1. Introduction
1. Le présent rapport dresse le bilan des efforts systématiques
engagés par le Conseil de l'Europe pour améliorer la qualité de
la démocratie en Europe (voir section 7 ci-dessous).
2. Il montre à quel point les bonnes pratiques au niveau local
contribuent à améliorer la qualité et l'image de la démocratie aux
niveaux national et international.
3. Il observe également combien, à l'intérieur comme à l'extérieur
de l'Europe, le respect envers la démocratie représentative et ses
institutions a diminué. Le signe le plus évident en est la faible
participation aux élections nationales. Par ailleurs, les élections
du Parlement européen n'ont enregistré récemment que 43 % de votants.
Au sein des Etats membres du Conseil de l'Europe, des manifestations
ont également eu lieu, notamment en Russie, en Allemagne, en Grèce
et en Espagne. Une telle désaffectation et une telle insatisfaction
à l'égard de la démocratie moderne ont aussi été amplifiées, bien
que non causées au départ, par le fléchissement actuel de la conjoncture
économique.
4. Ce rapport décrit comment la conduite des affaires publiques
et nationales peut être facilitée au sein des Etats membres du Conseil
de l'Europe, notamment avec le concours de tous les citoyens. Il
place la participation et la consultation au cœur de la citoyenneté
active et soutient la mise en place, à l'intérieur du Conseil de
l'Europe, des mesures de coordination proposées par plusieurs présidences
successives du Conseil visant à obtenir de meilleurs résultats pour
la démocratie à l'échelon local et national.
5. Ce rapport approuve, par conséquent, la volonté des présidences
successives du Conseil de l'Europe d'élaborer et de mettre en œuvre
un agenda commun couvrant les fonctions du Conseil de l'Europe relatives à
la démocratie locale et régionale (voir ci-dessous, section 9).
6. Pour renforcer la démocratie locale, ce rapport conseille
également de renforcer la coordination et les systèmes de travail
entre le Conseil de l'Europe et l'Union européenne, et de concevoir
de tels systèmes nouveaux ou révisés en relation avec le Programme
unique sur la démocratie locale et régionale du Conseil de l'Europe,
au fur et à mesure du développement et du déploiement de ce dernier.
2. Citoyenneté active:
participation et consultation
2.1. Définitions
7. La citoyenneté active a été interprétée de diverses
façons. L'Union européenne a désigné 2011 comme «Année européenne
des activités de volontariat pour la promotion de la citoyenneté
active», généralement nommée Année européenne du volontariat ou
AEV 2011. Les Nations Unies ont également célébré le dixième anniversaire
de l'Année internationale des volontaires. En 2011 également, l'Assemblée
parlementaire a adopté la
Résolution
1778 (2011) «Promouvoir le volontariat en Europe», dans laquelle
elle invite notamment les Etats membres à «promouvoir une politique
dynamique en faveur du volontariat et du bénévolat, et à s'engager
en 2011, au cours de l'Année européenne du volontariat, dans des
campagnes de sensibilisation au volontariat et au bénévolat, en
étroite collaboration avec l'Union européenne».
8. Ces différentes approches ont entraîné une confusion entre
le volontariat et la citoyenneté active. Il convient donc de définir
plus clairement ces deux concepts. Les services volontaires au-delà
de la sphère familiale et amicale représentent une citoyenneté exemplaire.
Cependant, ils n'ont parfois rien à voir avec les affaires publiques.
Ils n'entrent donc pas dans le cadre de la «citoyenneté active»
mais constituent un élément distinct de celle-ci. A l'inverse, la
«citoyenneté active», si elle traite d'affaires publiques, n'a pas nécessairement
trait au volontariat. Par conséquent, elle peut être décrite comme
l'implication des citoyens dans la vie des communautés locales sous
forme d'idées, d'actions et de prises de décisions. Ces derniers aspects
reflètent la pratique de la démocratie aux niveaux local et national.
On peut donc en déduire trois attributs essentiels de la «citoyenneté
active»: le respect, la responsabilité et la participation (au sens
d'une activité significative).
9. La participation désigne les différents modes d'implication
des citoyens dans la société. Dans un rapport récent, le National
Council for Voluntary Organisations (NCVO) du Royaume-Uni précise
ceci: «Ce n'est pas seulement faire la charité, voter aux élections
ou faire du bénévolat.» Est ainsi mise en avant la diversité des contributions
possibles au sein de la société et des communautés. Par conséquent,
pris individuellement, les efforts politiques, les actes de bienfaisance
ou les activités de volontariat ne suffisent pas à fournir une définition.
Ces différentes voies constituent tous les éléments utiles d'un
large éventail de contributions.
10. La citoyenneté démocratique est une compétence qui s'adresse
à tous. Elle inclut la connaissance du mode de fonctionnement d'un
pays, d'une société et des institutions gouvernementales, et des
moyens d'accéder à l'information et de voter. Elle couvre également
les aptitudes requises pour bien vivre en famille et dans une communauté,
résoudre les différends à l'amiable et de façon équitable, savoir
comment négocier et trouver un terrain commun. Un citoyen démocratique
doit apprendre ces règles de base de la société et acquérir les
responsabilités personnelles correspondantes.
11. Le NCVO mentionne différents motifs de participation allant
de l'altruisme à l'auto-intérêt manifeste ou éclairé. La participation
peut être individuelle ou collective, et sa fréquence faible ou
élevée. Ses bienfaits potentiels sur la vie sont souvent évoqués,
tout comme certains de ses effets négatifs
.
12. Le rapport susmentionné observe qu'une telle participation
est l'un des trois piliers du concept actuellement mis en avant
par le Gouvernement du Royaume-Uni pour renforcer la démocratie
locale: «Depuis des décennies, les autorités locales et nationales
s'échinent à trouver les moyens d'encourager les gens à devenir
des citoyens plus actifs. Leurs raisons varient dans le temps, qu'il
s'agisse d'améliorer les services publics, de réduire les dépenses
publiques ou de conforter la démocratie. Les dernières évolutions
politiques sur le développement des initiatives locales, la "Big
Society", la sous-traitance des services publics, la promotion des
œuvres de bienfaisance et le rôle du secteur associatif placent
de plus en plus les questions de la participation au cœur de l'actualité.»
13. Pendant que les gouvernements et d'autres acteurs soutiennent
la participation, nombreux sont aussi ceux qui estiment qu'une démocratie
saine devrait œuvrer en faveur de la transparence, de la diffusion
de l'information et de l'établissement d'un dialogue actif avec
la société civile et les citoyens. Ce point de vue est repris à
l'article 11 du Traité de Lisbonne, qui prévoit aussi le droit de
pétition des citoyens.
14. L'indice de démocratie de l'Economist Intelligence Unit
mesure
l'efficacité des démocraties mondiales à l'aune de cinq critères:
processus électoral et pluralisme, libertés civiles, fonctionnement
du gouvernement, participation et culture politique.
2.2. Entreprises et citoyenneté
active
15. Ces dernières années ont connu une implication croissante
des entreprises dans leur localité. Les employés aident la communauté,
et l'entreprise investit dans son bien-être. Certains pays offrent
des incitations fiscales. Pour beaucoup, la notion et la pratique
de responsabilité des entreprises sont relativement nouvelles.
16. De nos jours, près d'une grande entreprise sur trois est engagée
d'une manière ou d'une autre. Les entreprises privées collaborent
avec les organisations non gouvernementales (ONG) locales. De nombreux Etats
membres du Conseil de l'Europe demandent au secteur privé de régénérer
les communautés et de faire évoluer leur propre système de financement.
Certains pourraient ainsi recueillir des fonds par l'entremise des entreprises,
promouvoir le travail bénévole ou encourager l'investissement direct
.
17. Le mécénat de compétences en France autorise les entreprises
qui permettent aux employés de travailler avec des ONG à déduire
la valeur de ce temps de leurs bénéfices imposables.
18. CoGe en Italie requiert que les banques et les fondations
versent une part de leurs bénéfices au secteur caritatif. Le comité
de gestion, qui comprend les membres de fondations, d'associations
et d'institutions bancaires, contrôle les fonds collectés région
par région et les affecte aux œuvres de bienfaisance d'associations
italiennes de volontaires
.
19. En collaborant avec les entreprises, les œuvres de bienfaisance
et les associations locales bénéficient du savoir-faire de leurs
employés ou de leurs clients. Par exemple, dans le cadre du partenariat
entre la société B&Q et UK Youth (une organisation nationale
de promotion des jeunes), le personnel de B&Q initie des jeunes à
des techniques de bricolage, qu'ils pourront ensuite utiliser pour
rénover les centres de jeunesse dans le pays
.
3. Pourquoi la citoyenneté active
est importante
3.1. Compléments nécessaires de
la démocratie représentative: arguments en faveur d'une meilleure
interaction entre les citoyens et les autorités dans la vie quotidienne
20. L'Assemblée parlementaire est d'avis qu'il existe
aujourd'hui une crise de la démocratie. Elle déclare ceci à ce propos
dans la
Résolution 1746
(2010) «Démocratie en Europe: crise et perspectives»:
«L'Assemblée considère que la crise
actuelle de la représentation exige qu'en dehors des formes traditionnelles
de mandat et de délégation, qui satisfont toujours moins de citoyens,
le lien politique entre la société et les autorités soit aussi envisagé
d'une façon différente. Ainsi, sans remettre en question la démocratie
représentative, l'Assemblée souligne que la représentation ne peut
plus être la seule expression de la démocratie; cette dernière doit
aussi être développée au-delà de la représentation (...).»
21. La Résolution indique ainsi que des formes plus durables d'interaction
entre les citoyens et les autorités devraient être mises en place.
Elle interprète la démocratie «non pas simplement comme un régime
ou la somme de droits individuels, mais comme une forme de société
qui nécessite des règles pour la justice sociale et la redistribution
et suppose non seulement de déléguer et de prendre des décisions,
mais aussi de discuter et de vivre ensemble dans la dignité, le
respect et la solidarité. C'est une œuvre inachevée qui est mise
à l'épreuve au quotidien».
22. De là découle le consensus européen sur la démocratie participative.
Dans les Etats membres du Conseil de l'Europe, celle-ci est aussi
perçue comme un processus quotidien, qui s'impose aujourd'hui de
toute urgence, mais pas nécessairement par la voie de la démocratie
traditionnelle et représentative.
3.2. Le volontariat dans la société:
un consensus européen
23. Le rapport récent des Nations Unies sur l'état du
volontariat dans le monde évalue le rôle du volontariat dans la
société et ses réussites actuelles en matière de résolution des
problèmes et de définition de finalités communes. Il souligne le
fait que le volontariat favorise le développement de la citoyenneté
active, de la démocratie et de l'inclusion sociale.
24. Les gouvernements promeuvent de plus en plus le volontariat
comme une forme d'engagement civique visant non seulement à améliorer
la prestation de services mais aussi à promouvoir des valeurs communes. Certaines
initiatives, parmi lesquelles l'Année internationale du volontariat
instituée en 2001, ont contribué à l'émergence du consensus actuel
sur le volontariat.
4. La citoyenneté active en Europe
4.1. Associations et citoyenneté
active
25. Les associations ne sont pas seulement des prestataires
de services; elles contribuent aussi à la promotion des droits de
l'homme. Lors du Sommet de Varsovie, les chefs d'Etat et de gouvernement
ont indiqué à cet égard que le Conseil de l'Europe «à travers ses
divers mécanismes et institutions, jouera un rôle dynamique pour
protéger le droit des individus et promouvoir l'engagement inappréciable
des organisations non gouvernementales dans la défense active des
droits de l'homme».
26. En tant que prestataires de services, les associations soutiennent
les économies locales, tout en promouvant la culture et le bien-être
des communautés locales. La liberté d'association est affirmée en
premier lieu dans la Convention européenne des droits de l'homme
et dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne,
mais sa pertinence et son utilité pour l'Europe du XXIe siècle
sont également soulignées à l'article 11 du Traité de Lisbonne.
4.2. Effectifs des associations
en Europe
27. La plupart des pays encouragent la participation
et comptabilisent le nombre de membres des œuvres de bienfaisance,
des associations jouant un rôle de soutien et d'alerte, des syndicats,
des groupes religieux et des partis politiques. A l'échelle de l'Europe,
les chiffres sont élevés si l'on prend en compte les effectifs globaux
d'un large éventail d'associations.
28. Les effectifs des syndicats varient fortement en Europe. Le
taux de syndicalisation est en moyenne de 23 %. Cependant, les écarts
sont importants d'un pays à l'autre. Les plus grands Etats de l'Union
européenne affichent des effectifs plutôt bas, comme l'Allemagne:
20 %; la France: 18 % ; l'Espagne: 16 % et la Pologne: 15 %.
29. On observe des écarts identiques en Europe centrale et orientale.
La plupart des Etats sont en deçà de la moyenne européenne de 23
%, comme la Pologne citée plus haut (15 %). En revanche, en Slovénie,
les employés syndiqués représentent 41 % des salariés et, en Roumanie,
les estimations atteignent 34 %
.
30. En ce qui concerne le nombre de membres des associations/œuvres
de bienfaisance, on constate des écarts anormaux entre les Etats
de l'Union européenne: en Finlande, le ratio est de 20 associations
pour 1 000 habitants, alors qu’au Luxembourg, à Malte, en Lettonie
et en Roumanie, on compte moins d'une association pour 1 000 habitants
.
31. En dépit des écarts anormaux indiqués ci-dessus, les effectifs
des associations demeurent élevés dans l'ensemble de l'Europe. En
Suède, 90 % de la population est membre d'une association (associations sportives,
culturelles, de protection de l'environnement, religieuses ou de
consommateurs) et 77 % au Royaume-Uni, 70 % aux Pays-Bas, 65 % en
Allemagne, 54 % en France, mais uniquement 36 % en Russie. Toutefois,
les chiffres ne font pas la distinction entre les membres actifs
et les membres nominaux. Les membres actifs représentent tout de
même 62 % au Royaume-Uni
.
4.3. Partis politiques: déclin des
effectifs en Europe
32. En 2006, l'enquête Power
(Power
Inquiry) –
une étude indépendante réalisée par la fondation de bienfaisance
Joseph Rowntree pour examiner la démocratie au Royaume-Uni – a observé
que le déclin du nombre de membres des partis ne touchait pas seulement
le Royaume-Uni. Deux études différentes ont mis en évidence une
baisse significative du nombre de membres des partis dans au moins
13 démocraties européennes. Le processus est constant depuis les
années 1950. Une autre étude a permis de conclure que, dans les
démocraties bien établies, au cours de la même période, il y avait
eu une diminution parallèle du nombre de personnes s'étant associées
à un parti politique quelconque.
33. La plupart des études universitaires abondent dans le même
sens. Dans un document publié en 2001, Mair et Ingrid van Biezen
notent que «dans chacune des démocraties européennes établies de
longue date, sans exception, le nombre absolu de membres a aujourd'hui
diminué, et parfois considérablement. Nous avons là, en d'autres
termes, le témoignage concret et probant du désengagement généralisé
à l'égard des partis politiques».
34. Quoi qu'il en soit, l'enquête Power fait aussi état de certaines
contre-tendances. La désaffection à l'égard de la vie politique
ne correspond pas toujours à une absence d'intérêt ou d'activité
politique. L'engagement prend plutôt des formes diverses. Le mouvement
Make Poverty History, par exemple, a suscité l'enthousiasme de personnes
que les urnes n'attirent guère.
5. Exemples d'engagement citoyen
dans la prise de décision locale
5.1. Comités qui consultent et encouragent
le travail en équipe
35. Besançon est une ville de plus de 134 300 habitants
située dans l'est de la France. Le Conseil des sages est une instance
bien connue en premier lieu pour veiller aux intérêts des personnes
âgées. Une autre instance répond aux préoccupations des jeunes.
Globalement, leur mission consiste à recueillir des informations
sur les conséquences imprévues de certaines politiques et à proposer
des améliorations possibles. Le transport, l'urbanisme et les questions
environnementales sont gérés par le Conseil, qui encourage les habitants
à former une équipe. L'objectif est d'améliorer la qualité de la
vie en ville, de prévenir les comportements asociaux dans les espaces
libres et d'aider à décider de la conception et de l'emplacement
des nouvelles constructions. Un tel travail en équipe attire les
faveurs de tous et permet de diminuer l'isolement des personnes
âgées.
5.2. Services volontaires et esprit
de solidarité
36. En Allemagne et en Autriche, les services de protection
contre l'incendie sont principalement gérés par des volontaires.
Ceux-ci travaillent avec d'autres organisations de volontaires comme
le Technisches Hilfswerk, services d'ambulance volontaires et services
médicaux d'urgence ou de secours. Le personnel de la plupart des
services d'incendie ruraux se compose uniquement de bénévoles qui
sont généralement de garde vingt-quatre heures sur vingt-quatre,
sept jours sur sept, bien qu'ils occupent un autre emploi. Dans
les villes allemandes, appartenir aux forces des pompiers est un
véritable honneur. Un système à peu près identique prévaut dans
les zones rurales du Royaume-Uni.
5.3. Le rôle des ONG en matière
de reconstruction d'après-conflit et de citoyenneté active
37. Créée à Dubrovnik, en Croatie, en 1993, l'ONG Desa
a d'abord eu pour mission d'aider les femmes réfugiées pendant la
guerre. Face aux combats et à l'intolérance ethnique, sa vocation
première était de restaurer la confiance et la normalité pour toutes
les personnes durement éprouvées. Elle joue depuis également un
rôle en matière de réhabilitation économique; elle a aussi participé
utilement aux discussions sur l'adhésion future de la Croatie à
l'Union européenne lors de la septième réunion du Forum national,
qui a eu lieu à Pozega. Cette dernière initiative a encouragé le
développement des zones rurales et de leurs opportunités commerciales.
5.4. Budgets participatifs et prix
«Big Society» au Royaume-Uni
38. La pratique des budgets participatifs a vu le jour
au Brésil en 1989. Après la chute de la dictature, elle a été adoptée
non seulement en tant qu'expression de la démocratie mais aussi
parce qu'elle est apparue beaucoup plus efficiente pour la gestion
des villes, petites ou grandes. Il s'agit d'assurer la fourniture
des services publics en utilisant les connaissances, les compétences,
les idées et l'expérience de la population locale. Introduite en
Angleterre en l'an 2000 par l'institution Church Action on Poverty,
elle a été mise en œuvre avec succès dans plus de 100 collectivités.
Comme au Brésil, l'objectif est d'améliorer la qualité des services publics
en invitant les citoyens à participer davantage aux choix et décisions
les concernant.
39. Les systèmes de subventions se sont révélés à la fois populaires
et efficaces. Ils sont assez faciles à mettre sur pied. La localité
reçoit une somme modeste tirée du budget d'un service public donné.
Le village, le quartier ou la circonscription peut à son tour financer
des priorités locales.
40. Des consultations sont menées pour identifier les priorités
locales et décider d'affecter les fonds publics à tel ou tel poste.
Par exemple, pour financer des câbles souterrains ou un meilleur
éclairage, la rénovation de la mairie du village ou du terrain de
jeu, des soins de santé mentale ou un service de véhicules sanitaires légers.
Grâce à ces consultations, le public prend conscience des décisions
difficiles qui doivent souvent être prises. Grâce aux réponses recueillies,
les conseillers territoriaux apprennent à connaître les attentes
de leurs concitoyens, leur conception des problèmes qui se posent
et des solutions possibles. Les citoyens locaux sont ainsi beaucoup
plus proches de leurs collectivités et les uns des autres. Voici
quelques exemples:
- le conseil
municipal de Dulverton dans le Somerset – consultation de la population
locale sur les choix de dépenses des budgets locaux: quatre groupes
d'action bénévoles ont été mis sur pied pour concevoir les plans
de développement de la bibliothèque, du centre de recyclage, du
centre de jeunesse et des parcs de stationnement. Cet exemple de
dévolution des compétences a suscité l'intérêt des médias et cette
nouvelle approche à l'égard des initiatives locales a bénéficié
d'une couverture télévisuelle;
- le conseil municipal de Liverpool – objectif de fixer
les priorités des dépenses publiques au niveau des quartiers: en
2010-2011, le conseil municipal de Liverpool a délégué certaines
décisions afférentes aux dépenses (410 000 livres sterling) à ses
30 quartiers. Il s'agissait du budget affecté aux espaces verts et
à la voierie. Dans les quartiers, 1 500 acteurs se sont joints à
ce projet.
41. Le prix «Big Society» a été décerné à un certain nombre d'initiatives.
Un exemple récent est le projet Food Cycle organisé avec des jeunes
bénévoles en se servant des excédents alimentaires et d'un espace cuisine
gratuit. Le projet a débuté en 2008 et comprend aujourd'hui 14 plates-formes
dans le pays, au service des sans-abri, des réfugiés, des personnes
âgées et des personnes à faibles revenus.
5.5. Conseils de jeunesse
42. Selon la
Résolution
1826 (2011) sur le renforcement de la démocratie par l'abaissement
de la majorité électorale à 16 ans, adoptée par l'Assemblée le 23
juin 2011, plus les jeunes attendent pour participer à la vie politique,
moins ils s'engagent à l'âge adulte. Cela s'applique aux décisions
aux niveaux à la fois local et national. Encourager la participation
des jeunes et leur implication dans la prise de décisions politiques
est, par conséquent, un élément crucial pour la citoyenneté active.
Encourager de jeunes citoyens actifs peut avoir pour effet un sentiment
renforcé d'appartenance à une communauté et fournir des décisions
de meilleure qualité. Dans une étude récente réalisée par la Coopération
de la jeunesse finlandaise – Allianssi quant aux points de vue des
jeunes
sur
le fonctionnement de la démocratie, 73 % ont répondu qu'on devrait
donner aux citoyens davantage de possibilités de prendre des initiatives
en politique. Dans la même enquête, seulement 52,4 % estiment que
la prise de décisions au niveau local a bien ou plutôt bien fonctionné.
43. L'implication des jeunes peut revêtir de nombreux aspects
et formes et il existe de nombreux exemples de bonnes pratiques
dans les Etats membres du Conseil de l'Europe. Différents organes
opèrent à des niveaux européen, national, régional et local. Par
exemple, en Finlande, il existe presque 200 conseils locaux pour
la jeunesse. Les membres de ces groupes informels sont élus lors
d'élections dans les écoles et leur tâche principale est d'agir
comme lobbyistes sur les questions de jeunesse au sein de leurs
propres municipalités. Quelque 1 800 conseils de jeunes et d’enfants
existent en France. La Lettonie a mis en place un portail internet où
les jeunes peuvent présenter leurs initiatives.
44. De nombreux Etats membres du Conseil de l’Europe organisent
régulièrement des «parlements des jeunes». La Finlande, pour citer
seulement un exemple, organise un «parlement de jeunes» tous les
deux ans. Il rassemble 199 jeunes âgés de 13 à 18 ans au parlement.
Pendant toute la journée, ces futurs décideurs sont initiés aux
travaux parlementaires, à tenir une session plénière, à voter, à
se familiariser avec les travaux en commission et à discuter avec
le président du parlement et de nombreux parlementaires. Un autre
exemple est celui du parlement des jeunes grecs auquel participent
des jeunes venant non seulement du pays mais aussi d’autres pays
où vivent d’importantes communautés grecques, comme l’Allemagne
et l’Australie.
45. Un exemple au niveau européen est le Parlement européen de
la jeunesse. Il réunit plus de 20 000 jeunes à plus de 100 événements
aux niveaux régional, national et international par le biais de
35 organisations nationales chaque année. Son but est d'éveiller
la prise de conscience sur les questions européennes, d'encourager
la citoyenneté européenne active et de motiver les étudiants à s'engager
en politique européenne. Il fournit un forum par lequel les jeunes
d'Europe peuvent exprimer leurs propres avis, sans revenir à un
jeu de rôle.
46. Pour sa part, notre Assemblée coorganise cette année à Strasbourg
du 5 au 7 octobre 2012 une Assemblée des jeunes réunissant 170 participants
âgés de 16 à 22 ans en tant que contribution au Forum mondial sur
la démocratie 2012.
5.6. D'autres initiatives en Europe
47. Un grand nombre de projets ont été lancés et fonctionnent
mais ne reçoivent guère de publicité. Un rapport d'enquête récent
du Conseil de recherche sur le secteur associatif note que des centaines
de milliers de groupes existent sans être connus
.
48. Les technologies portables sont intéressantes à cet égard.
Elles encouragent les citoyens à participer à la démocratie et permettent
aussi aux gouvernements d'informer les citoyens. Un autre exemple
est celui de la directive INSPIRE en Europe, qui s'appuie sur des
programmes de cartographie et de visualisation de pointe basés sur
le web. Tout en illustrant les potentialités futures en la matière,
celle-ci offre la possibilité aux gouvernements et aux administrations
publiques d'appliquer leurs propres normes en matière de promotion
de la démocratie locale.
6. Conseils économiques et sociaux
6.1. Appel à de nouvelles structures
49. Une étude réalisée par le Community Server Volunteers
(CSV) en 2010
sur les pratiques
de consultation et de dialogue avec la société civile dans l'Union
européenne constate qu'il se passe encore peu de choses en ce domaine,
et cela en dépit des intentions déclarées à la fois dans le Traité
de Lisbonne et au sein même des Etats de l'Union européenne. Il
est donc aujourd'hui nécessaire d'envisager de nouveaux moyens de
susciter l'action requise autour de ce qui a été convenu.
50. L'«approvisionnement par la foule», par exemple, a déjà fait
la preuve de son intérêt. Cette méthode, qui permet de recueillir
l'opinion d'un nombre important d'individus, a déjà été appliquée
dans le cadre d'enquêtes universitaires et professionnelles. Toutefois,
malgré son succès, elle est encore peu prise en compte ou utilisée.
Cela reflète peut-être un aspect regrettable, à savoir le fait que
le système en place (gouvernement et administration publique) chargé
de promouvoir la démocratie locale n'est pas aussi ouvert qu'il
devrait l'être à différentes méthodes et opportunités utiles ou
essentielles.
6.2. Dialogue ouvert, transparent
et régulier
51. L'article 11 du Traité de Lisbonne insiste sur la
nécessité d'un tel dialogue. L'objectif est de rassembler les organes
directeurs de l'Europe et la société civile. De cette façon, les
déficits démocratiques se réduiraient, puis céderaient la place
à une citoyenneté plus active.
52. Le dialogue ouvert a été pris en compte dans la discussion
de fond sur Education et formation 2020 de l’Union européenne et
des fonds ont été alloués à des projets pilotes portant sur l'utilisation
des technologies numériques géospatiales.
6.3. Absence de plans de consultation
locale adéquats
53. Malgré l'assurance du Traité de Lisbonne que serait
donnée «aux citoyens et aux associations représentatives la possibilité
de faire connaître et d'échanger publiquement leurs opinions», la
volonté de concrétiser ces intentions s'est révélée insuffisante
et certains ne manquent pas de faire remarquer que la méthode de
«consultation effective» n'est toujours pas utilisée ou correctement
appliquée.
54. Le rapport susmentionné de 2010 a examiné la situation dans
21 des 27 Etats membres de l'Union européenne et conclu que seuls
cinq d'entre eux pratiquaient une consultation effective. Il n'y
a eu aucune consultation dans neuf pays, tandis que des efforts
moyennement efficaces ont été engagés dans les sept pays restants.
55. De son côté, le pays de Galles a adopté une approche totalement
engagée. Dans le cadre du programme de partenariat avec le secteur
associatif, «la législature galloise est légalement habilitée à
établir des partenariats contractuels avec le secteur associatif».
Mais ailleurs, comme indiqué précédemment, le degré d'engagement
reste variable.
6.4. Instances qui encouragent le
règlement des problèmes par le dialogue
56. Les conseils économiques et sociaux (CES) et les
institutions similaires sont en partie issus des Nations Unies.
Ils sont toutefois bien représentés en Europe.
57. Les instances susmentionnées facilitent le dialogue entre
les employeurs, les salariés et le gouvernement. Leurs membres englobent
donc des représentants des associations patronales et syndicales, des
gouvernements et d'autres secteurs concernés de la société civile.
58. Les gouvernements et les parlements disposent ainsi de conseils,
d'études et de rapports d'experts sur les questions économiques
et sociales. En conséquence, les CES facilitent, lorsque cela est
nécessaire, la communication entre les gouvernements, les syndicats,
les employeurs, les salariés et d'autres parties concernées. Le
bilan de cette contribution est positif.
59. Les traditions et procédures nationales étant distinctes,
à Etats différents, il faut un traitement différent. A cet égard,
les CES se sont révélés une fois de plus adaptables et efficaces.
6.5. Absence au Royaume-Uni d'institutions
pour soutenir les initiatives citoyennes
60. Il n'existe pas de conseil économique et social au
Royaume-Uni, non plus qu'aucun autre organe chargé de promouvoir
le dialogue avec les citoyens. Toutefois, les initiatives citoyennes
sont aujourd'hui fréquemment débattues dans les deux chambres du
Parlement du Royaume-Uni. L'un de ses comités spéciaux a récemment recommandé
un amendement procédural des règles actuelles relatives aux pétitions
électroniques (pétitions des citoyens). Il s'agit d'augmenter nettement
le nombre de signataires nécessaires pour lancer une pétition, qui
est aujourd'hui de 100 000. La recommandation fait suite aux douze
premiers mois du programme, durant lesquels les arbitres ont dû
faire face à un afflux trop important de demandes. D'un autre côté,
cette réaction prouve le succès et la popularité du programme.
7. Pertinence du travail réalisé
par le Conseil de l'Europe
61. La citoyenneté active contribue à renforcer la vie
politique et sociale dans tous les Etats membres du Conseil de l'Europe.
62. Elle favorise la réalisation d'objectifs qui relèvent des
compétences du Conseil de l'Europe, notamment en ce qui concerne
la solidarité locale et les questions familiales.
63. Le Conseil de l'Europe soutient la démocratie participative.
De 2007 à 2010, plusieurs rapports sur ce thème ont été présentés
à l'Assemblée parlementaire, notamment les rapports de M. Andreas
Gross (Suisse, SOC) de la commission des questions politiques et
de la démocratie. Ils ont attiré l'attention sur les droits et les
responsabilités des citoyens en matière de participation et ont
proposé des mesures pour garantir leur participation effective.
Voici quelques exemples à cet égard:
- dans la Résolution
1746 (2010) «Démocratie en Europe: crises et perspectives», l'Assemblée
reconnaît la crise de la démocratie et son aggravation due à la
dégradation actuelle de la conjoncture économique. Elle suggère
des approches nouvelles pour dynamiser la démocratie traditionnelle,
notamment la démocratie participative;
- la Résolution
1778 (2010) «Promouvoir le volontariat en Europe» établit un lien
entre renforcement de la démocratie et citoyenneté active. S'agissant
de cette dernière, elle examine les espaces de choix et de décisions
qui sont aujourd'hui ouverts aux citoyens de base.
64. La Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission
de Venise) a également abordé le thème de la démocratie participative.
65. Cette dernière fait aussi l'objet de la
Recommandation 307 (2011) sur la participation des citoyens aux niveaux local
et régional, adoptée par le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux
du Conseil de l’Europe.
66. En outre, un protocole additionnel à la Charte européenne
de l'autonomie locale (STE no 122) a
été préparé, qui prévoit le droit de participer aux affaires d'une
autorité locale (ce protocole a été ouvert à la signature à Utrecht
les 16 et17 novembre 2009).
67. L'une des questions soulevées par l'Assemblée dans la
Résolution 1746 (2010) précitée a été celle de l'extension du droit de participation
locale à l'échelon national, ainsi que le fait de savoir s'il s'agit
aussi d'une liberté politique fondamentale. L'Assemblée a proposé,
par conséquent, un nouveau protocole à la Convention européenne
des droits de l'homme (STE n° 5) afin
de garantir le droit de participer aux affaires publiques à tous les
niveaux, local, régional ou national.
68. Une autre question visait à déterminer dans quelle mesure
la démocratie participative pourrait redynamiser les démocraties
d'Europe, à la lumière de la Déclaration de Varsovie.
69. La Déclaration de Varsovie (2005) promeut le changement dans
les relations entre l'Etat et le citoyen, observe que cela se traduit
nécessairement par une participation accrue des citoyens, et suggère
donc, parallèlement, qu'au XXIe siècle
une démocratie locale plus solide pourrait servir aussi à renforcer
la démocratie aux niveaux national et international.
70. La Déclaration de Varsovie est aussi à l'origine de la Conférence
des organisations internationales non gouvernementales (OING) du
Conseil de l'Europe. Plus de 400 OING bénéficient d'un statut participatif
auprès du Conseil de l'Europe. Elles y constituent le pilier de
la société civile. Les OING offrent des conseils spécialisés aux
citoyens et aux gouvernements.
71. La Conférence des OING du Conseil de l'Europe a produit un
Code de bonne pratique pour la participation civile au processus
décisionnel, qui vise à faciliter la participation aux décisions
aux niveaux local et national. Ce code montre également le rôle
que peuvent jouer les ONG à cet égard: «Les ONG forment une composante
essentielle de la participation dans une société ouverte et démocratique,
en ce qu'elles mobilisent de très nombreux individus.» La Conférence
des OING est aussi sur le point de publier une boîte à outils pour la
pratique du dialogue interculturel.
72. D'autres travaux sur la démocratie participative sont en cours
dans d'autres secteurs du Conseil de l'Europe. Une institution particulièrement
remarquable dans le secteur intergouvernemental est le Comité européen
sur la démocratie locale et régionale (CDLR), qui est chargé de
préparer les décisions du Comité des Ministres dans ce domaine.
Ce comité a aussi préparé le protocole additionnel susmentionné
à la Charte européenne de l'autonomie locale sur le droit de participer
aux affaires des collectivités locales. Une autre aide clé est le
Centre d'expertise sur la réforme de l'administration locale, qui
apporte aux collectivités locales une aide sur le terrain.
73. Le lien entre la démocratie participative et le travail du
Conseil de l'Europe sur l'éducation à la citoyenneté démocratique
et aux droits de l'homme est manifeste.
74. Le travail du Conseil de l'Europe sur l'éducation à la citoyenneté
est en cours dans de nombreux Etats membres.
75. Le Conseil de l’Europe travaille également avec et pour les
jeunes en les encourageant activement à s’engager activement dans
le renforcement de la société civile européenne et dans la défense
des droits de l’homme, de la diversité culturelle et de la cohésion
sociale. L’attachement du Conseil de l’Europe à favoriser une plus
grande participation des jeunes trouve sa pleine expression dans
son système de cogestion: des représentants d’ONG de jeunesse siègent
avec des fonctionnaires gouvernementaux au sein de comités chargés
de définir les priorités du secteur de la jeunesse et de formuler
des recommandations sur les futurs budgets et programmes. Leurs
propositions sont ensuite adoptées par le Comité des Ministres
.
8. Liens de travail entre villes
et localités du Conseil de l'Europe
8.1. Consensus sur la démocratie
participative
76. Au sein des Etats membres du Conseil de l'Europe,
un nombre croissant de villes et de localités soutiennent la démocratie
participative. Elles y sont encouragées par leur gouvernement national.
Cependant, la nature propre et la réussite des initiatives locales
exigent qu'elles soient indépendantes du gouvernement. Cela est
reconnu à la fois par les localités et par les gouvernements nationaux.
Un consensus existe également au sujet du développement de bonnes
pratiques. Pour ce faire, les localités testent des initiatives
et reprennent celles qui ont déjà porté des fruits ailleurs. Une
ville ou une localité peut souhaiter comparer certains de ses projets
à d'autres similaires entrepris dans le même pays. Elle peut de
la même façon comparer ses résultats à ceux de villes ou localités
semblables à l'étranger.
8.2. Liens de travail entre villes
européennes et non européennes et «diplomatie des villes»
77. De tels liens sont parfois établis afin de faciliter
les relations commerciales et l'échange d'information théorique
ou technique. Ils s'étendent à la fois à l'intérieur et à l'extérieur
de l'Europe. Ils peuvent donc concerner deux villes européennes
ou bien une ville européenne donnée et une autre ville en dehors
de l'Europe. De plus, une ville européenne donnée entretient souvent
des liens avec plusieurs autres villes appartenant à différents
Etats européens ou à des Etats situés hors de l'Europe. Les villes
comparent parfois leur expérience et examinent ensemble leurs gestions
respectives de la santé, de l'éducation et des questions sociales
par exemple. Il est fréquent que trois ou plusieurs partenaires
associent leurs efforts de cette façon. Le développement de telles
synergies s'est révélé bénéfique aux citoyens et à la démocratie
locale.
78. Le modèle de la diplomatie des villes est également utile
pour faire avancer la démocratie locale et régionale en dehors de
l'Europe, par exemple dans des pays comme la Tunisie et le Maroc.
79. L'idée que les structures de la diplomatie des villes contribuent
à promouvoir la citoyenneté active est une simple déduction logique.
En effet, dès lors que deux villes ou centres distincts, adhérant
chacun de leur côté à l'objectif de la citoyenneté active, travaillent
ensemble à la réalisation de buts communs, la diplomatie des villes
ne peut que favoriser le développement de la citoyenneté active,
puisque celle-ci était dès le départ l'un de leurs buts communs.
8.3. La diplomatie des villes et
le Conseil de l'Europe
80. Si, au sein des Etats membres du Conseil de l'Europe,
la synergie des structures urbaines contribue à renforcer la démocratie
participative, la démocratie aux niveaux national et international
ne peut qu'en bénéficier. Comme le laissait entendre également la
Déclaration de Varsovie, il en va ainsi parce qu'une pratique renforcée
de la démocratie par les citoyens au niveau local contribue à améliorer
la qualité et l'image de la démocratie aux niveaux national et international.
81. Au sein du Conseil de l'Europe, les initiatives locales indépendantes
visant à encourager la citoyenneté active sont soutenues par les
gouvernements nationaux. Par conséquent, s'il apparaît que la diplomatie
des villes constitue un moyen efficace à cette fin, les gouvernements
nationaux seront intéressés à la soutenir, elle aussi.
82. Le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux peut aussi jouer
un rôle incitatif à cet égard. La
Recommandation 234 (2008) du Congrès sur la diplomatie des villes souligne que
la coopération entre villes peut donner de bons résultats lorsqu'elle
porte sur des programmes spécifiques. La recommandation établit une
distinction entre la diplomatie des villes et le jumelage de villes.
Cette dernière pratique s'est développée après la seconde guerre
mondiale. Elle servait à favoriser le développement de liens de
bonne volonté entre les villes et localités européennes. Par la
suite, cependant, et tout particulièrement pendant les dernières années,
la diplomatie des villes est devenue la pratique prépondérante.
Contrairement au jumelage de villes, la diplomatie des villes porte
sur des questions ou des programmes spécifiques. Comme indiqué plus
haut, l'idée fondamentale est d'atteindre des objectifs communs
en travaillant ensemble à des questions et des problèmes communs.
Afin d'encourager encore son utilisation et ses méthodes, le Congrès
prévoit d'établir une charte de la diplomatie des villes.
83. Les agences de la démocratie locale (ADL), créées par le Congrès
dans les années 1990, ont permis le développement de l'aide aux
municipalités détruites par la guerre en ex-Yougoslavie. La méthode
adoptée a été celle d'accords de partenariat avec des villes et
des régions d'Europe de l'Ouest. Initialement axé sur les moyens
de surmonter la situation de crise, l'agenda de ces agences s'est
ouvert à des questions telles que les réformes démocratiques, le
développement de la société civile et la promotion de la participation
des citoyens.
8.4. La diplomatie des villes et
l'Union européenne
84. L'Union européenne est, elle aussi, déjà en mesure
de fournir des incitations pour favoriser le développement de la
diplomatie des villes, dans le but de renforcer la qualité de la
démocratie en Europe. Les programmes de financement de l'Union européenne
exigent généralement que les collectivités locales travaillent avec
les partenaires d'autres pays. Les liens déjà établis et la perspective
du développement de structures spécialisées entre villes offrent
d'excellentes opportunités à cet égard. Les initiatives en ce domaine pourraient,
à leur tour, stimuler la fierté civique, l'amour-propre et la confiance
en soi
.
9. Pertinence du Programme unique
proposé: l'aide des présidences du Conseil de l'Europe à la démocratie
locale et régionale
9.1. Le concept et ses différents
aspects
85. La démocratie locale et régionale est l'une des priorités
communes des présidences ukrainienne, britannique et albanaise du
Conseil de l'Europe. Sous la présidence ukrainienne, les ministres
européens chargés des collectivités locales et régionales se sont
réunis en novembre 2011 à Kiev. La conférence a adopté à l'unanimité
une déclaration qui souligne l'importance des activités paneuropéennnes
futures dans le domaine de la démocratie locale et régionale.
86. La volonté actuelle, par conséquent, est de commencer à faire
le point sur les progrès des réformes engagées, comme on l'a vu,
pendant le mandat de ces présidences successives. Pour ce faire,
l'actuelle présidence britannique a proposé de poursuivre le développement
d’un agenda commun couvrant les fonctions du Conseil de l'Europe
relatives à la démocratie locale et régionale. La formulation et
l'analyse des priorités ponctuelles demeureraient ainsi non soumises
à restrictions, de même que la communication d'idées et de suggestions
utiles, de la base jusqu'au niveau décisionnel. Cependant, les contributions
des acteurs existants seraient agrégées et synthétisées dans le
cadre d'un programme de travail unique et cohérent, approuvé par
le Comité des Ministres après consultation du Congrès, de l'Assemblée
parlementaire et de la Conférence des OING.
87. L'efficacité d'une telle approche cohérente dépendrait de
la coordination et des dispositions administratives qui l'entoureraient.
On admet aussi, néanmoins, que le programme pourrait être structuré
de différentes façons, afin de mettre à profit l'expertise de chacun
des acteurs et des secrétariats correspondants.
88. Quatre aspects spécifiques demandent à être pris en compte
à cet égard: les activités que pourrait englober le programme unique,
l'architecture de gestion adéquate, les modalités budgétaires et administratives
à envisager en conséquence, et les moyens d'encourager et de contrôler
l'efficience de chacun des acteurs.
9.2. Arguments complémentaires en
faveur de la coordination du travail sur la démocratie locale des organes
concernés de l'Union européenne et du Conseil de l'Europe: une approche paneuropéenne
89. Une telle coordination ferait beaucoup pour améliorer
l'efficience de la mise en œuvre des activités, en réduisant la
duplication des efforts et le risque de gaspillage – tout particulièrement
la coordination accrue du travail entre l'Assemblée parlementaire
et le Parlement européen, entre le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux
du Conseil de l'Europe et le Comité des régions de l'Union européenne,
ainsi qu'entre les directions du Secrétariat général du Conseil
de l'Europe et celles de la Commission européenne. L'amélioration
de la coordination du travail des divers organes et comités de l'Union
européenne et du Conseil de l'Europe dans le domaine de la démocratie
locale et régionale permettrait en définitive de mieux servir les
intérêts des citoyens européens.
90. Quarante-sept Etats, dont 27 Etats membres de l'Union européenne
mais aussi 20 Etats européens non membres de l'Union européenne,
étant représentés au sein du Comité des Ministres du Conseil de
l'Europe, cet organe est évidemment mieux placé que tout organe
pertinent de l'Union européenne pour appliquer une approche paneuropéenne
de la coordination sur les questions concernant la démocratie locale
et régionale. Tel est en tout cas le point de vue défendu par le
rapporteur.
10. Conclusions
91. S'agissant de l'amélioration des relations entre
l'Etat et le citoyen en Europe, le rapporteur relève deux avancées
majeures dans l'Europe d'après-guerre, émanant toutes deux du Conseil
de l'Europe. D'une part, la reconnaissance du droit de recours individuel
devant la Cour européenne des droits de l'homme, qui met l'Etat et
le citoyen sur un pied d'égalité. D'autre part, la Déclaration du
Sommet de Varsovie de 2005, qui affirme: «Nous sommes convaincus
qu'une démocratie effective et une bonne gouvernance à tous les
niveaux sont essentielles pour prévenir les conflits, promouvoir
la stabilité, favoriser le progrès économique et social, et, partant,
la création de communautés durables, lieux de vie et de travail
pour aujourd'hui et pour l'avenir.» Cette déclaration insuffle un
nouvel élan à la démocratie aux niveaux national et international,
grâce au renforcement de la démocratie à l'échelon local et au niveau
des citoyens.
92. L'objectif de la promotion de la citoyenneté active, ainsi
que le déploiement de la diplomatie des villes comme l'un des moyens
d'y parvenir, sont conformes à l'ambition permanente du Conseil
de l'Europe, qui est de renforcer la démocratie en Europe.
93. Sous l'actuelle présidence britannique du Comité des Ministres
(jusqu'en mai 2012), des discussions sont en cours entre différents
organes et secteurs du Conseil de l'Europe sur les moyens de mieux
coordonner le travail relatif à la démocratie locale et régionale.
Il s'agit d'en améliorer la visibilité et l'impact. La promotion de
la citoyenneté active constitue un élément essentiel à cette fin,
à la fois comme thème cohérent pour le présent et pour l'avenir,
et aussi comme moyen de rappeler que l'efficience et l'amélioration
de la mise en œuvre des activités doivent avoir dans tous les cas
pour but de mieux servir le citoyen.
94. Dans ce contexte, je suggérerais que le Royaume-Uni prenne
des mesures pour promouvoir à la fois la fin et les moyens, comme
indiqué ci-dessus, pendant sa présidence du Conseil de l'Europe
en 2012 et que ce travail soit poursuivi sous les présidences ultérieures.
Le Royaume-Uni devrait s'appuyer, dans le cadre de son initiative
pour le «renforcement de la démocratie locale», sur les idées proposées
par l'ancien Vice-Premier ministre d'Espagne, M. Manuel Chaves (et
approuvées par la Conférence des ministres chargés des affaires locales
et régionales à Kiev en novembre 2011), en faveur d'un agenda commun,
afin d'encourager la collaboration entre les différents acteurs
dans ce domaine. Les boîtes à outils, les programmes de travail
sur le terrain et le soutien pratique du Centre d'expertise sur
la réforme de l'administration locale auront aussi un rôle important
à jouer à cet égard. Des mesures devraient donc être prises pour
faciliter l'échange d'expérience entre les villes et les gouvernements,
et à l'intérieur de ceux-ci, en mettant l'accent sur les exemples
de moyens pratiques utilisés pour mettre en valeur la participation,
la citoyenneté et la bonne gouvernance au niveau local.
95. S'agissant des moyens de promouvoir la citoyenneté active,
on peut identifier deux types de solutions probantes: celles qui
fonctionnent à l'extérieur et celles qui marchent à l'intérieur.
La diplomatie des villes (lorsque deux localités s'associent pour
résoudre des problèmes d'intérêt commun) appartient au premier type de
solutions, tandis que les budgets participatifs, la responsabilité
des entreprises et l'engagement des citoyens sont des exemples du
second.
96. L'Assemblée pourrait demander aux gouvernements nationaux
des Etats membres de contribuer à restaurer la confiance dans la
démocratie, en encourageant l'examen et l'échange des bonnes pratiques,
tout particulièrement au niveau local. Elle pourrait aussi les inviter
à réduire la dépendance à l'égard des services publics en renforçant
les initiatives et le contrôle au niveau local.
97. Conformément à l'article 11 du Traité de Lisbonne, l'Assemblée
devrait demander instamment à l'Union européenne de concrétiser
son ambition d'une participation citoyenne aux processus décisionnels
de l'Union européenne. Elle pourrait aussi demander à l'Union européenne
d'élargir la portée de l'Année européenne des citoyens en 2013,
afin d'y inclure les questions concernant la citoyenneté active,
qui ne sont pas prises en compte dans cette manifestation dont le
thème porte aujourd'hui uniquement sur la liberté de circulation
. Enfin, au moment où la présidence
du Conseil de l'Europe s'efforce d'avancer vers la mise en place
d'un agenda commun au sein du Conseil de l'Europe, l'Assemblée pourrait
appeler l'Union européenne et le Conseil de l'Europe à intensifier
leur coopération quant au traitement conjoint des mesures à prendre,
afin d’éviter les doublons et de parvenir à une plus grande efficience
renforçant ainsi la démocratie locale en Europe au meilleur bénéfice
des citoyens européens.