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Résolution 2003 (2014) Version finale
Vers une meilleure démocratie européenne: faire face aux enjeux d’une Europe fédérale
1. L'Assemblée parlementaire note
que, si la crise économique qui sévit en Europe demeure l'une des principales
préoccupations, le processus d’intégration européenne – en particulier
la forme et le système adoptés par l'Union européenne – fait aujourd'hui
également l'objet de réflexions, de critiques et de querelles politiques.
2. Alors que, pendant des décennies, elle a été considérée comme
faisant partie de la solution à la plupart des problèmes économiques
et politiques, c'est plus récemment que les citoyens ont progressivement
perçu la façon dont l'intégration européenne se poursuivait comme
une autre source de développements économiques néfastes, de disparités
sociales croissantes et d'érosion de la démocratie.
3. La montée et la force des partis nationalistes dans plusieurs
pays européens sont une autre indication du questionnement de la
forme politique que prend l'intégration européenne. Trop de citoyens
tournent le dos à l'Union européenne, ayant l'impression que plus
elle acquiert de compétences, moins forte devient la démocratie.
4. Afin de reconquérir la confiance des citoyens, il semble qu'aujourd'hui
l'enjeu politique majeur de l'Union européenne, outre la gestion
de la crise budgétaire et économique, soit de progresser sur la
voie de la démocratisation et de développer pour elle-même un système
politique dont les pouvoirs reposent sur une démocratie européenne
transnationale forte. Pour ce faire, elle a le choix entre plusieurs
options, y compris celle d'une Europe fédérale munie d'une démocratie
fédérale.
5. L'Assemblée considère qu'elle peut aujourd'hui offrir une
tribune idéale pour des délibérations sur les options concernant
la future forme politique de l'Union européenne et plus particulièrement
les défis que supposerait le passage à une démocratie européenne
fédérale, étant donné que:
5.1. le
projet sous-jacent à la création du Conseil de l'Europe et de son
Assemblée parlementaire, au lendemain de la seconde guerre mondiale,
était précisément l'instauration d'une «fédération démocratique
européenne», sur la base d'une Constitution européenne;
5.2. l'Assemblée a l'habitude de débattre sur la question de
savoir comment les valeurs européennes fondamentales, telles que
les droits de l'homme, l'Etat de droit et la démocratie, se développent
et comment elles peuvent être mieux protégées. Pendant plusieurs
années, elle a gagné de l'expérience en la matière en adoptant de
nombreux rapports traitant des crises auxquelles font face les démocraties d'aujourd'hui
et cherchant des réponses à la question de savoir comment la démocratie
devrait se développer afin de se redynamiser, dans le plein respect
de l'intégrité et de la souveraineté des Etats, et comment renforcer
sa substance et empêcher ce qui pourrait être vu comme une érosion
de la démocratie et la réduction de celle-ci à une sorte de «post-démocratie»;
5.3. composée de représentants de parlements nationaux qui,
une fois de retour dans leur pays, sont en mesure d'enrichir et
d'élargir les débats de fond, l'Assemblée réduit la fracture naissante
entre les arènes politiques européennes et nationales, et peut examiner
les options envisageables sans engager les gouvernements ou l'Union
européenne dans son ensemble;
5.4. tous les Etats membres du Conseil de l'Europe et leurs
citoyens sont liés à l'Union européenne de différentes manières
et à des degrés divers, et pourraient donc eux aussi bénéficier
de la mise en œuvre de réformes institutionnelles qui redynamiseraient
la démocratie et aideraient l'Union européenne à surmonter la crise
qu’elle traverse et à se rapprocher de ses citoyens.
6. L'Assemblée note que, malgré la diversité de ses racines historiques
et de ses interprétations, le fédéralisme constitue essentiellement
un principe d'organisation politique, dans une société multiculturelle,
qui répartit les pouvoirs entre les différents niveaux de gouvernement.
Plutôt qu'un modèle pour une union politique sans cesse plus étroite
ou pour un Etat européen, le fédéralisme suppose un processus d'équilibrage des
pouvoirs au sein d'un système politique différencié qui permet l'unité
tout en garantissant la diversité.
7. L'Assemblée note également que le principe directeur de l'attribution
des pouvoirs au sein d'une fédération est la subsidiarité, ce qui
signifie que la responsabilité doit en principe incomber prioritairement
aux échelons de plus petite taille et que la solution à tout problème
devrait être recherchée au plus près des citoyens.
8. A condition qu'il se fonde sur la démocratie, le fédéralisme
aide à intégrer la diversité, tout en équilibrant les différences.
La démocratie fédérale européenne ne signifierait donc pas plus
d'Europe et moins d'Etats-nations. Elle impliquerait un gouvernement
décentralisé fort de compétences européennes fondées sur la volonté
des citoyens européens, lui permettant de faire face, dans l'intérêt
des citoyens européens, aux questions transnationales qui ne pourraient
pas être traitées efficacement par un Etat-nation seul.
9. Un tel fédéralisme démocratique européen serait un mode d'organisation
plus compatible avec le caractère multinational des sociétés de
l'Union européenne d'aujourd'hui et le souhait de ses Etats membres de
se partager seulement les pouvoirs qu'ils ne pourraient pas mieux
exercer seuls. Dès lors, ce serait un système politique visant à
une recherche constante d'équilibre entre l'intégration et la différenciation.
10. Pour toutes les raisons qui précèdent, l'Assemblée invite
tous les Européens concernés, et les institutions et les Etats européens,
comprenant à la fois les gouvernements et les parlements, à s'intéresser aux
défis que devrait relever une démocratie fédérale européenne et
à évaluer les moyens par lesquels l'Union européenne d'aujourd'hui,
fondée sur des traités, pourrait être transformée en union fédérale
européenne fondée sur une Constitution. Cette union décentraliserait
le pouvoir et renforcerait les seules compétences européennes nécessaires
pour faire face aux défis de politique transnationale mieux que
tout Etat pourrait seul le faire en Europe, dans l'intérêt de la
majorité des citoyens européens.
11. Pour sa part, l'Assemblée considère que, pour des raisons
historiques et au regard de ses fonctions et de sa composition,
elle pourrait offrir un espace public interparlementaire au sein
duquel des évaluations régulières sur «l'état de la démocratie fédérale
européenne» pourraient favoriser la recherche et l'établissement
d'un juste équilibre fédéral.