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Résolution 2003 (2014) Version finale

Vers une meilleure démocratie européenne: faire face aux enjeux d’une Europe fédérale

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 25 juin 2014 (23e séance) (voir Doc. 13527, rapport de la commission des questions politiques et de la démocratie, rapporteur: M. Andreas Gross). Texte adopté par l’Assemblée le 25 juin 2014 (23e séance).

1. L'Assemblée parlementaire note que, si la crise économique qui sévit en Europe demeure l'une des principales préoccupations, le processus d’intégration européenne – en particulier la forme et le système adoptés par l'Union européenne – fait aujourd'hui également l'objet de réflexions, de critiques et de querelles politiques.
2. Alors que, pendant des décennies, elle a été considérée comme faisant partie de la solution à la plupart des problèmes économiques et politiques, c'est plus récemment que les citoyens ont progressivement perçu la façon dont l'intégration européenne se poursuivait comme une autre source de développements économiques néfastes, de disparités sociales croissantes et d'érosion de la démocratie.
3. La montée et la force des partis nationalistes dans plusieurs pays européens sont une autre indication du questionnement de la forme politique que prend l'intégration européenne. Trop de citoyens tournent le dos à l'Union européenne, ayant l'impression que plus elle acquiert de compétences, moins forte devient la démocratie.
4. Afin de reconquérir la confiance des citoyens, il semble qu'aujourd'hui l'enjeu politique majeur de l'Union européenne, outre la gestion de la crise budgétaire et économique, soit de progresser sur la voie de la démocratisation et de développer pour elle-même un système politique dont les pouvoirs reposent sur une démocratie européenne transnationale forte. Pour ce faire, elle a le choix entre plusieurs options, y compris celle d'une Europe fédérale munie d'une démocratie fédérale.
5. L'Assemblée considère qu'elle peut aujourd'hui offrir une tribune idéale pour des délibérations sur les options concernant la future forme politique de l'Union européenne et plus particulièrement les défis que supposerait le passage à une démocratie européenne fédérale, étant donné que:
5.1. le projet sous-jacent à la création du Conseil de l'Europe et de son Assemblée parlementaire, au lendemain de la seconde guerre mondiale, était précisément l'instauration d'une «fédération démocratique européenne», sur la base d'une Constitution européenne;
5.2. l'Assemblée a l'habitude de débattre sur la question de savoir comment les valeurs européennes fondamentales, telles que les droits de l'homme, l'Etat de droit et la démocratie, se développent et comment elles peuvent être mieux protégées. Pendant plusieurs années, elle a gagné de l'expérience en la matière en adoptant de nombreux rapports traitant des crises auxquelles font face les démocraties d'aujourd'hui et cherchant des réponses à la question de savoir comment la démocratie devrait se développer afin de se redynamiser, dans le plein respect de l'intégrité et de la souveraineté des Etats, et comment renforcer sa substance et empêcher ce qui pourrait être vu comme une érosion de la démocratie et la réduction de celle-ci à une sorte de «post-démocratie»;
5.3. composée de représentants de parlements nationaux qui, une fois de retour dans leur pays, sont en mesure d'enrichir et d'élargir les débats de fond, l'Assemblée réduit la fracture naissante entre les arènes politiques européennes et nationales, et peut examiner les options envisageables sans engager les gouvernements ou l'Union européenne dans son ensemble;
5.4. tous les Etats membres du Conseil de l'Europe et leurs citoyens sont liés à l'Union européenne de différentes manières et à des degrés divers, et pourraient donc eux aussi bénéficier de la mise en œuvre de réformes institutionnelles qui redynamiseraient la démocratie et aideraient l'Union européenne à surmonter la crise qu’elle traverse et à se rapprocher de ses citoyens.
6. L'Assemblée note que, malgré la diversité de ses racines historiques et de ses interprétations, le fédéralisme constitue essentiellement un principe d'organisation politique, dans une société multiculturelle, qui répartit les pouvoirs entre les différents niveaux de gouvernement. Plutôt qu'un modèle pour une union politique sans cesse plus étroite ou pour un Etat européen, le fédéralisme suppose un processus d'équilibrage des pouvoirs au sein d'un système politique différencié qui permet l'unité tout en garantissant la diversité.
7. L'Assemblée note également que le principe directeur de l'attribution des pouvoirs au sein d'une fédération est la subsidiarité, ce qui signifie que la responsabilité doit en principe incomber prioritairement aux échelons de plus petite taille et que la solution à tout problème devrait être recherchée au plus près des citoyens.
8. A condition qu'il se fonde sur la démocratie, le fédéralisme aide à intégrer la diversité, tout en équilibrant les différences. La démocratie fédérale européenne ne signifierait donc pas plus d'Europe et moins d'Etats-nations. Elle impliquerait un gouvernement décentralisé fort de compétences européennes fondées sur la volonté des citoyens européens, lui permettant de faire face, dans l'intérêt des citoyens européens, aux questions transnationales qui ne pourraient pas être traitées efficacement par un Etat-nation seul.
9. Un tel fédéralisme démocratique européen serait un mode d'organisation plus compatible avec le caractère multinational des sociétés de l'Union européenne d'aujourd'hui et le souhait de ses Etats membres de se partager seulement les pouvoirs qu'ils ne pourraient pas mieux exercer seuls. Dès lors, ce serait un système politique visant à une recherche constante d'équilibre entre l'intégration et la différenciation.
10. Pour toutes les raisons qui précèdent, l'Assemblée invite tous les Européens concernés, et les institutions et les Etats européens, comprenant à la fois les gouvernements et les parlements, à s'intéresser aux défis que devrait relever une démocratie fédérale européenne et à évaluer les moyens par lesquels l'Union européenne d'aujourd'hui, fondée sur des traités, pourrait être transformée en union fédérale européenne fondée sur une Constitution. Cette union décentraliserait le pouvoir et renforcerait les seules compétences européennes nécessaires pour faire face aux défis de politique transnationale mieux que tout Etat pourrait seul le faire en Europe, dans l'intérêt de la majorité des citoyens européens.
11. Pour sa part, l'Assemblée considère que, pour des raisons historiques et au regard de ses fonctions et de sa composition, elle pourrait offrir un espace public interparlementaire au sein duquel des évaluations régulières sur «l'état de la démocratie fédérale européenne» pourraient favoriser la recherche et l'établissement d'un juste équilibre fédéral.