1. Introduction
1. Les sociétés contemporaines se trouvent confrontées
à un vaste éventail de défis, notamment la mondialisation, le chômage
généralisé et les tensions sociétales dues à la difficulté de développer
une cohésion entre des communautés d’origine culturelle hétérogène.
Pour réunir les conditions nous permettant de relever ces défis
efficacement, je suis fermement convaincu que le bon fonctionnement
des systèmes éducatifs européens est nécessaire.
2. C’est pourquoi, en septembre 2012, avec 19 autres membres
de l’Assemblée parlementaire, j’ai déposé une proposition de résolution
(
Doc. 13015) mettant en exergue la nécessité de réexaminer le lien
entre la bonne gouvernance (tant du point de vue des processus de
définition des politiques que des pratiques administratives) et
la qualité de l’enseignement.
3. Pour élaborer ce rapport, j’ai pris en compte les travaux
antérieurs de notre Assemblée et du secteur intergouvernemental
du Conseil de l’Europe. Je tiens également à remercier les experts
qui ont contribué aux travaux de la commission
.
4. Dans les sections à suivre, j’examinerai d’abord ce que «qualité
de l’enseignement» signifie et comment l’évaluer. J’envisagerai
ensuite les secteurs à améliorer dans les politiques de l’éducation,
en essayant de déterminer quels changements apporter à la gouvernance
des systèmes éducatifs pour contribuer à rehausser la qualité de
l’enseignement.
2. Définition
de la «qualité» dans les systèmes éducatifs
2.1. Un concept pluridimensionnel
complexe
5. Il n’existe pas de définition commune et unique de
ce qu’est la «qualité de l’éducation». Toutefois, il semble y avoir
un consensus sur une variété d’éléments devant composer la qualité
de l’éducation.
6. Dans le prolongement de la Recommandation CM/Rec(2012)13
,
la 24e Conférence permanente des ministres
de l’Education (Helsinki, 26-27 avril 2013), réunie autour du thème
«Gouvernance et éducation de qualité»
,
est convenue que la qualité de l’éducation était étroitement liée
à quatre objectifs interconnectés, à savoir:
- la préparation à un emploi durable;
- la préparation à une vie de citoyens actifs dans des sociétés
démocratiques;
- le développement personnel;
- le développement et la consolidation, par l’enseignement,
l’apprentissage et la recherche, d’une base de connaissances approfondie
et diversifiée.
7. La conférence a également souligné que les systèmes éducatifs
du XXIe siècle doivent:
- être inclusifs, ouverts, transparents
et fondés sur l'éthique;
- favoriser la participation des élèves et des parents à
la prise de décision;
- s’appuyer sur des professionnels qualifiés;
- apporter aux étudiants les compétences professionnelles
nécessaires, mais aussi des compétences démocratiques et interculturelles
et un esprit critique.
8. Le Gouvernement écossais aborde la question de la qualité
de l’éducation différemment: l’éducation doit contribuer au bien-être
de chaque individu
. Partant, le Gouvernement écossais
propose une méthodologie d’évaluation du bien-être des enfants,
laquelle, pour l’essentiel, suppose qu’ils se sentent et soient:
- en sécurité (safe) – qu’ils soient protégés
contre les abus, la négligence ou la maltraitance;
- en bonne santé (healthy)
– qu’ils bénéficient de normes élevées de santé physique et mentale,
et d’un soutien pour opérer des choix sains et sûrs;
- en situation de réussite (achieving)
– qu’ils bénéficient de soutien et d’orientations tout au long de l’apprentissage,
et d’une stimulation des compétences, de la confiance et de l’estime
de soi;
- entourés (nurtured)
– qu’ils bénéficient d’un lieu enrichissant et stimulant où vivre
et grandir;
- actifs (active)
– qu’ils aient la possibilité de participer à un vaste éventail
d’activités;
- respectés (respected)
– qu’ils puissent donner leur avis et participer aux décisions qui
touchent à leur bien-être;
- responsables (responsible)
– qu’ils jouent un rôle actif au sein de l’école et de la communauté;
qu’ils soient des acteurs, non des récepteurs passifs;
- inclus (included)
– qu’ils reçoivent aide et conseils pour surmonter les inégalités;
ils sont membres à part entière des communautés où ils vivent et
étudient.
9. Ces exemples montrent clairement qu'une éducation de qualité
est un concept pluridimensionnel très complexe. Il est donc nécessaire
de l’examiner de différents points de vue. Pour essayer de simplifier
l’analyse, on peut regrouper les principaux éléments de la qualité
selon trois grandes catégories, qui correspondent à une approche
tridimensionnelle de la qualité de l’éducation:
- la qualité des «résultats»,
c’est-à-dire ce qui est acquis (ou devrait l’être) à travers l’éducation;
- la qualité de la «contribution initiale», c’est-à-dire
ce que les systèmes éducatifs apportent (ou devraient apporter)
aux élèves et aux étudiants afin d’atteindre les résultats visés
en termes de qualité;
- la qualité de la «gouvernance» du système éducatif, c’est-à-dire
les principes directeurs et les processus internes qui assurent
(ou devraient assurer) que le système éducatif peut apporter une
contribution initiale de qualité et atteindre des résultats en termes
de qualité.
2.2. Qualité des résultats
10. Lors de l’examen des résultats (et compte tenu des
textes mentionnés à la section 2.1), il est important de différencier
trois vastes objectifs éducatifs distincts bien qu’étroitement interconnectés:
- adéquation des acquis de l’apprentissage;
- développement personnel et bien-être;
- amélioration de la performance sociale.
2.2.1. Acquis de l’apprentissage
11. Les acquis de l’apprentissage doivent être en accord
avec deux résultats ultimes essentiels devant aller de pair: le
premier (sur lequel nous mettons souvent l’accent) est l’«employabilité»;
le second (non moins important) est la «citoyenneté responsable».
La Recommandation CM/Rec(2012)13 préconise un système qui «apporte
aux élèves et aux étudiants les compétences, la confiance en soi
et l’esprit critique nécessaires pour qu’ils deviennent des citoyens
responsables et améliorent leur employabilité». En outre, la recommandation associe
la «qualité» à la capacité du système à transmettre des «valeurs
culturelles universelles et locales aux élèves et aux étudiants».
De la même façon, l’Assemblée parlementaire, dans sa
Résolution 1929 (2013) sur «La culture et l’éducation par les parlements nationaux:
les politiques européennes», et la Conférence permanente des ministres
de l’Education (Helsinki, 2013) ont insisté sur la nécessité d’une
préparation à un emploi durable, apportant aux étudiants les compétences
professionnelles requises, mais aussi sur la nécessité d’une préparation
à une vie de citoyens actifs dans des sociétés démocratiques, apportant
aux étudiants des compétences démocratiques et interculturelles
ainsi que la capacité à une réflexion critique.
2.2.2. Développement personnel
et bien-être
12. L’accent mis sur les acquis de l’apprentissage en
vue d’une employabilité et d’une citoyenneté responsable reflète
la relation entre la personne adulte et la société; autrement dit,
sa capacité à jouer un rôle actif au sein de la société. Reste que,
pour assurer la réussite du système éducatif sur ce plan, l’éducation
doit aussi conduire au développement et au bien-être de l’individu.
C’est ce que souligne la Recommandation CM/Rec(2012)13 en exigeant
une éducation qui «favorise l’épanouissement de la personnalité
de chaque élève et étudiant, et le développement de ses dons et
aptitudes mentales et physiques, dans toute la mesure de ses potentialités»
et qui «offre un environnement sûr et non violent au processus d’apprentissage
dans lequel les droits de tous sont respectés».
13. De surcroît, le système éducatif n’offre pas seulement un
environnement d’apprentissage; il est un environnement de vie où
chaque membre de la société doit être amené à s’épanouir et à se
développer en tant que personne accomplie. A cet égard, l’approche
utilisée par le Gouvernement écossais est instructive: une éducation
de qualité suppose nécessairement que l’école soit un lieu où élèves
et étudiants se développent en sécurité, en bonne santé et entourés.
Le Conseil de l’Europe a élaboré une méthodologie visant à définir une
variété de facteurs affectant le bien-être et des indicateurs pertinents
pouvant servir d’outil d’élaboration des politiques
. De son côté, l’OCDE a lancé un
programme permettant d’identifier l’«indicateur du vivre mieux»
. De fait, effectuer des choix informés
quant aux politiques à mettre en place pour améliorer le bien-être,
voilà qui est crucial pour favoriser le développement sociétal.
2.2.3. Amélioration de
la performance sociale
14. Prendre soin du développement personnel revient finalement
à prendre soin de la société elle-même et à soutenir l’amélioration
de la performance sociale. Comme le déclare la Recommandation CM/Rec(2012)13, une
éducation de qualité signifie «une éducation qui (…) promeut la
démocratie, le respect des droits de l’homme et la justice sociale».
A Helsinki, les ministres de l’Education ont mis en évidence le
lien entre éducation et démocratie, et la valeur de l’éducation
en tant que pierre angulaire de l’égalité, du bien-être, de la prospérité,
de la civilisation et de la culture. Ils ont également souligné
la nécessité d’assurer, à travers l’enseignement, l’apprentissage
et la recherche, le développement et la consolidation d’une base
de connaissances approfondie et diversifiée. En d’autres termes,
une éducation de qualité construit des sociétés capables de vivre
ensemble en harmonie et de suivre le rythme du progrès technique
et scientifique.
2.3. La qualité de la
contribution initiale
15. Les résultats de l’enseignement sont largement conditionnés,
bien entendu, par la qualité de ce que le système offre aux élèves
et aux étudiants. A cet égard, entre autres facteurs – notamment
ceux plus haut mentionnés concernant l’environnement d’apprentissage
et de vie –, j’insisterai sur les suivants:
- les qualifications et les attitudes des enseignants;
- la méthodologie d’enseignement;
- les programmes.
2.3.1. Qualifications
et attitudes des enseignants
16. La qualité des résultats des études de nos élèves
dépend, en premier lieu, du professionnalisme de nos enseignants.
La Recommandation CM/Rec(2012)13 parle d’une éducation qui «s’appuie
sur des enseignants qualifiés, déterminés à suivre une formation
professionnelle continue». Une éducation de qualité exige des enseignants
qu’ils soient cultivés et capables de transmettre leur savoir, de
comprendre la diversité, d'accorder leur attention à différents
besoins et de s’y adapter, de prendre soin de leurs élèves et étudiants
et, non seulement de favoriser leur processus d’apprentissage, mais
aussi de les aider à développer leur propre personnalité et de les
préparer à la vie. Pour autant, les qualifications ne sont pas tout:
les attitudes et le comportement des enseignants comptent parmi
les facteurs clés d’une éducation de qualité. C’est pourquoi, lors
de la Conférence permanente tenue à Helsinki, les ministres ont
envisagé l’élaboration d’un cadre de référence sur les principes
éthiques de bonne conduite et de professionnalisme applicables aux
enseignants.
2.3.2. Méthodologie d’enseignement
17. Au sein du système éducatif, il est normal que coexistent
différentes méthodologies d’enseignement: elles doivent être adaptées
à des besoins spécifiques et, dans cette perspective, l’uniformité
constituerait un obstacle. Reste que, pour obtenir une éducation
de qualité, il faut que les méthodologies d’enseignement répondent
à certains principes fondamentaux. En particulier, il me semble
essentiel que des méthodologies spécifiques soient élaborées visant
à favoriser la confiance des étudiants, leur estime de soi, à stimuler
leur créativité et leur esprit critique, et à leur offrir des possibilités
de participer activement aux activités d’apprentissage.
2.3.3. Programmes
18. L’éducation est un processus qui se déroule pas à
pas, où les connaissances, compétences et aptitudes requises s’acquièrent,
bien entendu, progressivement. Autrement dit, il convient de déterminer
des acquis de l’apprentissage spécifiques pour chaque niveau d’enseignement,
et de concevoir les programmes respectifs de manière à ce qu’ils
soient cohérents entre eux. Les programmes doivent être cohérents
avec les résultats attendus du processus d’apprentissage, et ceux-ci
doivent être cohérents avec les besoins de l’emploi, afin d’éviter
tout décalage entre les besoins du marché et les compétences acquises
via un enseignement formel. Cela
signifie aussi que le système nécessite une certaine capacité d’adaptation
à l'évolution des besoins.
19. Les bons résultats des processus d’enseignement dépendent
aussi des programmes de recherche, qui permettent d’approfondir
les connaissances et de donner encore plus de valeur à l’enseignement
proposé dans nos établissements scolaires, et dans nos universités.
2.4. Qualité de la gouvernance
de l’éducation
20. Il ne serait pas possible d’assurer la qualité de
la contribution initiale et des résultats de l’enseignement sans
une bonne gouvernance des systèmes éducatifs. Le concept d’éducation
en tant que droit individuel et bien public laisse entendre que
les pouvoirs publics ont la responsabilité de mettre en place un
cadre (également applicable aux prestataires privés) au sein duquel
puisse être assurée une éducation de qualité.
21. Dans sa Stratégie pour l’innovation et la bonne gouvernance
au niveau local
, le Conseil de l’Europe mentionne
12 principes clés qui, mutatis mutandis, sont également applicables
au secteur éducatif.
Citons également
l’analyse approfondie, réalisée par Elisabeth Bäckman et Bernard
Trafford, du concept et des implications de la «gouvernance démocratique
à l’école»
. Cette analyse met en lumière l’incidence
positive que la gouvernance démocratique du système éducatif peut
avoir sur les résultats de l’apprentissage. Comme l’expliquent les
auteurs, «Par “démocratique”, on entend que la gouvernance de l’école
repose sur les valeurs des droits de l’homme, sur l’autonomisation
et sur la participation des élèves, du personnel et des partenaires à
toutes les décisions importantes de l’école».
22. Mon analyse se limitera à quatre éléments clés qui, me semble-t-il,
constituent des critères fiables de bonne gouvernance applicables
à n’importe quel système éducatif:
- intégration;
- participation;
- coopération;
- éthique.
2.4.1. Intégration et
non-discrimination
23. Les systèmes éducatifs doivent être inclusifs – c’est-à-dire
répondre au critère d’ «intégration». Le terme «intégration» est
à prendre au sens large. Un système éducatif inclusif doit, en particulier,
présenter les caractéristiques essentielles suivantes:
- être non seulement «ouvert à
tous» mais également «accessible à tous» et, pour reprendre les
termes de la Recommandation CM/Rec(2012)13, donner «accès à l’enseignement
à tous les élèves et les étudiants, particulièrement aux personnes
appartenant à des groupes vulnérables ou défavorisés»;
- prendre en compte les besoins éducatifs et sociaux de
tous et être adapté à ces différents besoins, offrant des possibilités
à tous les étudiants, afin de favoriser le développement de chacun
d’eux;
- offrir aide et conseils pour surmonter les inégalités,
et encourager tous les étudiants à mener à terme leurs programmes
d’enseignement.
2.4.2. Participation
24. A la réunion d’Helsinki, les ministres de l’Education
ont souligné que la conception démocratique de l'éducation et la
participation de tous les acteurs sont des critères majeurs de qualité.
A travers la Charte européenne sur l'éducation à la citoyenneté
démocratique et aux droits de l’homme, le Conseil de l'Europe a posé
des jalons importants dans ce sens. Les ministres ont aussi proposé
d'étudier les possibilités d'élaborer des indicateurs pour mesurer
la participation des principaux partenaires européens en matière
d'éducation.
25. J’aimerais souligner, en accord avec le Gouvernement écossais,
qu'une éducation de qualité doit déclencher – et garantir – responsabilité
et respect. Les étudiants ne doivent pas être considérés comme des réceptacles
passifs; ils deviennent des acteurs à part entière et jouent un
rôle actif au sein du système éducatif, en prenant part à toutes
les décisions affectant leur bien-être. Cela fait aussi partie (comme
expliqué plus haut) du concept de «gouvernance démocratique de l’école».
2.4.3. Coopération
26. Les ministres ont suggéré d'accorder plus de confiance
aux pouvoirs locaux et aux acteurs non gouvernementaux pour la réalisation
de la mission éducative. Ils ont aussi estimé que la coopération
entre parents et enseignants est déterminante pour la réussite scolaire.
Concevoir un partenariat en termes d'éducation et de formation avec
les parents ne deviendra réalité que si, du côté de l'école, ce
partenariat bénéficie d’un climat de confiance, de coopération et
de communication. En tant que responsables des politiques de l'éducation,
les ministres se sont engagés à en créer les conditions et à soutenir
tous les intervenants. M. Eero Heinäluoma, Président du Parlement
finlandais, a souligné la nécessité d'une étroite coopération entre
l'école et les parents. Si les parents et les enseignants poursuivent
des objectifs différents, si les parents se désintéressent de leurs
enfants, l'école n'a guère de chance d'atteindre ses objectifs,
a-t-il précisé.
2.4.3.1. Ethique
27. La qualité de l'éducation dépend largement du comportement
éthique adopté au niveau systémique –par les enseignants, administrateurs,
chercheurs, etc. La profession d’enseignant gagnerait peut-être
à adopter un code de déontologie, semblable au serment d’Hippocrate
que prêtent les médecins et autres professionnels de santé pour
jurer de pratiquer la médecine avec honnêteté. Pour ne citer qu’un
exemple, référons-nous au code de déontologie de l’
American Association of Educators , qui engage les éducateurs:
- à contribuer utilement aux progrès
de chaque étudiant et à favoriser la réalisation de son potentiel personnel,
notamment en sa qualité de citoyen au sein d'une communauté;
- à traiter chaque étudiant avec prévenance et équité, et
à tenter de résoudre les problèmes (y compris disciplinaires) conformément
à la loi et à la politique de l’établissement d’enseignement;
- à ne pas rabaisser intentionnellement un étudiant et à
déployer des efforts constructifs pour le protéger contre des conditions
néfastes à l’apprentissage, à la santé ou à la sécurité.
3. Evaluation de la
qualité de l’enseignement: principaux mécanismes et leur incidence
28. Dans les sections précédentes, j’ai identifié un
certain nombre des composantes nécessaires à une éducation de qualité
et à une bonne gouvernance du système éducatif. Se pose une question
à caractère transversal: comment évaluer si et dans quelle mesure
ces composantes de la qualité sont présentes dans le système? La
Recommandation CM/Rec(2012)13 fait état de la certification des
résultats du processus d’apprentissage formel ou non formel, laquelle
doit être effectuée «d’une manière transparente, fondée sur une évaluation
équitable».
29. Tous les pays disposent de processus de suivi et d’évaluation
à l’échelle nationale, bien qu’ils ne soient pas toujours explicitement
liés aux compétences clés. Il convient toutefois de noter que ces
mécanismes, bien que largement répandus, portent principalement
sur l’enseignement obligatoire ou l’enseignement jusqu’à l’examen
de fin de scolarité de l’enseignement secondaire. Les pays mentionnent
généralement plusieurs mécanismes complémentaires, notamment: la
définition de seuils de compétence; d’exigences finales et/ou d’indicateurs
de performance spécifiques; et l’analyse des résultats de l’évaluation
nationale, de l’autoévaluation scolaire et/ou d’examens externes.
30. Tous les pays ont mis en place des instances chargées spécifiquement
du contrôle de la qualité de l’éducation. L’assurance qualité dans
l’enseignement supérieur est contrôlée par des associations indépendantes.
Au niveau scolaire, ce sont les inspections académiques nationales
qui s’en chargent. Les résultats de l’évaluation menée par les inspections
académiques nationales sont généralement réunis dans des rapports
annuels présentés à l’administration centrale et peuvent être traduits
en indicateurs pour fournir aux responsables de l’élaboration des
politiques des éléments sur lesquels s’appuyer (par exemple en vue
de modifier ou de mettre un terme aux programmes existants ou d’en
proposer de nouveaux). En Finlande, le Conseil national de l’éducation
procède aussi à un contrôle longitudinal, à partir des conclusions
des évaluations précédentes. Ces évaluations fournissent des indicateurs
de base, qui décrivent les connaissances, les compétences et les
attitudes des élèves et des étudiants dans les domaines du programme d’enseignement;
des indicateurs contextuels, qui décrivent dans quelle mesure les
connaissances et les compétences des élèves et des étudiants sont
liées aux facteurs démographiques, sociaux, économiques et éducatifs;
et des indicateurs de tendance, qui décrivent les évolutions des
indicateurs de base et contextuels.
31. L’Union européenne assure un suivi
de la réussite
scolaire dans l’enseignement secondaire sur la base des objectifs
fixés au niveau de l’Union européenne, et en particulier des compétences
clés définies dans les Objectifs de Lisbonne en matière d’éducation
et de formation
. Les inspections académiques sont,
dans la plupart des cas, les autorités chargées du suivi et de l’évaluation.
32. Tous les pays utilisent au moins certains des mécanismes d’évaluation
internationaux actuellement en place pour évaluer la qualité de
l'éducation, qui s’intéressent principalement aux acquis de l’apprentissage.
Les principaux mécanismes sont présentés brièvement dans les sections
à suivre.
3.1. Enseignement pré-primaire
et primaire
33. Le principal résultat attendu de l’enseignement pré-primaire
et primaire est de donner la capacité de lire et écrire. Neanmoins,
le taux d’alphabétisation de 100 % n’est pas encore une réalité
dans les Etats membres du Conseil de l’Europe. Dans la seule Europe
centrale et orientale, la population analphabète des adultes et des
jeunes
a atteint le niveau de presque 5
millions de personnes, dont 77,5 % de femmes (3,8 millions). La jeunesse
comptait 386 000 illettrés en 2011, dont 59,4 % de jeunes filles.
Ces chiffres témoignent d’un très grave problème, d’une menace pesant
lourdement sur le développement socio-économique durable et l’égalité des
chances.
34. Depuis sa fondation, en 1946, l’UNESCO est en première ligne
des efforts déployés en faveur de l’alphabétisation dans le monde.
L’UNESCO contrôle les niveaux d'alphabétisme par le biais de son
Institut de statistiques (ISU)
, du Rapport mondial de suivi sur
l’Education pour tous
et de programmes régionaux d’évaluation
(RAMAA
, SACMEQ
et LLECE
). Sachant que la majorité des analphabètes
dans le monde sont des femmes, l'UNESCO a également élaboré des
initiatives ciblées telles que le «Partenariat mondial pour l’éducation
des filles et des femmes»
.
35. Les Rapports mondiaux de suivi sur l’Education pour tous de
l’UNESCO
attirent l’attention de
la communauté internationale sur des défis spécifiques en matière
d’éducation. Ces rapports influent sur la coordination des efforts
déployés à travers le monde pour assurer l'accès à une éducation
de bonne qualité. Ainsi, en 2007, le Rapport mondial de suivi «Un
bon départ – éducation et protection de la petite enfance» examinait
l’incidence de l’éducation dans la petite enfance sur le développement
général de l’enfant et ses chances de progrès dans la vie adulte.
A la suite de quoi, en septembre
2010, l’UNESCO organisait à Moscou sa toute première Conférence
mondiale sur l’éducation et la protection de la petite enfance (EPPE)
.
36. La conférence a offert une occasion unique d’examiner, au
plan mondial, les priorités en matière d’éducation. Elle a recommandé
des systèmes éducatifs qui favorisent l’inclusion, un apprentissage
de qualité, la flexibilité et l’innovation, et elle a apporté aux
décideurs et autres parties prenantes des orientations sur les pistes
à suivre pour transformer les systèmes éducatifs. A l’initiative
de l’UNESCO, un Comité inter-institutions sur l’assurance et la
référence de qualité a vu le jour en décembre 2010 à la suite de
la Conférence mondiale sur l’EPPE
.
37. L’UNESCO a lancé le développement conjoint d’un Indice holistique
de développement adapté à la petite enfance (HECDI). L’objectif
1, le suivi de l’éducation pour tous, a été limité – souvent au
suivi de la santé des enfants âgés de 0 à 3 ans, et au suivi de
l’éducation pré-primaire. Certes, il existe des indices du bien-être de
l'enfant, mais ils couvrent les résultats de l’enfance sans examiner
la panoplie des services à l’enfance. L’indice HECDI entend compenser
ces perspectives fragmentées sur la petite enfance en appliquant
une approche holistique au suivi de l’EPPE, suivi qui comprendrait
alors des évaluations portant sur la santé, la nutrition, la protection,
l’aide sociale et l’éducation.
3.2. Enseignement secondaire
38. Dans l’enseignement secondaire, les programmes d’évaluation
internationale de la réussite scolaire varient quant à la portée
et aux groupes ciblés. Le Programme international de l’OCDE pour
le suivi des acquis des élèves (PISA) est conçu pour évaluer les
systèmes éducatifs par la mesure des compétences en lecture, mathématiques
et sciences. L’évaluation porte sur les élèves âgés de 15 ans. L’évaluation
du rendement scolaire dans le cadre du programme PISA
a une incidence majeure sur les politiques
éducatives des Etats membres du Conseil de l’Europe.
39. En Norvège, les résultats de 2000 et 2003 – auxquels on fait
souvent référence en parlant du «choc Pisa» (le pays était alors
classé en dessous de la moyenne de l’OCDE et des autres pays scandinaves)
– ont déclenché des réformes politiques substantielles. En 2009,
les résultats plaçaient la Norvège au-dessus de la moyenne sur l’échelle
de lecture et dans la moyenne sur l’échelle des sciences et des
mathématiques
, ce qui a alimenté un
discours politique sur la nécessité d’une amélioration en continu
et d’une réforme de l’éducation.
40. En 2006 et 2009, les classements et les résultats du Royaume-Uni
se situaient dans la moyenne
. Le gouvernement a signalé, dans
son livre blanc sur «L’importance de l’enseignement» (2010), qu’il
attachait de l’importance aux comparaisons internationales, chargeant
le bureau de contrôle des examens et des diplômes (Office of Qualifications
and Examinations, Ofqal) de procéder à des études comparatives des
examens proposés au Royaume-Uni avec ceux en vigueur à l’étranger,
afin de vérifier leur conformité avec les normes internationales.
41. L’enquête PISA 2012
a mis l’accent sur le niveau de
compétence en mathématiques, qui est considéré comme une variable
prédictive probante de l’évolution des jeunes adultes; il influe
sur leur faculté de suivre des études post-secondaires et sur leurs
perspectives financières une fois dans la vie active. Quelque 510 000 élèves,
dont l’âge était compris entre 15 ans et 3 mois et 16 ans et 2 mois
et qui étaient représentatifs des 28 millions d’élèves âgés de 15 ans
scolarisés dans les 65 pays et économies participants, ont passé
les épreuves en 2012.
42. L’enquête PISA 2012 conclut que performance élevée et équité
n’ont rien de contradictoire. L’équité au service de l’excellence
– tel est le message à transmettre aux décideurs. Les résultats
montrent que les systèmes d’éducation performants tendent à répartir
les ressources de manière plus équitable entre les établissements
favorisés et les établissements défavorisés sur le plan socio-économique.
Dans ces systèmes, les déclarations des chefs d’établissement à
propos de la pénurie d’enseignants, de l’adéquation des moyens pédagogiques
et des infrastructures matérielles, et du temps d’apprentissage
moyen en mathématiques varient moins entre les établissements selon
que leur effectif d’élèves est plus ou moins défavorisé. Prenons, à
titre d’exemple, le cas de l’Estonie, de la Finlande et de la Corée,
dont le score est supérieur à la moyenne de l’OCDE en mathématiques.
Dans ces pays, les chefs d’établissement en poste dans des établissements défavorisés
ont été aussi nombreux, voire plus nombreux, que leurs homologues
en poste dans des établissements favorisés à déclarer qu’ils disposaient
de ressources pédagogiques adéquates. Cela dit, au-delà d’un certain
niveau de dépenses par élève, l’excellence n’est pas qu’une question
d’argent: le mode de répartition des ressources est aussi important
que le volume de ces ressources.
43. L’enquête 2012 révèle également que dans la plupart des pays
et économies, beaucoup trop d’élèves ne tirent pas pleinement parti
de toutes les possibilités d’apprentissage qui s’offrent à eux par
manque d’engagement à l’égard de l’école et de l’apprentissage.
L’assiduité aux cours et l’engagement à l’égard de l’école varient
non seulement entre les élèves et les établissements, mais également
entre les pays/économies. Ainsi, dans des pays et économies très
performants d’Asie de l’Est, en l’occurrence à Hong-Kong (Chine),
au Japon, en Corée, à Macao (Chine) et à Shanghai (Chine), le pourcentage
d’élèves qui ont déclaré être arrivés en retard à l’école ou avoir
séché des cours ou des journées de classe est relativement peu élevé.
44. La mesure dans laquelle les aspirations scolaires des élèves
et de leurs parents sont façonnées par des valeurs culturelles ou
par leurs déterminants, et dans laquelle ces aspirations entrent
en interaction avec les politiques et pratiques en matière d’éducation
est un sujet important, qui mérite d’être analysé de manière plus approfondie.
En tout état de cause, il semble que si un pays cherche à améliorer
la performance de ses élèves, il faut que ses chefs de file politiques
et sociaux persuadent les citoyens de faire les choix qui s’imposent
pour montrer qu’ils attachent plus d’importance à l’éducation qu’à
d’autres domaines présentant de l’intérêt pour la nation.
45. Les résultats de l’enquête PISA 2012 indiquent que le dynamisme,
la motivation et la confiance en soi sont essentiels pour permettre
aux élèves d’exploiter tout leur potentiel. Les élèves peuvent développer
leur potentiel par la pratique et le travail acharné, mais ils ne
peuvent atteindre les niveaux les plus élevés de performance que
s’ils convaincus qu’ils sont les artisans de leur réussite et qu’ils
sont capables d’atteindre ces niveaux. A Shanghai (Chine), par exemple,
les élèves sont non seulement persuadés qu’ils sont capables de réussir,
mais sont également disposés à tout mettre en œuvre pour y parvenir:
73 % d’entre eux se disent d’accord ou tout à fait d’accord avec
l’affirmation «Quand j’entame un exercice, il m’intéresse jusqu’au
bout». Le fait que dans certains pays, les élèves soient nombreux
à estimer que c’est d’un dur labeur, et non d’une intelligence innée,
que découlent de bons résultats scolaires suggère que l’école et
son contexte social font la différence en instillant des valeurs
qui contribuent à promouvoir la réussite scolaire.
46. Au programme PISA s’ajoutent ceux de l’Association internationale
pour l’évaluation du rendement scolaire (IEA)
; par exemple, l’étude internationale
des tendances en mathématiques et en sciences (
Trends in International Mathematics and Science
Study, TIMSS), visant à mesurer les connaissances, compétences et
concepts spécifiques en mathématiques et en sciences, pour les élèves
des classes de CM1 et de 4e. L’Educational
Testing Service (ETS)
, ainsi que les réseaux des agences
nationales d’assurance qualité
, assurent une évaluation thématique
des résultats scolaires – notamment pour les compétences linguistiques. Les
examens proposés par l’ETS, tels les GRE (Graduate Record Examinations)
et le TOEFL (Test of English as a Foreign Language), sont utilisés
comme critères déterminant l’accès à l'enseignement supérieur ou
à un emploi.
3.3. Enseignement supérieur
47. L’évaluation de la qualité dans l'enseignement supérieur
est un élément clé du processus de Bologne visant à mettre en place
l'Espace européen de l'enseignement supérieur (EEES). Le but est
d’établir un cadre général des qualifications comparables de l'enseignement
supérieur afin d'assurer une plus grande mobilité, l'employabilité
et la compétitivité dans l'ensemble de l'EEES et ce but ne pourra
être atteint que s’il repose sur des systèmes d'assurance qualité
fiables et efficaces dans chaque pays.
48. L’assurance qualité dans l’enseignement supérieur
stimule le progrès des méthodes
et des approches éducatives, et
le renforcement de la coopération entre les universités à travers
l'Europe. Tous les ans, des agences européennes d’assurance qualité
se réunissent à l’occasion du forum européen de l’assurance qualité
(EQAF)
. Le forum offre une plate-forme
unique pour favoriser un dialogue sur l’assurance qualité par-delà
les frontières nationales et organisationnelles, contribuant ainsi
à atteindre un consensus au niveau européen.
49. L’Association européenne pour l’assurance qualité dans l’enseignement
supérieur (ENQA) élabore des mécanismes d’évaluation internationaux
. L’ENQA contribue à la protection
et à l’amélioration de la qualité dans l’enseignement supérieur
européen à un haut niveau, et joue un rôle crucial pour promouvoir
l’assurance qualité dans les pays signataires du Processus de Bologne.
Les membres de l’ENQA sont des organisations d’assurance qualité
qui, dans les Etats membres appartenant à l’Espace européen de l’enseignement supérieur
(EEES), opèrent dans le domaine de l’enseignement supérieur.
50. L’ENQA a produit, en coopération et en concertation avec ses
agences et avec le Groupe E4
les normes et directives applicables
à l’assurance qualité dans l’Espace européen de l’enseignement supérieur («
Standards and Guidelines for Quality Assurance
in the European Higher Education Area»)
. Elles ont été soumises aux ministres
européens de l’Education à Bergen, en mai 2005, et présentées au
Groupe de suivi de Bologne le 1er mars
2005. Ces normes et directives, toutes traduites
, sont aujourd’hui mises en pratique à
travers la série de conférences et d’ateliers qu’organisent l’ENQA
et ses membres sur l’assurance qualité dans l’enseignement supérieur
et la recherche
. Les normes et directives indiquent
des mesures à prendre pour améliorer la qualité dans l’enseignement
supérieur au moyen de mécanismes d’assurance qualité, tant internes
qu’externes. Enfin, l’ENQA a spécifié à l’intention des agences
d’assurance qualité externe des normes européennes à respecter quant
à leur statut officiel, à leurs activités, à leurs ressources et
à leurs procédures en matière d’indépendance et de responsabilité.
51. L'évaluation de la qualité a un impact sur la façon dont les
universités sont choisies par les nouvelles générations d'étudiants.
Une forme bien connue d’évaluation sont les palmarès et d’autres
types de classements ou classifications des universités. Les universités
de renom en tête de ces palmarès attirent des étudiants de partout
dans le monde. Ceci dit, la place qu'une Université a sur de telles
listes n'est pas forcément un indicateur fiable de la qualité de
l'enseignement telle que nous l’avons définie. En effet, une distinction
claire doit être faite entre les systèmes d'assurance qualité, d'une
part, et les classements et les classifications, d'autre part.
52. Les classifications – comme, par exemple, la Carnegie classification aux Etats-Unis et
le U-Map en Europe – groupent
les universités par catégories (par exemple en fonction de leur
spécialisation dans certaines matières comme les nouvelles technologies,
les sciences, les arts, etc.).
54. Ces classements ont été conçus comme un outil de marketing
qui met en avant les universités bénéficiant d’une reconnaissance
internationale. Ils montrent aussi les niveaux de transfert des connaissances,
examinant dans quelle mesure l’université travaille avec les entreprises,
ce qui est important pour les perspectives d’emploi futur
. Ainsi,
ils sont devenus essentiels pour aider les étudiants potentiels (plus
de 170 millions dans le monde) et leurs familles à choisir le lieu
où ils vont étudier. Les universitaires les utilisent pour orienter
les partenariats et les choix de carrière, et les entreprises et
les philanthropes les trouvent utiles pour leurs décisions d’investissement.
En outre, ils apparaissent aujourd’hui comme des indicateurs géopolitiques:
les gouvernements les utilisent non seulement pour orienter les
politiques mais aussi en tant qu’outil stratégique, comme critère
de leur compétitivité.
55. Les 10 meilleures universités du classement du
Times et de celui de Shanghaï sont
américaines et britanniques, mais les universités asiatiques montent
en puissance. Les pays asiatiques ont compris que les universités
dirigent l’économie, surtout l’économie de la connaissance qui est
un moteur de l’innovation. Ils investissent donc massivement dans
leurs universités, tandis qu’en Occident celles-ci sont frappées
par l’austérité
. Au vu du classement
des principales universités européennes, il me semble indispensable
de revoir nos politiques et d’examiner les points que les universités
européennes devraient améliorer.
56. Néanmoins, je dois également attirer l’attention sur le fait
que les indications données par ces classements restent partielles
et que les indicateurs utilisés privilégient souvent les universités
scientifiques et ne rendent pas forcement justice aux universités
de premier plan dans le domaine des études littéraires, notamment
si leurs publications ne sont pas dans la langue de Shakespeare.
Par exemple, si une étude sur la philosophie médiévale italienne
est publiée en italien (et elle n’est pas traduite en anglais),
celle-ci ne sera pas prise en compte dans certains systèmes de classement.
En outre, les classements ne tiennent pas compte des différences
qui existent entre les facultés au sein d’une même université: certaines
peuvent être excellentes et d’autres médiocres. Il faut souligner
la nécessité de promouvoir le pluralisme des langues et des cultures européennes
aussi en milieu scientifique et au niveau global.
57. Classements et classifications fournissent des informations
comparatives de performance sur certains aspects d’un programme
ou d’un établissement – c’est-à-dire les taux de réussite des étudiants
et des diplômés, ou le nombre de lauréats de prix Nobel au sein
du personnel. Mais ces informations renseignent peu sur la qualité
du programme ou de l’établissement. Ainsi, les classements et les
classifications, même s’ils contribuent à renforcer la transparence,
ne doivent pas, toutefois, être considérés comme des outils d’assurance
de la qualité. Il convient de noter que les classements et les classifications
donnent des évaluations des universités individuelles. Je suggère
que, en plus de cela, elles devraient évaluer le système universitaire
dans son ensemble.
4. Conclusions:
stratégies pour l’amélioration de la qualité de l’éducation et de
la gouvernance des systèmes éducatifs
58. La
Recommandation
CM/Rec(2007)6 du Comité des ministres relative à la responsabilité
publique pour l’enseignement supérieur et la recherche souligne
la responsabilité des autorités publiques dans l’établissement d’un
cadre politique, législatif et financier adéquat pour l’enseignement
supérieur et la recherche. Les lignes directrices qui y figurent
offrent également une base solide pour élaborer des stratégies visant
à améliorer la gouvernance des systèmes éducatifs et la qualité
de l'éducation. Je souhaite développer ici certains éléments qui,
à mon avis, doivent trouver leur place dans ces stratégies.
59. Le point de départ est, pour moi, que les
élèves, les enseignants et les familles doivent être au centre de
toute stratégie pour l’amélioration de la qualité et de la gouvernance
de l’éducation et que nos Etats doivent investir mieux dans l’éducation.
60. Les stratégies pour assurer la qualité et la bonne gouvernance
en matière d'éducation doivent prendre en compte l'égalité des sexes,
qui doit être garanti dans et par les systèmes éducatifs. Les gouvernements devraient
s'efforcer de faire de nouveaux progrès, notamment en assurant une
mise en œuvre efficace de la
Recommandation
1281 (1995) de l'Assemblée sur l’égalité des sexes dans le domaine
de l'éducation.
4.1. Lutter contre l’exclusion
et améliorer la performance et garantir le bien-être des élèves
61. Le système éducatif doit être ouvert et accessible
à tous; néanmoins nous sommes loin d’avoir atteint cet objectif.
Lors de la 24e Conférence permanente
des ministres de l'Education, à Helsinki, Mme Androulla Vassiliou,
Commissaire européenne à l'éducation, à la culture, au multilinguisme
et à la jeunesse, a constaté que les systèmes européens d’éducation
et de formation sont plus ou moins concernés par des inégalités
en termes d’accès à une éducation de qualité et de résultats d’apprentissage.
Ces inégalités ont de lourdes conséquences sur les personnes concernées,
sur l'économie et sur la cohésion de nos sociétés
. L’égalité des chances dans l’enseignement
– et dans l’enseignement supérieur en particulier – n’est pas seulement
une question de justice sociale, mais la condition pour garantir
la meilleure utilisation du capital humain et social d’un pays.
62. Il faut s’engager dans la promotion du pluralisme des processus
d’éducation et des visions culturelles à la lumière d’un débat ouvert
et dans le respect du principe de laïcité pour combattre l’intégralisme,
le nationalisme et l’identitarisme qui favorisent l’exclusion.
63. Dans sa Déclaration finale, la Conférence des ministres de
l’éducation réunis à Helsinki évoque la nécessité d’aider les Etats
membres à élaborer des mesures politiques spécifiques favorisant
l’accès de tous les élèves et de tous les étudiants à l’enseignement,
en particulier ceux qui n’achèvent pas leur scolarité et qui, de
ce fait, se trouvent davantage exposés au risque de chômage et de
pauvreté. Ainsi, s’agissant d’assurer l’intégration dans les systèmes
éducatifs pour les enfants présentant des difficultés d’apprentissage,
je tiens à saluer les travaux de l’Agence européenne pour le développement
de l’éducation des personnes présentant des besoins particuliers,
laquelle favorise la mise en œuvre des «Principes clés de la promotion
de la qualité de l'éducation inclusive»
.
64. Je souhaite souligner qu’il ne s’agit surtout pas d’aplatir
vers le bas: l’égalité n’est pas égalitarisme et l’éducation pour
tous n’est pas le passage automatique d’une classe à l’autre. Néanmoins,
l’évaluation ne saurait ni stigmatiser, ni devenir une «sanction»;
elle doit rester un outil pour détecter les besoins et permettre un
suivi davantage personnalisé des élèves, et notamment de ceux qui
sont les plus défavorisés.
65. Il faut donc revoir les méthodologies d’enseignement – et,
même, l’approche globale appliquée à la relation entre enseignants
et élèves/étudiants. Il convient de trouver un équilibre entre la
nécessité d’appliquer une certaine sélection fondée sur le mérite
et sur les performances des élèves – c’est-à-dire les connaissances et
les compétences qu’ils acquièrent – et la nécessité de tous les
encourager et de soutenir leur développement personnel. A l’école
comme à l’université, l’augmentation du stress due à la pression
imposée aux élèves, qui sont surchargés de travail, est une raison
de leur décrochage. Peut-être un examen plus approfondi s’imposerait-il
pour déterminer le juste volume de travail. Quoiqu’il en soit, l’enseignant
doit éviter toute attitude qui risquerait d’humilier les élèves
et de leur donner le sentiment d’être incapables d’apprendre ou
de progresser.
66. Les statistiques du programme PISA montrent que certains systèmes
éducatifs ont pu réduire les écarts corrélés aux origines ethniques
et socio-professionnelles. Celles-ci ne sont donc pas une fatalité:
il faut aider les enfants dès leur plus jeune âge à surmonter les
difficultés d’intégration scolaire pour qu’ils puissent affronter
et vaincre celles d’intégration sociale.
67. Plusieurs orientations politiques, parfois combinées, peuvent
améliorer la performance et l’équité dans l’éducation.
68. Un premier ensemble de mesures devrait cibler les performances
peu élevées, quel que soit le milieu socio-économique des élèves,
soit en ciblant les établissements peu performants, soit en ciblant
les élèves peu performants au sein des établissements, selon le
degré de concentration des performances peu élevées dans les établissements.
Ces mesures peuvent consister à proposer un programme de cours spécifique
ou des ressources pédagogiques supplémentaires à des élèves en fonction
de leurs résultats scolaires. Certains systèmes d’éducation prévoient,
par exemple, des programmes de prévention précoce qui ciblent les
enfants chez qui un risque d’échec a été identifié lors de leur
préscolarisation, tandis que d’autres proposent des programmes de
prévention plus tardive ou de remédiation aux enfants qui ne progressent
pas à un rythme normal au cours des premières années de l’enseignement
primaire. Leur objectif est d’amener les élèves peu performants
au même niveau que leurs condisciples, quel que soit leur milieu
socio-économique.
69. Un deuxième ensemble de mesures devrait cibler les enfants
défavorisés au travers d’un programme de ressources pédagogiques
supplémentaires ou d’une aide financière. Ces programmes sélectionnent
les élèves en fonction du milieu socio-économique de leur famille,
et non de leurs aptitudes cognitives. Les politiques ciblant les
enfants défavorisés peuvent améliorer leurs résultats scolaires,
mais elles peuvent aussi leur fournir des ressources économiques
supplémentaires.
70. Un troisième ensemble de mesures devrait prévoir l’adoption
de politiques moins ciblées pour améliorer le niveau de tous les
élèves. Ces mesures consistent, entre autres, à modifier le contenu
des programmes de cours ou le rythme auquel ils sont enseignés,
à améliorer les méthodes pédagogiques, à instaurer la journée complète
de classe, à modifier l’âge du début de la scolarisation, ou encore
à augmenter le temps passé en classe. Certains pays, dont le Danemark
et l’Allemagne, ont réagi aux résultats de l’évaluation PISA de
2000 en soumettant leur système d’éducation et leurs programmes
de cours à de profondes réformes, incluant certaines de ces mesures.
Des pays ont entrepris de réformer leur système d’éducation en vue
de s’orienter vers des établissements plus généralistes (la Pologne)
ou de réduire la stratification (l’Allemagne). Ces réformes s’attaquent
en même temps à plusieurs causes d’inégalité, telles que le désavantage
socio-économique, l’ascendance allochtone ou une structure familiale
moins favorable.
71. Un quatrième ensemble de mesures devrait viser à créer un
climat d’apprentissage positif. Il est encourageant de constater
que les environnements d’apprentissage se sont, dans l’ensemble,
améliorés entre 2003 et 2012, même s’il reste dans tous les pays
et économies des établissements où l’environnement d’apprentissage
n’est pas propice. Les résultats de l’enquête PISA montrent que
lorsque l’on compare deux établissements, soit publics, soit privés,
dont la taille, la situation géographique et le profil socio-économique de
l’effectif d’élèves sont comparables, le climat de discipline tend
à être meilleur dans l’établissement qui ne manque pas d’enseignants
qualifiés.
72. Je rappelle, également, la nécessité de lutter sans quartier
contre l’isolement et la violence à l’école. L’Assemblée, dans sa
Résolution 1803 (2011) sur l’éducation contre la violence à l’école a formulé
des propositions très concrètes à cet égard: il nous incombe de
les promouvoir activement, afin que nos parlements et nos gouvernements
assurent leur mise en œuvre.
4.2. Développer le professionnalisme
des enseignants et favoriser la modernisation de l’éducation
73. L’essentiel des dépenses encourues par les systèmes
éducatifs concerne les enseignants. Des enseignants qualifiés et
motivés, telle est la base de toute politique d’éducation fructueuse.
Aussi en est-il souvent appelé à une revalorisation du statut de
la profession enseignante
. A cet égard, il est essentiel de veiller
à ce que les procédures de sélection et de nomination des enseignants
soient transparentes, objectives et fondées sur le mérite.
74. Le climat de discipline et la pénurie d’enseignants sont en
corrélation. La qualité d’un établissement ne peut excéder celle
de ses enseignants et de son chef d’établissement. Des pays qui
ont amélioré leurs résultats aux épreuves PISA, tels que l’Estonie
et la Pologne, ont par exemple entrepris d’améliorer la qualité du
personnel enseignant, et ce par la mise en œuvre de diverses politiques
qui ont entre autres consisté à ajouter parmi les exigences à satisfaire
par les enseignants celle d’être titulaires d’un certificat d’aptitude pédagogique,
à inciter les sujets brillants à embrasser la profession d’enseignant,
à accroître la rémunération des enseignants pour rendre la profession
plus attractive et retenir plus d’enseignants, ou à prendre des mesures
pour encourager les enseignants à suivre des activités de formation
continue. Bien rémunérer les enseignants n’est qu’un aspect de la
question, certes, mais revaloriser les salaires peut aider les systèmes d’éducation
à persuader les meilleurs candidats de s’orienter vers la profession
d’enseignant. Il ressort des résultats de l’enquête PISA que, parmi
les pays et économies dont le produit intérieur brut (PIB) par habitant est
supérieur à US$ 20 000, les systèmes d’éducation très performants
tendent à rémunérer davantage les enseignants par rapport à leur
revenu national par habitant.
75. Le rôle des enseignants se trouve quelque peu entravé par
une certaine bureaucratisation, résultant peut-être d’une normalisation
progressive dans tous les secteurs de l’éducation. Il me semble
qu’une éducation de qualité nécessiterait des enseignants plus disponibles
pour leurs élèves; aussi serait-il souhaitable d’éviter des situations
où les enseignants, soient-ils du cycle primaire, secondaire ou
supérieur, consacrent une grande part de leur temps de travail à
remplir des formulaires administratifs au lieu d’enseigner et de
guider les élèves/étudiants.
76. Les systèmes d’éducation doivent veiller à ce que les enseignants
soient orientés vers les établissements et les élèves auxquels ils
peuvent être le plus utiles. Les systèmes d’éducation pourraient
revoir la façon dont ils recrutent et répartissent les enseignants
pour faire en sorte que les établissements défavorisés disposent
de suffisamment d’enseignants qualifiés, prévoir des mesures incitatives
pour attirer des enseignants qualifiés dans ces établissements,
et veiller à ce que les enseignants en poste dans des établissements
défavorisés participent à des activités de formation continue (il
ressort des résultats que ces enseignants sont moins susceptibles
de participer à des activités de formation continue).
77. Il est nécessaire de moderniser les programmes de formation
des enseignants, tant au niveau de la formation initiale que continue.
En particulier, il convient d’étendre la formation permanente des
éducateurs et des enseignants pour leur permettre de faire face
à des réalités en rapide évolution et aux défis complexes dus à
l’inter-culturalisme, à la société de l’information et au rythme
de l’innovation en science et technologie.
78. A ce dernier égard, l’école doit favoriser l’apprentissage
des connaissances numériques et médiatiques. C’est là une condition
nécessaire non seulement pour combattre efficacement la fracture
numérique au sein de nos pays, mais aussi pour assurer leur compétitivité
à long terme dans le contexte de la globalisation.
79. Il faudra investir pour équiper nos établissements scolaires
d’outils informatiques, d’une part, pour moderniser leur gestion,
ainsi que pour faciliter la collecte et l’analyse de données au
niveau national; d’autre part pour que des salles d’étude équipées
d’ordinateurs connectés à l’internet soient disponibles pour les élèves
qui n’ont pas de connexion internet à la maison. Cela peut sembler
utopique dans le contexte actuel de crise financière et de restrictions
budgétaires. Néanmoins, soit nous investissons dans notre futur,
soit nos pays ne tiendront pas le pas et le coût à payer sera bien
plus élevé.
80. En outre, on peut utiliser le potentiel de l’internet pour
améliorer l’enseignement des matières traditionnelles (les langues,
les mathématiques, l’histoire-géo, les sciences…). Utiliser les
nouvelles technologies à l’école peut aider à susciter l’intérêt
des élèves, à développer des méthodologies de cours innovantes et
des outils pédagogiques davantage adaptés à la diversité des élèves.
On pourrait songer, par exemple, à des cours de soutien en ligne
et à l’offre de contenus pédagogiques de niveaux progressifs: pour aider
les élèves en difficulté à réviser, les élèves les plus curieux
à explorer et à approfondir les thèmes qui les attirent et tous
les élèves à développer leur créativité.
81. Pour faire évoluer le système et améliorer sa capacité de
réponse à des besoins spécifiques, il conviendra de réfléchir non
seulement au rôle et à la formation des enseignants mais aussi à
l’intégration systématique dans les équipes scolaires d’autres professionnels
que les enseignants et de faire un vrai travail en équipe. Je pense
par exemple au rôle que des pédopsychiatres pourraient avoir pour
aider les enseignants à développer des accompagnements ciblés, en
tenant compte des spécificités de chaque élève.
4.3. Lutter contre la
corruption et renforcer l’éthique dans l’éducation
82. L'éducation soutient la démocratie et le développement
de la société civile; ainsi, la corruption dans l’éducation nous
prive de la démocratie et affaiblit la société civile. Transparency
International
a souligné que la corruption n’a
pas pour seule conséquence de compromettre l’accès à l’éducation,
mais qu’elle a aussi des répercussions sur la qualité de l’éducation
et la fiabilité des résultats des études.
83. Depuis la corruption qui entache l’obtention des ressources
et le népotisme dans le recrutement des enseignants, jusqu’au fait
de fausser des résultats de recherches à des fins personnelles,
on peut identifier des risques de corruption à tous les niveaux
des systèmes d’enseignement et de recherche. Les ministres de l’Education,
à Helsinki, ont reconnu cette menace et la nécessité de la combattre.
Le rapport mondial de Transparency International sur la corruption
dans l’éducation
propose des solutions innovantes
à cet égard, que nous devrions prendre sérieusement en considération.
84. Par exemple, dans ce contexte, la transparence et l’obligation
de rendre compte en matière de gestion des fonds publics revêtent
une importance capitale. Pour les promouvoir, nous devons veiller
à ce que les informations soient facilement accessibles, proposer
des directives claires aux parties concernées, établir des dispositifs
d’audit solides et des mécanismes de suivi et d’application efficaces,
comprenant des mesures de protection des «donneurs d’alerte» et
des moyens juridiques non seulement de sanctionner les fonctionnaires corrompus
mais aussi de récupérer les fonds détournés. De plus, il convient
de renforcer la capacité des commissions parlementaires concernées
à évaluer l’efficacité des mesures prises dans ce domaine.
85. Les écoles et les universités devraient avoir des codes de
conduite, rédigés avec la participation de toutes les parties concernées.
A cet égard, par exemple, il pourrait être important de revoir les
procédures administratives, telles que l’homologation des offres
éducatives émanant d’établissements d’enseignement privés – par
exemple, ouvrir de nouvelles universités ou proposer des programmes
d’éducation et de formation professionnelles dans des secteurs très
en demande, tels la médecine. Des mesures doivent être prises pour éviter
la commercialisation des diplômes et pour lutter contre la prolifération
des écoles/universités virtuelles de qualité douteuse.
86. Par ailleurs, il est tout aussi nécessaire d'encourager un
comportement éthique parmi les élèves/étudiants et de les aider
à développer des attitudes fondées sur des valeurs de respect et
de compréhension mutuelle. Brimades et harcèlement entre élèves
sont cités parmi les principales raisons d'abandon scolaire. L’Assemblée,
dans sa
Résolution 1803
(2011) et dans sa
Recommandation
1965 (2011) sur l’éducation contre la violence à l’école, invite
instamment les Etats membres à combattre toutes les formes de violence
à l’école avec la plus grande détermination.
87. Je suis convaincu que le Conseil de l’Europe peut jouer un
rôle déterminant en soutenant le renforcement des politiques nationales
dans ce domaine. A cet égard, je salue les propositions formulées
lors de la Conférence ministérielle d’Helsinki en vue de l’adoption
de codes déontologiques pour les enseignants et de la mise en place
d’une plate-forme paneuropéenne d’échange d’informations et de bonnes
pratiques relatives à l’éthique et à l’intégrité dans l’éducation.
4.4. Promouvoir la participation
active des familles et mieux intégrer l’école dans la communauté
88. L’école doit faire une place aux familles et faire
en sorte que les parents puissent participer activement au processus
éducatif dont ils sont – et doivent se sentir – co-responsables.
Les professionnels de l’éducation et les familles sont souvent dans
une position de méfiance réciproque. Il faut faire tomber les barrières
entre école et maison et mieux associer les parents à la vie des
institutions d’enseignement.
89. Les résultats de la dernière étude PISA suggèrent qu'il y
a une corrélation positive entre la performance des élèves et des
valeurs familiales favorisant l'éthique du travail et la réussite.
90. Plus en général, les acteurs intervenant dans l’éducation
sont nombreux (éducateurs, enseignants, chefs d’établissements scolaires,
représentants des pouvoirs locaux et l’administration nationale);
le premier rôle des autorités éducatives doit être de les réunir.
A cette fin, les autorités devraient envisager la création de plates-formes
d’acteurs nationaux ou locaux visant à promouvoir une meilleure
communication mutuelle et, finalement, à encourager leur participation
active.
91. Il faut faire de l’école un espace privilégié du vivre ensemble.
Ce résultat ne peut être obtenu que si les établissements d’éducations,
voire le système d’éducation dans son ensemble, sont bien intégrés
dans leur écosystème social et économique.
92. Au fond, l’idée de définir des zones prioritaires – caractérisées
par des situations sociales problématiques et marquées par un taux
élevé d’élèves en situation d’échec scolaire – pour allouer des ressources
supplémentaires (par exemple pour renforcer les effectifs, verser
des primes aux enseignants, développer des mécanismes de soutien
pour les élèves) est une forme de prise en compte du milieu scolaire. L’efficacité
d’une telle approche serait sans doute renforcée si elle faisait
partie d’une stratégie plus globale.
93. Par exemple, on pourrait considérer des formes de coopération
(tant entre les élèves que les enseignants) entre établissements
de quartiers différents. On pourrait également repenser les approches
par rapport aux activités périscolaires, par exemple explorer des
formes d’apprentissage ludiques, et le développement du potentiel
des élèves dans des domaines où les heures d’apprentissage à l’école
restent un nombre fort limité, comme les arts ou la musique. Le
périscolaire pourrait devenir le temps privilégié du lien entre
l’institution scolaire et la communauté, d’un partenariat avec le
monde de la culture et le marché du travail.
94. A cet égard, les acquis du parcours éducatif doivent être
en adéquation avec les besoins du marché du travail. Pour renforcer
la cohérence entre les résultats de l’enseignement et les besoins
réels en termes de qualifications, les Etats membres doivent mettre
en place des mécanismes permettant d'évaluer périodiquement ces
besoins, veiller à ce que les programmes scolaires soient rapidement
adaptables et, enfin, apporter des conseils adéquats aux étudiants
et à leurs familles.
95. Il convient de prendre des mesures pour mieux connecter la
recherche et l’enseignement, s’employant à injecter les innovations
dans les processus éducatifs. D’autre part, l’éducation formelle
doit chercher à profiter de la richesse de l’éducation non formelle
et de la possibilité d’acquérir de nouvelles compétences, lesquelles
sont complémentaires à celles acquises à travers un enseignement
formel. Il faut développer la reconnaissance des compétences acquises
à travers un apprentissage non formel
.
4.5. Fournir des ressources
adéquates et en contrôler l’utilisation
96. Du moins jusqu’à un certain niveau de dépenses, plus
le niveau des ressources investies dans l’éducation est élevé (en
termes de pourcentage du PIB), meilleurs sont les résultats. Selon
les résultats de l’étude PISA de 2009, en effet, il y a une corrélation
positive entre le pourcentage du PIB consacré à l'éducation et la
globalité des résultats de l’alphabétisme
.
C’est pourquoi l’Assemblée invite les Etats membres à assurer la
mise à disposition des ressources nécessaires en faveur de l'éducation
– au minimum 6 % du produit national brut
.
97. Un élément qui passe pour influer sur la qualité des résultats
de l’apprentissage est le nombre d’élèves par enseignant. L’hypothèse
générale, en particulier pour l’enseignement primaire, est que moins
il y a d’élèves par enseignant, meilleurs sont les résultats scolaires.
Or, l’analyse des données statistiques montre que, même s'il y a
moins d’élèves par enseignant, le résultat final en lecture et mathématiques
n’est pas nécessairement supérieur à la moyenne relevée par l’OCDE
.
98. Cela doit nous mener à conclure que d’autres éléments – comme
les méthodes pédagogiques, le professionnalisme des enseignants
et la motivation des élèves, voire des parents – ont une incidence
sur la qualité de l’apprentissage au moins tout aussi importante
que la dimension des classes. Il pourrait être plus efficace d’investir
dans ces autres éléments, plutôt que de viser la réduction du nombre
d’élèves par classe.
99. Quelle que soit leur niveau, les ressources peuvent être gaspillées
ou être distribuées de façon inadéquate à cause de la corruption
dans certains cas, mais le plus souvent en raison du manque de capacité de
gestion. Il est donc essentiel que les pouvoirs publics contrôlent
les flux financiers du secteur de l’éducation et évaluent dans quelle
mesure les ressources disponibles sont employées efficacement.
4.6. Développer les
mécanismes nationaux d’évaluation
100. Pour détecter les problèmes, améliorer l’allocation
des ressources, mesurer l’efficacité des choix politiques et des
mesures adoptées, il est nécessaire que chaque système d’éducation
se dote de mécanismes permettant de mesurer la performance tant
des institutions éducatives individuelles que du système éducatif dans
son ensemble sur la base de l’analyse régulière de données objectives,
pertinentes et fiables.
101. L’aperçu général sur les mécanismes d’évaluation (voir, plus
haut, la section 3) montre que les méthodes servant à analyser les
résultats du processus d’apprentissage sont multiples. Cependant,
les critères appliqués ne permettent pas toujours d’avoir une vision
claire des progrès des élèves dans des domaines qui ne sont pas
définis statistiquement – par exemple, le développement de la créativité
et de l’esprit d’initiative qui, par ailleurs, ont un impact sur
leur capacité à trouver un emploi, y compris par le biais de l’entreprenariat.
102. En conséquence, il serait souhaitable de compléter les dispositifs
d’évaluation existants par l’évaluation d’autres aspects importants
– actuellement négligés – qui déterminent la qualité de la contribution
initiale et de la «gouvernance» des systèmes éducatifs.
103. Ainsi, les références de PISA aux connaissances et compétences
qui sont «des atouts pour la vie» englobent les compétences en compréhension
de l’écrit et en culture mathématique et scientifique. N’y figurent pas,
cependant, la capacité à vivre ensemble dans une société multiculturelle,
ou encore l’initiative individuelle dont peut faire preuve tout
un chacun pour amener de nouveaux développements positifs. La prochaine
étude internationale de l’IEA sur l’éducation civique et sur l’éducation
à la citoyenneté (International Civic and Citizenship Education
Study), prévue en 2016, pourrait conduire à une approche différente:
l’étude explorera comment les jeunes sont préparés à endosser leur
rôle de citoyen. Elle sondera les étudiants sur leur connaissance
et leur compréhension des concepts et des questions se rapportant
à la citoyenneté, ainsi que sur leurs croyances en des valeurs,
sur leurs attitudes et sur leur comportement
.
104. Cette approche plus large me semblerait cohérente avec la
conclusion du Rapport mondial de suivi de l’UNESCO «Vaincre l’inégalité:
l’importance de la gouvernance», qui veut que le suivi de la qualité
de l'éducation couvre trois dimensions: i) ressources ou conditions
optimales d’apprentissage (depuis l’infrastructure et les supports
pédagogiques jusqu’aux enseignants formés/qualifiés et à l’adéquation
des budgets); ii) pédagogie et processus d’apprentissage (notamment
une langue d’enseignement adéquate) et temps d’apprentissage; et
iii) acquis de l’apprentissage
.
105. L’évaluation de la qualité est la première étape vers une
assurance qualité qui devrait comprendre la mesure systématique
des résultats et des performances du système éducatif, la comparaison
avec des normes établies, le suivi des processus et, enfin, un nécessaire
retour d’information qui contribuera à prévenir les erreurs. Avec
un plan précis de l’assurance qualité dans l’éducation, les Etats
membres seraient certainement mieux armés pour concevoir de meilleurs
systèmes éducatifs. Le développement des systèmes d’assurance de
la qualité est donc essentiel.
106. Bien entendu, il ne faut pas seulement que le système d’assurance
de la qualité produise des informations fiables et pertinentes;
il faut aussi que les établissements d’enseignement utilisent ces informations
pour améliorer leurs activités. Il s’agit donc de guider, et non
de contrôler, par l’information.
107. Cela m’amène à une remarque ultérieure: les autorités éducatives
doivent fournir des informations claires et complètes sur l'offre
éducative. Ainsi les étudiants devraient-ils être avertis lorsqu’un
diplôme délivré par un établissement d’enseignement n’est pas reconnu
par les autorités nationales de tel ou tel pays – et n’a donc pas
de valeur sur ce marché du travail.
108. L’information publique sur les établissements d’enseignement
doit être communiquée de manière transparente afin d’éviter les
interprétations erronées
. Cette démarche doit concerner tous
les types de prestataires d’enseignement et valoir pour:
- les informations, les recommandations
ou les résultats d’accréditation utilisés par les décideurs chargés de
gérer les politiques de l’enseignement supérieur;
- les informations et les conseils à l’intention des étudiants;
- les évaluations et les recommandations destinées à aider
les établissements et les programmes de l’enseignement supérieur
dans leurs stratégies et leurs actions permanentes d’amélioration;
- les critères ou les classements élaborés à des fins de
communication externe.
109. Enfin, il est important d’engager toutes les parties prenantes,
surtout les élèves et étudiants, dans les auto-évaluations des établissements.
La plupart des établissements utilisent diverses formes d’évaluation, dont
les auto-évaluations, les évaluations externes et l’inspection des
enseignants en matière de contrôles de qualité
. Dans les systèmes qui se distinguent
par une grande équité, les établissements sont plus nombreux à demander
à leurs élèves de fournir un retour d’information par écrit au sujet
des cours, des enseignants ou des ressources. Certains pays impliquent
les élèves/étudiants dans les évaluations des établissements par
le biais de la création de conseils d’élèves/étudi ants ou de la
réalisation d’enquêtes auprès des élèves/étudiants. Pour utiliser
à bon escient l’apport des élèves/étudiants, le personnel des établissements
peut avoir besoin d’aide pour interpréter leur évaluation et y donner
suite. La confiance entre le personnel et les élèves/étudiants, et
l’engagement sans faille de la communauté scolaire, sont à la clé
de la réussite de cette pratique.
110. Le projet de résolution et le projet de recommandation reprennent
ces réflexions sous forme de propositions concrètes.