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Résolution 2301 (2019)

Nécessité d'un ensemble de normes communes pour les institutions du médiateur en Europe

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 2 octobre 2019 (31e séance) (voir Doc. 14953, rapport de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, rapporteur: Lord Richard Balfe). Texte adopté par l’Assemblée le 2 octobre 2019 (31e séance). Voir également la Recommandation 2163 (2019).

1. L’Assemblée parlementaire, renvoyant à ses Recommandations 757 (1975) et 1615 (2003), et à sa Résolution 1959 (2013), réaffirme que l’institution du médiateur, qui est chargée de protéger les citoyens contre la mauvaise administration et les violations des droits de l’homme et des libertés fondamentales commises par des administrations publiques, joue un rôle fondamental dans le renforcement de la démocratie, de l’État de droit et des droits de l’homme.
2. L’Assemblée rappelle les travaux déjà menés par d’autres organes du Conseil de l’Europe en matière de promotion de l’institution du médiateur et des institutions nationales des droits de l’homme (INDH), parmi lesquels les Recommandations nos R (80) 2, R (85) 13, R (97) 14, R (2000) 10, CM/Rec(2007)7 et CM/Rec(2018)11 du Comité des Ministres, les Recommandations 61 (1999) et 309 (2011) et la Résolution 327 (2011) du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe, ainsi que les recommandations en la matière du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe.
3. L’Assemblée observe que la plupart des États membres du Conseil de l’Europe ont créé des institutions du médiateur. Un État dispose d’une ample marge d’appréciation dans la configuration institutionnelle du médiateur, dont il n’existe de ce fait pas de modèle standardisé. Il est toutefois très inquiétant que l’efficacité et l’indépendance de l’institution du médiateur aient été menacées ces dernières années dans de nombreux États membres du Conseil de l’Europe. Ces menaces ont notamment pris la forme de réformes législatives visant à affaiblir l’institution, de parlements tardant excessivement à nommer les médiateurs, de parlements refusant d’examiner ou rejetant les rapports annuels ou autres du médiateur, de restrictions budgétaires et d’audits injustifiés ou d’entraves à l’accès aux dossiers et à l’information. L’Assemblée s’inquiète également de voir que, dans certains pays, les médiateurs ont été la cible d’attaques verbales de la part de membres de la classe politique, y compris du gouvernement.
4. Pour ces raisons, il est urgent de définir des normes communes qui régissent le fonctionnement des institutions du médiateur et, en particulier, les moyens de garantir leur indépendance.
5. Si certaines institutions du médiateur sont aussi des institutions nationales des droits de l’homme, ces dernières ne sont pas toujours des institutions «classiques» du médiateur. Les Principes concernant le statut et le fonctionnement des institutions nationales pour la protection et la promotion des droits de l’homme (les Principes de Paris), adoptés par les Nations Unies en 1993, fixent des normes minimales en matière de statut et de fonctionnement des INDH, et ne s’appliquent donc pas à toutes les formes d’institutions du médiateur.
6. L’Assemblée reconnaît l’importance de la contribution apportée par les avis de la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) à la création et au développement des institutions du médiateur. Elle se félicite donc de l’adoption par la Commission de Venise le 15 mars 2019 des Principes sur la protection et la promotion de l’institution du médiateur (les Principes de Venise), élaborés avec la coopération des grandes institutions internationales compétentes dans ce domaine, dont le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe et le Comité directeur pour les droits de l’homme (CDDH), le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et l’Institut international de l’ombudsman. Les Principes de Venise ont aussi été approuvés par le Comité des Ministres le 2 mai 2019. Il s’agit du premier ensemble de normes internationales sur les institutions du médiateur, comparable aux Principes de Paris sur les INDH.
7. Les Principes de Venise rappellent que l’indépendance, l’objectivité, la transparence, l’équité et l’impartialité sont les principes fondamentaux de l’institution du médiateur, qui peuvent être réalisés au moyen de différents modèles. Ils contiennent 25 principes portant sur les garanties constitutionnelles qui protègent cette institution, le choix d’un modèle institutionnel, les critères de nomination à la fonction, l’élection des titulaires, le statut de l’institution, ses immunités, son mandat, son indépendance budgétaire, ses compétences, ses pouvoirs et son accessibilité.
8. L’Assemblée se félicite du fait que les Principes de Venise comportent des normes minimales visant à protéger et à promouvoir l’institution du médiateur, et à accroître son efficacité; à aider les parlements et les gouvernements à créer et à consolider ces institutions; et à reconnaître le rôle qu’elles jouent dans le renforcement de la démocratie, de l’État de droit et des droits de l’homme. Ces principes peuvent également fournir des éléments d’orientation aux institutions du médiateur elles-mêmes, ainsi qu’aux éventuels plaignants et aux représentants de la société civile qui œuvrent à la promotion et à la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Ce document aidera par ailleurs les médiateurs à résister à toute ingérence excessive dans leurs activités.
9. L’Assemblée approuve par conséquent les Principes de Venise et appelle les États membres du Conseil de l’Europe:
9.1. à faire en sorte que les Principes de Venise et les autres recommandations du Conseil de l’Europe en la matière soient pleinement mis en œuvre;
9.2. à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir l’indépendance des institutions du médiateur;
9.3. à inviter leurs parlements nationaux et les organes gouvernementaux concernés à se référer systématiquement aux Principes de Venise lorsqu’ils apprécient la nécessité de procéder à une réforme législative des institutions du médiateur et la teneur de cette réforme;
9.4. à s’abstenir de prendre toute mesure visant ou aboutissant à supprimer l’institution du médiateur ou à lui porter atteinte, et de diriger contre elle et son personnel toute attaque ou menace, et à les protéger contre les actes de cette nature;
9.5. à promouvoir un climat propice au médiateur, notamment en garantissant un accès libre et sans entrave aux institutions du médiateur, en dotant ces institutions de ressources financières et humaines suffisantes, et en leur permettant de coopérer librement avec leurs homologues d’autres pays et les associations internationales de médiateurs.
10. L’Assemblée encourage tous les États membres de la Commission de Venise, qu’ils soient membres ou non du Conseil de l’Europe, qui ne l’ont pas encore fait à créer rapidement une institution «classique» du médiateur dotée d’un large mandat, afin que les particuliers puissent la saisir d’une plainte en cas de mauvaise administration et de violation de leurs droits de l’homme et de leurs libertés fondamentales, conformément aux Principes de Venise, et à coopérer avec la Commission de Venise à cette fin.