Imprimer
Autres documents liés
Résolution 2251 (2019)
Mise à jour des lignes directrices pour garantir des référendums équitables dans les États membres du Conseil de l'Europe
1. L’expérience acquise en matière
référendaire depuis l’adoption, en 2007, par la Commission européenne
pour la démocratie par le droit (Commission de Venise), à la demande
de l’Assemblée parlementaire, du Code de bonne conduite en matière
référendaire (ci-après «le code»), appelle aujourd’hui au renforcement
des règles régissant la tenue de référendums, à l’amélioration du
respect du code par les États membres du Conseil de l’Europe ainsi
qu’au partage de bonnes pratiques sur tout le continent.
2. En particulier, dans certains pays, des référendums tenus
récemment ont soulevé des préoccupations quant à leur organisation
et/ou à l’équité du résultat. D’autres pays ont exploré des pratiques
référendaires novatrices, dont les décideurs politiques de l’ensemble
des États membres pourraient bénéficier. De plus, le développement
d’internet, en particulier des médias sociaux, a fondamentalement
changé la nature des campagnes politiques et des attentes des citoyens
à l’égard de la démocratie.
3. Par conséquent, l’Assemblée se félicite du fait qu’un processus
de mise à jour du code de 2007 ait été engagé par la Commission
de Venise et invite cette dernière à prendre en compte, dans le
code révisé, les principes généraux suivants:
3.1. les référendums devraient s’inscrire dans le processus
de démocratie représentative et ne pas être utilisés par l’exécutif
pour passer outre la volonté du parlement, ni être organisés dans
le but d‘éviter les freins et contrepoids habituels;
3.2. les propositions soumises à référendum devraient être
aussi claires que possible et avoir fait l’objet d’un examen préalable
minutieux, y compris par le parlement, afin de garantir qu’elles
reflètent les préoccupations des électeurs et qu’elles expriment
leur volonté;
3.3. la campagne devrait garantir l’équilibre entre les parties
et permettre aux électeurs d’accéder à des informations équilibrées
et de qualité afin de faire un choix éclairé.
4. En ce qui concerne certains aspects spécifiques de la conduite
d’un référendum, l’Assemblée invite la Commission de Venise à envisager
d’inclure, dans le code révisé, les éléments suivants:
4.1. l’exécutif ne devrait pas être
en mesure de convoquer un référendum sur une proposition constitutionnelle,
sauf lorsque la décision de tenir un référendum a déjà été approuvée
par le législateur ou si la proposition soumise au vote populaire
a été adoptée par le corps législatif;
4.2. il ne devrait pas être possible de tenir un référendum
en même temps que d’autres élections, afin de permettre aux électeurs
de prendre des décisions éclairées lorsqu’ils votent;
4.3. dans la mesure du possible, les référendums devraient
être postlégislatifs. À défaut, il conviendrait de définir un processus
prévoyant la tenue de deux référendums si le premier ne permettait pas
aux électeurs de faire un choix entre les options finalement offertes;
4.4. pour éviter les risques d’un taux de participation faible,
tout en maintenant le principe de ne pas conditionner les résultats
d’un référendum à un quorum de participation, seuls les sujets susceptibles de
susciter un intérêt public significatif devraient, dans la mesure
du possible, être soumis à référendum;
4.5. il ne devrait pas être possible de soumettre à référendum
une proposition allant à l’encontre des conditions d’adhésion au
Conseil de l’Europe telle que la proposition de réintroduire la
peine de mort;
4.6. des questions autres que celles appelant à répondre par
«oui» ou par «non», y compris celles proposant plusieurs options,
devraient être permises lorsqu’elles offrent aux électeurs un choix
plus clair;
4.7. un organe impartial devrait effectuer une vérification
de toutes les questions référendaires proposées, de manière à s’assurer
qu’elles sont claires, compréhensibles et neutres. En cas de formulation
des questions référendaires selon un format prédéfini, il conviendrait
de réexaminer périodiquement ce dernier, afin de veiller à ce que
le bulletin de vote réponde à ces critères;
4.8. en cas de référendums d’initiative citoyenne, le nombre
de signatures requises pour déclencher un référendum devrait être
suffisamment élevé pour avoir l’assurance que la proposition bénéficie
d’un soutien véritablement important; l’élaboration de procédures
selon lesquelles les pétitions de citoyens ne donneraient pas directement
lieu à un référendum, mais plutôt à une assemblée de citoyens qui recommanderait
les suites à donner, pourrait être encouragée;
4.9. toutes les parties devraient disposer de suffisamment
de temps pour développer et faire valoir leur point de vue, et les
électeurs pour entendre les arguments et se faire une opinion. Bien
qu’une période de préparation beaucoup plus longue soit souhaitable,
en particulier si le sujet n’a pas déjà fait l’objet de débats publics
étendus, le délai minimal absolu entre la convocation d’un référendum
et le jour du scrutin pourrait être fixé à quatre semaines;
4.10. l’interdiction de l’utilisation par les autorités de fonds
publics à des fins de propagande devrait s’étendre à toute la durée
de la campagne;
4.11. en cas d’allocation de fonds publics, le principe de l’égalité
entre les parties devrait prévaloir sur celui de la distribution
proportionnelle des ressources;
4.12. le principe de la transparence devrait s’appliquer aussi
bien aux sources du financement d’une campagne qu’à l’utilisation
de ces fonds; le plafonnement des dépenses et/ou des dons devrait
être encouragé et les financements étrangers interdits;
4.13. de nouvelles règles sur la transparence des matériels
de campagne devraient s’imposer, notamment un étiquetage clair permettant
d’identifier l’origine de toutes les publicités; une réglementation
rigoureuse et indépendante de la presse et une vérification impartiale
des faits devraient être encouragées afin de faire face aux fausses
informations;
4.14. une instance indépendante, plutôt que les autorités, devrait
avoir la responsabilité de fournir des informations officielles;
celles-ci devraient, au minimum, énoncer la question référendaire
et indiquer en détail quand et comment les citoyens peuvent voter,
et, dans la mesure du possible, également fournir des explications
sur les propositions et une analyse de ces dernières;
4.15. les pouvoirs de sanction devraient couvrir tous les aspects
de la réglementation des campagnes, y compris les manquements aux
règles sur le financement de la campagne; les amendes devraient
être proportionnelles à l’ampleur du financement de la campagne.
5. L’essor des médias numériques et la convergence croissante
de la presse écrite et des médias audiovisuels et numériques, notamment
les médias sociaux, imposent une régulation de tous les secteurs
des médias par rapport à tous les processus électoraux. L’Assemblée
note que la Commission de Venise travaille actuellement sur ces
questions et espère que des lignes directrices en la matière seront
développées tant pour les élections que pour les référendums.
6. Considérant que le respect de principes susmentionnés fait
parfois défaut dans certains domaines, l’Assemblée appelle tous
les États membres à s’assurer:
6.1. que
tous les éléments fondamentaux des référendums, tels que définis
dans le code en vigueur, en particulier les règles relatives au
droit de vote, sont stipulés dans la législation référendaire en
général (et non pas décidés sur une base ad hoc); cette législation
ne doit pas être modifiée moins d’un an avant la tenue d’un référendum;
6.2. que l’instance chargée de l’organisation des référendums
est indépendante du gouvernement et dispose de pouvoirs pour faire
appliquer les règles, y compris le pouvoir de sanctionner en cas
de violation;
6.3. que, pendant toute la durée de la campagne, des fonds
publics ne sont pas utilisés par les autorités à des fins de propagande;
6.4. que des solutions optimales sont mises au point, en coopération
avec les entreprises de l’internet, afin de développer des répertoires
des publicités en ligne à caractère politique.
7. L’Assemblée considère que l’existence d’une instance indépendante
qui effectuerait une vérification de toutes les questions référendaires,
superviserait la conduite de la campagne, prendrait toutes les mesures requises
pour en assurer le bon déroulement et disposerait des moyens nécessaires
pour faire appliquer ses décisions et sanctionner des violations
éventuelles, serait l'un des moyens les plus efficaces pour renforcer
le respect des règles référendaires par les États membres. Elle
appelle ainsi la Commission de Venise à envisager de recommander,
dans le code révisé, la création de telles instances dans les États
membres du Conseil de l’Europe.
8. L’Assemblée souligne que renforcer la participation des citoyens
au débat démocratique, tant avant qu’après l’annonce d’un référendum,
peut répondre au sentiment de déconnexion des processus décisionnels qu’éprouvent
les électeurs et à leur défiance à cet égard. Par conséquent, l’Assemblée,
tout en rappelant également sa Résolution 1746 (2010) «Démocratie
en Europe: crise et perspectives» et en s’inspirant de la pratique
actuelle dans certains États membres:
8.1. encourage tous les États membres à explorer les possibilités
de délibérations citoyennes tant avant la tenue de référendums qu’au
cours de la campagne, par exemple par le biais d’assemblées de citoyens;
8.2. invite la Commission de Venise à souligner, dans le code
révisé, le rôle que des assemblées de citoyens et d’autres mécanismes
similaires pourraient jouer afin d’assurer un contrôle minutieux
des propositions avant qu’un référendum soit convoqué et d’améliorer
la qualité de l’information et du débat au cours de la campagne
référendaire.