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Résolution 2134 (2016)
Coopération avec la Cour pénale internationale: pour un engagement étendu et concret
1. L’Assemblée parlementaire rappelle
ses résolutions antérieures qui appelaient à la ratification du
Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI ou «la Cour»)
et à une pleine coopération avec cette dernière, ainsi qu’à la mise
en œuvre effective du Statut de Rome, notamment la Résolution 1300 (2002) sur
les risques pour l’intégrité du Statut de la Cour pénale internationale,
la Résolution 1336 (2003) sur
les menaces qui pèsent sur la Cour pénale internationale et la Résolution 1644 (2009) sur
la coopération avec la Cour pénale internationale (CPI) et l’universalité
de cette instance.
2. L’Assemblée réitère sa ferme volonté de lutter contre l’impunité
et de soutenir la CPI, première institution judiciaire indépendante
permanente dont la compétence s’étend aux personnes accusées des
«crimes les plus graves qui touchent l'ensemble de la communauté
internationale»: génocide, crimes contre l’humanité et crimes de
guerre. L’Assemblée est absolument convaincue qu’il ne saurait y
avoir un véritable respect, et une réelle promotion et protection
des droits de l’homme au titre de la Convention européenne des droits
de l’homme (STE no 5) et de la Déclaration
universelle des droits de l’homme dans les situations où règne l’impunité
des auteurs des plus graves violations du droit international –
qui englobent les violations flagrantes des droits de l’homme, équivalant
aux crimes contre l’humanité ou au génocide – et des plus graves
atteintes au droit international humanitaire équivalant à des crimes
de guerre. De même, l’impunité des auteurs de crimes d’agression
– qui caractérise tous ceux qui ont perpétré des guerres d’agression
après la seconde guerre mondiale – n’est en aucun cas propice à
la réalisation de sociétés pacifiques dans lesquelles les droits de
l’homme fondamentaux sont respectés.
3. L’Assemblée considère que la ratification universelle du Statut
de Rome de la CPI est essentielle pour éviter le renvoi, par le
Conseil de sécurité des Nations Unies, de situations à la Cour,
car ces décisions risquent souvent de présenter deux poids, deux
mesures et un caractère politisé. Elle observe que, depuis son adoption en
1998, le Statut de Rome a été ratifié par 124 Etats dans le monde.
Malheureusement, 6 Etats membres du Conseil de l’Europe (Arménie,
Azerbaïdjan, Monaco, Fédération de Russie, Turquie et Ukraine),
1 Etat observateur du Conseil de l’Europe (Etats-Unis), 1 Etat doté
du statut d’observateur auprès de l’Assemblée (Israël), et 2 Etats
dont les parlements jouissent du statut de partenaire pour la démocratie
de l’Assemblée (Kirghizistan et Maroc) ne l’ont pas encore ratifié.
L’Assemblée se félicite des modifications apportées à la Constitution
ukrainienne, qui ont finalement été adoptées par le Parlement ukrainien
et permettent la ratification du Statut de Rome. Cependant, l’Assemblée
est préoccupée par le fait que ces modifications n’entreront en
vigueur que dans trois ans, et non dès que possible, comme elle
l’avait recommandé.
4. L’Assemblée se félicite du fait que, en 2010, les Etats parties
au Statut de Rome ont adopté deux amendements à ce dernier («les
amendements de Kampala»): le premier incrimine l’emploi de certaines
armes en situation de conflit armé non international, en l’inscrivant
dans le champ de la définition des «crimes de guerre», et le deuxième
intègre la définition du crime d’agression et les conditions de
l’exercice de la compétence de la CPI pour connaître de ce crime.
L’Assemblée observe qu’à ce jour près de la moitié des Etats membres
du Conseil de l’Europe ont ratifié ces amendements. Parmi les Etats
déjà parties au Statut de Rome, à l’heure actuelle 17 Etats membres
du Conseil de l’Europe (Albanie, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie, Danemark,
France, Grèce, Hongrie, Irlande, Italie, République de Moldova,
Monténégro, Norvège, Portugal, Roumanie, Royaume-Uni, Serbie et
Suède), 3 Etats observateurs du Conseil de l’Europe (Canada, Japon
et Mexique) et 1 Etat dont le parlement jouit du statut de partenaire
pour la démocratie auprès de l’Assemblée (Jordanie) n’ont pas encore
ratifié l’amendement de Kampala sur le crime d’agression. De plus,
parmi les Etats déjà parties au Statut de Rome, à ce jour, 17 Etats
membres du Conseil de l’Europe (Albanie, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie,
Danemark, France, Grèce, Hongrie, Irlande, Islande, Italie, République
de Moldova, Monténégro, Portugal, Roumanie, Royaume-Uni, Serbie
et Suède), trois Etats observateurs (Canada, Japon et Mexique) et
2 Etats dont les parlements jouissent du statut de partenaire pour
la démocratie auprès de l’Assemblée (Jordanie et Palestine) n’ont
pas encore ratifié l’amendement de Kampala sur les crimes de guerre.
5. L’Assemblée rappelle également l’importance de la ratification
de l’Accord sur les privilèges et immunités de la CPI, qui facilite
le fonctionnement indépendant de la Cour en octroyant à ses agents
le statut juridique de fonctionnaires d’une institution judiciaire
internationale, indispensable à la conduite efficace des enquêtes,
et invite instamment les Etats qui ne l’ont pas encore fait à ratifier
ou à adhérer à ce traité. A l’heure actuelle, parmi les Etats déjà
parties au Statut de Rome, 2 Etats membres du Conseil de l’Europe
(République de Moldova et Saint-Marin), 1 Etat observateur (Japon)
et 1 Etat dont le parlement jouit du statut de partenaire pour la
démocratie auprès de l’Assemblée (Jordanie) n’ont pas adhéré à cet
instrument.
6. L’Assemblée rappelle que la CPI repose sur le principe de
complémentarité, en exerçant uniquement sa compétence en dernier
ressort. C’est la raison pour laquelle les Etats parties au Statut
de Rome devraient adopter une législation nationale pour mettre
pleinement en œuvre le statut, surtout en incorporant les crimes et
les principes généraux du droit qui y figurent dans leur système
de droit pénal national. L’Assemblée invite instamment les Etats
qui ne l’ont pas encore fait à mettre pleinement en œuvre le Statut
de Rome. A ce jour, parmi les Etats déjà parties au Statut de Rome,
4 Etats membres du Conseil de l’Europe (Albanie, Hongrie, Italie
et Saint-Marin) et 2 Etats dont le parlement jouit du statut de
partenaire pour la démocratie de l’Assemblée (Jordanie et Palestine)
n’ont pas pleinement intégré ces crimes et principes généraux du
droit dans leur système national de droit pénal.
7. L’Assemblée souligne également l’importance de la coopération
des Etats avec la CPI pour mener des enquêtes sur des crimes qui
relèvent de sa compétence et engager des poursuites, notamment en
ce qui concerne l’arrestation et la reddition des suspects ou des
accusés, la saisie des actifs du crime, et la collecte et la conservation
des éléments de preuve. A cet égard, l’Assemblée appelle les Etats
membres du Conseil de l’Europe qui ne l’ont pas encore fait à mettre
en place dans leur législation nationale un mécanisme de coopération
efficace avec la CPI, ainsi qu’à conclure des «accords de coopération
volontaire» avec la CPI (exécution des peines prononcées dans les
arrêts de la CPI, remise en liberté provisoire et définitive, protection et
réinstallation des témoins). A ce jour, parmi les Etats déjà parties
au Statut de Rome, 5 Etats membres du Conseil de l’Europe (Albanie,
Andorre, Hongrie, République de Moldova et Saint-Marin), 1 Etat
observateur (Mexique) et 2 Etats dont le parlement jouit du statut
de partenaire pour la démocratie de l’Assemblée (Jordanie et Palestine)
n’ont pas établi dans leur législation nationale de mécanisme de
coopération efficace avec la CPI.
8. L’Assemblée rappelle sa Résolution
2091 (2016) sur les combattants étrangers en Syrie et
en Irak, et le témoignage de Nadia Murad, lauréate de l’édition
2016 du prix des droits de l’homme Václav Havel. L’Assemblée presse
une nouvelle fois les Etats membres de remplir leur obligation positive,
en droit international, de prévenir le génocide en cours en Syrie
et en Irak, et de garantir la poursuite des auteurs d’actes de génocide
et d’autres graves crimes de guerre contre les Yézidis, les chrétiens
et les autres minorités religieuses de la région, surtout quand
les responsables de ces actes sont des citoyens d’Etats membres
et/ou qu’ils arrivent sur le sol de l’Europe. L’Assemblée déplore
vivement que pratiquement aucune poursuite n’ait été engagée à l’encontre
de ces auteurs de génocide et de crimes contre l’humanité.
9. L’Assemblée se félicite des travaux de l’Action mondiale des
parlementaires, un réseau international non partisan et à but non
lucratif de législateurs engagés, qui informe et mobilise les parlementaires
de toutes les régions du monde pour promouvoir les droits de l’homme
et l’Etat de droit. Grâce à sa campagne en faveur de l’universalité
et du caractère effectif du Statut de Rome, elle a contribué à 77
ratifications sur 124 et dispensé une assistance technique à la
pleine mise en œuvre du Statut de Rome à plusieurs de ses membres. L’Assemblée
souligne également le rôle déterminant joué par la société civile,
en particulier la Coalition pour la Cour pénale internationale,
qui rassemble quelque 2 500 organisations non gouvernementales (ONG) issues
de plus de 150 pays, à laquelle un hommage appuyé doit être rendu.
10. L’Assemblée constate avec préoccupation que l’intégrité et
l’indépendance de la CPI ont été remises en question ces derniers
temps par certains Etats membres de l’Union africaine. Elle considère
qu’il convient de mettre un terme à toute tentative visant à porter
atteinte à l’autorité de la Cour en sa qualité d’institution judiciaire
internationale permanente et indépendante.
11. L’Assemblée invite par conséquent instamment les Etats membres
du Conseil de l’Europe, ses Etats observateurs, les Etats observateurs
de l’Assemblée et les Etats dont les parlements jouissent du statut
de partenaire pour la démocratie de l’Assemblée à réaffirmer leur
engagement en faveur de la CPI:
11.1. en
signant et en ratifiant sans plus tarder le Statut de Rome, les
amendements de Kampala et l’Accord sur les privilèges et immunités
de la CPI, s’ils ne l’ont pas encore fait;
11.2. en adoptant une législation effective qui tienne compte
du Statut de Rome, notamment en intégrant les crimes et les principes
généraux du droit qui y sont définis dans leur législation pénale nationale
et en établissant des procédures qui permettent une coopération
pleine et effective avec la Cour;
11.3. en coopérant pleinement avec la CPI et en lui dispensant
une assistance judiciaire conforme aux obligations qui découlent
du Statut de Rome, par exemple en désignant un correspondant chargé
de la coopération avec la CPI;
11.4. en concluant des accords de coopération avec la Cour pour
faciliter les enquêtes et les poursuites relatives aux crimes qui
relèvent de sa compétence, ainsi que l’exécution des peines prononcées
dans ses arrêts, la protection et la réinstallation des témoins,
et la remise en liberté provisoire et définitive des personnes;
11.5. en dispensant une entraide judiciaire dans les matières
qui relèvent du champ d’application du Statut de Rome;
11.6. en octroyant à la CPI des ressources budgétaires effectives
qui lui permettent d’accomplir sa mission de manière indépendante
et efficace, tout en respectant l’autonomie dont jouit le Bureau
du procureur pour déterminer les situations qui méritent l’ouverture
d’une enquête et l’engagement de poursuites dans le cadre du Statut
de Rome, et en évitant toute ingérence dans son mandat par des pressions
budgétaires;
11.7. en organisant la formation des juges, des procureurs,
des avocats et des membres des forces de police et des forces armées
sur les questions relatives à la mise en œuvre du Statut de Rome;
11.8. en organisant des séminaires et des conférences avec les
parlementaires, en collaboration avec les réseaux parlementaires
comme l’Action mondiale des parlementaires, afin de les sensibiliser
et de faire naître une volonté politique, ainsi que pour donner
aux parlementaires nationaux et à leur personnel les outils indispensables
aux avancées du processus de ratification du Statut de Rome, des amendements
de Kampala et de l’Accord
sur les privilèges et immunités, et à la pleine mise
en œuvre de ces traités internationaux;
11.9. en prenant les mesures de sensibilisation qui s’imposent
pour que la CPI soit mieux connue du grand public;
11.10. en accordant un soutien politique et financier aux organisations
non gouvernementales qui luttent contre l’impunité, qui promeuvent
l’universalité et le caractère effectif du système du Statut de
Rome, et le respect par les Etats des obligations nées de ce statut,
et qui dispensent une assistance aux victimes des crimes les plus
graves à l’échelle internationale;
11.11. en prenant toute autre mesure visant à protéger l’intégrité
et l’indépendance de la CPI, surtout à l’égard de la politique menée
par les autres organisations régionales, comme l’Union africaine;
11.12. en versant des contributions financières appréciables
au Fonds au profit des victimes de la CPI, soulignant ainsi que
la CPI exerce une justice qui n’est pas seulement répressive et
préventive, mais également réparatrice.
12. L’Assemblée se félicite du renvoi à la CPI, par le Conseil
de sécurité des Nations Unies, de situations comme celles du Darfour
(Soudan) ou de la Libye. Elle déplore que les situations de la Syrie
et de l’Irak n’aient pas encore été renvoyées à la CPI par le Conseil
de sécurité des Nations Unies. Elle appelle le Conseil de sécurité
des Nations Unies à exercer pleinement ses responsabilités pour
exécuter les décisions et les ordonnances de la Cour, et à lui fournir
des ressources financières suffisantes pour que cette dernière accomplisse
sa mission.
13. L’Assemblée appelle les Etats membres et les Etats observateurs
qui sont membres du Conseil de sécurité des Nations Unies, c’est-à-dire
la Russie, le Royaume-Uni, la France, les Etats-Unis, l’Espagne, l’Ukraine
et le Japon, à collaborer et, dans un délai de deux mois, à présenter
devant le Conseil de sécurité des Nations Unies une résolution garantissant
des poursuites efficaces à l’encontre des responsables d’actes de
génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre commis
en Syrie et en Irak.
14. L’Assemblée appelle également la procureure de la CPI à reconsidérer
sa décision d’avril 2015 de ne pas procéder à l’examen préliminaire
des crimes commis par les combattants étrangers de Daech, à la lumière des
preuves nouvelles et accablantes dont elle dispose, et de rapidement
reconnaître sa compétence à l’égard des auteurs de génocide, de
crimes contre l’humanité et de crimes de guerre commis en Syrie
et en Irak, dans toute la mesure du possible.