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Résolution 2203 (2018)

L'évolution de la procédure de suivi de l'Assemblée (janvier-décembre 2017) et l’examen périodique du respect des obligations de l’Estonie, de la Grèce, de la Hongrie et de l’Irlande

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 25 janvier 2018 (8e séance) (voir Doc. 14450 Partie 1, Partie 2, Partie 3, Partie 4 et Partie 5, rapport de la commission pour le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil de l'Europe (commission de suivi), rapporteur: M. Cezar Florin Preda). Texte adopté par l’Assemblée le 25 janvier 2018 (8e séance).

1. L'Assemblée parlementaire reconnaît le travail accompli par la commission pour le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil de l'Europe (commission de suivi) afin de remplir son mandat tel qu'il est défini dans la Résolution 1115 (1997) sur la création d'une commission de l'Assemblée pour le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil de l'Europe (commission de suivi) (telle que modifiée par la Résolution 1431 (2005), la Résolution 1515 (2006), la Résolution 1698 (2009), la Résolution 1710 (2010), la Résolution 1936 (2013) et la Résolution 2018 (2014)). Elle félicite la commission de son action dans l'accompagnement des 10 pays faisant l'objet d'une procédure de suivi stricto sensu (Albanie, Arménie, Azerbaïdjan, Bosnie-Herzégovine, Géorgie, République de Moldova, Fédération de Russie, Serbie, Turquie et Ukraine) et des trois pays engagés dans un dialogue postsuivi (Bulgarie, Monténégro et «l'ex-République yougoslave de Macédoine») dans leurs efforts pour satisfaire pleinement aux obligations et aux engagements qu’ils ont contractés lors de leur adhésion au Conseil de l'Europe, ainsi que dans le suivi des obligations découlant de l'adhésion de tous les autres États membres au moyen de son processus d'examen périodique.
2. L'Assemblée déplore vivement qu’une fois de plus, en 2017, les corapporteurs de la procédure de suivi n'aient pu se rendre en Fédération de Russie en raison du boycott par la délégation russe du travail de l'Assemblée. Elle rappelle à cet égard que la coopération avec la procédure de suivi est un engagement explicite contracté par le pays lors de son adhésion.
3. L’Assemblée rappelle que, à la lumière des événements actuels en Turquie, et des préoccupations exprimées à cet égard, elle a décidé de rouvrir la procédure de suivi stricto sensu à l’égard de la Turquie afin d’intensifier sa coopération avec les autorités turques et toutes les parties prenantes du pays.
4. L’Assemblée félicite la sous-commission sur les conflits entre les États membres du Conseil de l'Europe pour les travaux qu’elle a entrepris.
5. L'Assemblée se félicite des évolutions positives et des progrès réalisés pendant la période considérée dans un certain nombre de pays faisant l'objet d'une procédure de suivi ou engagés dans un dialogue post-suivi, à savoir:
5.1. en Albanie, la tenue d’élections législatives conformes aux normes européennes à la suite de l’accord intervenu entre les principales forces politiques, ainsi que les efforts constants pour réformer le système judiciaire et garantir l’intégrité de toutes les personnes nommées ou élues à des fonctions publiques;
5.2. en Arménie, l’amélioration du climat politique et les réformes considérables, notamment dans le système judiciaire, pour mettre en œuvre la nouvelle Constitution;
5.3. en Azerbaïdjan, la libération récente de personnes qualifiées de «prisonniers politiques» ou de «prisonniers de conscience», et la poursuite du dialogue avec les autorités du pays dans le cadre de la procédure de suivi de l’Assemblée;
5.4. en Géorgie, l’étroite collaboration avec la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) pendant la rédaction des amendements à la Constitution, qui améliorent globalement l’ordre constitutionnel du pays;
5.5. en Serbie, l’engagement du nouveau gouvernement de donner suite aux préoccupations de l’Assemblée concernant la réforme de l’appareil judiciaire et du paysage médiatique;
5.6. en Ukraine, l’ambitieux programme de réformes lancé à la suite de la «Révolution de la dignité» malgré un contexte difficile résultant de l’agression russe dans l’est de l’Ukraine et de l’annexion illégale de la Crimée;
5.7. en Bulgarie, les amendements à la législation électorale, qui ont amélioré le climat lors des élections législatives de 2017, ainsi que les nombreux changements positifs apportés au système judiciaire du pays grâce aux amendements à la loi sur le système judiciaire;
5.8. au Monténégro, les efforts pour réformer l’appareil judiciaire et le système de la justice pour se conformer aux recommandations, notamment celles de l’Assemblée;
5.9. dans «l’ex-République yougoslave de Macédoine», la fin de la crise politique qui, depuis avril 2014, dominait l’agenda politique du pays;
5.10. en Turquie, la création de la commission d’enquête sur les mesures de l’État d’urgence, dont l’Assemblée attend qu’elle offre un recours effectif aux fonctionnaires révoqués, ainsi qu’aux associations et aux médias contraints de fermer, en vertu des décrets d’urgence.
6. Parallèlement, l’Assemblée s’inquiète des évolutions observées et des lacunes qui subsistent dans un certain nombre de pays soumis à une procédure de suivi ou engagés dans un dialogue postsuivi. Ces lacunes compromettent la consolidation démocratique dans ces pays et sont contraires aux obligations et engagements pris lors de leur adhésion, à savoir:
6.1. en Albanie, la polarisation persistante entre les principaux partis politiques ainsi que le boycott parlementaire du principal parti d’opposition, qui ont affecté le programme de réformes et engendré des retards considérables dans la mise en œuvre d’importantes réformes, y compris du système judiciaire;
6.2. en Arménie, les allégations d'achat massif de voix et les rapports d’utilisation abusive des moyens administratifs lors des élections législatives de 2017; les fréquents rapports de recours disproportionné et excessif à la force par la police, surtout lors des protestations et des manifestations, doublés d’un sentiment d’impunité pour de tels actes;
6.3. en Azerbaïdjan, le manque d’indépendance et d’impartialité du système judiciaire, et les ingérences de l’exécutif dans celui-ci; la répression contre les médias indépendants; l’absence de mécanisme indépendant, impartial et effectif d’enquête dans les allégations de mauvais traitements infligés par les forces de l’ordre;
6.4. en Bosnie-Herzégovine, le manquement des autorités de Bosnie-Herzégovine et de sa délégation parlementaire à leur devoir de présenter des observations sur l’avant-projet de rapport sur le respect des obligations et engagements de la Bosnie-Herzégovine, en violation de l’obligation pour le pays de coopérer avec la commission de suivi; la non-exécution systématique, depuis 2009, des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme concernant les restrictions, pour des motifs ethniques et de résidence, au droit d’éligibilité; le manquement persistant à l’obligation de remédier à la ségrégation ethnique et religieuse dans l’éducation;
6.5. en Géorgie, le report, après les prochaines élections législatives, de l’instauration dans le pays d’un système électoral entièrement à la proportionnelle, ce qui compromettait les chances de parvenir à un large consensus politique sur les amendements à la Constitution;
6.6. dans la Fédération de Russie, l’agression militaire contre l’Ukraine, qui se poursuit dans le Donbass, et l’occupation illégale de la République autonome de Crimée et de la ville de Sébastopol; la décision de la Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie de ne pas verser aux actionnaires de Yukos les dommages octroyés par la Cour européenne des droits de l'homme, en violation de l’obligation pour tout État membre du Conseil de l’Europe de se conformer inconditionnellement aux décisions de la Cour; la qualification d’organisation extrémiste prononcée par la Cour suprême de Russie à l’encontre des Témoins de Jéhovah, qui illustre le recours abusif aux lois contre l’extrémisme pour restreindre la liberté d'expression et de réunion, ainsi que la liberté de culte, en Fédération de Russie; les rapports d’enlèvements, de détentions illicites, de torture et de meurtres d’hommes en République tchétchène au seul motif de leur orientation sexuelle et de leur identité de genre, et les violations persistantes des droits de l’homme en Crimée occupée;
6.7. en Serbie, le manque d’application des lois existantes sur les médias, qui nuit à l’équilibre de la couverture médiatique, notamment en période électorale;
6.8. en Turquie, l’affaiblissement de la séparation des pouvoirs et de l’indépendance de l’appareil judiciaire, ainsi que l’étiolement de l’équilibre des pouvoirs à la suite de l’adoption d’amendements à la Constitution non conformes aux normes européennes et dans des conditions qui soulèvent des interrogations sur la nature démocratique du processus; la levée de l’immunité de parlementaires et leur placement en détention provisoire; l’impact disproportionné des décrets-lois d’urgence – y compris les révocations massives de fonctionnaires, de juges, de procureurs et d’universitaires, et la fermeture de médias et d’organisations non gouvernementales (ONG) – ainsi que l’accès limité à des recours devant les instances judiciaires; les violations répétées de la liberté d’expression et des médias, et la situation des administrations locales dans le sud-est de la Turquie, qui provoquent une grave détérioration du fonctionnement des institutions démocratiques;
6.9. en Ukraine, le durcissement du discours politique à la suite des événements de l'Euromaïdan et de l’agression russe dans l’est de l’Ukraine, ainsi que la polarisation du paysage médiatique, qui se traduisent par des attaques inadmissibles contre des journalistes et des médias; le déséquilibre entre la langue officielle et les langues des minorités nationales dans la nouvelle loi ukrainienne sur l’éducation, qui limite les droits par rapport à la législation antérieure; la corruption généralisée qui sape la confiance du public dans l’ensemble du système politique et judiciaire; l’absence de composition équilibrée de la commission électorale centrale conformément aux recommandations du Conseil de l’Europe, grâce à une représentation proportionnelle de tous les groupes politiques parlementaires;
6.10. en Bulgarie, la faiblesse de la structure qui permet de demander des comptes au procureur général et le recours fréquent à un discours raciste et xénophobe pendant la campagne électorale, ainsi que les allégations d’achats de voix et de vote organisé, surtout parmi les groupes vulnérables de la société bulgare, pendant les élections législatives de 2017;
6.11. au Monténégro, la poursuite du boycott du parlement par l’opposition, qui entrave les réformes; les inquiétudes sur l’état de la liberté d'expression et de la liberté des médias dans le pays;
6.12. dans «l’ex-République yougoslave de Macédoine», l’assaut du parlement par des manifestants et les divisions ethniques persistantes dans le pays.
7. En conséquence, l’Assemblée demande instamment à tous les pays soumis à une procédure de suivi ou engagés dans un dialogue postsuivi d’intensifier leurs efforts pour honorer pleinement l’ensemble des obligations et engagements qu’ils ont contractés lors de leur adhésion au Conseil de l’Europe. Elle appelle notamment:
7.1. les autorités albanaises et toutes les forces politiques du pays à surmonter la polarisation politique et à garantir l’application intégrale du processus d’évaluation des juges et la mise en œuvre de la loi de dépénalisation;
7.2. toutes les forces politiques d’Arménie à continuer d’améliorer le climat politique du pays par le dialogue et la coopération; les autorités arméniennes à dûment enquêter sur toutes les allégations de recours disproportionné et excessif à la force par la police, et à mettre en place un mécanisme de plainte contre la police qui soit réellement indépendant, conformément aux recommandations faites, notamment, par l’Assemblée; et à légiférer pour effectivement combattre l’achat de voix et le détournement des ressources administratives lors des élections;
7.3. les autorités azerbaïdjanaises à libérer les derniers «prisonniers politiques» ou «prisonniers de conscience» et à modifier le cadre juridique qui régit les ONG afin de le mettre en conformité avec les normes européennes, et à rapidement assurer la pleine exécution des décisions de la Cour européenne des droits de l’homme, notamment en faveur de Ilgar Mammadov, prenant note de la décision du Comité des Ministres de saisir la Cour, conformément à l’article 46.4 de la Convention, de la question de savoir si la République d'Azerbaïdjan ne s’est pas conformée à son obligation en vertu de l’article 46.1;
7.4. les autorités géorgiennes à envisager la mise en œuvre de la réforme du système électoral avant les prochaines élections législatives et à pleinement appliquer les recommandations de la Commission de Venise énoncées dans son avis sur les amendements à la Constitution;
7.5. les autorités moldaves à pleinement appliquer les recommandations énoncées par la Commission de Venise dans l’avis qu’elle rendra prochainement sur le cadre juridique régissant le financement des partis politiques et des campagnes, ainsi que les récents amendements à la législation électorale de la République de Moldova;
7.6. les autorités de la Fédération de Russie à mettre en œuvre toutes les résolutions de l’Assemblée relatives à l’agression militaire contre l’Ukraine; à cesser l’application abusive des lois contre l’extrémisme pour restreindre la liberté d’expression et de réunion en Fédération de Russie; à pleinement reconnaître la primauté des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme et à en assurer l’exécution de manière inconditionnelle; à mener des enquêtes exhaustives sur les détentions illégales, la torture et les meurtres d’hommes en République tchétchène au motif de leur orientation sexuelle et de leur identité de genre, à faire rendre des comptes aux auteurs de ces actes ignobles et à prendre des mesures efficaces pour protéger la vie, la liberté et la sécurité des homosexuels et des bisexuels dans toute la Fédération de Russie;
7.7. les autorités serbes à pleinement appliquer les recommandations restantes de l’Assemblée relatives au paysage médiatique; à réexaminer les dispositions de la Constitution concernant l’appareil judiciaire, et à mettre en œuvre les réformes nécessaires pour dépolitiser les institutions judiciaires, renforcer l’État de droit et améliorer la confiance dans les institutions de l’État;
7.8. les autorités turques à répondre pleinement aux préoccupations et à appliquer les recommandations contenues dans les avis de la Commission de Venise concernant les décrets-lois d'urgence; à faire cesser les pressions sur les journalistes, les défenseurs des droits de l’homme et les politiciens de l’opposition;
7.9. les autorités ukrainiennes à pleinement appliquer les recommandations de la Commission de Venise dans son avis sur la nouvelle loi relative à l'éducation; à accélérer les réformes visant à combattre la corruption généralisée dans le pays et à veiller à ce que ces réformes produisent des résultats tangibles et concrets;
7.10. les autorités bulgares à appliquer les recommandations de la Commission de Venise dans ses avis sur la loi relative au système judiciaire et sur le Code électoral, et à renforcer l’obligation du procureur général de rendre des comptes;
7.11. les autorités du Monténégro à pleinement appliquer les lois visant à garantir une indépendance et un professionnalisme véritables du système judiciaire, et à doter l’agence de prévention de la corruption des moyens nécessaires à l’accomplissement efficace de son mandat; à renforcer le bureau du procureur spécial et son unité de police spéciale pour qu’ils puissent faire face au nombre élevé d’affaires à traiter; l’opposition à mettre un terme à son boycott du parlement et à s’engager dans le processus de réformes, y compris du cadre électoral en vue de l’élection présidentielle de 2018;
7.12. les autorités de «l’ex-République yougoslave de Macédoine» et toutes les forces politiques à remédier à l’actuelle polarisation et aux tensions ethniques dans le pays, à dépolitiser les institutions de l’État et les organes de régulation, et à garantir l’efficacité, l’impartialité et l’indépendance du système judiciaire.
8. S’agissant de la préparation du rapport sur le fonctionnement des institutions démocratiques en Pologne, l’Assemblée prend acte de la mission des corapporteurs à Varsovie. Dans ce contexte, l’Assemblée appelle les autorités polonaises à veiller à ce que les actuelles réformes, notamment celle du système judiciaire, soient pleinement conformes aux normes européennes. À cet égard, l’Assemblée invite les autorités polonaises à continuer de demander des avis à la Commission de Venise sur de telles réformes et à donner suite aux recommandations et préoccupations qui y sont formulées.
9. L'Assemblée réaffirme l'importance de la procédure de suivi parlementaire et des travaux de la commission de suivi dans les processus de démocratisation et de renforcement des institutions dans tous les États membres du Conseil de l'Europe. De ce point de vue, elle salue tout spécialement l’examen périodique du respect des obligations contractées lors de l’adhésion au Conseil de l’Europe par des pays ne faisant pas l’objet d’une procédure de suivi stricto sensu et non engagés dans un dialogue postsuivi avec l’Assemblée.
10. L'Assemblée prend note des rapports de l'examen périodique sur le respect des obligations découlant de l'adhésion au Conseil de l'Europe à l’égard de l’Estonie, de la Grèce, de la Hongrie et de l’Irlande, qui sont présentés dans le cadre du rapport sur l’évolution de la procédure de suivi de l’Assemblée (janvier-décembre 2017). Elle approuve les constats et conclusions de ces rapports d’examen périodique et encourage les autorités respectives à en mettre en œuvre les recommandations. En particulier, l’Assemblée:
10.1. concernant l’Estonie:
10.1.1. salue l’extraordinaire politique de gouvernance électronique de l’Estonie et les réalisations considérables en matière de transparence, d’accessibilité du gouvernement, et ses compétences en cyberdéfense;
10.1.2. salue le respect par l’Estonie des principes de l’État de droit et félicite le pays pour son classement selon l’Indice de perception de la corruption, qui révèle que la corruption est peu répandue parmi la population. Afin de renforcer cette perception du public, l’Assemblée encourage les autorités à mettre en œuvre sans tarder les recommandations en suspens du Groupe d'États contre la corruption (GRECO);
10.1.3. consciente du contexte historique spécifique de l’Estonie, et saluant les efforts considérables consentis par les autorités estoniennes à l’égard de la situation des apatrides/«personnes de nationalité indéterminée», l’Assemblée recommande de prendre des mesures supplémentaires pour réduire leur nombre en facilitant l’accès à la citoyenneté pour les résidents de longue durée;
10.1.4. encourage les autorités à continuer de promouvoir l’utilisation des langues minoritaires et appelle l’Estonie à signer et à ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires (STE no 148);
10.1.5. tout en saluant les efforts des autorités pour intégrer la minorité russe, recommande des mesures supplémentaires pour faire diminuer le chômage et l’exclusion sociale parmi les minorités ethniques du pays;
10.1.6. invite le Parlement estonien à ratifier le Protocole no 12 à la Convention européenne des droits de l'homme (STE no 177) et encourage les autorités à mettre en œuvre les recommandations en suspens de la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (ECRI) sur le discours raciste et la discrimination à l’encontre des Roms;
10.2. concernant la Grèce:
10.2.1. prend acte des retombées négatives de la récession et des politiques d’austérité sur les droits sociaux de la population, notamment ceux des groupes les plus défavorisés;
10.2.2. à cet égard, se félicite grandement de la ratification de la Charte sociale européenne (révisée) (STE no 163) en 2016 et encourage les autorités à faire une déclaration autorisant les ONG nationales à présenter des réclamations collectives;
10.2.3. insiste sur le fait que la corruption est une des causes profondes qui ont contribué à la crise économique et à la dette souveraine du pays. L’Assemblée félicite par conséquent les autorités grecques pour les mesures prises pour garantir la transparence du financement des partis politiques et lutter contre la corruption, et les invite à pleinement mettre en œuvre les recommandations du GRECO;
10.2.4. rappelle que la Grèce est confrontée, ces dernières années, à une crise migratoire majeure, dont elle a dû assumer une part importante de la charge financière, ce qui doit être salué. Elle prie toutefois les autorités grecques de faire cesser la pratique de la rétention des enfants immigrants et d’intensifier les efforts pour améliorer les conditions de vie et l’intégration des réfugiés et des migrants, dans le respect de la Résolution 2174 (2017) de l’Assemblée sur les répercussions sur les droits de l’homme de la réponse européenne aux migrations de transit en Méditerranée, et des recommandations du Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l’Europe et du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT);
10.2.5. constate avec regret que la conjonction de la crise économique et de celle de l’immigration offre un terreau fertile aux idées extrémistes en Grèce. L’Assemblée prie donc instamment les autorités grecques de lutter résolument contre le racisme et l’intolérance, de garantir l’application effective des lois contre les crimes de haine et de mettre en œuvre les recommandations de l’ECRI et du Commissaire aux droits de l'homme. Elle appelle le Parlement grec à ratifier sans tarder le Protocole no 12 à la Convention européenne des droits de l’homme;
10.2.6. concernant les droits des minorités, demande à nouveau à la Grèce de ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires et la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales (STE no 157), et de pleinement exécuter les arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme pour renforcer les droits des minorités;
10.2.7. appelle les autorités grecques à rendre le système judiciaire plus transparent et plus responsable, conformément aux demandes du GRECO;
10.2.8. reste préoccupée par le problème persistant des mauvais traitements infligés par la police, comme le rappellent le CPT et le Commissaire aux droits de l'homme, et prie instamment les autorités d’agir résolument et de renforcer les mesures préventives pour résoudre ce problème structurel, en créant notamment un organe efficace et pleinement indépendant de plaintes contre la police;
10.2.9. encourage les autorités à continuer d’améliorer l’indépendance des médias et les prie instamment de continuer à s’abstenir de toute ingérence politique indue dans le paysage médiatique;
10.2.10. appelle le Parlement grec à ratifier la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (STCE no 210), signée en 2011, afin de lutter contre la violence à l’égard des femmes, un problème qui reste grave et largement répandu dans la société grecque;
10.2.11. se félicite de l’entrée en vigueur de la loi 4511/2018, qui abolit l’application obligatoire de la charia dans toutes les affaires civiles et d’héritage de la minorité musulmane de Thrace; cette loi dispose que le droit civil grec s’applique et que les juridictions civiles grecques sont compétentes, sauf si toutes les parties concernées en décident explicitement autrement;
10.3. concernant la Hongrie:
10.3.1. se félicite des déclarations répétées des autorités hongroises réaffirmant leur attachement indéfectible à l’Europe et à sa communauté de valeurs, mais s’inquiète des réformes qui ont soulevé des interrogations en raison des tentatives de prise de contrôle politique sur la plupart des institutions essentielles tout en affaiblissant l’équilibre des pouvoirs;
10.3.2. se déclare à nouveau préoccupée par les récents événements qui indiquent une stigmatisation croissante des ONG, notamment à la suite de l’adoption récente de la loi sur la transparence des organisations recevant des fonds étrangers, qui constitue une atteinte disproportionnée et inutile à la liberté d’expression et d’association, et appelle à modifier cette loi pour la rendre conforme aux normes européennes;
10.3.3. prie instamment les autorités hongroises d’inverser le recul du pays dans les évaluations de la liberté des médias et de faire cesser la forte intervention des politiques dans le marché hongrois des médias. À cet égard, l’Assemblée appelle les autorités hongroises à dépénaliser la diffamation et à prendre des mesures appropriées pour améliorer la transparence et la responsabilité en matière de droit d’accès à l’information;
10.3.4. s’agissant du système judiciaire, note les mesures positives prises pour renforcer le rôle d’instance de contrôle joué par le Conseil national de la magistrature; encourage les autorités à poursuivre ces réformes, y compris par l’adoption de mesures limitant le risque de mesures arbitraires prises par le président de l'Office national de la justice et renforçant l’indépendance du parquet;
10.3.5. appelle les autorités à s’attaquer au problème de la surpopulation carcérale, dans le respect des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme et des recommandations du CPT, et, dans ce contexte, prie instamment les autorités d’intensifier leurs efforts pour promouvoir les peines de substitution non privatives de liberté et réduire au minimum le recours à la détention provisoire;
10.3.6. salue les efforts des autorités en matière de politique des langues minoritaires et l’amélioration des lois de lutte contre la discrimination;
10.3.7. tout en se félicitant des progrès législatifs et pratiques dans la lutte contre les crimes de haine et le discours de haine, elle se déclare préoccupée par les propos haineux et xénophobes dans les déclarations politiques, qui ne font pas assez l’objet de condamnations publiques. L’Assemblée exhorte les autorités à s’attaquer à ce problème, notamment par la mise en œuvre des recommandations pertinentes du Commissaire aux droits de l'homme, de l’ECRI et du Comité consultatif de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales;
10.3.8. appelle le Parlement hongrois à ratifier le Protocole additionnel à la Convention sur la cybercriminalité relatif à l’incrimination d’actes de nature raciste et xénophobe commis par le biais de systèmes informatiques (STE no 189);
10.3.9. réaffirme ses inquiétudes à l’égard des amendements à la loi sur l’enseignement supérieur national, qui pourraient contraindre l'université d'Europe centrale à fermer ses portes ou à quitter la Hongrie, et appelle à réexaminer la législation pour la mettre en conformité avec les recommandations de la Commission de Venise;
10.3.10. est consciente du défi sans précédent que les migrations imposent au pays, mais s’inquiète du non-respect, dans le droit et la pratique en matière d’asile, des normes européennes et internationales. L’Assemblée exhorte les autorités à instaurer une procédure d’asile respectant pleinement les droits de l'homme et à veiller à ce que toute allégation d’usage excessif de la force par les gardes-frontières fasse rapidement l’objet d’une enquête indépendante et impartiale;
10.4. concernant l’Irlande:
10.4.1. salue l’Irlande pour le processus innovant et participatif lancé en 2012 pour réviser la Constitution avec la participation du parlement, de la société civile et des citoyens irlandais, et constate que celui-ci a permis l’organisation de plusieurs référendums sur des amendements à la Constitution;
10.4.2. salue, à cet égard, l’amélioration du cadre juridique et des droits relatifs aux personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres (LGBT), y compris les mariages entre personnes de même sexe, la reconnaissance légale des personnes transgenre et l’élargissement attendu du droit d’adoption aux couples de même sexe et aux couples vivant en concubinage;
10.4.3. salue les progrès accomplis au cours de la dernière décennie en matière de reconnaissance de responsabilité dans les abus commis dans des établissements à l’égard d’enfants et de femmes, notamment dans les «blanchisseries Magdalene» et les «foyers mères-bébés». L’Assemblée encourage les autorités irlandaises à continuer de regarder en face les violations des droits de l'homme commises dans le passé, à mener des enquêtes sur celles-ci et à garantir l’accès de toutes les victimes à des dispositifs de recours, conformément aux recommandations publiées par le Commissaire aux droits de l'homme et par le Comité des Nations Unies contre la torture;
10.4.4. appelle les autorités irlandaises à continuer de se conformer à l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme O’Keeffe c. Irlande, dans lequel la Cour constate que l’Irlande a manqué à l’obligation qui lui incombait, en vertu de l’article 3 de la Convention, de protéger les enfants contre les abus, et à ratifier la Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels (STCE no 201), que l’Irlande a signée en 2007;
10.4.5. dans le domaine de l’égalité des sexes, salue les efforts positifs consentis pour promouvoir l’approche intégrée de l'égalité entre les femmes et les hommes, et pour améliorer la participation des femmes dans la vie politique. À cet égard, l’Assemblée encourage les autorités irlandaises à adopter une position ferme dans la promotion de jure et de facto de l’égalité des sexes, et s’attend à ce que les référendums constitutionnels prévus en 2018 aboutissent:
10.4.5.1. à la suppression ou à la révision de l’article 41.2.1 sur la vie de la femme au foyer, qui inscrit dans la Constitution des clichés sexistes qui n’ont pas leur place dans une société démocratique moderne;
10.4.5.2. à la révision du huitième amendement à la Constitution, afin de rendre légale en Irlande l’interruption de grossesse assortie de délais de gestation, de renforcer les droits de la femme en matière de santé reproductive et de faciliter l’accès à un avortement légal et sûr, conformément à la Résolution 1607 (2008) de l’Assemblée sur l’accès à un avortement sans risque et légal en Europe;
10.4.6. appelle l’Irlande à ratifier la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, et à rapidement aligner sa législation sur cet instrument;
10.4.7. encourage les autorités irlandaises à garantir une éducation inclusive à tous les élèves, indépendamment de leur religion ou de leurs convictions, notamment grâce à l’adoption du projet de loi sur l’enseignement (admission aux écoles), pour rendre les politiques d’inscription plus équitables et plus transparentes dans toutes les écoles primaires et secondaires;
10.4.8. salue les efforts de l’Irlande pour lutter contre la corruption et encourage les autorités irlandaises à mettre en œuvre les recommandations du GRECO et à adopter et à promulguer le projet de loi de 2015 sur les normes dans le secteur public et le projet de loi sur la justice pénale (faits de corruption), qui renforcera le dispositif juridique de lutte contre la corruption;
10.4.9. s’attend également à l’adoption rapide du projet de loi sur le conseil de la magistrature, afin d’assurer notamment la création d’un conseil statutaire indépendant pour la magistrature et l’adoption d’un code de déontologie des juges;
10.4.10. salue la récente reconnaissance des Travellers comme un groupe ethnique par le Gouvernement irlandais, et encourage les autorités à poursuivre la lutte contre la discrimination à l’égard des Roms et des Gens du voyage;
10.4.11. appelle les autorités à ratifier le Protocole no 12 à la Convention européenne des droits de l'homme, que l’Irlande a signé en 2000.
11. L’Assemblée salue les efforts continus de la commission de suivi pour réfléchir aux moyens de consolider et de renforcer le processus d’examen périodique.