1. Origine, objectif et portée du rapport
1. Le rapport a pour origine la
Résolution
2186 (2017) sur l’appel pour un sommet du Conseil de l’Europe afin
de réaffirmer l’unité européenne, et de défendre et promouvoir la
sécurité démocratique en Europe, qui a été adoptée en octobre 2017
à une large majorité par l’Assemblée, sur la base d’un rapport élaboré
par M. Michele Nicoletti pour la commission des questions politiques
et de la démocratie (
Doc. 14396).
2. Dans la
Résolution
2186 (2017), l’Assemblée déclare que «le Conseil de l’Europe et
les valeurs qu’il défend sont aujourd’hui plus nécessaires que jamais» et
justifie cette affirmation comme suit: «étant à l’origine de la
construction européenne, réunissant la quasi-totalité des États
européens sur la base de valeurs et de principes communs et étant
donc un garant naturel de «l’unité dans la diversité», offrant un
espace juridique commun à 835 millions d’Européens, leur garantissant
la protection des droits humains, promouvant les droits sociaux
et la démocratie, et contribuant au développement d’une société
civile européenne, le Conseil de l’Europe est aujourd’hui le mieux
placé pour aider à relever les défis liés à la montée du nationalisme
et éviter que se dressent de nouveaux murs.»
3. Après avoir énuméré les questions qui, de son point de vue,
devraient être abordées en priorité dans le cadre d’un sommet politique
aux objectifs bien circonscrits, l’Assemblée a décidé, pour sa part,
dans le paragraphe concluant la
Résolution
2186 (2017) (paragraphe 18) «de poursuivre sa propre réflexion
sur son identité, son rôle et sa mission en tant qu’organe statutaire
du Conseil de l’Europe et en tant que forum paneuropéen de dialogue
interparlementaire qui vise à avoir un impact dans tous les États
membres». Par une décision prise le 13 octobre 2017, le Bureau de
l’Assemblée a renvoyé le suivi du paragraphe 18 de la
Résolution
2186 (2017) à la commission des questions politiques et de la démocratie
pour rapport et à la commission du Règlement, des immunités et des
affaires institutionnelles pour avis.
4. Au cours de la partie de session de janvier 2018, parallèlement
à ma nomination en tant que rapporteur par la commission des questions
politiques et de la démocratie, le Bureau de l’Assemblée a constitué
une commission ad hoc sur le rôle et la mission de l’Assemblée parlementaire.
L’objectif était de mener, au sein d’un groupe plus large et inclusif,
une réflexion sur les questions soulevées par la
Résolution
2186 (2017), à laquelle j’ai été invité à participer en ma qualité
de rapporteur de la commission des questions politiques. Il a été
d’emblée convenu que les résultats des travaux accomplis au sein
de la commission ad hoc alimenteraient le rapport devant être élaboré
par la commission des questions politiques.
5. La commission ad hoc, présidée par M. Nicoletti, ancien Président
de l’Assemblée, a réuni des parlementaires des 47 États membres
du Conseil de l’Europe, notamment les présidents des délégations nationales
auprès de l’Assemblée, les présidents des groupes politiques, les
présidents des commissions et, conformément à la lettre et à l’esprit
de
la
Résolution 2186 (2017) et par décision du Bureau, des représentants du Parlement
russe. Outre les discussions tenues au cours de quatre réunions,
les participants, représentant les deux tiers des parlements des
États membres et l’ensemble des groupes politiques, ont contribué
par écrit au processus de réflexion. Ces contributions ont été reproduites
in extenso dans deux recueils. Un processus de consultation sans
précédent, assurant une plus grande légitimité démocratique, a ainsi
été entrepris dans le cadre des travaux de la commission ad hoc
sur les questions relatives à l’identité, au rôle et à la mission
de l’Assemblée.
6. Les propositions concrètes formulées par les participants
ont été résumées dans une note élaborée par le président et annexée
par la suite au rapport de la commission ad hoc
qui a été approuvé et transmis au Bureau
le 26 juin 2018. Le Comité Mixte s’est réuni le 28 juin, ce qui
a permis un échange de vues avec les Délégués des Ministres sur
les sujets abordés dans la note. Le Bureau a pris note du rapport
de la commission ad hoc et l’a rendu public à sa réunion du 29 juin
2018, accompagné d’une liste de décisions de suivi.
7. Dans la mesure où la commission ad hoc n’avait aucun pouvoir
de décision, son rapport a été transmis aux deux commissions compétentes,
c’est-à-dire à la commission des questions politiques, pour qu’il
soit pris en considération dans le cadre du présent rapport, et
à la commission du Règlement, en ce qui concerne les questions nécessitant
de modifier le Règlement de l’Assemblée. Il appartiendra en fin
de compte à l’Assemblée de prendre toutes les décisions nécessaires
sur la base de rapports émanant de l’une ou de l’autre commission.
8. Le présent rapport couvrira toutes les questions qui ont été
spécifiquement renvoyées à notre commission par les décisions du
Bureau du 29 juin 2018. Pour autant, sa portée est plus vaste puisque
celui-ci tire son origine du paragraphe 18 de
la
Résolution 2186 (2017), qui met l’accent sur la double mission de l’Assemblée
en tant que «forum paneuropéen de dialogue interparlementaire» mais
aussi en tant que «organe statutaire du Conseil de l’Europe». Par
conséquent, les relations de l’Assemblée avec l’autre organe statutaire du
Conseil de l’Europe, le Comité des Ministres, entrent dans le champ
d’application du rapport. Les questions principales qui seront ainsi
spécifiquement développées sont les suivantes:
- la nature, l’identité et la
mission de l’Assemblée;
- la rationalisation des travaux de l’Assemblée;
- l’amélioration du suivi des textes de l’Assemblée;
- le renforcement du dialogue entre l’Assemblée et le Comité
des Ministres;
- le renforcement des relations de l’Assemblée avec l’Union
européenne et le Parlement européen ainsi qu’avec d’autres organisations
ou assemblées parlementaires internationales.
9. L’objectif du rapport est le même pour toutes les questions
à traiter: renforcer l’impact de l’Assemblée tant au sein de l’Organisation
que dans les États membres.
10. Lors de sa réunion du 11 septembre 2018, la commission a tenu
une première discussion sur les questions liées à la nature, à l’identité
et à la mission de l’Assemblée ainsi qu’au suivi des résolutions
de l’Assemblée. Une deuxième discussion, axée sur la nécessité de
rationaliser les travaux de l’Assemblée et de renforcer son dialogue
avec le Comité des Ministres, a eu lieu lors de notre réunion du
5 mars 2019, avec la participation de la Présidente de l’Assemblée
et de Mme Nina Nordström, Directrice
au ministère des Affaires étrangères de la Finlande, en tant que
représentante de la Présidence finlandaise du Comité des Ministres.
Le présent rapport comprend, comme annoncé, une dernière partie
sur les relations avec l’Union européenne et d’autres organisations
ou assemblées parlementaires internationales.
2. Identité,
rôle et mission de l’Assemblée
2.1. Rôle
délibératif
11. Selon son Statut (
STE
n° 1, article 10), le Conseil de l’Europe a deux organes
statutaires: le Comité des Ministres et l’Assemblée parlementaire.
12. L’Assemblée, qui a tenu sa première session il y a 70 ans,
le 10 août 1949, est la plus ancienne assemblée parlementaire internationale,
à caractère pluraliste, composée de parlementaires élus démocratiquement
et établie sur la base d’un traité intergouvernemental. C’est aussi
la matrice d’autres institutions parlementaires européennes, créées
à sa suite.
13. L’identité, le rôle et la mission de l’Assemblée ont été définis
dans le Statut du Conseil de l’Europe, qui date de 1949.
14. Selon l’article 22 du Statut, l’Assemblée est «l’organe délibérant
du Conseil de l’Europe»; l’article 23 reconnaît à l’Assemblée le
droit de «délibérer et formuler des recommandations [adressées au
Comité des Ministres] sur toute question répondant au but et rentrant
dans la compétence du Conseil de l’Europe». Ce but est défini à
l’article 1er: «réaliser une union plus
étroite entre ses Membres afin de sauvegarder et de promouvoir les
idéaux et les principes qui sont leur patrimoine commun». Par «principes»,
il faut entendre «le principe de la prééminence du droit et le principe
en vertu duquel toute personne placée sous [la] juridiction [d’un
Membre du Conseil de l’Europe] doit jouir des droits humains et
des libertés fondamentales» (article 3), principes sur lesquels,
selon le Préambule, «se fonde toute démocratie véritable».
15. L’Assemblée a aussi la prérogative d’élire le Secrétaire Général
et le Secrétaire Général adjoint du Conseil de l’Europe (en vertu
de l’article 36 du Statut). De plus, elle élit les juges de la Cour
européenne des droits de l’homme (en vertu de l’article 22 de la
Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5)),
le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe (en
vertu de l’article 9 de la Résolution (99) 50 du Comité des Ministres)
et le Secrétaire général de l’Assemblée (en vertu de la Résolution
statutaire (49) 20).
16. La combinaison de ses pouvoirs de délibération et de décision
renforce l’importance de l’Assemblée en tant que plate-forme parlementaire,
en Europe mais aussi sur la scène internationale.
2.2. Réunir
l’Europe
17. L’Assemblée a largement contribué
au processus d’élargissement de l’Organisation puisque, avant d’accepter
tout nouvel État membre, le Comité des Ministres doit consulter
l’Assemblée (conformément à la Résolution statutaire (51) 30). L’Assemblée
a donc beaucoup contribué à réunir l’Europe, après des décennies de
profondes et dangereuses divisions sur le continent.
18. L’Assemblée a en outre mis au point des procédures destinées
à faciliter l’intégration de nouveaux États membres dans l’Organisation,
notamment la pratique consistant à demander aux nouveaux États membres
de prendre un certain nombre d’engagements spécifiques (qui s’ajoutent
aux obligations statutaires leur incombant au titre de leur appartenance
au Conseil de l’Europe), ainsi qu’une procédure de suivi spécifique, pays
par pays, destinée à vérifier que les États membres respectent les
engagements qu’ils ont pris lors de leur adhésion.
19. L’Assemblée est ainsi devenue le forum parlementaire paneuropéen
le plus vaste, au sein duquel (presque) tous les États européens
sont représentés par des délégations formées de membres des parlements nationaux,
issus de la majorité et de l’opposition, qui participent à ses activités.
2.3. Forum
paneuropéen pour le dialogue politique, et gardienne des droits
humains et de la démocratie en Europe
20. En conséquence, l’Assemblée
constitue un forum paneuropéen de dialogue politique qui est unique, permanent
et structuré. Elle permet ainsi aux parlementaires qui représentent
les citoyens de l’Europe toute entière de discuter des (nombreuses)
questions qui relèvent du but et de la compétence de l’Organisation, définis
à l’article 1er du Statut.
21. Durant nos réunions à Helsinki en novembre 2018, des représentants
de la Commission des Affaires étrangères du Parlement finlandais
et l’ancienne Présidente Halonen ont souligné que le caractère unique
de notre Assemblée tient précisément au fait qu’elle assure un lien
direct avec les parlements nationaux, y compris l’opposition.
22. Dans la mesure où la Convention européenne des droits de l’homme
confère à l’Assemblée le droit d’élire les juges de la Cour européenne
des droits de l’homme, l’Assemblée joue aussi – avec la Cour et
le Comité des Ministres, qui surveille l’exécution des arrêts de
la Cour par les États membres – un rôle majeur dans le système unique
de protection des droits humains, de la prééminence du droit et
de la démocratie, consacré par la Convention et étayé par les arrêts
contraignants de la Cour. C’est pourquoi l’Assemblée est souvent
appelée la gardienne de la démocratie et des droits humains en Europe:
par ses missions d’information, ses observations électorales et
ses rapports sur la situation des droits humains, de la prééminence
du droit et de la démocratie dans les États membres, l’Assemblée
est en effet à même de signaler les changements positifs et négatifs
dans ces domaines. Elle peut aussi appeler les gouvernements – directement
ou au moyen de recommandations adressées au Comité des Ministres
– et les parlements des États membres concernés à remplir les obligations
leur incombant au titre du Statut, de la Convention européenne des
droits de l’homme, des arrêts de la Cour et de toutes les autres
conventions, qui forment ensemble la pierre angulaire du Conseil
de l’Europe.
2.4. Moteur
politique du Conseil de l’Europe
23. Comme indiqué au paragraphe
6 de sa
Recommandation
2114(2017) «Défendre l’acquis du Conseil de l’Europe: préserver
le succès de 65 ans de coopération intergouvernementale»
, l’Assemblée porte, avec le Comité
des Ministres et les États membres, «la responsabilité de la création,
de la protection, de la mise en œuvre et de la poursuite du développement
du système conventionnel du Conseil de l’Europe». Par l’adoption de
recommandations spécifiques adressées au Comité des Ministres, l’Assemblée
a donc beaucoup contribué au développement de ce système conventionnel,
qui a créé un espace juridique paneuropéen s’étendant de Reykjavik
à Vladivostok et englobant des centaines de millions de citoyens.
L’Assemblée a notamment été à l’origine des principales conventions
du Conseil de l’Europe, à commencer par la Convention européenne
des droits de l’homme, et a participé activement à leur élaboration.
C’est pourquoi elle est souvent appelée le moteur politique du Conseil
de l’Europe.
24. L’Assemblée a en outre encouragé la ratification et la mise
en œuvre de conventions du Conseil de l’Europe par les États membres,
par l’intermédiaire de recommandations ou de résolutions. Pour citer
un exemple récent, l’Assemblée a activement soutenu l’élaboration
de la Convention sur la prévention et la lutte contre la violence
à l’égard des femmes et la violence domestique (STCE no 210,
«Convention d’Istanbul»), dont elle s’emploie à promouvoir la ratification
et la mise en œuvre par un nombre toujours croissant d’États membres
.
2.5. Conclusions
de la commission ad hoc
25. Les travaux de la commission
ad hoc du Bureau ont donné une nouvelle occasion aux parlements
des États membres de dire ce qui constitue, d’après eux, la principale
mission de l’Assemblée aujourd’hui. La commission ad hoc a identifié
trois missions pour l’Assemblée (qui rejoignent aussi les considérations
ci-dessus): organe délibératif du Conseil de l’Europe, forum paneuropéen
de dialogue et gardienne des droits humains et de la démocratie.
La question de savoir s’il faut privilégier une mission par rapport
aux autres, ou comment les combiner de la meilleure façon possible,
relève avant tout d’un choix politique plutôt qu’institutionnel,
a conclu la commission ad hoc
.
2.6. Défis
actuels du Conseil de l’Europe et de son Assemblée
26. 70 ans après sa création, le
Conseil de l’Europe connaît une profonde crise politique et financière.
Il est confronté à de nombreux défis qui font peser une menace sérieuse
sur l’efficacité de ses organes statutaires et de ses mécanismes
et instruments et ainsi, à terme, sur les objectifs statutaires
de l’Organisation: de dangereux conflits persistent dans et entre
les États membres, au lieu d’être résolus grâce, entre autres, aux outils
de l’Organisation; la mise en œuvre multilatérale des normes internationales
des droits humains, y compris par la Cour européenne des droits
de l’homme, est de plus en plus souvent remise en question dans les
États membres; le respect du Statut de l’Organisation et de la Convention
européenne des droits de l’homme s’affaiblit; et l’Assemblée elle-même
n’a pas encore été en mesure d’aider efficacement à surmonter ces
crises.
27. En ce qui concerne la mission paneuropéenne du Conseil de
l’Europe, l’«unité dans la diversité» souhaitée a été sérieusement
remise en question à la suite de l’annexion illégale de la Crimée
par la Russie en 2014, un acte considéré comme une violation flagrante
du droit international et du Statut du Conseil de l’Europe. En réaction
à la décision de l’Assemblée d’appliquer des sanctions à l’encontre
de la délégation parlementaire russe, cette dernière a cessé de
participer aux activités de l’Assemblée. Depuis janvier 2016, la Russie
n’a pas désigné de délégation parlementaire auprès de l’Assemblée.
Cette situation a causé une fissure au sein de l’Organisation, un
État membre étant présent dans un organe statutaire, le Comité des Ministres,
mais absent de l’autre, l’Assemblée. Depuis juin 2017, la décision
du Gouvernement russe, face à cette situation, de suspendre le paiement
de sa contribution au budget de l’Organisation, a entraîné une grave crise
budgétaire qui menace les activités essentielles du Conseil de l’Europe.
2.7. Mesures
proposées
28. Pour relever ces défis, promouvoir
la sécurité en Europe, rétablir la confiance envers le Conseil de l’Europe
et entre les États membres et préserver l’avenir de l’Organisation,
je propose que l’Assemblée:
a. appelle
tous les États membres à réaffirmer, 70 ans après la création du
Conseil de l’Europe, leur engagement à l’idéal d’unité européenne
et aux valeurs et principes de la démocratie, des droits humains
et de l’État de droit, et à soutenir et renforcer davantage le Conseil
de l’Europe en tant qu’organisation paneuropéenne unique, qui défend
ces valeurs au bénéfice des citoyens européens;
b. souligne que l’adhésion au Conseil de l’Europe entraîne
l’obligation pour tous les États membres de participer aux deux
organes statutaires;
c. appelle la Fédération de Russie, conformément à ses obligations
statutaires, à présenter une délégation à l’Assemblée et à reprendre
le paiement obligatoire de sa contribution au budget de l’Organisation,
ce qui à défaut pourrait entraîner la suspension de ses droits de
représentation dans les deux organes statutaires si le Comité des
Ministres décidait d’appliquer l’article 9 du Statut;
d. appelle à l’intensification du dialogue entre tous les
acteurs concernés afin de préserver la mission paneuropéenne du
Conseil de l’Europe et d’éviter une situation dans laquelle le plus
grand État membre serait invité à, ou choisirait de quitter l’Organisation,
avec toutes les implications géopolitiques et toutes les conséquences
concrètes pour les citoyens russes que cela aurait; à cet égard,
elle salue l’engagement et les efforts entrepris par la Présidence
finlandaise du Comité des Ministres;
e. appelle les gouvernements des États membres à envisager
toutes les options possibles pour assurer la pertinence politique
et la viabilité financière de l’Organisation, de manière à éviter
de restreindre gravement ses activités et, par là-même, son efficacité;
f. appelle ses membres à inscrire de toute urgence cette
question à l’ordre du jour de leurs parlements nationaux et à inviter
instamment leurs gouvernements à agir de manière responsable, conformément à
leurs obligations en vertu du Statut du Conseil de l’Europe, afin
d’assurer la viabilité financière du Conseil de l’Europe.
3. Rationaliser
les travaux de l’Assemblée
3.1. La
contribution de la commission ad hoc
29. Les contributions écrites et
les discussions au sein de la commission ad hoc du Bureau ont fait apparaître
un large consensus parmi les délégations sur la nécessité de rationaliser,
restructurer et moderniser son travail ainsi que de concentrer ses
activités sur des questions pour lesquelles elle peut avoir un impact
au sein de l’Organisation et/ou dans les États membres.
30. Dans le contexte de la crise budgétaire actuelle de l’Organisation,
il est important de préciser que, du moins à mon avis, l’objectif
de rationalisation ne devrait pas être lié aux difficultés financières
auxquelles l’Organisation est actuellement confrontée. C’est plutôt
l’un des défis majeurs que notre Assemblée doit relever si elle
veut rester pertinente tant au sein de l’Organisation que, en particulier,
dans les États membres. Même si les problèmes budgétaires sont résolus,
d’une manière ou d’une autre, nous devrions veiller à ce que notre Assemblée
débatte des rapports qui relèvent «du but et de la compétence du
Conseil de l’Europe» (voir article 23 du Statut) et sont susceptibles
d’être politiquement pertinents et d’avoir un impact sur le travail
de l’Organisation et/ou dans les États membres, faisant ainsi la
différence
.
31. À cet égard, la commission ad hoc s’est accordée à reconnaître
que le renforcement et le développement du système conventionnel
unique de l’Organisation devraient constituer la priorité la plus importante
de l’Assemblée
. Les activités de l’Assemblée devraient
essentiellement porter sur la manière d’actualiser les conventions
du Conseil de l’Europe, y compris par le biais de protocoles additionnels,
d’en proposer de nouvelles, d’accélérer leur ratification et de
renforcer leur mise en œuvre par les États membres, y compris le
rôle spécifique des parlements dans ce processus. L’exécution des
arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme revêt à cet égard
une importance particulière. Les membres de l’Assemblée ont également
un rôle important à jouer en expliquant à leur électorat l’impact
direct de ces textes juridiques sur leur vie quotidienne, ainsi
qu’en jouant un rôle de catalyseur de l’évolution des mentalités
sur un certain nombre de questions d’éthique ou de dignité humaine.
32. Le renforcement des organes et mécanismes normatifs, consultatifs
et de suivi de l’Organisation et la promotion de la mise en œuvre
de leurs recommandations par les États membres, au moyen de résolutions et/ou
de recommandations, ont également été identifiés comme des aspects
prioritaires. J’ajouterais que notre Assemblée, avec sa composition
unique de parlementaires nationaux issus de la majorité et de l’opposition, est
également la mieux placée pour promouvoir des changements législatifs
concrets au sein des États membres sur les questions couvertes par
les conventions du Conseil de l’Europe (afin d’éviter que les parlements
nationaux ne s’engagent dans des travaux législatifs préparatoires
en partant de zéro).
33. Il est intéressant de noter que cette priorité coïncide également
avec la première priorité de la Présidence finlandaise du Comité
des Ministres, qui vise à renforcer le système des droits humains
et de l’État de droit en Europe, y compris le système des conventions.
34. Comme l’a déclaré le ministre des Affaires étrangères de la
Finlande et Président du Comité des Ministres Timo Soini devant
notre Assemblée lors de la partie de session de janvier 2019, «dans
la situation actuelle, il est très important de souligner les bénéfices
que le respect des droits humains universels et la coopération multilatérale
fondée sur des règles ont procurés aux citoyens européens... [et]
de faire connaître l’impact du travail de la Cour aux citoyens ordinaires».
Pour la Finlande, la valeur ajoutée du Conseil de l’Europe, et ce
qui fait la différence, est précisément le fait que son action soit
au service des citoyens.
35. Dans le même temps, les droits humains et l’État de droit
sont au cœur de l’Agenda 2030 des Nations Unies pour le développement
durable. En tant qu’organisation régionale, le Conseil de l’Europe
a donc une occasion unique de contribuer à la mise en œuvre de cet
agenda. Ainsi, tout travail de l’Assemblée et des États membres
du Conseil de l’Europe en la matière serait reflété au niveau mondial
par le biais du système des Nations Unies.
36. Le développement du système conventionnel de l’Organisation
devrait avant tout viser à réagir aux évolutions et aux nouveaux
défis qui se présentent en Europe et au-delà, car le système des
droits humains et de l’État de droit du Conseil de l’Europe ne fonctionne
pas de façon isolée; il doit être adapté pour garantir les droits
humains, également à l’avenir. Ainsi, l'un des défis récents de
l'Organisation auquel notre Assemblée devrait également répondre
(ce qu’elle a déjà commencé à faire) est de vérifier dans quelle
mesure les instruments actuels du Conseil de l'Europe sont adéquats
et suffisants, ou s’il conviendrait d’en développer de nouveaux
ou si les anciens devraient être consolidés ou appliqués plus efficacement
pour répondre aux nouvelles situations.
37. L’un des nouveaux défis sociétaux qui a retenu une attention
croissante récemment est l’intelligence artificielle, qui implique
des questions juridiques et éthiques, mais qui a aussi des implications
pour la démocratie, la sécurité et la responsabilité. Le changement
climatique est un autre défi sociétal actuel, dont notre Assemblée
s’est déjà beaucoup occupée et qui continue de figurer parmi ses
grandes priorités, étant donné la nécessité pour le Conseil de l’Europe
de jouer un rôle moteur global, en particulier au niveau parlementaire,
pour faciliter la mise en œuvre de l’accord de Paris sur le changement
climatique.
38. Les progrès de la technologie et de la numérisation ainsi
que l’utilisation sans cesse croissante des médias sociaux appellent
eux aussi à actualiser les conventions du Conseil de l’Europe. L’Assemblée
devrait jouer un rôle de précurseur dans la promotion de ces changements.
39. Comme le Président de la République de Finlande, Sauli Niinistö,
l’a déclaré à l’Assemblée lors de la partie de session de janvier
2019, «pour que son action reste pertinente, le Conseil de l’Europe
doit donc, comme toute organisation, faire preuve de souplesse et
se montrer capable de traiter les questions d’actualité dès qu’elles
se présentent. Vivre avec son temps peut sembler banal, mais ce
n’est pas une tâche facile». Cela vaut également pour les travaux
de l’Assemblée.
40. Au-delà des conventions stricto sensu, l’acquis du Conseil
de l’Europe est également constitué d’instruments juridiques non
contraignants, notamment de recommandations et de lignes directrices
élaborées par le Comité des Ministres ou d’autres organes du Conseil
de l’Europe, tels que la Commission européenne pour la démocratie
par le droit (Commission de Venise). Il convient également de les
mettre à jour à la lumière des nouveaux défis, tels que l’utilisation
des médias sociaux. Là encore, nous sommes au cœur de ce que l’Assemblée
devrait promouvoir et faire
.
41. Dans le même temps, le système conventionnel du Conseil de
l’Europe est confronté à de nombreux défis qui ne découlent pas
de l’évolution technologique, mais de tendances négatives susceptibles
de s’accentuer en 2019. Je voudrais citer les exemples mentionnés
par la Présidente de notre Assemblée à l’ouverture de la partie
de session de janvier 2019: «les vives attaques portées contre la
liberté d’expression, la liberté des médias et la liberté de réunion,
les dérives anti-démocratiques et anti-libérales, la montée des discours
nationalistes et populistes, les menaces dirigées contre l’État
de droit, ou encore la mise en cause de l’autorité de la Cour de
Strasbourg». Comme l’a noté notre Présidente, cela est d’autant
plus alarmant que d’importants scrutins se profilent dans plusieurs
de nos États membres et que les élections au Parlement européen
approchent. Il relève de notre responsabilité politique et cela
devrait être l’une des priorités de l’Assemblée de défendre notre
système de valeurs et de normes face aux tendances antidémocratiques
et anti-libérales, à l’extrémisme politique et au nationalisme agressif,
la discrimination, la xénophobie, le discours de haine, et les autres
menaces à l’État de droit.
42. Un autre domaine qui a été suggéré comme une priorité pour
l'Assemblée dans le cadre de la commission ad hoc est celui de l'égalité
de genre, à savoir veiller à ce que les travaux de l'Assemblée tiennent compte
de la perspective de genre. Ce thème coïncide également avec la
deuxième priorité de la Présidence finlandaise concernant le soutien
à l'égalité et aux droits des femmes. La Convention sur la prévention
et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence
domestique est une réalisation remarquable du Conseil de l'Europe
et l'Assemblée devrait continuer à promouvoir sa ratification et/ou
à assurer son application effective par les États membres.
43. Durant les discussions lors la réunion de la commission le
5 mars 2019 à Paris, les membres se sont référés à l’importance
du travail de l’Assemblée en matière d’observation électorale. L’Assemblée
devrait poursuivre le développement de ses outils d’observation
électorale, en coopération étroite avec la Commission de Venise,
afin d’améliorer le cadre juridique de ses États membres en matière
d’élections et de référendums, les pratiques électorales et le respect
par les États membres des recommandations pertinentes.
44. L’augmentation dramatique des attentats terroristes ces dernières
années sur le continent européen a également fait de la prévention
de la radicalisation conduisant au terrorisme et de la lutte contre
le terrorisme une priorité de notre Assemblée et de l’Organisation
tout entière, dans le respect des normes relatives aux droits humains.
La prévention de la radicalisation est explicitement mentionnée
dans la troisième priorité de la Présidence finlandaise. Notre Assemblée
a travaillé main dans la main avec le secteur intergouvernemental de
l’Organisation sur des questions telles que les combattants étrangers
(en promouvant le Protocole additionnel à la Convention du Conseil
de l’Europe pour la prévention du terrorisme, STCE no 217),
les droits humains et la lutte contre le terrorisme, le financement
de Daech et la protection des victimes du terrorisme. Les défis
posés par la crise migratoire et des réfugiés sans précédent, une
conséquence, dans une large mesure, de la guerre en Syrie ainsi
que de la déstabilisation et des conditions économiques désastreuses
dans d’autres parties du monde, ont également été au centre des
préoccupations de l’Assemblée ces dernières années.
45. Les travaux de l’Assemblée sur les migrations et le terrorisme
ont montré à quel point la stabilité et la sécurité en Europe sont
étroitement liées à la stabilité et à la sécurité dans les pays
du voisinage. Notre Assemblée a été pionnière dans la promotion
des relations avec les pays voisins du Conseil de l’Europe et a notamment
développé l’outil du partenariat pour la démocratie afin de promouvoir
les droits humains, l’État de droit et les principes démocratiques
dans le voisinage comme moyen d’améliorer les conditions de vie
et la stabilité dans ces régions, également dans l’intérêt de la
sécurité européenne. Si, dans un contexte de contraintes budgétaires,
les activités de coopération avec le voisinage devaient être financées
principalement par d’autres sources que le budget ordinaire (par
exemple, par le biais de programmes conjoints avec l’Union européenne,
qui est extrêmement intéressée par les travaux du Conseil de l’Europe
dans ce domaine), cela ne devrait pas nous faire sous-estimer leur
pertinence politique. Après dix ans de pratique réussie du statut
de partenaire pour la démocratie avec les parlements des régions
voisines, des discussions ont déjà commencé au sein de notre commission
pour réévaluer ce statut en vue d’adapter éventuellement les règles
à la pratique réelle et souligner l’importance du dialogue politique
entre partenaires (plutôt que toute idée de «suivi» des partenaires),
mais aussi pour lancer l’idée d’un statut auprès de l’Organisation
dans son ensemble.
46. En ce qui concerne les autres thèmes soulevés par les délégations
au sein de la commission ad hoc, une délégation a mentionné la nécessité
pour l’Assemblée d’être plus active dans le domaine des droits sociaux
(au-delà des droits civils et politiques) et une autre a mentionné
les droits des minorités nationales. En outre, pour une délégation,
la rationalisation des travaux de l’Assemblée ne devrait pas la
priver de la possibilité de s’employer à résoudre les conflits en
Europe et dans son voisinage qui pourraient conduire à de graves
violations du droit international, des principes démocratiques ou
des droits humains.
3.2. Les
mesures proposées
47. Sur la base des considérations
qui précèdent et des discussions lors de la réunion de la commission
le 5 mars 2019 à Paris, avec la participation également de la Présidente
de l’Assemblée, je propose que l’Assemblée:
a. décide de rationaliser ses travaux et de concentrer ses
activités sur les questions pour lesquelles elle peut avoir un impact
selon les axes présentés ci-dessus;
b. encourage les commissions à examiner attentivement les
propositions, même après qu’elles aient passé le filtre du Bureau
et de l’Assemblée, afin de ne retenir que celles qui semblent politiquement pertinentes
et pour lesquelles le Conseil de l’Europe pourrait avoir une valeur
ajoutée et un impact tangible. Les sujets qui peuvent n’intéresser
qu’un nombre limité de pays ou de parlementaires ne devraient pas
donner lieu à l’élaboration d’un rapport et à un débat de l’Assemblée;
c. décide de réexaminer, sur la base des propositions de
ses commissions, leur mandat, leur programme de travail et leur
représentation institutionnelle auprès des comités intergouvernementaux
et d’autres organes du Conseil de l’Europe, afin d’en vérifier la
pertinence politique et la valeur ajoutée ;
d. invite ses commissions à se concentrer dans leurs rapports
sur des propositions pouvant se traduire par une action concrète
du secteur intergouvernemental de l’Organisation (organes normatifs,
consultatifs ou de suivi) afin d’améliorer leur impact et leur visibilité,
et le cas échéant, à associer aux critiques adressées aux États
membres (sur des manquements dans le domaine législatif ou dans
l’application de la législation ou sur des violations des droits
humains, des principes démocratiques ou de l’État de droit) des
propositions d’activités de soutien visant à remédier à ces lacunes
ou aux cas de non-conformité; dans les deux cas, ces propositions
devraient être transmises à l’autre organe statutaire, le Comité
des Ministres, sous la forme de recommandations adoptées par l’Assemblée.
4. Améliorer
le suivi au niveau national des textes adoptés par l’Assemblée
4.1. La
coopération entre l’Assemblée et les parlements nationaux
48. La question du suivi au niveau
national des textes adoptés par l’Assemblée a toujours été au centre
de ses préoccupations. L’Assemblée, en tant que forum interparlementaire
de dialogue sans aucun pouvoir législatif, dépend de la coopération
des parlements et des gouvernements nationaux pour donner suite
aux propositions faites dans ses résolutions et recommandations.
En outre, les recommandations de l’Assemblée, organe interparlementaire
du Conseil de l’Europe, doivent être examinées par l’organe intergouvernemental de
l’Organisation, à savoir le Comité des Ministres, comme le précise
le Statut.
49. Dès 1949,
la
Recommandation 8 (1949) exprimait le souhait que les recommandations
de l’Assemblée soient immédiatement examinées par les parlements
nationaux. En 1956,
la
Résolution 104 (1956) a conduit à la création d’un groupe de travail
chargé d’entretenir les liens entre l’Assemblée et les parlements
nationaux et de transmettre certains textes en conséquence. Cela
a donné naissance à la commission des relations parlementaires et
publiques qui a connu un certain succès. Cependant, au cours des
années 1990, elle a été accusée par certains d’être «excessivement
bureaucratique» et ses contributions ont diminué. Elle n’a pas survécu
aux réformes structurelles de 2000, qui ont entraîné une réduction
du nombre de commissions.
50. La
Résolution 1640 (2008) sur l’utilisation par les membres de l’Assemblée de
leur double rôle parlementaire national et européen est l’un des
textes récents les plus importants sur le renforcement de la visibilité
et de l’impact de l’Assemblée au sein des parlements nationaux.
L’Assemblée y invitait notamment le Bureau de l’Assemblée à choisir
certains textes (comme l’avait fait la commission des relations
parlementaires et publiques) en vue de les communiquer aux délégations
et aux parlements nationaux, ainsi que ses commissions à contrôler
les suites données, dans les parlements nationaux, aux textes adoptés, ses
membres à faire connaître les travaux de l’Assemblée et les parlements
nationaux à examiner la mise en œuvre de ces textes. Cependant,
un document de suivi de
la
Résolution 1640 (2008) publié en 2009 a révélé que les principaux textes
adoptés par l’Assemblée n’étaient toujours pas systématiquement
transmis aux parlements nationaux
.
51. Depuis la dissolution de la commission des relations parlementaires
et publiques en 2000, il n’existe plus d’instance spécialement chargée
de superviser la diffusion des résolutions de l’Assemblée. Désormais,
il appartient essentiellement aux parlementaires de prendre l’initiative,
à titre individuel, d’aborder les résolutions de l’Assemblée dans
les questions parlementaires ou au sein des commissions dont ils
sont membres. Les anciens rapporteurs de l’Assemblée sont tenus
d’informer la commission respective de l’Assemblée des suites données
à la résolution ou à la recommandation que l’Assemblée a adoptée
sur la base de leur rapport, un an après l’adoption. Cela dit, le
plus souvent, cet exercice de «reporting» prend la forme d’une courte
intervention orale, ne donne pas lieu à un débat et ne bénéficie
d’aucune visibilité car l’ancien rapporteur n’est pas véritablement
en mesure de vérifier les suites données par les parlements nationaux
ou les États membres.
4.2. L’enquête
sur le suivi par les parlements nationaux
52. Plus récemment, à la suite
des débats tenus au sein de la commission ad hoc et sur la proposition
de son président, le Centre européen de recherche et de documentation
parlementaires (CERDP) a réalisé en mai 2018 une enquête auprès
des parlements des 47 États membres de l’Assemblée sur le suivi
par les parlements nationaux des résolutions adoptées par l’Assemblée.
Il s’agissait de déterminer si les parlements tenaient des sessions
de suivi et/ou prenaient des initiatives concernant les résolutions
adoptées par l’Assemblée; si les résolutions étaient renvoyées aux
commissions parlementaires compétentes et si des mesures étaient
prises en conséquence; et si les délégations nationales établissaient
des rapports sur les activités de l’Assemblée. Les conclusions tirées
des 31 réponses reçues peuvent se résumer ainsi:
a. seuls quelques parlements disposent d’une procédure de
suivi automatique des résolutions adoptées par l’Assemblée. Les
résolutions de l’Assemblée tendent plutôt à figurer incidemment
parmi les initiatives, les débats ou les questions parlementaires
au niveau national;
b. environ la moitié des parlements qui ont participé à l’enquête
renvoient les résolutions aux commissions parlementaires compétentes.
Toutefois, ces renvois se font généralement de manière ad hoc, à l’initiative
de parlementaires individuels plutôt que dans le cadre d’une procédure
automatique. Il semble que les commissions parlementaires nationales
adoptent rarement des mesures directes en conséquence;
c. la plupart des délégations de l’Assemblée établissent
effectivement des rapports et les remettent à leurs parlements nationaux.
Cependant, la fréquence de ce reporting varie
considérablement d’une délégation à l’autre. En outre, seul un nombre
limité de ces rapports sont activement débattus au parlement. Il
semble plus courant qu’ils soient présentés sans débat.
53. Compte tenu des tentatives précédentes d’améliorer le suivi
au niveau national des textes adoptés par l’Assemblée, et compte
tenu des résultats de la récente enquête sur la participation des
parlements nationaux, toute tentative d’améliorer la situation devrait
être simple, systématique et durable, mais également être faisable
d’un point de vue financier et pratique dans les circonstances actuelles.
Elle devra également respecter la nature et l’identité de l’Assemblée,
qui est un forum de dialogue entre des représentants des parlements
nationaux des 47 États membres, et non pas une sorte de «parlement
paneuropéen». L’Assemblée élabore des conclusions et des propositions
qui sont mises à la disposition de ceux qui veulent les mettre en
œuvre. Enfin, plus l’Assemblée axera ses résolutions sur l’essentiel,
plus ses conclusions et propositions auront de chances d’être davantage
prises au sérieux par les parlements nationaux.
4.3. Les
mesures proposées
54. Sur la base des discussions
qui ont eu lieu lors des réunions de la commission les 11 septembre
2018 et 5 mars 2019, et après avoir également pris en compte les
points de vue exprimés par la Présidente de l’Assemblée, je propose
que:
a. le Secrétaire Général de
l’Assemblée veille à ce que les présidents des parlements nationaux
soient régulièrement informés des conclusions et propositions formulées
dans les résolutions de l’Assemblée, surtout celles concernant leur
propre pays;
b. les délégations parlementaires nationales auprès de l'Assemblée
informent régulièrement leurs parlements de leurs activités au sein
de l'Assemblée, de préférence après chaque partie de session, et informent
le Bureau de l'Assemblée du suivi donné aux résolutions de l'Assemblée
au niveau national au moins une fois par an;
c. les rapporteurs de l’Assemblée, en cas de suivi de propositions
spécifiques par pays, préparent, avec la participation active de
la délégation nationale concernée, un mémorandum sur le suivi donné
par les parlements et gouvernements nationaux à leur rapport, au
plus tard un an après son adoption par l'Assemblée;
d. les commissions de l’Assemblée augmentent leurs contacts
avec les commissions compétentes des parlements nationaux, y compris
les échanges de vues entre leurs présidents et/ou rapporteurs respectifs.
e. les groupes politiques de l’Assemblée encouragent leurs
membres à veiller au suivi approprié des résolutions que le groupe
juge pertinentes, et envisagent la création de leurs propres mécanismes
de suivi;
f. ses membres promeuvent la prise de conscience et le suivi
des activités de l’Assemblée et plus généralement du Conseil de
l'Europe en expliquant à leurs électeurs l'impact direct qu'elles
peuvent avoir sur leur vie quotidienne et en agissant comme catalyseurs
pour changer leurs mentalités sur un certain nombre de questions
éthiques.
5. Renforcer
le dialogue entre l’Assemblée parlementaire et le Comité des Ministres
55. Une autre question sur laquelle
un consensus s’est dégagé au sein de la commission ad hoc du Bureau concerne
la nécessité de renforcer le dialogue politique entre l’Assemblée
et le Comité des Ministres, tout en respectant les prérogatives
de chacun. Le rapport de la commission ad hoc comprend une liste
utile de nouvelles propositions et rappelle d’anciennes propositions
qui n’ont pas encore été pleinement mises en œuvre ou qui nécessitent
d’être relancées.
56. Certaines d’entre elles figurent dans les recommandations
de l’Assemblée adoptées il y a une quinzaine d’années et d’autres
dans le rapport du Secrétaire Général du Conseil de l’Europe intitulé
«Dialogue et coopération renforcés entre l’Assemblée parlementaire
et le Comité des Ministres», publié en juin 2010 (
SG/Inf(2010)12), suite à l’accord conjoint conclu entre l’Assemblée
et le Comité des Ministres
. À la suite de cet exercice,
l’Assemblée a étudié les moyens d’élargir une coopération constructive,
d’assurer une meilleure interaction entre les deux organes statutaires
et de coordonner leurs activités et leurs positions
. Les questions relatives à des
instruments spécifiques de dialogue avec le Comité des Ministres
à la disposition de l’Assemblée et au rôle budgétaire de celle-ci
ont déjà été examinées par la commission du Règlement, ou le seront
davantage dans les prochains rapports ou dans son avis sur le présent
rapport.
57. Depuis la publication du rapport de la commission ad hoc et
les décisions de suivi prises par le Bureau de l’Assemblée, les
contacts et le dialogue entre l’Assemblée et le Comité des Ministres
se sont considérablement intensifiés à différents niveaux.
58. Comme l’a déclaré la Présidente de l’Assemblée dans son discours
d’ouverture lors de la partie de session de janvier 2019, juste
après sa réélection, il est nécessaire de «renforcer les relations
entre l’Assemblée et le Comité des Ministres … et poursuivre un
dialogue franc et ouvert, qui respecte les prérogatives et les rôles
des unes, des uns et des autres … et qui se focalise surtout sur
ce qui nous unit, à savoir les objectifs du Conseil de l’Europe,
tels que définis dans son Statut. Notre devoir commun est de renforcer
nos propres mécanismes institutionnels, de manière à pouvoir parler
d’une seule voix lorsqu’il y va de l’avenir de l’Organisation».
59. Pour sa part, le ministre finlandais des Affaires étrangères
et Président du Comité des Ministres, s’adressant à l’Assemblée
durant la même partie de session et évoquant la question de la participation
des États membres aux travaux des deux organes statutaires de l’Organisation,
a souligné que «seule une coopération constructive entre le Comité
des Ministres et l’Assemblée parlementaire pourra apporter des réponses
et permettre de sortir de l’impasse». Ce que le ministre a proposé,
c’est «un dialogue renforcé entre le Comité des Ministres et l’Assemblée
pour enclencher un processus qui débouche sur une solution à la question».
60. Des réunions du Comité Mixte se sont tenues à chaque partie
de session de l’Assemblée depuis juin 2018, y compris sur le rapport
de la commission ad hoc et en particulier sur la question des relations
entre l’Assemblée et le Comité des Ministres.
61. En outre, la fréquence des réunions informelles entre la présidence
de l’Assemblée et la présidence du Comité des Ministres a augmenté
de manière significative au cours des dernières années.
62. Enfin et surtout, la pratique des réunions informelles entre
le Comité des Présidents de l’Assemblée et le Bureau du Comité des
Ministres, avec la participation du Secrétaire Général et de la
Secrétaire Générale adjointe de l’Organisation, a récemment repris
. Le 3 avril 2019 la cinquième réunion
de ce type au cours des 6 derniers mois a eu lieu à Helsinki. Dans
quelle mesure devrait-on substituer à ces réunions informelles un organe
de contact permanent pour garantir la fréquence et une communication
structurée entre l’Assemblée et le Comité des Ministres est une
question que les deux organes doivent se poser.
63. Sans risquer d’interférer dans le processus de dialogue entre
les deux organes statutaires tel que décrit ci-dessus, il sera très
intéressant pour notre commission d’approfondir les propositions
récemment avancées par les délégations nationales au sein de la
commission ad hoc mais aussi, comme indiqué ci-dessus, certaines
propositions plus anciennes qui pourraient être remises sur la table.
64. La première priorité pour nous, parlementaires, est de demander
au Comité des Ministres de veiller à ce que ses réponses aux recommandations
de l’Assemblée traitent pleinement et de façon substantielle toutes les
questions soulevées. Depuis le rapport 2010 du Secrétaire Général,
précédemment mentionné, l’Assemblée a réduit le nombre de recommandations
adressées au Comité des Ministres à des questions qui relèvent des
activités essentielles de l’Organisation, afin de contribuer à améliorer
le contenu des réponses. Toutefois, il semble qu’il y ait toujours
une marge d’amélioration, car certaines réponses ne traitent pas
toutes les questions soulevées, comme cela a été noté dans le rapport
de la commission ad hoc
.
65. Concernant l’exigence de transparence, le Comité des Ministres
pourrait envisager d’introduire la pratique consistant à annexer
à ses réponses aux recommandations de l’Assemblée une opinion dissidente d’un
ou plusieurs États membres (à l’instar de la pratique de l’Assemblée
ou de la Cour européenne des droits de l’homme). Cela pourrait faire
gagner du temps lors de l’adoption de la réponse, puisqu'un ou quelques
États membres en désaccord avec l’opinion majoritaire ne bloqueraient
pas l’adoption. En même temps, cela garantirait aux dissidents que
leur voix serait entendue et permettrait à l’Assemblée de savoir
pourquoi et sur quelles questions certains États membres sont en
désaccord avec l’opinion majoritaire
.
66. Pour améliorer la communication et la compréhension, nous
devrions également envisager de relancer la pratique consistant
à inviter les rapporteurs de l’Assemblée aux groupes de rapporteurs
et aux comités directeurs du Comité des Ministres pour présenter
leurs rapports et expliquer le contenu des recommandations. Il serait
également utile d’inviter les présidents des groupes de rapporteurs
compétents du Comité des Ministres à échanger régulièrement avec
les commissions de l’Assemblée afin de développer de synergies concernant
les dossiers d’intérêt commun
.
67. De même, il a été proposé au sein de la commission ad hoc
de renforcer la pratique des auditions conjointes entre les commissions
de l’Assemblée et les experts intergouvernementaux lors du processus d’élaboration
des nouvelles conventions du Conseil de l’Europe afin d’assurer
à ces conventions, après leur adoption, un meilleur soutien des
parlements nationaux.
68. En ce qui concerne les réunions du Comité Mixte entre les
deux organes statutaires, tout en se félicitant de leur nombre accru
(comme indiqué ci-dessus, une réunion s’est tenue à chaque partie
de session depuis juin 2018), il conviendrait d’explorer la possibilité
de créer un «groupe de travail mixte» à la suite d’un accord entre
le Bureau de l’Assemblée et le Comité des Ministres «pour l’examen
d’une question particulière», conformément à l’article 58.1 du Règlement
de l’Assemblée
.
69. S’agissant du dialogue politique entre l’Assemblée et le gouvernement
de l’État membre exerçant la présidence du Comité des Ministres,
il convient de saluer le fait qu’en plus d’un échange de vues avec
le Ministre des Affaires étrangères en sa qualité de Président du
Comité des Ministres, le dialogue a été, dans la pratique, renforcé
par un échange de vues avec le Premier ministre ou le Chef de l’État
concerné.
70. La proposition faite en 2010 de consulter la délégation nationale
auprès de l’Assemblée lors de la préparation de la future présidence
et de ses priorités semble également avoir été mise en œuvre et
elle a contribué à assurer une coordination plus étroite entre les
composantes gouvernementale et parlementaire dans la préparation
de la présidence. À cet effet, l’Assemblée a prévu dans son Règlement
(article 14.3) que les présidents des délégations nationales des
États membres de la présidence en exercice, de la présidence sortante
et des deux présidences suivantes du Comité des Ministres sont membres
de droit du Bureau avec droit de vote.
71. Malgré des progrès récents en ce qui concerne le dialogue
politique entre les deux organes statutaires, il n'y a pas eu jusqu'à
présent de suivi concret des propositions faites dans la
Résolution 2186 (2017) et dans la
Recommandation
2113 (2017) visant à harmoniser les procédures
en cas de non-respect par un État membre de ses obligations statutaires.
72. Il est par conséquent toujours nécessaire et de la plus haute
importance que les deux organes statutaires s’engagent dans une
réflexion commune afin de mettre en place une procédure de réaction
au niveau du Conseil de l’Europe pour répondre efficacement au non-respect
par un État membre de ses obligations statutaires. Une telle procédure
devrait être en mesure de traiter les aspects politiques et juridiques du
non-respect par un État membre de ses obligations et engagements
statutaires, en particulier en ce qui concerne les conventions auxquelles
il est Partie (par exemple, dans le cadre du suivi de l’article
46.4 de la Convention européenne des droits de l’homme et du non-respect
des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme).
73. Il appartient aux deux organes statutaires de décider des
principes et des modalités d’une telle procédure de réaction conjointe.
L’idée principale devrait cependant être de prévoir un processus
progressif qui permettrait, en fin de compte, de renforcer l’impact
et la pertinence des mesures à prendre, tant au sein de l’État membre
qu’au sein du Conseil de l’Europe, grâce à la synergie et à l’action
conjointe des deux organes statutaires («parler d’une seule voix»).
74. Cette procédure de réaction conjointe pourrait être lancée
par l’Assemblée parlementaire, le Comité des Ministres ou le Secrétaire
Général et tous trois y participeraient. Il pourrait s’agir d’un
processus progressif qui commencerait par la notification de l’État
membre concerné et comprendrait un certain nombre de mesures concrètes
bien définies comme un dialogue coordonné avec l’État concerné,
la mise en place d’un groupe spécial commun pour mener une procédure
de suivi spéciale renforcée, la diffusion d’une déclaration publique et,
enfin, la décision du Comité des Ministres de prendre des mesures
en vertu des articles 7, 8 ou 9 du Statut selon un calendrier fixé.
Une action politique pourrait au besoin s’y ajouter avec un soutien
technique à l’État concerné.
75. La mise en place d’une telle procédure éviterait que l’un
ou l’autre des organes statutaires prenne des décisions sans consulter
l’autre et garantirait la synergie et la cohérence que l’Assemblée
avait déjà évoquées il y a un an et demi dans sa
Résolution
2186 (2017).
76. Bien entendu, un certain nombre de questions doivent être
examinées et convenues entre les deux organes statutaires (dans
des enceintes appropriées), par exemple en ce qui concerne l’évaluation
des circonstances qui pourraient déclencher le processus de réaction
conjointe.
77. D’un point de vue procédural, si les deux organes statutaires
parviennent à un accord préalable sur des termes précis, le nouveau
mécanisme pourrait être formellement établi par une résolution statutaire.
Par le passé, plusieurs résolutions statutaires ont été adoptées
par le Comité des Ministres soit sur la base d’une proposition de
l’Assemblée, soit après consultation de l’Assemblée par le biais
d’une demande d’avis. Il convient de rappeler qu’il y a plus de
vingt ans, dans son rapport final de 1998 au Comité des Ministres (
CM(98)178), le Comité des Sages
faisait des propositions visant «à renforcer
le processus de prise de décision au sein de l’Organisation et à
renforcer et consolider son équilibre institutionnel» (voir paragraphe
40) et avançait (au paragraphe 41) que «le Comité des Ministres
et l’Assemblée parlementaire devraient se concerter sur le texte
d’une résolution statutaire qui clarifierait leurs relations en
tant que les deux principaux partenaires au sein de l’Organisation».
Toutefois, cela n’a pas encore été fait, ce qui laisse place à des malentendus
et éventuellement à des décisions parfois contradictoires.
78. Compte tenu des considérations qui précèdent, je propose que
l’Assemblée:
a. note qu’il est urgent
de créer des synergies et d’organiser des actions conjointes entre
les deux organes statutaires afin de renforcer les possibilités
de l’Organisation d’agir plus efficacement lorsqu’un État membre
manque à ses obligations statutaires ou ne respecte pas les valeurs
et les principes fondamentaux défendus par le Conseil de l’Europe;
b. demande au Comité des Ministres d’examiner sa proposition
de mettre en place, dans de telles situations, une procédure de
réaction conjointe, qui pourrait être engagée à l’initiative de
l’Assemblée parlementaire, du Comité des Ministres ou du Secrétaire
Général à laquelle tous trois participeraient; cette procédure consisterait
en un processus progressif démarrant lors de la notification de
l’État membre concerné et comprenant un certain nombre de mesures
concrètes bien définies comme un dialogue coordonné avec l’État
concerné, la mise en place d’un groupe spécial commun pour mener
une procédure de suivi spéciale renforcée, la diffusion d’une déclaration
publique et, enfin, la décision de prendre des mesures en vertu
des articles 7, 8 ou 9 du Statut selon un calendrier fixé; cette
procédure conjointe renforcerait la légitimité, la crédibilité,
l’impact, la pertinence et la synergie des mesures à prendre, envers
l’État membre concerné comme au sein de l’Organisation, sans préjudice
des pouvoirs et des responsabilités propres à chaque organe; l’action
politique pourrait également s’accompagner, s’il y a lieu, d’un
soutien technique à l’État concerné;
c. appelle à une coordination plus intense et structurée
entre les activités de suivi des deux organes statutaires, du Secrétaire
Général et du Commissaire aux droits de l’homme ainsi que des différents mécanismes
et organes spécialisés de suivi et de conseil de l’Organisation,
sans préjudice de leur indépendance respective.
6. Renforcer
les relations de l’Assemblée avec l’Union européenne et le Parlement
européen et d’autres organisations internationales ou assemblées
parlementaires
6.1. Les
relations avec l’Union européenne
79. La nécessité d’intensifier
le dialogue politique de haut niveau entre l’Assemblée et l’Union
européenne, en particulier avec la Commission européenne et le Parlement
européen, tout en respectant pleinement leurs domaines de compétence
respectifs, et la nécessité de créer des synergies et des partenariats
communs, afin d’améliorer la visibilité de l'Assemblée et d’éviter
la duplication inutile des travaux et des ressources, est une autre
question pour laquelle un consensus s’est dégagé au sein de la commission
ad hoc du Bureau sur le rôle et la mission de l’Assemblée parlementaire.
80. Nombre de nouveaux défis ont vu le jour dans les relations
entre les deux organisations suite à la signature du Mémorandum
d’accord entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne en 2007
sur la base des propositions faites par M. Jean-Claude Juncker,
alors Premier ministre du Luxembourg, dans le rapport intitulé «Conseil
de l'Europe-Union européenne: une même ambition pour le continent
européen»
, qui lui avait été commandité lors
du Sommet de Varsovie. Si le Mémorandum de 2007 confirmait le rôle
central du Conseil de l’Europe en tant que «référence en matière
de droits de l’homme, de primauté du droit et de démocratie en Europe»
et «source paneuropéenne de référence en matière de droits de l’homme»,
l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, en 2009, a offert de
nouvelles opportunités pour un partenariat renforcé entre le Conseil
de l’Europe et l’Union européenne, sur la base de leurs acquis respectifs
et de leurs avantages comparatifs. Le but principal de ce partenariat
était et reste de garantir la cohérence et la complémentarité entre,
d’une part, le projet paneuropéen porté par le Conseil de l’Europe
et, de l’autre, les progrès de l’intégration de l’Union, tout en
évitant les répétitions et les messages contradictoires.
81. L’adhésion de l’Union européenne à la Convention européenne
des droits de l’homme, que le Traité de Lisbonne a transformé en
obligation juridique pour l’Union, et celle de cette dernière à
d’autres conventions du Conseil de l’Europe, notamment la Convention
du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence
à l’égard des femmes et la violence domestique (STCE no 210),
qui prévoit également un mécanisme de suivi, devraient déboucher
sur un espace juridique commun pour la protection des droits humains
sur tout le continent dans l’intérêt de tous les peuples européens.
Cependant l’adhésion de l’Union à la Convention est interrompue
depuis l’avis rendu par la Cour de justice de l’Union européenne
le 18 décembre 2014 (Avis 2/13), cette dernière ayant estimé que
le projet d’accord d’adhésion, établi à l’issue de fastidieuses
négociations entre les institutions de l’Union européenne et le
Conseil de l’Europe, était incompatible avec les traités de l’Union et
posait des questions juridiques et politiques complexes.
82. En même temps, le rôle toujours plus important de l’Union
européenne dans les secteurs clés d’activité du Conseil de l’Europe
(justice, liberté et sécurité démocratique) a accru le risque de
répétitions entre les deux organisations et ainsi la nécessité de
développer des synergies afin d’assurer la cohérence des normes. Également,
le rôle croissant de l’Union européenne dans ces domaines affecte
l’interaction entre l’Union et ses États membres lors de la participation
à des comités directeurs du Conseil de l'Europe et lorsque sont négociées
de nouvelles conventions du Conseil de l'Europe sur des questions
relevant de ces domaines. Des exemples de bonne coordination sont
disponibles dans le cadre des stratégies transversales multi-annuelles, telles
que la Stratégie pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2018-2023
et la Stratégie du Conseil de l'Europe pour les droits de l'enfant
(2016-2021), qui ont été préparées en consultation étroite avec
l’Union européenne pour veiller à la complémentarité et mettre l’accent
sur la valeur ajoutée spécifique de chaque organisation en la matière.
83. L’Assemblée a examiné plusieurs rapports sur les relations
entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne, préparés essentiellement
par ses commissions des questions politiques et de la démocratie
ainsi que des affaires juridiques et des droits de l’homme
,
soulignant les défis susmentionnés dans les résolutions et recommandations
qu’elle a adoptées, réitérant les mêmes messages et appelant de
ses vœux l’adhésion de l’Union européenne à la Convention européenne
des droits de l’homme.
84. Ce n’est pas une coïncidence si le rapport de la commission
ad hoc du Bureau soulève aussi la nécessité de faire de l’adhésion
de l’Union à la Convention européenne des droits de l’homme le principal
sujet du dialogue politique de l’Assemblée avec les diverses institutions
de l’Union, en particulier la Commission européenne et le Parlement
européen. C’est aussi la raison pour laquelle j’ai demandé à rencontrer
le président de la Commission européenne, M. Juncker, et les services
juridiques de la Commission européenne et du Conseil européen. Je
me suis rendu à Bruxelles le 4 avril 2019 et je remercie le Bureau
du Conseil de l’Europe présent dans cette ville de l’excellente
organisation
.
85. Je suis particulièrement reconnaissant à M. le Président Juncker
du temps qu’il a consacré à notre entretien, de son hospitalité
et des assurances qu’il m’a données. M. Juncker m’a confirmé, comme
il l’avait récemment dit au Secrétaire Général du Conseil de l’Europe,
qu’il avait entrepris de relancer les travaux sur l’adhésion de
l’Union à la Convention européenne des droits de l’homme. Il m’a
assuré qu’il ferait tout son possible pour que la Commission, encore
sous sa présidence, présente au Conseil de l’Union européenne des propositions
consolidées en réponse aux questions juridiques soulevées par l’Avis
de la Cour de Luxembourg de 2014. Il a confirmé que l’adhésion de
l’Union européenne à la Convention n’était pas seulement une obligation
juridique selon le Traité de Lisbonne due depuis longtemps, mais
avait également des conséquences politiques importantes qu’il ne
fallait pas sous-estimer.
86. Comme les représentants des services juridiques de la Commission
européenne et du Conseil de l’Union européenne me l’ont aussi expliqué,
à la suite d’échanges qu’ils ont eus, les travaux techniques sont achevés
du côté de la Commission en ce sens qu’une réponse est proposée
pour chaque question soulevée par la Cour. Une fois les propositions
de la Commission soumises au Conseil de l’Union européenne, des discussions
se tiendront entre les 28 ou 27 États membres de l’Union européenne
(en fonction de l’issue du Brexit) et toute proposition concertée
sera ensuite examinée dans le cadre de négociations avec les 47
États membres du Conseil de l’Europe. Lors des entretiens que j’ai
eus avec des représentants des services juridiques de la Commission
européenne et du Conseil européen, j’ai aussi discuté de l’adhésion
de l’Union européenne à d’autres conventions du Conseil de l’Europe,
en particulier la Convention d’Istanbul et celle sur la protection
des données, ainsi que de la participation éventuelle de l’Union
européenne au Groupe d’États contre la corruption (GRECO).
87. Ces dernières années, plusieurs institutions de l’Union (le
Parlement européen, la Commission européenne, le Conseil européen,
la Cour de justice de l’Union européenne) ont appliqué, établi ou
proposé divers mécanismes, procédures ou initiatives d’ampleur et
d’effets variables concernant le respect de l’État de droit. Cette
évolution relativement récente pose un nouveau défi puisque le Conseil
de l’Europe est invité à veiller à ce que tout mécanisme de l’Union
européenne relatif à l’État de droit se fonde sur les normes du Conseil
de l’Europe en la matière, ce qui comprend la jurisprudence de la
Cour européenne des droits de l’homme, les recommandations pertinentes
du Comité des Ministres, les normes et avis de la Commission de Venise
(dont la «Liste des critères de l’État de droit»), les avis et/ou
conclusions des organes consultatifs et de suivi du Conseil de l’Europe,
et ne débouche pas sur des messages contradictoires ou des pratiques
de course à la «juridiction» la plus avantageuse. L’Assemblée devrait
en outre s’assurer que ses propres travaux dans le domaine soient
aussi une source de référence pour l’Union européenne lorsqu’elle
analyse la conformité aux valeurs garanties à l’article 2 du Traité
sur l’Union européenne dans le cadre de ses diverses procédures
ou initiatives existantes. Les travaux de la commission de suivi
de l’Assemblée devraient être pris en compte à cet égard, mais aussi
les travaux pertinents de ses commissions générales, en particulier
les conclusions et recommandations concernant des pays donnés qui
figurent dans les rapports et résolutions thématiques ou spécifiques
à des pays.
88. Un rapport préparé par Mme Petra
De Sutter sur la «Création d’un mécanisme de l’Union européenne pour
la démocratie, l’État de droit et les droits fondamentaux»
souligne ces nouveaux défis et réaffirme
la nécessité de garantir la synergie d’action et éviter une fragmentation
de la compréhension des valeurs fondamentales et de leur mise en
œuvre sur le continent européen, à travers des arrangements pratiques
à tous les niveaux. Il invite par exemple l’Union européenne à prévoir
des garanties dans tout mécanisme de l’Union européenne existant
ou futur, afin de permettre que l'évaluation ou l'action de l'Union
européenne ne porte pas atteinte aux procédures existantes relevant
des mécanismes consultatifs ou de suivi du Conseil de l’Europe,
à l'instar de l'article 53 de la Charte des droits fondamentaux
de l'Union européenne.
89. Je soutiens en particulier la proposition faite dans ce rapport
d’intensifier le dialogue avec les parlements nationaux, dans des
conditions favorisant un débat ouvert sur les recommandations émanant
des deux organisations sur le respect des normes relatives aux droits
humains, à l’État de droit et à la démocratie par les États membres,
et d’utiliser la plateforme que constitue l’Assemblée pour rapprocher
dans les meilleurs délais les décideurs européens et les représentants
des parlements nationaux. Il conviendra naturellement de réfléchir
soigneusement aux détails et aux modalités précises de ce débat
et de les fixer d’un commun accord. À mon avis, ce débat périodique
(qui devrait se tenir tous les ans comme le propose Mme De
Sutter ou tous les deux ans pour des raisons pratiques ou logistiques)
devrait être intitulé «Débat sur la démocratie, l’État de droit et
les droits humains» afin d’indiquer clairement que les trois piliers
du Conseil de l’Europe sont concernés. Par analogie avec le débat
biennal sur les activités de l’Organisation de coopération et de
développement économiques (OCDE) pour lequel l’Assemblée siège dans
une composition élargie aux délégations parlementaires des États
membres de l’OCDE qui ne sont pas membres du Conseil de l’Europe,
dans le cas d’un débat périodique sur la démocratie, l’État de droit
et les droits humains, organisé en coopération avec les institutions
de l’Union européenne, l’Assemblée pourrait siéger en composition
restreinte aux délégations parlementaires nationales des États membres
de l’Union européenne. La Conférence des présidents de parlements
pourrait également offrir une plateforme pour un tel débat.
90. La veille de mon arrivée à Bruxelles, le 3 avril 2019, la
Commission européenne a publié une communication sur l’État de droit
qui renvoie à plusieurs reprises aux travaux du Conseil de l’Europe
et ouvre la voie à ce dernier pour qu’il avance des propositions
concrètes visant à renforcer la boîte à outils de l’Union européenne
dans le domaine de l’État de droit.
91. Lorsque j’ai rencontré le Président Juncker, je me suis félicité
de cette évolution récente qui est aussi conforme à ce qu’il avait
proposé dans son rapport en 2006 lorsqu’il indiquait que «l’Union
européenne doit s’appuyer sur les évaluations conduites par le Conseil
de l’Europe». J’ai aussi mentionné les discussions en cours entre
le Conseil de l’Europe et l’Union européenne sur la possibilité
que cette dernière verse au Conseil de l’Europe une contribution
non affectée destinée aux activités de ce dernier relatives à l’État
de droit
.
Cette participation serait tout à fait justifiée, car les institutions
de l’Union se servent des travaux réalisés par le Conseil de l’Europe
pour apprécier le respect de l’État de droit dans les États membres
communs aux deux organisations ainsi que dans ceux qui sont engagés
dans le processus d’élargissement ou font partie du Partenariat
oriental. Le Président Juncker a dit qu’il appréciait beaucoup la
contribution du Conseil de l’Europe dans les initiatives récentes
de la Commission européenne visant à examiner les développements
liés à l’État de droit dans certains États membres, en particulier
de la Commission de Venise, et était prêt à considérer des moyens
afin que l’Union européenne soutienne le travail du Conseil de l’Europe
dans le domaine de l’État de droit.
92. Discutant du rôle du Conseil de l’Europe dans l’architecture
européenne globale, le Président Juncker a souligné que le Conseil
de l’Europe était et devait rester l’endroit où toutes les nations
européennes peuvent se rencontrer. Il a aussi pleinement soutenu
les propositions que j’ai insérées dans le présent rapport et que j’ai
brièvement partagées avec lui en ce qui concerne la nécessité de
développer des synergies et de promouvoir une action conjointe des
deux organes statutaires et du Secrétaire Général du Conseil de
l’Europe afin d’améliorer la capacité de réaction de l’Organisation
en cas de violation, par un État membre, de ses obligations statutaires
ou de non-respect des valeurs et des principes fondamentaux du Conseil
de l’Europe.
93. À Bruxelles, j’ai aussi discuté de la nécessité de renforcer
le dialogue et la coopération entre le Conseil de l’Europe et l’Union
européenne avec Mme Marja Rislakki, représentante
permanente de la Finlande auprès de l’Union européenne. Évoquant
le ferme engagement de la Présidence finlandaise du Comité des Ministres de
soutenir le Conseil de l’Europe, j’ai exprimé l’espoir que la Finlande
le fasse aussi lorsqu’elle présidera le Conseil de l’Union européenne
à compter du 1er juillet 2019. Mme Rislakki
m’a assurée que la Finlande ferait tout son possible pour faire
avancer l’adhésion de l’Union européenne à la Convention européenne
des droits de l’homme au cas où le Conseil de l’Union européenne
serait saisi du dossier pendant sa présidence.
94. Le rapport de la Commission ad hoc du Bureau comprend également
les propositions suivantes sur les modalités de renforcement du
dialogue entre l’Assemblée et l’Union européenne, dont j’ai aussi
inclus une partie dans le projet de résolution:
a. établir des contacts directs entre l’Assemblée et la Conférence
des organes parlementaires spécialisés dans les affaires de l’Union
des parlements de l’Union européenne (COSAC), y compris d’éventuelles réunions
de commissions conjointes;
b. créer un réseau de parlementarisme européen, comprenant
l’Assemblée, des parlements nationaux et le Parlement européen afin
de coordonner l’action politique, de rationaliser la communication
et de faciliter le flux d’informations, de bonnes pratiques, d’idées
et de recommandations et, grâce à ce flux, de mieux harmoniser les
législations nationales;
c. organiser des auditions régulières, en commission ou en
plénière, avec des responsables de l'Union européenne (Commissaire
européen en charge de l'État de droit et des droits de l'homme,
Commissaire européen en charge de la justice et des affaires intérieures,
chef de l'Agence des droits fondamentaux, etc.);
d. organiser des échanges fréquents entre les commissions
de l'Assemblée et celles du Parlement européen ou favoriser autrement
la coopération entre l'Assemblée et le Parlement européen, par exemple
à travers la promotion de projets communs;
e. mettre en place un organe informel conjoint entre l’Assemblée
et le Parlement européen afin de débattre des questions d’actualité
présentant un intérêt commun, réuni dans une composition variant
selon les besoins, ou organiser, conjointement avec le Parlement
européen, des conférences interparlementaires sur des thèmes spécifiques
d'intérêt commun;
f. renforcer la coopération dans des missions conjointes
d'observation électorale;
g. envisager l’actualisation de l'accord relatif au renforcement
de la coopération entre l’Assemblée et le Parlement européen de
2007, afin de prendre en compte les développements les plus récents intervenus
depuis l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne.
95. Il est clair que la question des relations entre le Conseil
de l’Europe et l’Union européenne, y compris le Parlement européen,
devrait demeurer l’une des premières priorités de notre Assemblée.
Étant donné qu’elle va au-delà de la portée du présent rapport,
il serait opportun que la commission des questions politiques et
de la démocratie élabore un nouveau rapport sur la coopération générale
entre les deux organisations à la suite des élections au Parlement
européen qui se tiendront en mai 2019.
6.2. Les
relations avec d’autres organisations ou assemblées parlementaires
internationales
96. Plusieurs membres de la commission
ad hoc du Bureau sur le rôle et la mission de l’Assemblée parlementaire
ont évoqué la nécessité pour l’Assemblée de renforcer ses relations
avec d’autres organisations ou institutions internationales et/ou
régionales et plus particulièrement avec leurs assemblées parlementaires. Étaient
en particulier visées les Nations Unies, l’OCDE, ainsi que l’Organisation
pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) et son Assemblée
parlementaire. Une délégation a également mentionné la nécessité
d’affiner l’interaction avec l’Union Interparlementaire (UIP) et
l’Assemblée interparlementaire de la Communauté des États indépendants
(AIP-CEI), tandis qu’une autre estimait aussi nécessaire de renforcer
la coopération avec l’Assemblée parlementaire de l'Organisation
du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN).
97. S’agissant de la coopération avec les Nations Unies, et afin
d’éviter les répétitions inutiles, je renvoie au rapport que vient
d’adopter la commission des questions politiques et de la démocratie
sur «Le renforcement de la coopération avec les Nations Unies dans
la mise en œuvre du Programme de développement durable 2030»
. Le projet de résolution engage
l’Assemblée à examiner régulièrement la mise en œuvre des objectifs de
développement durable (ODD) et de jouer pleinement son rôle de plateforme
d’échange des expériences et bonnes pratiques nationales. En outre,
selon les termes du projet de résolution, l’Assemblée devrait renforcer
la contribution parlementaire aux Nations Unies, et le dialogue
avec elles, en mettant l’accent sur la réalisation des ODD et la
complémentarité entre le Conseil de l’Europe et les Nations Unies.
Je renvoie également au rapport de la commission des questions sociales,
de la santé et du développement durable sur la «Mise en œuvre des
Objectifs de développement durable: la nécessaire synergie de tous
les acteurs, des parlements aux collectivités locales»
. Ce rapport vise à mobiliser les
parlements nationaux et les collectivités territoriales afin de
soutenir les ODD. Je soutiens pleinement les propositions faites
dans ces rapports.
98. Pour ce qui est de la coopération avec l’OCDE, les débats
de l’Assemblée élargie ont été instaurés en 1993 pour permettre
la participation de délégations des parlements nationaux des États
membres de l’OCDE non membres du Conseil de l’Europe et du Parlement
européen. Ces débats se déroulent conformément à des règles spéciales,
adoptées par l’Assemblée élargie en 1992 et révisées depuis. À cet
égard, des mesures concrètes ont été adoptées récemment sur proposition
de la commission des questions politiques et de la démocratie et
approuvées par le Bureau de l’Assemblée à l’issue d’une réunion
entre l’ancien président de l’Assemblée, M. Nicoletti, et le Secrétaire
général de l’OCDE, M. Gurría, et des échanges subséquents entre les
secrétariats des deux organisations et d’un échange de lettres entre
leurs secrétaires généraux en janvier 2019. Ces mesures, que je
salue entièrement, réduisent le nombre de débats de l’Assemblée
élargie sur les activités de l’OCDE (qui passerait d’un par an à
un tous les deux ans) tout en renforçant dans le même temps l’impact
et la visibilité de la coopération entre les deux organisations
en créant une relation institutionnelle plus forte et plus efficace,
rationalisant les procédures et en faisant une meilleure utilisation
des atouts des deux organisations. Ces mesures comprennent entre
autres la participation, en tant que partenaire institutionnel, d’une
délégation de l’Assemblée aux réunions du Réseau parlementaire mondial
de l’OCDE tous les deux ans (durant l’année où il n’y a pas de débat
relatif à l’OCDE à l’Assemblée), la portée du rapport de l’Assemblée sur
des thèmes précis, qui seront définis par le rapporteur à la suite
de contacts avec l’OCDE, plutôt que sur les activités de l’OCDE
en général, ainsi que des échanges de vues réguliers entre la commission
des questions politiques et des experts de l’OCDE
.
99. En ce qui concerne les relations avec l’AIP-CEI, je rappelle
que nos deux assemblées coopèrent sur la base d’un accord signé
en 1997. Notre Assemblée participe régulièrement voire coorganise
des conférences parlementaires avec cette dernière sur des sujets
d’intérêt commun, tels que la lutte contre le terrorisme. Ces activités
conjointes nous offrent l’occasion de souligner, périodiquement,
notre engagement fort aux valeurs fondamentales que le Conseil de
l’Europe est tenu de défendre et qui ne sont pas nécessairement
une priorité pour quelques États membres de la CEI.
100. La question du renforcement des relations avec l’OSCE et son
Assemblée parlementaire, voire avec l’Assemblée parlementaire de
l’OTAN, qui toutes deux ont des accords de coopération avec notre
Assemblée, mérite une réflexion plus approfondie et éventuellement
un rapport distinct de la commission des questions politiques et
de la démocratie.
101. En général, il serait opportun pour notre Assemblée d’évaluer
ses accords de coopération avec différentes assemblées ou organisations
parlementaires internationales, afin de les mettre éventuellement
à jour et d’assurer leur efficacité.
7. Conclusions
102. Créé il y a 70 ans pour réaliser
une union plus étroite entre ses États membres sur la base de valeurs et
de principes communs, le Conseil de l’Europe est aujourd’hui confronté
à de nombreux défis qui font peser une grave menace sur l’efficacité
de ses organes statutaires et de ses mécanismes et instruments et
ainsi, à terme, sur les objectifs statutaires de l’Organisation.
103. L’Assemblée parlementaire, en tant que l’un des deux organes
statutaires de l’Organisation, a elle-même joué un rôle essentiel
dans le renforcement de l’unité dans la diversité en Europe. Le
rapport et le projet de résolution, s’appuyant aussi sur les conclusions
de la commission ad hoc de son Bureau sur le rôle et la mission
de l’Assemblée parlementaire, rappellent et réaffirment le rôle
délibératif important de l’Assemblée, ainsi que son rôle en tant
que gardienne des droits humains et de la démocratie en Europe,
«moteur politique» de l’Organisation et forum paneuropéen au service
du dialogue interparlementaire. Cependant, l’Assemblée n’a pas encore
été en mesure d’aide efficacement à surmonter les crises qui menacent
actuellement l’Organisation.
104. Ainsi le présent rapport et les projets de résolution et de
recommandation proposent des mesures pour relever les défis actuels,
promouvoir la sécurité en Europe, rétablir la confiance envers le
Conseil de l’Europe et entre les États membres et préserver l’avenir
de l’Organisation.
105. En ces temps difficiles pour l’Organisation, le rapport propose
que l’Assemblée rationalise, restructure et modernise son propre
travail et concentre ses activités sur les questions relevant du
but et de la compétence de l’Organisation, qui présentent un intérêt
politique et sont susceptibles d’avoir un impact sur le travail
de l’Organisation et/ou dans les États membres, au bénéfice des
citoyens européens. Renforcer et développer le système conventionnel
unique de l’Organisation est considéré comme la priorité principale
de l’Assemblée. Des mesures concrètes sont proposées dans le projet
de résolution.
106. Il n’est possible d’améliorer l’impact et la visibilité des
travaux de l’Assemblée que s’il est donné suite aux décisions qu’elle
prend, en particulier par les parlements nationaux ou par leur intermédiaire.
À cet égard, le rapport et le projet de résolution propose des mesures
concrètes pour améliorer le suivi donné aux résolutions de l’Assemblée.
107. Notant que la commission ad hoc du Bureau a souligné la nécessité
de renforcer le dialogue politique entre l’Assemblée et le Comité
des Ministres, le rapport et les projets de résolution et de recommandation saluent
le fait que, récemment, les contacts et le dialogue avec le Comité
des Ministres se soient intensifiés de manière significative à différents
niveaux et sous différentes formes et proposent de créer des synergies
et d’organiser des actions conjointes entre les deux organes statutaires
du Conseil de l’Europe afin de renforcer la capacité de l’Organisation
d’agir plus efficacement lorsqu’un État membre manque à ses obligations statutaires
ou ne respecte pas les valeurs et les principes fondamentaux défendus
par le Conseil de l’Europe.
108. En ce qui concerne la nécessité de renforcer le dialogue politique
entre l'Assemblée et l'Union européenne, le rapport et le projet
de résolution soulignent que la promotion de l’adhésion de l’Union européenne
à la Convention européenne des droits de l’homme doit rester au
premier plan de ce dialogue, car elle aboutira à un espace juridique
commun pour la protection des droits humains sur l’ensemble du continent dans
l’intérêt de tous les Européens. Ils mettent en exergue les nouveaux
défis dans les relations entre l’Union européenne et le Conseil
de l’Europe dans le domaine de l’État de droit et rappellent des
nouvelles ou anciennes propositions pour une coopération plus étroite
avec le Parlement européen.
109. Enfin, le rapport et le projet de résolution passent brièvement
en revue la coopération avec d'autres organisations internationales
et/ou régionales, en particulier les Nations Unies et l’OCDE, et
proposent une évaluation des accords de coopération de l’Assemblée
avec les différentes assemblées ou organisations parlementaires
internationales afin de les mettre éventuellement à jour et renforcer
leur efficacité.