Rapport | Doc. 12173 | 01 mars 2010
Commémoration des victimes de la Grande Famine (Holodomor) en ex-URSS
Commission des questions politiques et de la démocratie
Résumé
La Grande Famine dans l’Union soviétique au début des années 1930 est l’une des pages les plus tragiques de l’histoire de l’Europe du XXe siècle. Des millions de personnes ont péri dans les ex-Républiques soviétiques du Bélarus, du Kazakhstan, de la Moldova et de la Russie, et tout particulièrement en Ukraine, du fait des politiques et des actions cruelles et inhumaines du régime totalitaire stalinien.
En Ukraine, qui a le plus souffert, ces événements tragiques se réfèrent à l’Holodomor et sont reconnus par la loi ukrainienne comme un acte de génocide contre les Ukrainiens.
Le rapport rend hommage à la mémoire de ceux qui ont péri dans cette catastrophe humaine et condamne fermement les politiques du régime totalitaire stalinien qui ont mené à la mort de millions d’innocents, en tant que crime contre l’humanité.
Il se félicite de la décision des autorités ukrainiennes d’instaurer une journée nationale de commémoration des victimes de la Grande Famine (Holodomor) et encourage les autres pays ayant également souffert à se joindre à la commémoration des victimes de cette tragédie, quelle que soit leur nationalité.
A. Projet de résolution
(open)B. Exposé des motifs, par M. Çavuşoğlu, rapporteur
(open)1. Introduction
2. Contexte historique général
3. Résultats des politiques soviétiques
4. L’Ukraine, principale victime de la Grande Famine
5. Visites au Bélarus, au Kazakhstan et en Russie
6. Conclusions
Annexe 1 – Commentaires du Parlement du Kazakhstan
(open)La Grande Famine au Kazakhstan dans les années 1930
La Grande Famine des années 1930 a été à l’origine de misère et de souffrances dans de nombreuses régions de l’ex-URSS, y compris au Kazakhstan. Cette terrible catastrophe a fait suite à la collectivisation forcée et à la mauvaise récolte de 1932. La famine a été le résultat d’une vaste politique d’industrialisation, de collectivisation imposée par la contrainte et de réquisition forcée de la production céréalière qui a détruit l’agriculture.
Raisons
Les résolutions du 15e Congrès du Parti communiste de toute l’Union soviétique (en décembre 1927) visaient la collectivisation massive de la campagne. En même temps, il était évident que le principal objectif était de «consolider progressivement les petites unités rurales pour en faire de vastes exploitations paysannes soutenant et encourageant l’agriculture socialisée» .
Les raisons de ces événements tragiques qualifiés dans l’histoire soviétique d’erreurs et d’excès n’étaient pas contingentes. Pourtant, d’après les historiens, ce phénomène était naturel, si ce n’est fatal, car l’usage de la force était incontrôlable, résultant de tendances à opposer les moyens politiques et idéologiques aux impératifs économiques, à violer le droit et à faire abstraction du facteur humain. Les erreurs et les excès étaient donc le reflet objectif de la société stalinienne.
Pour certains historiens cependant, Joseph Staline et ses conseillers n’auraient pas été au courant de la situation réelle ni de l’ampleur de la tragédie dans la steppe.
Les documents officiels laissent toutefois penser le contraire. Une note officielle du gouvernement signée par le président du Conseil des commissaires du peuple du Kazakhstan, ou Issaïev (en mai 1932), a ainsi rendu approximativement compte des événements. Le secrétaire du Comité régional de la Sibérie occidentale du Parti communiste de toute l’Union soviétique, R. Eikhe, et le président du Comité exécutif central d’Ouzbékistan, Y. Akhounbabaïev, avaient aussi informé Moscou de la famine et des déplacements de population au Kazakhstan (ce qui semble vrai, car la Sibérie occidentale et l’Ouzbékistan ont accueilli de très nombreux migrants originaires du Kazakhstan et il était du devoir de R. Eikhe et d’Y. Akhounbabaïev de rendre compte aux autorités moscovites et à Joseph Staline de la situation).
Dans ce contexte, il convient de mentionner un épisode avec V. Molotov, président du Conseil des commissaires du peuple, qui s’inquiétait des transferts massifs de population en provenance de l’ouest du Kazakhstan. F. Golovochtchekine, premier secrétaire du Comité régional kazakh, a expliqué que les migrations étaient dues à des conflits avec les ennemis de classe. Il savait cependant que les déplacements massifs étaient provoqués par les difficultés rencontrées et non par l’évolution du mode de vie.
Cours de l’histoire
La collectivisation a anéanti les villages kazakhs qui, dans leur majorité, ont été privés de leur bétail. L’économie agricole du Kazakhstan a subi un terrible coup qui a réduit la capacité et la structure productives des villages kazakhs.
Dans une lettre adressée à Joseph Staline, le vice-président du Conseil des commissaires du peuple, Tourar Ryskoulov , apportait des preuves convaincantes de la famine qui a sévi au Kazakhstan dans les années 1930. Pour citer Tourar Ryskoulov «d’après les dernières estimations, 40 000 Kazakhs résident le long du cours moyen de la Volga, 100 000 au Kirghizistan, 50 000 en Sibérie occidentale, 20 000 dans la région de Kara-Kalpak, 30 000 en Asie centrale. Les Kazakhs ont aussi migré vers des régions éloignées comme la Kalmoukie, le Tadjikistan, la région du Nord, etc. Sous la conduite de beys (riches propriétaires terriens), une partie de la population s’est dirigée vers la Chine occidentale. C’est la première fois que la population kazakhe quitte les régions centrales du pays.
Il ne s’agit pas d’une simple migration nomade semblable à celle qui a d’ordinaire lieu l’été, mais de la fuite d’habitants mourant de faim. Dans certaines régions, le nombre de migrants représente jusqu’à 40-50 % de la population totale. Les migrations sont à l’origine de famines et d’épidémies depuis le début de 1932. Au printemps dernier, de nombreux Kazakhs sont morts de faim et à la suite des pandémies. La situation s’aggrave à l’approche du printemps».
D’après le rapport de la Croix-Rouge de Moscou sur la région d’Aktioubinsk, les Kazakhs résidant dans le district de Turgaï ont été victimes de la famine et d’épidémies. Ils se nourrissaient de détritus, de racines de plantes sauvages et de rongeurs.
D’après les autorités locales, 20 à 30 % de la population des districts de Turgaï et de Batpaka ont péri et ceux qui ont survécu ont migré. Le district de Tchelkar a perdu 30 à 35 % de sa population. D’après le rapport que le président du Comité exécutif, T. Ivanov, a fait devant le Congrès régional des Soviets (en juillet 1932), la population de la région d’Aktioubinsk est tombée de 1 012 500 habitants en 1930 à 725 800 habitants en 1932, ce qui ne représentait plus que 71 %. D’après le président du Comité exécutif du district de Kzyl-Orda, 15 à 20 % seulement de la population a survécu. La population du district du Balkhach s’élevait à 60 000 habitants. La moitié de la population du district de Karatal est décédée au cours de l’hiver en raison de la migration forcée de trois villages kazakhs. Cinq cent soixante-neuf personnes sont mortes de faim entre décembre 1932 et le 10 janvier 1933 dans la même région. Trois cents corps ont été retrouvés à la gare d’Ushtobe, à Karatal et dans un sovkhoze cultivant du riz. Le nombre d’exploitations agricoles dans le district de Tchoubar est tombé de 5 300 en 1931 à 1 941 en 1933.
Conséquences
Les conséquences de la Grande Famine ont été terribles. Sans leur bétail, les nomades ont été privés de leur alimentation traditionnelle. La pêche et la chasse n’ont pas été d’un grand secours. Le pain a manqué en raison de mauvaises récoltes. Qui plus est, la plupart des Kazakhs n’avaient pas la possibilité de quitter la zone dévastée. Sans chevaux ni chameaux, les nomades affamés ne pouvaient guère parcourir de grandes distances. La grande steppe s’est refermée sur les Kazakhs qui n’avaient pas de bétail.
Poussés par la pauvreté, les gens ont envahi les villes, les campements cosaques, les gares et les villages dans le seul but de survivre. Sous l’effet de migrations massives, des épidémies de fièvre typhoïde, jusque-là inconnues des habitants de la steppe, sont apparues. De nombreux habitants sont morts de faim, faute d’être immunisés contre des maladies inconnues et de disposer de services de santé.
La population autochtone a profondément souffert des mouvements migratoires de masse. Un quart de la population totale, soit 1 030 000 personnes, a quitté le Kazakhstan l’année de la Grande Famine. Seules 414 000 personnes sont revenues par la suite, 616 000 préférant rester à l’étranger. D’après les experts, 200 000 personnes se sont installées en Chine, en Mongolie, en Afghanistan, en Iran et en Turquie. Il ressort des données d’un recensement que le nombre de Kazakhs résidant dans les pays voisins est passé de 314 000 en 1926 à 794 000 en 1939 . De 1926 à 1939, sous l’effet des migrations, le nombre de Kazakhs a été multiplié par 2,3 en Russie, par 1,7 en Ouzbékistan, par 6 au Turkménistan, par 7 au Tadjikistan et par 10 au Kirghizistan .
La famine, les épidémies et les migrations massives ont eu, dans un premier temps, de profonds effets sur l’évolution démographique du Kazakhstan, mais la population autochtone a réussi à surmonter rapidement les conséquences de cette tragédie. C’est seulement grâce à la poussée démographique de l’après-guerre (vers 1962) que les Kazakhs ont comblé les pertes. Ce n’est qu’en 1969, c’est-à-dire quarante ans plus tard, que la population a retrouvé sa taille. Sans la forte hausse de la natalité, il aurait fallu cent, voire cent vingt ans pour surmonter la crise démographique. Cela étant, la famine restera présente dans les esprits dans les cent cinquante à cent soixante-dix années à venir.
L’histoire moderne donne des interprétations très variées de la tragédie due à la Grande Famine survenue au Kazakhstan en 1932-1933. D’après le recensement de 1926, le Kazakhstan comptait 3 628 000 habitants . Cela étant, douze ans plus tard, en 1939, ce chiffre avait été réduit de 1 321 000 habitants, soit une baisse de 36,7 % . Pour les historiens eux-mêmes, ce chiffre était minimal et devait être modifié après une analyse approfondie . Grâce à cette analyse, les chercheurs ont constaté qu’au milieu des années 1930, le nombre d’habitants était d’environ 4 120 000 .
Compte tenu de ce qui précède, on peut dire que sur toute la période, le Kazakhstan a perdu plus de 2 millions d’habitants .
Etant donné que dans les années 1920 le taux de mortalité au Kazakhstan était de 25 habitants pour 1 000, le nombre de personnes décédées de causes naturelles de 1931 à 1933 aurait dû être d’environ 250 000 (7 %). Sur la base de ces données, les historiens ont estimé que 1 750 000 personnes, soit 42 % de la population, sont mortes de faim et de maladies .
La question du nombre de victimes de la Grande Famine demeure ouverte. Les données du recensement de 1937 effectué en une journée à l’échelle de l’Union soviétique, et baptisé «recensement de la répression», ont mis en évidence la plus grande catastrophe démographique de l’histoire du Kazakhstan due à la politique de Staline. Les responsables du recensement ont été arrêtés ou exécutés (le système s’est débarrassé des témoins). Pendant de nombreuses années, les données du recensement de 1937 avaient disparu. Elles sont toutefois réapparues récemment dans les archives économiques de l’Etat central de l’ex-URSS.
La population du Kazakhstan honore la mémoire des victimes de la famine, condamne le régime qui a agi au mépris de la vie pour réaliser d’ambitieux objectifs économiques et politiques, d’où la nécessité de poursuivre les recherches sur cette tragédie.
Annexe 2 – Commentaires de la délégation parlementaire de Moldova
(open)La famine en République de Moldova, incursion historique
Information préparée sous la direction de Mme Ana Gutu, présidente de la délégation moldove à l’Assemblée parlementaire
A. La famine en République autonome soviétique socialiste moldave (l’actuel territoire de la Transnistrie) en 1932-1933
Le pouvoir soviétique a été définitivement instauré en Transnistrie au début de l’année 1923. Jusqu’à cette date, il n’y a pas d’informations selon lesquelles la population de la rive gauche de la rivière Nistrou aspirait à la création d’un Etat indépendant. Seulement au printemps de 1924, les dirigeants bolcheviques de l’URSS lancent l’idée de la création d’une République soviétique moldave sur la rive gauche de la Nistrou. La république a été créée par décision du Bureau politique du Comité central (CC) de l’URSS «concernant la création de la République autonome soviétique socialiste moldave (RASSM)» de juillet 1924 et du Comité exécutif central de l’Ukraine du 12 octobre 1924 concernant la création de la RASSM dans la composante de l’Ukraine soviétique.
Les autorités soviétiques ont commencé la mise en place dans la Transnistrie des politiques de dénationalisation, d’industrialisation et de collectivisation, au prix de sacrifices humains.
Dans les années 1920, l’économie des départements transnistriens a été confrontée à de nombreuses difficultés, celles-ci étant une suite du désastre causé par les guerres, et notamment par l’anarchie politique apportée par les bolcheviques. La situation dans l’agriculture était très compliquée, l’agriculture étant le secteur principal de l’économie. Les surfaces de céréales et le nombre de bétail ont diminué de deux fois par rapport à l’année 1913. Malgré la situation compliquée, les autorités ont organisé la campagne de collecte des céréales et ont mis en application les plans de collectivisation. C’est dans de telles conditions qu’a été déclenchée la campagne de dépossession des paysans cossus (koulak dans la terminologie soviétique). Au cours de l’année agricole 1929-1930, plus de 3 000 ménages paysans ont été déclarés des koulaks, leur fortune confisquée, et les propriétaires déportés. L’apogée de la lutte contre les paysans a été atteint dans l’année 1932. Les villages étaient déjà détruits s’agissant de l’aspect moral et matériel. La vague suivante de la politique de collecte de céréales a affecté la majorité absolue des ménages paysans. La situation s’est compliquée à cause des calamités naturelles: au printemps, la rivière Nistrou a débordé et à peu près 1 000 familles de paysans sont restées sans-abri, plus de 10 000 familles ont complètement perdu leurs sources d’existence. L’été et l’automne ont été secs, suivis de pluies abondantes. Comme conséquence en Transnistrie a suivi une période d’une terrible famine; les plus monstrueuses proportions ont été enregistrées dans les années 1932-1933, quand environ 20 000 personnes sont décédées.
La collectivisation forcée et la famine qui s’ensuivit ont provoqué l’exode des paysans vers la Roumanie, qui ont traversé la rivière Nistrou. Dans ces conditions, les autorités soviétiques ont consolidé les frontières, en massacrant ceux qui essayaient de passer la frontière. La cruauté des gardes-frontière a choqué l’opinion publique mondiale. La nuit du 23 février 1932, le feu a été ouvert sur 60 paysans, dont 40 ont été tués sur la glace de la rivière pendant qu’ils traversaient celle-ci. La veille, environ 100 personnes des villages du département Tighina ont été massacrées pour la même raison. Pourtant, le nombre de ceux qui voulaient partir de la RASSM a augmenté et environ 20 000 personnes ont réussi à se réfugier en Roumanie.
B. La famine des années 1946-1947 en Bessarabie
L’occupation de la Bessarabie en 1940 et sa réoccupation par les Soviétiques en 1944 ont marqué des jours noirs dans l’histoire de cette province roumaine. Les autorités soviétiques ont instauré en Bessarabie un régime totalitaire, un régime antinational, un régime de terreur et de vol. Immédiatement après la seconde guerre mondiale et pendant les premières années d’occupation soviétique – les années 1946-1947 – la République soviétique socialiste moldave (RSSM) (créée le 2 août 1940) a été dévastée par une famine sans précédent dans l’histoire du pays.
Les causes de la famine des années 1946-1947
La justification de la famine dans la littérature soviétique: La littérature communiste a essayé d’expliquer sans fondement la famine par deux thèses:
- comme étant une conséquence de l’occupation fasciste;
- comme étant provoquée par l’état de ruine et de sécheresse monstrueuse des années 1945-1946.
Les idées ont été reprises dans certains rapports de l’époque, par exemple dans le rapport que le ministre de l’Intérieur de Chişinău, Tutuşkin, transmis à son chef de Moscou, mentionnant «…comme conséquence de l’occupation roumaine et de la sécheresse des années 1945-1946, la situation alimentaire de RSSM est extrêmement difficile…».
Les réalités objectives: Les documents démontrent que la famine des années 1946-1947 a été une grave conséquence des actions inhumaines, criminelles du régime staliniste, des fonctionnaires du Parti communiste et de l’Etat.
Conformément aux documents et aux témoignages des survivants:
- au cours des années 1944-1949, le Comité central (CC) du Parti communiste (PC) de Moldova, le Conseil des ministres de la RSSM, sous la pression du bureau Moldave du CC du PC de l’Union entière ont adopté environ 100 décisions qui obligeaient les organes locaux d’imposer aux paysans de livrer obligatoirement à l’Etat les produits agricoles. Ainsi, ces institutions ont organisé la remise obligatoire à l’Etat de la minime quantité de produits agricoles obtenus dans les ménages paysans dans les conditions de cette sécheresse sans précédent. Dans les villages moldaves, les dirigeants ont confisqué tous les produits agricoles, jusqu’au dernier grain de blé. La presse de l’époque abondait de rapports triomphalistes de «la remise des céréales à l’Etat» par centaines de tonnes, de la «surréalisation» du plan de la collecte. En réalité, les équipes d’activistes collectaient tous les produits agricoles sans tenir compte du fait que, pour survivre, les paysans avaient besoin eux-mêmes de nourriture;
- l’importance du parti de réaliser les plans quinquennaux au détriment de la situation de la population. La réalisation des plans quinquennaux à l’aide d’objectifs déraisonnables a constitué le but principal des autorités soviétiques. De plus, on encourageait la surréalisation des plans. Ainsi, dans les conditions où des gens mouraient de faim, l’industrie alimentaire de la RSSM dépassait le plan de l’année 1946 dans la fabrication du beurre de 33,2 %, de l’huile de 39,5 %, de la viande de 32,5 %, et des conserves de 101,9 %. Ces produits alimentaires provenaient des acquisitions des paysans et des blés exportés dans l’URSS.
Les années et les mois où le peuple moldave mourait de faim, Staline a exporté dans d’autres pays 1,7 million de tonnes de céréales – des wagons chargés d’aliments étaient dirigés vers les pays socialistes, notamment l’Allemagne de l’Est, pour des raisons propagandistes.
Les conséquences de la famine
La dystrophie – A cause du manque de nourriture ou de l’alimentation (la consommation de feuilles, de traînasse, de l’amarante, etc.), le nombre de personnes affectées par la dystrophie augmentait rapidement. Conformément aux données (incomplètes) collectées par les organes de protection de la santé, 53 000 personnes dystrophiques étaient enregistrées le 25 décembre 1946 en RSSM, le nombre de celles-ci augmentait à 190 000 le 1er février 1947, et vers le 1er mars étaient enregistrés 238 000 cas de dystrophie. Bien qu’on ait pris des mesures afin de réduire les ravages de cette maladie, les résultats n’ont pas justifié les attentes: au mois de décembre 1947, dans plusieurs départements, les personnes affectées de dystrophie constituaient entre un quart et 30 % de la population, et dans certains lieux (notamment dans le département de Cimişlia) ce chiffre augmentait jusqu’à 80 %.
Le cannibalisme ou la terrible réaction des gens affamés. Des cas de cannibalisme ont été enregistrés au commencement de l’année 1946 dans différents endroits de Moldova. Ainsi, par exemple, au mois de juin 1946, quelques cas de cannibalisme ont eu lieu dans les villages d’Alexandreşti, de Recea-Slobozia et de Sturzeni du district de Râşcani. A. Kosyguine, haut fonctionnaire du Parti communiste de l’URSS, arrivé en 1947 en Moldova, a été également témoin de cannibalisme; visitant quelques villages tout près de Chişinău, il a vu dans une maison le cadavre d’un mort qui était préparé afin d’être consommé.
Le 8 septembre 1947, le Comité départemental du Parti communiste de Cahul (au district de Cahul, 10 cas de cannibalisme ont été officiellement enregistrés de février 1946 à février 1947) a édicté un document intitulé «Conseils du Comité départemental de PCM aux secrétaires des comités départementaux du parti concernant la prévention des faits de cannibalisme dans le district». La direction du département, relatait-on dans le document, «dispose d’informations sur le cannibalisme et l’utilisation en qualité de nourriture des cadavres des hommes dans certains villages des départements de Vulcăneşti, Taraclia, Ciadâr-Lunga, Baimaclia et, spécialement, Congaz». Un fonctionnaire informait la direction du Parti et de l’Etat de la république que, se trouvant les 7 et 8 février 1947 dans le village de Baurci du district de Congaz (l’actuel territoire de la Gagaouzie, autonomie territoriale de l’ethnie turque orthodoxe sur le territoire de la République moldove), il a constaté quatre assassinats dans un but de cannibalisme. «La consommation des cadavres, mentionnait cette source, a pris un caractère de masse. On a constaté des cas de vol de cadavres menés au cimetière et restés non enterrés.» «On a enlevé les muscles et les membres» à plusieurs cadavres trouvés dans divers endroits du village. Dans le village de Beşalma, la situation était encore plus grave. La consommation des cadavres est aussi répandue dans d’autres villages. Au mois de janvier 1947, une paysanne du village de Tambula du district de Bălţi a tué, dans le but de les manger, deux de ses quatre enfants, une fillette de 6 ans et un garçon de 5 ans. Un paysan de Glinjeni, département de Chişcăreni, a appelé chez lui une voisine qu’il a étranglée et mangée. Un autre paysan du village de Cajba du département de Glodeni a tué son petit-fils de 12 ans, qui était venu chez lui, et l’a mangé. En Moldova ont été enregistrés au total environ 39 cas de cannibalisme pendant la famine des années 1946-1947.
Les victimes humaines – Le phénomène de la sous-alimentation, causé par le manque de nourriture normale, la consommation des plantes et des sous-produits agro-industriels nocifs à la santé (des cadavres, des charognes, etc.) mais aussi les épidémies qui s’intensifiaient ont provoqué le décès d’une centaine de milliers de personnes (d’abord dans les villages, parce que les villes où habitait la nomenclature soviétique étaient plus aidées, avec des produits alimentaires qui étaient pris de force aux paysans). Les gens mouraient dans leurs maisons, dans la rue, etc., à cause de la famine. Des dizaines de cadavres étaient quotidiennement collectés dans les rues. A Chişinău, par exemple (conformément à l’information présentée par le ministère de l’Intérieur de la république à la direction de Moscou), la milice ramassait sans cesse dans la rue de 8 à 12 cadavres de paysans arrivés des villages.
Le tableau ci-dessous reflète la mortalité de la population de la RSSM pendant les années 1946-1947:
Mois |
1946 |
1947 |
Différence |
Janvier |
4 466 |
19 133 |
14 667 |
Février |
4 347 |
23 791 |
19 444 |
Mars |
5 633 |
25 953 |
20 320 |
Avril |
4 588 |
15 034 |
10 446 |
Mai |
3 782 |
14 938 |
10 616 |
Juin |
3 676 |
24 701 |
21 085 |
Juillet |
5 235 |
16 418 |
11 183 |
Août |
5 313 |
8 346 |
3 033 |
Septembre |
4 544 |
5 248 |
704 |
Octobre |
5 799 |
||
Novembre |
5 753 |
3 264 |
2 489 |
Décembre |
9 650 |
Il y a une discordance énorme entre le nombre des naissances et le nombre des décès. Ainsi, au cours des premiers trois mois de l’année 1946, le nombre de naissances dans la république a été de 9 494, et le nombre de décès de 14 428; en milieu rural, ce nombre a été respectivement de 7 845 et 12 973: le nombre de ceux qui décédaient était deux fois plus élevé que le nombre de ceux qui naissaient. Conformément aux données officielles, vers la fin de l’année 1947, les proportions de la mortalité commencent graduellement à se réduire. Au mois de novembre, 3 264 personnes sont décédées, soit 21,2 % plus que le nombre de naissances.
En 1946, la population rurale de la république s’est réduite de 447 personnes, mais en 1947, à la suite de la dystrophie, la réduction a été de 100 633 personnes, correspondant à une perte annuelle de plus de 10 %. Généralement pendant l’année 1947, la population rurale a été réduite de 193 900 personnes. La famine a aussi provoqué de grandes pertes de vies humaines dans la première moitié de l’année 1948. Au début de cette année-ci, le nombre de décès était plus élevé qu’à la fin de l’année précédente.
Le bilan
Le nombre exact de personnes décédées n’est pas connu. Pourtant, conformément aux recherches effectuées dans les dernières années, on constate que, pendant la période de la famine des années 1946-1947, mais aussi dans la première moitié de l’année 1948, sont morts à cause de la faim entre 250 000 et 300 000 personnes, le chiffre moyen accepté dans l’historiographie était d’environ 280 000 personnes (70 % du nombre total des décès étaient le résultat de la dystrophie).
Le vagabondage – En raison de la mort de leurs parents, des milliers d’enfants restés sans protection vagabondaient dans les villages et les villes à la recherche de nourriture. Les enfants orphelins des villages partaient dans les villes dans l’espoir de trouver un petit morceau de pain. Au cours du seul premier semestre de l’année 1946, on avait ramassé environ 1 500 enfants vagabonds au commissariat de la milice de la RSSM.
Des tendances d’émigration – La famine en Bessarabie a intensifié l’esprit d’émigration, et plusieurs cas de tentatives de départ pour la Roumanie ont été enregistrés. Le destin de ceux qui ont essayé d’arriver en Roumanie est divers. Certains émigrants ont été fusillés par les gardes-frontière soviétiques. Quelques centaines de personnes ont réussi à traverser la frontière avec la Roumanie, mais une partie des personnes a été arrêtée pendant la tentative de passer la frontière. Ainsi, au mois d’août 1946, 37 personnes ont été arrêtées, 49 au mois de septembre, 46 au mois de décembre, et 63 au mois de janvier 1947, etc. Certains de ceux qui ont eu l’intention de fuir en Roumanie étaient surveillés.
C. Conclusions
Ce n’est pas la sécheresse qui a provoqué le désastre (il y en avait de temps en temps en Moldova, sans mener au cannibalisme généralisé), mais les méthodes de gouvernement stalinistes, le désir de construire un avenir «serein» sans tenir compte du prix payé pour atteindre ce but. Les paysans bessarabiens ont été condamnés délibérément à la famine pour deux raisons:
- ils étaient vus comme des ennemis de classe: on a inventé des termes confus – koulak (paysan cossu) – dont étaient étiquetés les paysans laborieux. Ainsi ceux-ci étaient soumis à des impôts écrasants et condamnés à l’extermination, y compris physique;
- ils étaient traités d’ethniques roumains, «des traîtres et des alliés de l’Allemagne nazie»: la paysannerie roumaine de Moldova était traitée avec hostilité, car elle a été considérée comme alliée de Hitler, étant étiquetée comme «nation traîtresse». Pour réduire toute résistance et forcer les paysans bessarabiens à entrer dans les fermes collectives, la direction utilisait le scénario appliqué déjà en Ukraine pendant les années 1932-1933. La terreur par la famine est devenue ainsi un instrument de réalisation des plans des autorités soviétiques.
L’Ukraine a réussi à obtenir le soutien de la communauté internationale pour qualifier le phénomène tragique des années 1932-1933 de génocide. La République de Moldova doit suivre l’exemple de l’Ukraine.
Bibliographie
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Moraru, Anton, Istoria Românilor. Basarabia şi Transnistria, 1812-1993 (L’histoire des Roumains. La Bessarabie et la Transistrie, 1812-1993), Chişinău, 1995.
Şişcanu, Elena, Basarabia sub regimul bolşevic (1940-1952) (La Bessarabie sous le régime bolchevique (1940-1952)), Semne, Bucarest, 1998.
Ţurcanu, Ion, Foametea din Basarabia în anii 1946-1947 (La famine en Bessarabie dans les années 1946-1947), Chişinău, 1993.
Turea, Larisa, Cartea foametei (Le livre de la famine), Bucarest, 2008.
Annexe 3 – Commentaires de la délégation parlementaire de l’Ukraine
(open)Informations du groupe Notre Ukraine sur sa position face à l’Holodomor de 1932-1933 en Ukraine
En 1917, après la révolution de février en Russie, Lénine déclarait dans la revue Prosvechtchenie, publiée en novembre 1917, que seule la nationalisation de tous les produits permettrait aux bolcheviks de contrôler le pays. Ceux-ci ont lancé cette nationalisation en utilisant des cartes de rationnement, d’où la conclusion suivante: la famine était supposée être le mode d’administration au début du régime bolchevique. Pour que la nationalisation s’étende à tous les territoires, les bolcheviks devaient:
- détruire la République nationale ukrainienne (RNU). Cette république était l’un des plus grands Etats indépendants occupés par les bolcheviks. Elle comptait un parlement central dont les chefs de file étaient instruits et épris de liberté, et une paysannerie aisée et puissante dont la production céréalière était élevée pour l’époque;
- détruire la paysannerie ukrainienne qui représentait 80 % de l’ensemble de la population ukrainienne. Au début du XXe siècle, l’Ukraine assurait 90 % des exportations de céréales de l’Empire russe. Les paysans ukrainiens fournissaient 42 % de la production mondiale d’orge et 20 % de celle de céréales. Ils étaient le pilier de l’agriculture ukrainienne. Les bolcheviks avaient compris qu’ils ne seraient pas en mesure de contrôler l’Ukraine s’ils ne pouvaient détruire la paysannerie ukrainienne.
Tel était le principal objectif du régime communiste de Staline. La lutte contre les opposants susmentionnés a pris les formes suivantes:
- à partir de 1928, les bolcheviks ont commencé à éliminer les koulaks (riches paysans) et à détruire les meilleures exploitations ukrainiennes;
- le régime communiste a confisqué les biens des paysans;
- en 1929, le Gouvernement bolchevique a étendu la collectivisation totale;
- à partir de 1929, la terreur bolchevique a visé à exterminer l’élite ukrainienne. Le but était d’éliminer cette élite;
- en 1930, l’Eglise orthodoxe autocéphale ukrainienne a été interdite.
Cette lutte a eu les résultats suivants:
- les rendements agricoles ont chuté;
- la productivité du travail a baissé;
- les réquisitions de céréales sont devenues excessives;
- la famine a sévi en 1931, 1932 et 1933;
- à partir de janvier 1933, après le télégramme de Staline aux paysans ukrainiens, le régime a prélevé, pendant des mois, l’ensemble de la production;
- de la fin janvier au mois de juin 1933, le régime a provoqué la mort de 3,4 millions de personnes qui ont succombé à la famine. Sous l’effet de la baisse du taux de natalité, une perte supplémentaire de 1,1 million de personnes a été enregistrée. C’est ainsi que pendant cinq mois, 4,5 millions de personnes, 900 000 par mois, 3 000 par jour, ont succombé à la famine en Ukraine. (Ces données reposent sur les dernières recherches de l’Institut démographique et d’études sociales de l’Académie nationale des sciences d’Ukraine.)
Les différences entre l’Ukraine et la Russie par rapport à l’Holodomor sont les suivantes:
- les paysans qui vivaient dans des régions touchées par la famine pouvaient se déplacer en Russie alors qu’en Ukraine, le décret pris par Staline interdisait aux paysans de quitter le territoire de la RSS d’Ukraine et du Kouban;
- des listes noires existaient en Russie comme en Ukraine, mais uniquement dans les régions où vivait la population ukrainienne. Les autres régions de la Russie n’étaient pas soumises à ces mesures;
- la langue russe présentait des avantages par rapport à la langue ukrainienne qui était réprimée. Les publications ukrainiennes étaient bloquées et la grammaire ukrainienne a été adaptée à la grammaire russe;
- des unités et des brigades armées russes de la Guépéou ont coupé des villages et des régions entières de l’Ukraine du reste du monde, condamnant les populations à mourir de faim.
Le consul d’Italie, M. Sergio Gradenigo, a noté dans son livre Lettres de Kharkov que l’un des chefs locaux russes de la Guépéou affirmait avec cynisme que le «matériel ethnographique» devait être transformé. Il parlait de la nation ukrainienne.
Informations du Groupe du Bloc de Ioulia Timochenko sur sa position face à l’Holodomor de 1932-1933 en Ukraine
L’Holodomor de 1932-1933 est devenu l’une des pages les plus tragiques de l’histoire de l’Ukraine et le symbole du génocide du peuple ukrainien. Il illustre la partie dramatique de l’histoire de l’Ukraine au sujet de laquelle nous devons révéler la vérité. Face aux millions d’hommes qui ont succombé à cette famine artificielle, un devoir de mémoire et de justice s’impose.
L’Holodomor se caractérise avant tout par d’énormes pertes humaines, l’extermination physique systématique de notre nation à des fins politiques. Il s’agit d’une tentative de transformer la nation ukrainienne en nation d’esclaves du système totalitaire.
Cette tragédie est aujourd’hui trop politisée en Ukraine. Il est regrettable que les questions de mémoire nationale et d’unité de la nation soient au centre d’intérêts partisans à court terme. Le peuple ukrainien continue malheureusement d’être l’instrument de campagnes de relations publiques de certains responsables politiques, ce que l’on ne saurait permettre et ce qui ne fait que confirmer le cynisme de ceux-ci.
Deux positions sont apparues en Ukraine et au-delà de ses frontières face à la Grande Famine de 1932-1933. Dans un cas, l’Holodomor est assimilé à un génocide tandis que, dans l’autre, on se limite à reconnaître la famine. La reconnaissance de l’Holodomor en tant que génocide est fortement influencée par le facteur géopolitique. Après que l’Ukraine eut soulevé la question au niveau national, la Fédération de Russie a nié le caractère anti-ukrainien de l’Holodomor, d’où des spéculations politiques en Ukraine également.
Cela étant, une seule conclusion se dégage de l’étude et de l’analyse approfondies des dispositions de la Convention de l’ONU de 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide: le peuple ukrainien a été victime d’un génocide et l’Holodomor en a été l’instrument. En fait, les conditions artificielles créées visaient l’extermination physique complète ou partielle des Ukrainiens en tant que nation et peuple.
Nous appelons l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe et les pays qui n’ont pas encore reconnu l’Holodomor de 1932-1933 comme un génocide du peuple ukrainien à le faire. L’adoption de la résolution pertinente de l’APCE qui condamne ce crime correspond à la position de l’Assemblée qui condamne les crimes commis par les régimes totalitaires, en particulier les violations des droits fondamentaux de l’homme, dont le droit à la vie, et est conforme à l’esprit et aux principes des résolutions précédentes de l’APCE, à savoir les Résolutions 1096 (1996) et 1481 (2006).
Nous préconisons une enquête impartiale sur l’Holodomor et la publication de ses résultats sans qu’aucune partie tierce ne soit visée. Nous espérons que le rapport de l’APCE sera objectif, car il est avant tout motivé par la nécessité de rétablir la vérité historique, d’honorer la mémoire des victimes de l’Holodomor et d’éviter des crimes terribles semblables dans l’avenir.
Nous souhaitons diffuser, à l’échelon européen mais aussi mondial, des informations sur cette tragédie qui, en raison de ses conséquences terribles, demeure une page sombre de l’histoire européenne.
La communauté internationale pourra ainsi dégager des conclusions en relation avec les événements qui ont eu lieu en Ukraine sous le régime stalinien, mais sera aussi garante, d’une certaine façon, de ce que cette terrible leçon ne se répète pas et qu’aucune catastrophe analogue ne puisse se reproduire.
Déclaration du Parti des régions d’Ukraine sur la famine artificielle de 1932-1933 en République soviétique d’Ukraine (Holodomor)
Le Parti des régions condamne énergiquement l’Holodomor, crime terrible du régime totalitaire soviétique contre le peuple ukrainien et d’autres nations de l’ancienne Union soviétique, et crime contre l’humanité qui a fait des millions de victimes innocentes.
Nous invitons la communauté internationale à rendre hommage à la mémoire des victimes de la famine en Ukraine et dans d’autres pays de manière à contribuer à éviter des catastrophes humaines analogues dans l’avenir, à renforcer l’effectivité de l’Etat de droit et à améliorer le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Le Parti des régions remercie la communauté internationale des efforts qu’elle fait pour sensibiliser l’opinion publique mondiale à l’Holodomor et se félicite de la profonde compassion dont la communauté internationale fait preuve ainsi que de la manière objective dont elle aborde le problème, comme en témoignent notamment les documents internationaux suivants:
- Résolution du Parlement européen du 23 octobre 2008 sur la commémoration de l’Holodomor, la famine artificiellement provoquée en Ukraine (1932-1933);
- Résolution de l’Assemblée parlementaire de l’OSCE du 3 juillet 2008 sur l’Holodomor de 1932-1933 en Ukraine;
- Résolution de l’UNESCO sur le souvenir des victimes de la Grande Famine (Holodomor) en Ukraine, 1er novembre 2007;
- Déclaration commune sur la Grande Famine de 1932-1933 en Ukraine (Holodomor), ONU, 10 novembre 2003.
Le Parti des régions souscrit à la position de l’Union européenne selon laquelle l’Holodomor est «un crime effroyable perpétré contre le peuple ukrainien et contre l’humanité».
Il adhère aussi à la déclaration du Parlement européen selon laquelle «l’intégration européenne se fonde sur la volonté de surmonter les événements tragiques du XXe siècle et la reconnaissance que cette réconciliation avec une histoire difficile ne dénote en rien un sentiment de culpabilité collective, mais qu’elle constitue une base solide sur laquelle il sera possible de construire un avenir européen commun fondé sur des valeurs communes, ainsi qu’un futur collectif et interdépendant».
Parallèlement, le Parti des régions est d’avis que toute interprétation des événements survenus en 1932-1933 en Ukraine doit être conforme au droit international en vigueur. Il reconnaît que l’interprétation de l’Holodomor en tant que génocide commis contre la nation ukrainienne ne satisfait pas pleinement aux critères établis pour le crime de génocide par la Convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide que 140 pays ont ratifiée.
Conformément à cette convention, le génocide s’entend en particulier de «l’un quelconque des actes ci-après, commis dans l’intention de détruire en tout ou en partie un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel:
a. meurtre de membres du groupe;
b. atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe;
c. soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle;
d. mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe;
e. transfert forcé d’enfants du groupe à un autre groupe».
Les événements de la famine massive qu’a connue l’Ukraine en 1932-1933 ne correspondent pas à cette définition du génocide que les faits historiques ci-après contredisent:
- la politique de réquisition de la nourriture a été planifiée et organisée par les représentants des autorités centrales à Kiev et à Moscou, et exécutée par les administrations locales; elle n’a touché la paysannerie ukrainienne qu’en tant que strate politique et économique ou «classe politique» faisant partie de la société ukrainienne;
- les réquisitions et les autres mesures restrictives et répressives ont été appliquées dans le cadre de la politique de collectivisation forcée mise en œuvre sur le territoire de l’ensemble de l’Union soviétique;
- des millions de personnes ont été décimées ou ont profondément souffert de la politique de collectivisation et de réquisition alimentaire au Kazakhstan et en Russie, elles ont été des douzaines de milliers à subir le même sort au Bélarus et dans d’autres républiques. Les Ukrainiens, les Russes, les Kazakhs, les Bélarussiens, les Juifs, les Grecs, les Moldoves et de nombreux autres groupes ethniques ont payé un lourd tribut;
- comme indiqué, les régions les plus touchées par la famine ont aussi été victimes d’épidémies graves de typhus et de paludisme;
- les réquisitions alimentaires et les autres mesures appliquées se sont inscrites dans le cadre de la théorie marxiste-léniniste de la lutte des classes et de la politique de collectivisation officielle, et non dans celui d’une politique de répression visant exclusivement la nation ukrainienne;
- rien ne prouve que la politique officielle du gouvernement qui a entraîné la famine reposait sur des motifs ethniques; de plus, ceux qui l’ont exécuté au niveau national étaient pour la plupart ukrainiens.
Compte tenu de ce qui précède, le Parti des régions lance un appel pour promouvoir des recherches historiques internationales approfondies et non politisées sur la famine que l’Ukraine a connue en 1932-1933.
Comme cette immense stratégie a touché bon nombre de nations composant l’URSS de l’époque, nous demandons aussi des mesures communes, dans le cadre de la Communauté d’Etats indépendants (CEI), à la mémoire des victimes de ces événements tragiques.
Le Parti des régions condamne résolument toute tentative d’engager la responsabilité pénale ou administrative en cas de refus de reconnaître l’Holodomor comme un génocide, ainsi que l’a indiqué le Président Iouchtchenko. Il estime que de telles mesures sont incompatibles avec les principes fondamentaux de la liberté d’expression et de la démocratie, et avec ceux de recherches libres menées sans entrave.
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Commission chargée du rapport: commission des questions politiques
Renvoi en commission: Doc. 11512, Renvoi 3423 du 14 avril 2008, et Doc. 11542, Renvoi 3435 du 18 avril 2008
Projet de résolution adopté à l’unanimité le 15 décembre 2009
Membres de la commission: M. Göran Lindblad (Président), M. David Wilshire (Vice-Président), M. Björn von Sydow (Vice-Président) (remplaçante: Mme Kerstin Lundgren), Mme Fátima Aburto Baselga, M. Francis Agius (remplaçant: M. Joseph Debono Grech), M. Alexandre Babakov (remplaçant: M. Sergey Markov), M. Viorel Badea, M. Denis Badré, M. Andris Bērzinš, M. Mevlüt Çavuşoğlu, M. Lorenzo Cesa, M. Titus Corlătean, Mme Anna Čurdová, M. Rick Daems, Mme Maria Damanaki (remplaçant: M. Konstantinos Vrettos), M. Dumitru Diacov, M. Pol van den Driessche, Mme Josette Durrieu, M. Frank Fahey, M. Piero Fassino, M. György Frunda, M. Jean-Charles Gardetto, M. Marco Gatti, M. Andreas Gross, M. Michael Hancock, M. Davit Harutyunyan, M. Norbert Haupert, M. Joachim Hörster, Mme Sinikka Hurskainen, M. Tadeusz Iwiński, M. Bakir Izetbegović (remplaçant: M. Mladen Ivanić), M. Michael Aastrup Jensen, M. Miloš Jevtić, Mme Birgen Keleş, M. Victor Kolesnikov (remplaçante: Mme Olha Herasym’yuk), M. Konstantin Kosachev, M. Jean-Pierre Kucheida, Mme Darja Lavtižar-Bebler, M. René van der Linden, M. Dariusz Lipiński, M. Gennaro Malgieri, M. Dick Marty, M. Frano Matušić, M. Silver Meikar, M. Evangelos Meimarakis, M. Dragoljub Mićunović, M. Jean-Claude Mignon, Mme Nadezhda Mikhailova, M. Aydin Mirzazada, M. Juan Moscoso del Prado Hernández, Mme Lilja Mósesdóttir, M. João Bosco Mota Amaral, Mme Olga Nachtmannová, M. Gebhard Negele, Mme Miroslava Nĕmcová, M. Zsolt Németh, M. Fritz Neugebauer (remplaçant: Franz Eduard Kühnel), M. Aleksandar Nikoloski, M. Hryhoriy Omelchenko, M. Maciej Orzechowski, M. Ivan Popescu, M. Christos Pourgourides, M. John Prescott (remplaçant: M. John Austin), M. Gabino Puche, M. Amadeu Rossell Tarradellas, M. Ilir Rusmali, M. Ingo Schmitt (remplaçant: M. Eduard Lintner), M. Predrag Sekulić, M. Samad Seyidov, M. Leonid Slutsky, M. Rainder Steenblock, M. Zoltán Szabó (remplaçant: M. Mátyás Eörsi), M. Mehmet Tekelioğlu, M. Han Ten Broeke, M. Zhivko Todorov, Lord Tomlinson (remplaçant: Rudi Vis), M. Latchezar Toshev, M. Petré Tsiskarishvili, M. Mihai Tudose, M. Ilyas Umakhanov, M. José Vera Jardim, M. Luigi Vitali, M. Wolfgang Wodarg, Mme Karin S. Woldseth, Mme Gisela Wurm, M. Emanuelis Zingeris
Ex officio: M. Tiny Kox
N.B. Les noms des membres ayant participé à la réunion sont indiqués en gras
Secrétariat de la commission: Mme Nachilo, M. Chevtchenko, Mme Sirtori-Milner