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Résolution 2114 (2016)

La gestion des urgences de santé publique de portée internationale

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 22 avril 2016 (18e séance) (voir Doc. 14012, rapport de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable, rapporteure: Mme Sílvia Eloïsa Bonet). Texte adopté par l’Assemblée le 22 avril 2016 (18e séance).

1. L’Europe et d’autres continents ont effectué des progrès significatifs dans le domaine de la santé ces dernières décennies. Cependant, le monde a récemment été confronté à trois situations d’urgence de portée internationale en matière de santé publique (liées aux virus H1N1, Ebola et Zika) avec un impact considérable sur des droits de l’homme essentiels, notamment le droit à la vie et le droit au meilleur état de santé susceptible d’être atteint. Dans un monde de plus en plus globalisé, les maladies sont davantage susceptibles de se propager très rapidement.
2. Aujourd’hui, les menaces de sécurité sanitaire émanent d’au moins six sources: l’émergence et la propagation de nouveaux microbes; la mondialisation des déplacements et de l’approvisionnement en denrées alimentaires; la multiplication des pathogènes pharmacorésistants; la libération, intentionnelle ou non, de pathogènes; l’acquisition, la fabrication et l’utilisation d’agents biologiques à des fins terroristes; et les catastrophes naturelles entraînant des épidémies. Ces grands risques sanitaires peuvent menacer la sécurité et la stabilité nationales et internationales, peser sur les économies et mettre les systèmes de santé sous pression.
3. Le monde est terriblement mal préparé à faire face aux crises de santé publique de portée internationale. De nouvelles méthodes de travail pour affronter ces crises sanitaires avant qu’elles ne se produisent doivent être explorées de façon urgente. L’architecture actuelle du système de santé mondial a besoin d’être renforcée en ayant au sommet une Organisation mondiale de la santé (OMS) habilitée à agir, bien gérée et responsable, et, à la base, des systèmes nationaux de santé efficaces, équitables et résistants. Les décisions politiques doivent être prises de façon à changer les systèmes de santé et à protéger efficacement la santé des personnes.
4. Tous les décideurs politiques, à tous les niveaux (y compris l’Assemblée parlementaire, l’Union européenne et l’OMS), doivent s’accorder pour améliorer l’état de préparation aux situations d’urgence au niveau international, y compris par des changements législatifs. L’Assemblée parlementaire recommande donc aux Etats membres de travailler ensemble avec ces décideurs politiques:
4.1. pour conférer à l’OMS le rôle de chef de file dans la gestion des urgences de santé publique de portée internationale, et veiller à ce qu’elle dispose des pouvoirs nécessaires et d’un financement stable pour appliquer efficacement le Règlement sanitaire international, suivre sa mise en œuvre, et renforcer son mécanisme de réponse rapide;
4.2. pour assurer une coopération, une coordination et un suivi efficaces entre l’OMS, l’Union européenne, d’autres agences spécialisées des Nations Unies, le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies, et les organisations internationales non gouvernementales pertinentes;
4.3. pour participer activement à l’Assemblée mondiale de la santé afin de garantir la bonne gouvernance de l’OMS, tout en assurant la promotion et le suivi des efforts de réforme, y compris la transparence dans la composition des panels d’experts;
4.4. pour bâtir des systèmes de santé résilients au niveau national, en mettant en place des stratégies de prévention et de gestion des grands risques sanitaires publics prévoyant notamment un système de détection précoce, la collecte de données précises, la disponibilité d’outils de diagnostic et de traitement, et un suivi continu en temps réel afin d’améliorer les résultats conformément aux recommandations internationales;
4.5. pour mettre en place une structure financière pour la gestion des risques pandémiques qui puisse débloquer des ressources suffisantes en vue de répondre aux besoins prioritaires, et pour apporter un soutien financier adéquat aux programmes de promotion de la santé publique aux niveaux local, régional, national et international;
4.6. pour promouvoir l’engagement et la mobilisation de la communauté en tant qu’éléments essentiels de tout plan d’action pour traiter les urgences internationales de santé publique;
4.7. pour développer des partenariats entre le secteur public et le secteur privé, en particulier en ce qui concerne la communication, les systèmes de gestion de l’information, la logistique, l’approvisionnement en fournitures et matériels médicaux nécessaires, et la mobilisation des personnels de santé;
4.8. pour créer et collaborer avec les équipes sanitaires spéciales internationales d’intervention rapide, constituées notamment de spécialistes de la santé publique, de médecins, d’infirmières et d’autres agents de santé communautaires, qui devraient être dûment protégés contre les risques et avoir suivi une formation spécifique, en veillant à ce qu’ils puissent être évacués en toute sécurité le cas échéant;
4.9. pour faciliter la mise à disposition des connaissances scientifiques et des informations en temps voulu pour toutes les parties prenantes, notamment grâce à un système ouvert de partage de données des études épidémiologiques, génomiques, cliniques et anthropologiques, entre les universitaires et les acteurs sur le terrain;
4.10. pour promouvoir la recherche et le développement de médicaments, de dispositifs de diagnostic et de vaccins, dans un esprit de solidarité, avec une recherche appropriée prête à être testée lors d’une épidémie, en vue de créer des procédures accélérées d’autorisation et de s’assurer que les médicaments ou vaccins ainsi mis au point sont accessibles et abordables, en particulier pour les patients vulnérables, en faisant des réserves appropriées de médicaments et de traitements selon des conditions strictes de sécurité;
4.11. en cas d’urgence de santé publique engendrée par une maladie transmissible, pour concevoir et mettre en œuvre avec soin toute mesure de contrôle de santé publique visant à diminuer les risques susceptibles de porter atteinte aux droits et aux libertés individuels (mise en quarantaine, éloignement social, contrôle aux frontières et limitation des déplacements, par exemple);
4.12. à la suite d’une urgence de santé publique, pour prévoir des mesures de réadaptation et d’aide psychologique afin d’éviter que les survivants ne continuent d’être discriminés et que les patients handicapés ne soient davantage stigmatisés.
5. L’Assemblée appelle les Etats membres à joindre leurs efforts aux actions politiques et aux changements législatifs au niveau mondial pour promouvoir la réduction à la source des risques zoonotiques potentiels, notamment les maladies transmises par la nourriture et les maladies animales graves.
6. L’Assemblée reconnaît le rôle de la Direction européenne de la qualité du médicament et soins de santé (DEQM) du Conseil de l’Europe en tant qu’organisation contribuant à la qualité des soins de santé, ainsi qu’à la promotion et à la protection de la santé humaine et animale. Elle invite ainsi ses Etats membres et ses organes directeurs à examiner la possibilité d’impliquer la DEQM dans la prévention et le traitement des menaces de santé publique internationales et la conception de stratégies de santé publique appropriées, en particulier dans le domaine des médicaments, des vaccins et des outils de diagnostic, éventuellement avec l’aide d’un prélèvement obligatoire sur les ventes et activités.
7. L’Assemblée appelle les Etats membres à souscrire à l’objectif international fixé par les Nations Unies de verser 0,7 % du revenu national brut au titre de l’aide publique au développement, en vue de renforcer les systèmes de santé de base et de permettre aux pays les plus touchés et les plus à risque de mieux résister aux futures urgences de santé publique.