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Rapport | Doc. 11939 | 05 juin 2009

Situation au Bélarus

Commission des questions politiques et de la démocratie

Rapporteur : M. Andrea RIGONI, Italie, ADLE

Origine - Renvoi en commission: Décision du Bureau de l’Assemblée du 17.12.98, Dir. 562 (2000), Doc 8544, Renvoi 2444, 04.11.99, Résolution 1306 (2002). 2009 - Troisième partie de session

Résumé

Bien que le Bélarus soit loin de respecter les normes du Conseil de l’Europe en matière de démocratie, de prééminence du droit et de droits de l’homme, ses autorités ont pris récemment des mesures importantes qui vont dans le bon sens. Le rapport recommande que, afin d’encourager la poursuite de ce processus, l’Assemblée engage un dialogue politique avec les autorités, tout en continuant à soutenir le renforcement des forces démocratiques et de la société civile dans le pays

Dans ce but, le Bureau de l’Assemblée devrait rétablir le statut d’invité spécial pour le Parlement du Bélarus, suspendu depuis 1997. Parallèlement une délégation de l’opposition extraparlementaire du Bélarus devrait être invitée à toutes les sessions de l’Assemblée ainsi qu’à toutes les réunions des commissions de l’Assemblée à l’ordre du jour desquelles sera inscrite la question du Bélarus.

Une série de recommandations dans des domaines tels que les prisonniers politiques, le droit et la pratique électoraux, la liberté d’association, la liberté de réunion, la liberté des médias et la peine capitale sont adressées aux autorités du Bélarus. Dans un an au plus tard, le Bureau de l’Assemblée devra évaluer dans quelle mesure le Bélarus se sera conformé à celles-ci, ainsi que l’esprit de coopération dont auront fait preuve les autorités dans leurs relations avec le Conseil de l’Europe.

A. Projet de résolution

(open)
1. L’Assemblée parlementaire suit attentivement la situation au Bélarus depuis 1992, date à laquelle elle a accordé le statut d’invité spécial au Parlement du Bélarus. Faute de progrès de la part de ce pays en matière de démocratie, de droits de l’homme et de prééminence du droit, ce statut a cependant été suspendu en 1997 et sa demande d’adhésion au Conseil de l’Europe a été gelée l’année suivante. L’Assemblée ne perd pas l’espoir que le temps viendra où le Bélarus remplira les conditions requises pour devenir membre du Conseil de l’Europe et où ses autorités s’engageront fermement à respecter les normes de l’Organisation et à adhérer à ses valeurs.
2. Ces derniers mois, des faits nouveaux importants sont intervenus au Bélarus: entre janvier et août 2008, neuf personnalités de l’opposition considérées comme des prisonniers politiques ont été libérées, dont l’ancien candidat à la présidence Alexandre Kozouline. De ce fait, il n’y a plus au Bélarus de prisonniers politiques reconnus comme tels par la communauté internationale. L’Assemblée se félicite de ce progrès tangible et lance un appel pour qu’il soit rendu irréversible.
3. L’Assemblée salue aussi avec satisfaction l’enregistrement du mouvement d’opposition Pour la liberté! ainsi que la possibilité donnée à trois publications indépendantes – Narodnaya Volya,Nashe Niva et Ouzgorak – d’être publiées au Bélarus et leur intégration dans le réseau de distribution national.
4. Elle considère également comme un élément positif la mise en place, sous l’égide de l’administration présidentielle et d’autres organes de l’Etat, de plusieurs conseils consultatifs qui pourront permettre aux autorités d’engager un dialogue constructif avec les représentants des organisations non gouvernementales et de la société civile. L’Assemblée espère que les résultats des discussions qui se tiendront dans le cadre des conseils consultatifs se traduiront par des mesures législatives et politiques.
5. L’Assemblée prend aussi note de la démission, en avril 2009, de M. Vladimir Nuamov, ministre de l’Intérieur depuis 2000, qui aurait été impliqué dans la disparition de quatre opposants politiques en 1999-2000 et qui, de ce fait, était interdit d’entrée dans l’Union européenne.
6. Ces développements sont d’autant plus importants qu’ils répondent à des exigences précises de la part des organisations européennes et qu’ils interviennent dans le contexte de la reprise du dialogue politique avec les dirigeants du Bélarus.
7. En effet, à la suite de la libération de tous les prisonniers politiques au Bélarus, l’Union européenne a décidé, en octobre 2008, de renouer les contacts avec ses dirigeants au plus haut niveau et de suspendre, même si ce n’est que partiellement et provisoirement, l’interdiction de visa à l’encontre d’un certain nombre de hauts responsables du Bélarus, dont le Président Loukachenko. Cette suspension a été prolongée de neuf mois en avril 2009. La volonté de l’Union européenne de normaliser les relations avec le Bélarus a été illustrée par la visite à Minsk du Haut-Représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune Javier Solana, et sa rencontre avec le Président Loukachenko, le 19 février 2009.
8. Le Bélarus est l’un des six pays qui participeront au Partenariat oriental, un nouvel instrument visant à renforcer la coopération politique et économique entre l’Union européenne et ses voisins d’Europe orientale et du Caucase, en vue de favoriser leur stabilité et de soutenir leurs réformes en faveur de la démocratie et de l’économie de marché. Le niveau de participation du Bélarus dépendra de l’évolution générale de ses relations avec l’Union européenne. Dans ce contexte, le Bélarus a participé au Sommet du Partenariat oriental qui s’est tenu à Prague le 7 mai 2009. L’Union européenne a également l’intention d’établir un Dialogue sur les Droits de l’Homme avec le Bélarus.
9. Récemment, le Conseil de l’Europe a lui aussi intensifié ses contacts avec les autorités du Bélarus: après la visite d’une délégation de la commission des questions politiques de l’Assemblée en février 2009, le ministre Miguel Angel Moratinos s’est rendu en visite officielle à Minsk en mars 2009, en sa qualité de Président du Comité des Ministres. Quelques semaines auparavant, les autorités du Bélarus avaient finalement donné leur feu vert à l’ouverture d’un Point d’Information sur le Conseil de l’Europe à Minsk, idée lancée par l’Assemblée qui a été développée par la présidence slovaque du Comité des Ministres. La cérémonie d’ouverture du Point d’Information est prévue en juin 2009.
10. De plus, en décembre 2008, le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe a décidé d’accorder le statut d’observateur au Conseil de coopération des collectivités locales, rattaché au Conseil de la République de l’Assemblée nationale de la République du Bélarus.
11. Malgré les récents développements positifs et la reprise des contacts avec les organisations européennes, la situation au Bélarus demeure toutefois préoccupante.
12. Tout d’abord, les élections législatives de septembre 2008 ont été une occasion manquée de s’engager résolument sur la voie du changement démocratique, n’ayant pas été conformes aux normes européennes en matière de liberté et d’équité. Comme l’a souligné l’OSCE/BIDDH, le processus électoral a laissé gravement à désirer, et ce à tous les stades du processus électoral, depuis l’absence d’information pluraliste des électeurs jusqu’au manque de transparence du dépouillement du scrutin. Ces insuffisances ont inévitablement jeté le doute sur la représentativité de l’actuel Parlement, aucun candidat de l’opposition n’étant parvenu à obtenir un siège. Il est toutefois encourageant qu’à la suite de l’évaluation finale de l’OSCE/BIDDH les autorités du Bélarus aient accepté de travailler avec ce dernier sur la réforme du cadre juridique et de la pratique électoraux du pays, afin de les mettre en conformité avec les engagements pris par le Bélarus à l’égard de l’OSCE.
13. En ce qui concerne le respect des libertés politiques, le harcèlement et l’intimidation de militants de l’opposition, en particulier de jeunes, se poursuivent par différents moyens tels que les perquisitions injustifiées dans des domiciles privés, la confiscation illégale d’équipements, les brutalités policières au cours des manifestations et la conscription forcée de personnes précédemment déclarées inaptes au service militaire. En outre, un certain nombre de militants politiques sont assignés à domicile et le casier judiciaire des prisonniers politiques libérés n’a pas été effacé, de sorte que ces personnes ne peuvent exercer pleinement certains de leurs droits, y compris celui de se présenter aux élections.
14. L’Assemblée note également qu’à l’heure actuelle, trois entrepreneurs, qui se trouvent en détention, ainsi que d’autres personnes sujettes à des formes de privation de leur liberté personnelle, sont considérés par l’opposition du Bélarus comme des prisonniers politiques ou, tout au moins, comme des victimes de manipulation du système judiciaire pénal pour des raisons politiques. L’Assemblée demande qu’une enquête indépendante soit conduite sur ces affaires, afin d’éclaircir si ces personnes sont des prisonniers politiques et, si c’est le cas, de faire le nécessaire pour qu’elles soient libérées.
15. La situation de la liberté d’association est également un motif de préoccupation: même si le mouvement d’opposition politique Pour la liberté! a enfin été enregistré en décembre 2008, d’autres organisations d’opposition et de défense des droits de l’homme continuent de rencontrer des obstacles pour obtenir leur enregistrement auprès du ministère de la Justice, le dernier exemple en date étant celui de l’organisation de défense des droits de l’homme NashaViasna dont les membres, en vertu de l’article 193.1 du Code pénal, s’exposent à des poursuites au motif qu’ils font partie d’une organisation non enregistrée.
16. L’Assemblée regrette que, malgré l’intégration de trois publications indépendantes dans le réseau de distribution national, les autres médias indépendants ne puissent bénéficier de ce dispositif, ni même être imprimés au Bélarus. De même, l’Assemblée est préoccupée par les difficultés que rencontrent les journalistes étrangers pour obtenir une accréditation de presse et par les médias étrangers, comme la chaîne par satellite Belsat, pour obtenir leur enregistrement auprès du ministère des Affaires étrangères. Elle prend note, cependant, des nombreuses déclarations émanant de dirigeants du Bélarus dans lesquelles ils attestent de leur volonté de faire en sorte que la nouvelle loi sur les médias ne soit pas appliquée d’une manière qui restreigne la liberté d’expression. L’Assemblée souhaiterait que l’on puisse en dire autant de la mise en œuvre de la loi sur la lutte contre l’extrémisme, qui a conduit récemment à la suspension de la publication du magazine Arche, laquelle a été par la suite retirée suite à la pression internationale.
17. Elle regrette également qu’il soit toujours possible au Bélarus de procéder à des exécutions capitales, bien que les catégories de crimes passibles de la peine de mort aient été restreintes, que le nombre de condamnations à mort ait reculé et qu’aucune exécution n’ait eu lieu depuis février 2008. L’Assemblée rappelle que, selon la Constitution en vigueur, la peine de mort est considérée comme une mesure transitoire et qu’aucune contrainte juridique n’empêche le Président ni le Parlement d’instaurer un moratoire sur les exécutions. L’Assemblée prend également note, qu’à l’heure actuelle, il n’y a pas de peine capitale en attente d’exécution.
18. Considérant que, même si le Bélarus est loin de respecter les normes du Conseil de l’Europe en matière de démocratie, de prééminence du droit et de droits de l’homme, ses autorités ont pris récemment des mesures importantes qui vont dans le bon sens, l’Assemblée décide d’encourager la poursuite de ce processus en engageant un dialogue politique avec les autorités, tout en continuant à soutenir le renforcement des forces démocratiques et de la société civile dans le pays.
19. Compte tenu de ce qui précède, l’Assemblée demande à son Bureau:
19.1. de lever la suspension du statut d’invité spécial du Parlement du Bélarus;
19.2. en tenant compte également de l’avis de la commission des questions politiques, de suivre la situation au Bélarus et, dans un délai d’un an, ou plus tôt si la situation l’exige, d’évaluer si ce pays a accompli des progrès tangibles et irréversibles vers le respect des normes du Conseil de l’Europe. A cet égard, il conviendra d’examiner particulièrement dans quelle mesure le Bélarus s’est conformé aux recommandations formulées aux paragraphes 21 et 22 de la présente Résolution et de prendre en considération l’esprit de coopération dont auront fait preuve les autorités dans leurs relations avec le Conseil de l’Europe;
19.3. dans le cadre du rétablissement du statut d’invité spécial pour le Parlement du Bélarus, et en attendant que l’opposition y soit convenablement représentée, de veiller à ce qu’une délégation de l’opposition extraparlementaire du Bélarus soit invitée à toutes les sessions de l’Assemblée ainsi qu’à toutes les réunions des commissions de l’Assemblée à l’ordre du jour desquelles sera inscrite la question du Bélarus;
19.4. d’inviter la commission des questions politiques à continuer de suivre la situation au Bélarus, en s’appuyant également sur les activités menées par sa sous-commission sur le Bélarus, et à faire rapport à l’Assemblée si besoin est.
20. En outre, l’Assemblée appelle le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe à désigner un groupe d’experts indépendants pour enquêter sur les nouveaux cas de prisonniers politiques présumés au Bélarus et sur ceux qui pourraient surgir.
21. Convaincue que le dialogue ne peut être nourri que par des progrès continus du Bélarus vers les normes du Conseil de l’Europe, l’Assemblée appelle les autorités du Bélarus:
21.1. à assurer la libération immédiate de tous les prisonniers politiques (tels que déterminés selon la procédure établie au paragraphe 20, ci-dessus) et à veiller à ce qu’il n’y ait pas de recul sur cette importante question;
21.2. à coopérer pleinement avec le Conseil de l’Europe pour établir si les allégations selon lesquelles il y aurait encore plusieurs prisonniers politiques au Bélarus sont fondées;
21.3. à effacer le casier judiciaire des anciens prisonniers politiques pour leur permettre d’exercer pleinement leurs droits civils et politiques;
21.4. à s’abstenir de harceler et d’intimider les militants de l’opposition;
21.5. à mettre un terme à la pratique de la conscription forcée de militants de l’opposition précédemment déclarés inaptes au service militaire;
21.6. à garantir le respect de la liberté d’association, en particulier:
21.6.1. en éliminant tous les obstacles pratiques et juridiques injustifiés à l’enregistrement de partis politiques, de groupes et d’associations de défense des droits de l’homme et en leur donnant la possibilité d’avoir leur siège dans des immeubles résidentiels;
21.6.2. en autorisant l’enregistrement de l’organisation de défense des droits de l’homme NashaViasna;
21.6.3. en abrogeant l’article 193.1 du Code pénal;
21.7. à garantir le respect de la liberté de réunion, en particulier:
21.7.1. en permettant aux organisations de l’opposition de tenir des manifestations dans des lieux où le public peut les voir;
21.7.2. en veillant à ce que les forces de l’ordre ne fassent pas inutilement usage de la force contre les manifestants;
21.8. à réformer la législation et la pratique électorales du Bélarus en tenant compte des recommandations de l’OSCE/BIDDH et de la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise), afin de les mettre en conformité avec les normes européennes et à demander formellement à la Commission de Venise, auprès de laquelle il bénéficie du statut de membre associé, d’être impliquée dans ce processus;
21.9. à garantir la liberté des médias et la diffusion d’une information pluraliste, en particulier:
21.9.1. en autorisant l’impression au Bélarus et la distribution par l’intermédiaire du réseau national des publications indépendantes restantes;
21.9.2. en éliminant les obstacles à l’accréditation des journalistes étrangers;
21.9.3. en enregistrant la chaîne par satellite BELSAT;
21.9.4. en s’abstenant de prendre prétexte de la loi sur la lutte contre l’extrémisme pour limiter ou pour faire cesser les activités des médias indépendants;
21.9.5. en veillant à ce que la nouvelle loi sur les médias soit appliquée de façon non restrictive, notamment en ce qui concerne l’obligation de réenregistrement;
21.10. à veiller à ce que l’Institut d’études politiques d’Europe orientale soit enregistré et à envisager la participation de jeunes fonctionnaires;
21.11. à apporter leur plein appui au fonctionnement du Point d’Information sur le Conseil de l’Europe à Minsk et à la mise en œuvre de ses activités;
21.12. à utiliser pleinement les conventions du Conseil de l’Europe auxquelles le Bélarus est partie, en participant aux activités qui en découlent de façon active et constructive.
22. Enfin, l’Assemblée appelle le Parlement du Bélarus à prendre l’initiative de transformer le moratoire sur la peine de mort actuellement de facto en un moratoire légal en adoptant les mesures législatives opportunes, comme étape intermédiaire vers l’abolition complète de la peine de mort.

B. Projet de recommandation

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1. Rappelant sa Résolution … (2009) sur la situation au Bélarus, l’Assemblée parlementaire confirme sa position selon laquelle les autorités du Bélarus ont pris récemment des mesures qui vont dans le bon sens, à savoir la libération de tous les prisonniers politiques reconnus comme tels par la communauté internationale, l’enregistrement du mouvement d’opposition Pour la liberté!, la possibilité donnée à deux publications indépendantes d’être imprimées au Bélarus et distribuées par l’intermédiaire du réseau national, la coopération avec l’OSCE/BIDDH en vue de réformer la législation et la pratique électorales du Bélarus, la création de conseils consultatifs et la décision d’ouvrir un Point d’Information sur le Conseil de l’Europe à Minsk. Ces mesures témoignent de la volonté des autorités d’engager le dialogue avec les organisations européennes, dont le Conseil de l’Europe, au niveau politique.
2. L’Assemblée réaffirme sa conviction que la meilleure façon pour le Conseil de l’Europe d’encourager la poursuite de ce processus est de renouer le dialogue politique avec les autorités, tout en continuant à soutenir le renforcement des forces démocratiques et de la société civile dans le pays. Pour autant, l’Assemblée insiste sur le fait que le dialogue ne pourra se poursuivre que si les dirigeants du Bélarus s’emploient sans relâche à atteindre progressivement les normes du Conseil de l’Europe.
3. En conséquence, l’Assemblée invite le Comité des Ministres à renouer des contacts avec les autorités du Bélarus, en particulier:
3.1. en autorisant la présence de représentants diplomatiques du Bélarus aux réunions de ses groupes de rapporteurs chaque fois que la question du Bélarus figure à l’ordre du jour;
3.2. en suivant la situation au Bélarus, y compris en organisant des visites sur le terrain, concernant notamment:
3.2.1. la question des prisonniers politiques;
3.2.2. la liberté d’association;
3.2.3. la liberté de réunion;
3.2.4. la liberté des médias;
3.2.5. la réforme électorale;
3.2.6. la peine de mort;
3.3. en considérant, dans un esprit positif, l’adhésion du Bélarus aux instruments du Conseil de l’Europe ouverts aux Etats non-membres pour lesquels le Bélarus a présenté une demande officielle et, avant que l’adhésion ne soit possible, en examinant les modalités de coopération avec les autorités du Bélarus en vue de les aider à mettre leur législation en conformité avec les normes du Conseil de l’Europe.
4. D’autre part, l’Assemblée appelle le Comité des Ministres à intensifier ses activités de soutien au développement de la société civile, en mettant l’accent sur la sensibilisation aux valeurs du Conseil de l’Europe et sur la connaissance de ses normes au Bélarus:
4.1. en créant un fonds de contributions volontaires en vue de financer des stages au Conseil de l’Europe pour des jeunes du Bélarus;
4.2. en favorisant la participation de représentants d’ONG et de la société civile du Bélarus à des manifestations du Conseil de l’Europe;
4.3. en encourageant ses comités intergouvernementaux à organiser des réunions, des séminaires et d’autres manifestations au Bélarus et en veillant à ce que ceux-ci bénéficient d’une grande visibilité;
4.4. en lançant, dans tout le Bélarus, une campagne d’information sur le Conseil de l’Europe, en s’appuyant notamment sur le Point d’Information sur le Conseil de l’Europe à Minsk;
4.5. en créant une page web consacrée au Bélarus sur le site du Conseil de l’Europe afin de faciliter l’accès des citoyens ordinaires du Bélarus à des informations pertinentes;
4.6. en coopérant avec l’Union européenne et l’OSCE à l’élaboration et à la mise en œuvre de programmes conjoints et d’autres activités au Bélarus.

C. Exposé des motifs par M. Rigoni, rapporteur

(open)

1. Introduction

1. Le Bélarus est le seul Etat européen à n’être pas membre du Conseil de l’Europe. Il est souvent considéré comme une exception, en ce sens qu’il n’a pas suivi la même voie vers la démocratie que les autres pays européens issus de la dissolution de l’Union soviétique.
2. Ces dernières années, le Conseil de l’Europe a lui aussi traité le Bélarus comme une exception: alors qu’il a aidé 47 Etats européens à progresser vers la démocratie par le dialogue politique en faisant preuve d’une grande patience et qu’il a toujours fait le choix de ne pas les ignorer politiquement, même lorsqu’ils ne respectent pas totalement leurs engagements et leurs obligations, il n’en a pas fait de même pour le Bélarus.
3. L’Assemblée a fait le choix d’isoler le Bélarus. D’aucuns diront peut-être que les autorités du Bélarus se sont isolées elles-mêmes en foulant aux pieds les droits de l’homme et les normes démocratiques. Ce n’est pas faux, mais on se place là sur un plan théorique. En réalité, l’Assemblée avait décidé que la situation avait assez duré et voulait voir s’il serait possible, en isolant les dirigeants du Bélarus, de faire changer les choses. Il s’avère que nous avons eu tort. Il n’est pas possible d’isoler les autorités du Bélarus sans isoler en même temps la population. En outre, l’évolution constatée ces derniers mois montre qu’il est possible d’obtenir des résultats en conjuguant subtilement dialogue, critique constructive et pression.
4. Dans ce rapport, j’ai l’intention d’appeler à une révision de l’attitude du Conseil de l’Europe à l’égard du Bélarus ces dernières années: si, contrairement aux autres organisations européennes, le Conseil de l’Europe s’en tient à sa façon d’agir actuelle, il laissera passer l’occasion d’influer sur la situation au Bélarus.
5. Il est possible de rester fidèle à ses valeurs et principes tout en dialoguant avec l’opposition et les autorités du Bélarus. C’est, me semble-t-il, le seul moyen d’aller de l’avant pour assurer le développement de la démocratie au Bélarus.

2. Relations entre le Conseil de l’Europe et le Bélarus

2.1. Relations avec l’APCE

6. Au fil des années, l’APCE a oscillé entre dialogue et isolement, comme le montre le tableau suivant:

Année

Etat des relations APCE-Bélarus

1992

L’Assemblée accorde au Parlement du Bélarus le statut d’invité spécial, comme à tous les autres pays d’Europe centrale et orientale ou du Caucase qui aspirent à adhérer au Conseil de l’Europe

1993

Le Bélarus présente une demande d’adhésion au Conseil de l’Europe

1996

Au Bélarus, un référendum débouche sur une réforme constitutionnelle qui renforce les pouvoirs du Président. Le 13e Conseil Suprême, premier et dernier parlement élu par le biais d’un scrutin libre et équitable, est dissous et un nouveau parlement est formé.

1997

Le Bureau de l’Assemblée suspend le statut d’invité spécial accordé au Parlement du Bélarus en avançant deux arguments: a) la manière dont la nouvelle législature a vu le jour le prive de toute légitimité démocratique; b) les amendements constitutionnels apportés par voie de référendum sont illégaux, ne respectent pas les normes démocratiques minimales et violent les principes de la séparation des pouvoirs et de la prééminence du droit.

1998

Le Bureau suspend la demande d’adhésion du Bélarus au Conseil de l’Europe.

1998-2004

Les relations entre l’Assemblée et les autorités du Bélarus se poursuivent, même hors d’un cadre de coopération formel: en 2000, l’Assemblée est présente pour observer les élections parlementaires, et l’année suivante, elle envoie une délégation pour observer les élections présidentielles, les deux missions d’observation se situant dans le cadre de la Troïka parlementaire sur le Bélarus 
			(1) 
			La
Troïka parlementaire sur le Bélarus est une forme de coopération
interparlementaire entre l’Assemblée parlementaire du Conseil de
l’Europe, le Parlement européen et l’Assemblée parlementaire de
l’OSCE, impliquant les instances des trois assemblées dotées d’un
mandat spécifique sur le Bélarus des trois assemblées..

Janvier 2004

Considérant que les raisons l’ayant entrainée restent d’actualité, le Bureau de l’Assemblée confirme la suspension du statut d’invité spécial suite à une demande du Bélarus de réexaminer la décision.

avril 2004

Dans sa Résolution 1371 (2004), l’Assemblée estime inopportune la présence, même informelle, de parlementaires du Bélarus à ses sessions ou à tout autre événement, tant qu’une enquête sur la question des personnes disparues n’est pas diligentée en bonne et due forme 
			(2) 
			Résolution 1371 (2004) sur les personnes disparues au Bélarus (rapporteur de
la Commission des questions juridiques et des droits de l’homme:
M. Pourgourides, Chypre, PPE/DC).. Au cours du débat, deux groupes distincts de parlementaires ont déposé des amendements visant à supprimer cette clause, en invoquant des arguments différents 
			(3) 
			Un groupe a demandé
la suppression de ce paragraphe, parce qu’il est impossible d’améliorer
la situation au Bélarus sans engager le dialogue avec les autorités,
un autre, parce que le statut d’invité spécial est subordonné aux
quatre critères fixés par la Troïka parlementaire sur le Bélarus
en 1999 (dialogue véritable entre les autorités et la société; liberté
des médias; renforcement du rôle du Parlement et application des
normes démocratiques en général) et non uniquement à la question des
personnes disparues (voir le Compte rendu des débats, 28 avril 2004)., mais les amendements ont été rejetés.

2004-2006

Pas de contacts entre l’Assemblée et les autorités du Bélarus, malgré un débat suivi au sein de la commission des questions politiques sur l’utilité de cette pratique d’isolement

2006

Vladimir Konoplev, alors Président du Parlement du Bélarus, et Alexandre Milinkevich, candidat d’opposition à l’élection présidentielle sont invités à prendre la parole devant l’Assemblée, dans le cadre du débat sur la situation au Bélarus à la veille de l’élection présidentielle

2007

M. van der Linden, ancien Président de l’APCE, et moi-même, en ma qualité de rapporteur, nous rendons au Bélarus en des occasions distinctes.

2008

A deux reprises, des représentants du Parlement du Bélarus sont invités de pair avec des représentants de l’opposition, à intervenir devant la commission des questions politiques dans le cadre de discussions sur la situation au Bélarus

2009

Une sous-commission ad hoc de la commission des questions politiques présidée par M. Lindblad, Président de la commission, Mme Hurskainen, Présidente de la sous-commission sur le Bélarus, et moi-même en ma qualité de rapporteur, s’est rendue à Minsk.

7. L’année 2004, au cours de laquelle l’APCE engage sa pratique d’isolement, marque un tournant dans ses relations avec le Bélarus. L’emploi du terme «pratique» de préférence à «politique» est délibéré: l’isolement des autorités n’a jamais été une politique clairement formulée de l’APCE, il n’a été que la conséquence d’une interprétation de la Résolution 1371 (2004) sur les personnes disparues.
8. En effet, lors de la même réunion au cours de laquelle il décide de ne pas rétablir le statut d’invité spécial, le Bureau exprime également le souhait d’observer les élections législatives de 2004 au Bélarus, et d’envoyer une mission préélectorale peu de temps avant le scrutin, il autorise la sous-commission sur le Bélarus à se rendre dans le pays après la partie de session d’avril 2004 et confirme même sa volonté de poursuivre le dialogue avec l’ensemble des forces politiques du Bélarus. Rien de cela n’aura lieu, vu le climat de défiance mutuelle régnant après le débat du mois d’avril à l’Assemblée.
9. Cela commence à changer en 2007, lorsque le Président en exercice de l’Assemblée, M. van der Linden, se rend au Bélarus, avant que je ne m’y rende à mon tour quelques mois plus tard; puis, suite à ces visites, des représentants du Parlement du Bélarus sont invités à participer à des échanges de vues sur la situation au Bélarus dans le cadre de la commission des questions politiques et de sa sous-commission sur le Bélarus. En février 2009, une sous-commission ad hoc de la commission des questions politiques présidée par M. Lindblad, Président de la commission, accompagné de Mme Hurskainen, Présidente de la sous-commission sur le Bélarus, et de moi-même, en ma qualité de rapporteur, s’est également rendue à Minsk.

2.2. Visite de la Présidence espagnole du Comité des Ministres

10. Le 30 mars 2009, le Ministre Miguel Angel Moratinos s’est rendu en visite officielle à Minsk en sa qualité de Président du Comité des Ministres. Durant sa visite, dont le but était d’évaluer le degré d’engagement du Bélarus envers les principes du Conseil de l’Europe et d’encourager les réformes internes qui permettraient de consolider les relations de ce pays avec l’Organisation, il a rencontré des représentants de la société civile et de personnalités politiques de haut rang, dont le Ministre des Affaires étrangères et le Président Loukachenko.

2.3. Conventions du Conseil de l’Europe

11. Même si sa demande d’adhésion au Conseil de l’Europe demeure suspendue, le Bélarus est partie à un certain nombre d’instruments du Conseil de l’Europe, ouverts à la signature et à la ratification des États non membres. Ainsi le Bélarus est partie à la Convention culturelle européenne et membre associé de la Commission de Venise et il peut, par conséquent, prendre part, à un niveau technique, aux activités du Conseil de l’Europe s’y rapportant. Il a également ratifié la Convention européenne dans le domaine de l’information sur le droit étranger et son protocole additionnel (en 1997), la Convention sur la reconnaissance des qualifications relatives à l’enseignement supérieur dans la région européenne (en 2002), la Convention contre le dopage (en 2006), la Convention civile sur la corruption (en 2006) et la Convention pénale sur la corruption (en novembre 2007).
12. Les autorités du Bélarus ont exprimé le souhait d’adhérer à d’autres instruments du Conseil de l’Europe; cette question a été examinée d’une manière générale au sein du Groupe de rapporteurs sur la démocratie (GR-DEM) des Délégués des Ministres. Cependant, le Bélarus devrait réviser certains domaines de sa législation afin de la rendre compatible avec les instruments du Conseil de l’Europe. Le Conseil de l’Europe pourrait jouer son rôle traditionnel en facilitant ce processus, afin de rendre l’adhésion possible.

2.4. Le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux

13. En décembre 2008, la Commission permanente du Congrès des Pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe a décidé d’accorder le statut d’observateur au Conseil pour la coopération des collectivités locales rattaché au Conseil de la République de l’Assemblée nationale de la République du Bélarus. Ce statut permettra à ses représentants de participer aux manifestations organisées par le Congrès.
14. En mars 2009, lors de la première session du Congrès à laquelle participait une délégation d’observateurs du Bélarus, Ian Micallef, Président a.i. du Congrès, a déclaré combien il appréciait cette participation et a annoncé qu’une table ronde serait organisée sur la conformité de la législation du Bélarus avec la Charte européenne de l’autonomie locale; le Congrès établira également un avis d’expert sur le projet de loi relatif à l’autonomie locale au Bélarus 
			(4) 
			Communiqué de presse
n°180 – La présidente du Congrès a.i. accueille favorablement les
mesures adoptées en vue d’une future coopération avec le Bélarus. .

2.5. Le Point d’Information sur le Conseil de l’Europe à Minsk

15. J’attends enfin l’ouverture d’un Point d’Information sur le Conseil de l’Europe à Minsk, une initiative sur laquelle j’ai grandement insisté lors de ma visite en 2007. Comme l’a fort justement fait observer l’Assemblée dans sa Recommandation 1734 (2006) sur le Bélarus à la veille de l’élection présidentielle du 19 mars 2006, l’ouverture d’une structure d’information sur le Conseil de l’Europe dans ce pays pourrait permettre d’établir un premier contact avec la population et contribuer à la diffusion des valeurs européennes.
16. En acceptant d’ouvrir un Point d’Information dans les locaux de l’Université d’État de Minsk, les autorités du Bélarus prouvent qu’elles sont disposées à laisser entendre à la population le discours du Conseil de l’Europe. Je suis heureux de dire que cette occasion a été saisie et que, grâce aux efforts de la Présidence slovaque du Comité des Ministres, un accord en ce sens a été conclu en mai 2008. La sous-commission ad hoc qui s’est rendue à Minsk en février 2009 a pu visiter les locaux mis à disposition par l’Université d’Etat à la Faculté de journalisme.
17. Je me félicite que le gouvernement du Bélarus ait finalement approuvé, le 3 mars 2009, l’ouverture du Point d’Information; dorénavant, il appartient au Conseil de l’Europe et à l’Université de régler les aspects techniques. Le Conseil de l’Europe sélectionne actuellement le personnel du Point d’Information dont la cérémonie d’ouverture est prévue en juin 2009.

3. La situation de la démocratie, de l’Etat de droit et des droits de l’homme au Bélarus

18. Depuis ma visite au Bélarus en 2007, la situation dans le pays a connu plusieurs améliorations majeures, objectives et tangibles.
  • Ces améliorations ont trait à des domaines relevant des missions essentielles du Conseil de l’Europe;
  • elles répondent à des demandes formulées par notre Assemblée ainsi que par l’Union européenne;
  • elles s’accompagnent de déclarations concordantes de la part des autorités, qui témoignent de leur volonté d’engager un processus de progrès, pour un rapprochement progressif et mutuel avec l’Europe.

3.1. Libération des prisonniers politiques

19. Entre janvier et août 2008, neuf personnalités 
			(5) 
			Dimitri Dachkevitch
et Artur Finkevitch, chefs de l’organisation non enregistrée Malady Front (Front de la jeunesse), Andreï
Klimov, ancien député et membre du Parti civique unifié de l’opposition,
Andreï Kim, militant politique, Youri Leonov, Nicolaï Avtouhovitch
et Sergueï Parsioukevitch, entrepreneurs, Alexandre Zdvijkov, journaliste,
et Alexandre Kozouline, leader du parti social-démocrate bélarussien. de l’opposition du Bélarus purgeant des peines de prison suite à des accusations mensongères et à des procès à motivation politique ont été libérées.
20. Parmi elles se trouvait Alexandre Kozouline, leader du parti social-démocrate du Bélarus et candidat à l’élection présidentielle de 2006, qui avait été condamné à cinq ans et demi de prison pour hooliganisme et incitation au désordre public au cours d’une manifestation de protestation contre le déroulement et les résultats du scrutin présidentiel de 2006.
21. L’importance de cette libération ne doit pas être sous-estimée: M. Kozouline est une personnalité très charismatique de l’opposition considérée par beaucoup comme pouvant être un rival dangereux pour le Président Loukachenko. Ce dernier aurait, en outre, des griefs personnels contre lui. M. Kozouline a, par ailleurs, refusé, à plusieurs reprises, de solliciter la grâce présidentielle et a finalement été gracié sans ne l’avoir jamais demandée.
22. Ces neuf libérations ont conduit un certain nombre d’organisations et de pays connus pour critiquer les autorités du Bélarus – dont les États-Unis d’Amérique – à déclarer qu’il n’y avait plus de prisonniers politiques au Bélarus.
23. L’amélioration de la situation dans ce domaine est, me semble-t-il, une avancée décisive qui doit être prise en compte par l’Assemblée. Elle se doit d’autant plus de réagir, si l’on considère que, malheureusement, certains États membres du Conseil de l’Europe, en dépit de l’engagement qu’ils ont pris lors de leur adhésion de régler le problème des prisonniers politiques, n’y sont pas encore parvenus.
24. Cependant, les allégations formulées par des représentants de l’opposition bélarusse, selon lesquels à l’heure actuelle, un certain nombre de personnes qui se trouvent en détention ou sont sujettes à d’autres formes de privation de leur liberté personnelle, sont des prisonniers politiques, devraient être examinées avec la plus grande attention. 
			(6) 
			Il
s’agit de jeunes militants de l’opposition et entrepreneurs, dont
certains avaient déjà été emprisonnés (aux arrêts domicilaires:
Artsyom Doubski, Mikhail Pashkevich, Tatyana Tishkevich, Paval Vinahgradau,
Ayaksei Bonda, Mikhal Kryvau, Ales Straltsou et Ales Charnyshou.
Yuri Leonov, Nicolai Avtuhovich et Uladzimir Asipenka se trouvent
en détention). A mon avis, dans le cadre d’un dialogue avec les autorités du Bélarus, le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe devrait charger un groupe d’experts indépendants d’enquêter sur ces cas et de déterminer si ces personnes sont des prisonniers politiques, en s’appuyant sur les critères précis déjà instaurés par le Conseil de l’Europe.

3.2. Libertés politiques

25. En ce qui concerne les libertés politiques dont jouissent, en général, les citoyens du Bélarus, la situation est peu encourageante.
26. D’importants progrès sont à relever du côté des autorités, tels que:
  • en décembre 2008, l’enregistrement du mouvement «Pour la Liberté», dirigé par l’ancien candidat unique de l’opposition aux élections présidentielles de 2006, après plusieurs tentatives et des querelles juridiques qui ont duré plus d’un an; et
  • une attitude quelque peu moins répressive à l’égard de la tenue et du déroulement de certaines manifestations telles que celle qui a suivi les élections parlementaires de septembre 2008.
27. Cependant, les obstacles aux activités des partis et mouvements d’opposition et des ONG subsistent et le climat général est tel que l’expression d’opinions politiques s’écartant de la ligne officielle est stigmatisée, réprimée et sanctionnée non seulement par le biais de mesures prises par les représentants du pouvoir judiciaire et des forces de l’ordre, mais également par le biais de licenciements et d’expulsions des universités.
28. Même s’il n’y a plus de prisonniers politiques, le harcèlement et l’intimidation de militants de l’opposition, en particulier de jeunes, se poursuivent par le biais de différentes mesures telles que les perquisitions injustifiées de domiciles privés, la confiscation illégale d’équipements, les brutalités policières au cours de manifestations et les conscriptions forcées malgré les déclarations précédentes d’incapacité d’effectuer un service militaire. En outre, un certain nombre de militants politiques sont assignés à domicile et les casiers judiciaires des prisonniers politiques libérés n’ont pas été effacés, ce qui fait que ces personnes ne peuvent exercer pleinement certains de leurs droits, y compris celui de se présenter aux élections.
29. Le principal obstacle à l’exercice de la liberté d’association reste l’application des dispositions relatives à l’enregistrement des partis politiques et des organisations. Les conditions à remplir pour pouvoir se faire enregistrer par le ministère de la Justice sont excessivement restrictives, ce qui fait qu’en l’absence d’enregistrement, l’organisation en question est considérée comme étant illégale et ses membres peuvent faire l’objet de poursuites pénales. Le principal facteur qui fait obstacle à l’enregistrement est l’obligation de trouver des locaux pouvant servir d’adresse légale, ce qui se révèle extrêmement difficile non seulement en raison du prix élevé des loyers, mais aussi et surtout parce que l’écrasante majorité des bâtiments appartient à l’Etat et que, dans tous les cas, les immeubles d’habitation sont considérés comme inappropriés pour un tel usage. Quelques jours seulement avant la rédaction du présent rapport, les autorités ont une nouvelle fois refusé d’enregistrer l’organisation non gouvernementale de droits de l’homme NachaViasna qui, depuis des années, ne cesse d’effectuer des tentatives dans ce sens.
30. Pour ce qui est de la liberté de réunion, même si au cours de l’année 2008, plusieurs manifestations ont pu avoir lieu sans entraves particulières ou sans qu’elles soient suivies d’arrestations massives, certaines ont été violemment réprimées, notamment celles organisées par des entrepreneurs, des journalistes et des organisations de jeunesse.

3.3. Elections

31. Les élections législatives de septembre 2008 ont aussi suscité une vive déception, puisqu’elles n’ont pas été conformes aux normes européennes en matière de liberté et d’équité. Bien que l’APCE ait décidé de ne pas envoyer de mission d’observation, faute d’avoir reçu une invitation officielle, j’ai pu me forger une opinion personnelle en observant le scrutin en ma qualité de parlementaire italien attaché à la mission de l’OSCE/BIDDH.
32. Il est absolument invraisemblable, me semble-t-il, que sur 110 circonscriptions électorales, aucun candidat de l’opposition n’ait pu être élu.
33. Certaines améliorations sont effectivement à noter, dont:
  • la possibilité pour des représentants de l’opposition de siéger dans les commissions électorales;
  • l’inscription comme candidats d’un nombre de représentants de l’opposition plus élevé que les années précédentes;
  • la diminution du pourcentage d’électeurs utilisant le système de vote anticipé, qui est passé de 31,5% en 2006 à 26,2% et l’apposition immédiate de scellés sur les urnes servant au vote anticipé 
			(7) 
			La procédure
de vote anticipé permet aux électeurs d’exprimer leur suffrage dans
les cinq jours précédant le jour du scrutin. Dans la pratique, les
étudiants et les employés sont encouragés à recourir à ce système
de vote..
34. En revanche, ces améliorations perdent de leur importance, si l’on considère que:
  • les représentants de l’opposition siégeant au sein des commissions électorales à divers niveaux étaient très peu nombreux et n’ont joué qu’un rôle consultatif, sans pouvoir véritablement influer sur la prise de décisions;
  • la phase la plus délicate de la procédure est le décompte des voix qui manque de transparence et durant laquelle les observateurs internationaux ont été tenus à l’écart.
35. Malheureusement, l’évaluation globale de ces élections montre que «l’environnement électoral au Bélarus n’a toujours pas permis une véritable confrontation politique ni garanti l’égalité de traitement entre les candidats de la part des autorités; que de vives inquiétudes subsistent au sujet de droits fondamentaux, tels que la liberté de réunion et d’expression, et de l’accès à une pluralité de points de vue offrant aux électeurs les informations sérieuses leur permettant de faire un choix éclairé; que le cadre législatif continue d’entraver la tenue d’élections conformes aux engagements de l’OSCE. Les inquiétudes suscitées par le Code électoral (CE), précédemment exprimées dans les rapports et avis juridiques de l’OSCE/BIDDH et de la Commission pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) du Conseil de l’Europe restent d’actualité» 
			(8) 
			Rapport
final de la mission d’observation des élections de l’OSCE/BIDDH,
Bélarus, élections législatives du 28 septembre 2008 (Varsovie,
28 novembre 2008). La citation fait référence à l’Avis conjoint
relatif à la législation électorale de la République du Bélarus
de la Commission de Venise et de l’OSCE/BIDDH (octobre 2006), élaboré
à la demande de l’Assemblée. .
36. Il convient toutefois de saluer le fait que, à la suite de l’évaluation finale de l’OSCE/BIDDH, les autorités du Bélarus ont accepté de travailler avec l’OSCE/BIDDH sur la réforme de la loi et de la pratique électorales en vue d’améliorer, conformément à leurs engagements avec l’OSCE, l’environnement dans lequel se tiennent les élections. Une première table ronde a eu lieu à cette fin en janvier 2009.
37. J’espère que, dans le cadre d’une reprise du dialogue et surtout dans l’hypothèse d’un rétablissement du statut d’invité spécial du Parlement du Bélarus, l’APCE sera invitée à observer les futures élections.

3.4. Médias

38. Il ne peut y avoir de démocratie sans liberté des médias. Malheureusement au Bélarus, certains éléments rendent l’accès à une information pluraliste particulièrement difficile aux citoyens ordinaires:
  • l’impression et la distribution de publications indépendantes traitant de questions politiques sont entravées par des obstacles d’ordre juridique et pratique;
  • en revanche, la distribution de publications officielles ou pro-gouvernementales dans le grand public est vivement encouragée;
  • de même, des ressources considérables sont investies dans la publication de médias imprimés ou la production de programmes TV soutenant très clairement les dirigeants du Bélarus ou présentant les institutions et les démocraties européennes sous un jour peu favorable;
  • les cas de harcèlement de journalistes indépendants sont fréquents, de sorte que bon nombre d’entre eux préfèrent pratiquer l’autocensure.
39. Il serait naïf de croire que ces problèmes «endémiques» puissent être réglés rapidement ou facilement. Cependant, la décision prise par les autorités du Bélarus en novembre 2008 d’autoriser l’impression et la distribution dans le pays via le réseau public de trois journaux indépendants, Narodnaya, Nashe Niva et Ouzgorak, marque un premier pas important dans la bonne direction.
40. De plus, également en novembre 2008, le ministère de l’information du Bélarus en coopération avec le Représentant de l’OSCE sur la liberté des médias et le Bureau de l’OSCE à Minsk, ont organisé une table ronde sur la législation du Bélarus sur le média Internet.
41. Malgré ces améliorations, il reste encore beaucoup à faire pour renforcer la liberté des médias au Bélarus et pour briser le monopole de l’Etat en matière d’information. A cette fin, il convient, entre autres, de prendre les mesures suivantes:
  • inclure les autres publications indépendantes restantes dans le réseau de distribution national;
  • lever les obstacles qui entravent l’accréditation des journalistes étrangers et l’enregistrement des médias étrangers, à commencer par la chaîne par satellite BELSAT, dont la demande d’enregistrement a été refusée le 3 mars 2009 au motif qu’elle avait présenté un dossier inapproprié;
  • s’assurer que la nouvelle loi sur les médias n’est pas appliquée d’une manière qui porte atteinte à la liberté des médias, notamment en ce qui concerne l’obligation de réenregistrement;
  • garantir le plein respect de la liberté d’expression et s’abstenir de prendre prétexte de la loi sur la lutte contre l’extrémisme pour limiter ou pour mettre fin aux activités des publications indépendantes, comme cela a été le cas pour le magazine culturel Arche, dont la publication a été suspendue de façon temporaire en février 2009.

3.5. Peine capitale

42. Bien que le recours à la peine capitale ait été limité à quelques cas de crimes particulièrement graves, jusqu’à il y a peu des sentences de mort continuaient d’être prononcées et des condamnés d’être exécutés, à raison de quatre ou cinq par an en moyenne, la dernière exécution remontant à février 2008. Pour que les choses soient claires, je précise, qu’à ma connaissance, la peine capitale n’a jamais été infligée à des prisonniers politiques, mais uniquement à des personnes condamnées pour des crimes particulièrement graves et atroces.
43. Lorsque je me suis rendu à Minsk en 2007, ainsi que durant la récente visite de la sous-commission ad hoc de la commission des questions politiques, nous avons abordé la question de la peine capitale avec plusieurs responsables, dont les plus hautes autorités judiciaires, ainsi qu’avec d’autres spécialistes et des ONGs. Les autorités du Bélarus avaient alors souligné que, comme le montre le référendum organisé en 1996 au cours duquel les électeurs s’étaient prononcés en faveur du maintien de la peine capitale, l’opinion publique du Bélarus n’était pas prête à accepter l’abolition de la peine de mort. D’autre part, l’introduction de la peine capitale dans la Constitution est envisagée comme une mesure temporaire, susceptible d’être abolie le moment venu et aucune contrainte juridique n’empêche le Président ou le Parlement de décréter un moratoire sur les exécutions.
44. En avril 2008, j’ai lancé un appel public au Parlement du Bélarus pour demander à son Président de prendre l’initiative de l’adoption d’un moratoire sur les exécutions, à titre d’étape intermédiaire vers l’abolition de la peine de mort. Cet appel a été publié dans le journal Narodnaya Gazeta 
			(9) 
			12 avril 2008.. Tout en saluant le fait que, depuis ma lettre ouverte, aucune exécution capitale n’ait eu lieu et qu’aucune sentence capitale n’ait été prononçée, je regrette qu’à ce jour, en dépit des quelques discussions tenues par les Iégislateurs du Bélarus, aucune suite législative n’ait été donnée à ma proposition. J’espère toutefois que, dans le contexte du renforcement du dialogue avec les autorités, le parlement actuel retiendra cette idée. L’adoption d’un moratoire est selon moi, un objectif accessible qui permettrait au Bélarus de se rapprocher des valeurs et normes du Conseil de l’Europe. Cela donnerait aussi un signal clair que, même si en ce moment il y a un moratoire de fait, les autorités sont prêtes à introduire un changement formel dans la législation.

4. L’opposition

45. En dépit de sa participation aux élections législatives de 2008, l’opposition démocratique au Bélarus n’est qu’extraparlementaire.
46. Elle se compose d’une multitude de partis et groupes politiques, de l’extrême gauche à l’extrême droite. La plupart de ceux-ci sont toutefois unis et rassemblés au sein des Forces démocratiques unifiées du Bélarus (FDU), un groupement qui est parvenu à présenter aux élections présidentielles de 2006 un candidat unique, M. Alexandre Milinkevitch.
47. Cela étant, bien qu’elles s’attachent à préserver leur unité, les Forces démocratiques unifiées n’ont pas de chef unique ou de leader charismatique et les membres sont divisés sur de nombreuses questions politiques, excepté leur opposition commune au pouvoir en place 
			(10) 
			Le Conseil
politique des Forces démocratiques unifiées, mis en place lors du
Congrès, rassemble 4 chefs de l’opposition: Anatoli Lebedko, chef
du Parti civil unifié, Sergeï Kaliakine, Président du Parti communiste,
Vintchouk Viatchorka, chef du Front populaire du Bélarus et Anatoli
Levkovitch, Président des socio-démocrates. Quelques jours avant
le Congrès, Alexandre Milinkevitch, qui désavouait le choix d’une
direction commune des Forces démocratiques unifiées, a participé
à la fondation du mouvement Pour la liberté,
dont il a été élu chef.. Les désaccords sont fréquents sur des questions stratégiques, par exemple, sur la participation aux élections ou sur leur boycott ou sur l’engagement ou non d’un dialogue avec les autorités – et à quel niveau.
48. Au cours des dernières années, les Forces démocratiques unifiées ont adopté plusieurs documents programmatiques, dont un projet de constitution parallèle pour le Bélarus et de plate-forme économique. Après les élections de 2008, elles sont convenues d’un certain nombre de mesures, «les priorités des FDU pour réformer la législation et démocratiser le pays au cours des six prochains mois», portant sur la législation électorale, la liberté d’expression et la liberté des médias, les libertés politiques et la liberté d’action des ONG.
49. Outre les FDU, il existe un certain nombre de partis et de groupes politiques tels que le mouvement Pour la liberté! et le Parti chrétien démocrate, qui comptent dans leurs rangs des dirigeants politiques connus et réputés et qui reflètent assurément les points de vue et représentent les intérêts de la population du Bélarus.
50. Personnellement, j’admire le courage et la détermination dont font preuve les représentants de l’opposition du Bélarus dans le combat qu’ils mènent dans des conditions extrêmement difficiles. La réussite du processus de démocratisation au Bélarus dépend, me semble-t-il, dans une large mesure du renforcement de l’opposition démocratique, de son unité, de sa vision commune, de sa stratégie et de ses actions, en un mot, de sa crédibilité en tant que force politique aux yeux du peuple du Bélarus.
51. Je pense qu’à ce stade, l’opposition au Bélarus doit principalement s’attacher à obtenir un large soutien de la population du Bélarus, car elle ne touche à ce jour qu’un public limité. Cela peut s’expliquer en partie par la mainmise des autorités sur les médias et la manipulation des résultats électoraux, comme l’affirme l’opposition. A mon sens, toutefois, cela est également dû aux erreurs stratégiques commises par l’opposition elle-même ainsi qu’à ses propres limites liées à son stade actuel de développement.
52. L’opposition démocratique doit redoubler d’efforts:
  • pour dépasser ses divisions internes;
  • pour moderniser le fonctionnement de ses partis politiques et envisager d’en moderniser les structures et la direction pour gagner en crédibilité et en visibilité;
  • pour énoncer un message clair, fixer des objectifs précis, concrets et accessibles et accroître la visibilité de la direction;
  • pour ne pas perdre de vue les besoins, les aspirations et les doléances de la population et leur donner une expression politique: certains des documents programmatiques de l’opposition sont trop ambitieux et trop théoriques pour le citoyen moyen du Bélarus qui, même s’il y avait accès, ne comprendrait pas en quoi ces documents pourraient améliorer sa vie;
  • pour accepter les changements que le monde des affaires serait susceptible d’apporter;
  • pour élaborer une stratégie de dialogue avec la classe dirigeante.
53. S’agissant de ce dernier point, l’opposition a tenté, avant les élections, d’engager un dialogue avec les autorités sans toutefois susciter de réaction positive de leur part. Après ces dernières, toutefois, un certain nombre de Conseils consultatifs ont été mis en place sous l’égide de l’administration présidentielle et d’autres organes de l’Etat, en vue de traiter différentes questions allant des droits de l’homme aux médias ou aux questions sociales. Des représentants de la société civile, des ONG, des experts et des dirigeants de l’opposition ont été invités à y siéger, à titre personnel. J’espère que cette occasion d’engager un dialogue constructif sera mise à profit et que les autorités tiendront compte du résultat des discussions qui se tiennent au sein des Conseils consultatifs.

5. La nouvelle stratégie de dialogue de l’Union européenne

54. Encouragée par les mesures positives prises par les autorités du Bélarus dans un certain nombre de domaines, l’Union européenne a récemment décidé de rétablir les contacts avec celles-ci, qui s’étaient raréfiés depuis novembre 2004 
			(11) 
			Conclusions du Conseil
de l’Union européenne, Affaires générales et relations extérieures,
2622ème réunion, 22 et 23 novembre 2004, Bruxelles.. Elle a entrepris une normalisation progressive des relations avec les autorités, tout en continuant de soutenir les forces démocratiques d’opposition, les ONG et la société civile 
			(12) 
			Cette nouvelle approche
a été discutée en détail au cours de l’audience sur «Politique de
l’UE envers le Bélarus: développements récents», organisée par la
Commission des questions politiques le 16 décembre 2008..
55. La première démonstration de la volonté de l’Union européenne d’engager avec les dirigeants du Bélarus un processus progressif sur la base de la réciprocité a été la suspension de l’interdiction de visa à l’encontre d’un certain nombre de hauts responsables du Bélarus, dont le Président Loukachenko, pour une période renouvelable de six mois 
			(13) 
			Conclusions
du Conseil de l’Union européenne, Affaires générales et relations
extérieures, 2897e réunion, 13 octobre
2008, Luxembourg. La suspension ne concerne pas les responsables
prétendument impliqués dans les disparitions de 1999/2000 et la
Présidente de la Commission électorale centrale, Mme Yermoshina.. La mesure de suspension a d’ailleurs été récemment reconduite pour neuf mois, jusqu’à décembre 2009.
56. Le fait que le Parlement européen, qui a toujours critiqué sans détours la situation au Bélarus et ses dirigeants, ait également soutenu à une large majorité la décision du Conseil du l’Union européenne est révélateur de l’unité de vues des institutions de l’Union européenne au sujet de la nouvelle stratégie envers ce pays 
			(14) 
			Résolution du Parlement
européen du 9 octobre 2008 sur la situation au Bélarus à l’issue
des élections législatives du 28 septembre 2008 et du 15 janvier
2009 sur la stratégie de l’UE à l’égard du Bélarus..
57. De même, en réaction aux mesures positives prises par le Bélarus et conformément à la nouvelle stratégie de l’Organisation, la Commission européenne a engagé un dialogue suivi avec le Bélarus dans des domaines tels que l’énergie, l’environnement, les questions douanières, les transports et la sécurité alimentaire et confirmé qu’elle était prête à étendre le champ de ces activités de coopération technique. Elle étudie par ailleurs les moyens d’adapter des instruments tels que la Politique européenne de voisinage et le nouveau programme de «Partenariat oriental» à la situation spécifique du Bélarus. Le Bureau de la délégation de la Commission européenne à Minsk, ouvert en mars 2008, sera très utile à cet égard.
58. La volonté de l’Union européenne de normaliser les relations avec le Bélarus, qui peut être un partenaire stratégique et économique clé pour l’Europe, a été concrétisée par la visite à Minsk de Javier Solana et par la réunion qu’il a tenue avec le Président Lukachenko le 19 février 2009.
59. Le Bélarus est, également, l’un des six pays qui participeront au Partenariat oriental, un nouvel instrument visant à renforcer la coopération politique et économique entre l’Union européenne et ses voisins d’Europe orientale et du Caucase, en vue de favoriser leur stabilité et de soutenir leurs réformes en faveur de la démocratie et de l’économie de marché. Le niveau de participation du Bélarus dépendra de l’évolution générale de ses relations avec l’UE. Dans ce contexte, le Bélarus a participé au Sommet du Partenariat oriental qui s’est tenu à Prague le 7 mai 2009. L’Union européenne a également l’intention d’établir un Dialogue sur les Droits de l’Homme avec le Bélarus.
60. Le rôle dominant que l’Union européenne va maintenant assumer aussi en ce qui concerne la promotion des standards en matière de démocratie et de droits de l’homme, offre également de nouvelles opportunités d’action aussi au Conseil de l’Europe: la compétence de notre Organisation pourrait être précieuse dans le cadre du Partenariat oriental, notamment dans sa dimension multilatérale.
61. Désormais la balle est dans le camp du Bélarus: l’Union européenne a besoin de constater d’autres progrès tangibles, afin de poursuivre en toute confiance la voie qu’elle a décidé de suivre avec la suspension de l’interdiction de visa. En particulier, ce progrès devrait être irréversible et garanti dans la législation ou dans des changements du système.
62. Selon le Parlement européen, pour améliorer significativement les relations avec l’Union européenne, le Bélarus doit:
  • rester un pays sans prisonniers politiques,
  • garantir la liberté d’expression des médias,
  • continuer à coopérer avec l’OSCE sur la réforme de la loi électorale,
  • améliorer les conditions de travail des ONG, et
  • garantir la liberté de réunion et d’association politique.
63. Avec ce changement de politique, l’Union européenne rejoint l’OSCE, qui a toujours été pour une stratégie de dialogue avec les autorités du Bélarus. Le Bélarus est membre de l’OSCE depuis 1992. Les relations entre l’OSCE et le Bélarus ont parfois été tendues, en raison des critiques sans détours formulées par l’Organisation concernant la situation du pays. Cependant, le dialogue n’a jamais été rompu: l’OSCE dispose d’un bureau à Minsk qui joue un rôle essentiel dans la fourniture d’informations de première main sur la situation au Bélarus. Par ailleurs, des députés du Bélarus siègent à l’Assemblée parlementaire de l’OSCE. A l’heure actuelle, la coopération bilatérale entre l’OSCE et le Bélarus s’est intensifiée, notamment au sujet de la réforme électorale, et les représentants de l’OSCE se disent satisfait par la disponibilité montrée par les autorités.
64. Je suis convaincu qu’en restaurant ses relations avec les autorités du Bélarus l’Union européenne a pris une sage décision et j’espère que l’Assemblée suivra une orientation similaire.

6. Pourquoi le dialogue avec les autorités est-il nécessaire?

65. Le Bélarus est le seul pays européen qui n’ait pas opéré de transition vers des institutions démocratiques, le pluralisme politique et l’économie de marché: il s’est brièvement engagé dans cette voie lorsqu’il est devenu indépendant en 1990, pour revenir ensuite à une économie contrôlée par l’Etat et à un système de pouvoir centré sur la personne du Président après l’accession à la présidence d’Alexandre Loukachenko en 1994, à l’issue d’élections libres.
66. Cette spécificité s’observe également dans la société: en ce qui concerne la conscience politique de la population et le niveau de développement de la société, le Bélarus n’est comparable à aucun autre pays européen, même issu de l’Union soviétique. Selon les résultats d’enquêtes et études menées par des observateurs et des centres de recherche indépendants, le Bélarus se caractérise objectivement par une apathie politique généralisée de la population dans son ensemble – qui explique pour partie son soutien au régime en place – et la faiblesse d’une opposition pâtissant quant à elle de l’absence de soutien.
67. La situation particulière du Bélarus ne saurait excuser les politiques non démocratiques et les violations des droits de l’homme. Il faut cependant en tenir compte lors de l’élaboration d’une stratégie visant à promouvoir le développement de la démocratie et le respect des droits de l’homme dans ce pays.
68. Ces dernières années, les activités du Conseil de l’Europe ont essentiellement consisté à soutenir les forces démocratiques d’opposition, les ONG et la société civile. Cette stratégie n’a toutefois donné que de minces résultats, car ces groupes sont complètement exclus du régime actuel et ne reçoivent qu’un soutien limité de la population et n’ont donc guère d’influence réelle sur la situation.
69. Le Conseil de l’Europe doit continuer à apporter son soutien aux forces démocratiques et encourager leur développement et leur modernisation. Les groupes politiques de l’APCE doivent, pour leur part, jouer un rôle plus important dans ce domaine; ils ont été encouragés à le faire, mais – à l’exception notable de quelques-uns – ils ne l’ont pas fait ou ne l’ont pas fait systématiquement. De plus, bien que ce soit indispensable, il ne suffit pas de faire participer les forces d’opposition du Bélarus aux discussions concernant leur pays: elles doivent grandir politiquement, développer des structures et des programmes solides et parfaitement adaptés à leur électorat potentiel, elles ont besoin d’être au fait et de participer aux principaux débats politiques qui se tiennent en Europe.
70. Cependant, c’est faire preuve d’optimisme, pour ne pas dire manquer de réalisme, que de croire que le processus de démocratisation au Bélarus pourrait être mené exclusivement par l’opposition.
71. Compte tenu de la spécificité du pays, il est nécessaire d’amorcer un dialogue avec la classe dirigeante afin de pouvoir entrer en contact avec la population et de faire mieux connaître les valeurs démocratiques, notamment parmi la jeune génération. Par ailleurs, la classe dirigeante du Bélarus ne se réclame pas d’une «pensée unique»: beaucoup de membres de l’élite politique sont ou pourraient être réceptifs au message du Conseil de l’Europe et c’est précisément parce qu’elles font partie du pouvoir en place qu’elles pourraient influer sur la situation du pays.
72. Au cours de mes visites à Minsk, les autorités du Bélarus m’ont assuré de leur volonté d’engager un dialogue progressif avec notre Organisation et son Assemblée. Il m’a été dit qu’elles se rendent parfaitement compte que, dans ce processus, le Bélarus devra prendre des mesures convaincantes pour se rapprocher des normes du Conseil de l’Europe, dans les domaines de compétence de notre Organisation. Elles y sont disposées, à condition que le Conseil de l’Europe accepte également d’engager avec elles un dialogue progressif. De la même manière, elles sont prêtes à accepter les critiques, à condition qu’elles soient formulées dans le cadre d’un dialogue.
73. Cette position a été confirmée à plusieurs reprises par les parlementaires et les représentants diplomatiques du Bélarus qui se sont exprimés lors des discussions sur le Bélarus au sein de la commission des questions politiques de l’APCE.
74. De plus, la démission récente du ministre de l’Intérieur, M. Vladimir Naumov, doit être considérée dans le contexte des remaniements qui ont écarté du pouvoir toutes les personnalités proches du Président Lukachenko au début de la décennie, qui, d’après les organisations européennes, avaient participé à l’élaboration et à l’application des politiques les plus répressives du régime.

7. Conclusions

75. Le statut d’invité spécial a été instauré par l’Assemblée en 1989 pour forger des liens plus étroits avec les parlements d’Europe centrale et orientale et aider ces pays à remplir les conditions requises pour devenir membres du Conseil de l’Europe. Aux termes du Règlement de l’Assemblée, le Bureau peut octroyer le statut d’invité spécial au parlement d’un État non membre, à condition que l’État concerné remplisse quatre critères:
  • être européen;
  • avoir signé l’Acte final d’Helsinki du 1er août 1975 et la Charte de Paris pour une nouvelle Europe du 21 novembre 1990;
  • avoir accepté les autres instruments adoptés au cours des conférences de l’OSCE;
  • avoir signé et ratifié les deux Pactes des Nations Unies du 16 décembre 1996 relatifs aux droits civils et politiques et aux droits économiques, sociaux et culturels.
76. Le statut d’invité spécial du parlement du Bélarus a été suspendu il y a plus de douze ans. A présent, il est temps pour l’Assemblée de procéder à une évaluation honnête de la situation au Bélarus et de l’efficacité de sa politique:
  • la pratique d’isolement des autorités et le soutien à l’opposition démocratique n’ont pas permis de faire progresser la démocratie, les droits de l’homme et l’État de droit au Bélarus;
  • au cours des derniers mois et comme jamais auparavant, les autorités du Bélarus au plus haut niveau ont donné des signes tangibles de leur volonté de se rapprocher de l’Europe et ont répondu positivement à toute une série de demandes formulées par les Institutions européennes, dont l’Assemblée;
  • l’avancée la plus significative est le fait que plus aucun prisonnier politique au sens où l’entend la communauté internationale ne soit incarcéré au Bélarus depuis août 2008; les autorités se sont engagées à ne pas faire marche arrière sur cette question;
  • des progrès ont également été réalisés dans le domaine des médias, avec la publication de trois grands journaux indépendants et leur distribution via le réseau national de distribution;
  • des améliorations sont observées également dans les domaines de la liberté d’association et de la liberté de réunion ainsi qu’en ce qui concerne la volonté des autorités d’engager le dialogue avec la société civile.
77. Parallèlement, l’Assemblée doit comparer son attitude envers le Bélarus à celle qu’elle avait adoptée à l’égard d’autres pays:
  • parmi les États membres du Conseil de l’Europe, certains pays détiennent encore des prisonniers politiques, entravent l’exercice de la liberté d’association et de la liberté de réunion, et organisent des élections ne répondant pas aux normes européennes; et
  • l’Assemblée établit –patiemment- des contacts avec ces pays et tente de relever leurs normes en matière de démocratie, de droits de l’homme et d’État de droit, par le biais du dialogue et de la procédure de suivi.
78. Enfin, l’Assemblée doit garder à l’esprit que les deux autres Organisations européennes dont elle partage les valeurs – l’Union européenne et l’OSCE – ont abandonné ou n’ont jamais mis en œuvre une politique d’isolement. Une position commune de ces organisations ne peut qu’avoir un impact plus fort sur les autorités du Bélarus.

8. Principales recommandations

8.1. Relations avec les autorités du Bélarus

79. A la lumière de ces considérations et par souci de cohérence des politiques de l’Assemblée, je n’hésite pas à proposer que l’Assemblée rétablisse un dialogue structuré et formel avec les autorités du Bélarus.
80. Il me semble que le rétablissement du statut d’invité spécial du Parlement du Bélarus constitue le meilleur moyen de reprendre le dialogue. Cette mesure permettrait aux parlementaires du Bélarus d’assister aux sessions de l’Assemblée ainsi qu’aux réunions de commissions, lors desquelles ils auraient le droit de participer aux débats sans toutefois être autorisés à prendre part aux votes.
81. De plus, le rétablissement du statut d’invité spécial permettrait au Conseil de l’Europe, en tant qu’organisation, d’étendre ses activités au Bélarus, notamment dans les domaines essentiels de la démocratie, des droits de l’homme et de l’Etat de droit.
82. Bien que cette décision relève du Bureau, qui peut l’adopter à la majorité des deux tiers, il me semble que l’Assemblée devrait faire sentir son poids politique derrière cette mesure. Il s’agit en effet d’une décision courageuse, mais aussi nécessaire si l’Assemblée veut jouer un rôle et influer sur la situation au Bélarus.
83. De leur côté, les dirigeants du Bélarus doivent prendre conscience du fait que le rétablissement du statut d’invité spécial constitue un point de départ plutôt qu’une destination finale: il marque le début d’un dialogue plus étroit qui ne pourra se poursuivre que grâce aux progrès et aux améliorations qui interviendront dans les domaines de la démocratie, de la prééminence du droit et des droits de l’homme, et à la condition que les responsables soient prêts à accepter des critiques constructives dans un esprit de coopération et d’ouverture.
84. C’est pourquoi, après le rétablissement du statut d’invité spécial, l’Assemblée devrait continuer à suivre la situation au Bélarus pour savoir si les progrès enregistrés et l’attitude adoptée permettent d’avancer sur la voie d’un dialogue structuré.
85. Par conséquent, dans un an au plus tard, le Bureau devrait, en tenant compte de l’avis de la commission des questions politiques, être invité à évaluer si les autorités du Bélarus ont accompli des progrès tangibles et irréversibles vers le respect des normes du Conseil de l’Europe, indiquant leur détermination à faire leurs ses valeurs, et à examiner les nouvelles mesures à prendre. Dans son évaluation, le Bureau devra accorder une attention particulière aux développements intervenus dans les domaines suivants:
  • prisonniers politiques,
  • droit et pratique électorales,
  • libertés d’association et de réunion,
  • liberté des médias et
  • peine de mort.
86. Dans ce contexte, les activités de la sous-commission sur le Bélarus devraient être orientées pour soutenir le rapporteur sur la situation au Bélarus dans l’évaluation de la situation dans le pays, par le biais de l’organisation de visites sur le terrain et d’échanges de vues avec la participation d’invités du Bélarus.

8.2. Soutien de l’opposition démocratique, des ONG et de la société civile

87. Le Conseil de l’Europe et l’Assemblée doivent non seulement poursuivre, mais aussi développer leurs contacts avec l’opposition démocratique du Bélarus et leur soutien au renforcement de la société civile et des ONGs au Bélarus.
88. En vue, notamment, d’associer plus étroitement ces groupes aux travaux de l’Assemblée et de garantir qu’une grande variété de points de vue seront pris en compte, une délégation de l’opposition extraparlementaire du Bélarus devrait être invitée à toutes les sessions de l’Assemblée ainsi qu’à toutes les réunions de commissions à l’ordre du jour desquelles sera inscrite la question du Bélarus.
89. Cette invitation aurait une grande portée politique, car pour la première fois des personnes n’exerçant aucun mandat parlementaire seraient très étroitement et systématiquement associées aux activités de l’Assemblée. On peut espérer que cette initiative atténuerait par ailleurs les craintes de certains groupes d’opposition qui redoutent d’être marginalisés dans le cadre de la reprise du dialogue entre les organisations européennes et les dirigeants du Bélarus, dans la mesure où elle soulignerait que les forces démocratiques doivent demeurer des interlocuteurs incontournables pour l’Assemblée.

8.3. Coopération avec les autres organisations européennes

90. Le Conseil de l’Europe et l’Assemblée doivent renforcer leur coopération avec les organes et institutions appropriés de l’Union européenne et de l’OSCE afin d’améliorer les normes de démocratie, de droits de l’homme et de primauté du droit au Bélarus. L’Assemblée doit poursuivre sa coopération avec le Parlement européen et l’Assemblée parlementaire de l’OSCE, notamment via la Troïka parlementaire sur le Bélarus. L’organisation d’activités conjointes et la formulation de recommandations et de déclarations communes doivent être vivement encouragées.

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Commission chargée du rapport: Commission des questions politiques

Renvoi en commission: Décision du Bureau de l’Assemblée du 17.12.98, Dir. 562 (2000), Doc 8544, Renvoi 2444, 04.11.99, Rés. 1306 (2002)

Projet de résolution et projet de recommandation adoptés à l’unanimité le 26 mai 2009

Membres de la commission: M. Göran Lindblad (Président), M. David Wilshire (Vice-Président) remplaçant: M. Nigel Evans), M. Björn Von Sydow (Vice-Président), Mme Kristina Ojuland (Vice-Présidente), Mme Fátima Aburto Baselga (remplaçant: M. Pedro Agramunt), M. Françis Agius (remplaçant: M. Joseph Debono Grech), M. Alexandre Babakov, M. Viorel Badea, M. Denis Badré, M. Ryszard Bender, M. Andris Bērzinš, Mme Gudfinna Bjarnadottir, M. Pedrag Boškovic, M. Luc Van den Brande, M. Mevlüt Çavuşoğlu, M. Lorenzo Cesa, M. Titus Corlătean, Mme Anna Čurdová, M. Rick Daems, M. Dumitru Diacov, Mme Josette Durrieu, M. Frank Fahey, M. Joan Albert Farré Santuré, M. Piero Fassino (remplaçant: M. Andrea Rigoni), M. Per-Kristian Foss, M. György Frunda, M. Jean-Charles Gardetto, M. Marco Gatti, M. Charles Goerens, M. Andreas Gross, M. Michael Hancock, M. Davit Harutiunyan, M. Joachim Hörster, Mme Sinikka Hurskainen, M. Tadeusz Iwiński, M. Bakir Izetbegović, M. Michael Aastrup Jensen, Mr Miloš Jevtić, Mme Birgen Keleş, M. Victor Kolesnikov, M. Konstantion Kosachev, M. Jean-Pierre Kucheida, Mme Darja Lavtižar-Bebler, M. René van der Linden, M. Dariusz Lipiński, M. Juan Fernando López Aguilar, M. Younal Loutfi, M. Gennaro Malgieri, M. Dick Marty, M. Frano Matušić, M. Dragoljub Mićunović, M. Jean-Claude Mignon, Mme Nadezhda Mikhailova, M. Aydin Mirzazada, M. Joāo Bosco MotaAmaral, M. Gebhard Negele, Mme Miroslava Nemcova, M. Zsolt Németh, M. Fritz Neugebauer, M. Hryhoriy Omelchenko, M. Theodoros Pangalos, M. Aristotelis Pavlidis, M. Ivan Popescu, M. Christos Pourgourides, M. John Prescott (remplaçant: M. John Austin), M. Gabino Puche, M. Ilir Rusmali, M. Oliver Sambevski, M. Ingo Schmitt, M. Samad Seyidov, M. Leonid Slutsky, M. Rainder Steenblock, M. Zoltán Szabó, M. Mehmet Tekelioğlu, M. Han Ten Broeke, Lord Tomlinson (remplaçant: M. Denis MacShane), M. Petré Tsiskarishvili, M. Mihai Tudose, M. Ilyas Umakhanov, M. José Vera Jardim, M. Luigi Vitali, M. Wolfgang Wodarg, Mme Gisela Wurm (remplaçant: M. Albrect Konečný), M. Boris Zala, M. Emanuelis Zingeris.

Ex-officio: MM. Mátyás Eörsi, Tiny Kox

N.B.:Les noms des membres qui ont pris part à la réunion sont imprimés en caractères gras

Secrétariat de la commission: Mme Nachilo, M. Chevtchenko, Mme Sirtori-Milner, Mme Alleon