1. Introduction
1. Le Conseil de l'Europe et la Banque européenne pour
la reconstruction et le développement (BERD) ont signé en 1992 un
accord de coopération en vertu duquel les deux institutions acceptent
d'échanger des informations dans le but spécifique d'observer les
progrès démocratiques réalisés en Europe centrale et orientale.
En juin 2011, l'Assemblée parlementaire a entrepris certaines réformes
et a adopté une nouvelle répartition des tâches.
2. Le mandat révisé de la commission des questions politiques
et de la démocratie prévoit que «la commission établit des rapports
annuels sur les activités de l'Organisation de coopération et de développement
économiques (OCDE) et de la Banque européenne pour la reconstruction
et le développement (BERD). En vue de la préparation des rapports
et des débats à l'Assemblée, la commission entretient des relations
avec l'OCDE et la BERD».
3. Le 22 janvier 2013, l'Assemblée a tenu un débat sur un rapport
consacré aux activités de la BERD pendant la période 2010-2012,
présenté par M. Tuur Elzinga (Pays-Bas, GUE), et a adopté la
Résolution 1913 (2013). Le 6 juin 2013, la commission m'a désignée rapporteure.
4. Le présent rapport, basé sur une note préparée par M. Gabriele
Ciminelli, chercheur en économie à l'institut Tinbergen d'Amsterdam,
passe en revue les activités déployées par la BERD en 2013 et 2014.
Il place notamment l'accent sur l'évolution politique et économique
caractéristique de la région d'opérations de la Banque au cours
des deux dernières années et sur la stratégie à moyen terme, récemment
annoncée, qui guidera les opérations de la Banque pendant la deuxième
partie de la décennie.
5. Le rapport comporte également un bref compte rendu de la littérature
consacrée aux relations entre développement économique et démocratie,
ainsi qu'une analyse de la manière dont une réforme axée sur les lois
du marché pourrait s'avérer bénéfique pour la démocratie multipartite
dans la région de transition à laquelle s'intéresse la BERD. Nous
avons accordé une attention particulière aux progrès réalisés par
la Banque dans la nouvelle région dénommée «partie méridionale et
orientale du bassin méditerranéen «(SEMED selon son acronyme anglais
couramment utilisé), ainsi qu'aux relations qu'entretient la BERD
avec d'autres institutions européennes.
6. Dans le cadre de la préparation du présent rapport, la rapporteure
a tenu des réunions bilatérales avec des agents et des administrateurs
de la BERD, lesquels lui ont communiqué des renseignements utiles
sur le fonctionnement et les activités de la Banque. La sous-commission
sur les relations avec l'OCDE et la BERD a tenu une réunion au siège
de cette dernière, situé à Londres, le 4 février 2014.
2. Contexte
7. Vingt-cinq ans après la chute du rideau de fer, les
décideurs du monde entier s'efforcent toujours d'améliorer les conditions
de vie dans l'ancien bloc de l'Est. Dans ce contexte, la BERD est
investie d'un rôle unique. Créée en 1991 pour faciliter la transition
vers une économie de marché ouverte, la BERD est la seule institution
financière dont le mandat fasse clairement référence aux principes
de la démocratie pluripartite, du pluralisme et de l'économie de
marché. En fait, la Banque ne peut opérer que dans les pays s'étant
engagés à respecter et à mettre en pratique ces principes. Au 1er juin
2014, la BERD était le plus gros investisseur dans sa région d'opérations.
8. La BERD promeut la transition vers une économie de marché
en cofinançant des prêts, en investissant du capital-risque et en
facilitant l'accès au marché des capitaux à des entreprises publiques
ou privées qui opèrent de manière concurrentielle dans une économie
de marché. L'ampleur de l'engagement de la Banque dans le secteur
public ne peut cependant dépasser 40 % du montant des transactions.
Pour financer ses opérations, la BERD lève des fonds sur le marché
international des capitaux et notamment dans ses pays d'opérations,
contribuant par là même à renforcer les marchés locaux de capitaux.
9. La Banque fournit également une coopération technique à ses
clients dans le but de soutenir la préparation et la mise en œuvre
de projets. Elle constitue un cas unique parmi les banques de développement, dans
la mesure où ladite coopération technique revêt généralement la
forme de l'octroi de subventions financées par des partenaires donateurs.
Outre ses activités en matière d'investissement et de coopération technique,
la BERD se consacre également à un dialogue politique avec les pays
bénéficiaires, de manière à encourager les réformes économiques
structurelles. Grâce à un savoir spécifique et des compétences accumulés
pendant plus de 20 ans d'activité, elle est en mesure de prodiguer
– en matière de politique économique – des conseils se révélant
souvent décisifs au regard de l'acquisition d'une capacité institutionnelle
suffisante pour favoriser l'avènement d'une économie de marché ouverte
et d'une démocratie multipartite.
10. Depuis le début, la région d'opérations de la BERD comprend
non seulement des pays d'Europe centrale et orientale et des Balkans,
mais s'étend plus à l'Est jusqu'aux républiques d'Asie centrale.
Au fil du temps, cette région s'est progressivement élargie de sorte
que, au 1er juin 2014, elle englobait
35 pays. Les opérations de la BERD ont été dans un premier temps
étendues à la Mongolie (2006) et à la Turquie (2009). A la suite
des changements historiques intervenus en Afrique du Nord et au
Proche et au Moyen-Orient, les actionnaires de la Banque ont demandé
à celle-ci d'élargir sa zone de compétence géographique aux pays
de la partie méridionale et orientale du bassin méditerranéen (SEMED),
notamment l'Egypte, la Jordanie, le Maroc et la Tunisie. D'autres
pays de la SEMED ont déjà exprimé leur désir de rejoindre la Banque.
11. En novembre 2012, sans préjudice de la position des membres
individuels sur le statut du Kosovo*
, la Banque
a annoncé que celui-ci deviendrait à la fois membre de la BERD et
bénéficiaire potentiel
. Dans le cadre
de l'assemblée générale annuelle tenue à Varsovie le 15 mai 2014,
les actionnaires de la BERD sont convenus d'un élargissement supplémentaire
de la zone d'opérations de la Banque. L'un des membres fondateurs,
Chypre, s'est vu accorder le statut de pays bénéficiaire afin de
pouvoir restructurer et rétablir son économie frappée de plein fouet
par la crise financière. La Banque prévoit que son intervention
à Chypre revêtira un caractère temporaire et envisage de mener ses
opérations dans toute l'île, c'est-à-dire au bénéfice des deux communautés
.
12. Aucun pays ne peut bénéficier d'un investissement de la BERD
tant qu'il n'est pas devenu actionnaire de cette banque. C'est pourquoi,
suite au désir exprimé par les autorités de Tripoli de bénéficier d'investissements
de la BERD, la demande de la Libye visant à devenir le 67e actionnaire
de la Banque a été accueillie favorablement. La BERD a tenu à préciser
que la décision de conférer à la Libye le statut de pays bénéficiaire
serait prise séparément, à l'issue d'une évaluation minutieuse de
l'environnement politique, économique et opérationnel du pays, sur
la base de l'article 1 de l'Accord portant création de la banque
(ACB).
13. Les défis économiques et financiers inhérents à la crise mondiale
ont profondément affecté les perspectives de transition dans la
région d'opérations de la BERD. Premièrement, la crise financière
a provoqué un ralentissement durable de la croissance dans ladite
région. Cette évolution a entraîné un ralentissement considérable
du processus d'alignement du niveau de vie des pays concernés sur
celui de l'Europe de l'Ouest. Deuxièmement, les marchés libres ont
souvent été accusés d'avoir favorisé le malaise économique. Par
conséquent, la crise a tempéré l'enthousiasme du public pour ces
réformes dans certains pays.
14. La BERD n'ignore pas que les défis posés par la crise financière
et la demande de savoir-faire et de financement émanant de la région
SEMED ne font que renforcer son rôle dans le monde de l'après-crise.
Au cours de l'assemblée générale annuelle de 2014, les actionnaires
de la BERD ont discuté des nouvelles lignes directrices à moyen
terme censées guider l'action de la Banque pour les années à venir.
Forte des compétences qu'elle a acquises et des initiatives importantes
qu'elle a prises au fil du temps, la BERD nourrit l'intention d'insuffler
une nouvelle énergie à la politique de transition en concentrant
ses efforts sur trois objectifs clés: i) soutenir la lutte des gouvernements
en faveur de l'accélération de la transition par le biais d'un dialogue
politique et du financement de projets cruciaux; ii) promouvoir
l'intégration économique à la fois au niveau international et régional;
et iii) relever des défis communs à tous les pays de la planète.
Les lignes directrices à moyen terme devraient constituer un point
de départ pour la discussion du document de la Banque intitulé Fifth Capital Resources Review (CRR5)
[Cinquième évaluation des ressources en capital], lequel couvrira
la période 2016 à 2020 et sera soumis à l'approbation des actionnaires
de la Banque lors de l'assemblée générale annuelle de 2015 à Tbilissi.
3. Gouvernance et
structure
15. La BERD compte 66 actionnaires, dont tous les Etats
membres de l'Union européenne et deux institutions européennes,
à savoir l'Union européenne (représentée par la Commission) et la
Banque européenne d'investissement (BEI). De plus, certains pays
développés – comme les Etats-Unis, le Japon, la Corée du Sud, le
Canada et l'Australie – situés hors d'Europe et ne faisant pas partie
de la région d'opérations de la BERD sont également actionnaires.
Parmi les Etats membres du Conseil de l'Europe, seuls l'Andorre, Monaco
et Saint-Marin ne sont pas actionnaires de la Banque.
16. La structure globale de la BERD repose sur sept axes correspondant
à des priorités opérationnelles communes. La répartition du travail
au sein de la Banque reflète bien sa double nature puisqu'elle est
à la fois une institution financière publique et une entité opérant
conformément aux principes du secteur privé. Tous les pouvoirs sont
aux mains d'un conseil des gouverneurs composé d'un représentant
pour chaque actionnaire, généralement un fonctionnaire du ministère
des Finances ou le président de la Banque centrale. Ce conseil se réunit
une fois par an et délègue la plupart de ses pouvoirs à un conseil
d'administration chargé à la fois de fixer l'orientation stratégique
de la Banque et de procéder à des évaluations internes. Le président
élu par le conseil des gouverneurs est le représentant juridique
de la BERD. Il gère les opérations de la Banque sous la supervision
du conseil d'administration. Dans l'exercice de ses fonctions, il
est conseillé par un comité exécutif composé de cinq vice-présidents
et d'autres membres de la haute direction, dont l'économiste en
chef, le conseiller général et le secrétaire général.
17. Les réunions du conseil d'administration se tiennent normalement
à des intervalles de deux semaines et sont présidées par le président.
Le conseil adopte des décisions formelles concernant les investissements, les
tâches en matière de coopération technique, les emprunts et autres
activités de la Banque. Fait important, c'est à lui qu'il appartient
de veiller au respect des clauses revêtant un caractère politique
énoncées dans le mandat de la Banque. A supposer que le conseil
exprime de graves préoccupations quant à la conformité d'un pays,
il pourrait décider de limiter l'engagement de la BERD auprès de
l'Etat concerné tout en continuant à investir dans le secteur privé
afin de soutenir la transition économique.
18. Cette politique – communément désignée sous le terme d'«approche
calibrée» – est actuellement appliquée à deux pays: le Bélarus et
le Turkménistan. Les décisions du conseil d'administration sont
adoptées à la majorité, à condition que celle-ci ne représente pas
moins de deux tiers des actions souscrites au capital de la Banque.
Le conseil se compose de 23 administrateurs représentant chacun
un ou plusieurs membres. Seuls quelques rares pays de la zone d'opérations
sont directement représentés au conseil d'administration par leurs
propres administrateurs. Toutefois, en avril 2013, certains gouverneurs
ont demandé à revoir la composition du conseil d'administration
dans le but d'accroître le poids des pays bénéficiaires. Ce processus devrait
se dérouler parallèlement à la Cinquième évaluation des ressources
en capital de la Banque.
19. Treize services assurent les tâches quotidiennes de la Banque.
Le service Banque, finances et risque est chargé de prêter et d'emprunter,
ainsi que de gérer les risques. Le Bureau du conseiller général
délivre des avis juridiques et fournit un soutien opérationnel,
tandis que le Bureau du secrétaire général gère les relations institutionnelles
de la Banque, notamment avec ses actionnaires. Pourtant, ce sont
deux services particuliers – le service de l'action extérieure et
des affaires politiques (EAPA) et le Bureau de l'économiste en chef
(OCE) – qui confèrent peut-être un caractère si particulier à la
BERD en tant qu'institution financière.
20. Même si toutes les actions de la banque visent à promouvoir
la transition, c'est au sein de ces deux services que les progrès
en matière économique et politique sont suivis et évalués. L'OCE
est chargé de l'analyse économique et évalue notamment l'impact
potentiel des projets individuels de la Banque sur la facilitation
de la transition vers une économie de marché. L'OCE évalue également
l'ampleur de la transition économique au niveau des secteurs d'activité
et des pays. La transition politique, quant à elle, est suivie par l'EAPA
qui communique régulièrement des mises à jour et des informations
relatives à l'évolution politique des pays relevant de la zone d'opérations.
Son avis joue d'ailleurs un rôle déterminant sur les initiatives
de dialogue politique prises par la Banque. De plus, l'EAPA est
aussi chargé de gérer les activités financées par les donateurs,
y compris la coopération technique avec les clients de la Banque
et le dialogue politique avec les pays bénéficiaires.
21. Alors que l'EAPA et l'OCE fournissent des évaluations politiques
et économiques, la tâche cruciale d'évaluation de l'efficacité de
l'action de la Banque en faveur de la transition relève du service
d'évaluation (EvD). Ce dernier est totalement indépendant du reste
de la direction générale de la BERD et rend compte directement au
conseil d'administration. Ses évaluations des performances – indépendantes
et basées sur des preuves – contribuent à renforcer l'action de
la BERD et sa transparence. Une part importante de sa mission consiste
à évaluer après coup l'impact sur la transition des projets de la
Banque, sous l'angle du renforcement du secteur privé ainsi que
de l'amélioration obtenue aux niveaux institutionnel et politique.
L'activité de l'EvD ne se limite toutefois pas à l'évaluation de
projets individuels, puisqu'elle inclut aussi l'évaluation des stratégies, programmes
et politiques de la Banque. Le document intitulé
Annual Evaluation Review procède
d'ailleurs minutieusement à une évaluation de ce type.
22. La Banque soutient également la transition par le biais de
la promotion des normes les plus élevées en matière de gouvernance
d'entreprise, de transparence et d'intégrité dans sa région d'opérations.
L'organe chargé de surveiller le respect de ces normes est le Bureau
du chef de vérification de la conformité (OCCO). Ce bureau – qui
rend compte au président et au comité d'audit du conseil d'administration
– évalue l'intégrité et la transparence des clients de la Banque
et mesure les risques potentiels sous l'angle de la réputation associés
aux activités d'investissement de la BERD. Dans le cadre de sa mission,
l'OCCO enquête sur les allégations de fraude et de corruption liées
à des projets financés par la Banque. Il convient également de noter que
le même bureau gère aussi le mécanisme de vérification de la conformité
du projet (
Project Compliant Mechanism ou
PCM) qui permet à des individus
et à des groupes locaux d'un pays de la zone d'opérations de soulever
des griefs ou de formuler des plaintes visant des projets de la
BERD. En outre, l'OCCO est également responsable de l'application
des meilleures pratiques et normes internationales en matière de
gestion interne de la Banque
.
23. Dans le cadre de son engagement en faveur de la démocratie
et de la bonne gouvernance, la BERD consulte régulièrement toute
une série d'organisations issues de la société civile. Ce dialogue
porte à la fois sur des projets individuels et sur des initiatives
plus larges, notamment en ce qui concerne l'analyse des principales
politiques et stratégies de la Banque. En décembre 2013, la BERD
a approuvé sa nouvelle Stratégie pour le secteur de l'énergie visant
à encadrer les investissements de la Banque dans ce secteur pour la
période 2014 à 2018. Surtout, son approbation s'inscrit dans un
processus élargi de consultation de plus de 1 000 organisations,
dans le cadre duquel la Banque a pris en compte et réagi aux commentaires
émanant d'acteurs extérieurs
. Le président et les membres
du conseil d'administration tiennent également des réunions avec
des organisations issues de la société civile et autres acteurs
importants pendant leurs visites dans les pays relevant de la zone
d'opérations
.
24. Peu de temps après son élection, en 2012, le président Chakrabarti
a révélé un agenda de modernisation visant à rendre l'organisation
interne plus réactive aux défis en perpétuelle évolution auquel
la Banque ne manquera pas d'être confrontée à l'avenir. L'initiative,
baptisée
One Bank, se concentre
sur la nécessité de simplifier les procédures internes de la Banque
et de moderniser sa culture de gestion. La Banque prévoit d'accroître
encore son efficacité en adoptant plusieurs mesures, dont la réduction
du personnel peu performant et des indemnités au titre du remboursement
des frais de voyage et de mission. La création en 2012 de deux nouvelles
vice-présidences – chargées respectivement de l'élaboration d'une
politique et de la gestion des ressources humaines et des services
généraux – constitue peut-être l'initiative la plus concrète en faveur
de la modernisation de la Banque. Dans ce contexte, la BERD a identifié
en 2013 une série de valeurs clés – professionnalisme, intégrité,
leadership, innovation, diversité et travail d'équipe – susceptibles
de contribuer à l'amélioration de la gestion du personnel. Cet exercice
a incité la BERD à améliorer l'inclusion et la diversité au sein
de son personnel grâce à l'adhésion à différents programmes et réseaux
prônant la diversité et à l'introduction d'une formation obligatoire
en matière de leadership inclusif. La Banque a également élargi ses
critères de sélection de projets dans le but d'accroître son efficacité
dans des domaines tels que l'inclusion sociale et l'égalité des
chances
.
25. L'établissement d'une vice-présidence chargée d'élaborer une
politique revêt une valeur à la fois symbolique et opérationnelle,
dans la mesure où il constitue l'une des pièces maîtresses de la
stratégie de la Banque visant à relancer la transition par le biais
d'un dialogue politique élargi. Cette initiative permet de recourir
au dialogue politique en vue de produire des effets de transition
au-delà de projets individuels, notamment en renforçant le lien
entre les investissements consentis par la BERD et les réformes
économiques devant être adoptées à un niveau sectoriel plus large
et au niveau du pays
. De ce
point de vue, la Banque a obtenu un succès remarquable en mai 2014
en signant avec les autorités kazakhes un Partenariat pour la relance
du processus de réforme au Kazakhstan (
Partnership
for Re-energising the Reform Process in Kazakhstan).
Le partenariat permet à la BERD, de concert avec d'autres institutions
financières internationales, de canaliser $US 2,7 milliards fournis
par le gouvernement vers des secteurs stratégiques de l'économie.
Cette mesure accroîtra la masse critique de la Banque dans le pays
et multipliera ainsi les occasions d'instaurer un dialogue politique
et de fournir une coopération technique. Selon le directeur exécutif de
la BERD, Olivier Descamps, le partenariat pourrait devenir un moyen
privilégié de favoriser les réformes axées sur les lois du marché
et, en cas de succès, servir de modèle à de nouvelles stratégies
de relance visant d'autres pays à revenu moyen
.
26. La BERD a été critiquée récemment pour son manque de transparence.
En 2013, la BERD a été classée par l'Indice de transparence de l'aide
(ATI) au niveau le plus bas parmi 67 institutions financières internationales
et organisations multilatérales du point de vue de la transparence.
D'après ATI, la Banque «a pour points faibles les indicateurs d'engagement
et les informations sur l'organisation et l'activité financières». L'Assemblée
parlementaire devrait donc encourager la BERD à adhérer à l'Initiative
internationale pour la transparence de l'aide (IITA) et à commencer
à publier des données suivant les normes de l'Initiative.
4. Faits économiques
et politiques marquants en 2013 et 2014
27. Dans son rapport annuel de 2013, la BERD relève que,
depuis le début des années 2000, plusieurs pays de la région en
transition ont assisté à un ralentissement de leurs progrès sur
la voie de la démocratisation
. Par
la suite, la crise financière a suscité un certain ressentiment
à l'égard de l'économie de marché, ce qui a retardé la mise en œuvre
des réformes axées sur les lois du marché. L'interrelation entre
les deux processus a incité la BERD à décrire certains pays relevant
de sa zone d'opérations comme bloqués à un niveau de réforme politique
et économique inférieur au niveau optimal
.
Au cours du deuxième semestre 2013 et du premier semestre 2014,
le public a manifesté – dans plusieurs pays de la région de transition
– son mécontentement et son désir d'une meilleure gouvernance. Le
malaise social a temporairement accru l'incertitude politique ce
qui, dans certains pays, s'est traduit par un ralentissement de
l'activité économique. Pourtant, ces épisodes constituent par ailleurs
autant d'occasions de rectifier l'agenda des réformes. Surtout, les
chances de succès des efforts visant à lancer une nouvelle vague
de réformes politiques et économiques dépendent également du leadership
et d'un soutien extérieur. C'est dans ces domaines que la BERD conserve un
rôle crucial.
4.1. La région d'opérations
de la BERD enregistre un progrès démocratique tout en étant soumise
à des tensions géopolitiques
28. En 2013 et 2014, l'évolution politique dans la région
d'opérations de la BERD a été contrastée selon les pays. Alors que
l'accroissement des tensions géopolitiques entre la Russie et l'Ukraine
et les défis inhérents à la transition politique en Egypte et en
Tunisie dominent l'actualité, les progrès sur la voie de la démocratisation sont
tangibles dans plusieurs autres pays. La Croatie est officiellement
devenue le 28e membre de l'Union européenne. En 2013, la Géorgie
et la République de Moldova ont signé un accord d'association avec
l'Union européenne en 2014. Des progrès notables ont également été
enregistrés en Asie centrale, notamment en Mongolie et en République
du Kirghizstan. En avril 2014, l'Assemblée parlementaire a accordé
le statut de Partenaire pour la démocratie au Parlement kirghize.
29. Dans la région des Balkans occidentaux, le processus de réconciliation
entre les différents pays se poursuit, même si les questions interethniques
posent toujours un sérieux défi. En février 2014, une série de manifestations
et de troubles sociaux s'est rapidement propagée en Bosnie-Herzégovine,
la population réclamant la fin de l'inertie politique caractéristique
de ce pays depuis la fin de la guerre. Les causes profondes de l'inaction
du gouvernement doivent être recherchées dans l'équilibre constitutionnel
fragile issu du processus de pacification mené après la guerre dans
l'ex-Yougoslavie. Ledit processus a conduit à l'établissement d'un
système de pouvoirs et de contre-pouvoirs peu propice à un fonctionnement
efficace de l'Etat. Dans sa stratégie par pays adoptée en janvier
2014, la BERD indique que la réforme du cadre constitutionnel de
la Bosnie-Herzégovine constitue une étape décisive vers la création
d'un Etat plus efficace et plus démocratique
.
30. En Turquie, le gouvernement a fermement réagi aux manifestations
publiques traduisant le mécontentement de la population face à la
démolition du parc Gezi à Istanbul en mai 2013. Cet incident a déclenché
une vague de protestations dénonçant principalement des atteintes
alléguées à la liberté d'expression et de réunion, laquelle a rapidement
gagné le reste du pays. En décembre 2013 et pendant les premiers
mois de l'année 2014, un scandale de corruption impliquant les associés
de certains ministres du gouvernement a de nouveau provoqué un tollé
général auquel le gouvernement a réagi en limitant provisoirement
l'accès aux réseaux sociaux. Pourtant, en mars 2014, le parti au
pouvoir a remporté les élections locales dans les principales villes
du pays et, depuis, l'agitation sociale diminue progressivement.
La BERD demeure fermement attachée à traiter les lacunes importantes
à la transition qui persistent dans ce pays.
31. Malgré des progrès enregistrés en République de Moldova, l'évolution
de la situation dans la Communauté des Etats indépendants (CEI)
soulève des préoccupations, en particulier en ce qui concerne la corruption,
le respect insuffisant de la prééminence du droit et des cas de
violations des droits de l'homme signalés par les organisations
internationales. L'absence de tout progrès démocratique au Bélarus
et au Turkménistan est signalée comme un facteur particulièrement
préoccupant dans le rapport annuel de 2013
. La
portée de l'engagement de la Banque dans ces deux pays se limite
à certains secteurs spécifiques de l'économie et elle est évaluée
par rapport à des objectifs intermédiaires (politiques et économiques)
précis, dans le contexte de ce qu'il convient d'appeler la politique
d'approche calibrée.
32. La BERD a réagi à l'évolution de la situation enregistrée
en Ukraine pendant le premier semestre 2014 en affirmant sa volonté
de renforcer à la fois son engagement financier dans le pays et
les initiatives visant à instaurer un dialogue politique avec les
autorités. Les investissements de la Banque dans le pays devraient augmenter
pour atteindre environ 1 milliard d'euros par an dans le cadre d'un
programme international d'aide financière
. En mai 2014, la BERD a signé un
protocole d'accord avec le gouvernement en faveur de l'Initiative
anticorruption ukrainienne. Le volet essentiel de ce dispositif
de détection de la corruption et de renforcement de la transparence
est la création d'un ombudsman commercial indépendant auprès de
qui les entreprises pourraient porter plainte en cas de traitement
inéquitable
.
33. En ce qui concerne son engagement en Russie, la BERD n'a pris
aucune décision formelle à propos de l'ampleur de ses opérations
dans le pays après la crise de Crimée. Pourtant, on s'attend à ce
que l'économie russe ralentisse en raison de l'accroissement des
tensions géopolitiques. Cette évolution pourrait provoquer une réduction
supplémentaire des investissements de la BERD dans le pays, lesquels
étaient déjà passés de 2,6 à 1,8 milliard d'euros en raison de la
détérioration des conditions d'investissement. Pendant son discours devant
l'assemblée générale annuelle de 2014, le président Chakrabarti
a rappelé le concept de gestion souple qui permet à la Banque de
réaffecter à d'autres pays les capitaux inutilisés résultant de
la diminution des investissements dans une région
.
34. Dans la SEMED, les réformes politiques ont progressé régulièrement,
non sans quelques difficultés. En Jordanie et au Maroc, le rôle
des parlements élus a été renforcé par l'adoption de réformes supplémentaires. Après
une période d'impasse politique, la Tunisie a fini par adopter en
février 2014 une nouvelle Constitution, perçue comme une étape importante
dans la transition de ce pays vers la démocratie. En Egypte, les
progrès ont été plus inégaux. La période de transition politique
ayant suivi le soulèvement de 2011 a été interrompue par des manifestations
de masse contre le président Mohamed Morsi. La déposition de ce
dernier en juin 2013 a été suivie d'une période prolongée de tensions
politiques et d'agitation sociale. Une nouvelle feuille de route pour
le processus de transition a finalement été adoptée en décembre
2013. Ces événements ont conduit à l'approbation d'une nouvelle
Constitution dans le cadre d'un référendum organisé en février 2014
et à l'élection, fin mai 2014, d'Abdel Fattah al-Sissi en qualité
de nouveau Président de la République. Des élections parlementaires
se tiendront en octobre 2014. Bien que la période analysée ait été
dominée par une incertitude politique, la BERD a réalisé des progrès
notables dans la conduite de ses opérations dans la SEMED. Même si
son statut reste celui d'un pays bénéficiaire potentiel, l'Egypte
a bénéficié d'investissements réalisés par l'intermédiaire du Fonds
d'investissement spécial SEMED-BERD. Parallèlement, la Jordanie,
le Maroc et la Tunisie se sont vu accorder le statut de pays bénéficiaire
en novembre 2013. En 2011, l'Assemblée parlementaire a accordé au
Parlement du Maroc le statut de Partenaire pour la démocratie, et
le Parlement de Jordanie a aussi demandé ce statut.
4.2. Accroissement de
l'incertitude et des risques entourant les perspectives de croissance
35. A l'exception de la Russie, la Turquie et la Pologne,
la région de transition se compose de pays dotés d'une économie
relativement modeste qui les rend vulnérables aux événements extérieurs.
Cette faiblesse s'est révélée dans toute son ampleur au lendemain
de la crise financière, lorsque la région a été atteinte de plein
fouet par l'effondrement du commerce mondial et le retrait des capitaux
étrangers. Alors que les échanges commerciaux ont rebondi en 2009-2010,
le processus de désendettement transfrontalier (à savoir le retrait
par les banques appartenant à des intérêts étrangers des fonds investis
dans la région) se poursuivait encore, bien qu'à un rythme moins
soutenu. Globalement, la production économique annuelle a augmenté
de moins de 3 % tant en 2012 qu'en 2013. En mai 2014, en raison
notamment des tensions entre la Russie et l'Ukraine, le Bureau de
l’économiste en chef a prévu une baisse supplémentaire, de sorte
que l'augmentation de la production ne devrait plus atteindre que
1,4 % en 2014
.
36. Lorsqu'on analyse de plus près la dynamique de la croissance,
il apparaît que, en 2013, la diminution des tensions financières
dans la zone euro a bénéficié aux pays entretenant des liens étroits
avec l'union monétaire. La reprise progressive de l'activité économique
dans la zone euro se reflète dans l'augmentation importante des
taux de croissance en Europe du Sud et de l'Est, lesquels ont atteint
2,7 % du Produit Intérieur Brut (PIB) en 2013 comparés à 0,4 % en
2012. Ceci, en dépit du fait que le désendettement transfrontalier
ne s'est pas arrêté dans les régions de l'Europe du Sud et de l'Est
et de l'Europe centrale et balte, ce qui retarde d'autant plus la
reprise du crédit. Au nombre des circonstances positives, il convient
cependant de signaler que la plupart de ces financements revêtaient
la forme de prêts en devises étrangères et que les prêts en devise locale
– qui épargnent à l'emprunteur les risques inhérents à la fluctuation
des taux de change – ont augmenté dans plusieurs pays, dont la Pologne,
la Hongrie, la Bulgarie et «l'ex-République yougoslave de Macédoine». L'incertitude
politique continue cependant à peser fortement sur la croissance
dans d'autres régions d'opérations de la BERD. En Ukraine, l'agitation
sociale naissante pendant les derniers mois de l'année 2013 a contribué
à miner encore davantage la confiance – déjà ébranlée – des consommateurs
et des milieux d'affaires, ce qui s'est traduit par une stagnation
de la production en 2013. La croissance de la production dans la
région de la SEMED en 2013 s'est avérée légèrement inférieure aux
prévisions en raison de bouleversements intervenus tant au niveau
national que régional.
37. L'expansion économique a été freinée en Europe de l'Est et
dans le Caucase, dans la mesure où la détérioration de l'environnement
extérieur – limitée auparavant à la partie occidentale de la région
de transition – a gagné sa partie orientale. Cette tendance traduit
principalement l'évolution de l'économie mondiale. En mai 2013,
la Réserve fédérale américaine a annoncé son intention de réduire
prochainement ce qu'il est convenu d'appeler le programme d'assouplissement
quantitatif, à savoir un mécanisme d'achat massif d'avoirs déclenché
cinq ans auparavant en réaction à la crise financière. L'assouplissement
quantitatif ayant contribué à accroître les flux de capitaux à court
terme vers les économies de marché émergentes, la simple annonce de
sa réduction partielle a provoqué une volatilité des marchés financiers
des pays concernés et une inversion des flux financiers. En raison
notamment de l'incertitude accrue entourant les futures variations
de la politique monétaire internationale, les principaux marchés
émergents – au nombre desquels il convient de citer la Chine, l'Inde
et la Russie – ont connu une baisse de leur activité économique,
ce qui a contribué à une réduction de la demande extérieure dans
les pays voisins. Au cours du troisième trimestre 2013, les flux
de capitaux privés sont devenus négatifs dans la région de la BERD.
La volatilité accrue et l'inversion des flux de capitaux se reflètent
particulièrement dans la dépréciation des devises des pays qui dépendaient
des flux en provenance de l'étranger, comme la lire turque et le
tögrög mongol, lesquelles ont perdu environ 15 % de leur valeur
par rapport au dollar des Etats-Unis au cours de la période de sept
mois allant du 13 mai au 13 décembre 2013.
38. A l'exception de l'Europe du Sud et de l'Est et de la SEMED,
qui devraient bénéficier de la reprise en Europe, les perspectives
de croissance économique en 2014 et en 2015 dans la région de transition
sont assombries par les tensions géopolitiques entre l'Ukraine et
la Russie. La volatilité des marchés financiers augmente au fur
et à mesure que la crise de Crimée s'envenime. Le montant des capitaux
ayant fui la Russie au cours du premier trimestre 2014 équivaut
au montant total des capitaux sortants pour l'ensemble de l'année 2013.
La pression à la baisse sur le rouble russe s'accroît, tandis que
la bourse de Moscou plonge. En conséquence, la confiance des investisseurs
et des milieux d'affaires diminue et, selon les prévisions, la croissance
économique devrait cesser en 2014 et demeurer faible en 2015. En
Ukraine, la dépréciation de la devise et la détérioration des indicateurs
de risque n'ont connu qu'un faible répit début mai 2014 lorsque
le gouvernement a signé un accord préliminaire sur un programme
international d'ajustement macro-économique dirigé par le Fonds
monétaire international (FMI). En raison de la mise en œuvre des
réformes structurelles envisagées dans le programme, l'Ukraine devrait
voir sa production nettement baisser en 2014 et stagner en 2015.
39. L'accroissement des tensions géopolitiques entre la Russie
et l'Ukraine aura probablement également des répercussions sur les
pays voisins. La région de l'Europe du Sud et de l'Est devrait souffrir
directement des conséquences négatives sous l'angle économique et
financier. Le Bureau de l'économiste en chef a révisé à la baisse,
en mai 2014, ses prévisions de croissance dans la région pour 2014
lesquelles sont passées de 2 % à -2,6 % du PIB
.
Dans la région de l'Europe centrale et balte, l'accroissement des
tensions géopolitiques devrait neutraliser l'effet positif de la
reprise de la demande extérieure en provenance de la zone euro et
des premiers signes d'une reprise des investissements privés. La
crise de Crimée pourrait affecter la croissance dans la région,
essentiellement par le biais des liens commerciaux avec la Russie
et, aussi, parce que certaines préoccupations en matière de sécurité
énergétique se font jour, notamment en raison des incertitudes entourant
l'approvisionnement en gaz. La croissance prévue par la BERD dans
la région de l'Europe centrale et balte est de 2,2 % du PIB en 2014.
Dans la région de l'Asie centrale, les perspectives ont été assombries
par deux facteurs: la diminution des transferts de fonds en provenance
de Russie et la contagion sur les marchés financiers et monétaires,
laquelle transparaissait déjà dans la dévaluation des devises des
pays entretenant des liens étroits avec la Russie, comme la République
du Kirghizstan et le Kazakhstan. Toutefois, la BERD estime toujours
que la croissance dans la région d'Asie centrale atteindra en moyenne
6,2 % en 2014
.
40. En ce qui concerne la politique macro-économique, l'évolution
dans la région de transition en 2013 et 2014 reflète des tendances
globales plus importantes. La politique monétaire demeure conciliante
dans la plupart des pays d'opérations de la BERD, grâce notamment
aussi à la diminution du taux d'inflation. Cette diminution s'explique
à son tour par l'abaissement des prix des produits de base, une
croissance plus faible dans les principaux marchés émergents et
un fort taux de chômage dans les économies développées. Parmi les
exceptions notables, il convient de citer la Russie et la Turquie
dans lesquelles l'inflation demeure supérieure à l'objectif que
s'est fixé la Banque centrale. Les preuves en matière de politique
fiscale sont moins évidentes. Tous les Etats membres de l'Union
européenne continuent de déployer des efforts de consolidation en
vue de se conformer aux règles fiscales communautaires. Toutefois,
le solde primaire – une mesure de la position budgétaire du gouvernement
– s'est détérioré dans certains pays en raison d'une diminution
des recettes due à un ralentissement de l'activité économique. Le
solde primaire s'est également détérioré dans plusieurs pays exportant
des matières premières en raison d'une réduction des revenus générés
par ces activités. Les déficits fiscaux sont demeurés relativement
importants en Egypte et en Tunisie en raison d'une augmentation
des dépenses et de l'incapacité des pouvoirs publics à réformer
les régimes de subventionnement de l'énergie.
5. Réaction de la
BERD à l'essoufflement de la transition
5.1. Conséquence du
ralentissement de la croissance: soutien plus mitigé du public aux réformes
axées sur les lois du marché
41. La période prolongée de croissance ralentie ayant
suivi la crise financière mondiale a profondément affecté les chances
de la région de transition de la BERD de s'aligner sur le niveau
de vie des économies de marché avancées. La principale raison économique
pour laquelle la croissance dans la région est tombée et demeure
au-dessous des niveaux antérieurs à la crise est bien comprise et
tient au déclin persistant des flux de capitaux internationaux affluant
dans la région. Selon le Bureau de l'économiste en chef, pourtant,
le remède à ce malaise économique ne saurait tenir à un retour des
flux de capitaux au niveau antérieur à la crise, dans la mesure
où ledit niveau correspondait souvent à celui de bulles d'investissement
insoutenables à terme. La BERD est donc davantage préoccupée par
l'absence de volonté politique de mettre en œuvre les réformes structurelles
essentielles pour améliorer les institutions propices au développement
des marchés et renouer avec la croissance. Comme indiqué dans le
rapport sur la transition de 2013, les réformes s'étaient déjà essoufflées
à compter de 2005, soit avant l'éclatement de la crise financière,
et la période de croissance ralentie ayant suivi ladite crise reflète
ce problème plus structurel
.
42. L'augmentation du chômage de longue durée apportée par la
crise et la période prolongée d'austérité budgétaire souvent prônée
par des organismes supranationaux ont érodé la confiance du public
dans les réformes axées sur les lois du marché. Une partie des pays
les plus avancés de la région de transition ont même inversé leur
réforme. Par exemple, la Hongrie et la Bulgarie ont abaissé le tarif
de certains services publics, ce qui s'est traduit par une chute
des prix de l'énergie à des niveaux inférieurs à celui qui permettrait de
recouvrer les coûts. Une telle situation pourrait décourager les
investissements dans le secteur et faire peser le risque d'une baisse
de la compétitivité économique. Des retards dans les privatisations,
la renationalisation de banque et l'ingérence accrue de l'Etat dans
l'économie sont autant d'initiatives allant dans ce sens adoptées
dans plusieurs pays, dont la Russie, l'Ukraine, le Kazakhstan et
la Lettonie. En Pologne et en Hongrie, le marché des capitaux a
souffert de l'adoption par le gouvernement d'une législation éliminant
de fait la partie du régime de retraite financée intégralement par
des capitaux privés.
43. Le Bureau de l'économiste en chef a élaboré ce qu'il est convenu
d'appeler des indicateurs de transition, afin d'évaluer le passage
à une économie de marché ouverte. Au niveau national, il a procédé
à 11 rétrogradations dans la région de transition de la BERD entre
2010 et 2013, dont six visaient des Etats membres de l'Union européenne.
Pendant l'année 2013, le nombre des rétrogradations a dépassé celui
des promotions dans la région pour la première fois depuis l'établissement
de la Banque
. Le fait
que la majorité des rétrogradations ait affecté les pays les plus
avancés n'est pas totalement surprenant. En raison des liens étroits
avec l'Europe de l'Ouest, la crise s'est surtout fait sentir dans
les régions de l'Europe centrale et balte et de l'Europe du Sud
et de l'Est. En outre, dans bon nombre de ces pays, la crise semble
avoir été attribuée aux institutions économiques qui prévalaient
à l'époque, ce qui explique les préventions à l'encontre du libre marché.
Pourtant, les réformes structurelles étaient perçues comme un élément
crucial de la stratégie visant à parvenir à une convergence. A en
croire les prévisions à long terme établies par le Bureau de l'économiste en
chef, si les pays avaient relancé leur réforme, ils auraient pu
accroître leur croissance annuelle dans une proportion variant entre
0,8 % et 1,5 % du PIB à long terme. Le défi inhérent à une telle
politique peut se résumer comme suit: pour relancer la croissance,
il est nécessaire d'aiguiser l'appétit de réformes structurelles. Toutefois,
ceci devrait se faire au cours d'une période pendant laquelle le
soutien en vue de telles réformes diminue, précisément en raison
du ralentissement de la croissance.
5.2. Redynamiser la
transition: lignes directrices à moyen terme et cinquième évaluation
des ressources en capital de la Banque
44. Pendant l'assemblée générale annuelle de 2014, le
président Chakrabarti a dévoilé une approche reposant sur trois
piliers – élaborée conjointement par le conseil d'administration
et la haute direction – en vue de redynamiser la transition dans
la région de la BERD. Cette approche relève d'une stratégie plus
complète connue sous le nom de «lignes directrices à moyen terme»
[
medium-term directions] formant
la base de la discussion autour de la
Fifth
Capital Resources Review [Cinquième évaluation des ressources
en capital de la Banque] et couvrant la période allant de 2016 à
2020. Lors de la présentation de ces lignes, le président Chakrabarti
a souligné que, pour être la plus efficace possible la Banque est
tenue d'affiner son modèle commercial; il a aussi explicitement
mentionné la nécessité d'accroître la capacité de prise de risque
de la BERD
.
45. La nouvelle stratégie s'articule autour de trois axes majeurs.
Le premier vise la nécessité de rendre résilient le processus de
transition, surtout sous l'angle des institutions et des structures
économiques. La BERD comprend parfaitement la nécessité de réveiller
l'intérêt pour les réformes basées sur les lois du marché pour faciliter
la transition. En définitive, cependant, c'est aux gouvernements
qu'il appartient d'adopter les politiques requises en ce sens. Pourtant,
la Banque a toujours un rôle décisif à jouer dans la formulation
et la promotion de ces politiques. En outre, grâce à sa longue expérience
acquise dans la région, elle occupe une position privilégiée lui
permettant de repérer et de financer les projets susceptibles d'avoir
un impact durable sur la transition, dès lors que des politiques
et des institutions appropriées ont été mises en place. Les lignes directrices
à moyen terme visent précisément ces deux éléments – la formulation
de réformes politiques et le financement de projets essentiels –
dans le but de permettre à la Banque de contribuer à l'amélioration
des structures et des institutions économiques
.
46. Le deuxième objectif des lignes directrices à moyen terme
est de renforcer l'intégration économique dans la région de transition.
Outre qu'elle contribuerait à relancer la croissance, une telle
intégration pourrait aider à prévenir l'inversion du processus de
transition, dans la mesure où le coût de l'annulation d'une réforme est
plus important dans les économies davantage interconnectées. Concrètement,
la Banque pourrait intervenir dans ce secteur de deux manières:
en finançant des projets visant à développer les infrastructures transfrontières
et en introduisant de nouveaux investisseurs internationaux dans
la région.
47. Enfin, la nécessité de relever des défis communs à tous les
pays de la planète – comme la sécurité alimentaire, le changement
climatique, la raréfaction de l'eau et la sécurité énergétique –
constitue le troisième axe essentiel de la stratégie
.
La BERD s'est déjà confrontée à ces défis et a pour ambition de
renforcer son engagement. C'est ainsi qu'elle a réagi à l'augmentation
des prix des denrées alimentaires entre 2010 et 2012 en augmentant
ses investissements dans le secteur agroalimentaire. En outre, dans
le but de réduire les émissions de carbone et de rendre les pays
de la région d'opérations plus efficaces et indépendants sur le
plan énergétique, la BERD a lancé en 2006 une politique dite
Sustainable Energy Initiative [Initiative
pour une énergie durable] dans le cadre de laquelle elle a investi
13,5 milliards d'euros dans divers projets dans le secteur de l'énergie
durable entre 2006 et 2013.
48. Les lignes directrices à moyen terme ne se limitent pas aux
trois thèmes mentionnés ci-dessus. Un élément important de la nouvelle
stratégie vise la répartition géographique planifiée des activités
de la Banque. A cet égard, lesdites lignes reflètent un consensus
sur l'abandon progressif des investissements dans les sept pays
bénéficiaires de la BERD ayant rejoint l'Union européenne en 2004,
dans le cadre de ce qu'il est convenu d'appeler la «politique de
graduation». Il n'est pas précisé cependant si cette sortie est
censée se produire pendant la période couverte par la cinquième
évaluation des ressources en capital de la Banque. Afin de rendre
le processus de graduation à la fois plus facile et politiquement
attrayant, la Banque œuvre également à la création d'un Fonds spécial
de post-graduation auquel ces pays pourront accéder après avoir
été gradués en vue d'obtenir un financement pour des projets d'investissement
transfrontières. Ce fonds bénéficiera également à la République
tchèque, c'est-à-dire le seul membre de la BERD ayant été effectivement
gradué en 2007. Alors que la BERD compte réduire progressivement
le volume de ses opérations dans la partie occidentale de la région
de transition, les lignes directrices à moyen terme maintiennent
l'orientation générale vers un accroissement des opérations dans
les parties orientale et méridionale de ladite région. Enfin, la nouvelle
approche en matière de répartition géographique planifiée vise également
à accroître la souplesse avec laquelle la Banque peut réagir aux
transformations de l'environnement économique dans la région. Soulignons
que la détermination de l'ampleur de cet accroissement de la souplesse
se fait toujours sous l'égide du conseil d'administration.
49. La Banque travaille aussi actuellement à la modernisation
de son processus de planification. Concrètement, ce processus consiste
à adopter tous les trois ans un Plan de mise en œuvre stratégique (Strategic Implementation Plan ou
SIP). A l'heure actuelle, les lignes directrices résumant les activités
de la banque à moyen terme sont exposées dans un document intitulé
«Evaluation des ressources en capital de la Banque» (Capital Resource Review ou CRR)
couvrant une période de cinq ans, tandis que les modalités de leur
mise en œuvre sont définies dans le Plan d'activités annuel (Annual Business Plan ou ABP). L'inconvénient
de cette approche tient à ce qu'elle ne permet guère de modifier
l'orientation stratégique. Par conséquent, dans certains cas, la
Banque a dû s'écarter de son plan original tel qu'il est exposé
dans la CRR. L'exemple le plus notable est celui du report de la
sortie des pays bénéficiaires ayant rejoint l'Union européenne en
2004 de la liste des pays aidés par la BERD, laquelle était initialement
prévue pour la période couverte par la Troisième évaluation des
ressources en capital de la Banque (2006-2010). La réforme visait
à assouplir le processus de planification en autorisant l'insertion
dans le SIP d'une partie des tâches normalement répertoriées dans
la CRR et l'ABP de manière à alléger ces deux derniers documents.
Une telle mesure atténuerait le caractère normatif de la CRR et
contribuerait ainsi à améliorer l'alignement des priorités de la
Banque sur les contraintes résultant de l'environnement dans lequel
elle opère.
6. Progrès démocratique
des pays bénéficiaires
50. En février 2013, la BERD a révisé ses processus et
procédures relatifs à la mise en œuvre des aspects politiques de
son mandat. Les opérations de la Banque – conçues pour favoriser
le développement du secteur privé et réduire les écarts en matière
de transition économique – n'assurent qu'indirectement la promotion
de la transition démocratique. Il s'ensuit que la Banque n'évalue
ni les contributions potentielles ni l'impact des projets individuels
sur le renforcement de la démocratie multipartite. Néanmoins, le
progrès démocratique est reconnu comme étant étroitement lié à l'objectif
principal des opérations de la BERD, à savoir promouvoir la transition
vers une économie de marché ouverte. Pour cette raison, les évaluations
politiques font partie intégrante des stratégies triennales par
pays et des mises à jour annuelles desdites stratégies.
6.1. La réforme axée
sur les lois du marché contribue-t-elle à promouvoir la démocratie?
La théorie à l'épreuve des faits dans la région de transition
51. La réforme axée sur les lois du marché est généralement
censée avoir de profondes implications politiques et institutionnelles.
Plus spécialement, le développement économique est souvent associé
à la consolidation des institutions démocratiques et au renforcement
des capacités institutionnelles. Cela étant, transition économique
et transition démocratique ne vont pas toujours de pair. En particulier,
même si la corrélation entre développement économique et démocratie
est actuellement étroite, elle n'implique pas pour autant une relation
de cause à effet.
52. Dans la mesure où le mandat de la BERD consiste à favoriser
la transition vers une économie de marché ouverte dans les pays
s'étant engagés à respecter les principes de la démocratie multipartite,
la nature de la relation entre développement économique et politique
est devenue extrêmement pertinente. Si les transitions économiques
et politiques étaient connues pour être deux processus distincts,
d'aucuns pourraient s'attendre à ce que la BERD opère uniquement
dans les pays appliquant déjà les principes de la démocratie multipartite. Par
ailleurs, au cas où la réforme axée sur les lois du marché devrait
faciliter la transition politique vers un système plus démocratique,
la BERD pourrait légitimement vouloir opérer également dans les
pays non démocratiques. En réalité, la Banque déploie ses activités
à la fois dans des pays pleinement démocratiques – comme ceux ayant
déjà adhéré à l'Union européenne – et dans d'autres où la démocratie
n'est pas encore totalement instaurée, comme le Bélarus et le Turkménistan,
ce qui semblerait suggérer que la transition politique est censée
découler du développement économique.
53. Lors de la réunion de la sous-commission sur les relations
avec l'OCDE et la BERD qui s'est tenue au siège de la Banque en
février 2014, nous avons en particulier interrogé la Banque sur
son point de vue concernant le fait qu'elle aide des pays qui n'œuvrent
pas en faveur de la démocratie et donne une crédibilité à certains
pays qui ne la méritent pas. Il nous a été répondu que si le but
de la Banque n'était pas de promouvoir la démocratie et si démocratie
et économie de marché n'allaient pas toujours de pair, la Banque souhaitait
toutefois la convergence de ces pays à long terme. Il nous a aussi
été indiqué que le conseil d'administration de la Banque estimait
que ce ne serait pas aider ces pays que de leur tourner le dos.
54. L'édition 2013 du rapport sur la transition consacre un chapitre
entier à l'analyse d'ouvrages et de documents expliquant la relation
entre les marchés et la démocratie et à la question de savoir si
les principales conclusions énoncées par les auteurs peuvent s'appliquer
à la région de transition. Une bonne partie de cette littérature
prétend, statistiques à l'appui, que la prospérité, l'industrialisation,
l'urbanisation et l'éducation sont associées au renforcement des
systèmes démocratiques. Sur la base de cette conclusion, les tenants
de la théorie bien connue de la modernisation considèrent le développement
économique -exprimé en termes de niveau de revenu par habitant –
indispensable à la création d'une classe moyenne aisée et politiquement
active en mesure d'exiger et d'appuyer une réforme démocratique.
L'une des autres voies importantes par lesquelles le développement
économique est supposé bénéficier à la démocratisation est le taux
supérieur de réussite scolaire caractéristique des pays dotés d'un
PIB plus important par habitant, la raison tenant à ce que l'éducation
influence positivement la perception de la démocratie par les individus.
55. Par ailleurs, une autre école de pensée maintient que c'est
l'égalité économique, plutôt que le développement économique en
soi, qui favorise l'avènement et le maintien de systèmes démocratiques.
En particulier, dans un pays où l'inégalité règne en maître, la
petite minorité contrôlant l'essentiel des richesses préfère un
régime autoritaire servant ses intérêts plutôt qu'un régime démocratique
défendant les intérêts de la majorité de la population. Cette thèse
s'appuie bien entendu sur l'hypothèse selon laquelle la majorité
moins bien lotie ferait tout pour obtenir une redistribution des
richesses en votant pour des partis défendant ses intérêts et pour
exiger une réforme du système fiscal, à supposer qu'elle puisse
faire entendre sa voix comme c'est le cas dans les systèmes démocratiques
.
56. En recourant à des données internationales, le rapport sur
la transition de 2013 procède à une enquête empirique sur la relation
entre développement économique et développement démocratique avant
de conclure que la réforme axée sur le marché et la croissance économique
semble globalement bénéficier à la démocratisation à long terme
et réduire le risque d'une régression par rapport à l'acquis démocratique.
Cette conclusion est plus nuancée au vu des éléments spécifiques
en provenance de la région de transition. Pendant une longue période,
l'impact de la croissance économique sur le renforcement de la démocratie
est demeuré faible. Cela n'a rien d'étonnant dans la mesure où la
plupart des pays situés dans la région de la BERD ont connu pendant
cette époque un développement économique tout en relevant d'Etats
ou d'empires non démocratiques jusqu'en 1989. La situation change
du tout au tout lorsqu'on examine uniquement la période comprise
entre 1989 et 2012. Le rapport sur la transition de 2013 estime
que le succès des pays étant parvenus à renforcer leur démocratie
est dû en grande partie à une croissance économique ralentie, et
peut-être plus encore à l'adoption de réformes axées sur les lois
du marché. Il convient de noter que le niveau d'égalité économique
– tel qu'il est mesuré par le coefficient de Gini – ne semble pas
jouer un rôle déterminant
.
57. Plusieurs mises en garde s'imposent néanmoins. Globalement,
les pays dotés de ressources naturelles importantes ont moins de
chance d'arriver à un système démocratique, même après avoir réussi
leur développement économique. Cette règle vaut également pour la
région de la BERD dans laquelle les pays où le secteur de l'extraction
de ressources naturelles représente une part importante du PIB ont
atteint un niveau de démocratie largement inférieure à celui auquel
on pourrait s'attendre contenu de l'état de développement de leur
économie. Les revenus importants générés par le secteur de l'extraction
rendent les autorités moins dépendantes du régime fiscal pesant
sur l'ensemble de la population, ce qui se traduit par une diminution
des pressions en faveur d'une responsabilité accrue à l'égard des
contribuables et notamment de la création d'institutions plus démocratiques.
58. En outre, ces revenus importants permettent aux autorités
de maintenir un consensus en procédant à une redistribution par
le biais de l'octroi de subventions à la population, ce qui se traduit
par un affaiblissement des revendications en faveur d'une réforme
politique. La banque devrait donc particulièrement tenir compte, au
moment d'élaborer sa politique, du fait qu'une partie de ces pays
bénéficiaires sont dotés de stocks importants de ressources naturelles,
ce qui pourrait entraver leur progrès démocratique. L'engagement
de la Banque dans ces pays se concentre particulièrement sur le
renforcement des capacités institutionnelles, par le biais de l'encouragement
au dialogue politique et à la diversification économique, dans le
cadre du financement de projets visant des secteurs autres que ceux
liés aux activités d'extraction des ressources naturelles: une orientation
cruciale pour renforcer les autres secteurs de l'économie et contribuer
ainsi à réduire la dépendance de la population à l'égard des subventions
financées par les revenus générés par lesdites activités. Le développement
d'institutions solides est essentiel afin de garantir que les revenus exceptionnels
provenant des activités d'extraction soient utilisés pour financer
des investissements productifs qui sont bénéfiques à la croissance
économique, plutôt que pour une redistribution basée sur un consensus.
59. Le rapport sur la transition de 2013 conclut que les effets
du développement économique sur le processus de démocratisation
ne se feront concrètement sentir probablement qu'au bout de 10 à
20 ans. A court terme, la croissance économique pourrait même accroître
les chances de survie des régimes non démocratiques. Par conséquent,
les tenants du développement international doivent faire preuve
de patience et de persévérance dans leur soutien aux réformes axées
sur les lois du marché, dans la mesure où un tel effort ne peut
porter ses fruits sous l'angle de la promotion du progrès démocratique
que de manière graduelle
.
6.2. Degré de transition
atteint par les pays bénéficiaires en fonction du nombre d'investissements
réalisés par la BERD
60. L'absence d'évaluation de la contribution potentielle
des projets individuels à la démocratisation complique l'établissement
d'une relation de cause à effet entre le volume des investissements
de la BERD dans un pays bénéficiaire et le degré de transition atteint
par celui-ci. Par ailleurs, une simple comparaison des indicateurs
pertinents de gouvernance démocratique entre 1992 et 2012 laisse
à penser que quelques pays – qu'ils soient situés ou non dans la
région d'opérations de la BERD – ont connu des changements significatifs de
leur niveau de démocratie.
61. Le tableau de la figure 1 montre l'évolution du niveau de
démocratie, tel qu'il a été mesuré dans le cadre du projet Polity
entre 1992 et 2012, à la fois pour les pays en transition et les
autres. Ce projet fournit des séries de données couramment utilisées
dans les recherches en sciences sociales. Son analyse porte sur
la catégorie d'administration politique la plus formelle, c'est-à-dire
sur le fonctionnement des Etats dans le système mondial moderne.
La démocratie est définie comme la présence de trois éléments indépendants: l'existence
d'institutions et de procédures permettant aux citoyens d'exprimer
de manière effective des préférences entre des politiques et des
dirigeants; l'existence de contraintes sur l'exercice du pouvoir
par l'exécutif; la garantie des libertés civiles.
62. Les conclusions du projet Polity sur le niveau de démocratie
des Etats reposent sur l'évaluation de: i) la compétitivité du recrutement
de l'exécutif; ii) l'ouverture du recrutement de l'exécutif; iii)
l'existence de contraintes pour le chef de l'exécutif et; iv) la
compétitivité de la participation politique. Un score Polity compris entre
-10 et +10 est défini chaque année et pour chaque pays. Les valeurs
comprises entre -10 et -6 caractérisent les autocraties, entre -5
et 5, les anocraties et entre 6 et 10, les démocraties. Les pays
situés au-dessus de la ligne pointillée ont connu un renforcement
de la démocratie; dans les autres, la situation de la démocratie
s'est dégradée. Le Turkménistan et l'Ouzbékistan étaient déjà si
peu démocratiques en 1992 que la situation ne pouvait s'aggraver,
et ils ont donc conservé leur position tout en bas de l'échelle.
Le Bélarus, l'Azerbaïdjan et le Kazakhstan, dans cet ordre, ont
connu les pires évolutions, le Bélarus chutant de 15 points (+7
à -7). Le Kirghizistan a connu l'une des évolutions les plus positives,
passant de -3 à +7.
Figure 1: Evolution du niveau
de démocratie entre 1992 et 2012
Source: Rapport de 2013 de la BERD sur la transition, p. 26
63. En 1992, la démocratie s'était déjà renforcée dans
la plupart des pays qui allaient adhérer par la suite, en 2004,
à l'Union européenne, ce qui explique qu'ils n'ont pas pu procéder
à des améliorations notables au cours de la période considérée.
Le fait que la démocratie se soit propagée dans la partie occidentale
de la région de transition peu après la chute du mur de Berlin n'est
guère surprenant. Dotés d'une population disposant d'un niveau d'instruction
élevé et d'une économie largement fondée sur la production de biens manufacturés,
lesdits pays disposaient déjà d'un environnement propice au renforcement
de la démocratie. La chute du mur a donc constitué pour eux une
chance de procéder à une transition politique ordonnée. On peut faire
une analyse analogue pour les pays du Sud et de l'Est de l'Europe,
dont la transition démocratique a résulté essentiellement d'un choc
important tel que la dissolution de l'ancienne Yougoslavie. Par
ailleurs, la Russie et l'Ukraine ont débuté avec des indicateurs
démocratiques relativement élevés en 1992, mais ne sont pas parvenues
à progresser davantage. Cette situation pourrait constituer un exemple
de la manière dont une alliance entre l'ancienne élite et une nouvelle
classe d'entrepreneurs politiques est parvenue à conserver ou à acquérir
le contrôle des secteurs stratégiques de l'économie, notamment ceux
basés sur l'extraction de ressources naturelles.
64. Les républiques d'Asie centrale constituent peut-être le cas
le plus intéressant à analyser. Ces pays n'ont amorcé leur transition
qu'avec un niveau de développement démocratique faible et une économie reposant
largement sur l'agriculture et l'extraction de ressources naturelles.
Certains, comme l'Ouzbékistan et le Turkménistan, n'ont expérimenté
quasiment aucun changement, tandis que d'autres (comme la Mongolie
et la République du Kirghizstan) ont réalisé des progrès importants
ou bien ont reculé (c'est le cas notamment du Kazakhstan et de l'Azerbaïdjan).
Sauf en ce qui concerne la République du Kirghizstan, le taux d'investissement
de la BERD dans la région d'Asie centrale semble être corrélé d'une
certaine manière aux performances démocratiques des pays concernés.
65. Fait primordial, la Mongolie bénéficie du taux d'investissement
le plus important de la BERD pour la région de transition, puisque
la Banque y a investi en moyenne 32 € par an et par personne au
cours des huit années où elle a opéré dans le pays. A titre informatif,
elle n'a investi pendant la même période qu'un euro en Ouzbékistan
et deux euros au Turkménistan. Un fort taux d'investissement annuel
par habitant – compris entre 18 (en Slovénie) et 29 euros (au Monténégro)
– caractérise également les pays de la région de l'Europe du Sud
et de l'Est qui ont tous vu leurs indicateurs démocratiques progresser
entre 1992 et 2012. Au Bélarus, en Azerbaïdjan et au Kazakhstan,
c'est-à-dire les pays ayant connu l'évolution la plus négative sous
l'angle de leurs indicateurs démocratiques, le taux d'investissement
de la BERD a été de 7, 10 et 14 euros par an, respectivement.
66. Ces chiffres indiquent effectivement, dans une certaine mesure,
l'existence d'une corrélation positive entre les investissements
de la Banque dans les pays bénéficiaires et les progrès démocratiques
réalisés par ces derniers. Il convient cependant de souligner qu'il
s'agit là de chiffres approximatifs ne tenant pas compte de certains
aspects importants comme la taille économique des pays et les problèmes
potentiels de causalité renversée
.
Ils ne sauraient par conséquent être invoqués pour déduire une relation
de cause à effet entre les investissements de la BERD et les progrès
démocratiques.
7. Considérations
spécifiques aux activités de la BERD
7.1. Opérations dans
la partie méridionale et orientale du bassin méditerranéen: première évaluation
67. La percée politique survenue dans les pays de la
SEMED en 2011 est davantage le résultat d'un processus interne que
d'une évolution induite par des interventions extérieures. Après
une longue période de régime non démocratique, des manifestations
de masse en faveur d'une plus grande égalité des chances ont amené
une ère de changement. Les événements qui ont suivi ont constitué
une occasion unique de favoriser à la fois le développement économique
et politique.
68. Le succès du processus de transition dépend cependant de plusieurs
facteurs. Les problèmes auxquels est confrontée la nouvelle région
de transition diffèrent considérablement de ceux auxquels se sont
heurtés certains pays d'Europe orientale dans les années 1990, ce
qui confère à l'évolution de la SEMED un caractère unique aux yeux
de la BERD. Le stock de capital humain dans la région est légèrement
inférieur au niveau qui était celui des pays d'Europe centrale et
balte et des pays du Sud et de l'Est de l'Europe au moment où ils
ont entamé leur transition. Une telle situation pourrait accroître
les délais nécessaires à la consolidation des institutions politiques,
juridiques et économiques indispensables au renforcement du développement.
En outre, les jeunes chômeurs constituent une portion importante
de la population dans la SEMED, ce qui fait peser un risque accru
d'inversion des réformes politiques au cas où ces personnes auraient
le sentiment de ne pas être suffisamment prises en compte dans le
processus de transition.
69. Par ailleurs, le développement du secteur privé, notamment
celui des petites et moyennes entreprises (PME), et la modernisation
des infrastructures, ainsi que des systèmes de distribution de l'énergie,
constituent deux domaines ayant un fort impact potentiel sur la
transition, domaines dans lesquels la BERD pourrait jouer un rôle
important. L'accès des femmes au marché du travail et des questions
plus spécifiques relevant de la parité entre les sexes constituent
un autre domaine de la transition où les écarts sont particulièrement manifestes.
Dans ce domaine, la Banque a récemment ajouté l'inclusion économique
à sa liste de critères d'évaluation de la transition. Cette inclusion
– comprise comme l'élargissement des chances accordées aux individus,
quelle que soit leur situation personnelle ou sociale – pourrait
contribuer à renforcer la participation des femmes et des jeunes
au marché du travail.
70. Sur la base de la décision des actionnaires d'élargir la compétence
géographique de la Banque à l'Egypte, au Maroc, à la Tunisie et
à la Jordanie, la BERD a effectué un travail préliminaire afin d'identifier
les priorités de ces pays et, depuis 2011, maintient un contact
avec les parties prenantes. En 2012, le conseil des gouverneurs
a affecté 1 milliard d'euros – prélevé sur le revenu net de la Banque
– au Fonds d'investissement spécial BERD-SEMED en vue de réaliser
des premiers investissements dans la région. Une fois le statut
de pays bénéficiaire potentiel accordé à l'Egypte, à la Tunisie,
à la Jordanie et au Maroc, le premier projet visant la région de
la SEMED a été approuvé en décembre 2012. En novembre 2013, la Tunisie,
la Jordanie et le Maroc se sont vu accorder le statut de pays bénéficiaire,
alors que l'Egypte conserve celui de pays bénéficiaire potentiel.
En outre, la Banque a ouvert des bureaux de liaison à Tunis, au
Caire, à Casablanca et à Amman afin de maintenir un contact permanent
avec les autorités compétentes et les milieux d'affaires des pays
visés.
71. Trois ans après le Printemps arabe, la BERD est pleinement
engagée dans la nouvelle région de transition et nourrit l'intention
de renforcer sensiblement ses engagements financiers et institutionnels.
Il est crucial qu'elle poursuive également un dialogue politique
avec les autorités, de manière à renforcer l'environnement juridique.
Globalement, en 2013, la BERD a investi 449 millions d'euros dans
21 opérations dans la région. La Banque, cependant, prévoit de porter
son volume d'investissement à 2,5 milliards d'euros d'ici 2015.
Elle a identifié cinq domaines d'action prioritaires: i) soutien
au renforcement des PME, afin d'accroître l'impact sur la croissance
et la création d'emplois; ii) augmentation de la chaîne de valeur
de l'agroalimentaire grâce à une amélioration des rendements, de
la logistique et de l'utilisation efficace des ressources; iii)
soutien aux institutions financières sous l'aspect d'un renforcement
des capacités et de la création de produits innovants; iv) encouragements
prodigués aux gouvernements afin qu'ils libéralisent progressivement
le secteur de l'énergie et introduisent dans l'économie des pratiques
propices à une utilisation rationnelle et durable de l'énergie;
et v) modernisation des infrastructures, notamment grâce au recours
à la décentralisation des services municipaux et à l'implication
du secteur privé.
7.2. Relations entre
la BERD et les institutions européennes
72. Depuis son établissement, la BERD a toujours accordé
une importance particulière au maintien de ses relations avec les
autres organisations internationales, notamment les institutions
européennes. C'est ainsi que la Banque entretient des contacts réguliers
avec le Conseil de l'Europe, la Banque de développement du Conseil
de l'Europe (CEB) et la Commission européenne. La relation entre
la BERD et le Conseil de l'Europe vise à surveiller les progrès
démocratiques enregistrés en Europe centrale et de l'Est. De plus,
en octobre 2013, la BERD et la CEB ont conclu un accord bilatéral
prévoyant l'échange régulier d'informations afin de faciliter la
collaboration dans les domaines où leurs mandats respectifs se chevauchent
et d'accroître l'impact de leur action dans les pays où chacune
des deux banques mène des opérations. Lorsque nous l'avons rencontré
au siège de la BERD, M. Suma Chakrabarti nous a fait part de son
intérêt pour la coopération avec la commission de suivi de l'Assemblée.
73. La relation entre la BEI et la BERD revêt un caractère unique,
dans la mesure où la première est actionnaire de la seconde alors
que l'inverse n'est pas vrai. Les deux banques partagent des intérêts
dans plusieurs des pays d'opérations de la BERD et cofinancent fréquemment
des projets. En 2011, la BERD, la Commission européenne et la BEI
ont en outre révisé un protocole d'accord existant afin de soutenir
la réalisation des objectifs de l'Union européenne en matière de
politique extérieure dans les pays où les deux banques mènent des
opérations.
74. L'Union européenne est, elle aussi, actionnaire de la BERD
au même titre que chacun des Etats membres de l'Union européenne.
En outre, certains Etats membres (comme la Bulgarie, la Croatie,
Chypre, l'Estonie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne,
la Roumanie, la Slovaquie et la Slovénie), ainsi que certains candidats
ou candidats potentiels à l'adhésion à l'Union européenne (comme
l'Albanie, la Bosnie-Herzégovine, «l'ex-République yougoslave de
Macédoine», le Monténégro et la Serbie) sont aussi des pays bénéficiaires
des investissements de la BERD. Des partenaires européens – tels
que la Commission européenne, la BEI et certains Etats membres de
l'Union européenne – figurent également parmi les plus gros donateurs
en ce qui concerne des activités essentielles de la BERD, notamment
au niveau de la coopération technique avec les clients de la Banque
et du dialogue politique avec le gouvernement des pays bénéficiaires. A
travers toutes ces activités, la Banque ne cesse d'élever les normes
de gouvernance d'entreprise et de transparence, ainsi que de promouvoir
le renforcement d'institutions susceptibles de soutenir les réformes axées
sur les lois du marché dans des secteurs de transition clés de l'économie.
Parmi les nouvelles activités déployées par la BERD, il convient
de signaler l'établissement en 2013 d'une Equipe de coordination
de la politique extérieure et l'ouverture d'un bureau à Bruxelles,
dans le but de renforcer encore davantage la collaboration avec
les institutions européennes et d'autres partenaires extérieurs
clés.
8. Conclusions
75. Avant la crise financière récente de 2007-2008, on
estimait que la transition vers une économie de marché avait en
grande partie réussi dans une partie substantielle de la région
d'opérations de la BERD. La grave récession qui a suivi a compromis
le processus de convergence et remis en cause les résultats obtenus au
cours des années précédentes. La diminution des capitaux étrangers
disponibles et le resserrement consécutif du crédit se sont traduits
par une baisse des investissements et de la consommation, laquelle
à son tour a eu des répercussions négatives sur la croissance économique.
La crise et les efforts incessants en faveur d'un ajustement fiscal
dans les pays de l'Union européenne ont également tempéré l'enthousiasme
du public pour la liberté du marché. Dans ce contexte, il serait
judicieux de reconsidérer l'ampleur de l'ajustement fiscal dans
les pays concernés. De plus, l'absence d'une véritable volonté politique
de mettre en œuvre les réformes structurelles requises, dont le
rythme s'était déjà ralenti dès 2005, est patente. En outre, depuis
le début des années 2000, plusieurs des pays de la région de transition
ont été le témoin d'un plafonnement du progrès démocratique.
76. L'évolution observée récemment dans certains pays de la région
de la SEMED est cependant encourageante. En Jordanie et au Maroc,
le rôle des parlements élus a été renforcé. Après une période d'incertitude,
la Tunisie a fini par adopter en 2014 une nouvelle Constitution
qui peut être perçue comme une étape importante dans la transition
de ce pays vers la démocratie. L'Egypte reste confrontée aux défis inhérents
à la transition politique et conserve son statut de bénéficiaire
potentiel. Bien que la période analysée ait été dominée par une
incertitude politique, la BERD a réalisé des progrès notables dans
la conduite de ses opérations dans la région. En novembre 2013,
la Tunisie, la Jordanie et le Maroc se sont vu accorder le statut de
pays bénéficiaire. La Banque a également ouvert des bureaux de liaison
à Tunis, au Caire, à Casablanca et à Amman pour maintenir un contact
avec les autorités et les milieux d'affaires des pays concernés.
Elle a investi 449 millions d'euros dans le cadre de 21 opérations
menées dans la région en 2013 et compte porter le volume de ses
investissements à 2,5 milliards d'euros d'ici 2015. Dans la mesure
où les problèmes sociaux affectant la nouvelle région de transition
découlent du fort taux de chômage parmi les jeunes et de la faible participation
des femmes au marché du travail dans ce domaine, il convient de
saluer la révision des critères de sélection des projets appliqués
par la Banque de manière à englober l'inclusion sociale et l'égalité
des chances.
77. Les événements intervenus en Ukraine au deuxième semestre
2013 et au premier semestre 2014 constituent autant d'occasions
importantes d'accélérer la transition. La BERD est en mesure de
jouer un rôle déterminant dans ce processus en fournissant un certain
leadership et un soutien extérieur. A cet égard, son intention avouée
consiste à soutenir l'Ukraine en accroissant son engagement financier
dans ce pays et en renforçant son dialogue politique avec les autorités
et elle devrait être soutenue et encouragée dans cette entreprise.
Ces nouveaux efforts en faveur d'un renforcement dudit dialogue
ont déjà abouti à la signature, d'un protocole d'entente avec le
gouvernement pour l'Initiative anticorruption ukrainienne.
78. La BERD n'ignore pas que la nécessité de ses opérations ne
fera que se confirmer pendant la période d'après crise. Au cours
de l'assemblée générale annuelle de 2014, ses actionnaires ont débattu
des nouvelles lignes directrices à moyen terme censées guider les
activités de la Banque pour les années à venir. Ces lignes reposent
sur une approche à trois volets visant à redonner un élan à la transition
dans la région d'opérations de la BERD, à réviser les limites de
la compétence géographique de la Banque et à moderniser son processus de
planification. Les lignes directrices à moyen terme constituent
un point de départ pour la discussion de la Bank's
Fifth Capital Resources Review (CRR5) [Cinquième évaluation
des ressources en capital de la Banque] censée couvrir la période
allant de 2016 à 2020 et qui sera soumis pour approbation au cours
de l'assemblée générale annuelle de 2015 qui se tiendra à Tbilissi.
79. Afin d'essayer de renforcer sa capacité à réagir aux priorités
et aux contraintes imposées par l'environnement dans laquelle elle
opère, la BERD a l'intention d'introduire un Plan de mise en œuvre stratégique
(Strategic Implementation Plan ou
SIP) qui devrait assouplir le processus de planification et lui conférer
un caractère moins contraignant en s'appuyant sur l'Evaluation des
ressources en capital et le Plan d'activités annuel. Enfin, la Cinquième
évaluation des ressources en capital de la Banque devrait proposer
une révision de la composition du Conseil d'administration dans
le but d'accroître le poids des pays d'opérations. Les orientations
stratégiques reposent également sur un consensus concernant la graduation
prévisible des opérations de la Banque des sept pays bénéficiaires
ayant adhéré à l'Union européenne en 2004. De plus, elles prévoient
généralement le renforcement des opérations dans les parties orientale
et méridionale de la région, parallèlement à l'évolution récente
de la situation géopolitique.
80. La BERD vise à insuffler une nouvelle énergie à la transition
en concentrant ses efforts sur trois thèmes essentiels: i) soutenir
l'activité des gouvernements visant à accélérer la transition grâce
à un dialogue politique; ii) promouvoir l'intégration économique
à la fois au niveau mondial et régional; et iii) relever les défis
communs à tous les pays de la planète, qu'il s'agisse du changement
climatique, de la sécurité énergétique et alimentaire ou de la raréfaction
de l'eau. Il convient d'appuyer les efforts en vue du renforcement
de la politique de dialogue, dans la mesure où ils revêtent une
importance cruciale pour repenser les capacités institutionnelles. De
ce point de vue, la Banque a obtenu un succès remarquable en signant
avec les autorités kazakhes un Partenariat pour la relance du processus
de réforme au Kazakhstan (Partnership
for Re-energising the Reform Process in Kazakhstan) et
il conviendra de suivre de près les résultats concrets de cette
initiative. En cas de succès, elle pourrait constituer un modèle
de redynamisation de la transition dans d'autres pays à revenu moyen.
Concrètement, la Banque pourrait promouvoir l'intégration économique
régionale en attirant de nouveaux investisseurs internationaux dans
la région et en finançant des projets censés renforcer les infrastructures
transfrontières. A cet égard, la BERD œuvre également à la création
d'un Fonds spécial de post-graduation auquel les pays pourront accéder
après avoir été gradués en vue d'obtenir un financement pour des
projets d'investissement transfrontières. Une telle initiative mérite
d'être saluée, dans la mesure où elle pourrait renforcer l'intégration
régionale et l'appétence pour la graduation.
81. Dans l'intervalle, la Banque a déjà modifié de manière pertinente
sa structure interne dans le contexte de la modernisation de l'agenda
lancée par le président Chakrabarti. L'initiative, baptisée One
Bank, vise à répondre à la nécessité d'une simplification des procédures
internes et d'une modernisation de la culture de gestion de la BERD.
Elle s'est traduite par la création, en 2012, de deux nouvelles
vice-présidences chargées respectivement d'élaborer une politique
et de gérer les ressources humaines et les services généraux. L'établissement
de la vice-présidence chargée de l'élaboration d'une politique devrait
être perçu comme un effort visant à renforcer le lien entre les
investissements de la Banque et les réformes économiques qu'il conviendrait
d'adopter dans des secteurs plus larges et au niveau des pays. Pendant
ce temps, l'expansion de la Banque se poursuit. Au cours de l'assemblée
générale annuelle de 2014, ses actionnaires ont accordé le statut
de pays bénéficiaire à Chypre, afin d'aider ce pays à rétablir son
économie. De plus, la demande de la Libye visant à devenir le 67e actionnaire
de la Banque a été favorablement accueillie. Toute future décision d'accorder
le statut de pays bénéficiaire à ce pays devrait être prise séparément,
à l'issue d'un examen minutieux par la Banque de son environnement
politique, économique et opérationnel, en vertu de l'article 1 de
l'Accord portant création de la Banque.