1. Introduction
1. Il y a un an, lors de sa partie
de session de juin 2018, l'Assemblée parlementaire avait décidé,
sur proposition du Groupe des socialistes, démocrates et verts (SOC),
de tenir un débat selon la procédure d'urgence sur les «Obligations
internationales des États membres du Conseil de l'Europe de protéger
la vie en mer». Mme De Sutter avait été
désignée rapporteur et le rapport avait été débattu le 27 juin.
2. Le Groupe des socialistes a proposé un nouveau débat sur le
sujet le 29 septembre 2019, pour lequel j'ai été désigné rapporteur.
J'étais en effet vivement intéressé par la possibilité de travailler
sur ce sujet, dont j'avais déjà abordé certains aspects dans le
rapport que j'avais préparé en 2018 sur le traitement extraterritorial des
demandes d'asile et la création de centres d’accueil sûrs pour les
réfugiés à l'étranger
. De plus, je prépare actuellement
un rapport sur les droits et obligations des ONG qui viennent en
aide aux réfugiés et aux migrants en Europe, un texte qui a des
liens évidents avec le présent rapport.
3. Ce nouveau rapport est avant tout motivé par la tragédie qui
continue de se dérouler en Méditerranée et qui est marquée par de
nouveaux morts annoncés chaque jour par les médias et les organisations internationales,
la dégradation persistante des conditions de vie des personnes victimes
de la traite et du trafic d’êtres humains, l'extension des «zones
dangereuses» maritimes à de nouvelles zones et la stigmatisation
des ONG. Toutes ces conséquences dramatiques ont été décrites et
dénoncées dans les précédents textes adoptés par l'Assemblée.
4. Deuxièmement, le Conseil de l'Europe, en tant que défenseur
des droits de l'homme dans toute l'Europe, devrait continuer à prendre
une position de premier plan sur les questions de migration, d’autant
que l'Assemblée est la mieux placée pour donner une vue d'ensemble
et appeler à renforcer l’action collective, en attirant l'attention
sur la nécessité de respecter les dispositions de la Convention
européenne des droits de l'homme (STE n° 5) et de mettre en œuvre
les recommandations formulées par des instances tels que le Commissaire
aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe et le Représentant
spécial du Secrétaire Général pour les migrations et les réfugiés.
5. Troisièmement, ce rapport vient à un moment où, malgré un
contexte toujours très négatif, des événements récents montrent
que les États membres de l'Union européenne et du Conseil de l'Europe semblent
davantage disposés à trouver collectivement des stratégies pour
gérer plus efficacement les flux migratoires, réduire le nombre
atroce de pertes de vies humaines en mer et assurer un traitement
décent et équitable des migrants contraints de quitter leur pays
pour survivre. De nouvelles propositions, recommandations et lignes
directrices ont également été formulées par des organisations internationales visant
à aider les États européens à mieux gérer l'accueil et la protection
des migrants qui se rendent en Europe. Toutes ces initiatives devraient
être accueillies favorablement, encouragées et éventuellement combinées
pour constituer une base solide pour l’action collective.
2. La situation actuelle en Méditerranée
6. Le débat d'urgence de 2018
a été déclenché par le refus des gouvernements italien et maltais
d'autoriser l’accès à leurs ports nationaux de deux navires qui
avaient secouru des demandeurs d’asile au large des côtes libyennes,
l’Aquarius (exploité par SOS Méditerranée et appartenant à l'ONG
allemande Sea Watch) et, un peu plus tard, le Lifeline (exploité
sous pavillon néerlandais par l'ONG allemande Mission Lifeline).
D’autres refus d’accès ont été notés en 2019, notamment celui qui
a été opposé en août au capitaine du navire Ocean Viking des ONG Médecins Sans Frontière et SOS Méditerranée, lequel avait
secouru plus de 300 personnes qui ont finalement pu débarquer à
Malte après deux semaines en mer grâce à un accord de relocalisation.
Après plusieurs incidents de ce type et à la suite d’une évolution
des comportements politiques, en particulier en Italie, on se remet
à espérer que les sauvetages en mer seront suivis d'un accueil rapide
et de meilleures conditions, bien que les moyens restent insuffisants
pour mettre en place des installations d'hébergement décentes.
7. Selon le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés
(HCR), 59 503 migrants sont arrivés en Europe par la mer en 2019
. Cependant, le fait qu’aucune protection
n’ait pu être accordée aux migrants au cours de l’été 2019, alors
que 30 % d’entre eux avaient besoin d'une protection internationale,
a montré à quel point il était nécessaire d’établir un nouveau mécanisme
régional d’intervention immédiate garantissant un débarquement prévisible
et le traitement ultérieur des personnes sauvées en mer.
8. Les demandeurs d'asile empruntent trois grands itinéraires
migratoires pour se rendre en Europe: la Méditerranée occidentale
entre l'Espagne et le Maroc, la Méditerranée orientale, en traversant
la mer pour atteindre les îles grecques de la mer Égée orientale,
et la région de la Méditerranée centrale, qui est la partie de la
mer Méditerranée située entre l'Afrique du Nord et l'Italie
. Les migrants qui arrivent en Méditerranée occidentale
viennent principalement du Maroc, de la Guinée, du Mali et de l'Algérie;
en Méditerranée orientale, les Syriens sont les plus nombreux, suivis
des Afghans et des Irakiens; en Méditerranée centrale, les demandeurs
d'asile arrivent principalement de Tunisie, de Libye et d'Érythrée.
En 2019 (janvier-août), le nombre de franchissements illégaux de
frontières est resté élevé: 14 824 en Méditerranée occidentale,
858 en Méditerranée centrale et 3 060 en Méditerranée orientale.
9. Au total, au cours des six dernières années, 18 888 personnes
ayant fui leur foyer en quête de sécurité sont mortes dans la région
méditerranéenne. D’après le projet sur les migrants disparus (MPP)
de l’Organisation internationale pour les migrations, qui enregistre
le nombre de migrants décédés dans le monde entier, au 29 septembre
2019, 970 personnes avaient perdu la vie dans la région méditerranéenne
(252 en Méditerranée occidentale, 59 en Méditerranée orientale et
659 en Méditerranée centrale). La proportion de décès par rapport
aux tentatives de traversée en Méditerranée reste également extrêmement
élevée même si elle est inférieure à celle de 2016, point culminant
de la «crise» des réfugiés. En effet, de 1,5 % en 2018 (1 855 décès
pour 118 398 tentatives de traversée), le taux est tombé à 0,9 %
en 2019 (970 décès pour 107 999 tentatives de traversée).
10. En ce qui concerne le nombre de migrants décédés par région
d'origine, on compte environ 722 victimes issues d’une région indéterminée,
tandis que d’autres viennent d'Afrique du Nord (77), de la Corne
de l'Afrique (15) et d'Afrique subsaharienne (47). Certaines d’entre
elles viendraient d'Afrique subsaharienne (68), du Moyen-Orient
(11) et d'autres régions méditerranéennes (7).
11. En plus des mesures prises dans différents domaines d’action,
la communauté internationale a réagi à ces développements par des
déclarations, telles que celle du 25 juillet 2019 de Filippo Grandi,
Haut-Commissaire des Nations-Unies pour les Réfugiés, qui a déploré
la mort de 150 personnes dans une collision en mer en Libye, l’incident
le plus médiatisé depuis mai 2017. Le Haut-Commissaire a plaidé
en faveur de la reprise des opérations de secours en mer, de la
fin de la détention des réfugiés et des migrants en Libye et de la
multiplication des voies de sortie sûres du pays. L’Assemblée a
aussi réagi tout récemment par une déclaration de la Présidente
de de la commission des migrants, des réfugiés et des personnes
déplacées le 14 août 2019, partageant l’inquiétude du HCR concernant
l’adoption par le Parlement italien d’une loi imposant des restrictions
significatives sur les ONG menant des opérations de sauvetage en
mer, dénonçant le risque de cette loi qui serait d’augmenter le
nombre de morts. En même temps, elle a appelé la communauté européenne
à montrer plus de solidarité avec l’Italie en participant à la réinstallation
des migrants.
3. Le
traitement des causes
12. Selon la
Résolution 2228 (2018) sur l'impact sur les droits de l'homme de la «dimension
extérieure» de la politique d'asile et de migration de l'Union européenne:
hors de vue, hors de droits?, la délégation des procédures de migration
aux pays extérieurs aux frontières de l'Union européenne est censée
«alléger la pression migratoire sur les États membres aux frontières
de l'Union européenne, facilitant ainsi la réinstallation des migrants
dans toute l'Europe et un afflux plus régulier; réduire la nécessité
pour les migrants d'entreprendre des voyages terrestres et maritimes
potentiellement mortels; et promouvoir la coopération avec les voisins
de l'Europe en matière de gestion des migrations».
13. Dans ce contexte, les opérations aéronavales de l'Union européenne,
Triton et Sophia, ont permis de réduire de près de 32 % les arrivées
sur les côtes italiennes entre novembre 2016 et novembre 2017 et
de sauver plus de 200 000 vies depuis 2014. Le financement de l'Union
européenne a également permis au HCR et à l’OIM d'aider les réfugiés
et les migrants. Toutefois, le transfert de responsabilités à des
pays tiers pour renforcer les contrôles aux frontières de l'Union
européenne entraîne de graves risques pour les droits de l'homme;
il augmente le risque pour les migrants d’être «bloqués» dans des
pays de transit par le biais de la réadmission, ainsi que le recours
accru à des mesures punitives et restrictives telles que le refoulement,
la détention arbitraire et les mauvais traitements. C'est également
un moyen pour de nombreux États membres de l'Union européenne de
prendre leurs distances par rapport à la question politiquement
controversée de l'assistance et de l'intégration des réfugiés.
14. Maintenir les migrants à une plus grande distance peut aussi,
en fait, constituer un moyen d'éviter des situations de refoulement
en Europe. Dans la
Résolution
2215 (2018) susmentionnée, l’Assemblée invitait les États membres
du Conseil de l’Europe à se conformer aux obligations qui leur incombent
en vertu de l’article 3 de la Convention européenne des droits de
l’homme, qui leur impose de s’abstenir de renvoyer des migrants vers
des pays où ils sont exposés au risque de torture et de peines ou
traitements inhumains ou dégradants, et à ne pas coopérer avec des
pays tiers en matière de contrôle des migrations si cela risque
de provoquer des violations de l’article 3.
4. Opérations
de recherche et sauvetage: coopération avec les ONG en Méditerranée
15. Le rapport à venir, intitulé
«Droits et obligations des ONG venant en aide aux réfugiés et aux
migrants en Europe», se penchera en particulier sur les ONG portant
secours à des migrants en mer.
16. Depuis la fin de l’opération Mare Nostrum des garde-côtes
italiens en 2014
les États membres de l’Union européenne
ont eu recours à l’opération Sophia de l’EUNAVFOR MED
et à l’opération Triton de FRONTEX
, ainsi qu’aux opérations de sauvetage
menées par les garde-côtes libyens
et les garde-côtes italiens et maltais
en ce qui concerne la Méditerranée centrale, et par les garde-côtes
marocains et espagnols pour ce qui est de la Méditerranée occidentale
. On note à cet égard que les garde-côtes
nationaux de Grèce et de Turquie n’ont pas grandement secouru les
migrants en détresse en Méditerranée orientale mais que certains
navires privés ont parfois été en mesure de le faire
. Malgré ces opérations, les morts
en mer se poursuivent.
17. Les navires de secours exploités par des ONG ont une importante
fonction de sauvetage de vies humaines, de sorte que l’on ne peut
que regretter les poursuites, voire même les persécutions, dont
font l’objet les organisations concernées. Les exemples sont nombreux
et maintenant bien documentés pour la plupart, notamment celui du
Sea-Watch3. Le 26 janvier 2019, la Cour européenne des droits de
l’homme n’a pas fait droit à la demande de mesures provisoires d’urgence
en vue de débarquer formulée par la capitaine et 40 migrants, mais
a demandé au gouvernement italien de prendre toutes les mesures
nécessaires pour fournir aux requérants les soins médicaux, la nourriture,
l’eau et les produits de première nécessité nécessaires (requêtes
n° 5504/19 et 5604/19)
.
18. Le même raisonnement a été confirmé dans la décision de la
Cour du 26 juin 2019 dans l’affaire
Rackete et
autres c. Italie (requête n° 32969/19)
. Cependant, la situation à bord
du Sea-Watch3 est devenue si difficile que la capitaine Rackete
a finalement décidé, le 29 juin 2019, d’entrer dans le port sicilien
de Lampedusa, désobéissant ainsi aux ordres des gardes-frontières
italiens. Accusée d’avoir défié un navire de guerre et mis en danger
la vie de quatre policiers en vertu du droit pénal italien, son
assignation à résidence a finalement été levée
. L’affaire est toujours pendante,
mais Mme Rackete a bénéficié d’un large
soutien international
.
19. La plupart des poursuites sont principalement fondées sur
des allégations selon lesquelles des ONG avaient aidé des passeurs.
Le Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air
et mer de 2000, additionnel à la Convention contre la criminalité
transnationale organisée (ci-après dénommé «Protocole de Palerme»)
traite de cette question. Il a été signé par presque tous les États
membres du Conseil de l’Europe
.
20. Aux termes de l’article 3 du Protocole de Palerme, toute personne
qui tire directement ou indirectement «un avantage financier ou
autre avantage matériel» du trafic illicite de migrants est passible
de poursuites pénales. Or, dans les cas mentionnés dans l’aperçu
général de l’Agence des droits fondamentaux de l’Unio européenne
, il apparaît qu’aucune affirmation
de ce type n’a été avancée par des procureurs nationaux. Les autorités
nationales devraient donc respecter ce constat et exclure de la
responsabilité pénale toutes les opérations de sauvetage qui constituent
manifestement une «exemption humanitaire» du trafic d’êtres humains
.
21. Aux termes de l’article 5 du Protocole de Palerme, «les migrants
ne sont pas passibles de poursuites pénales en vertu du présent
Protocole». Par conséquent, quiconque assiste uniquement des migrants
en détresse en mer ne peut être tenu responsable. Cela est d’autant
plus vrai que les navires ont l’obligation de secourir d’autres
navires et personnes en détresse en vertu du droit international
de la mer. Le rapport (
Doc. 14586) de Mme Petra De Sutter (Belgique,
SOC) et la
Résolution
2229 (2018) «Obligations internationales des États membres du Conseil
de l’Europe de protéger les vies en mer» soulignent clairement cette
obligation internationale.
22. Les compétences et les capacités des navires des ONG à mener
des opérations de recherche et de sauvetage en mer doivent être
reconnues et il convient de maintenir la coopération avec ces navires.
23. Les garde-côtes libyens ont également secouru un grand nombre
de migrants en mer.
Environ 450 000 personnes déplacées
ont été retournées en Libye depuis 2016, et 47 879 réfugiés ont
été enregistrés en Libye par le HCR en août 2019.
Les ONG
et les organisations internationales
sur le terrain se sont systématiquement inquiétées du fait que la
Libye n’est pas un pays sûr et que, par conséquent, les migrants ne
devraient pas y être renvoyés.
L’OIM organise des formations pour
les garde-côtes libyens
et continue de mener son programme
de retours volontaires vers leurs pays d’origine de migrants étrangers
se trouvant en Libye.
Les États membres doivent continuer
à surveiller la situation sécuritaire en Libye.
5. La
gestion des arrivées
5.1. Recommandation
de la Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, «Combler
le manque de protection des réfugiés et des migrants en Méditerranée»
(juin 2019)
24. En juin 2019, la Commissaire
aux droits de l’homme a publié une recommandation complète intitulée «Sauver
des vies. Protéger les droits. Combler le manque de protection des
réfugiés et des migrants en Méditerranée». Elle souligne le fait
que certains États membres du Conseil de l’Europe ont progressivement adopté
des approches plus strictes et restrictives en vue de faire face
aux tentatives de traversée du couloir maritime de la Méditerranée
centrale par des réfugiés et des migrants. Le résumé énonce que
«Politisant un problème à caractère humanitaire, ces États ont adopté
des lois, des politiques et des pratiques souvent contraires aux
obligations légales qui sont les leurs, à savoir: assurer l’efficacité
des opérations de recherche et de sauvetage (SAR); débarquer et
prendre en charge les personnes secourues de façon rapide et en
toute sécurité; et prévenir la torture ainsi que les traitements
inhumains ou dégradants. C’est pourquoi la présente recommandation
vise à mettre en évidence les lacunes de cette approche et à aider
les États membres à repenser leur action conformément aux normes
relatives aux droits de l’homme».
25. La recommandation contient 35 principes qui s’articulent autour
de cinq domaines d’action principaux: assurer une coordination efficace
des opérations de recherche et sauvetage; garantir un débarquement
sûr et rapide des personnes secourues; coopérer avec les ONG de
manière effective; prévenir les violations des droits de l’homme
dans le cadre de la coopération avec des pays tiers; et ouvrir l’accès
à des voies sûres et légales pour rejoindre l’Europe. Ils visent
à aider les États membres à accroître le partage des responsabilités dans
le contexte des migrations, dans le respect des droits de l’homme.
26. En plus de fournir des orientations de politiques, y compris
sur les relations des autorités nationales avec les ONG qui viennent
en aide aux migrants, la recommandation encourage les États membres
à participer aux programmes de réinstallation des réfugiés, à envisager
de proposer des visas humanitaires, des programmes de parrainage,
etc., afin de créer des voies sûres et légales vers une installation
en Europe, grâce notamment à des procédures de regroupement familial
effectives.
5.2. Le
Mécanisme conjoint HCR/OIM de débarquement
27. En 2018, le HCR et l’OIM ont
appelé les pays méditerranéens à convenir d’un mécanisme de débarquement
prévisible et responsable qui s’appliquerait en accordant la priorité
aux droits de l’homme et à la sécurité et qui serait dissocié, après
le débarquement, du traitement ultérieur du statut et des responsabilités de
suivi connexes concernant les personnes sauvées dans les eaux internationales.
28. Les deux organisations ont souligné que cette réponse régionale
conjointe devrait reposer sur un ensemble d’objectifs communs, notamment
la maximisation des efforts conjoints visant à réduire les pertes
en vies humaines en mer; veiller à ce que le sauvetage de vies humaines
demeure la priorité de la communauté internationale; intensifier
les efforts visant à renforcer la capacité des garde-côtes dans
les pays méditerranéens (et pas seulement en Libye) à mener des
opérations de sauvetage efficaces dans leur région de recherche
et de sauvetage respective; veiller à ce que les centres nationaux
de coordination et de sauvetage en mer (MRCC) soient en mesure de
mener à bien leur travail efficacement aux fins des opérations de
recherche et de sauvetage; assurer un débarquement rapide des personnes
sauvées en Méditerranée dans des ports sûrs, conformément aux accords
de sauvetage en mer et au droit maritime international en vigueur, et
coordonné par l’intermédiaire des MRCC responsables; établir des
mesures favorisant des accords de coopération visant à soutenir
les États qui acceptent le débarquement; sauvegarder le droit de
demander l’asile et respecter les droits de l’homme de tous les
individus, tels que le non-refoulement, y compris le droit de ne pas
être débarqué ou transféré dans un lieu où il existe un risque de
persécution, de torture ou d’autres dommages graves; renforcer les
efforts visant à lutter contre le trafic et la traite des êtres
humains, en particulier des mesures visant à assurer la protection
des victimes de la traite et à poursuivre efficacement les personnes
impliquées dans la traite ou le trafic, et enfin renforcer la capacité
de sauvetage en mer coordonnée par des MRCC efficaces qui interviennent
conformément au droit international.
29. Le mécanisme élaboré par le HCR et l’OIM repose sur une proposition
en six étapes visant à «veiller à ce que les personnes sauvées en
mer dans les eaux internationales soient rapidement débarquées d’une manière
prévisible, conformément au droit maritime international, dans des
conditions qui garantissent le respect de leurs droits, y compris
le non-refoulement, et évitent tout dommage grave ou autre risque»;
et à ce que «le traitement responsable après le débarquement, avec
le soutien, le cas échéant, de l’OIM et du HCR, conduise à des solutions
différenciées rapides et efficaces et réduise les déplacements ultérieurs
grâce à un arrangement de coopération efficace.»
30. Cette proposition vise à faciliter l’application des normes
existantes du droit international et exige la solidarité entre les
États membres de l’Union européenne dans la gestion de toutes les
conséquences du sauvetage, du débarquement et du traitement. La
première étape du débarquement prévoit que la détermination des
lieux de débarquement dans les centres de débarquement actuellement
utilisés et dans des centres pré-identifiés supplémentaires sur
le territoire de l’Union européenne, voire ailleurs, devrait être
fondée sur une répartition géographique qui tienne dûment compte
des capacités disponibles dans ces centres et du respect des droits
de l’homme.
31. La deuxième étape, qui concerne les modalités d’accueil, prévoit
la manière dont les migrants secourus devraient être transportés
vers des centres d’accueil publics offrant des conditions d’accueil
adéquates, sûres et dignes. Elle prévoit également un enregistrement
biométrique immédiat des migrants et un contrôle de sécurité. La
troisième étape consiste à traiter et à évaluer les besoins de protection
internationale des migrants, y compris l’option du retour volontaire.
L’OIM et le HCR fourniront un appui spécialisé à ce stade. Les trois étapes
suivantes prévoient le processus de recherche de solutions dans
un délai raisonnable pour les réfugiés, les personnes ayant des
besoins spécifiques et les personnes ayant besoin d’aide pour retourner
dans leur pays d’origine.
32. Cette proposition pourrait fournir une structure à l’accord
piloté par la France qui sera proposé au Conseil des ministres de
la justice et des affaires intérieures les 7-8 octobre 2019 à Luxembourg
.
6. Conclusions
33. Le présent rapport est destiné
à servir de base au débat d’urgence qui se tiendra le 3 octobre
2019. Il n’a pas pour ambition de donner un aperçu complet de tous
les aspects de la situation actuelle des migrants qui tentent de
traverser la Méditerranée, mais de rappeler aux États membres leurs
obligations en vertu des traités internationaux auxquels ils sont
Parties.
34. Certains aspects mériteraient un examen plus approfondi, notamment
les changements des routes migratoires, qu’il s’agisse des voies
terrestres mais aussi des voies maritimes traversant la Méditerranée.
Les contrôles aux frontières et les mesures de sécurité devenant
de plus en plus stricts, les réfugiés et demandeurs d’asile potentiels
sont amenés à prendre de plus en plus de risques et à effectuer
des voyages difficiles et périlleux, dans les conditions extrêmes,
vers les destinations qu’ils ont choisies. Les États membres doivent continuer
à renforcer leur coopération et à accorder une plus grande attention
tant à leur propre besoin d’accueillir et d’intégrer les migrants
dans un contexte de déclin démographique partout en Europe qu’à l’obligation
morale de sauver des vies et d’aider les personnes en danger.
35. Des lois, règlements, directives, bonnes pratiques, initiatives
et mécanismes sont indispensables pour s’acquitter de l’obligation
incontestable de sauver des vies en mer et d’alléger les souffrances
endurées par ceux qui quittent leur foyer, non pas volontairement
mais par nécessité absolue. Ces dispositions doivent être prises
en compte et appliquées pour garantir un plus grand respect des
droits de l’homme et de l’égalité.