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Résolution 1942 (2013) Version finale

L'évaluation du partenariat pour la démocratie concernant le Parlement du Maroc

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 25 juin 2013 (22e séance) (voir Doc. 13230, rapport de la commission des questions politiques et de la démocratie, rapporteur: M. Volontè; Doc. 13244, avis de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, rapporteur: M. Xuclà, et Doc. 13245, avis de la commission sur l’égalité et la non-discrimination, rapporteure: Mme Gafarova). Texte adopté par l’Assemblée le 25 juin 2013 (22e séance).

1. Le 21 juin 2011, l’Assemblée parlementaire a adopté la Résolution 1818 (2011) sur la demande de statut de partenaire pour la démocratie auprès de l’Assemblée parlementaire présentée par le Parlement du Maroc par laquelle elle a accordé ce statut au Parlement du Maroc. Ce dernier est ainsi devenu le premier à demander et à se voir attribuer ce statut mis en place par l’Assemblée en 2009 pour développer la coopération institutionnelle avec les parlements d’Etats voisins du Conseil de l’Europe.
2. En adressant sa demande officielle pour obtenir ce statut, le Parlement du Maroc a déclaré qu’il partageait les mêmes valeurs que celles défendues par le Conseil de l’Europe et il a pris une série d’engagements politiques conformément à l’article 61.2 du Règlement de l’Assemblée. Ces engagements sont repris au paragraphe 3 de la Résolution 1818 (2011).
3. En outre, l’Assemblée a estimé, au paragraphe 8 de la résolution susmentionnée, qu’un certain nombre de mesures spécifiques étaient essentielles pour renforcer la démocratie, l’Etat de droit et le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales au Maroc.
4. L’Assemblée a en outre souligné que l’avancement des réformes est le but principal du partenariat pour la démocratie et qu’il doit constituer le critère d’évaluation de son efficacité.
5. L’Assemblée a donc décidé de faire, deux ans après l’octroi du statut de partenaire pour la démocratie au Parlement du Maroc, le bilan des progrès réalisés dans la mise en œuvre des engagements politiques et des réformes jugées essentielles.
6. L’Assemblée note avec satisfaction que le Maroc a fait un pas important sur la voie des réformes démocratiques en adoptant, en juillet 2011, la nouvelle Constitution qui consacre certains principes essentiels comme l’attachement aux droits de l’homme universellement reconnus, l’interdiction de toute discrimination, la primauté des conventions internationales ratifiées sur le droit interne, la séparation des pouvoirs et le renforcement des institutions, notamment du parlement. Cependant, l’Assemblée déplore le fait que, à ce jour, seules quelques lois organiques aient été adoptées pour mettre en œuvre certaines dispositions constitutionnelles.
7. L’Assemblée souligne l’importance de poursuivre et d’accélérer le processus de réforme par l’adoption des lois organiques nécessaires et la mise en place des structures de gouvernance prévues, de manière à réaliser pleinement le potentiel démocratique de la nouvelle Constitution.
8. L'Assemblée note que le Maroc est devenu un pays de destination pour les migrants, ce qui rend nécessaire une procédure d'asile adéquate et une politique d'intégration répondant aux normes en matière de droits de l'homme, y compris la non-discrimination, le droit au regroupement familial et les droits sociaux.
9. Cependant, l’Assemblée est préoccupée par la situation des droits de l’homme au Maroc, s’agissant en particulier du recours présumé à la torture, des traitements inhumains ou dégradants, des mauvaises conditions de détention, des violations des libertés de religion et d’expression, de l’indépendance des médias, et des libertés d’association et de réunion pacifique. Elle souligne de ce fait l’importance pour le Maroc de prendre toutes les mesures nécessaires pour répondre aux points spécifiques mentionnés au paragraphe 8 de la Résolution 1818 afin de renforcer la démocratie et le respect des droits de l’homme.
10. En ce qui concerne les engagements politiques contractés par le Parlement du Maroc lors de sa demande de statut de partenaire pour la démocratie, l’Assemblée:
10.1. note que le moratoire de fait sur la peine capitale est en place depuis 1993 mais que les tribunaux marocains continuent de prononcer des condamnations à la peine capitale. L’Assemblée se félicite de l’ampleur prise par le débat politique et public sur la nécessité d’abolir la peine de mort, y compris la formation d’un réseau parlementaire contre la peine de mort, et appelle le Parlement du Maroc à abolir la peine de mort en droit, et, entre-temps, à déclarer un moratoire de droit sur les exécutions;
10.2. note que, en dépit des irrégularités signalées, la plupart des observateurs nationaux et internationaux, y compris une commission ad hoc de l’Assemblée, ont fait un bilan positif des élections législatives anticipées de 2011. Elle invite les autorités marocaines compétentes à procéder, en étroite coopération avec la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise), à une analyse approfondie de l’organisation de ces élections tenant compte de la nécessité de remédier aux irrégularités signalées, en vue d’améliorer la législation électorale ainsi que certains aspects pratiques de l’organisation du scrutin et, d’une manière générale, de tout le processus électoral avant les prochaines élections. Elle s’attend de plus à être invitée à observer les futures élections législatives;
10.3. se félicite que la nouvelle Constitution marocaine proclame l’égalité entre les femmes et les hommes, et dispose que l’Etat œuvre à la réalisation de la parité entre les femmes et les hommes. Elle engage le parlement à accélérer, en coopération avec des experts du Conseil de l’Europe, la rédaction de la loi portant création de l’Autorité pour la parité et la lutte contre toutes formes de discrimination, prévue dans la nouvelle Constitution, et à prendre d’autres mesures pour que les femmes soient dûment représentées à tous les niveaux du pouvoir et de la société;
10.4. note que le Maroc a adhéré à la Convention européenne sur la violence et les débordements de spectateurs lors de manifestations sportives et notamment de matches de football (STE no 120) et a signé la Convention du Conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique (STCE no 211). Elle se félicite en outre de l’invitation faite au Maroc d’adhérer à une série d’autres conventions du Conseil de l’Europe ou de les signer et appelle le Parlement marocain à veiller à ce que les conditions appropriées soient réunies à cette fin. L’Assemblée encourage aussi les autorités marocaines à envisager l’adhésion à la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (STE no 126) ainsi qu’aux Conventions du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains (STCE no 197) et sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (STCE no 210);
10.5. 10.5. se félicite de la participation active de la délégation parlementaire marocaine aux travaux de l’Assemblée et de ses commissions, qui permet de tenir l’Assemblée informée de l’évolution politique du pays à la lumière des valeurs défendues par le Conseil de l’Europe;
10.6. compte que le parlement affirme son rôle en tant qu’institution politique de premier plan, plateforme de dialogue national et moteur du changement en intensifiant les travaux législatifs sur le programme de réforme, y compris dans les domaines évoqués dans la Résolution 1818 (2011), et appelle le parlement à associer plus activement la société civile au processus législatif;
10.7. invite le parlement à concrétiser son attachement général aux valeurs fondamentales de l’Etat de droit et du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales en s’attelant aux problèmes qui existent dans ces domaines, y compris ceux signalés par des organisations de la société civile et par les médias;
10.8. appelle le parlement à assurer le droit d'association et la liberté d'expression des organisations de la société civile;
10.9. appelle le parlement à protéger les droits de l'homme des réfugiés et des autres migrants en adoptant des lois sur l'asile et sur les droits sociaux des migrants, et en surveillant leur mise en œuvre.
11. L’Assemblée rappelle le paragraphe 11 de la Résolution 1818 et souligne l’urgence, pour toutes les parties concernées, ainsi que pour la communauté internationale, de poursuivre les efforts visant à trouver une solution juste, durable et mutuellement acceptable au problème du Sahara occidental, dans le cadre des Nations Unies.
12. Réitérant que les recommandations énoncées au paragraphe 8 de sa Résolution 1818 sont essentielles au renforcement de la démocratie, de l'Etat de droit et du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales au Maroc, l'Assemblée appelle les autorités marocaines à redoubler d'efforts en vue de réaliser des progrès décisifs dans ces domaines. Elle les invite à s'appuyer sur l'expertise du Conseil de l'Europe pour faciliter ce processus, que ce soit d'un point de vue technique, par l'échange de bonnes pratiques ou par le biais du soutien parlementaire.
13. L’Assemblée est très préoccupée par le fait que le Code pénal marocain sanctionne les relations sexuelles consensuelles entre personnes du même sexe par des peines allant de six mois à trois ans d’emprisonnement. Elle note que des personnes ont été récemment emprisonnées en vertu de cette législation et appelle le Parlement marocain à engager l’abrogation de cette législation dès que possible.
14. L’Assemblée rappelle que, lorsqu’elle a accordé le statut de partenaire pour la démocratie au Parlement du Maroc, elle espérait que ce statut contribuerait à renforcer la coopération entre ce pays et le Conseil de l’Europe, et avait encouragé le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, en coordination avec l’Union européenne, à mobiliser l’expertise de l’Organisation, dont celle de la Commission de Venise, en vue de contribuer à mettre pleinement en œuvre les réformes démocratiques au Maroc.
15. Dans ce contexte, l’Assemblée note avec satisfaction que, en avril 2012, le Conseil de l’Europe et les autorités marocaines ont approuvé un plan d’action intitulé «Priorités 2012-2014 pour le Maroc dans le cadre de la coopération avec le voisinage», qui comprend un certain nombre de programmes bilatéraux destinés à favoriser le processus de transition démocratique dans le pays et à contribuer à relever les défis relatifs aux droits de l’homme, à l’Etat de droit et à la démocratie, y compris en traitant certaines questions importantes soulevées dans la Résolution 1818. L’Assemblée décide de suivre sa mise en œuvre et est prête à contribuer pleinement à sa dimension parlementaire.
16. L’Assemblée note que le Conseil de l’Europe a établi une présence permanente à Rabat, qui est appelée à jouer un rôle essentiel dans la mise en œuvre des Priorités 2012-2014 pour le Maroc dans le cadre de la coopération avec le voisinage. Elle regrette que la question du statut de cette présence ne soit pas encore réglée et invite instamment les autorités marocaines compétentes à conclure sans délai un accord sur le statut de cette présence.
17. L’Assemblée appelle tous les acteurs concernés, c’est-à-dire le Conseil de l’Europe, l’Union européenne et les autorités marocaines, à envisager la prolongation des activités menées en commun conformément aux Priorités 2012-2014 pour le Maroc dans le cadre de la coopération avec le voisinage au-delà de la période de trois ans et d’étendre le champ de ces activités en vue de couvrir toutes les questions soulevées dans la Résolution 1818.
18. L’Assemblée est d’avis que l’octroi du statut de partenaire pour la démocratie au Parlement du Maroc a créé une nouvelle dynamique dans la coopération entre le Conseil de l’Europe et le Maroc, et a ainsi contribué à l’avancement des réformes.
19. L’Assemblée encourage les membres de la délégation marocaine, partenaire pour la démocratie, à intensifier leurs efforts pour accélérer la mise en œuvre du processus de réforme et faire face aux préoccupations qui demeurent par rapport à l’Etat de droit et au respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, conformément aux engagements politiques pris dans le cadre du partenariat et aux recommandations de la Résolution 1818.
20. L’Assemblée décide de continuer à passer en revue la mise en œuvre des réformes politiques au Maroc et d’offrir son assistance au Parlement du Maroc. Elle réévaluera le partenariat dans un délai de deux ans à compter de l’adoption de la présente résolution.