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Résolution 1816 (2011)

Les risques sanitaires des métaux lourds et d'autres métaux

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Texte adopté par la Commission permanente, agissant au nom de l’Assemblée, le 27 mai 2011 (voir Doc. 12613, rapport de la commission des questions sociales, de la santé et de la famille, rapporteur: M. Huss).

1. L’Assemblée parlementaire est préoccupée par le fait que les Etats membres du Conseil de l’Europe, dans le cadre de leurs politiques de santé, ne portent pas suffisamment d’attention aux risques sanitaires des métaux, alors que ces risques sont scientifiquement établis dans beaucoup de cas. Ainsi, il est de plus en plus évident que l’exposition permanente et à petites doses de l’être humain à des substances telles que l’aluminium, le cadmium, le mercure ou le plomb serait un des cofacteurs de certaines maladies neurologiques, cardio-vasculaires et auto-immunes.
2. Face au droit de chaque personne à un environnement sain, les stratégies préventives de santé visant à réduire l’exposition humaine à de telles substances nocives devraient figurer parmi les priorités politiques. Cela semble d’autant plus urgent face aux coûts réels élevés de l’utilisation des métaux lourds, fortement soupçonnés de contribuer à des maladies chroniques qui pèsent lourd sur les budgets nationaux des caisses d’assurance-maladie.
3. Au-delà de la nécessité d’une action politique et législative immédiate suivant le principe de précaution, les recherches scientifiques sur les métaux lourds dans toute leur complexité devraient se poursuivre. Cela permettra d’établir un lien causal entre la présence de métaux lourds dans l’environnement humain et certaines pathologies humaines, d’apporter davantage de réponses appropriées à ces dernières et de proposer des procédés industriels et des approches thérapeutiques à la hauteur des connaissances scientifiques actuelles les meilleures.
4. Afin de soutenir les politiques nationales, le droit à un environnement sain pour chaque personne devrait être mieux ancré et renforcé dans les normes internationales, y compris dans les normes du Conseil de l’Europe. L’Assemblée a déjà lancé des appels en ce sens à plusieurs reprises, par exemple en adoptant sa Recommandation 1885 (2009) sur l’élaboration d’un protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit à un environnement sain, mais sans qu’à ce jour une suite concrète n’ait été donnée par le Comité des Ministres.
5. Toute action concernant les métaux lourds peut s’inscrire dans un contexte international où les dangers de ces substances pour la santé humaine et l’environnement sont de plus en plus reconnus. Ainsi, l’Union européenne est en train de réexaminer sa stratégie communautaire sur le mercure jusqu’à la fin de 2011, et des négociations sont en cours dans le cadre du Programme des Nations Unies pour l’environnement en vue d’élaborer un instrument international contraignant sur le mercure pour 2013. Les Etats membres du Conseil de l’Europe devraient prendre part activement aux négociations en cours et agir en tant que précurseurs d’une évolution vers des politiques sanitaires et environnementales innovantes.
6. L’Assemblée constate que les connaissances scientifiques et médicales sur les métaux lourds ont atteint un niveau tel qu’il n’est plus justifié de retarder des actions concrètes visant à réduire ou à éliminer leur présence dans l’environnement humain et, ainsi, d’atténuer leurs conséquences sanitaires. Elle appelle donc tous les Etats membres à soutenir une approche politique innovante à la problématique et à prendre les mesures globales suivantes:
6.1. définir les métaux lourds et les risques sanitaires qu’ils entraînent comme des priorités des politiques sanitaires et environnementales, tout en suivant le principe de précaution tel que soutenu par la Recommandation 1787 (2007) sur le principe de précaution et la gestion responsable des risques; cela devrait se faire en mettant l’accent sur l’élimination la plus large possible des métaux lourds de l’environnement humain, sur la prévention de la bioaccumulation de telles substances dans la nature, la chaîne alimentaire et, enfin, le corps humain, sur la prévention et le soin des maladies chroniques générées par ces substances ainsi que sur la protection particulière des personnes les plus vulnérables;
6.2. promouvoir, au sein de l’Union européenne et dans d’autres contextes internationaux, l’établissement de règles plus strictes concernant la production, l’utilisation et l’importation de produits contenant des métaux lourds, y compris des limites spécifiques d’exposition aux métaux lourds, notamment pour les personnes les plus vulnérables, établies en collaboration avec l’Organisation mondiale de la santé;
6.3. organiser et faciliter des échanges de connaissances et de bonnes pratiques entre les autorités nationales spécialisées pour compléter leurs données respectives en la matière et s’inspirer des mesures politiques efficaces prises ailleurs.
7. L’Assemblée appelle instamment tous les Etats membres à prendre les mesures de prévention suivantes en ce qui concerne les métaux lourds les plus toxiques tels que le mercure:
7.1. interdire ou restreindre, lorsque cela est possible et approprié, l’utilisation des métaux lourds par l’industrie, l’agriculture et le secteur médical, et, en ce qui concerne ce dernier notamment, par la restriction, voire l’interdiction, des amalgames comme matériaux d’obturation dentaire;
7.2. promouvoir une information largement diffusée sur les effets sanitaires des métaux lourds pour permettre à tous les professionnels et consommateurs de faire des choix éclairés, sans attendre des mesures politiques plus radicales sur le choix de méthodes de traitements médicaux, de produits de consommation et de produits alimentaires, de moyens de transport;
7.3. promouvoir les recherches scientifiques et technologiques dans le but de substituer, à long terme, les métaux lourds dans tous les procédés industriels et agricoles ainsi que dans tous les traitements médicaux, tout en mettant en place des réglementations strictes pour prévenir les conflits d’intérêts des experts impliqués tel qu’évoqué par la Recommandation 1908 (2010) de l’Assemblée sur le lobbying dans une société démocratique (code européen de bonne conduite en matière de lobbying), notamment en soutenant la recherche médicale en la matière;
7.4. là où les métaux lourds ne peuvent pas être substitués immédiatement, réduire au minimum leur arrivée et leur bioaccumulation dans l’environnement naturel et humain, entre autres en obligeant tous les utilisateurs et émetteurs de métaux lourds, y compris les cabinets dentaires, à installer des équipements antipollution et de filtrage efficaces.
8. Au niveau des normes internationales et européennes, il faut continuer à promouvoir le droit à la santé et le droit à un environnement sain en tant que droits humains fondamentaux. A cet égard, l’Assemblée fait appel aux Etats membres pour continuer à promouvoir, au sein du Conseil de l’Europe, l’idée d’un protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme sur le droit à un environnement sain tel que proposé par sa Recommandation 1885 (2009). Par ailleurs, elle considère que 2011 – année du 50e et du 15e anniversaire respectivement de la Charte sociale européenne et de la Charte sociale européenne révisée – serait un moment propice pour introduire le droit à un environnement sain dans la Charte sociale européenne révisée, par exemple sous l’article 11 relatif au droit à la protection de la santé.