre au moins une candidature féminine et une candidature masculine; ou bien trouver d’autres manières de garantir une meilleure représentation des femmes en politique, comme l’instauration de quotas obligatoires novateurs pour les femmes dans les partis politiques, ou des listes composées uniquement de femmes, ou le jumelage de circonscriptions, en assortissant une fois de plus ces dispositifs de sanctions effectives, en cas de non-respect;
6.4. en limitant par voie législative le cumul de mandats politiques (aux niveaux local, régional, national ou européen);
6.5. en encourageant les partis politiques à adopter volontairement des quotas par sexe et autres mesures positives, y compris dans leurs propres structures décisionnelles, tout particulièrement dans leur structure responsable de la désignation des candidats aux élections;
6.6. en accompagnant ces réformes de mesures telles qu’une éducation civique égalitaire et l’élimination des clichés sexistes et des préjugés à l’égard des femmes candidates, qui sont ancrés dans les mentalités, non seulement dans les partis politiques, mais aussi dans les médias et les syndicats.