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Résolution 1829 (2011) Version finale
La sélection prénatale en fonction du sexe
1. La préférence pour les fils et
la discrimination à l’égard des femmes sont tellement répandues
à travers le monde que des millions de femmes, spontanément ou sous
pression, décident de ne pas donner naissance à des filles, considérées
comme un fardeau pour leur famille et ne pouvant pas perpétuer la
lignée familiale.
2. La sélection du sexe est un problème énorme dans certains
pays d’Asie, où l’avortement sélectif au détriment des filles et
le meurtre de nouveau-nées se pratiquent depuis des décennies. La
sélection prénatale en fonction du sexe est indiquée par un écart
par rapport au sexe-ratio naturel qui est en moyenne de 105 garçons
pour 100 filles («sexe-ratio biaisé»), et s’accroît parallèlement
au nombre d’enfants dans la famille ou quand il y a des restrictions
légales ou économiques à la taille de la famille.
3. Tout laisse à penser que la sélection prénatale en fonction
du sexe ne se limite pas à l’Asie. Au cours des dernières années,
l’écart par rapport au sexe-ratio naturel à la naissance a atteint
des proportions inquiétantes dans plusieurs Etats membres du Conseil
de l’Europe. C’est notamment le cas de l’Albanie, de l’Arménie et
de l’Azerbaïdjan où le taux actuel est de 112 garçons pour 100 filles
et de la Géorgie où il est de 111 garçons pour 100 filles.
4. L’Assemblée parlementaire condamne la pratique de la sélection
prénatale en fonction du sexe en tant que phénomène qui trouve ses
racines dans une culture d’inégalité fondée sur le genre et renforce
le climat de violence à l’égard des femmes, contrairement aux valeurs
défendues par le Conseil de l’Europe.
5. Rappelant la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention
et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence
domestique (STCE no 210), l’Assemblée est d’avis que la pression
sociale et familiale exercée sur les femmes afin qu’elles ne poursuivent
pas leur grossesse en raison du sexe de l’embryon/fœtus doit être
considérée comme une forme de violence psychologique et que la pratique
des avortements forcés doit être criminalisée.
6. L’Assemblée souhaite attirer l’attention des Etats membres
du Conseil de l’Europe sur les conséquences sociales de la sélection
prénatale en fonction du sexe, notamment sur les déséquilibres démographiques
susceptibles de créer des difficultés pour les hommes dans la recherche
d’une épouse, de mener à des violations graves des droits de l’homme
telles que la prostitution forcée et la traite à des fins de mariage
ou d’exploitation sexuelle, et de contribuer à une montée de la
criminalité et des troubles sociaux.
7. Conformément à la Convention pour la protection des droits
de l’homme et de la dignité de l’être humain à l’égard des applications
de la biologie et de la médecine: Convention sur les droits de l’homme
et la biomédecine (STE no 164), l’Assemblée est d’avis que, dans
le contexte des technologies de procréation assistée telles que
le diagnostic génétique préimplantatoire, la sélection prénatale
en fonction du sexe ne devrait être employée qu’aux fins exclusives
de prévention des maladies héréditaires graves liées au sexe.
8. Au vu de ces considérations, l’Assemblée appelle les Etats
membres:
8.1. à collecter le sexe-ratio
à la naissance, à suivre son évolution et à prendre rapidement des mesures
pour s’attaquer à d’éventuels déséquilibres;
8.2. à encourager les recherches sur les sexe-ratios à la naissance
au sein de communautés spécifiques;
8.3. à collecter des données sur la sélection en fonction du
sexe dans le contexte de l’utilisation de toutes les formes de technologie
de procréation assistée;
8.4. à promouvoir la recherche sur les causes de la sélection
prénatale en fonction du sexe et ses conséquences sociales;
8.5. à encourager les autorités nationales d’éthique à élaborer
et à mettre en place des lignes directrices destinées au personnel
médical, décourageant la sélection prénatale en fonction du sexe, quelle
que soit la méthode employée, sauf si elle est justifiée par la
prévention de maladies génétiques graves liées au sexe;
8.6. à recommander que toutes les autorités publiques pertinentes
publient des lignes directrices à l’attention de tout le personnel
médical actif dans ce domaine pour que, lorsque l’information sur
le sexe du fœtus est communiquée, conformément aux réglementations
légales en vigueur, une telle information soit présentée de manière
positive, quel que soit le sexe;
8.7. à introduire des mesures législatives en vue d’interdire
la sélection du sexe dans le contexte des technologies de procréation
assistée et de l’avortement légal, sauf lorsque la prévention d’une
maladie héréditaire grave le justifie;
8.8. à faire rapport au Conseil de l’Europe en janvier 2015
sur l’effet des mesures énoncées dans le présent paragraphe.
9. Par ailleurs, l’Assemblée appelle les autorités d’Albanie,
d’Arménie, d’Azerbaïdjan et de Géorgie:
9.1. à enquêter sur les causes et les raisons des sexe-ratios
biaisés à la naissance;
9.2. à redoubler d’efforts pour relever le statut des femmes
dans la société et à assurer une mise en œuvre effective des lois
et politiques relatives à l’égalité des genres et à la non-discrimination;
9.3. à procéder à la collecte de données fiables sur les sexe-ratios
à la naissance, y compris dans diverses régions d’un même pays,
et à assurer le suivi de leur évolution;
9.4. à organiser et/ou soutenir l’organisation d’initiatives
et de campagnes de sensibilisation du public sur la sélection prénatale
en fonction du sexe et ses conséquences pernicieuses, en impliquant
les organisations internationales pertinentes, y compris le Conseil
de l’Europe;
9.5. à suivre et à analyser l’impact des campagnes, lois et
mesures, et, prioritairement, la mise en œuvre des lois et politiques
relatives à l’égalité des genres;
9.6. à organiser et à soutenir la formation du personnel médical
en ce qui concerne la sélection prénatale en fonction du sexe et
ses conséquences pernicieuses.
10. L’Assemblée encourage le Fonds des Nations Unies pour la population
(FNUAP), le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD)
et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à renforcer leurs travaux
sur la lutte contre la sélection prénatale en fonction du sexe.
11. Elle recommande par ailleurs au Comité des Nations Unies pour
l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes de se pencher
sur la question de la sélection prénatale fondée sur le sexe, sur
un plan général en tant que phénomène qui découle de la discrimination
envers les femmes et la renforce, et plus spécifiquement lors de
l’examen de la situation en Albanie, en Arménie, en Azerbaïdjan
et en Géorgie.