1. Introduction
1. Depuis 1992, date à laquelle le Conseil de l’Europe
et la Banque européenne pour la reconstruction et le développement
(BERD), un an après que cette dernière eut vu le jour, ont signé
un accord de coopération, l’APCE suit de près les activités de la
banque dans son soutien aux changements démocratiques et à la transition
vers une économie de marché, essentiellement en Europe centrale
et orientale, mais aussi en Asie centrale. En plus d’une quinzaine
d’années d’activités, la BERD a mené à bien la majeure partie de
sa mission en Europe centrale et réoriente maintenant progressivement
l’essentiel de ses activités sur l’Europe de l’Est et du Sud-Est,
parmi ses 29 pays d’opération. Ses principaux partenaires institutionnels
et actionnaires l’Union européenne et la Banque européenne d’investissement
– sont en train de reprendre le rôle de la BERD dans les nouveaux
Etats membres de l’Union européenne, permettant ainsi à la BERD
de concentrer ses ressources et son expérience sur les pays qui
en ont le plus besoin.
2. La commission des questions économiques et du développement
de l’Assemblée parlementaire attache une grande importance aux échanges
d’idées annuels sur les aspects sociaux, politiques et économiques
des travaux de la BERD, ce qui donne également l’opportunité aux
représentants élus des 47 Etats membres du Conseil de l’Europe et
des pays observateurs (qui comptent parmi les pays donneurs et bénéficiaires
clés de la BERD) de faire connaître leurs points de vue et leurs
propositions pour la future orientation de la banque.
3. Le présent rapport entend donner une vision générale des activités
de la BERD à ce jour, en particulier depuis le dernier rapport et
le débat de l’Assemblée à ce sujet en juin 2006, et approfondir
certains domaines d’activités spécifiques. Ainsi, il se penchera
de plus près sur le développement des systèmes financiers dans les
pays d’opération de la banque, les progrès des réformes dans le
Caucase et en Europe du Sud-Est, ainsi que sur les activités de
la BERD avec la Fédération de Russie, l’Ukraine et la Moldova. Les
travaux du rapporteur se sont inspirés de diverses sources publiques
et médiatiques, des publications de la BERD et des discussions avec
des représentants de la banque. Au nom de la commission, le rapporteur
souhaite remercier la BERD d’avoir accueilli la réunion de la commission
à son siège de Londres en janvier dernier ainsi que de lui avoir
aimablement fourni toute l’assistance nécessaire pendant la préparation
de ce rapport, en attendant le débat à l’Assemblée en juin 2007.
2. Contexte et présentation générale
4. Il convient de rappeler ici que la mission de la
BERD consiste à faciliter la transition vers des économies de marché
ouvertes et à promouvoir l’initiative privée et l’esprit d’entreprise
dans les pays d’Europe centrale et orientale (PECO) ainsi que dans
la Communauté d’Etats indépendants (CEI). Il est également important
de noter que la BERD est une banque de développement dont le mandat
comprend des objectifs politiques: en principe, la banque n’investira
que dans les pays qui sont engagés en faveur de la démocratie pluripartite,
de l’Etat de droit et des droits de l’homme. Bien que les actionnaires
de la banque soient tous des organes publics (61 pays membres représentés
par leurs gouvernements, plus l’Union européenne et la BEI), toute
son attention est consacrée au secteur privé, même si certains investissements
concernent également le secteur public, en particulier les infrastructures,
au niveau national, régional ou municipal. Le cœur de métier de
la BERD consiste à aider le financement de projets jugés financièrement
sains et à faire progresser les réformes, tout en respectant l’environnement.
La BERD demeure le plus gros investisseur institutionnel dans ses
pays d’opération et, dans l’ensemble, elle est très bien parvenue
à concilier les exigences d’une activité bancaire d’investissement
saine, d’une part, et d’une activité de banque de développement,
d’autre part.
5. La BERD a une base financière de 20 milliards d’euros de capital
souscrit (dont 5 milliards d’euros de capital libéré et 15 milliards
d’euros de capital appelable) et ne prévoit pas d’augmentation de
capital d’ici à 2010. Cependant, la banque n’utilise pas directement
le capital de ses actionnaires pour financer ses investissements.
L’essentiel de ses opérations est financé par des fonds levés sur
les marchés financiers internationaux – actuellement, à des conditions
très favorables étant donné que la BERD a une réputation solide
dans son secteur, reflétée par la notation AAA accordée par Standard
& Poor’s et Aaa par Moody’s. Cela permet également à la banque
de structurer son portefeuille de prêts de manière à l’adapter au
mieux aux besoins de ses clients et à réduire au minimum les risques
de change et de taux d’intérêt pour ses prêts. Une saine gestion
des ressources et des politiques d’investissement solides conjuguées
avec le fait que la banque opère actuellement dans un environnement
favorable ont permis à cette dernière de dégager des résultats financiers
particulièrement bons en 2005 et 2006, avec un niveau record de
bénéfices: en 2006, les bénéfices nets de la BERD pour l’année atteignaient
2 389 millions d’euros (contre 1 525,6 millions d’euros pour 2005
– voir tableau 1 pour plus de détails). Toutefois, l’affectation
de la totalité des bénéfices de 2006 aux réserves – conformément
à la décision du Conseil des gouverneurs de la BERD en mai 2007
– a provoqué de la part du représentant des Etats-Unis une protestation,
celui-ci faisant valoir qu’au moins une partie de ces bénéfices records
devrait être versée aux actionnaires sous forme de dividendes.
6. La banque semble donc bien équipée pour procéder à une réorientation
stratégique majeure de ses opérations afin de mettre l’accent sur
les pays d’Europe centrale et du Sud-Est, ce qui entraînerait inévitablement
une augmentation des frais de fonctionnement du fait de la hausse
des coûts de préparation des projets, d’un nombre plus important
de projets plus petits et très vraisemblablement d’une rentabilité
plus faible dans un premier temps. La BERD prévoit toutefois une
base annuelle de volume d’activités de 3,9 milliards d’euros en
2007, avec un fort impact sur la transition et des décaissements
sous-jacents de 2,8 milliards d’euros. Après onze années d’austérité
budgétaire (budgets encroissance zéro en termes réels), la BERD
devrait voir aussi son budget augmenter de 7 % en cumulé sur 2006-2007
et de 13 % au total sur cinq ans d’ici à 2010.
7. Les priorités opérationnelles de la BERD, adoptées en 1999,
couvrent: 1. l’assistance à la création de secteurs financiers sains
liés aux besoins des entreprises et des particuliers sur le plan
local; 2. l’élaboration de politiques commerciales et de cadres
financiers pour le développement des infrastructures; 3. l’assistance aux
entreprises en démarrage et aux petites et moyennes entreprises
(PME); 4. le soutien à la restructuration d’entreprises plus grandes
traversant une mauvaise passe; 5. la mise en place d’investissements
en fonds propres; et 6. la promotion d’un climat d’investissement
sain et d’institutions plus solides dans les pays d’opération, grâce
à un dialogue politique.
8. La BERD est désormais active dans 29 pays d’opération
. Le dernier arrivé, la
Mongolie, a été accepté en tant que pays d’opération par la BERD
en juillet 2006. Le financement de projets a été entamé en octobre 2006,
et la BERD, en collaboration avec le Gouvernement de la Mongolie
et la sphère locale d’entreprises, cherche plus particulièrement
à aider le développement des entreprises privées, des PME, du secteur
financier et de la microfinance, des infrastructures et du processus
de privatisation. Par le passé, la BERD a déjà travaillé en Mongolie
grâce au Fonds de coopération pour la Mongolie, instauré en mars
2001, et elle a levé au total 10,3 millions d’euros sous forme de
dons auprès de donneurs.
9. Les pays d’opération sont divisés en trois groupes géographiques:
l’Europe centrale et orientale plus les pays Baltes (PECOB)
, l’Europe du Sud-Est (ESE)
et
la Communauté d’Etats indépendants plus la Mongolie (CEI+M)
.
Les pays peuvent également être classés selon les progrès enregistrés
dans leur réforme. Les pays dits «en phase initiale de transition»
comprennent l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Géorgie, le Kirghizistan,
la Moldova, la Mongolie, le Tadjikistan et le Turkménistan. En 2004,
la BERD a lancé l’Initiative pour les pays en phase initiale de
transition, présentée dans le rapport de l’an dernier sur la BERD
(
Doc. 10950),
afin d’accroître l’impact de ses activités dans ces pays qui comptent
au nombre des plus pauvres parmi ses pays d’opération. L’initiative
coordonne l’assistance des donateurs et s’efforce de remédier à
la pauvreté en finançant avant tout des projets plus petits dans
le secteur privé, en soutenant le développement des infrastructures
municipales et en améliorant l’environnement juridique. A la fin
de 2006, la BERD était parvenue à faire passer à 86 % la part de
ses opérations dans les pays en phase initiale et intermédiaire
de transition plus la Fédération de Russie (alors que les projections
s’établissaient autour de 70 %).
10. Cela n’empêche cependant pas la BERD de poursuivre sa coopération
avec les institutions de l’Union européenne dans le cadre des programmes
JASPERS, JEREMIE et JESSICA menés dans les pays d’opération en phase
avancée de la transition. Ces programmes prévoient un soutien ciblé
respectivement sur le développement régional, les PME et le microfinancement,
ainsi que la revitalisation urbaine dans les nouveaux Etats membres
de l’Union européenne. L’ouverture, en janvier 2007, d’un Bureau
régional pour le programme JASPERS à Varsovie va être bientôt suivie
de l’inauguration d’autres bureaux similaires à Vienne et à Bucarest,
en capitalisant sur le savoir-faire et l’expérience de la BERD,
de la BEI et de la Commission européenne en matière de financement
à long terme, en particulier pour les projets d’infrastructures. L’implication
de la BERD dans les pays d’Europe centrale et orientale qui ont
adhéré à l’Union européenne en 2004 s’achèvera d’ici à 2010.
11. La BERD mène des évaluations
ex-post de
ses activités de coopération technique et opérations d’investissement
afin de faire le point sur les résultats et de tirer les leçons
de l’expérience en vue d’améliorer ses futures initiatives. Une
petite équipe d’évaluateurs, le Département d’évaluation des projets
(DEP), indépendant sur le plan opérationnel, évalue le degré de
responsabilité (envers le management, les comités de direction et
le grand public), la transparence et la valeur ajoutée des activités
de la BERD. Outre des pratiques bancaires saines et le principe
de l’additionnalité (la capacité à compléter plutôt qu’à remplacer
les sources privées de financement), l’impact sur la transition
est
un des grands principes directeurs clé. Au total, 548 projets ont
été évalués à ce jour. Entre 1996 et 2006, 78 % des projets ont
reçu une évaluation positive (excellent ou satisfaisant) quant à
leur impact sur la transition, et 58 % des projets ont reçu une
évaluation satisfaisante ou plus pour ce qui concerne la performance
globale.
12. Etant donné l’environnement difficile dans lequel opère la
BERD, ces résultats sont le signe d’une réussite remarquable. Etant
donné que l’équipe d’évaluation mène également des études spécifiques
et diffuse les leçons tirées de l’expérience, parmi les problèmes
qui vont devoir être traités dans les années à venir, on citera
notamment l’adaptation à des évaluations plus nombreuses, l’examen
par les pairs des fonctions d’évaluation et l’harmonisation des
procédures d’évaluation par rapport à celles utilisées par d’autres banques
de développement multilatérales, ainsi que la mise en place et le
maintien d’un bon système de suivi des recommandations de l’évaluation.
13. La BERD suit les progrès de la transition en classant les
pays d’opération en fonction de neuf indicateurs au total, répartis
sur quatre catégories: 1. entreprises (privatisation à grande échelle,
privatisation à petite échelle, gouvernance et restructuration d’entreprise);
2. marchés et commerce (libéralisation des prix, du commerce et
des opérations de change et politique de la concurrence); 3. institutions
financières (réforme bancaire, libéralisation des taux de change,
marchés boursiers et institutions financières non bancaires); et
4. infrastructures. Les neuf indicateurs concernent différentes
étapes du processus de réforme. Si la privatisation à petite échelle,
la libéralisation des prix et la libéralisation du commerce et du
marché des changes font partie de la phase initiale de réforme,
les autres indicateurs relèvent de la deuxième phase.
14. Les réformes initiales de libéralisation des marchés sont
dans une très large mesure achevées dans la région des PECOB, en
Bulgarie, en Roumanie et en Croatie; en revanche, elles ont pris
du retard dans bon nombre de pays ESE (en particulier les Balkans
de l’Ouest) et dans la CEI+M. La deuxième phase de la réforme demeure
inachevée dans la plupart des pays de toute la région en transition.
Cependant, des progrès significatifs ont été enregistrés l’an passé,
et, en 2006, 16 pays ont vu 24 indicateurs de la transition au total progresser.
15. D’un point de vue géographique, l’Europe du Sud-Est, avec
12 indicateurs en progression, a énormément avancé, les améliorations
les plus notables en matière de réforme ayant été enregistrées en Bulgarie,
en Roumanie et en Croatie. Les réformes se sont ralenties dans les
PECOB après l’adhésion à l’UE, le soutien des populations à des
mesures de restructuration pénibles s’étant affaibli (même si l’Estonie
a significativement avancé dans un certain nombre de secteurs).
Les huit indicateurs restants en progrès concernent des pays de
la CEI+M, où les changements introduits par les réformes se sont
pour l’essentiel concentrés dans trois des pays les plus riches
(le Kazakhstan, la Fédération de Russie et l’Ukraine) à la suite de
réponses positives de la part des marchés après des efforts de renforcement
institutionnel.
16. Pour ce qui est des indicateurs par secteur, la majeure partie
des indicateurs en progression concerne des réformes relevant de
la deuxième phase, étant donné que les progrès ont été minces dans
les pays où la phase initiale de réforme n’est pas encore achevée.
Le secteur financier est celui qui a le plus progressé, avec un
total de 11 indicateurs en progrès sur les 24. Les reclassements
restants sont venus récompenser la politique de concurrence (4),
la gouvernance et la restructuration d’entreprises (3), la privatisation
à petite échelle (3) et les infrastructures (3). Il est particulièrement
intéressant de noter que, si l’ensemble de la catégorie des infrastructures
ne voit des progrès que pour trois indicateurs seulement, la sous-catégorie
des télécommunications en affiche neuf au total.
17. Les progrès dans les réformes, après avoir atteint un pic
durant la seconde moitié des années 1990 (particulièrement dans
les PECOB et les pays de la CEI), se poursuivent, bien que plus
lentement. De manière générale, ces dernières années, le processus
de transition est de plus en plus tiré par les marchés plutôt que par
les gouvernements, en particulier pour ce qui est des télécommunications
(autrement dit la téléphonie mobile) et le secteur financier (voir
plus loin). En fait, l’ensemble de la région en transition a fait
des progrès significatifs pour ce qui concerne la réforme dans ces
deux secteurs.
18. Pour ce qui est des indicateurs macroéconomiques, la croissance
du PIB en termes réels est demeurée forte dans tous les pays, avec
une moyenne de 5,3 % en 2005, et devrait tourner autour des 6,2 %
en 2006. C’est là un rythme de croissance soutenu, supérieur de
plusieurs points de pourcentage à la moyenne dans la zone euro.
Les taux de croissance tendent à être plus élevés dans la région
CEI+M (qui a bénéficié d’évolutions positives en matière de termes
de l’échange) qu’en Europe du Sud-Est et dans les PECOB. A mesure
que les pays les plus pauvres rattrapent leurs voisins, la convergence
se poursuit, la majeure partie des réformes économiques ayant été
entreprise en Europe du Sud-Est, en particulier en Bulgarie, en Roumanie,
en Croatie, dans «l’ex-République yougoslave de Macédoine» et en
Serbie, tandis qu’en Europe centrale, les progrès marquent le pas
dans ce domaine. S’il est vrai que des prix élevés et une demande soutenue
pour le pétrole, le gaz, le métal et les produits agricoles soutiennent
la forte performance de bon nombre de pays riches en ressources
(essentiellement dans la région CEI+M)
, la majeure partie de la croissance
dans la région en transition a été tirée par la consommation du
fait d’une hausse des salaires et d’une expansion du crédit. En
outre, en 2006, l’ensemble de la région a profité d’un afflux record
de plus de 50 milliards d’euros d’investissement direct étranger
(IDE).
19. Il est intéressant de noter que les estimations d’experts
montrent qu’environ un tiers du PIB officiel dans la plupart des
pays en transition est généré par l’économie «informelle». On pense
que ces activités informelles persistent du fait de déséquilibres
dans les systèmes fiscaux, les niveaux de prélèvements de sécurité
sociale, les cadres réglementaires complexes et d’une absence d’opportunités
d’emploi dans le secteur formel (en particulier dans les régions
rurales). Une étude de la BERD sur le secteur informel en Arménie,
en Bosnie-Herzégovine et en Ukraine révèle que l’agriculture est
un secteur clé sous-tendant les activités informelles, qui représentent
53 % de l’emploi total en Arménie, 43 % en Bosnie-Herzégovine et
66 % en Ukraine. Les décideurs politiques sont donc confrontés à
la mission délicate de rééquilibrer les réglementations concernant les
activités commerciales, les impôts et taxes, le salaire minimal
et les niveaux de prestations sociales ainsi que les incitations
à la création d’emplois très qualifiés. La BERD, pour sa part, est
particulièrement vigilante pour ce qui est de s’assurer de l’intégrité
de ses clients et partenaires
.
20. Une forte demande et des prix énergétiques élevés causent,
cependant, des pressions inflationnistes dans la plupart des pays
en transition, et l’entrée dans la zone euro pour les PECOB a été
repoussée, sauf pour la Slovénie qui a adhéré à l’Union économique
et monétaire en juin 2006 et a adopté l’euro en janvier 2007. En
outre, étant donné que l’épargne intérieure n’est pas suffisante
pour couvrir les investissements, bon nombre de pays en transition
sont toujours confrontés à des déficits en compte courant persistants
et importants. Plusieurs devises de la région en transition sont
également soumises à des pressions. Grâce à un environnement mondial
favorable, à des niveaux de financement record et à une aversion
au risque relativement faible de la part des investisseurs, les
perspectives de croissance sont positives. Toutefois, certaines
incertitudes persistent du fait du peu de visibilité en matière
de croissance internationale (en particulier pour les Etats-Unis),
de possibles turbulences sur les marchés financiers et d’une moins
bonne tenue des marchés des matières premières.
3. Finance en transition et réformes
21. Le Rapport sur la transition de 2006 de la BERD porte
spécifiquement sur le secteur financier, dont le développement est
essentiel pour une croissance de plus en plus corrélée à l’expansion
du système financier et qui a absorbé 45 % du financement total
de la BERD en 2006 (à comparer avec 30 % pour les prêts directs au
secteur des entreprises et 17 % pour les projets d’infrastructure).
Dans l’ensemble, les pays en transition ont connu une transformation
extraordinaire de leur secteur financier, tiré par des améliorations institutionnelles
de grande ampleur, des privatisations et l’entrée de banques étrangères
sur les marchés locaux. De ce fait, les secteurs financiers se sont
à la fois agrandis et complexifiés, bien que les progrès de la réforme
du secteur financier aient été inégaux. Ce sont les PECOB qui ont
le plus avancé (en ce qui concerne les marchés bancaires et les
marchés des titres), mais, malgré cela, leur potentiel de développement
financier non encore exploité demeure considérable étant donné leur
niveau de revenus. Malgré les progrès, le secteur financier demeure
donc encore sous-développé dans bon nombre de pays, en particulier
dans la CEI+M et en Europe du Sud-Est (même si celle-ci est, des
deux, la plus développée).
22. Bien que les activités bancaires continuent de dominer le
secteur financier dans la région en transition, d’autres secteurs
de la finance ont également pris de l’ampleur, par exemple les marchés
des titres et des obligations, et des marchés des valeurs mobilières
commencent à émerger, complétant ainsi le secteur bancaire. En 2005,
la capitalisation du marché boursier s’établissait d’à peine plus
d’un quart du PIB dans les PECOB à juste en dessous d’un cinquième
dans la CEI+M. La Fédération de Russie est actuellement le pays en
transition ayant la capitalisation la plus forte dans ce domaine.
Le changement peut-être le plus frappant (tant en envergure qu’en
amplitude) pour ce qui concerne le secteur bancaire est l’émergence
de banques étrangères qui se sont imposées comme des acteurs de
poids par l’acquisition d’actifs de banques locales existantes ou
en tant que nouvelles arrivantes sur le marché (par exemple des
banques autrichiennes et italiennes dans les PECOB et l’ESE, ou
des banques suédoises (nordiques) dans les Etats baltes).
23. Le marché du crédit dans la plupart des pays PECOB et ESE
a connu une croissance considérable au cours des cinq dernières
années, de 70 % dans les PECOB, et il a pratiquement doublé en Europe
du Sud-Est. Le rapide essor du crédit est cependant également associé
à des risques de crédit et des risques de change, ainsi qu’à d’autres
répercussions négatives potentielles. L’essor du crédit a largement
contribué aux forts taux de croissance du PIB dans bon nombre de
pays en transition. Pour la seule année de 2005, dans la région
en transition, les activités de prêts bancaires ont augmenté de
20 % en moyenne. La croissance la plus élevée du crédit a été enregistrée
dans les pays en transition moins avancés, et a été la plus rapide
pour les banques étrangères nouvellement implantées. Toutefois,
même si le ratio crédit national au secteur privé sur PIB a augmenté,
il reste inférieur à 50 % dans les PECOB (en comparaison, il est
supérieur à 150 % au Portugal et en Espagne et de 86 % en Grèce).
En dehors de la Croatie (avec un ratio de 56 %), pour la région ESE,
il s’est établi en moyenne à 18 % en 2005. Dans les pays de la CEI,
étant donné que le financement bancaire a en fait reculé, il n’a
été en moyenne que de 13 % (même s’il remonte lentement au Kazakhstan
et en Fédération de Russie).
24. Les prêts aux ménages représentent la plus grande part de
la croissance du crédit, le crédit aux entreprises n’ayant, généralement,
pas augmenté aussi rapidement. Le crédit aux entreprises de plus
petite taille demeure limité. Selon la récente étude BEEPS (Business
Environment and Entreprise Performance Survey) de la BERD/Banque
mondiale, 60 % des entreprises plus petites analysées dans l’étude
portant sur la région en transition n’ont pas souscrit de prêts
bancaires (et entre un quart et un tiers d’entre elles ont déclaré
qu’elles n’étaient pas en mesure de le faire). Même dans les pays
PECOB membres de l’UE, l’accès au financement représente toujours
un obstacle majeur pour le développement des entreprises. Là encore, l’environnement
du financement est nettement plus difficile pour les PME que pour
les grosses sociétés. C’est pourquoi le financement interne représente
encore la majeure partie de la finance d’entreprise (entre 68 % dans
les PECOB et 77 % dans la CEI).
25. Le crédit bancaire peut avoir un impact positif sur la performance
des entreprises étant donné que, selon une récente étude de la BERD,
l’accès au crédit bancaire (quel que soit le volume emprunté) tire
les recettes des entreprises à la hausse. L’étude montre également
que le crédit a tendance à être utilisé plus efficacement par les
grandes entreprises que par les plus petites. Les facteurs institutionnels
(plus précisément les droits des créanciers et les registres des
crédits) jouent un rôle important dans le développement du secteur financier.
Une analyse de la BERD montre que la réforme institutionnelle peut
réduire l’écart entre le niveau réel et le niveau potentiel de développement
financier (particulièrement grand dans les pays ESE et de la CEI). Etant
donné que le rythme des réformes se ralentit actuellement dans le
secteur financier (en 2006, il y a eu moins d’indicateurs qui se
sont améliorés que dans les années précédentes), votre rapporteur
aimerait souligner combien il est important d’aller de l’avant.
L’absence de réforme en ce qui concerne la protection des créanciers
en particulier ferait obstacle à la poursuite du développement financier,
et donc de la croissance, dans bon nombre de pays. La supervision
des banques et une politique de la concurrence sont également importantes.
Enfin, et ce n’est pas le moindre, il y a encore une certaine latitude
pour élargir l’accès aux financements et donner de la profondeur
au système financier pour ce qui est d’accroître les crédits et d’apporter
davantage de services (par exemple le crédit-bail, le financement
de fonds propres, les pensions et l’assurance).
3.1. Tendances du secteur bancaire
26. Le secteur bancaire dans la région en transition
a marqué des progrès considérables et les banques en transition
atteignent lentement les normes des marchés financiers plus matures.
Les progrès les plus significatifs ont été enregistrés en Estonie,
en Hongrie et en Lettonie. Dans bon nombre des pays ESE et CEI+M,
le secteur bancaire est encore loin à la traîne, même si les indicateurs
de réforme dans le secteur bancaire ont été revus à la hausse pour
la Fédération de Russie, le Tadjikistan et l’Ukraine en 2006. Ces récentes
années ont vu une diversification considérable des services à mesure
que le secteur bancaire devenait plus compétitif et efficient, ainsi
que mieux régulé, grâce à des modifications de la structure capitalistique
et à des améliorations du cadre législatif et institutionnel (par
exemple une meilleure protection légale, une application plus effective
de la législation et une meilleure supervision et régulation). Selon l’économiste
en chef de la BERD, les banques dans la région sont plus grosses,
plus fortes, mieux réglementées, plus rentables et plus compétitives
qu’elles ne l’ont jamais été.
27. L’entrée de banques étrangères a accéléré l’intégration du
secteur bancaire dans la région en transition et dans les économies
plus matures. Elles ont également contribué à accroître la disponibilité
du crédit, ont renforcé la concurrence et encouragé l’adoption de
meilleures technologies bancaires et pratiques managériales. Les
banques étrangères dominent désormais le secteur bancaire dans la
plupart des pays PECOB et ESE (tous sauf la Lettonie, «l’ex-République
yougoslave de Macédoine», la Serbie et la Slovénie), où la part
des actifs des banques étrangères dépassait les 70 % en 2005. En
revanche, dans la CEI, ce sont les banques nationales qui dominent
le marché. Toutefois, si la présence de banques étrangères a eu
un impact positif sur le secteur bancaire tant pour ce qui est de
l’efficience que de la stabilité, il ne s’agit pas pour elles de
remplacer la réforme institutionnelle. En outre, les banques étrangères
ne connaissent pas l’environnement local, ce qui est préoccupant,
et sont donc moins enclines à prêter à des entreprises plus petites.
28. L’étude BEEPS de la BERD évoquée plus haut a analysé un échantillon
de 220 banques dans des pays en transition. Elle relève des améliorations
institutionnelles et juridiques qui ont encouragé le prêt tant aux particuliers
qu’aux petites entreprises. Le segment des prêts aux particuliers
notamment (pour l’essentiel sous forme de prêts immobiliers) a augmenté
rapidement dans l’ensemble de la région en transition, même si cette augmentation
a été plus sensible encore dans les PECOB et l’ESE (où il représentait,
en 2005, environ 45 % et 60 % respectivement du total des crédits).
Les banques étrangères en particulier ont été actives dans les prêts
aux ménages (étant donné qu’en général, ce type de prêt implique
moins de recueil d’informations, des marges plus élevées et est
considéré comme moins risqué
),
même si elles s’ouvrent désormais, lentement certes, vers les petites
entreprises aussi. Les prêts immobiliers ont également augmenté,
même si leur part sur le total des prêts est modeste (en particulier
dans les pays de la CEI).
29. Il n’en reste pas moins, alors que les PME sont les clients
les plus importants pour toutes les catégories de banques, que le
crédit bancaire est pour l’essentiel proposé aux grosses entreprises.
Bon nombre de petites sociétés, même dans les pays en transition
plus développés, n’ont pas accès au système financier bancaire. Les
petites entreprises dans les PECOB sont particulièrement limitées.
L’étude de la BERD montre également que les banques plus petites
ont, plus que les grandes, tendance à prêter aux petites sociétés.
30. La performance des banques dans la région en transition s’est
améliorée et les retours sur actifs et fonds propres sont désormais
assez élevés en comparaison avec la moyenne dans l’UE. En termes
de marge nette d’intérêt bancaire, la performance a été meilleure
pour les petites banques que pour les plus grandes. Bien que la
composition de l’actionnariat de la banque ne soit pas corrélée
à la performance de ces dernières, les réformes portant sur les
structures capitalistiques (et l’environnement institutionnel) ont
réduit les coûts. Ainsi, lorsque le capital est détenu par des actionnaires
étrangers, on constate en général une meilleure efficience sur le
plan des coûts. La rentabilité des banques (en termes de retour
sur actifs) est également forte, en particulier dans les pays de
la CEI. Toutefois, le ratio prêt douteux sur total des prêts est,
à 15 %, très élevé dans cette région. Dans les PECO et l’ESE, ce
ratio a considérablement diminué et s’établit, respectivement, à
3,4 % et 9,5 % (ce qui reste élevé malgré tout). Les grosses banques
et banques étrangères ont, en général, un portefeuille de prêts
de bien meilleure qualité que les autres banques.
31. Le secteur bancaire dans la région en transition est fortement
concentré. A l’exception du Monténégro, de la Fédération de Russie
et de l’Ukraine, les cinq plus grosses banques dans tous les pays
en transition représentent plus de la moitié du total de l’actif
bancaire. Les activités de prêt et de dépôt représentent toujours le
gros des activités du secteur bancaire dans la région en transition.
Toutefois, bon nombre de banques proposent aujourd’hui d’autres
services financiers (par exemple finance d’entreprises, gestion
d’actifs et négociations de titre). La gamme de produits et les
services est toutefois encore trop limitée. Pour cette région, il
est essentiel d’ouvrir l’accès aux financements. Il convient d’améliorer
encore la réglementation bancaire et la protection des créanciers
pour que les activités de prêts augmentent, en particulier en faveur
des PME. Toutefois, à l’augmentation des activités de prêt doit
répondre une plus grande prise de risque. Enfin, les banques dans
cette région devraient développer davantage leurs gammes de produits
et services financiers.
3.2. Gestion d’actifs
32. Dans la région en transition, ces quelques dernières
années, les marchés pour la gestion d’actifs ont connu une croissance
significative. Le volume total de financement engagé dans les (nouveaux)
fonds de gestion d’actifs privés
dans
les pays en transition a culminé à plus de 1,6 milliard de dollars
des Etats-Unis en 2005. Dans les PECOB, les mesures d’harmonisation
et d’intégration prises en vue de l’adhésion à l’UE ont à l’évidence
contribué au développement de ce créneau dans ces pays. Les marchés
russes sur ce segment ont également connu une expansion, la relative
stabilité et la forte croissance du pays ayant attiré les investisseurs étrangers.
De manière générale, les rendements ont augmenté rapidement ces
dernières années (et sont désormais comparables à ceux servis en
Europe de l’Ouest) grâce à des fenêtres de sortie plus faciles
et à de
meilleures perspectives d’investissement. Toutefois, la plupart
des marchés de gestion des actifs privés dans la région en transition
restent petits et manquent souvent de liquidité.
33. La BERD a analysé les données concernant 44 fonds de gestion
d’actifs privés (avec un volume total de capitaux de 4,6 milliards
de dollars), qui ont apporté quelque 2,7 milliards de dollars à
450 investissements dont 399 entreprises entre 1992 et 2005. Cette
analyse montre que, de manière générale, les fonds les plus gros,
les plus anciens et les plus diversifiés ont eu tendance à être
plus performants et à obtenir de meilleurs rendements. Les fonds
depuis longtemps en fonctionnement ont, normalement, eu davantage
de temps pour dénouer les positions et servir des intérêts à leurs
investisseurs. Si les premiers fonds avaient tendance à investir
dans la production et la vente au détail, les plus récents (établis
entre 1995 et 1999) se sont concentrés sur les télécommunications
et l’informatique. Les secteurs les plus profitables ont été les
services financiers, les télécommunications et la haute technologie.
Indépendamment du secteur, toutefois, les fonds diversifiés sur
plusieurs secteurs ont, en moyenne, obtenu des rendements supérieurs
à ceux qui s’étaient spécialisés sur un seul secteur.
34. Les fonds dans la région en transition ont communément investi
dans l’expansion d’entreprise et les démarrages (et moins dans les
privatisations et les rachats). Toutefois, les retours sur les investissements dans
des créations d’entreprises ont été, de manière générale, plus faibles
que ceux obtenus par des investissements dans les privatisations.
Même si les projets menés par des co-investisseurs ont eu tendance à
générer de meilleurs rendements, la plupart des entreprises ont
obtenu des capitaux auprès d’un seul fonds (70 % des investissements
en capitaux privés objet de l’étude avaient été apportés par un
seul investisseur). En outre, la plupart des capitaux gérés par
les fonds de gestion de patrimoine proviennent de l’étranger, car les
sources nationales pour ce secteur restent limitées. Si l’on ne
peut pas dire clairement dans quelle mesure la performance dépend
du pays où les fonds sont investis, les rendements ont été en général
relativement bons en République tchèque, en Slovaquie et dans l’ensemble
de l’ESE.
35. Bien que l’apport de capitaux privés soit un complément aux
activités de prêts bancaires, ce mode de financement d’un investissement
est en général plus cher que le prêt. Toutefois, l’expansion du
secteur de l’investissement privé a eu des effets positifs et significatifs
sur le développement économique dans la plupart des pays en transition,
non seulement en tant que source de financement supplémentaire pour
les entreprises, mais également en tant que soutien au développement
de know-how et d’expertise.
Grâce à leur implication active dans les entreprises qu’ils financent,
les fonds d’investissement privé jouent un rôle de plus en plus important
dans la restructuration d’entreprises et dans la promotion de l’esprit
d’entreprise et des compétences managériales. La poursuite du développement
dans ce secteur dépendra des améliorations qui seront apportées
au cadre juridique et réglementaire et de l’augmentation du financement
par des sources nationales. Pour ce faire, les fonds de pension
et les compagnies d’assurances pourraient s’intéresser aux investissements
par apport de capitaux privés. De riches particuliers et des entreprises
s’intéressent également de plus en plus à ce type d’investissement,
qui bénéficierait grandement d’améliorations dans l’environnement
global des affaires et du développement du secteur bancaire.
3.3. Transferts de fonds par des migrants, source de
financement pour la création de petites entreprises et le micro-investissement
36. Les transferts de fonds par les migrants attirent
de plus en plus l’attention dans le monde entier, du fait de l’augmentation
de leur volume et de l’importance des flux, ainsi que de leur capacité
potentielle à réduire la pauvreté et à soutenir les efforts de développement
dans le pays de destination. En 2005, selon des estimations, ce
type de transfert représentait, pour la partie officielle, 230 milliards
de dollars
.
Ces transferts ont pris de plus en plus de poids dans un grand nombre
d’économies des pays en transition, au point de représenter une
part substantielle de leur PIB (en 2004, ils ont représenté jusqu’à
27,1 % du PIB de la Moldova, faisant d’elle le deuxième pays de
destination au monde en termes relatifs
). La
majeure partie des fonds transférés par les migrants est généralement
utilisée dans les pays de destination pour les besoins de la vie
courante, une fraction plus petite étant épargnée ou investie dans
l’immobilier (achats et/ou construction de logement). Enfin, une
part modeste mais très importante finance souvent la création de
petites entreprises et l’investissement.
37. En janvier 2006, la BERD a entrepris une étude portant sur
639 micro et petites entreprises et l’utilisation des fonds transférés
par les migrants pour la création, le fonctionnement et l’expansion
d’entreprises dans cinq pays en transition où ces transferts de
fonds représentent une part élevée du PIB (en Albanie, en Bosnie-Herzégovine,
en Géorgie, en Moldova et en Serbie). Les résultats de l’étude,
présentés dans le Transition Report Update de mai 2006, montrent
qu’une part tout à fait significative des transferts de fonds est
utilisée par les patrons d’entreprise pour financer des investissements
(en particulier pour les sociétés qui démarrent). En tout, 27 %
des patrons d’entreprise sondés ont signalé recevoir des transferts
de fonds de l’étranger et 43 % d’entre eux ont indiqué les utiliser
pour couvrir les frais d’établissement, des investissements et des besoins
en fonds de roulement. Les transferts de fonds ont été très importants
pour la création d’entreprises: 93 % des patrons d’entreprises s’en
sont servi pour démarrer leurs activités, et environ 40 % des frais
de démarrage ont été financés par ce biais
.
38. Le manque d’accès au financement est l’un des principaux obstacles
à l’établissement, au fonctionnement et à l’expansion des entreprises
dans la région en transition. Ce sont en général les entreprises plus
petites (dominantes dans le tissu industriel dans la plupart des
pays en transition) qui ont le plus de difficultés à obtenir un
financement. C’est pourquoi beaucoup d’entre elles passent par un
financement «informel» ou non bancaire. En fait, les entreprises
de la région en transition financent les trois quarts des nouveaux
investissements par des capitaux internes ou des prêts obtenus auprès
de la famille et d’amis. Les transferts de fonds par les migrants
peuvent ainsi compenser un secteur financier sous-développé et l’absence de
possibilités de crédit. Ils ne se substituent pas à des prêts bancaires,
au contraire, ils offrent aux entrepreneurs plus de possibilités
d’obtenir un financement par le biais bancaire.
39. L’étude conclut également que les banques jouent un rôle important
dans le mécanisme des transferts de fonds depuis l’étranger. Même
si leur rôle en tant que canal pour ce type de transfert varie d’un
pays à l’autre, plus de la moitié des entreprises sondées ont signalé
qu’elles reçoivent ces transferts via le canal bancaire. Pour un
impact maximal des transferts sur le développement local dans les
pays de destination, il convient alors de faire en sorte que les
flux de transferts transitent par les banques. A cette fin, se ralliant
à l’appel pour une meilleure gestion des flux entrants de transferts
de fonds lancé par notre collègue M. Schreiner dans le rapport de
l’an dernier sur la BERD (
Doc. 10950),
votre rapporteur plaide en particulier pour une réduction des frais
grevant ces transferts et pour une plus grande disponibilité des
prêts bancaires (et autres produits financiers). De plus, si l’on
veut que ces transferts de fonds jouent pleinement leur rôle de catalyseur
au niveau de l’économie locale, il faut un environnement globalement
propice aux affaires et à l’investissement, et l’instauration de
cet environnement dépend de beaucoup d’autres facteurs, notamment
les politiques budgétaire et monétaire et une réforme structurelle.
3.4. Responsabilité d’entreprise et développement durable
40. Votre rapporteur aimerait s’attarder sur les concepts
de développement durable et de responsabilité d’entreprise, deux
aspects importants des bonnes pratiques des affaires. La responsabilité
d’entreprise couvre la transparence, la responsabilisation et une
gestion économique saine, mais entraîne également les impacts environnementaux
et sociaux des activités de l’entreprise, de ses produits et services.
Pour ce qui est du secteur financier, de grandes initiatives internationales
s’efforcent de promouvoir des normes sociales et environnementales,
à savoir: 1. les Principes de l’Equateur – un ensemble de principes
acceptés par un certain nombre de grandes banques commerciales en
2003, qui établissent un cadre de pratiques de prêt socialement et
écologiquement responsables pour des activités de financement de
projet supérieures à 10 millions de dollars (ce seuil a été récemment
abaissé, il était de 450 millions de dollars); et 2. l’Initiative
du PNUD pour la finance – un accord de partenariat plus général
entre secteur public et secteur privé proposant à ses membres une
formation et des conseils sur les meilleures pratiques en matière
de développement durable. Une autre initiative, le Global Compact
des Nations Unies, lancée en 1999, invite les agences onusiennes,
des entreprises (notamment des banques et autres entreprises du
secteur financier), des ONG et des acteurs de ce type à soutenir
un ensemble de principes universels dans le domaine environnemental
et social
.
41. La région en transition est à l’évidence sous-représentée
en ce qui concerne ces trois initiatives. Les pays en transition
signataires du Global Compact ne représentent qu’environ 8 % de
l’ensemble des participants (pour ce qui est des membres du secteur
financier, ce chiffre est légèrement supérieur, il s’établit à environ
10 %). Seules quatre banques de pays en transition ont signé l’Initiative
du PNUD pour la finance. Toutefois, même si aucune banque des pays
en transition ne figure parmi les signataires des Principes de l’Equateur,
la plupart des transactions pour les financements de projets dans
la région sont couvertes par ces principes, étant donné qu’elles
sont actuellement mises en œuvre par des banques internationales
ou des institutions financières internationales.
42. Pour ce qui est du suivi des questions sociales et environnementales,
les banques des pays en transition (en particulier dans la CEI)
sont en retard. Selon une récente étude de la BERD sur les trois
plus grandes banques de 20 pays en transition, un sixième seulement
tient compte des impacts environnementaux dans leurs activités de
prêt, et elles sont encore moins à tenir compte des implications
sociales. Les politiques internes traitant de préoccupations sociales
et environnementales sont également peu fréquentes. Ce n’est que
pour ce qui concerne les partenariats avec les communautés locales
et des programmes philanthropiques que les banques des pays en transition
peuvent être considérées comme plus ou moins au même niveau que les
banques dans les pays de référence que sont la Grèce, le Portugal
et l’Espagne.
43. Malheureusement, le développement durable ne semble pas occuper
une haute priorité sur l’ordre du jour des banques et sociétés de
la région en transition. Toutefois, à mesure que le processus de
transition avance et que de plus en plus d’acteurs économiques reconnaissent
qu’une bonne réputation est importante pour les affaires, l’on peut
s’attendre à ce que la prise en compte de considérations environnementales
et sociales augmente dans un avenir proche.
44. Pour ce qui concerne la BERD, son engagement en faveur de
la responsabilité d’entreprise dans ses activités d’investissement
et ses opérations internes s’inscrit dans son choix global de privilégier
la durabilité. Chaque année, la BERD traite des questions de responsabilité
d’entreprise, non seulement pour ses propres opérations mais aussi
pour toutes ses activités d’investissement, dans son Rapport sur
la durabilité qui, avec le Rapport annuel et le Rapport sur la transition,
couvrent bon nombre des aspects du suivi de l’initiative GRI (Global
Reporting Initiative)
.
De plus, la BERD joue un rôle moteur dans l’initiative PNUE FI et
préside actuellement le comité de coordination régionale. Entre
autres, deux initiatives de la BERD cherchent à promouvoir une culture
d’entreprise saine dans la région en transition: les programmes
TAM (TurnAround Management) et BAS (Business Advisory Services).
Ces programmes de soutien à des entreprises non financières, avec
pour bailleurs de fonds des donateurs, ont pour objectif d’aider
et d’améliorer les compétences managériales dans les petites, moyennes
et grandes entreprises en vue d’améliorer les performances de ces
dernières et de créer davantage d’opportunités d’emploi. Ces deux
programmes sont d’importants éléments de la stratégie de la BERD
en faveur des PME et visent pour l’essentiel les pays de l’Initiative
pour les pays en phase initiale de transition (présentée dans la
partie II ci-dessus) et de l’Initiative pour l’ouest des Balkans
(voir partie V ci-après). Ils jouent également un rôle significatif
dans les activités de la BERD concernant l’ensemble des régions
et zones rurales moins développées de la Fédération de Russie et
de l’Ukraine.
45. Depuis son démarrage, en 1993, le programme TAM a mené à bien
plus de 1 350 projets dans 27 pays d’opération. Il aide des entreprises
comptant de 100 à 2 000 employés, où il intervient au niveau de l’encadrement
supérieur. Il entretient une base de données comportant plus de
3 000 consultants d’entreprise qui apportent une expertise sectorielle
spécifique en vue de la restructuration et de l’introduction d’une
nouvelle culture managériale dans les pays cibles. Le programme
BAS, commencé en 1995, a mis en œuvre plus de 6 000 projets dans
17 pays d’opération. Il utilise et développe des services de consultance
locaux (avec au total 1 700 consultants agréés) et propose des conseils
et services aux entreprises plus petites qui comptent de 10 à 250
employés. A eux deux, ces programmes ont mobilisé quelque 146 millions
d’euros de financement de donateurs pour le soutien à des entreprises
qui cumulent au total un chiffre d’affaires annuel de 25 milliards d’euros
et emploient au total 1,1 million de salariés. Si les entreprises
participant au Programme TAM ont conservé à 90 % leurs emplois,
le programme BAS a quant à lui contribué à augmenter l’emploi de
20 %. Leurs activités ont eu des taux de réussite élevés – 82 %
(TAM) et 92 % (BAS). Les initiatives nouvelles et en démarrage TAM/BAS
s’efforceront de pénétrer les zones rurales de tous les pays cibles,
en particulier par le biais du soutien à l’efficience en matière
d’environnement et d’énergie, aux femmes chefs d’entreprise, à la coopération
transfrontalière, aux pépinières d’entreprises et au tourisme. Enfin,
les programmes servent également d’étape préparatoire pour les projets
d’investissement de la BERD, en particulier dans les Early Transition Countries (ETC)
(pays en phase initiale de transition).
46. L’un des défis les plus pertinents en matière de développement
en Europe centrale et orientale est la nécessité de renforcer l’efficience
de l’utilisation de l’énergie
pour
parvenir à une plus grande compétitivité des entreprises locales,
à la réduction des émissions de gaz à effet de serre à mesure que
les économies prennent de l’expansion, ainsi qu’à une plus grande
sécurité énergétique. Le rôle spécial joué par la BERD dans la promotion
de l’efficience énergétique dans la région a été largement reconnu
par les autres institutions financières internationales. Il convient
de signaler ici l’importance de l’Initiative de la BERD en faveur
de l’énergie durable, lancée en mai 2006, dans le cadre de laquelle
la banque entend plus que doubler ses investissements dans le domaine
de l’efficience énergétique et des technologies plus propres au
cours des trois prochaines années. Ainsi, la banque va investir
quelque 1,5 milliard d’euros entre 2006 et 2008, auquel va venir
s’ajouter une assistance supplémentaire de la part de donneurs qui
pourrait atteindre près de 100 millions d’euros. Cette initiative
vient compléter 35 projets pour l’efficience énergétique industrielle,
ainsi qu’une série de lignes de crédit consacrées à l’efficience
énergétique, un portefeuille énergies renouvelables, des projets
de chauffage urbain et des programmes de modernisation des systèmes
de transport urbains, pour un total de 673 millions d’euros que
la banque a financé depuis 2001.
4. Processus de réforme dans le Caucase du Sud
47. La région du Caucase du Sud, en particulier l’Azerbaïdjan,
a connu des taux de croissance très élevés ces dernières années
(voir tableau 2 en annexe). Avec l’ouverture de l’oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan
et une rapide augmentation de la production pétrolière, l’Azerbaïdjan
est désormais l’économie du monde à la croissance la plus rapide.
Les recettes d’exportation sont florissantes et l’importance stratégique
de ce pays de plus en plus forte. Même si l’économie arménienne
s’est reprise ces dernières années, sa croissance est freinée par
la situation politique compliquée dans la région et la non-coopération
économique imposée par l’Azerbaïdjan et la Turquie. L’économie de
la Géorgie a également connu une belle croissance ces dernières années,
même si le rythme est moins soutenu. Une bonne part de la croissance
en Arménie et en Géorgie est tirée par la consommation privée, à
la suite d’augmentations salariales et d’une hausse de l’emploi,
et en conséquence de l’expansion du crédit et de l’augmentation
des flux entrants de transferts de fonds. L’Arménie et l’Azerbaïdjan
ont, en 2005-2006, atteint et dépassé leur niveau de PIB en termes
réels d’avant la transition (et ont rattrapé peu ou prou le niveau
moyen des autres pays en transition), tandis que la Géorgie n’a
encore récupéré que la moitié de son PIB «d’avant la transition»
en termes réels (et se classe loin derrière la moyenne des pays
en transition).
48. Le taux de l’inflation, qui avait baissé en Arménie ces dernières
années, remonte à nouveau essentiellement à la suite de l’augmentation
des prix de l’énergie. En Azerbaïdjan, les pressions inflationnistes sont
dues à une augmentation des dépenses nationales stimulées par les
recettes énergiques. Le déficit public est relativement faible dans
les trois pays du Caucase (même si l’Arménie est en moins bonne
position), bien que la situation se soit légèrement détériorée ces
quelques dernières années. Le déficit en compte courant est demeuré
plus ou moins stable en Géorgie ces dernières années et s’est quelque
peu amélioré en Arménie; quant à l’Azerbaïdjan, il est passé d’un
déficit relativement important (jusqu’à un quart de son PIB en 2003
et 2004) à un excédent (0,5 % du PIB) en 2006. Les flux d’IDE (tant
en termes absolus qu’en termes relatifs) ont diminué de manière
significative en Azerbaïdjan en 2005 et 2006, alors qu’ils étaient
encore élevés ces dernières années. Alors que les flux d’IDE ont
augmenté en Géorgie en 2005 et 2006, en Arménie, ils sont restés
relativement faibles mais stables.
49. Pour ce qui est des indicateurs de transition (voir tableau
3 en annexe), ces trois pays sont près d’avoir achevé la première
phase de la réforme (même si l’Azerbaïdjan est légèrement en retard
par rapport aux deux autres). L’Arménie et la Géorgie ont également
enregistré des progrès significatifs en matière de privatisation à
grande échelle et connu certaines améliorations dans le domaine
de la réforme bancaire et de la libéralisation des taux de change.
Pour ce qui est des indicateurs restants, le Caucase du Sud est
en retard, et aucun de ses indicateurs de transition n’a été revu
à la hausse en 2006.
50. Pour ce qui est des perspectives futures, le Rapport 2006
sur la transition (comme le montre le tableau 4 en annexe) invite
à poursuivre les améliorations dans l’environnement des affaires
pour les trois pays. L’Azerbaïdjan et la Géorgie doivent déployer
des efforts majeurs pour contenir l’inflation, tandis que pour l’Arménie,
si sa monnaie continue de s’apprécier, cela pourrait nuire à sa
compétitivité. La Géorgie doit remédier à ses lacunes d’infrastructures
et l’Azerbaïdjan se dégager de sa dépendance excessive à l’égard
du secteur énergétique. Enfin, ces trois pays sont pénalisés par
les faiblesses dans leurs institutions démocratiques et la prééminence
du droit, et les rumeurs de corruption sont préoccupantes dans toute
la région (même si la Géorgie est un peu moins mal placée).
51. Si les perspectives d’une adhésion à l’UE sont minces pour
les pays du Caucase du Sud, ceux-ci participent à la politique européenne
de voisinage (PEV), qui s’efforce d’encourager une coopération économique,
politique, culturelle et de sécurité plus approfondie entre l’UE
élargie et ses nouveaux voisins. Individuellement, les marchés des
pays du Caucase du Sud sont à l’évidence trop petits pour attirer
des investissements significatifs
.
Cela, conjugué à la diversité de leurs ressources et leur situation
géopolitique difficile, rend la coopération régionale (en vue d’une
intégration à plus long terme) essentielle pour la poursuite du
développement économique, politique et social du Caucase du Sud.
Si des conflits non résolus (notamment ceux du Haut-Karabakh, de
l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud) sont à l’évidence le premier
obstacle à la coopération régionale, cette coopération contribuerait
également à créer les conditions nécessaires pour résoudre ces conflits
ainsi que pour éviter que de nouveaux ne surgissent à l’avenir.
52. Votre rapporteur rappelle l’initiative de l’Assemblée (voir
Doc. 11082, la
Résolution 1525 (2006) et
la
Recommandation 1771
(2006)) en vue de l’établissement d’un pacte de stabilité
pour le Caucase du Sud. Ce pacte de stabilité pourrait s’appuyer
sur l’expérience positive de celui qui a été mis en place en Europe
du Sud-Est, tout en prenant en compte les différences significatives.
En tant que première mesure, la recommandation suggère l’organisation
d’une conférence internationale pour la sécurité et la coopération
dans le Caucase du Sud, en vue de faire le point sur les besoins
spécifiques de cette région et de fixer les conditions concrètes pour
le lancement potentiel d’un pacte de stabilité, en accord avec toutes
les parties prenantes. Elle invite les autorités de l’Arménie, de
l’Azerbaïdjan et de la Géorgie à entamer un débat politique sur
la possibilité de créer ce pacte de stabilité et, quel que sera
le statut retenu pour lui, les encourage à coopérer au niveau régional. Enfin,
elle appelle également à la consultation et au soutien d’autres
Etats membres et acteurs internationaux. Le soutien politique et
financier de l’UE, de la BERD, de la Fédération de Russie, de la
Turquie et des Etats-Unis est particulièrement important.
53. Dans le cadre de l’Initiative pour les pays en phase initiale
de transition, lancée en 2004 et qui vise à stimuler l’activité
du secteur privé dans les pays au revenu le plus bas, la BERD intensifie
actuellement ses travaux dans les trois pays du Caucase. En 2006,
11 projets par pays ont été approuvés en faveur de l’Arménie et
de l’Azerbaïdjan (pour 40,4 millions d’euros et 134,4 millions d’euros
respectivement de financement de la BERD) et 22 projets ont été
signés avec la Géorgie (pour une valeur de 114 millions d’euros
de fonds de la BERD). En septembre 2006, elle a ouvert un Bureau
régional pour le Caucase (ainsi que pour le Bélarus et la Moldova)
à Tbilissi (Géorgie). Ses travaux dans la région se focalisent sur
la réforme et le renforcement du secteur financier, le développement
du crédit-bail, le soutien aux micro et petites entreprises (Arménie
et Azerbaïdjan), la réhabilitation des infrastructures de développement
(Azerbaïdjan et Géorgie), la restructuration du secteur énergétique
(Arménie) et l’introduction de mesures pour une saine gouvernance d’entreprise
(Géorgie).
54. Avec d’autres organisations internationales, le Conseil de
l’Europe et la BERD participent également au Programme régional
de l’Initiative de Kiev. Cette initiative, lancée en décembre 2006,
vise à promouvoir des sociétés démocratiques participatives en contribuant
au développement culturel, social et économique durable dans les
trois pays du Caucase ainsi qu’en Moldova et en Ukraine. Pour cela,
elle s’efforce de tirer parti de la coopération multilatérale et
de la gestion transsectorielle de la culture et du patrimoine culturel.
En outre, fin 2006, la BERD, la BEI et la Commission européenne
ont signé un mémorandum d’entente destiné à faciliter encore plus
les projets conjoints en Europe de l’Est, dans le Caucase du Sud,
en Fédération de Russie et en Asie centrale, en particulier pour
ce qui est du développement des infrastructures, sous l’égide de
la politique européenne de voisinage de l’UE.
5. Perspectives d’intégration et de développement
régional en Europe du Sud-Est
55. Tous les pays d’Europe du Sud-Est (ESE) ont nettement
progressé dans leur réforme ces dernières années. Comme le montre
le tableau 5 en annexe, en 2006, la région de l’ESE a vu 12 des
24 indicateurs de transition améliorés pour ce qui est de la privatisation
à petite échelle, de la gouvernance et de la restructuration d’entreprise,
de la politique de concurrence et des institutions financières.
Dans l’ensemble, la région a pratiquement achevé la phase initiale
de réforme. Des progrès ont également été faits en ce qui concerne
la privatisation à grande échelle, la réforme bancaire et la libéralisation
des taux de change, même si la plupart des pays sont encore en retard
dans les domaines de la gouvernance, de la restructuration d’entreprises,
de la politique de concurrence, des marchés boursiers, des institutions
financières non bancaires et des infrastructures. On a noté en Bulgarie
et en Roumanie de gros efforts en faveur des réformes en 2006, ces
pays se préparant à adhérer à l’UE. «L’ex-République yougoslave
de Macédoine» et la Serbie ont également progressé de manière significative
l’an dernier, même si la Serbie reste encore en retard dans bon
nombre de secteurs de la réforme. En termes de développement, l’Europe
du Sud-Est a dépassé les pays de la CEI+M et rattrape lentement
la zone des PECOB. Les perspectives d’une adhésion potentielle à
l’UE à l’avenir devraient encourager la poursuite des réformes dans
les Balkans de l’Ouest.
56. La situation des indicateurs macroéconomiques (telle que présentée
dans le tableau 6 en annexe) donne une image contrastée. La plupart
des pays de l’Europe du Sud-Est ont connu une forte croissance au cours
des deux dernières années. L’année 2006, en particulier, a été remarquable
pour la Bulgarie et la Roumanie qui ont vu leur croissance du PIB
en termes réels bondir en anticipation de leur adhésion à l’UE, ainsi
que pour le Monténégro, depuis un an indépendant
. Les pressions inflationnistes augmentent
dans la plupart des pays d’Europe du Sud-Est, en particulier en
Serbie, du fait d’une hausse des prix de l’énergie, mais aussi d’une
rapide augmentation du crédit et des salaires. Plusieurs pays de
la région ont donc adopté des régimes de taux de change fixe sous
une forme ou sous une autre. Les comptes courants sont en déficit
dans la région
.
Or ces déficits sont importants et préoccupants précisément à cause
de ces régimes de taux de change fixe. L’ensemble de la région a
connu des arrivées records d’IDE, en particulier liés à la privatisation et
aux acquisitions dans le secteur bancaire. Le plus remarquable est
le Monténégro qui a ainsi reçu en 2005 l’équivalent de près de 20 %
de son PIB sous forme d’IDE qui ont continué d’augmenter en 2006,
pour l’essentiel du fait des privatisations, de l’expansion du secteur
bancaire et des investissements verts dans le tourisme. Toutefois,
le chômage reste élevé dans toute la région, culminant à 33 % en
Serbie, à près de 36 % dans «l’ex-République yougoslave de Macédoine»
et à 41 % en Bosnie-Herzégovine.
57. Le Rapport 2006 sur l’indice de réforme et les investissements,
élaboré par le Investment Compact sous la direction de l’OCDE dans
le cadre du Pacte de stabilité, a conclu que l’Europe du Sud-Est
a enregistré des améliorations significatives en matière de climat
des investissements et de climat des affaires en mettant en œuvre
des politiques d’investissement efficaces, en libéralisant les régimes
commerciaux et en introduisant des baisses dans la fiscalité des
entreprises. Les perspectives pour l’avenir sont globalement favorables.
La croissance devrait se poursuivre à la suite de l’expansion des
exportations et d’une forte demande intérieure. L’investissement
et les arrivées d’IDE devraient également demeurer soutenus et l’image
de la région s’améliore de plus en plus. Le premier des défis macroéconomiques
qui se pose pour ces pays est de respecter une discipline budgétaire
et de rester vigilant dans le secteur financier. Les incertitudes
politiques non résolues (en particulier le Kosovo) pourraient menacer
la stabilité de la région.
58. Le Pacte de stabilité pour l’Europe du Sud-Est, adopté en
1999, a permis de revitaliser les économies de la région ces dernières
années. Il a favorisé la stabilité, la coopération régionale et
l’adoption d’approches communes à de nombreux défis (tels que le
crime organisé et la corruption), et a également aidé à créer un marché
régional de l’électricité et une zone de libre-échange. Le Pacte
de stabilité se transforme actuellement en un conseil de coopération
régionale (CCR) qui sera en place d’ici à 2008. Le CCR concentrera
ses efforts sur des domaines dans lesquels les pays de la région
ont estimé qu’une coopération régionale serait la plus bénéfique:
le développement économique et social, les infrastructures, la justice
et l’intérieur, la coopération en matière de sécurité, le développement
du capital humain et la coopération parlementaire.
59. La communauté internationale reste engagée mais ce sont les
pays de la région qui vont s’approprier la coopération régionale.
Un cadre de coopération régionale durable et voué au succès suppose
l’engagement politique total des pays de la région, ainsi que la
participation sur le long terme de donneurs, de l’UE ou non. Un
certain nombre de décisions doivent encore être prises en ce qui
concerne l’implantation du secrétariat du CCR, le système de financement
et les contributions des donneurs, la relation avec le Pacte de
stabilité, ainsi qu’un mandat précis et une base juridique pour
le CCR
. L’Investment Compact (une initiative
sous la direction de l’OCDE dans le cadre du Pacte de stabilité)
a proposé la création d’un comité d’investissement pour l’Europe
du Sud-Est, qui servirait de bras financier du CCR pour l’investissement.
Ce comité, qui devrait être créé au printemps de 2007, pourrait
travailler à établir une plateforme régionale de haut niveau pour
suivre les progrès et pour concevoir, mettre en œuvre et évaluer
les politiques liées à l’investissement étranger et national dans
le contexte régional. Il pourrait également superviser et mettre
en œuvre le cadre régional pour l’investissement et les clauses
d’investissement de l’Accord de libre-échange régional pour l’Europe
du Sud-Est.
60. La BERD, pour sa part, a lancé, en mai 2006, l’Initiative
pour les Balkans de l’Ouest, destinée à stimuler les investissements
dans les entreprises privées, les institutions financières et le
développement des infrastructures dans les cinq pays de la sous-région.
Ce fonds constitué de plusieurs donneurs s’appuie sur l’Initiative
pour les pays en phase initiale de transition et s’efforce de déployer
un effort intégré pour le développement du secteur privé, portant
l’accent sur la création d’emplois. Dix millions d’euros au total, provenant
de 11 pays donneurs, ont été promis d’entrée de jeu.
6. Le point sur les travaux de la BERD en Fédération
de Russie, en Ukraine et en Moldova
6.1. Fédération de Russie
61. La Fédération de Russie a poursuivi son intégration
à l’économie européenne et mondiale, et son climat des affaires
s’améliore dans le contexte d’une stabilité politique générale et
d’une saine gestion macroéconomique. L’investissement – tant national
qu’étranger – a connu une croissance vigoureuse, qui devrait vraisemblablement
demeurer soutenue si l’on en croit le Conseil consultatif sur l’investissement étranger
(auquel la BERD participe activement), malgré des restrictions à
l’investissement étranger dans 39 secteurs de l’économie russe jugés
stratégiques. Les progrès de la réforme dans le secteur financier
russe (dont deux indicateurs de transition ont été revus à la hausse
en 2006) ont été particulièrement dynamiques l’an dernier et des
avancées notables ont été enregistrées dans les indicateurs de la
réforme de la phase initiale (pour ce qui est de la gouvernance,
de la restructuration d’entreprises, de la politique de la concurrence et
des infrastructures).
62. Le pays connaît actuellement une période de forte croissance,
essentiellement du fait d’une augmentation de la demande intérieure
et d’un renforcement de ses termes de l’échange (le taux de croissance
du PIB en termes réels s’est établi à 6,7 % en 2006). Selon les
estimations, les excédents de la balance intérieure pour 2006 devraient
s’établir à 7,5 % à la suite de mesures de resserrement budgétaire
et l’inflation continue de reculer (de 12,7 % en 2005, selon les
estimations, elle devrait être descendue à 9,7 % en 2006). Le Fonds
de stabilisation alimenté par les recettes des hydrocarbures est
une initiative importante qui encourage la stabilité des prix. Selon
les estimations, il devrait atteindre les 84 milliards de dollars
en 2006. Le compte courant du pays est également en excédent, avec
un niveau record de 10 % en 2006 selon les projections, essentiellement
du fait d’une augmentation du prix de matières premières clés destinées
à l’exportation même si les cours du pétrole ont baissé au deuxième
trimestre de 2006. En 2006, la BERD a investi 1,9 milliard d’euros
dans des entreprises russes, ce qui représente 38 % de son portefeuille
total pour l’année (en augmentation par rapport aux 26 % en 2005).
Cet investissement a principalement servi au soutien des secteurs
agroalimentaire, de la production, de l’immobilier/tourisme et des
télécommunications en dehors des grands centres urbains, la part
des petits prêts (5 millions d’euros ou moins par prêt) étant de
plus en plus importante (environ un tiers du total).
63. Même si les perspectives de croissance demeurent fortes, l’économie
russe semble en butte à des contraintes de capacité et les Russes
sont de plus en plus préoccupés par la corruption et une dégradation des
services sociaux. Le Rapport sur la transition de 2006 de la BERD
identifie une série de défis que la Fédération de Russie doit relever
pour avancer vers l’autonomie, et une croissance économique tirée
par l’investissement et l’innovation: améliorer le climat des investissements
en faisant progresser la réforme des institutions publiques, lutter
contre la corruption, réduire les obstacles administratifs et bureaucratiques
et clarifier le rôle des investissements étrangers dans les secteurs
stratégiques; équilibrer la consolidation des industries et le rôle
des organismes d’Etat, d’une part, et le besoin de maintenir un
régime commercial et d’investissements étrangers ouverts et fondés
sur des règles, d’autre part; et veiller à ce que les marchés intérieurs
soient compétitifs; enfin, poursuivre les efforts pour réduire l’inflation
en contenant l’expansion budgétaire et en permettant une plus grande
flexibilité des taux de change.
64. La Fédération de Russie demeure l’un des principaux pays cibles
pour les investissements de la BERD. Conformément à sa nouvelle
stratégie par pays pour la Fédération de Russie, approuvée en juillet
2006, la BERD cherche notamment, par ses activités, à réduire la
dépendance du pays à l’égard des ressources naturelles, à améliorer
et à renforcer les normes de gouvernance d’entreprise, à faciliter
le développement des PME, à moderniser les infrastructures russes
et à promouvoir l’intermédiation financière, en particulier dans les
régions. Outre ses bureaux régionaux existants à Moscou, Saint-Pétersbourg,
Ekaterinbourg et Vladivostok, la BERD ouvre actuellement de nouvelles
antennes à Rostov, Samara et Krasnoïarsk. Au cours de l’assemblée
annuelle de la BERD et du Forum économique qui se sont déroulés
à Kazan les 20 et 21 mai 2007, les autorités russes ont annoncé
une décision capitale: l’établissement d’une banque russe de développement,
dotée d’environ 2 milliards de dollars provenant du Fonds d’investissement
(lui-même financé par des ressources du Fonds de solidarité prioritaire
– FSP) et qui devrait, en principe, être opérationnel dans deux
ans. Le rapporteur espère que cette nouvelle institution travaillera
en complémentarité avec d’autres investisseurs institutionnels tels
que la BERD, en particulier pour le financement de projets d’infrastructure coûteux
et avec de longues périodes d’amortissement par le biais de partenariats
public-privé.
6.2. Ukraine
65. Comme la Fédération de Russie, l’Ukraine s’est rapprochée
d’une accession à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et a
déployé des efforts de réforme conséquents dans le secteur financier.
Ses indicateurs sur la réforme bancaire et la libéralisation des
taux de change (ainsi que sur les infrastructures) ont été revus
à la hausse en 2006, toutefois, bon nombre d’autres indicateurs
demeurent à l’évidence à la traîne. Les cibles visées en matière
de privatisations n’ont pas été atteintes et il convient encore
d’éliminer bon nombre de subventions croisées dans l’économie pour
éviter les distorsions sur les marchés et les pertes budgétaires.
Malheureusement, l’Ukraine demeure l’un des pays de la région les
plus consommateurs d’énergie et les moins efficients dans ce domaine.
La BERD met actuellement en œuvre plusieurs projets concernant le
secteur énergétique en Ukraine, notamment trois projets en coopération
avec la BEI.
66. En 2006, la croissance du PIB en termes réels s’est établie
à 7,1 % (contre 2,6 % en 2005) du fait de hausses des prix des métaux
exportés, d’une demande intérieure plus forte et d’une augmentation
des investissements. Le taux d’inflation baisse (9,1 % en 2006 selon
les estimations), en partie grâce à la discipline budgétaire et
à une réduction du prix des produits alimentaires. L’Ukraine a enregistré
un déficit en compte courant en 2006 (1,6 % du PIB) pour la première
fois depuis 1998, du fait d’importations florissantes, de prix de
l’énergie en hausse et d’exportations qui n’augmentent pas aussi
rapidement. Malgré cela, les arrivées d’IDE demeurent relativement
conséquentes, alors même que la situation politique, les priorités
dans ce domaine et donc la prise de décision dans le pays pâtissent
d’un manque de consensus parmi les acteurs politiques clés.
67. Pour l’Ukraine, la BERD a recommandé de travailler en priorité
sur la bonne gouvernance et la transparence (notamment par des améliorations
du droit des sociétés, des mesures de lutte contre la corruption,
un surcroît d’effort en matière de réforme de la justice, et la
garantie d’une concurrence loyale pour les entreprises privées);
sur la promotion de l’investissement dans les technologies permettant
des économies d’énergie et sur l’augmentation de la participation
du secteur privé dans le secteur de l’énergie afin de compenser
l’impact des hausses de prix sur les importations de gaz; sur le
maintien d’une discipline budgétaire et la mise en œuvre d’une politique
de taux de change flexible afin de mieux résister à des situations extérieures
pénalisantes.
68. La BERD demeure le plus gros investisseur en Ukraine, où elle
se concentre sur le dialogue politique pour améliorer l’environnement
des affaires et la compétitivité du secteur privé; sur le renforcement
des capacités institutionnelles du secteur financier et l’augmentation
du niveau de financement pour les micro-entreprises et les PME,
ainsi que sur le soutien à la restructuration et à la modernisation
du réseau d’infrastructures du pays (notamment le secteur énergétique,
où un intérêt particulier est porté à la sécurité nucléaire). L’investissement
de la BERD en Ukraine n’a jamais été aussi élevé (797 millions d’euros
en 2006); au 1er janvier 2007, au total,
la BERD avait investi dans ce pays près de 2,9 milliards d’euros
sous forme de 132 opérations, qui ont contribué à mobiliser 5,6
milliards d’euros supplémentaires de la part d’autres investisseurs.
Il convient aussi de noter que la BERD s’efforce en permanence d’accroître
ses prêts directs aux municipalités.
6.3. Moldova
69. Bien que la Moldova ait pratiquement achevé la phase
initiale de ses réformes, ces derniers temps le processus de privatisation
et les réformes structurelles se sont grippés. Le pays a quelque
peu progressé en ce qui concerne la réforme bancaire et la libéralisation
des taux d’intérêt, toutefois l’on attend encore des améliorations
majeures dans le cadre légal et la supervision du secteur bancaire,
ainsi que dans la gouvernance d’entreprise et la transparence. En
2006, aucun des indicateurs de transition n’a été revu à la hausse
pour la Moldova (en dehors de la sous-catégorie des télécommunications).
Son taux de croissance s’est ralenti (estimé à 4 %, en baisse par
rapport à 7,5 % en 2005) et l’inflation est demeurée élevée en 2006 (près
de 13 %) à la suite de l’embargo russe sur le vin et les produits
agricoles moldoves, conjugué à une augmentation brutale des prix
de l’énergie, essentiellement pour les importations de gaz
.
La consommation des ménages augmente, essentiellement du fait de
transferts de fonds plus importants de Moldoves expatriés qui travaillent
à l’étranger (ils représenteraient au moins 11 % de la main-d’œuvre
du pays). Etant donné les importations (énergie) en hausse et les
exportations en chute, le déficit commercial a atteint presque 50 %
du PIB en 2006. Cependant, l’investissement a augmenté, avec un
pic des apports d’IDE avec 225 millions de dollars en 2006. Selon
la BERD, les principaux obstacles aux affaires restent l’ingérence
des pouvoirs publics dans l’économie, la faiblesse de l’appareil
judiciaire faible, le sous-développement du secteur bancaire, l’opacité
du système financier et l’accès limité au financement.
70. Parmi les défis majeurs qui se posent à l’économie moldove,
on citera: 1. le maintien du rythme des réformes pour améliorer
l’environnement des affaires, attirer les investissements et renforcer
la compétitivité; le renforcement de la gouvernance d’entreprise
et de la transparence dans le secteur bancaire pour attirer les investissements
et promouvoir la concurrence; et 3. la mise en place de politiques
budgétaire et monétaire prudentes (et de la flexibilité des taux
de change) pour remédier à un déséquilibre croissant des comptes extérieurs
et aux pressions inflationnistes. La Stratégie de la BERD pour la
Moldova, approuvée en juillet 2005, identifie les objectifs opérationnels
pour un soutien aux institutions financières, à l’entreprise privée
et aux infrastructures. Les activités de la BERD en Moldova, pays
concerné par l’Initiative pour les pays en phase initiale de transition,
visent essentiellement à stimuler les entreprises privées par des
investissements directs (en particulier dans l’agroalimentaire et
les petites entreprises) et par un financement d’intermédiation
distribué par des banques locales ainsi que par le soutien au développement
des compétences des entreprises locales. Elles incluent également
plusieurs projets conjoints avec la BEI en faveur du secteur du
transport. En décembre 2006, la BERD avait approuvé 48 projets en
Moldova pour 205 millions d’euros au total (y compris 13,7 millions
d’euros en 2006), auxquels il convient d’ajouter 125 millions d’euros
mobilisés par ses partenaires.
7. Perspectives et défis
71. L’évaluation des activités de la BERD au cours des
cinq dernières années montre que la banque est une institution financière
internationale à la réussite incontestable dont les activités ont
été menées conformément à son mandat en tant que banque de développement
ayant une dimension politique et qui a apporté une contribution
significative à la promotion d’économies fonctionnant selon les
lois du marché, d’une bonne gouvernance d’entreprise et de l’esprit
d’entreprise dans ses pays d’opération, en particulier en Europe centrale
et orientale. La banque s’est taillé une solide réputation parmi
les investisseurs étrangers et locaux dans la région à mesure qu’elle
s’impliquait davantage et étoffait son expertise. Même si la banque
se désengage désormais progressivement de l’Europe centrale, son
dialogue politique permanent avec les gouvernements partenaires
et acteurs des marchés continue de jouer le rôle de catalyseur pour
la poursuite des réformes dans tous ses pays d’opération.
72. Le rapporteur se félicite que la BERD apporte une attention
croissante au secteur de l’énergie, en particulier pour ce qui est
d’accroître l’efficience énergétique et la sécurité de l’approvisionnement
énergétique dans la région. Il espère que les pays cibles feront
de ces deux questions majeures une priorité politique sur le long
terme et mettront ainsi à profit le financement de la BERD. Plus
la BERD s’investira en Europe de l’Est et du Sud-Est, plus sa contribution
dans ce secteur sera profitable.
73. A la suite des décisions prises lors de son assemblée annuelle
de 2006, la banque va désormais opérer de plus en plus dans les
pays les plus défavorisés dans un environnement plus complexe et
plus risqué pour ses activités. Il est important de noter que l’effort
novateur d’investissement et de développement de la BERD a été déployé
jusqu’ici en préservant un équilibre sain entre le risque, l’engagement
et les résultats et que la banque a fréquemment dépassé ses objectifs
stratégiques (par exemple en termes d’impact sur la transition, de
volume d’activités, de rentabilité et de stimulation sur le financement
du secteur privé). La banque a maximisé son volume d’activités à
près de 4,9 milliards d’euros pour 301 projets en 2006
(avec une
part de 48 % destinée aux pays en phase initiale à intermédiaire
de transition et 38 % pour la seule Fédération de Russie) et engrangé
des bénéfices impressionnants, en particulier sur 2005 et 2006,
qui lui ont permis de consolider des réserves générales de plus
de 10 % du capital autorisé en 2006. Ce «coussin» financier permet à
la banque d’accélérer l’expansion de sa capacité de prise de risque
et de soutenir des activités pour lesquelles le financement manque.
74. Selon les estimations mêmes de la BERD, l’écart se creuse
actuellement entre les pays en phase initiale de transition et les
économies plus matures, ce qui indique un ralentissement des réformes
dans la majorité des économies en phase initiale de transition.
Cela demande donc de la part de la BERD de renforcer sa présence
sur le terrain et de chercher à augmenter ses contacts locaux, de
proposer une offre de financement plus diversifiée (notamment des
prêts libellés en devise locale), de coopérer plus étroitement avec
d’autres institutions financières internationales (en particulier
la Banque mondiale, la Société financière internationale (IFC),
la BEI et la Banque asiatique de développement), avec les associés
dans les projets (notamment le Centre d’investissement de la FAO
des Nations Unies, l’Initiative centre-européenne, etc.) et les
partenaires locaux, et d’être encore plus vigilante en ce qui concerne
l’intégrité des clients.
75. Le nouveau plan d’activités de la banque prévoit des plans
d’entreprises annuels plus spécifiques, à partir de 2007, pour mieux
jauger les opportunités, avantages, coûts et allocation des ressources
sous l’angle du développement et de la performance de la banque.
L’activité bancaire constituant le cœur de métier sera adaptée pour
élargir la gamme de produits en vue de répondre à la grande hétérogénéité
des priorités, conditions des marchés, risques et profils de clients
par pays, tout en accordant une attention particulière au dialogue
politique proactif qui permettra d’améliorer l’environnement des
affaires. La faiblesse de la base capitalistique des entreprises
et institutions financières, le sous-développement des infrastructures
et les problèmes du secteur énergétique sont considérés comme les
principales contraintes dans les pays cibles, mais constituent aussi
de nouveaux défis pour l’action de la BERD. Les mesures de contrôle
du risque, l’audit interne et les fonctions d’évaluation des projets
devront être progressivement renforcés.
76. La dernière analyse stratégique des ressources en capital
ne propose pas d’augmentation de capital dans un proche avenir et
fixe un certain nombre de priorités opérationnelles telles que la
stabilisation du volume annuel d’activités dans une fourchette allant
de 3,3 à 3,9 milliards d’euros, l’augmentation graduelle du financement
pour la Fédération de Russie et du volume des opérations dans les
pays en phase initiale/intermédiaire de la transition, assortie
d’un désengagement progressif des pays les plus avancés, et une tendance
à réduire la taille moyenne des projets pour permettre de consacrer
davantage de ressources aux PME et micro-entreprises. Malgré la
recherche permanente de gains de productivité, il sera nécessaire
de renforcer certains des bureaux déjà ouverts dans les pays, d’en
ouvrir d’autres et d’en fermer quelques-uns dans les pays avancés
dès 2007. Il est rassurant de savoir qu’à partir de la fin de 2008,
la BERD sera, selon les estimations, en mesure de résister à des
chocs de grande ampleur de quelque 3,5 fois l’amplitude de la crise
financière de 1998.