1. Introduction
1. Le nombre de migrants connaît
une hausse constante en Europe, et il est probable que le phénomène se
poursuive avec la chute des taux de natalité, le vieillissement
de la population et l’appétit persistant de l’Europe pour les travailleurs
tant légaux que clandestins.
2. Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM),
le nombre de migrants vivant en Europe en 2005 serait de 64,1 millions,
soit 8,8 % de la population
. Aujourd’hui,
trois ans après cette estimation, leur nombre doit être beaucoup
plus élevé, surtout si l’on tient pleinement compte de ceux – et
ils sont légion – qui s’y trouvent en situation irrégulière. Dans
toute analyse de la situation de la démocratie en Europe, il convient donc
d’étudier dans quelle mesure cette multitude de migrants et leurs
communautés participent et sont associés au processus démocratique.
3. Le principe selon lequel tous les membres d’une communauté
doivent prendre part aux décisions qui la concernent est au cœur
même de la démocratie. Les migrants peuvent apporter une contribution
importante à leur communauté d’accueil; à ce titre, on s’accorde
de plus en plus à reconnaître, en Europe, qu’ils devraient se voir
confier un rôle équitable dans le processus politique et être autorisés
à participer sans réserve à la vie politique, sociale et culturelle
des Etats membres du Conseil de l’Europe. Il ne s’agit pas simplement
de participation au processus politique. La société contemporaine
est organisée dans bien des domaines selon des principes démocratiques,
qu’il s’agisse du sport, de l’art, des établissements scolaires,
des églises ou des organisations caritatives, et la gouvernance
d’organisations de plus en plus diverses repose sur des comités de
gestion, des conseils d’administration ou des conseils d’établissement.
La composition du comité ou du conseil est bien souvent déterminée
par un processus électoral et la volonté d’individus d’assumer volontairement
la responsabilité de la gestion et de la supervision.
4. Face à cette prise de conscience de l’importance cruciale
de l’intégration
des
migrants dans les sociétés d’accueil, les Etats membres du Conseil
de l’Europe devraient redoubler d’efforts pour encourager les migrants
à s’engager dans des associations et des clubs locaux et inviter
ces organisations à les accueillir comme il se doit. Cela peut constituer
un premier pas vers une participation accrue au processus politique,
les migrants étant ainsi progressivement amenés à se rendre compte
que la participation peut être une force de changement dans leur
communauté locale et la société en général.
5. La participation démocratique doit aussi être envisagée dans
le contexte de l’accès à des services tels que la santé, l’éducation
et le logement. Cet accès doit être fondé sur le principe de l’équité
des procédures et de l’accès à des voies de recours. Cela est particulièrement
important s’agissant des droits des enfants migrants, des personnes
âgées migrantes et des migrants souffrant d’exclusion sociale. Dans
tous ces domaines, il est indispensable que les migrants aient un
sentiment d’impartialité, d’équité et de justice pour qu’ils puissent
se sentir intégrés dans les communautés où ils vivent.
6. L’intégration devrait toujours être vue comme un processus
à double sens, impliquant à la fois les migrants et la population
dans son ensemble et appelant une reconnaissance mutuelle de toutes
les parties concernées.
7. Cette intégration va de pair avec la compréhension des valeurs
communes et le respect des différences culturelles, qui sont indispensables
au développement démocratique. Les questions de la participation démocratique
et de l’intégration des migrants sont donc étroitement liées, de
telle sorte qu’on peut y voir des éléments qui se renforcent mutuellement.
8. En Europe, la participation démocratique reste faible s’agissant
non seulement des migrants, mais aussi du reste de la population.
Le déficit est toutefois plus marqué dans le premier cas, et même
nettement plus en ce qui concerne les femmes migrantes.
9. Ce rapport se propose par conséquent d’étudier comment la
participation démocratique des migrants peut être améliorée et d’envisager
les mesures juridiques, politiques et structurelles à prendre en
ce sens. Il compte aussi se pencher sur la question de l’intégration,
en se demandant dans quelle mesure elle peut favoriser la participation
démocratique et en s’interrogeant sur l’influence que celle-ci peut
avoir, à son tour, sur l’intégration.
10. On ne peut pas améliorer la participation démocratique des
migrants du jour au lendemain. Il s’agit d’une question complexe,
qui requiert un effort durable et soutenu. En Belgique, par exemple,
ce n’est qu’après une longue bataille, notamment contre une xénophobie
bien ancrée, que les ressortissants de pays tiers ont obtenu le
droit de vote aux élections locales.
11. La participation démocratique peut s’exprimer à différents
niveaux: local, national et européen. Toutefois, c’est sans doute
au niveau local qu’elle est la plus efficace et pertinente pour
les migrants, en particulier si la naturalisation n’est pas envisageable.
12. La participation démocratique est importante pour les migrants,
qu’ils soient de la première génération ou des suivantes. Néanmoins,
ce rapport portera surtout, quoique pas exclusivement, sur les difficultés rencontrées
par les migrants de première génération. Plus tôt ils ont la possibilité
de participer à la vie démocratique, plus ils ont de chances d’y
parvenir et de réussir leur intégration. La participation démocratique peut
également s’exercer dans le pays d’origine, et les migrants doivent
être encouragés à maintenir cet investissement le cas échéant. Cette
question n’est toutefois pas abordée dans le cadre du présent rapport.
13. Votre rapporteur tient à dire sa gratitude pour l’appui et
les conseils qu’il a reçus, dans la préparation de ce rapport, de
la part de tous les acteurs du processus de consultation. Il voudrait
en particulier remercier le Migration Policy Group (MPG) et la Commission
des Eglises auprès des migrants en Europe (CEME) pour leur aide
précieuse
.
2. Comprendre la participation démocratique
des migrants au sein de la population dans son ensemble
14. La participation démocratique
peut prendre bien des formes. Elle peut notamment s’exprimer par
le vote, le fait de se présenter à une élection et l’exercice d’autres
droits politiques tels que la liberté d’expression, de pensée, de
conscience et de religion. Elle peut aussi avoir trait à la liberté
d’association, à travers l’appartenance à un parti politique, l’adhésion
à un syndicat, la participation à une manifestation, etc. En outre, il
peut s’agir de prendre part à la société civile, que ce soit au
sein d’associations, y compris de migrants, d’organisations paroissiales
ou encore de groupes à caractère scolaire, par exemple.
15. Il importe de noter que la participation à l’une de ces activités
peut avoir pour effet d’ouvrir sur d’autres. Plus un migrant prend
confiance dans une forme donnée de participation, plus il est susceptible
d’élargir cette expérience.
16. Il est extrêmement difficile de quantifier le degré de participation
démocratique des migrants en Europe, et l’on aura besoin pour cela
de bien plus d’études. Il existe néanmoins tout un éventail de travaux universitaires
qui donnent à penser que cette participation est faible, y compris
pour les Européens vivant en dehors de leur pays d’origine.
17. «L’European Social Survey»
est l’une des sources majeures de
ce type d’informations. En s’appuyant sur ses statistiques, une
étude portant sur les taux de participation civique des migrants
a été réalisée dans 22 pays européens
.
On y apprend ainsi qu’en Allemagne, les citoyens participent à hauteur
de 57,9 %, soit bien plus que les migrants, à 34 %. Pour la France,
ces taux sont respectivement de 53,2 % contre 48,1 %. En Hongrie,
ils s’établissent à 19,7 % contre 17,2 % et, en Estonie, à 17,7
% contre 14,8 %. Il est cependant intéressant de noter que les pays
ne présentent pas tous des taux de participation inférieurs pour
les migrants; au Portugal, par exemple, la tendance est inverse,
avec 18,1 % de ressortissants nationaux participant à la vie civique
du pays, contre 22,4 % de migrants.
18. Cette enquête s’est également penchée, de manière générale,
sur la participation civique des natifs et des migrants en termes
d’appartenance à des syndicats et partis, de travail pour des partis
politiques ou d’activités au profit d’autres groupes ou associations
et d’actions symboliques (signature de pétitions, manifestations,
etc.). Dans ce cadre, le taux de participation total est de 49,83
% en ce qui concerne les natifs, mais seulement de 38,96 % chez
les immigrés
.
19. De plus grandes disparités se font évidemment jour quand on
s’intéresse à des formes politiques de participation données, en
particulier lorsque la loi impose des restrictions au droit de vote
ou à celui de créer et de rejoindre des partis politiques.
20. Lorsque l’on examine la participation des migrants, il est
utile de se rappeler qu’ils ne constituent pas un groupe homogène.
Ils viennent de différents pays et ont souvent des expériences de
vie très dissemblables. Leur niveau de participation à la vie du
pays hôte dépend de facteurs variés, dont:
- le niveau général de participation démocratique dans leur
pays d’origine;
- le niveau de leur propre expérience ou de celle de leur
famille en la matière avant de migrer;
- le niveau général d’engagement dans la société hôte;
- les liens et la proximité culturels entre le pays d’origine
et le pays hôte;
- le niveau de motivation individuelle des personnes concernées;
- le niveau de leur intégration et les facteurs qui favorisent
l’intégration dans leur pays d’accueil.
21. Il est prouvé que chacun des facteurs ci-dessus a une influence
positive sur le niveau de participation démocratique du migrant.
L’expérience de vie des individus (qu’il s’agisse de travailleurs
hautement qualifiés, de réfugiés, d’étudiants, d’ouvriers saisonniers,
de migrants au titre du regroupement familial, d’immigrés clandestins,
de migrants de première ou de seconde génération, etc.) joue également
un rôle crucial à cet égard. Enfin, l’appartenance ou non du migrant
à l’Union européenne représente une différence de taille.
22. Il est clair que certains groupes ethniques ou nationaux sont
plus actifs que d’autres en Europe. Un projet de recherche a ainsi
conclu que les Européens de l’Est avaient tendance à se montrer
plus passifs que les personnes originaires d’Asie, d’Amérique latine
et d’Afrique. Les migrants russes et albanais seraient parmi les
moins mobilisés, alors que les Iraniens et les Indonésiens apparaissent
au contraire comme les plus déterminés
.
23. Dans l’élaboration de mesures visant à améliorer la participation
démocratique des migrants, il importe par conséquent de prendre
en considération les multiples expériences individuelles et les
différents facteurs qui influent sur la participation et l’intégration.
Les Etats ne doivent pas envisager ces mesures comme des options
mutuellement exclusives, mais plutôt comme des mécanismes complémentaires
de promotion de la participation démocratique des migrants. Par
exemple, le fait d’accorder le droit de vote au niveau local ne dispense
pas un pays de répondre à la nécessité d’établir des organismes
consultatifs ni d’appuyer les associations de migrants ou d’autres
initiatives de la société civile en leur faveur.
3. Le
rôle du Conseil de l’Europe dans l’amélioration de la participation
démocratique des migrants
24. Le Conseil de l’Europe attache
la plus grande impor tance à l’amélioration de la participation
des migrants. L’Assemblée apporte et continuera d’apporter une contribution
essentielle à la recherche de nouveaux progrès dans ce domaine.
Elle est convaincue que ces progrès seront déterminants pour faire reculer
la xénophobie et les tensions raciales.
25. L’Assemblée a adopté la
Recommandation
1500 (2001) sur la participation des immigrés et des résidents étrangers
à la vie politique dans les Etats membres du Conseil de l’Europe.
Ce dernier a ses propres conventions: celle relative au statut juridique
du travailleur migrant (STE no 93), et celles sur la nationalité
(STE no 166) et sur la participation des étrangers à la vie publique
au niveau local (STE no 144). Le Congrès des pouvoirs locaux et
régionaux du Conseil de l’Europe a accompli un travail important
sur la question et adopté la
Résolution
141 (2002) et la
Recommandation
115 (2002) sur la participation des résidents étrangers à la vie publique
locale: les conseils consultatifs, ainsi que la
Résolution 181 (2004) et la
Recommandation
153 (2004) sur un pacte pour l’intégration et la participation
des personnes issues de l’immigration dans les villes et régions
d’Europe. Il a également publié un «manuel» sur les organismes consultatifs
locaux pour les résidents étrangers.
26. Au plan intergouvernemental, le Comité européen sur les migrations
(CDMG) est saisi de nombreuses questions relatives à l’intégration
des migrants et, dès 1992, dans une recommandation sur les relations communautaires,
le Comité des Ministres
appelait
à encourager «la participation la plus large possible des migrants
et des personnes issues de l’immigration à la vie de la société
du pays où ils sont installés». Le CDMG a publié une série de rapports
dans le cadre du projet Relations intercommunautaires
ainsi qu’un Cadre des politiques d’intégration
.
Le Comité d’experts sur la participation démocratique et l’éthique
publique aux niveaux local et régional examine régulièrement, entre
autres, les obstacles à l’adhésion à la Convention sur la participation
des étrangers à la vie publique au niveau local. Par ailleurs, à
la Conférence des ministres européens responsables des collectivités
locales et régionales (Valence, 2007)
, les
ministres ont insisté sur «l’importance de garantir la participation
effective et adéquate de tous, y compris les étrangers, à la vie publique
au niveau local».
27. La Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission
de Venise) s’est penchée, par le passé, sur les entraves constitutionnelles
à la participation des migrants aux élections. En outre, le Code
de bonne conduite en matière électorale, élaboré par la Commission
de Venise avec l’appui de l’Assemblée
et du
Congrès des pouvoirs locaux et régionaux
,
et pour lequel le Comité des Ministres a encouragé les membres à
le prendre en considération
, stipule qu’il «est
tout à fait souhaitable que, après une certaine durée de résidence,
les étrangers disposent du droit de vote sur le plan local»
.
28. La Commission européenne contre le racisme et l’intolérance
(ECRI) contrôle régulièrement tous les Etats membres du Conseil
de l’Europe et adopte des recommandations de politique générale
sur toutes les formes de discrimination, de racisme et d’intolérance.
Dans ses rapports par pays, l’intégration est l’un des thèmes qui
reviennent souvent.
29. Le Comité consultatif sur la Convention-cadre pour la protection
des minorités nationales contrôle régulièrement la participation
effective des personnes appartenant à des minorités nationales en
vertu de l’article 15 de la convention-cadre
et
a publié en 2008 un commentaire
sur
la question. Cela s’applique certes aux minorités nationales mais
également, dans une certaine mesure, aux migrants.
30. Au fil de ce rapport, on abordera plus en détail certains
des travaux ci-dessus ainsi que d’autres activités du Conseil de
l’Europe dans le domaine de la participation démocratique des migrants.
4. L’intégration,
clé de la participation
31. La préface au
Manuel sur l’intégration à l’intention des
décideurs politiques et des praticiens résume avec
éloquence les raisons pour lesquelles l’intégration est essentielle
à nos sociétés européennes:
«L’intégration des immigrants est essentielle
à la cohésion sociale et au développement économique. Pour leur
permettre d’éprouver un sentiment d’appartenance à notre société,
nous devons les traiter équitablement et veiller à ce qu’ils disposent
des outils appropriés pour y participer pleinement. L’intégration
est un processus continu, à double sens, fondé sur des droits réciproques
et des obligations correspondantes des immigrants et de la société
d’accueil.»
32. Les ministres responsables des migrations du Conseil de l’Europe,
à leur 7e Conférence qui s’est tenue à Helsinki, ont souligné l’importance
de cette intégration et la nécessité d’en faire un processus à double
sens. Dans la déclaration finale
, ils se
sont engagés:
«à promouvoir une société accueillante et ouverte
et à encourager la participation des migrants, résidant légalement,
dans la vie économique, sociale, culturelle et politique:
a. en reconnaissant la contribution
positive que les migrants apportent à la société;
b. en associant la communauté
d’accueil et les migrants à des activités visant à promouvoir la compréhension
mutuelle;
c. en encourageant les migrants
et la société d’accueil à travailler en commun, au niveau local,
pour le développement de la société;
d. en mettant en œuvre des
programmes d’introduction pour les primo-arrivants, en vue d’encourager
activement les immigrés à apprendre la langue du pays d’accueil
ainsi qu’à comprendre et à respecter les institutions et les valeurs
fondamentales de la société d’accueil».
33. Votre rapporteur part du principe que l’intégration facilite
considérablement la participation démocratique, et que cette dernière,
à son tour, peut accompagner les migrants sur la route qui les mène
à l’intégration. Il estime que l’intégration ne doit pas être vue
comme une condition préalable à la participation démocratique, tant
il importe que les deux aillent de pair.
34. Votre rapporteur est conscient que les discussions sur l’intégration
des migrants portent souvent sur le long terme. Pourtant, les migrants
prévoient rarement de s’installer pour longtemps. En outre, ils
deviennent de plus en plus mobiles. Une partie du problème consiste
donc à tenir compte du fait qu’ils vivent dans l’incertitude quant
à leur avenir et que les mesures d’intégration et possibilités de
participation démocratique doivent par conséquent s’adresser également
à ceux dont le futur reste à décider.
35. Si l’intégration a lieu à tous les niveaux, c’est néanmoins
au plan local que son efficacité et sa pertinence s’expriment à
plein. Il incombe donc aux pouvoirs locaux d’adopter des politiques
effectives et souples. Votre rapporteur note d’ailleurs le travail
entrepris par le Congrès en ce sens
.
36. Dans cette partie du rapport, votre rapporteur se propose
d’examiner certains des indicateurs d’intégration clés
et
leur interaction avec la participation démocratique. Pour être à
même de participer, les migrants ont besoin de temps, d’argent et
de sécurité. Il leur faut également maîtriser la langue locale et disposer
de certaines compétences, outre l’aisance linguistique. L’intégration
est ainsi l’élément qui donne aux migrants les moyens de jouir des
possibilités offertes par la participation démocratique.
37. Votre rapporteur est conscient que la perception de l’intégration
au niveau européen est en train de changer. Traditionnellement,
les mesures prises dans ce domaine sont vues comme servant les migrants
afin de remédier aux inégalités et de garantir une participation
égale. On observe toutefois une tendance émergente, dans certains
Etats, à considérer l’intégration comme relevant de la responsabilité
des migrants, voire à envisager d’imposer des sanctions à ceux d’entre
eux qui ne s’intègrent pas suffisamment. La mise en place de tests,
d’une obligation d’apprentissage et, dans certains cas, de pénalités
n’est pas sans poser problème du point de vue des droits de l’homme,
en particulier lorsque ces mesures peuvent être appliquées de façon
discriminatoire à certains groupes. Il faudra que l’Assemblée se
penche plus avant sur la question, à l’avenir.
4.1. Education
38. L’éducation revêt une importance
cruciale, tant pour l’intégration que pour la participation démocratique. Les
études qui en apportent la preuve
ne manquent pas. Les services éducatifs étant
assurés localement, ils offrent aux migrants des occasions idéales
de participation dans les établissements scolaires, les établissements
d’enseignement supérieur et les activités parascolaires. L’éducation
est essentielle en ceci qu’elle est l’une des mesures de confiance
qui aident les migrants à mieux trouver du travail, développer leurs compétences
et gagner en confiance pour intégrer la vie démocratique et y participer.
39. L’éducation peut prendre la forme de programmes d’insertion.
Les établissements éducatifs qui accueillent les immigrés offrent
un nouveau départ aux migrants, en leur donnant les compétences
et la confiance nécessaires pour aller de l’avant dans leur nouvelle
société. Ces programmes sont souvent constitués de trois éléments:
apprentissage linguistique, formation civique et préparation au
marché du travail
.
L’enseignement pour adultes est également important pour les migrants
qui n’ont parfois pas eu les mêmes possibilités à cet égard dans
leur pays d’origine.
40. La ville de Gand, en Belgique, se distingue par ses bonnes
pratiques en termes de programmes d’insertion: elle offre ainsi
jusqu’à mille deux cents heures de cours de néerlandais et soixante-quinze
heures d’«orientation sociale», comprenant des séances d’information
à caractère administratif et pratique. La ville propose également
un programme d’accueil individualisé, «sur mesure», qui comprend
une orientation dans les domaines de l’emploi, de l’éducation et
de la formation
.
41. Cependant, l’éducation est très utile à tous les niveaux,
du primaire au supérieur et à l’enseignement pour adultes, en passant
par le secondaire.
42. Le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe a adopté une
recommandation importante (Rec(2008)4) relative à la promotion de
l’intégration des enfants de migrants ou issus de l’immigration.
Celle-ci donne des orientations détaillées sur l’intégration à la
vie scolaire, notamment dans les zones défavorisées et marginalisées.
Elle insiste sur la grande utilité de l’apprentissage linguistique,
du recrutement de personnel (y compris le fait d’avoir des enseignants
issus de l’immigration) et de sa formation (pour gérer des enfants
dont la langue maternelle n’est pas celle du pays et aborder la
question de l’éducation interculturelle). Elle appelle les établissements
scolaires et les autorités à promouvoir un climat d’hospitalité,
de tolérance et de respect de la diversité à l’école et à prendre
des mesures particulières pour l’intégration des nouveaux élèves
immigrés dans la vie scolaire. La recommandation souligne en outre
l’importance d’appuyer la société civile, les migrants et leurs
associations, celle d’aider les parents des enfants migrants et
la nécessité de faciliter la transition de l’école au marché du
travail.
43. Votre rapporteur estime que le rôle parental des parents migrants
doit être soutenu et renforcé, idée qui est par ailleurs exprimée
aussi dans la recommandation ciavant mentionnée du Comité des Ministres.
Les migrants qui ont des enfants, quelle que soit leur origine,
doivent être encouragés à s’impliquer dans les écoles et organisations
de parents. Cette participation des parents favorise non seulement
les progrès et l’intégration de leurs enfants, mais aussi, pour
eux-mêmes, la création de liens sociaux et l’expérience de la démocratie.
44. Les migrants rencontrent souvent le problème que leur niveau
d’éducation n’est pas formellement reconnu, ce qui les contraint
à occuper des postes très en deçà de ce à quoi ils pourraient prétendre
au vu de leurs compétences et expérience. Les Etats membres devraient
encourager les instances de certification à mettre en place un cadre
qui permette aux employeurs de reconnaître les qualifications obtenues
à l’étranger afin que les migrants puissent participer au monde
du travail à la hauteur de leur savoir-faire. Cela renforcera sans
nul doute leur confiance, leur capacité de gagner de l’argent, leur
intégration ainsi que leur intérêt et leur aptitude à prendre part
à la société démocratique.
4.2. Passerelles
sociales (entre communautés)
45. La création de passerelles
sociales entre communautés est un élément essentiel du processus d’intégration
à double sens. Ce mélange encourage la cohésion sociale, une compréhension
plus large au plan culturel et une multiplication des possibilités
économiques
.
46. Ces passerelles peuvent être bâties à de nombreux niveaux
et fondées sur le sport, l’éducation, la culture, la religion ou
d’autres activités. Les bonnes pratiques abondent
. En Allemagne, par exemple, le Forum abrahamique
rassemble chrétiens, musulmans et
juifs. Au Royaume-Uni, le Réseau interconfessionnel
travaille sur une base plus large
et s’efforce de favoriser les bonnes relations entre bahaïs, bouddhistes,
chrétiens, hindous, jaïns, juifs, musulmans, sikhs et zoroastriens.
Les enquêtes menées par ce réseau estiment à 130 le nombre de groupes,
conseils et forums interconfessionnels locaux au Royaume-Uni. Les
écoles jouent un rôle particulièrement important à cet égard et
peuvent jeter des ponts non seulement entre les enfants, mais aussi
entre les parents.
47. Le manque de passerelles sociales, en particulier lorsqu’il
est combiné au manque de relations et de liens sociaux, peut ruiner
les perspectives d’intégration et de participation démocratique.
Il affecte non seulement la confiance des migrants en eux-mêmes
et en la société, mais il peut aussi être facteur d’exclusion, de
marginalisation et d’extrémisme, en particulier s’agissant des jeunes
migrants
.
Un appui adéquat doit être apporté par les autorités afin de créer
des passerelles sociales de ce type, notamment en finançant des initiatives
de la société civile.
4.3. Relations
sociales (au sein des communautés)
48. Les relations sociales au sein
des communautés revêtent une grande importance dans la participation démocratique;
des chercheurs soulignent ainsi que plus le réseau associatif d’un
groupe ethnique donné est dense et plus les associations comptent
de membres, plus ce groupe aura confiance en la politique et plus
il y participera
.
Tel est par exemple le cas à Amsterdam, lorsque l’on met en parallèle
les expériences respectives des communautés marocaine et turque.
Cette dernière, avec ses réseaux plus denses et sa confiance politique
plus marquée, connaît une participation plus forte que la communauté
marocaine
.
49. Les relations sociales présentent également l’intérêt d’éviter
les risques d’assimilation, d’isolement et de perte d’identité.
50. On ne favorise pas les relations sociales au sein des communautés
pour encourager le séparatisme mais plutôt dans le but de renforcer
la confiance et d’ouvrir sur une participation accrue à la société.
Les autorités devraient par conséquent être encouragées à fournir
un appui, notamment financier, aux initiatives visant à la création
de liens sociaux au sein des communautés.
51. Parmi les nombreuses initiatives qui méritent d’être citées
figure le projet INVOLVE, sur l’intégration des ressortissants de
pays tiers par le volontariat
. Celui-ci,
en étudiant les meilleures pratiques de sept pays européens, a montré
comment le volontariat pouvait être propice aux relations sociales
et en même temps faire naître un sentiment d’appartenance chez les
migrants, que ce soit dans les communautés de migrants ou dans la
société au sens large.
4.4. Liens
sociaux (avec les services et la communauté)
52. Les services locaux doivent
être en mesure de répondre aux besoins des migrants dans tous les domaines,
y compris le logement, l’éducation, l’emploi et le social, entre
autres. Les migrants ont souvent des difficultés à accéder à ces
services en raison de barrières linguistiques, de différences culturelles
et d’un manque de connaissance et d’expérience du fonctionnement
du système.
53. Des stratégies d’insertion doivent être élaborées par les
pouvoirs locaux, au niveau organisationnel, et il importe que les
migrants participent non seulement à leur conception, mais aussi
à leur mise en œuvre. Les organisations de la société civile qui
aident les migrants ont besoin de se voir allouer des ressources.
Plus les migrants sont impliqués dans le processus, plus ils sont
susceptibles de s’intégrer, de renforcer leurs compétences et de
se montrer plus désireux de participer à d’autres aspects de la
vie démocratique. Le personnel travaillant pour les pouvoirs locaux
doit être spécialement formé pour répondre aux exigences d’une société
multiculturelle, et il convient que des interprètes et services
d’interprétation soient mis à sa disposition. On peut citer un exemple
de bonne pratique, en Italie, où 60 médiateurs culturels d’origine
italienne ou migrante sont attachés à la structure sociale publique
de six régions du Sud, en plus de 30 autres médiateurs qui travaillent
dans les agences locales pour l’emploi
.
54. Les migrants sont particulièrement vulnérables aux procédures
bureaucratiques lentes et inefficaces, que ce soit en matière d’immigration
ou dans leur rapport quotidien à la communauté. Les différences
de traitement et la discrimination pèsent lourd et freinent leur
intégration, ce qui ne les incite pas à prendre part à la vie démocratique
. Il est donc essentiel
que ces liens sociaux avec les services soient encouragés et facilités.
55. Il est un domaine de bonnes pratiques qui se développe dans
un certain nombre d’Etats membres, à savoir la création de services
ou ministères spécialisés dans les questions d’intégration ou de
migration, au plan tant national que local. Dans certains cas, ces
ministères sont même dirigés par des personnes d’origine migrante.
En Suède, par exemple, il existe un ministère de l’Intégration et
de l’Egalité des sexes. La ministre, Nyamko Sabuni, est née au Burundi.
De tels services spécialisés contribuent à appeler l’attention sur
les questions d’intégration, mais ils ne sauraient toutefois faire
oublier la nécessité impérieuse d’inscrire ces questions à l’ordre
du jour de tous les services.
4.5. Langue
56. L’aisance linguistique joue
à n’en pas douter un rôle important et, alliée au niveau d’éducation,
peut avoir une influence de taille sur l’assurance des migrants
ainsi que sur leur volonté et leur capacité de participation. Cette
participation peut prendre les formes les plus basiques, comme le
fait d’assister à une réunion, d’écrire une lettre ou simplement
de communiquer avec autrui. Les compétences linguistiques permettent
de créer un lien social avec d’autres communautés et d’avoir accès
aux services de base.
57. Le besoin d’apprendre la langue de la société d’accueil peut
même intervenir avant l’arrivée dans le pays. Aux Pays-Bas, par
exemple, pour nombre de migrants, la connaissance du néerlandais
est requise et contrôlée avant qu’ils ne soient autorisés à entrer
sur le territoire. Des conditions aussi strictes sont de nature à
mieux préparer les migrants à ce qui les attend, mais elles ne doivent
pas servir d’obstacle à la migration, en particulier lorsqu’il est
question de regroupement familial. Il importe que ces critères tiennent
compte du fait que l’alphabétisation des femmes reste très faible
dans de nombreuses sociétés. Une approche doit donc être adoptée
qui prenne en considération les différences entre les sexes afin
que les femmes migrantes ne pâtissent pas de telles mesures, qui,
à défaut, s’avéreraient discriminatoires.
4.6. Sécurité
et stabilité. Lutter contre le racisme, la xénophobie et l’intolérance
58. L’expérience du racisme, de
la xénophobie et de l’intolérance peut décourager les migrants de
participer à la vie démocratique et politique, en raison d’un sentiment
de rejet et de peur. Elle peut également mener à l’isolement et
à l’extrémisme. De manière générale, elle ne crée donc pas un climat
propice à la participation démocratique. Cependant, il arrive parfois
qu’elle ait l’effet inverse, poussant alors certains migrants à s’impliquer
pour faire évoluer les choses, redresser les torts ou aider les
victimes de problèmes similaires.
59. Le Conseil de l’Europe et ses Etats membres ont déjà bien
conscience de la responsabilité qui leur incombe de lutter contre
le racisme, la xénophobie et l’intolérance. Les rapports réguliers
par pays et les recommandations de politique générale de la Commission
contre le racisme et l’intolérance (ECRI) du Conseil de l’Europe
sont un rappel constant des mesures à prendre pour combattre ces
tendances.
60. La société civile est particulièrement active pour mobiliser
le grand public, les médias et les autorités contre le racisme,
la xénophobie et l’intolérance. Les Etats promulguent des lois et
créent des organes spécialisés de plus en plus efficaces à cet effet.
Ils ne doivent toutefois pas se reposer sur leurs lauriers, mais plutôt
donner suite aux recommandations de l’ECRI, notamment s’agissant
des mesures législatives et politiques et de l’action à mener pour
renforcer les organes spécialisés qui traitent des questions de discrimination.
61. La campagne du Conseil de l’Europe intitulée «Tous différents,
tous égaux»
est un exemple de bonne pratique,
qui consiste à lutter contre le racisme, la xénophobie et l’intolérance
en impliquant des jeunes de toute l’Europe dans des activités variées
visant à combattre la discrimination et à promouvoir la diversité,
les droits de l’homme et la participation.
4.7. Droits
et responsabilités
62. Garantir les droits des migrants
est l’une des façons de les faire se sentir en sécurité et d’encourager ainsi
leur intégration et leur participation démocratique.
63. Les tentatives internationales en ce sens n’ont toutefois
pas été couronnées de succès, jusqu’à présent, et la route promet
d’être longue avant de parvenir à un cadre général pour les droits
des migrants tant réguliers que clandestins au niveau européen.
64. A l’échelle mondiale, la Convention internationale sur la
protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres
de leur famille n’a été ratifiée que par un nombre restreint d’Etats,
dont seulement trois sont membres du Conseil de l’Europe (Azerbaïdjan,
Bosnie-Herzégovine et Turquie). La Convention du Conseil de l’Europe
relative au statut juridique du travailleur migrant (STE no 93)
a seulement enregistré 11 ratifications. D’autres conventions du
Conseil de l’Europe ayant rapport aux migrants n’ont pas, elles
non plus, les faveurs des Etats membres. La Convention européenne
sur la nationalité (STE no 166) n’a ainsi été ratifiée que par 16
pays, et la Convention sur la participation des étrangers à la vie
publique au niveau local (STE no 144), par huit
. La Charte sociale
européenne (et la Charte sociale européenne révisée) comportent
toute une gamme de dispositions qui protègent les droits des travailleurs
migrants et de leur famille. Néanmoins, les Etats sont encore trop
nombreux à n’avoir ratifié ni la Charte ni la Charte révisée, et
les dispositions spécifiquement liées aux migrants et à leur famille
ne s’appliquent aux «étrangers que dans la mesure où ils sont des
ressortissants des autres Parties résidant légalement ou travaillant
régulièrement sur le territoire de la Partie intéressée». L’une
des forces de la Charte et de la Charte révisée est toutefois qu’elles
offrent la possibilité de «réclamations collectives». Il s’agit
d’un mécanisme de plus en plus utilisé par les organisations non
gouvernementales internationales, et des mesures supplémentaires
sont nécessaires pour encourager celles-ci à se pencher sur les
problèmes des migrants afin de déposer des réclamations collectives
lorsque cela s’impose.
65. Votre rapporteur est préoccupé par le message ambigu qu’envoient
de trop nombreux Etats membres du Conseil de l’Europe quant à leur
engagement en faveur des droits consacrés dans ces différentes conventions.
Pour la plupart, ces droits illustrent des normes déjà acceptées
dans d’autres traités ou appliquées par ces Etats – la ratification
des instruments en question ne devrait donc pas poser de problème, mais
y manquer revient à envoyer aux migrants le message erroné que les
Etats ne sont pas prêts à défendre clairement leurs droits.
66. Votre rapporteur encourage donc les Etats membres à ratifier
ces instruments sans délai.
67. Parallèlement aux droits, les migrants ont des responsabilités.
C’est également vrai, dans certains cas, des pays d’origine. Selon
la Commission mondiale sur les migrations internationales, «il faudrait
idéalement que les migrants reçoivent un énoncé écrit de leurs droits
et de leurs obligations lorsqu’ils sont admis dans un pays, ce qui
les encouragera à devenir le plus tôt possible des citoyens actifs»
. La commission mondiale a également
attiré l’attention sur le danger inhérent à la situation où les
migrants ou leurs organisations sont opposés à l’intégration parce
qu’ils rejettent les valeurs et la culture de la société dans laquelle
ils résident. Les migrants ont la responsabilité d’accepter les
lois, les coutumes et les valeurs de la société d’accueil. Ils ont aussi
des responsabilités en matière de participation et de contribution
à cette société. Ils peuvent mener campagne pour un changement pacifique
par des moyens démocratiques, mais s’ils sont incapables de respecter
le droit et la Constitution, ils doivent envisager de quitter le
pays
.
4.8. Sécurité
dans les domaines de l’emploi et du logement
68. L’emploi est important pour
de multiples raisons. Il crée un lien entre les communautés, aide
les migrants à intégrer des réseaux sociaux, leur offre la possibilité
de s’impliquer dans des syndicats ou d’autres associations et leur
permet d’avoir un revenu garanti. Les gens qui disposent d’un revenu
et de moyens de subsistance sûrs sont plus susceptibles de prendre
une part active à la démocratie. Trop de migrants restent sans emploi
et, lorsqu’ils ne le sont pas, reçoivent des salaires inférieurs
à ceux des citoyens du pays d’accueil.
69. Ceux dont la subsistance n’est pas assurée doivent en revanche
se débattre pour joindre les deux bouts et risquent ainsi de ne
pas avoir le temps, l’énergie ni la possibilité de participer à
la vie démocratique. Pour eux, l’intégration est d’abord un combat.
Les personnes qui se trouvent en situation irrégulière n’ont pas
le droit de travailler. Il leur est donc très difficile d’obtenir
un emploi et, lorsqu’ils y parviennent, leur vulnérabilité les expose
à l’exploitation. Des obstacles majeurs se dressent par conséquent
sur la voie de leur intégration et de leur participation démocratique.
70. Il est essentiel que les migrants reçoivent une assistance
en vue d’intégrer le monde du travail, au moyen d’un apprentissage
linguistique et d’une formation aux compétences nécessaires pour
trouver leur place sur le marché. Les femmes migrantes rencontrent
des problèmes particuliers pour accéder au marché du travail. Les
migrants doivent aussi bénéficier d’une certaine sécurité de l’emploi,
en conservant néanmoins la possibilité de changer aisément d’emploi
et de permis de travail. Il convient ainsi que ce dernier ne soit
pas lié à un employeur, car de telles dispositions facilitent l’exploitation
et donnent lieu à d’autres difficultés en cas de perte d’emploi.
Les migrants doivent voir leurs compétences et qualifications reconnues,
et jouir du droit d’adhérer à un syndicat et de participer pleinement
à ses activités
.
71. En Europe, la Suède est probablement le pays qui a les meilleures
pratiques en termes d’accès des migrants au travail. Selon l’étude
du MIPEX sur l’accès au marché du travail
, dans ce pays, tout migrant
en possession d’un permis d’au moins un an peut travailler dans
la plupart des secteurs ou se mettre à son compte à condition d’avoir
un projet viable, à l’instar de tout ressortissant de l’Union européenne.
L’Etat aide les migrants à trouver du travail en leur prodiguant
des cours de suédois et une formation professionnelle. De plus, tous
les migrants qui vivent et travaillent (ce qui inclut le fait de
s’occuper d’enfants de moins de 10 ans) sur le territoire depuis
deux ans sont éligibles à des bourses d’études, au même titre que
les Suédois. Les migrants qui trouvent un emploi ont le droit de
changer de permis, de travail et de secteur après moins d’un an.
Ceux qui sont licenciés ne perdent pas nécessairement le droit de
séjourner en Suède.
72. Dans la Déclaration finale des ministres responsables des
migrations (Helsinki, 16-17 septembre 2002), les ministres ont fait
une déclaration et pris un engagement clair sur la nécessité de
promouvoir un accès égal à l’emploi pour les migrants en situation
régulière. Ils ont également dit leur intention de favoriser l’égalité
en reconnaissant l’équivalence des diplômes, qualifications et compétences,
en assurant l’égalité de traitement aux migrants sur le lieu de
travail, en adoptant la gestion de la diversité dans les ressources
humaines et en encourageant la participation des migrants aux syndicats
et comités d’entreprise.
73. L’accès à un logement de qualité est également crucial pour
l’intégration. En Europe, la situation est généralement assez médiocre
à cet égard, les migrants vivant les uns sur les autres dans des
endroits qui sont parfois à la limite de l’habitable et relèvent
souvent du ghetto. Cela ne favorise pas l’intégration, la confiance ni
l’émergence d’un sentiment d’appartenance, qui sont pourtant essentielles
à la participation démocratique. Des mesures supplémentaires sont
nécessaires pour combattre la discrimination dans le secteur du
logement, voir émerger des quartiers équilibrés et prévenir ou réduire
la ségrégation
.
4.9. L’intégration
comme processus à double sens
74. L’intégration doit être vue
comme un défi, et non comme un fardeau. Elle est un défi pour les
migrants comme pour les sociétés qui les accueillent. Dans la Déclaration
finale de la 7e Conférence des ministres responsables des migrations
(Helsinki, 16-17 septembre 2002), les ministres se sont engagés
«à considérer l’intégration comme une démarche interactive fondée
sur une volonté mutuelle consentie par les migrants et la société
d’accueil».
75. La Commission européenne contre le racisme et l’intolérance
(ECRI) a également souligné, à maintes occasions, l’importance de
l’intégration vue comme un processus à double sens. Dans un rapport
récent, elle déclare que «les mesures prises (…) doivent s’étendre
à la société dans son ensemble et ne pas être uniquement axées sur
les immigrés afin de ne pas les stigmatiser et de ne pas donner
l’impression que le succès de l’intégration ne dépend que de leurs
efforts»
.
La nécessité d’éviter la stigmatisation des migrants dans le débat
sur l’intégration revêt donc une très grande importance.
76. La population majoritaire a également un rôle essentiel à
jouer dans la lutte contre le racisme, l’intolérance et la discrimination;
elle doit par ailleurs être sensibilisée à la culture et aux traditions
des migrants et se montrer ouverte à des contacts avec eux.
77. Les associations grand public, services de l’Etat et autres
niveaux de la société doivent non seulement être ouverts aux migrants,
mais aussi encourager leur participation et prendre l’initiative
de les inviter à s’impliquer. Les migrants doivent être en mesure
de progresser sans être confrontés à des inégalités de traitement,
faute de quoi ils ne participeront pas et préféreront se retirer.
78. Les mesures sont nombreuses qui peuvent être prises pour favoriser
l’intégration comme processus à double sens. La formation à la diversité,
par exemple, est pratiquée dans certaines organisations pour encourager
ce phénomène. Par ailleurs, des outils d’évaluation sont de plus
en plus utilisés en interne pour déterminer dans quelle mesure un
organisme est ouvert aux migrants. Il convient d’encourager cette
évolution.
79. On peut faire bien davantage au niveau des écoles pour favoriser
l’intégration comme processus à double sens. Il faudrait en priorité
adapter les programmes scolaires afin qu’ils reflètent le caractère multiculturel
de la société et donnent une image juste et positive du rôle des
migrants dans la société.
5. Mesures
politiques et juridiques spécifiques pour assurer la participation
démocratique des migrants
80. La participation démocratique
ne saurait se réaliser dans un vide juridique ou politique, et certaines mesures
jouent à cet égard un rôle fondateur pour ce qui est d’influencer
et de faciliter la participation démocratique des migrants.
81. Dans cette partie du rapport, votre rapporteur se propose
de réfléchir sur la nationalité
, les droits électoraux,
le statut de résident de longue durée, les autres droits politiques,
les organismes consultatifs, l’appui à la société civile et le rôle
des médias afin de définir plus avant les mesures nécessaires pour
améliorer la participation démocratique des migrants.
5.1. Nationalité
82. L’acquisition de la nationalité
est l’un des mécanismes les plus efficaces qui soient pour favoriser l’intégration
et permettre la participation au processus politique et démocratique
.
83. En accordant la nationalité aux migrants, on lève tous les
obstacles juridiques à leur participation démocratique qui se trouve
dès lors encouragée
de facto,
comme le montrent divers travaux de recherche
, dont
«l’European Social Survey». Cette étude a ainsi permis de déterminer
que 46 % des migrants ayant acquis la citoyenneté du pays hôte sont
actifs au plan civique, alors que seuls 28 % le sont parmi les individus non
naturalisés
.
84. Par l’intermédiaire de la Convention européenne sur la nationalité,
le Conseil de l’Europe s’efforce de promouvoir l’élaboration progressive
de principes juridiques relatifs à la nationalité, d’éviter les
discriminations et de trouver des solutions adaptées aux conséquences
de la pluralité de nationalités
. Malheureusement, 16 pays seulement ont
ratifié la convention, le dernier en date étant l’Ukraine en 2006.
Les ratifications sont le fait, pour l’essentiel, de pays d’Europe
centrale et orientale, ce qui illustre une tendance, de la part
des pays occidentaux, à resserrer plutôt qu’à assouplir les critères
d’obtention de la nationalité.
5.1.1. Critères
de naturalisation
85. Les critères de naturalisation
diffèrent considérablement d’un pays européen à l’autre
. On
retrouve en général l’obligation de résider sur le territoire depuis
un certain nombre d’années. Il est des pays, comme la Belgique,
qui imposent une période de résidence courte, en l’occurrence trois
ans, alors que d’autres, tels que l’Autriche, l’Espagne, la Grèce,
l’Italie, la Lituanie, le Portugal et la Slovénie, exigent dix ans.
La norme s’établit toutefois à cinq ans, comme c’est le cas, entre
autres, en Bulgarie, en République tchèque, en Estonie, en France,
en Lettonie, au Luxembourg, à Malte, aux Pays-Bas, en Pologne, en
Roumanie, en Suède, en Slovaquie et au Royaume-Uni. La Convention
européenne sur la nationalité est décevante en ceci qu’elle fixe à
dix ans la durée maximale de résidence. Votre rapporteur estime
que les Etats membres du Conseil de l’Europe devraient être encouragés
à ramener cette période maximale à cinq ans.
86. Ce critère de résidence tend toutefois à être plus court pour
le conjoint d’un ressortissant. Par ailleurs, la résidence n’est
généralement pas le seul critère. Il faut aussi souvent faire état
d’une bonne connaissance de la langue officielle du pays, d’un revenu
et d’un logement adéquats et d’un casier judiciaire vierge. Des exigences
supplémentaires sont parfois formulées, et c’est là un fait plutôt
récent. On conditionne ainsi parfois la naturalisation à la réussite
d’examens spécifiques (l’Autriche, l’Allemagne, les Pays-Bas et
le Royaume-Uni ont adopté de telles procédures ou envisagent de
le faire), au fait de suivre des cours spécialisés (comme on le
prévoit en Estonie, en France, en Hongrie, en Lettonie et en Lituanie),
ou à des serments d’allégeance ou déclarations de loyauté (en Allemagne,
Estonie, Grèce, Irlande, Lettonie, Lituanie et Roumanie)
. Dans certains Etats, il y a des frais
élevés à payer, comme en Grèce (où ils se montent à environ 1 500
euros) et en Autriche
.
Quelques pays n’imposent aucune dépense, comme la France et le Luxembourg,
et d’autres font en sorte que cela ne coûte pas plus cher que de
renouveler une carte d’identité (notamment l’Espagne, l’Irlande,
l’Italie, la Lettonie, la Lituanie, la Norvège, la Pologne et le
Royaume-Uni).
87. Les politiques restrictives sur la nationalité touchent un
grand nombre d’individus dans toute l’Europe. En Allemagne, par
exemple, quelque 7 millions de personnes vivent sous le statut spécial
d’«étranger», alors que certaines d’entre elles sont sur le territoire
depuis des décennies, lorsqu’elles ne sont pas tout simplement nées
sur place
. En
Estonie, en Lettonie et en Lituanie, les difficultés rencontrées
par la minorité russe pour obtenir la nationalité donnent lieu à
de graves tensions dans la société.
88. L’un des obstacles à l’acquisition de la nationalité en Allemagne,
Estonie, Lettonie et Lituanie, mais aussi dans d’autres pays, tient
aux contraintes liées à la double nationalité. Cette dernière est
restreinte, entre autres, en Autriche, en Allemagne, au Danemark,
en Estonie, en Lettonie, en Lituanie, au Luxembourg, aux Pays-Bas,
en Pologne, en Slovénie et en Slovaquie
.
89. Pour bien des raisons, il arrive que les migrants ne veuillent
pas être déchus de leur nationalité d’origine. Cela peut avoir trait
à des questions d’identité personnelle ou de liens sentimentaux.
Par ailleurs, le fait de renoncer à leur nationalité peut les amener,
dans leur pays d’origine, à être considérés comme des étrangers ne
jouissant que de droits d’entrée et de séjour limités et devant,
à ce titre, obtenir un visa pour revenir. Cela peut également affecter
leurs droits d’héritage et de propriété. Pour ces personnes, l’obligation
d’abandonner leur nationalité constitue un obstacle important à
l’acquisition d’une nouvelle et agit comme un frein à l’intégration
et à la participation démocratique dans leur pays d’accueil
.
90. Il convient aussi d’évoquer la situation spécifique des réfugiés,
qui ne bénéficient plus de la protection de leur pays d’origine
et ont un besoin plus urgent d’obtenir la nationalité d’accueil
que les migrants ordinaires. Cette particularité est reconnue à
l’article 34 de la Convention de 1951 sur les réfugiés ainsi que
dans la Convention européenne sur la nationalité (article 6.4.g). Les Etats sont donc tenus, à
titre spécial, de faciliter leur accès à la nationalité.
91. Les migrants de seconde et troisième générations acquièrent
la nationalité par une combinaison des principes de
jus sanguinis et de
jus soli .
Il n’entre pas dans le cadre du présent rapport d’examiner les règles très
différentes qui s’appliquent dans les Etats membres du Conseil de
l’Europe ni leurs avantages et inconvénients respectifs les uns
par rapport aux autres. Votre rapporteur tient toutefois à souligner
que l’application de ces règles a parfois pour effet que les enfants
de ces générations ne sont pas automatiquement éligibles à la nationalité.
Tel est le cas dans des pays comme l’Autriche, le Danemark, la Finlande,
la Grèce, l’Italie, le Luxembourg et la Suède, où la seule façon
d’obtenir la nationalité à la naissance réside dans les liens du
sang
(jus sanguinis), ce qui
exclut les enfants de seconde et troisième générations dont les
parents n’ont pas été naturalisés
.
5.1.2. Faciliter
l’acquisition de la nationalité
92. Votre rapporteur estime que
l’intégration et toutes les étapes qui y mènent peuvent aboutir
à l’acquisition de la nationalité. La nationalité, une fois accordée,
est aussi un moyen d’améliorer l’intégration et la participation
démocratique. La Commission européenne insiste également sur le
fait que «la naturalisation est une stratégie qui peut contribuer
à promouvoir l’intégration. Les Etats membres doivent en être conscients lorsqu’ils
autorisent des immigrés et des réfugiés à résider sur leur territoire»
. Il convient de les encourager à
ratifier la Convention européenne sur la nationalité et à lever
les obstacles en la matière. Les critères de résidence supérieurs
à cinq ans et les dispositions qui empêchent les migrants de seconde
génération et au-delà d’obtenir la nationalité doivent faire l’objet
d’une attention particulière. Votre rapporteur estime en outre que
la double nationalité devrait être possible dans les Etats. En Europe,
après tout, nous assumons de plus en plus des identités multiples.
Nous sommes ainsi liés à notre pays de naissance, mais beaucoup
d’entre nous se définissent aussi par rapport aux pays où ils vivent
ou ont vécu. De plus, notre identité est également constituée par
notre statut de «citoyens» de l’Union européenne et d’«Européens»
dans le cadre plus large du Conseil de l’Europe.
93. Le fait d’accorder la nationalité ou de faciliter la naturalisation
ne doit cependant jamais être vu comme une alternative à d’autres
mesures à prendre pour encourager la participation démocratique
des migrants (octroyer aux migrants le droit de vote au niveau local
ou autre, établir des organismes consultatifs, soutenir les initiatives
de la société civile dans le domaine des migrations, etc.).
5.2. Statut
de résident de longue durée
94. Il est clair que les individus
qui n’ont pas le statut de résident de longue durée ou se battent
pour obtenir la nationalité peuvent avoir du mal à dépasser leur
sentiment d’insécurité pour participer à la vie démocratique. Ce
sentiment n’est pas forcément l’apanage de ceux qui cherchent à
consolider leur statut. Il existe aussi de nombreux migrants qui
sont extrêmement mobiles et ne savent pas de quoi leur futur sera
fait. Cela ne signifie pas pour autant que leur participation démocratique
doive être mise entre parenthèses. Chacun devrait donc être autorisé
et encouragé à participer autant que possible.
95. Votre rapporteur s’inquiète également de la position de plus
en plus ferme de nombreux pays sur la question du regroupement familial
et constate à cet égard des dispositions qui se font toujours plus
restrictives, comme en Autriche, en Belgique, au Danemark et en
France
.
96. On peut formuler certaines recommandations quant au statut
de résident de longue durée
. Les résidents
de longue durée ne devraient pas être obligés d’attendre plus de
cinq ans pour obtenir ce statut, et les courtes périodes passées
en dehors du pays ne devraient pas rendre la procédure caduque.
La durée totale de séjour devrait compter, y compris le temps passé
sur le territoire comme étudiant ou demandeur d’asile. La procédure
devrait faire l’économie des excès bureaucratiques et être transparente,
de préférence gratuite et exempte de critères linguistiques ou autres
(revenu, logement, emploi) qui soient trop restrictifs ou déraisonnables.
Le statut ne devrait pouvoir être annulé que dans des circonstances
exceptionnelles, et la personne en bénéficiant devrait jouir des
mêmes droits que les ressortissants du pays au moins en ce qui concerne
l’éducation et la formation professionnelle. Le regroupement familial
devrait être facilité.
5.3. Droits
électoraux
97. Plus il y a de gens qui ne
sont pas en droit de voter ou d’être élus, plus le fossé est grand
en termes de légitimité et de représentativité démocratiques. Cela
dit, il ne s’agit pas simplement des droits formels de voter ou
de se présenter à une élection, mais aussi de savoir si ces droits
sont effectifs et mis en œuvre.
98. En accordant des droits électoraux aux migrants, on leur donne
voix au chapitre. C’est l’un des éléments qui contribuent à éviter
l’exclusion et ses conséquences, que ce soit la violence, les comportements
criminels
ou différentes formes d’extrémisme.
99. Les droits électoraux comprennent deux éléments: le droit
de vote et le droit de se porter candidat à une élection. Les deux
ne sont pas toujours octroyés en même temps. Certains Etats n’accordent
que le premier, ce qui constitue un manquement aux normes fixées
par la Convention du Conseil de l’Europe sur la participation des
étrangers à la vie publique au niveau local. Ces pays sont la Belgique,
l’Estonie et le Luxembourg
.
5.3.1. Niveau
national
100. Au niveau national, à quelques
rares exceptions près, les migrants n’ont pas le droit de vote en
Europe à moins d’être devenus ressortissants du pays où ils se trouvent.
101. Le Portugal et le Royaume-Uni font figure d’exceptions en
la matière. Dans le cas du Portugal, le droit s’applique uniquement
au droit de vote et aux Brésiliens dans le cadre des élections parlementaires
(il est octroyé sur la base de la réciprocité et au vu de la proximité
culturelle entre les nationalités en question). Dans le cas du Royaume-Uni,
le droit de voter et de se présenter à une élection est accordé
à tous les citoyens des pays du Commonwealth, en raison de liens
anciens à caractère colonial
.
102. On ne trouve nulle part de sièges parlementaires réservés
à des groupes ethniques, en dehors des exemples liés à la protection
des minorités nationales. La notion de droits des «nouvelles minorités»
est encore loin de faire consensus, mais on ne peut exclure la possibilité
qu’un jour, l’idée de garantir des sièges à ces migrants finisse
par prendre forme.
103. Etant donné que les migrants n’ont généralement pas le droit
de vote au niveau national, il est d’autant plus important qu’ils
disposent d’autres moyens de représentation démocratique au plan
national et autre.
5.3.2. Niveau
local
104. C’est au niveau local que la
participation des migrants est peut-être la plus importante, car
c’est là que des politiques et décisions sont adoptées qui ont des
répercussions sur leur vie quotidienne, en particulier dans les
domaines de l’éducation, du logement public, des soins de santé
et de l’aide sociale.
105. Il est donc essentiel que les migrants jouissent de droits
électoraux au niveau local. Votre rapporteur note avec satisfaction
une tendance croissante en ce sens. De tels droits ont récemment
été accordés en République tchèque (en 2001), en Estonie, Lituanie
et Slovénie (en 2002), au Luxembourg et en Slovaquie (en 2003),
de même qu’en Belgique (en 2004)
.
106. Il y a toutefois des localités où les migrants représentent
une part importante de la population, sans pour autant être autorisés
à voter. La question a été soulevée dans le projet POLITIS, à travers
la question d’un enquêteur: «S’il y a 40 % d’immigrés dans une localité
mais qu’ils n’ont pas le droit de participer, à quoi cela rime-t-il?»
107. La Convention du Conseil de l’Europe sur la participation
des étrangers à la vie publique au niveau local stipule que le droit
de vote doit être accordé aux migrants au bout de cinq ans de résidence,
mais laisse néanmoins aux Etats toute latitude pour réduire cette
durée. La Finlande est le pays le moins exigeant à cet égard, avec
une période de résidence minimale fixée à deux ans, suivie de près
par le Danemark et la Suède, notamment, qui imposent trois ans.
Cependant, la plupart des autres Etats requièrent cinq ans pour
octroyer ce droit.
108. Certains Etats ont recours à d’autres critères tels que l’inscription
sur une liste, un serment d’allégeance (Belgique), un permis de
résidence permanent (Estonie et Lituanie), la réciprocité (République
tchèque, Portugal, Espagne) ou des liens historiques étroits (par
exemple le passé colonial, pour le Royaume-Uni et le Portugal).
Votre rapporteur estime que le premier objectif à atteindre pour
faciliter la participation politique devrait être de maintenir ces
critères à un niveau minimal.
109. Dans un certain nombre de pays, il existe des obstacles constitutionnels
à l’octroi
de droits électoraux. La Cour constitutionnelle fédérale des Länder
de Hambourg et du Schleswig-Holstein a ainsi jugé anticonstitutionnel
d’accorder le droit de vote au niveau local
.
De même, en Autriche, des tentatives en ce sens ont elles aussi
été jugées anticonstitutionnelles par la Cour constitutionnelle
en 2004
. Votre rapporteur considère
que la Commission de Venise pourrait jouer un rôle dans l’identification
et la levée des obstacles constitutionnels à l’octroi des droits
électoraux dans les Etats membres du Conseil de l’Europe et encourage donc
cette commission à poursuivre ces travaux dans ce domaine
.
110. Votre rapporteur estime en outre que les Etats membres devraient
au moins accorder aux migrants le droit de voter et d’être élus
au niveau local. Ils auraient par ailleurs intérêt à faciliter cette
évolution en limitant au minimum les critères administratifs et
en appuyant les campagnes d’information et les initiatives de la société
civile qui visent à informer les migrants sur leurs droits et à
encourager leur participation.
111. En vertu du Traité de Maastricht, les ressortissants des Etats
membres de l’Union européenne ont le droit de voter et d’être élus
aux élections locales et au Parlement européen dans tout Etat membre
de l’Union européenne. D’un côté, il est souhaitable de donner le
droit de vote à un grand nombre de migrants en Europe. De l’autre,
cette disposition du traité, comme le reconnaît le Congrès du Conseil
de l’Europe, introduit «une discrimination entre résidents d’origine
étrangère, contrairement aux principes prônés par le Conseil de l’Europe
et la Convention européenne des droits de l’homme
». Votre
rapporteur est également conscient des appels lancés pour accorder
à tous les ressortissants des Etats membres du Conseil de l’Europe
de tels droits de vote réciproques
. Il y a peutêtre
lieu d’examiner si ces droits doivent non pas être réservés aux ressortissants
de l’Union européenne ou des pays du Conseil de l’Europe, mais accordés
à tous les migrants, quelle que soit leur nationalité. L’Assemblée
souhaitera peut-être prendre l’initiative d’une réflexion sur les moyens
de faciliter la réalisation de cet objectif à long terme.
112. L’important n’est pas seulement d’accorder le droit de voter
et de se présenter à des élections. Il faut aussi que ce droit soit
appliqué. On ne connaît pas encore bien les niveaux et habitudes
de vote des migrants, mais des études intéressantes ont toutefois
été réalisées. Il apparaît ainsi, par exemple, que les migrants
ont tendance à voter pour d’autres migrants, mais seulement une
fois que les lignes politiques ont été tracées
. Comprendre
ces logiques de vote est essentiel pour répondre aux besoins et
attentes des migrants et afin d’encourager les partis politiques
à proposer davantage de candidats aux origines ethniques variées.
Les partis qui veulent attirer le vote migrant commencent à comprendre
cet impératif. A Bruxelles, par exemple, les formations politiques
recrutent des candidats d’origine étrangère en grand nombre dans
le but de séduire les «électeurs ethniques
».
5.4. Droits politiques
113. Conformément à la Convention
européenne des droits de l’homme, la liberté de pensée, de conscience et
de religion (article 9), la liberté d’expression (article 10) et
la liberté de réunion et d’association (article 11) sont garanties
aux migrants dans toute l’Europe
. Certaines restrictions peuvent toutefois
s’appliquer à «l’activité politique des étrangers», en vertu de
l’article 16 de la Convention
.
114. On observe, dans certains pays d’Europe centrale et orientale,
une tendance à imposer aux droits et activités politiques des migrants
des limites plus strictes qu’en Europe occidentale. Il en va ainsi,
parfois, du droit d’adhérer à un parti ou de créer une association
politique. En Estonie
,
les personnes qui ne sont pas ressortissantes du pays n’ont pas
le droit d’intégrer un parti ni de créer une association politique.
La même chose vaut pour la Lettonie
et la Lituanie
. La Slovaquie
n’accorde pas aux migrants
le droit d’adhérer à un parti ou mouvement politique et la Slovénie
leur permet seulement
de participer à un parti politique au titre de membre honoraire
et ne leur donne pas la possibilité de former leurs propres associations
politiques.
115. Dans de nombreux pays d’Europe centrale et orientale, on peut
encore beaucoup faire pour accroître les libertés politiques accordées
aux migrants. L’octroi répandu de ces droits politiques aux migrants
dans l’essentiel de l’Union européenne et une grande partie des
Etats membres du Conseil de l’Europe devrait inciter les pays moins
permissifs à lever certaines restrictions. La Commission de Venise
pourrait jouer un rôle à cet égard en encourageant les Etats à abroger
ces restrictions politiques le cas échéant.
5.5. Droit à la consultation
116. Les pouvoirs nationaux et locaux
reconnaissent de plus en plus que l’un des moyens les plus efficaces d’intégrer
les migrants et de faciliter leur participation démocratique consiste
à les consulter à la fois de manière générale et sur les questions
qui les concernent directement.
117. En vue de faciliter la consultation, des organismes consultatifs
ont été mis en place dans de nombreux pays, pour la plupart au niveau
local mais aussi au plan national. Ces trente dernières années,
de tels organismes ont été créés dans plus de dix pays, parmi lesquels
la Belgique, l’Allemagne, le Luxembourg, la France, la Finlande,
les Pays-Bas, l’Italie, l’Espagne, le RoyaumeUni, la Suède, le Danemark,
la Norvège et la Suisse
.
Il en existe peu en Europe centrale et orientale, même si des consultations
ad hoc ont quand même lieu avec les associations de migrants dans
certains pays.
118. Ces organismes consultatifs peuvent être définis comme des
entités démocratiques créées au niveau national ou local afin de
constituer un forum de consultation entre les représentants élus
et les migrants (en commençant par les résidents étrangers).
119. L’un des trois piliers de la Convention sur la participation
des étrangers à la vie publique au niveau local est l’établissement
d’organismes consultatifs pour représenter les résidents étrangers
au niveau local (article 5). En vertu de cette convention, aucun
obstacle juridique ou d’autre nature ne doit empêcher la création
de tels organismes, et il incombe aux Etats d’encourager et de faciliter
leur création dans les zones comptant un nombre significatif de
résidents étrangers et de veiller à ce que les participants à ces
organismes puissent être élus par les résidents étrangers ou une
quelconque association de résidents étrangers. Comme indiqué précédemment,
seuls huit pays ont ratifié cette convention
.
120. Les buts poursuivis par les organismes consultatifs peuvent
différer, mais ils ont généralement deux grands objectifs en commun.
Le premier est d’intégrer les résidents étrangers et d’encourager
leur participation à la vie publique locale et le second consiste
à améliorer ou harmoniser leurs relations avec d’autres secteurs de
la communauté (autorités, services administratifs, ressortissants
nationaux)
. Ils peuvent aussi avoir des visées très
spécifiques à la localité où ils se trouvent, telles que la lutte
contre la discrimination, la promotion des cultures différentes,
etc. La plupart des organismes consultatifs sont composés de 15
à 20 personnes, mais cela varie d’un cas à l’autre.
121. Un certain nombre de bonnes pratiques peuvent être observées
dans les différents conseils européens. L’Index des politiques d’intégration
des migrants
dresse une cartographie
des pays qui ont les meilleures pratiques en matière d’organismes
consultatifs, à savoir:
Danemark: Les représentants des migrants sont, en général,
librement élus au sein des organismes consultatifs locaux, régionaux
et nationaux, même s’ils ne sont consultés qu’à titre ponctuel.
Au plan local, il existe environ 60 Integrationsraad (conseils
d’intégration);
Finlande: Au Comité consultatif pour les relations ethniques
(ETNO), les membres immigrés ont les mêmes droits de vote et de
décision que les responsables finlandais ;
Allemagne: On compte 400 Ausländerbeiräte (conseils
des étrangers) au niveau local. En Rhénanie-duNord-Westphalie, ces
conseils sont obligatoires pour les collectivités où vivent plus
de 5 000 étrangers.
122. Malgré ces bonnes pratiques,
il y a aussi de nombreux pays qui ne disposent d’aucun organisme consultatif,
dont Chypre, la Lettonie, la Lituanie, Malte, la Grèce, la Hongrie,
la Pologne, la Slovénie et la Slovaquie
. D’autres en ont qui, pour diverses
raisons, ne sont pas efficaces. Les critiques formulées à l’encontre
de ces organismes portent souvent sur leur manque de représentativité,
les divergences de vues au sein des conseils, la crainte qu’ils
ne soient qu’un écran de fumée, l’attention excessive qu’ils prêtent
à l’immigration aux dépens des questions de société plus générales,
et le fait qu’ils puissent coûter cher et demander beaucoup de temps
.
123. L’expérience et les bonnes pratiques accumulées jusqu’à présent
permettent de formuler un certain nombre de recommandations quant
au fonctionnement des organismes consultatifs
:
124. En termes de composition, les organismes consultatifs doivent:
- être à composition non limitée,
dans toute la mesure du possible, même si cela implique d’établir
des catégories de membres et d’octroyer, sur cette base, des droits
différents. Cela signifie que des groupes qui seraient autrement
exclus peuvent participer sous une forme ou une autre, ce qui revêt
une importance particulière pour les migrants nouvellement arrivés,
les migrants naturalisés et les migrants irréguliers;
- permettre une représentation égale des représentants des
pouvoirs locaux et des migrants afin de jeter véritablement un pont
entre les communautés;
- garantir la représentativité parmi les migrants (en tenant
compte de l’implantation géographique, de la nationalité et du sexe
des intéressés).
125. En termes de sélection, il convient de préférer les élections
directes au sein des communautés concernées (comme c’est le cas
en Allemagne) ou de permettre aux associations de migrants de présenter elles-mêmes
des candidats (comme cela se fait par exemple à Grenoble et dans
plusieurs villes du Danemark et du Luxembourg) – et au minimum de
permettre à ces associations de proposer des membres (comme à Osnabrück).
Les représentants ne doivent pas simplement être choisis par les
autorités sans que les migrants aient été consultés.
126. En termes d’objectifs, il faut les définir clairement, établir
un ordre de priorité et former des projets réalistes en fonction
des ressources disponibles. Par ailleurs, ils doivent faire l’objet
d’une évaluation régulière.
127. En termes d’activités, il importe d’accorder la priorité aux
initiatives politiques, notamment la consultation ou encore la promotion
de la participation citoyenne. Les activités culturelles et sociales
peuvent également être encouragées, mais elles doivent être menées
par d’autres associations et organismes pertinents.
128. En termes de fonctionnement, les organismes consultatifs doivent
avoir le droit d’être informés et consultés et d’entamer des consultations
et de recevoir une réponse. Enfin, il importe qu’ils disposent des ressources
humaines et financières nécessaires pour opérer correctement.
129. Par l’intermédiaire de la Convention sur la participation
des étrangers à la vie publique au niveau local, et à la faveur
des travaux qui ont abouti au manuel du Congrès des pouvoirs locaux
et régionaux sur les organismes consultatifs locaux, le Conseil
de l’Europe a apporté une contribution précieuse à cette forme de participation
politique. Le Congrès et le Comité européen sur la démocratie locale
et régionale (CDLR), comité intergouvernemental compétent du Conseil
de l’Europe, doivent être encouragés à poursuivre leurs travaux dans
ce domaine, notamment en rassemblant les organismes consultatifs
locaux et en les incitant à constituer des réseaux nationaux et
internationaux.
5.6. Appui à la société civile et en particulier
aux organisations chargées des migrants et de leur représentation
130. Les passerelles sociales (entre
les communautés) et les relations sociales (au sein des communautés), on
l’a vu précédemment dans ce rapport, sont essentielles à l’intégration
et à la participation démocratique des migrants. Il est donc important
d’aider la société civile et les associations chargées des migrants
et de leur représentation.
131. La question fait débat de savoir s’il est préférable d’encourager
les organisations spécialisées dans les affaires de migration ou
représentant les migrants, ou bien de soutenir les organisations
génériques susceptibles d’inscrire les préoccupations des migrants
à leur ordre du jour. Or, il n’y a pas de réponse définitive, car
les deux types d’organisation ont un rôle à jouer et les migrants
doivent avoir le choix. Les études montrent que lorsque les migrants
prennent part à un type d’organisation, ils sont plus enclins à
faire le pas de s’intéresser aussi à l’autre type d’organisation.
Ce mouvement latéral est de nature à dissiper l’inquiétude, souvent
exprimée, de voir l’appui fourni aux associations de migrants donner
lieu à la création de «sociétés parallèles», compromettre les efforts
d’intégration et, dans les cas extrêmes, alimenter le fondamentalisme
et le terrorisme
.
132. Les organisations de migrants jouent indéniablement un rôle
important dans l’accueil réservé aux nouveaux arrivants et la possibilité
qui leur est offerte de créer des liens et de prendre part à des
activités culturelles, sportives et plus généralement sociales.
Les organisations sont nécessaires pour de nombreux migrants en
tant que passerelle d’accès à la société.
133. Les migrants participent à la vie civique pour des raisons
variées. Certains parce qu’ils y ont un intérêt particulier, d’autres
pour combattre une injustice, aider leurs enfants, soutenir leurs
compatriotes, ou pour d’autres motifs. L’important réside dans le
fait que les gens s’impliquent souvent parce qu’on leur demande
de le faire
. Il s’agit par conséquent d’un facteur à
prendre en considération lorsque l’on cherche à favoriser la participation
démocratique à ce niveau.
134. On peut se féliciter que l’Union européenne ait mis sur pied
le Fonds européen d’intégration (qui couvre la période 2007-2013).
Ce fonds, qui s’élève à 1,771 milliard d’euros, a pour objectif
d’accroître la participation civique, culturelle et politique des
ressortissants de pays tiers dans leur société d’accueil. Votre
rapporteur espère qu’il accueillera favorablement des projets plus
largement européens et qu’il ne se concentrera pas uniquement sur
les réseaux établis, mais aussi sur des organisations plus récentes
et celles qui ne sont pas spécialement habiles à puiser dans les
ressources de l’Union européenne.
5.7. Médias
135. Votre rapporteur prend bonne
note des conclusions de l’Assemblée dans la
Recommandation 1768 (2006) sur l’image des demandeurs d’asile, des migrants et
des réfugiés véhiculée par les médias et souhaite insister sur trois
points importants.
136. Premièrement, il est particulièrement nécessaire que les médias
donnent une image juste des migrants, plutôt que de les plier à
des stéréotypes, quels qu’ils soient. Cela s’applique tout spécialement
aux femmes migrantes, qui peuvent souffrir doublement des stéréotypes.
Deuxièmement, il faut veiller à ce que les migrants soient représentés
au sein même de la profession et faire en sorte qu’ils apparaissent
dans des programmes où ils puissent être vus et entendus. Troisièmement,
les migrants doivent avoir les mêmes chances que les autres de créer
leurs propres médias (presse, radio, télévision, etc.)
.
137. Plus les migrants sont visibles, plus leurs opinions sont
connues et plus on voit apparaître de modèles positifs, plus ils
seront susceptibles d’avoir l’intérêt, la confiance et la motivation
nécessaires pour participer à la vie démocratique.
6. Migrants en situation irrégulière
138. L’Assemblée a pris clairement
position sur la question des droits des migrants en situation irrégulière, notamment
dans sa
Résolution 1509
(2006) sur les droits fondamentaux des migrants irréguliers
et
dans sa
Résolution 1568
(2007) sur les programmes de régularisation des migrants en
situation irrégulière
.
139. On estime qu’environ 5,5 millions de migrants irréguliers
vivent dans l’Union européenne, et que 8 autres millions se trouvent
sur le territoire de la Fédération de Russie. L’Europe ne saurait
fermer la porte à la participation démocratique d’un si grand nombre
de personnes, dont beaucoup apportent une contribution significative
à nos économies (en travaillant dans la construction, l’agriculture,
l’hôtellerie et la restauration) et dans nos foyers (en travaillant
comme aide à domicile, en s’occupant des enfants, des personnes
âgées, etc.).
140. Ces personnes doivent avoir le droit de s’exprimer et de participer
au sein de nos sociétés démocratiques afin de ne pas être renvoyées
dans leur pays d’origine.
141. Comme l’Assemblée l’a clairement indiqué dans sa
Résolution 1568 (2007) sur les programmes de régularisation des migrants en
situation irrégulière, si les Etats ne comptent pas renvoyer ces
individus dans leur pays d’origine, ils doivent envisager de prendre
des mesures pour régulariser leur situation. C’est la façon la plus
sûre et la plus juste de garantir leurs droits et de leur permettre
de participer à la société démocratique.
142. Lorsque la régularisation n’est pas envisageable, il n’en
est pas moins nécessaire d’intégrer les migrants irréguliers dans
les processus démocratiques. Il ne faut pas les exclure des initiatives
de la société civile, mais au contraire leur donner la possibilité
d’y participer et de recevoir financement et appui. Ces migrants
doivent avoir le droit de participer et d’être représentés dans
des syndicats et des organismes consultatifs afin de faire entendre
leur voix.
143. Il existe aussi certaines mesures d’intégration adaptées aux
personnes qui se trouvent en situation irrégulière, en particulier
celles qui ne peuvent pas être renvoyées dans leur pays d’origine.
L’éducation doit par exemple être ouverte aux enfants de migrants
irréguliers, les passerelles, relations et liens sociaux doivent rester
actifs, la sûreté et la stabilité doivent être garanties et la sécurité
dans des domaines tels que l’emploi, la santé et même le logement
doit être assurée au minimum.
7. Femmes migrantes
144. Les femmes migrantes peuvent
rencontrer des difficultés différentes en termes de participation démocratique.
Certaines études quantitatives tendent à prouver que les femmes
sont moins actives que les hommes
, mais tel n’est pas toujours le cas. Lorsqu’elles
participent effectivement moins, cela peut s’expliquer par tout
un éventail de raisons. Leur expérience de la migration diffère
de celle des hommes. Il se peut que leur niveau de participation
dans leur pays d’origine soit moindre, qu’elles n’y disposent pas
d’autant de temps, d’argent et de compétences que les hommes et
que leur degré d’intégration s’en trouve par conséquent inférieur
.
A l’inverse, l’absence de possibilités de participation démocratique
dans leur pays d’origine peut être un facteur qui les incite à s’impliquer
dans leur pays d’accueil.
145. Des approches différenciées sont donc nécessaires quant à
la participation des femmes migrantes par rapport aux hommes, de
même que des recherches plus approfondies sur les besoins particuliers
des femmes à cet égard. Le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe
a formulé des recommandations sur la participation équilibrée des
femmes et des hommes dans la prise de décisions politiques et publiques
,
qui sont aussi particulièrement pertinentes en ce qui concerne les
femmes migrantes.
146. Les femmes d’origine migrante ont besoin d’être équitablement
représentées dans les organes de décision, et des mesures doivent
être prises afin qu’il soit plus facile pour elles de combiner participation
à des activités démocratiques et vie professionnelle et familiale.
147. Il y a en outre un problème qui affecte aussi la sécurité
des femmes migrantes et donc leur participation démocratique: l’accès
à un permis de résidence individuel. Souvent, la femme dispose uniquement
d’un permis de résidence lié à son mari. Pour offrir sécurité et
protection à toutes les épouses en cas de décès, de divorce ou de
violence domestique, les Etats devraient envisager d’octroyer aux
deux époux des permis de résidence individuels.
8. Conclusions
148. En tant que garant des valeurs
et des droits humains, le Conseil de l’Europe a un rôle vital à
jouer dans la promotion et la sauvegarde des droits des migrants.
149. L’Assemblée accorde depuis longtemps une attention particulière
aux intérêts des communautés de migrants, en veillant résolument
à donner à ces derniers la possibilité de prendre part à la société
dans tous ses aspects, ce qui constitue un premier pas crucial vers
l’intégration. La participation démocratique des migrants est un
élément essentiel de ce processus.
150. Afin de participer et de s’intégrer, les migrants doivent
être acceptés par les communautés d’accueil. Ils doivent bénéficier
de chances égales et voir leurs statuts et droits clarifiés et reconnus.
Par conséquent, les recommandations antérieures de l’Assemblée sur
les droits des migrants, y compris les immigrés clandestins, l’intérêt
des programmes de régularisation et la lutte contre la xénophobie,
l’intolérance, la traite des êtres humains, l’incitation à la haine
raciale et l’image des migrants dans les médias sont toutes pertinentes
pour assurer une meilleure intégration et une participation démocratique
plus grande.
151. Le Conseil de l’Europe est idéalement placé pour contribuer
à l’amélioration de la participation démocratique des migrants sur
l’ensemble du continent européen. A cette fin, le Comité des Ministres
doit mobiliser les commissions spécialisées et l’expertise de l’organisation
afin d’accorder une plus grande priorité au processus. Il importe
que les Etats membres signent et ratifient un certain nombre de
conventions existantes du Conseil de l’Europe relatives, par exemple,
à la nationalité, à la participation des étrangers à la vie publique
au niveau local ou encore au statut juridique du travailleur migrant,
et qu’ils appliquent les recommandations de la Commission européenne
contre le racisme et l’intolérance (ECRI).
152. En somme, le Conseil de l’Europe dispose des mécanismes nécessaires
pour faire de la participation démocratique une réalité. Il ne manque
plus que la volonté politique de franchir le pas.
Commission chargée du rapport: commission des migrations,
des réfugiés et de la population.
Renvoi en commission: Renvoi no 3414
du 21 janvier 2008.
Projet de résolution et projet de recommandation adoptés par
la commission à l’unanimité le 19 mai 2008.
Membres de la commission: Mme Corien
W.A. Jonker (Présidente),
M. Doug Henderson (1er Vice-Président), M. Pedro
Agramunt (2e Vice-Président), M. Alessandro Rossi (3e VicePrésident),
Mme Tina Acketoft, M. Ioannis Banias,
Mme Donka Banović, M. Italo Bocchino,
M. Jean-Guy Branger, M. Márton
Braun, M. André Bugnon, Lord
Burlison (remplaçante: Mme Claire Curtis-Thomas), M. Mevlüt Çavuoğlu,
M. Sergej Chelemendik, M. Christopher Chope (remplaçant: M. Bill Etherington), M. Boriss Cilevičs, Mme Minodora Cliveti, M. Telmo Correia, M. Ivica
Dačić, M. Joseph Debono Grech, M. Taulant Dedja, M. Nikolaos Dendias, M. Mitko Dimitrov, M. Karl Donabauer, M. Tuur
Elzinga, M. Valeriy Fedorov,
M. Oleksandr Feldman, Mme Doris Fiala,
M. Paul Giacobbi (remplaçant: M. Denis Jacquat),
Mme Gunn Karin Gjul, Mme Angelika
Graf, M. John Greenway, M. Tony Gregory, M. Andrzej Grzyb (remplaçant:
M. Tomasz Dudziński), M. Michael Hagberg,
Mme Gultakin Hajiyeva,
M. Davit Harutyunyan, M. Jürgen Herrmann, M. Bernd Heynemann, M. Jean
Huss, M. Ilie Ilacu, M. Tadeusz Iwiński, M. Mustafa Jemiliev, M. Tomáš
Jirsa, M. Reijo Kallio, M. Hakki Keskin, M. Egidijus Klumbys, M. Ruslan
Kondratov (remplaçant: M. Ivan Savvidi),
M. Dimitrij Kovačič, M. Andros Kyprianou, M. Geert Lambert, M. Massimo
Livi Bacci, M. Younal Loutfi (remplaçante: Mme Aneliya Atanasova), M. Andrija Mandić,
M. Jean-Pierre Masseret, M. Slavko Matić, M. Giorgio Mele, Mme Ana
Catarina Mendonça, M. Gebhard
Negele, M. Hryhoriy Omelchenko, M. Morten Østergaard, M. Alexey
Ostrovsky, M. Grigore Petrenco, M. Cezar Florin Preda, M. Gabino Puche, M. Milorad Pupovac, Mme Mailis Reps, Mme Michaela
Sburny, M. André Schneider,
M. Samad Seyidov, M. Steingrímur J. Sigfússon, Mme Miet
Smet (remplaçant: M. Daniel Ducarme),
M. Giacomo Stucchi, M. Vilmos
Szabó, Mme Elene Tevdoradze, M. Tuğrul Türke, Mme Özlem Türköne, Mme Rosario
Velasco García, M. Michał Wojtczak,
M. Andrej Zernovski, M. Yury Zelenskiy, M. Jiří Zlatuška, N., N.
N.B. Les noms des membres présents à la réunion sont indiqués
en gras.
Voir 24e séance, 25 juin 2008 (adoption
des projets de résolution et de recommandation amendés); et Résolution 1618 et Recommandation
1840.