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Résolution 2029 (2015) Version finale
La mise en œuvre du Mémorandum d’accord entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne
1. L’Assemblée parlementaire appuie
fermement le renforcement du partenariat entre le Conseil de l’Europe
et l’Union européenne, conformément au mémorandum d’accord conclu
en 2007, qui souligne le rôle du Conseil de l’Europe en tant que
«référence en matière de droits de l’homme, de primauté du droit
et de démocratie en Europe» et stipule que l’Union européenne «considère
le Conseil de l’Europe comme la source paneuropéenne de référence
en matière de droits de l’homme».
2. Se référant à sa Résolution
1836 (2011) et à sa Recommandation 1982 (2011) relatives
à l’impact du Traité de Lisbonne sur le Conseil de l’Europe, l’Assemblée
juge positif que les droits de l’homme, la démocratie et l’Etat
de droit aient été placés au cœur des politiques de l’Union européenne,
ouvrant ainsi de nouvelles perspectives de coopération entre les
deux organisations sur la base de l’acquis et des atouts propres
à chacune.
3. Depuis la signature du mémorandum d’accord en 2007 et l’entrée
en vigueur du Traité de Lisbonne en 2009, l’Assemblée constate en
particulier avec satisfaction:
3.1. que
la coopération est devenue plus structurée, stratégique et politique;
3.2. que les contacts entre les deux organisations, tant au
niveau politique, y compris au dialogue politique à haut niveau,
que technique et opérationnel, se sont intensifiés, sur les plans
quantitatif et qualitatif;
3.3. que l’Union européenne a joué un rôle accru dans les domaines
d’activité traditionnels du Conseil de l’Europe comme la justice,
la liberté, la sécurité et l’Etat de droit, et s’est largement appuyée,
durant la période 2010-2014, sur l’expertise du Conseil de l’Europe
dans la mise en œuvre du Programme de Stockholm – Une Europe ouverte
et sûre qui sert et protège les citoyens;
3.4. que l’Union européenne a régulièrement sollicité le concours
du Conseil de l’Europe, notamment dans le cadre des politiques d’élargissement
et de voisinage de l’Union européenne;
3.5. que des consultations ont lieu aux premiers stades du
processus d’élaboration de la législation de l’Union européenne,
en particulier sous la forme de contributions écrites et d’échanges
de vues, et que des représentants de l’Union européenne sont régulièrement
invités à participer à des activités normatives du Conseil de l’Europe;
3.6. qu’un nombre croissant de documents de l’Union européenne
font expressément référence aux normes et aux instruments du Conseil
de l’Europe;
3.7. que la représentation mutuelle à Bruxelles et à Strasbourg
a facilité la coordination, amélioré les relations et renforcé leur
impact.
4. L’Assemblée se félicite de l’accord programmatique global
sur le financement des programmes conjoints entre l’Union européenne
et le Conseil de l’Europe pour la période 2014-2020, qui a permis d’accroître
la coordination, l’impact et la durabilité des programmes de coopération,
mettant en place un nouveau cadre de coopération dans la région
de l’élargissement de l’Union européenne, dans les pays du Partenariat
oriental de l’Union européenne ainsi que dans les pays du sud de
la Méditerranée, dans un esprit de responsabilités partagées.
5. Tout en saluant ces mesures positives, l’Assemblée rappelle
que le mémorandum d’accord est un contrat prévoyant une obligation
de résultats de part et d’autre. Elle se réfère par ailleurs à la Recommandation 2027 (2013) «Programmes
de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe en matière de droits
de l’homme: des synergies, pas des doubles emplois», qui, tout en
précisant que des normes plus élevées de protection des droits de
l’homme sont toujours les bienvenues, met en garde contre la mise
en place de mécanismes parallèles qui risque de créer un double
système de normes, d’inciter à rechercher la juridiction la plus
favorable et d’entraîner un abaissement des normes du Conseil de
l’Europe.
6. L’Assemblée est convaincue que seule l’adhésion de l’Union
européenne à la Convention européenne des droits de l’homme (STE
n° 5, «la Convention») peut permettre une coopération juridique
approfondie, renforcer la cohérence des normes juridiques et offrir
un cadre unique pour les droits de l’homme, la démocratie et l’Etat
de droit en Europe. L’Assemblée se félicite du projet d’accord d’adhésion
convenu au niveau des négociateurs en avril 2013 et considère que
les obstacles identifiés par la Cour de justice de l’Union européenne
dans son Avis 2/13 doivent être surmontés dès que possible, conformément
aux engagements politiques pris par toutes les parties, comme indiqué
dans le Traité de Lisbonne. Elle invite par conséquent les Etats
membres du Conseil de l'Europe qui sont également membres de l’Union
européenne à exercer leur influence afin de reprendre sans délai
les négociations sur l’adhésion de l’Union européenne à la Convention et
à donner une priorité politique élevée à ce processus.
7. L’Assemblée se félicite du renforcement de l’action de l’Union
européenne dans le domaine de la justice et des affaires intérieures,
et de l’Etat de droit, si cela se traduit par une protection accrue
de la démocratie, de l’Etat de droit et des droits de l’homme dans
les 28 Etats membres de l’Union européenne. Afin de poursuivre la
construction d’un espace commun de protection des droits de l’homme,
de garantir la complémentarité et la cohérence des normes et le
suivi de leur application, tout en évitant un chevauchement d'activités,
l’Assemblée invite l’Union européenne:
7.1. à reprendre sans délai les négociations sur l’adhésion
de l’Union européenne à la Convention, à la lumière de l’Avis 2/13
de la Cour de justice de l’Union européenne, et à donner une priorité
politique élevée à cette question;
7.2. à tenir compte du rôle du Conseil de l’Europe en tant
que référence pour les droits de l’homme, l’Etat de droit et la
démocratie en Europe, en préparant de nouvelles initiatives dans
ce domaine;
7.3. à examiner avec le Conseil de l’Europe la possibilité
pour l’Union européenne d’adhérer aux conventions clés du Conseil
de l’Europe qui s’attaquent aux grands problèmes de la société européenne d’aujourd’hui,
y compris la Charte sociale européenne (révisée) (STE n° 163);
7.4. à adhérer pleinement et le plus rapidement possible au
Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO), et à respecter le principe
de l’égalité de traitement entre les membres du GRECO, qui implique
l’évaluation, par les mécanismes du GRECO, des institutions de l’Union
européenne, en tenant compte de sa spécificité en tant qu’entité
non étatique;
7.5. à tenir des discussions sur les modalités de participation
de l’Union européenne aux mécanismes et organes de suivi du Conseil
de l’Europe qui ne reposent pas sur une convention, tels que la Commission
européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI), la Commission
européenne pour l’efficacité de la justice (CEPEJ) ou la Commission
européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise);
7.6. à utiliser pleinement les rapports des organes et mécanismes
de suivi du Conseil de l’Europe, tels que ceux du Comité européen
pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains
ou dégradants (CPT), du Groupe d’experts sur la lutte contre la
traite des êtres humains (GRETA), et des mécanismes de suivi de
la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales
(STE no 157), ainsi que les rapports
de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires (STE
no 148), et à coopérer avec le Conseil
de l’Europe dans les domaines pertinents;
7.7. à utiliser et, ainsi, à renforcer les voies de consultation
régulière et structurée, au moins une fois par présidence de l’Union
européenne, notamment en ce qui concerne les évolutions normatives
dans les domaines des droits de l’homme, de la justice, de l’Etat
de droit et des affaires intérieures, et à consulter de manière
systématique le Conseil de l’Europe au sujet des projets de législation
pertinents de l’Union européenne;
7.8. à donner suite aux procédures de suivi existantes du Conseil
de l’Europe et aux recommandations formulées par ce dernier à l’intention
des Etats membres, à veiller à leur application dans les Etats membres
de l’Union européenne et à faciliter la mise en œuvre des décisions
de la Cour européenne des droits de l’homme;
7.9. à veiller à ce que les normes des droits de l’homme défendues
par l’Union européenne ne soient pas en deçà de celles défendues
par le Conseil de l’Europe, afin d’éviter l’existence de doublons
ou de normes de portée inférieure et une incitation à rechercher
la juridiction la plus favorable;
7.10. à mettre en application le nouveau cadre de l’Union européenne
pour renforcer l’Etat de droit en s’appuyant sur les instruments
et le savoir-faire du Conseil de l’Europe et en les complétant;
7.11. à intensifier la coopération avec le Conseil de l’Europe
dans le cadre des nouvelles orientations stratégiques pour la planification
législative et opérationnelle au sein de l’espace de liberté, de
sécurité et de justice de l’Union européenne pour la période 2015-2020,
définies par l’Union européenne;
7.12. à coordonner le colloque annuel de l’Union européenne
sur la situation des droits de l’homme en Europe avec l’action du
Conseil de l’Europe;
7.13. à continuer de promouvoir, parmi les Etats membres de
l’Union européenne ainsi que dans le cadre de ses politiques d’élargissement
et de voisinage, selon le cas, l’adhésion aux conventions clés et
aux mécanismes et organes de suivi du Conseil de l’Europe;
7.14. à assurer une complémentarité dans le contexte du cadre
stratégique et plan d’action en matière de droits de l’homme et
de démocratie de l’Union européenne, axés sur les actions extérieures
de l’Union européenne.
8. L’Assemblée invite les parlements des Etats membres de l’Union
européenne à continuer d’accroître la visibilité du partenariat
renforcé entre les deux organisations, y compris les relations entre
l’Assemblée et le Parlement européen.
9. Pour sa part, l’Assemblée se félicite de l’intensification
récente des contacts entre sa Présidente et les dirigeants du Parlement
européen et de la Commission européenne, et invite sa Présidente
et/ou son Comité des Présidents:
9.1. à
multiplier les réunions et les échanges informels réguliers avec
les dirigeants de l’Union européenne sur les enjeux politiques actuels;
9.2. à explorer les moyens d’étendre la coordination et la
coopération entre les deux organes parlementaires de l’Union européenne
et du Conseil de l’Europe, et leurs groupes politiques;
9.3. à envisager une mise à jour de l’accord du 28 novembre
2007 relatif au renforcement de la coopération entre l’Assemblée
parlementaire du Conseil de l’Europe et le Parlement européen, afin
de prendre en compte les développements les plus récents intervenus
depuis l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne.
10. En conclusion, tout en considérant que le mémorandum d’accord
demeure un socle solide pour continuer d’orienter et de structurer
les relations entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne, l’Assemblée
est d’avis que seule une coopération authentique, continue et substantielle
entre les deux organisations peut contribuer à la création d’une
Union européenne véritablement sûre et équitable, dans laquelle
les droits de l’homme et l’Etat de droit sont pleinement respectés,
protégés et encouragés. Cette démarche devrait au final mener à
l’adhésion de l’Union européenne au Statut du Conseil de l’Europe (STE n° 1),
conformément à la recommandation formulée en 2006 par M. Juncker
dans son rapport «Conseil de l’Europe – Union européenne: “Une même
ambition pour le continent européen”».