1. Introduction
1. La procédure de suivi de l'Assemblée
parlementaire repose sur la
Résolution
1115 (1997) relative à la création d'une commission de l’Assemblée
pour le respect des obligations et engagements des États membres du
Conseil de l'Europe (Commission de suivi) (modifiée par les résolutions
suivantes:
Résolution
1431 (2005), la
Résolution
1515 (2006), la
Résolution
1698 (2009), la
Résolution
1710 (2010), la
Résolution
1936 (2013), la
Résolution
2018 (2014), la
Résolution
2261 (2019), la
Résolution
2325 (2020), la
Résolution
2357 (2021), la
Résolution
2428 (2022) et la
Résolution
2551 (2024)). La
Résolution
1115 (1997) définit le mandat de la commission de suivi et stipule
«qu’elle est chargée de veiller au respect des obligations contractées
par tous les États membres aux termes du Statut du Conseil de l'Europe
[STE n° 1], de la Convention européenne des droits de l'homme [STE
n° 5] et de toutes les autres conventions du Conseil de l'Europe
auxquelles ils sont parties, ainsi qu’au respect des engagements
pris par les autorités des États membres à l’occasion de leur adhésion
au Conseil de l'Europe».
2. En vertu du paragraphe 14 de la
Résolution
1115 (1997) modifiée, la commission de suivi doit rendre compte
à l’Assemblée, une fois par an, de l’évolution générale des procédures
de suivi. Conformément à la pratique établie, la commission m’a
chargé, en ma qualité de présidente de la commission, de faire rapport
sur ses activités sur la période de janvier à décembre 2024.
3. Le mandat de la commission de suivi stipule qu’elle veille
au respect, par tous les États membres, des obligations découlant
de leur adhésion au Conseil de l’Europe et, le cas échéant, des
engagements spécifiques qu’ils ont contractés. Actuellement, 10
pays font l'objet d'une procédure de suivi complète (Arménie, Azerbaïdjan,
Bosnie-Herzégovine, Géorgie, Hongrie, République de Moldova, Pologne,
Serbie, Türkiye et Ukraine).
4. Quatre pays sont actuellement engagés dans un dialogue postsuivi
(Albanie, Bulgarie, Monténégro et Macédoine du Nord). Le dialogue
postsuivi concerne les États ayant progressé jusqu’à ce stade à
l’issue d’une procédure de suivi complète. Il s'agit d’un processus
moins intensif, ciblant un nombre limité de questions non encore
résolues et susceptibles d’être réglées à brève échéance. C'est
pourquoi le Règlement de l’Assemblée précise que seuls deux rapports
de dialogue postsuivi seront publiés. Le deuxième de ces rapports
doit définir si le dialogue postsuivi peut être clos pour le pays
considéré. À défaut, le pays fait à nouveau l’objet d’une procédure
de suivi complète.
5. Le mandat de la commission de suivi la charge d'assurer et
d'évaluer le respect des obligations contractées par tous les États
membres aux termes du Statut du Conseil de l'Europe, de la Convention
et de toutes les autres conventions de l'Organisation auxquelles
ils sont parties. Dès lors, comme le prévoit la
Résolution 2261 (2019), la commission de suivi prépare des rapports d’examen
périodique sur le respect des obligations découlant de l’adhésion
au Conseil de l’Europe pour tous les États membres qui ne font pas
l’objet de l’une des deux procédures spécifiques de suivi susmentionnées.
Comme le prévoit cette résolution, la commission de suivi sélectionne
les pays devant faire l’objet d’un examen périodique selon ses méthodes
de travail internes, pour des raisons de fond, tout en maintenant
l’objectif de consacrer, au fil du temps, des examens périodiques
à tous les États membres. La troisième série de pays sélectionnés
par la commission en décembre 2023 comprenait la Grèce, l’Espagne
et la Suède. Malheureusement, étant donné que les postes de rapporteurs
n’ont pas été pourvus, l’élaboration des rapports concernant ces
pays n’a pas encore commencé (voir chapitre 3).
6. Les commentaires par pays présentés dans la section ci-après
ont été élaborés en consultation avec les rapporteur·es responsables
sur la base de leurs rapports, notes et déclarations ainsi que des
discussions au sein de la commission de suivi (avec la participation
de représentants de la majorité et de l’opposition des pays concernés
conformément à l’article 10 de la
Résolution
1115 (1997)) ainsi que des conclusions d’autres mécanismes de suivi
du Conseil de l’Europe.
2. Aperçu des activités de la commission
2.1. Observations
générales
7. 2024 a été une nouvelle année
très chargée pour la commission et son mandat de suivi du respect
des obligations envers le Conseil de l'Europe de tous les États
membres. Plusieurs événements survenus sur notre continent ont souligné
la pertinence constante et la nécessité des travaux de la commission:
en particulier les élections en République de Moldova et en Géorgie
qui, comme je le soulignerai, ont eu lieu à un moment crucial pour
la consolidation démocratique et le processus d'intégration euro-atlantique
de chacun des pays, avec de fortes connotations géopolitiques et
un effet – bien que différent – sur leurs trajectoires démocratiques respectives.
L'importance des défis à relever pour garantir le respect des normes
et des valeurs européennes essentielles a également été soulignée
par l’évolution de la situation entourant l’adoption de la loi controversée sur
la transparence de l’influence étrangère en Géorgie, qui a occupé
une place prépondérante dans les travaux de la commission. Un autre
exemple clair de l’effet positif des travaux de la commission a
été la clôture de la procédure de suivi à l’égard de l’Albanie,
en reconnaissance des progrès réalisés en matière de respect de
ses obligations et engagements.
8. Malheureusement, le travail et l'agenda de la commission ont
été sérieusement affectés par les changements fréquents de rapporteurs
et leurs agendas internes chargés, ainsi que par les cycles électoraux dans
les pays faisant l’objet d’un suivi.
9. Au cours de la période de référence, les rapporteurs ont effectué
un certain nombre de visites dans les pays sous leur responsabilité
respective, y compris deux visites en République de Moldova, deux
visites aux institutions européennes à Bruxelles concernant le suivi
de la Bosnie-Herzégovine et de la Bulgarie, ainsi que des visites
en Hongrie, en Pologne et en Türkiye.
10. Le 24 juin 2024, la commission a eu un échange de vues avec
M. Michael O’Flaherty, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil
de l’Europe. En outre, à l'initiative des rapporteurs, plusieurs
auditions ont été organisées au cours des réunions de la commission.
Les détails de ces auditions figurent ci-après, dans les parties
consacrées aux pays concernés. La commission a également tenu des
auditions conjointes intitulées «Renforcement des mécanismes d’alerte
précoce sur les défis à la sécurité démocratique» (avec la commission
des questions politiques et de la démocratie) et «Réglementer l’influence
étrangère: meilleures pratiques et normes européennes» (avec la
commission des questions juridiques et des droits de l’homme).
11. La commission de suivi a soumis à l’Assemblée quatre rapports
sur des pays au cours de la période considérée: «Le respect des
obligations et engagements de l’Albanie», «Le respect des obligations
et engagements de l’Arménie», «Le respect des obligations et engagements
de la Bosnie-Herzégovine», et un rapport sur «Les défis pour la
démocratie en Géorgie», qui a été élaboré dans le cadre de la procédure d’urgence
qui a conduit à l’adoption de la
Résolution 2561 (2024). En outre, conformément à son mandat, la commission
a préparé le rapport «Contestation, pour des raisons substantielles,
des pouvoirs non encore ratifiés de la délégation parlementaire
de l’Azerbaïdjan» lors de la partie de session de janvier 2024 de l'Assemblée.
En outre, elle a adopté un rapport sur le dialogue postsuivi avec
la Bulgarie, qui n'a pas encore été présenté à l'Assemblée en raison
des élections législatives anticipées des 9 juin et 27 octobre 2024.
12. Au cours de l’année, la commission a examiné et déclassifié
des notes d’information sur le respect des obligations et engagements
de la République de Moldova et de la Türkiye.
13. Comme les années précédentes, la coopération remarquable avec
la Commission de Venise s’est poursuivie au cours de la période
considérée. La commission a demandé des avis concernant les projets
de lois constitutionnelles géorgiennes sur la protection des valeurs
familiales et des mineurs; sur les modifications du code électoral
géorgien abolissant les quotas de genre, tels qu'adoptés par le
Parlement géorgien le 4 avril 2024; sur les «amendements au Code
électoral et au Règlement intérieur du Parlement géorgien tels qu'adoptés
par le Parlement géorgien le 20 février 2024; sur le paquet législatif
hongrois relatif à la défense de la souveraineté nationale; sur
la loi hongroise XVII de 2024 portant modification des lois relatives
aux affaires judiciaires; sur le projet de loi modifiant la loi
sur le Conseil national de la magistrature en Pologne; et sur les dispositions
pertinentes de la Constitution turque et la loi sur le Conseil des
juges et des procureurs concernant la composition du Conseil des
juges et des procureurs et la procédure d’élection de ses membres.
14. Dans sa
Résolution
2551 (2024), l'Assemblée a décidé de modifier certaines dispositions
concernant spécifiquement le fonctionnement de la commission de
suivi. La durée des renvois des rapports d’examen périodique a été
portée à trois ans. En ce qui concerne la nomination des corapporteurs,
les règles prévoient désormais que: «Aucun corapporteur ne peut
être président au sein du parlement national de groupes d’amitié avec
le pays faisant l’objet d’une procédure de suivi».
15. Ainsi que cela a été mentionné ci-dessus, une rotation importante
des rapporteurs a eu lieu en 2024, ce qui a eu un effet non négligeable
sur les travaux de la commission.
2.2. Pays
faisant l'objet d'une procédure de suivi complète
2.2.1. Arménie
16. Au cours de sa troisième partie
de session de 2024, l’Assemblée a adopté la
Résolution 2560 (2024) «Le respect des obligations et engagements de l’Arménie».
Elle a félicité le pays pour son engagement continu en faveur du
développement démocratique en dépit des graves problèmes de sécurité
auxquels il était confronté.
17. L'Assemblée s'est félicitée de la ratification par l’Arménie
du Protocole n° 13 à la Convention de sauvegarde des Droits de l'homme
et des Libertés fondamentales, relatif à l'abolition de la peine
de mort en toutes circonstances (
STE
n° 187), y compris pour les crimes commis en temps de guerre
ou de danger imminent de guerre.
18. En ce qui concerne les préoccupations de longue date relatives
aux élections en Arménie, l'Assemblée a félicité les autorités pour
l’inclusivité et la transparence du processus législatif qui a conduit
à la réforme du Code électoral. Notant que les élections locales
de 2023 à Erevan ont été les troisièmes élections majeures consécutives
jugées exemptes des irrégularités qui avaient entaché beaucoup de
scrutins antérieurs, l’Assemblée a estimé que l’objectif d'organiser
des élections véritablement démocratiques qui favorisent la confiance
du peuple arménien a été atteint dans une large mesure. Elle a insisté
auprès des autorités sur la nécessité de mettre en œuvre les réglementations
relatives à l’utilisation abusive de ressources publiques et au
financement des partis politiques.
19. Néanmoins, elle a regretté que le climat politique reste très
polarisé et antagoniste. Prenant note de la pratique généralisée
de stigmatisation des opposants politiques, l’Assemblée a encouragé
l’ensemble des acteurs politiques à améliorer les rapports entre
la majorité parlementaire et l’opposition. Celle-ci a été invitée à
s’abstenir de boycotter les travaux de l’Assemblée nationale, car
un boycott massif et prolongé des travaux parlementaires par l’opposition
n’est acceptable que dans des cas rares et extrêmes où la légitimité
du parlement est remise en cause par les actions de la majorité.
De telles circonstances n’existent pas à l’heure actuelle en Arménie.
20. Pour sa part, la majorité parlementaire devrait faire preuve
de retenue dans l’utilisation de sa majorité qualifiée pour contourner
la prise de décision consensuelle. C’est particulièrement vrai en
ce qui concerne les désignations par le parlement aux organes de
contrôle indépendants, car la majorité actuelle dispose du nombre
de voix requis pour élire à elle seule les candidats. Dans ces circonstances
politiques, la règle de la majorité qualifiée pourrait affaiblir
plutôt que renforcer la perception de l’indépendance politique des personnalités
désignées. L'Assemblée a invité les partis politiques représentés
à l'Assemblée nationale à trouver un consensus interpartis pour
les désignations qui requièrent une majorité des deux tiers, en
tenant compte de la
Liste
de critères de la Commission de Venise sur les «Paramètres des rapports
entre la majorité parlementaire et l’opposition dans une démocratie».
21. En vue de renforcer l'indépendance des juges, l'Assemblée
a encouragé les autorités à poursuivre les réformes en collaboration
avec la Commission de Venise.
22. Dans l’ensemble, l’Assemblée a reconnu les progrès réalisés
par l’Arménie en matière de respect de ses obligations et engagements
envers le Conseil de l’Europe, en particulier dans le domaine du
droit électoral, et elle a décidé de poursuivre la procédure de
suivi, en attachant une importance particulière à la mise en œuvre
des réformes relatives au système judiciaire, aux secteurs des médias
et à la liberté d’expression.
2.2.2. Azerbaïdjan
23. Le 24 janvier 2024, l’Assemblée
a adopté, sur la base d’un rapport de la commission de suivi

, la
Résolution 2527 (2024) «Contestation, pour des raisons substantielles, des
pouvoirs non encore ratifiés de la délégation parlementaire de l’Azerbaïdjan»,
par laquelle elle a décidé de ne pas ratifier les pouvoirs de la délégation
azerbaïdjanaise. Elle a déploré que plus de vingt ans après son
adhésion au Conseil de l'Europe, l’Azerbaïdjan n’ait pas rempli
les engagements majeurs qui en découlent, notamment en ce qui concerne
sa capacité à organiser des élections libres et équitables, la séparation
des pouvoirs, la faiblesse du pouvoir législatif face au pouvoir
exécutif, l’indépendance du pouvoir judiciaire et le respect des
droits humains, comme l’illustrent beaucoup d’arrêts de la Cour
européenne des droits de l’homme et d’avis de la Commission de Venise.
Elle a également cité la situation humanitaire et des droits humains
désastreuse au Haut-Karabakh et le manque de coopération entre les
autorités et l’Assemblée, y compris les rapporteurs de la commission
des questions juridiques et des droits de l'homme et de la commission
de suivi.
24. L'examen par l’Assemblée du rapport de la commission de suivi
du 5 décembre 2023 sur le respect des obligations et engagements
de l'Azerbaïdjan a été reporté en raison de la convocation, le 7
décembre 2023, d'une élection présidentielle anticipée en Azerbaïdjan
(prévue pour le 7 février 2024). Après l’élection présidentielle,
le rapport de la commission de suivi a été déposé et publié

, mais en raison
de l’absence de la délégation azerbaïdjanaise, son examen par l’Assemblée
a été encore retardé. Les corapporteurs pour l’Azerbaïdjan – Mme Lise
Christoffersen (Norvège, SOC) et M. Ian Liddell-Grainger (Royaume-Uni,
CE/AD)

– ont continué de
suivre la situation dans le pays et, le 1er octobre 2024, l’Assemblée
a tenu un débat d’actualité intitulé «Détérioration de la situation
des droits humains, de l’État de droit et de la démocratie en Azerbaïdjan».
25. L’Assemblée n’a pas été invitée par l'Azerbaïdjan à observer
l'élection présidentielle anticipée du 7 février 2024 et les élections
législatives anticipées du 1er septembre 2024. Ces deux scrutins
couvraient, pour la première fois, le territoire du Haut-Karabakh.
Lors de l’élection du 7 février 2024, M. Ilham Aliyev, le Président
de la République sortant qui occupe ce poste depuis 2003, a remporté
un cinquième mandat consécutif avec plus de 92 % des voix, le taux
de participation s’élevant à 76,7 %. À l'issue des élections législatives
du 1er septembre 2024, le parti au pouvoir, le Parti du nouvel Azerbaïdjan,
a remporté 68 des 125 sièges du Milli Majlis (parlement), le reste
des sièges étant remporté par d’autres partis et candidats qui soutiennent
la politique du gouvernement. Le principal parti d’opposition –
le parti du Front populaire azerbaïdjanais – a boycotté l’élection.
Le taux de participation n’a été que de 37,3 %, chiffre le plus
faible de toutes les élections.
26. La mission internationale d’observation des élections, composée
du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme
(BIDDH) de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en
Europe (OSCE) et de l'Assemblée parlementaire de l’OSCE, a observé
les deux scrutins

. Selon la mission, ces élections
n’ont pas respecté les normes internationales en matière d’élections
démocratiques. Les deux élections se sont déroulées dans un environnement
restrictif qui n’a pas permis un véritable pluralisme et a donné
lieu à une compétition dépourvue de concurrence. Bien que le processus
de vote ait été bien organisé et efficace, de graves irrégularités
et omissions ont été observées, en particulier dans le décompte
des voix. En outre, le cadre juridique, à savoir le Code électoral,
ne répondait pas aux normes internationales, notamment aux recommandations
du BIDDH de l’OSCE, de la Commission de Venise et aux exigences découlant
des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme.
27. Les deux élections se sont déroulées dans un contexte de durcissement
des restrictions de la liberté d'expression, de réunion et d’association,
accompagné par une répression continue des militants politiques, des
personnes critiques du gouvernement, de la société civile et des
représentants des médias, ainsi que d’allégations de manque d'indépendance
des juges et des procureurs et de procès peu équitables fondés sur des
accusations sans fondement. Quelques mois avant les élections, les
autorités ont commencé à arrêter des journalistes et des militants
de la société civile, en particulier ceux qui avaient de l’expérience
dans le suivi des élections et / ou des affaires de corruption,
comme les journalistes de Toplum TV (dont Alaskar Mammadli, son fondateur),
Abzas Media (dont M. Ulvi Hasanli et M. Sevinj Abbasova, respectivement
directeur et rédacteur en chef) et Kanal 13 (dont M. Aziz Orujev
et M. Shamo Eminov, respectivement directeur et journaliste); les militants
politiques M. Tofig Yagublu et M. Ruslan Izzatli et les militants
de la société civile: M. Anar Mammadli, lauréat du prix Vaclav Havel
2014 et directeur du Centre d’étude de la démocratie et d’observations
des élections, et M. Akif Gurbanov, l'un des trois candidats présélectionnés
pour le prix Václav Havel 2024

. M. Gudad Ibadoghlou,
universitaire et expert en matière de lutte contre la corruption,
a été libéré en avril 2024 après neuf mois de détention provisoire,
mais il fait toujours l’objet de graves accusations pénales et reste assigné
à résidence

. Selon des rapports récents de groupes
de défense des droits humains, il y a actuellement dans le pays
plus de 300 personnes qui seraient détenues pour des motifs politiques.
28. Le 3 juillet 2024, le Comité européen pour la prévention de
la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants
(CPT) a fait une
déclaration publique sur le manque persistant de coopération de la part des
autorités azerbaïdjanaises et a également décidé de publier son
rapport (en anglais) sur la visite
ad hoc de
2022 en Azerbaïdjan. Cette décision est due à l'annulation par les
autorités azerbaïdjanaises des entretiens à haut niveau avec le
CPT à Bakou et à leur refus d’accepter une visite
ad hoc du CPT en juin 2024. En outre,
aucune des recommandations clés formulées de longue date par le
CPT concernant le traitement des personnes détenues dans des établissements
relevant du ministère de l'Intérieur et les allégations de mauvais
traitements physiques (y compris, à l’occasion, la torture) par
la police n'a été mise en œuvre. Il convient de rappeler que dans
sa
Résolution 2528 (2024) «Allégations de torture systémique et de peines ou traitements
inhumains ou dégradants dans les lieux de détention en Europe»,

l’Assemblée
était profondément préoccupée par des informations crédibles donnant
à penser que la torture et d'autres formes de mauvais traitements
tendaient à être systémiques et / ou répandues en Azerbaïdjan, en
particulier dans le contexte des «affaires Terter» (concernant un
groupe de militaires et de civils détenus par l’armée azerbaïdjanaise).
29. Le 26 août 2024, le ministère azerbaïdjanais des Affaires
étrangères a déclaré
personae non gratae les 76
membres de l’Assemblée qui avaient voté en faveur de la
Résolution 2527 (2024) et donc de la non-ratification des pouvoirs de la délégation
azerbaïdjanaise. Cette décision visait, entre autres, les membres
de l’Assemblée souhaitant participer à la Conférence des Nations
Unies sur le changement climatique (COP29) qui s’est tenue du 11
au 22 novembre 2024 à Bakou.
2.2.3. Bosnie-Herzégovine
30. Au cours de la quatrième partie
de session de 2024, l'Assemblée a adopté la
Résolution 2574 (2024) «Le respect des obligations et engagements de la Bosnie-Herzégovine».
Après la visite des corapporteurs en septembre 2023 à Sarajevo et
Banja-Luka, une autre visite a été organisée en février 2024 à la
Commission européenne à Bruxelles, pour discuter de sujets liés
à l’adhésion de la Bosnie-Herzégovine à l’Union européenne. En mars
2024, la commission a eu un échange de vues avec M. Christian Schmidt,
Haut représentant pour la Bosnie-Herzégovine. Et en septembre 2024,
la commission a tenu une audition avec la participation de M. Nikola
Špirić, Premier vice-président de la Chambre des peuples de l’Assemblée parlementaire
de Bosnie-Herzégovine, Mme Darijana Filipović,
Deuxième vice-présidente de la commission des affaires étrangères
de la Chambre des représentants de Bosnie-Herzégovine, et Mme Sabina
Ćudić, membre de la délégation de Bosnie-Herzégovine à l’Assemblée.
31. Dans sa
Résolution
2574 (2024), l’Assemblée a félicité les autorités de Bosnie-Herzégovine
pour le rythme des réformes depuis 2022. Ces changements positifs
ont conduit à la décision du Conseil européen d’entamer des négociations
d’adhésion avec la Bosnie-Herzégovine en mars 2024.
32. L’Assemblée s'est félicitée des modifications apportées à
la législation électorale conformément aux normes européennes et
aux recommandations formulées par le BIDDH de l’OSCE, le Groupe
d’États contre la corruption (GRECO) et la Commission de Venise.
Toutefois, elle a regretté que ces modifications aient dû être présentées
par le Haut Représentant et qu’elles n'aient pas pu être adoptées
par le Parlement de Bosnie-Herzégovine bien que les partis politiques
soient largement d’accord sur le fond de ces réformes.
33. Malgré ces modifications, l’Assemblée a regretté que les élections
de 2022 se soient déroulées pour la quatrième fois dans un cadre
constitutionnel qui était contraire à la Convention européenne des
droits de l’homme. Depuis l’adhésion de la Bosnie-Herzégovine au
Conseil de l’Europe en 2002, l’Assemblée n’a cessé d'appeler de
ses vœux une réforme constitutionnelle dans le pays.
34. L’Assemblée s’est référée à la résolution de l’Assemblée générale
des Nations Unies sur la Journée internationale de réflexion et
de commémoration du génocide de 1995 à Srebrenica, qui rappelle
les jugements du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie
et de la Cour internationale de justice sur le génocide commis en
1995 à Srebrenica.
35. En ce qui concerne le renforcement des institutions démocratiques
et de l’État de droit, l’Assemblée a appelé les autorités de Bosnie-Herzégovine,
entre autres, à mettre la législation électorale en conformité avec la
Convention européenne des droits de l’homme et à garantir l’égalité
et la non-discrimination des citoyens; à assurer le bon fonctionnement
de la Cour constitutionnelle; et à réformer le Conseil supérieur
des juges et des procureurs. En ce qui concerne la protection des
droits humains, l'Assemblée a appelé à des réformes visant à éliminer
tous les aspects de la ségrégation et de la discrimination dans
l’éducation et a encouragé la mise en place d’un tronc commun d’enseignement
de l’histoire, tout en interdisant d’honorer dans les programmes scolaires
les personnes condamnées pour génocide, crimes contre l’humanité
et crimes de guerre.
36. Tout en se félicitant des évolutions positives dans un certain
nombre de domaines, l’Assemblée est restée préoccupée par l’absence
ou l’insuffisance de progrès dans certains domaines essentiels pour
le fonctionnement des institutions démocratiques et a décidé de
poursuivre son suivi du respect des obligations et engagements de
la Bosnie-Herzégovine. En décembre 2024, la commission de suivi
a décidé de désigner M. Pablo Hispán (Espagne, PPE/DC) corapporteur
en remplacement de M. Aleksandar Nikoloski (Macédoine du Nord, PPE/DC).
2.2.4. Géorgie
37. Le 4 avril 2024, la majorité
au pouvoir a déposé à nouveau un projet de loi sur la transparence
de l’influence étrangère. Ce projet de loi était l’exacte copie

d'une proposition
que la majorité au pouvoir avait retirée en mars 2023 à la suite
de protestations et de manifestations nationales généralisées et
soutenues. Il convient de noter que, lorsque la proposition initiale
a été retirée en 2023, la majorité au pouvoir avait expressément
promis qu'elle ne tenterait pas de présenter à nouveau un projet
de loi similaire.
38. La présentation pour la seconde fois de ce projet de loi très
controversé a entraîné une nouvelle vague de protestations massives
en Géorgie, impliquant un large éventail de la société géorgienne.
Elle a également été condamnée par la communauté internationale,
qui a réitéré ses profondes inquiétudes quant à la compatibilité
entre cette loi et les normes européennes en matière de démocratie
et de droits humains, y compris en ce qui concerne les obligations
de la Géorgie au titre de la Convention européenne des droits de l’homme.
39. Le 15 avril 2024, le Président de l'Assemblée parlementaire
a demandé un avis à la Commission de Venise concernant le projet
de loi sur la transparence de l’influence étrangère. Le 20 mai 2024,
la Commission de Venise a rendu un avis sans équivoque: la loi est
fondamentalement erronée, elle porte atteinte à la liberté d’expression
et d’association, et elle nuit au pluralisme politique et à la démocratie.
Malgré le tollé national et les recommandations de la Commission
de Venise et de l’Assemblée, le Parlement géorgien a adopté la loi
le 18 mai, et le 28 mai, il a surmonté le veto présidentiel à cette
loi.
40. Les réactions de la communauté internationale à l’adoption
de cette loi ont été rapides et prévisibles. Ainsi que les autorités
en avaient été prévenues, le Conseil européen a déclaré que le processus
d'adhésion de la Géorgie à l'Union européenne était de facto suspendu. L'administration
américaine a mis fin à beaucoup de programmes de coopération avec
les autorités géorgiennes, ce qui les a privées d’un soutien financier considérable.
En outre, les autorités américaines ont annoncé des sanctions à
l'encontre de plusieurs personnes géorgiennes et des membres de
leur famille parce qu’elles avaient porté atteinte à la démocratie en
Géorgie.
41. La loi sur l’influence étrangère est officiellement entrée
en vigueur le 1er août 2024. Selon les dispositions de la loi, les
organisations de la société civile et les médias qui reçoivent plus
de 20 % de leur financement de sources étrangères avaient jusqu'au
3 septembre 2024 pour s’inscrire au registre spécial prévu par la
loi et tenu par le ministère de la Justice. Au 3 septembre, seul
1 % des ONG géorgiennes (soit environ 400 sur 30 000) s’étaient
inscrites. Néanmoins, plusieurs organisations ont indiqué qu’elles
avaient remarqué une réticence croissante des particuliers à se
porter volontaires pour leur travail et leurs activités en raison
de la stigmatisation des organisations de la société civile due
à cette loi.
42. Plus de 120 organisations de la société civile, organisations
de médias et la Présidente de la Géorgie ont contesté la constitutionnalité
de la loi sur l’influence étrangère devant la Cour constitutionnelle.
Le 9 octobre 2024, la Cour constitutionnelle a annoncé qu'elle avait
jugé recevables certaines parties des recours. Dans le même temps,
elle a décidé qu'elle ne suspendrait pas la loi pendant l’examen
de ces appels, laissant la loi et ses exigences suspendues comme
une épée de Damoclès au-dessus des organisations géorgiennes. Le 17 octobre,
un certain nombre d’organisations de médias et d’organisations de
la société civile ont annoncé qu'elles allaient exercer un recours
contre la loi sur l’influence étrangère devant la Cour européenne
des droits de l’homme.
43. Le 24 juin 2024, l'Assemblée a décidé d’organiser un débat
selon la procédure d'urgence intitulé «Les défis pour la démocratie
en Géorgie» et a saisi la commission de suivi pour rapport. Dans
la
Résolution 2561 (2024) adoptée à l’issue de ce débat, l'Assemblée a estimé
que l’évolution de la situation en Géorgie avait suscité de sérieux
doutes quant à l’engagement du pays envers les normes démocratiques
internationales et l’intégration euro-atlantique, et quant à sa
volonté d'honorer ses obligations de membre et ses engagements pris
lors de l’adhésion au Conseil de l'Europe. L'Assemblée était préoccupée
par le fait que l'adoption controversée de la loi sur la transparence
de l’influence étrangère – qu'elle considère comme incompatible avec
les normes européennes en matière de démocratie et de droits humains –
n’était pas un événement isolé, mais le point culminant d'une série
de faits nouveaux indiquant clairement un recul de la démocratie
dans le pays. A cet égard, l'Assemblée a exprimé sa profonde préoccupation
concernant l’adoption de modifications de la législation électorale
qui pourraient donner à la majorité au pouvoir le contrôle de toutes
les décisions de la Commission électorale centrale; les projets
de loi (à l'époque) sur la protection des valeurs familiales et
des mineurs, qui sont incompatibles avec les normes internationales
en matière de droits humains, et en particulier avec la Convention
européenne des droits de l'homme; le recours excessif et disproportionné
à la force de la police; et les agressions violentes et les campagnes
d'intimidation contre les manifestant·es, les militant·es de la
société civile, les journalistes et les député·es, qui constituent
une répression de manifestations légitimes de désaccord et d’opposition.
44. Des élections législatives ont eu lieu le 26 octobre 2024
en Géorgie. Les corapporteurs ont participé ès-qualités à l'observation
de ces élections

. Celles-ci étaient
les premières de l’histoire récente du pays à être organisées selon
un système électoral entièrement proportionnel, suivant une recommandation
de longue date de l'Assemblée. Malheureusement, les faits nouveaux
évoqués ci-dessus ont transformé l’élection en un référendum
de facto sur l'alignement international
et la trajectoire démocratique du pays, ce qui a accru considérablement
la polarisation de l’environnement politique et durci le discours
entre les participants.
45. A plusieurs égards malheureusement, ces élections n'ont pas
respecté les normes européennes en matière d'élections démocratiques,
et les déficiences constatées dans le processus électoral ont sapé
la confiance envers son résultat et son équité. Selon la mission
internationale d’observation des élections, dont l’Assemblée faisait
partie, ces élections, bien qu’elles aient offert un large choix
d’alternatives aux électeurs, ont été entachées de nombreux signalements
de pressions et d'intimidations à l’encontre des électeurs, ainsi que
par des conditions inégales pour les candidats aux élections, qui
ont favorisé de manière disproportionnée la majorité sortante au
pouvoir. Alors que le cadre juridique constitue une base adéquate
pour des élections démocratiques, les récentes modifications de
la législation électorale ont marqué un recul, soulevant des inquiétudes
quant à sa vulnérabilité aux abus politiques. Malheureusement, les
questions relatives à l’impartialité et à l’instrumentalisation
des organes de contrôle, en particulier le Bureau de lutte contre
la corruption, sont préoccupantes et sapent la confiance dans l’équité
de leurs décisions.
46. Le parti sortant, Rêve géorgien, a obtenu un excellent résultat
inattendu – 53,92 % des voix – supérieur à tous les résultats qu'il
avait obtenus lors des élections précédentes. Les trois coalitions
électorales (Coalition pour le changement, Mouvement unitaire et
national et Géorgie forte), ainsi que le parti Pour la Géorgie de l’ancien
Premier ministre Giorgi Gakharia ont obtenu ensemble 37,78 % des
voix, tandis qu'aucun autre parti n'a franchi le seuil des 5 %.
Selon ce résultat, Rêve géorgien disposera de 89 sièges au sein
du Parlement géorgien, qui compte 150 membres. L'élection et ses
résultats ont été dénoncés par les partis d'opposition, par les
principales organisations de la société civile et par la Présidente
de la Géorgie, qui ont souligné le nombre impressionnant d’informations
faisant état d'une fraude électorale généralisée. La régularité
des résultats de ces élections a ensuite été remise en question
par plusieurs pays et organisations internationales, qui ont demandé
une enquête transparente et crédible sur toutes les allégations
de fraude électorale.
2.2.5. Hongrie
47. En décembre 2023, la commission
de suivi a demandé, sur proposition des corapporteurs, un avis à
la Commission de Venise sur la loi LXXXVIII de 2023 relative à la
protection de la souveraineté nationale. La Commission de Venise
a adopté cet avis en mars 2024 (
CDL-AD(2024)001) et a recommandé d'abroger certains articles de la loi
et de fournir des précisions sur les définitions juridiques de certains
des concepts employés. Lors de sa réunion de septembre 2024, la
commission de suivi a eu un échange de vues sur cet avis avec M. Michael
Frendo, membre de la Commission de Venise. En octobre 2024, la Commission européenne
a décidé de saisir la Cour de justice de l’Union européenne à l’encontre
de la Hongrie, estimant que la loi relative à la protection de la
souveraineté nationale violait les valeurs démocratiques européennes et
un certain nombre de droits fondamentaux.
48. En octobre 2024, la commission a eu un échange de vues avec
la Commission de Venise au sujet de son avis de 2021 (
CDL-AD(2021)029) sur les amendements constitutionnels adoptés par le
parlement hongrois en décembre 2020 avec la participation de M.
Ben Vermeulen, membre de la Commission de Venise. Le neuvième amendement
a modifié sur plusieurs points la Loi fondamentale, notamment par
l’établissement de «fondations de gestion d'actifs d’intérêt public
exerçant des fonctions publiques». La
Résolution 2460 (2022) considérait comme «très préoccupante» la création de
ces fondations d'intérêt public, soulignant le fait que ces fiducies
géreraient sans contrôle un volume important de fonds publics et
privés, et l’absence de dispositions juridiques régissant la prévention
de conflits d'intérêts de membres du conseil d'administration. La Commission
de Venise a recommandé de définir clairement les obligations de
transparence et de responsabilité pour la gestion des fonds, ainsi
que les garanties d’indépendance appropriées pour la composition
et le fonctionnement du conseil d'administration de ces fondations.
49. La commission de suivi a également décidé de demander l’avis
de la Commission de Venise sur la loi XVII de 2024 portant sur la
modification de lois relatives aux affaires judiciaires. Du 18 au
20 novembre, MM. Papandreou et Kross, corapporteurs de la commission
de suivi, ont effectué une visite en Hongrie.
2.2.6. République
de Moldova
50. M. Pierre-Alain Fridez (Suisse,
SOC) et Mme Zanda Kalniņa-Lukaševica
(Lettonie, PPE/DC), corapporteurs pour la République de Moldova,
se sont rendus dans le pays à deux reprises cette année: du 5 au
7 février et du 1er au 3 juillet 2024.
51. L'environnement politique en République de Moldova au cours
de l'année écoulée a été dominé par les préparatifs de l’élection
présidentielle et du référendum constitutionnel sur l’adhésion à
l’Union européenne qui ont eu lieu le dimanche 20 octobre 2024

.
Cette élection et ce référendum ont été largement considérés comme
un moment clé pour l’intégration européenne du pays et les vecteurs
d’alignement sur l’étranger, ainsi qu’une répétition pour les prochaines
élections législatives de 2025, qui, dans cette république parlementaire, définiront
le cours de la politique intérieure de la République de Moldova.
En conséquence, l'environnement politique est resté très polarisé,
les forces politiques étant divisées sur les questions liées aux
perspectives d’avenir, aux valeurs et à l’alignement de la politique
étrangère de la République de Moldova. Cette situation a été aggravée
par une campagne d'ingérence sans précédent de la Fédération de
Russie dans le processus politique national et les élections.
52. Comme l'Assemblée l’a déjà observé dans ses rapports précédents,
le dialogue entre l’opposition et la majorité au pouvoir est limité
et conflictuel. Plusieurs interlocuteurs, y compris la Commission
de Venise dans ses avis, ont noté que les réformes sont parfois
élaborées de manière assez hâtive, sans consultation appropriée
de tous les acteurs concernés. Les autorités devraient répondre
à ces préoccupations, car un processus de réforme inclusif et transparent
est essentiel pour assurer un large soutien et l’acceptation des réformes
par la population moldave, ce qui est nécessaire pour garantir l’irréversibilité
du processus de réforme.
53. Les autorités ont poursuivi la mise en œuvre des réformes
ambitieuses nécessaires pour soutenir les négociations d’adhésion
à l’Union européenne. Les principales priorités à cet égard ont
été la réforme du système judiciaire en vue de garantir son indépendance
et son intégrité, et le renforcement de la capacité institutionnelle
de lutter contre la corruption encore endémique dans le pays.
54. Fait positif, le 31 mai 2024, le Conseil supérieur des procureurs
a proposé la candidature de M. Ion Munteanu, procureur par intérim,
au poste de procureur général. La Présidente Sandu l’a nommé le
lendemain, remplissant ainsi l’une des conditions clés des négociations
d’adhésion à l’Union européenne. M. Munteanu exercera un mandat
unique de sept ans, non renouvelable.
55. Le Centre national de lutte contre la corruption, qui est
chargé à la fois de prévenir et de combattre la corruption, est
désormais entièrement séparé du ministère public. Le parquet anti-corruption
est chargé des enquêtes pénales menées par les enquêteurs du Centre
national de lutte contre la corruption ainsi que de ses propres
enquêtes pénales et constitue désormais une entité complètement
autonome au sein du service des poursuites. Les membres du parquet
anti-corruption seront soumis à une procédure d’évaluation de l’intégrité au
cours du second semestre 2024. Tous les procureurs concernés ont
eu le choix de démissionner avant le 13 juin 2024 ou d’être soumis
à la procédure d’évaluation. Environ 25 % des procureurs concernés
ont ensuite démissionné.
56. Les procédures d’évaluation de l’intégrité des juges et des
procureurs se poursuivent sans relâche. Ces procédures sont essentielles
pour lutter contre la corruption au sein du pouvoir judiciaire et
pour assurer l'intégrité de ces institutions. La sélection des membres
du Conseil supérieur de la magistrature et du Conseil supérieur
des procureurs a été finalisée et celle des juges de la Cour suprême
devrait l’être d’ici la fin de 2024. La procédure d’évaluation de
tous les postes clés de juges et de procureurs, soit environ 250
postes au total, est toujours en cours et ne sera vraisemblablement
achevée que dans le courant de l’année 2025.
57. Malheureusement, des pressions ont été exercées au sein de
l'appareil judiciaire contre les réformes judiciaires et la volonté
des autorités d’éliminer la corruption endémique du système judiciaire.
Les membres de la commission d’évaluation ont fait état d'actions
menées par certaines personnes pour saper la crédibilité et l’efficacité
du processus d’évaluation. Il est donc capital que les autorités
continuent d'exprimer leur soutien ferme envers la procédure d’évaluation
et des commissions d’évaluation afin de contrecarrer ces tentatives individuelles.
58. L’évolution de la situation en Gagaouzie et les rapports entre
Chișinău et Comrat deviennent de plus en plus un vecteur d'instabilité
et d’ingérence russe, y compris en ce qui concerne les élections.
En mai 2023, Mme Evghenia Guţul a été
élue au poste de Bashkan (gouverneure) de Gagaouzie. Mme Guţul
était la candidate du parti Șor – interdit par la suite – et s'est
présentée sur un programme résolument pro-russe visant apparemment
à attiser les tensions entre la Gagaouzie et les autorités centrales
de Chișinau. Les élections ont été entachées par l’ingérence étrangère
et l’achat de voix. Pour ces raisons, le chef du parquet anti-corruption a
engagé des enquêtes formelles sur l'élection de Mme Guţul
et sur le financement de sa campagne. Le 24 avril 2024, le parquet
anti-corruption a engagé des poursuites contre Mme Guţul
parce qu’elle avait obtenu un financement illégal pour le parti
Șor, et parce qu’elle avait payé des participants à des manifestations organisées
par ce parti. Il est à espérer que les procédures judiciaires à
son encontre seront bientôt finalisées afin de sortir de ce blocage
tendu et de réduire ses possibilités de servir de vecteur d'ingérences
étrangères.
59. L'élection présidentielle et le référendum constitutionnel
ont eu lieu le dimanche 20 octobre 2024. Comme cela a été indiqué,
la campagne électorale pour ces élections a été caractérisée par
l’augmentation exponentielle des tentatives d'ingérence néfaste
de la Fédération de Russie dans la politique intérieure et les processus
électoraux. L’afflux en République de Moldova de sommes importantes
provenant de la Fédération de Russie, dans le but évident d'acheter
des voix et de subvertir le processus démocratique, est particulièrement
préoccupant à cet égard. Ces flux d’argent illicites transitent
souvent par des pays tiers, y compris des États membres du Conseil
de l’Europe, qui devraient être invités à prendre toutes les précautions nécessaires
pour s’opposer à ces pratiques malveillantes. Le discours anti-Union
européenne ont joué un rôle important. Il convient de mentionner
plusieurs récits clés visant à discréditer le programme pro-Union européenne:
premièrement, l’affirmation selon laquelle l’adhésion à l’Union
européenne porterait atteinte à la souveraineté, à la neutralité
et à l’intégrité territoriale de la République de Moldova, et que
l’adhésion à l’Union européenne entraînerait le pays dans la guerre
de la Fédération de Russie contre l’Ukraine; deuxièmement, la désinformation
visant à semer le doute au sujet d’une perte des valeurs et des
vertus traditionnelles de la République de Moldova.
60. Les corapporteurs ont participé, en tant que membres ex officio, à l’observation de ces
élections par l'Assemblée. La déclaration de constatations et de
conclusions préliminaires publiée par la mission internationale
d'observation des élections, dont l’Assemblée faisait partie, a
conclu «que l'élection présidentielle et le référendum constitutionnel
du 20 octobre ont été bien gérés, et les candidats ont fait campagne
librement dans un environnement caractérisé par des préoccupations
concernant l'ingérence étrangère illicite et des efforts de désinformation
actifs. Alors que cela a porté atteinte à l'intégrité du processus, les
conditions de la campagne n'ont pas, non plus, permis d’assurer
l’égalité des chances entre les candidats».
61. Alors que les sondages réalisés avant les élections prévoyaient
initialement que le référendum bénéficierait du soutien d’une majorité
considérable de la population moldave, il n'a été adopté que de justesse,
avec 50,35 % de voix favorables. Le taux de participation a été
de 51,74 %. Les autorités ont estimé que l'achat de voix et d'autres
manœuvres illicites de la Fédération de Russie ont considérablement
affecté le résultat du scrutin. Lors de l’élection présidentielle,
la Présidente sortante Maia Sandu a obtenu 42,3 % des voix, tandis
que l'ancien procureur général Stoianoglo, soutenu par le parti
socialiste, a obtenu 26,1 % des voix. Aucun des candidats n'ayant
obtenu la majorité absolue, un second tour a été organisé entre
Mme Sandu et M. Stoianoglo le 3 novembre
2024.
62. Le second tour de l'élection présidentielle a également été
observé par l'Assemblée dans le cadre de la mission internationale
d'observation des élections, qui a conclu que le second tour du
3 novembre 2024 «a été administré de manière efficace et professionnelle
et a offert aux électeurs un choix entre de véritables alternatives
politiques». Malheureusement, la mission a également noté que les
«défis posés par l'ingérence étrangère et l'achat de voix ont continué
à influer sur la campagne du second tour», tandis que les règles
du jeu sont restées inégales, bien que moins que lors du premier
tour du scrutin. Le second tour a été remporté par la Présidente
Sandu qui a obtenu 55,33% des voix contre 44,67% pour M. Stoianoglo.
Tant pour l'élection présidentielle que pour le référendum, les
voix de la diaspora moldave ont eu un effet décisif sur le résultat. Conformément
aux dispositions légales, la Commission électorale centrale de la
République de Moldova a soumis pour confirmation le 26 octobre 2024
les résultats du référendum constitutionnel à la Cour constitutionnelle.
Celle-ci a confirmé ces résultats le 31 octobre 2024 dans le délai
légal de 10 jours.
2.2.7. Pologne
63. A la suite des élections parlementaires
du 15 octobre 2023, les nouvelles autorités polonaises ont fait de
la «restauration de l’État de droit», ainsi que de l’exécution des
arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme relatifs à l’indépendance
de la justice, une priorité essentielle de leur action. Pour atteindre
cet objectif, ils se sont lancés dans un programme ambitieux de
réforme du système judiciaire. Il convient de s’en féliciter vivement.
64. Toutefois, certains acteurs se sont interrogés sur la compatibilité
de plusieurs aspects de ces réformes avec les règles et normes européennes,
et se sont demandé si dans leur volonté de restaurer l’État de droit, les
autorités ne contournaient pas parfois les exigences mêmes de l’État
de droit.
65. Le 21 février 2023, le Gouvernement polonais a présenté au
Sejm (chambre basse du Parlement) un projet de loi portant modification
de la loi sur le Conseil national de la magistrature, plus connu
sous son abréviation polonaise, KRS. Cette
loi modifiera les modalités de nomination des juges membres du KRS.
Ainsi que l’ont indiqué les rapports précédents, depuis la réforme
du KRS en 2017, tous les juges membres sont nommés par le parlement
et le Conseil ne peut donc plus être considéré comme un organe indépendant.
Cela a eu des conséquences considérables sur l’indépendance et la
légitimité du système judiciaire polonais. Étant donné le rôle central
du KRS pour l'indépendance du pouvoir judiciaire en Pologne, il
est important de veiller à ce que la nouvelle procédure de nomination
et la composition du KRS soient pleinement conformes aux règles
et aux normes européennes. C’est pourquoi, le 6 mars 2024, la commission
de suivi a demandé l’avis de la Commission de Venise sur cette loi.
66. Dans son avis

, la Commission de Venise a souligné
que «toute mesure prise en vue de «restaurer» l’État de droit doit
répondre aux exigences générales de l’État de droit», même si cela
implique la recherche d’un «certain équilibre entre différents éléments
– apparemment contradictoires – de l’État de droit». Par conséquent,
si la proposition d'élection de 15 membres judiciaires du KRS par
la communauté judiciaire est pleinement conforme aux normes européennes,
l’exclusion du droit de se présenter aux élections pour les juges
qui ont été nommés ou promus pendant les activités du KRS tel que
réformé en 2017, sans évaluation individuelle, soulève des questions
de proportionnalité. La Commission de Venise recommande donc aux autorités
de reconsidérer les critères d'éligibilité des juges souhaitant
se porter candidats à l'élection du KRS. Un amendement en ce sens
a été adopté par le Sénat polonais, mais n'a pas été repris par
le Sejm polonais. Une autre question controversée en Pologne était
celle de la fin anticipée des mandats des membres actuels du KRS.
Toutefois, la Commission de Venise a estimé que «la révocation anticipée
ex lege des membres judiciaires
en exercice du CNM [KRS] semble justifiée dans les circonstances
particulières de l'affaire polonaise et compatible avec les normes
européennes».

Le
2 août 2024, le Président Duda a décidé de ne pas signer la loi
mais de la renvoyer au Tribunal constitutionnel pour un contrôle
de constitutionnalité.
67. Les 11 et 12 octobre 2024, la Commission de Venise a adopté
deux autres avis sur des réformes essentielles du système judiciaire
en cours d'élaboration par les autorités polonaises, à savoir sur
les normes européennes régissant le statut des juges et sur la loi
sur le ministère public.
68. Dans son avis sur les normes européennes régissant le statut
des juges

, la Commission de Venise a estimé
que la question de savoir comment traiter les juges qui ont été
nommés par le biais d'une procédure déficiente (par le KRS après
la réforme controversée de 2017) devait avant tout être envisagée
dans le contexte de l’obligation de la Pologne d’exécuter les arrêts
pertinents de la Cour européenne des droits de l’homme concernant
le pouvoir judiciaire. Les autorités sont donc libres de choisir
les moyens d’y parvenir, pour autant que ces moyens soient compatibles
avec les principes d’État de droit et la Convention européenne des droits
de l'homme elle-même. Par conséquent, tout mécanisme mis en œuvre
à cette fin devrait concerner l’ensemble des juges concernés; il
ne devrait pas être mis en œuvre par un organisme contrôlé par le gouvernement;
il devrait faire l'objet d'une forme de contrôle judiciaire donnant
la possibilité aux juges concernés de contester les décisions qui
les concernent; et il devrait permettre une sorte d'évaluation individuelle
des nominations déficientes. En outre, la Commission de Venise a
estimé que l’invalidation
ex tunc des
nominations par le biais d'une procédure déficiente irait à l'encontre
des principes d’État de droit, en particulier parce qu'elle échouerait
à tout test de proportionnalité.
69. Dans son avis sur la loi relative au ministère public

, la Commission de Venise s'est félicitée
de la proposition de distinguer les fonctions de procureur général
et de ministre de la Justice, recommandation de longue date de la
Commission de Venise et de l'Assemblée. Elle s'est félicitée de
l'élection à la majorité absolue du procureur général par le Sejm
avec l’accord du Sénat. Toutefois, elle a recommandé aux autorités d'envisager
des mesures complémentaires pour garantir un processus de nomination
non politisé. En outre, pour éviter tout risque d'abus, elle a recommandé
de prévoir des «garanties procédurales contre la révocation abusive
du procureur général».
70. Sur proposition des corapporteurs, la commission de suivi
a décidé d'organiser le 2 décembre 2024 une audition de haut niveau
intitulée «Le processus de réforme judiciaire en Pologne et les
questions soulevées dans ce contexte», avec la participation du
Ministre polonais de la Justice, M. Adam Bodnar, du Commissaire polonais
aux droits humains, M. Marcin Wiacek, d’un représentant de la Commission
de Venise, M. Martin Kuijer, ainsi que de M. Maciej Nowicki, de
la Fondation polonaise Helsinki pour les droits humains, et de M. Jacek
Sokołowski, du Klub Jagielloński. En outre, les rapporteurs ont
effectué une visite d'information en Pologne du 18 au 20 novembre
2024

.
2.2.8. Serbie
71. La commission de suivi a examiné
la situation en Serbie lors de ses réunions de janvier

, mars

et avril 2024

.
Ses corapporteurs ont suivi de près la situation en Serbie, bien
qu’une visite dans le pays n’ait pas pu être organisée en raison
des développements postélectoraux (voir ci-dessous) et de l’indisponibilité
de l’un des corapporteurs.
72. Des élections législatives anticipées (les troisièmes organisées
en l’espace de quatre ans) et des élections locales à Belgrade et
dans la province de Voïvodine ont eu lieu le 17 décembre 2023. Une commission
ad hoc de l’Assemblée a observé
les élections législatives dans le cadre d’une mission internationale
d’observation des élections aux côtés des délégations de l’Assemblée
parlementaire de l’OSCE, du Parlement européen et de la mission
d’observation électorale du BIDDH de l’OSCE. Dans leur
rapport présenté à l’Assemblée en janvier 2024, les observateurs
de l’Assemblée ont conclu que les élections législatives anticipées
serbes avaient offert aux électeurs le choix entre plusieurs options
politiques et que les libertés d’expression et de réunion avaient
été respectées dans l’ensemble, mais que les élections avaient été entachées
d’irrégularités de procédure et de nombreuses allégations d’organisation
et de transport d’électeurs pour soutenir le parti au pouvoir lors
des élections locales. Des actes de violence isolés avaient été
signalés. Les pressions exercées sur les électeurs ainsi que l’implication
décisive du Président de la République, combinées aux avantages
systémiques du parti au pouvoir, avaient nui au processus électoral
dans son ensemble et créé des conditions injustes. Les résultats
des élections

et les irrégularités présumées
ont donné lieu à des manifestations de masse dans le pays. Dans
sa
Résolution
du 8 février 2024 intitulée «La situation en Serbie à la suite des élections»,
le Parlement européen a proposé de mener une enquête internationale
indépendante sur les irrégularités et suggéré de suspendre le financement
de pré-adhésion.
73. Par la suite, en avril 2024, la Présidente du parlement a
convoqué de nouvelles élections municipales à Belgrade. Ces élections
ont eu lieu le 2 juin 2024, en même temps que celles de 89 assemblées
locales dans le pays. Une partie de l’opposition les a boycottées.
Le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe
n’a malheureusement pas été invité à les observer. D’après le
rapport
de la Mission d’observation électorale du BIDDH de l’OSCE, les élections «ont été bien administrées, ont offert
aux électeurs un large éventail d’options politiques, mais les préoccupations
concernant les pressions généralisées exercées sur les employés
du secteur public, l’utilisation abusive des ressources publiques
et la partialité des médias en faveur de la coalition au pouvoir
ont eu des effets négatifs sur le processus.» La mission d'observation
électorale du BIDDH a rappelé une fois de plus la nécessité de réformer
le cadre juridique électoral compte tenu des recommandations du
BIDDH. Elle a également relevé un manque général de confiance dans
l’exactitude des listes électorales, la polarisation du paysage
médiatique, des cas d’intimidation de journalistes et, le jour du scrutin,
des problèmes liés au secret du vote, à des irrégularités de procédure,
à des allégations de pressions et d’achat de voix. L’alliance du
parti progressiste serbe (SNS) a remporté les élections dans la
plupart des assemblées locales. Lors des élections à l’assemblée
municipale de Belgrade, elle a obtenu la majorité des sièges (52,4 %),
suivie par l’opposition Kreni Promeni (Go-Change) (17,2 %). Les
partis d’opposition ont affirmé que le SNS avait falsifié les résultats
à Niš et au Nouveau Belgrade afin de revendiquer une courte majorité
de sièges dans leurs assemblées.
74. Le nouveau gouvernement a été approuvé par le parlement le
2 mai 2024, avec Miloš Vučević comme nouveau Premier ministre. Tout
en faisant observer que l’adhésion à l’Union européenne est un objectif stratégique
pour son pays, M. Vučević a également souligné qu’il n’approuvait
pas la politique de sanctions de l’Union européenne contre la Fédération
de Russie. Il a également dit que l’adhésion du Kosovo au Conseil
de l’Europe, recommandée par l’Assemblée dans son
Avis 302 (2024) du 16 avril 2024, constituait un défi pour la Serbie
et a annoncé que son gouvernement s’y opposerait.
76. Pour ce qui est de la lutte contre la corruption, en décembre
2023, la Serbie avait suivi 10 des 13 recommandations formulées
dans le cadre du quatrième cycle d’évaluation du GRECO concernant
la prévention de la corruption des parlementaires, juges et procureurs
(voir l’
addendum
au deuxième rapport de conformité). Toutefois, en ce qui concerne le cinquième cycle d’évaluation
du GRECO, qui traite de la prévention de la corruption et de la
promotion de l’intégrité dans les gouvernements centraux (hautes
fonctions de l’exécutif) et les services répressifs, selon l’
addendum
au deuxième rapport de conformité du GRECO de juin 2024, seule 1 des 24 recommandations
a été entièrement mise en œuvre, tandis que 10 l’ont été partiellement
et que 13 ne l’ont pas été (en particulier en ce qui concerne la
vérification de l’intégrité des membres du gouvernement, les formations
sur les normes d’intégrité, la définition du lobbying, la déclaration de
conflits d’intérêts et la prévention de la corruption au sein de
la police). S’agissant des mesures de lutte contre le blanchiment
de capitaux et le financement du terrorisme, selon un
rapport
de MONEYVAL de décembre 2023, la Serbie a fait des progrès en ce
qui concerne les actifs virtuels et les fournisseurs de services d’actifs
virtuels.
77. 62 arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme sont
pendants devant le Comité des Ministres

. Trois grands groupes d’affaires
relèvent toujours de la procédure de surveillance soutenue du Comité
des Ministres: mauvais traitements infligés par des policiers et
inefficacité des enquêtes sur ce type d’allégations (groupe d’affaires
Stanimirović), durée excessive des
différents types de procédures judiciaires (groupe d’affaires
Jevremović) et non-exécution ou
exécution tardive de décisions nationales à l’encontre d’entreprises appartenant
à la collectivité/à l’État (groupe d’affaires
Kačapor).
78. En janvier 2024, le CPT a publié le
rapport de sa visite ad
hoc en Serbie de mars 2023. Il était préoccupé par l’inaction des autorités s’agissant
de la mise en œuvre des recommandations qu’il avait formulées au
sujet des brutalités policières. En outre, la Serbie n’a toujours
pas pris les mesures nécessaires pour faire face aux conséquences
des guerres dans l’ex-Yougoslavie, en veillant notamment à ce que
les criminels de guerre soient jugés et à ce que la justice transitionnelle
soit rendue. Dans une
lettre adressée à son Premier ministre en janvier 2024, l’ancienne
Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, Dunja
Mijatović, demandait aux autorités de prendre des mesures concrètes
à cet égard, notamment en ouvrant les archives militaires.
79. Comme l’a souligné le rapporteur de la commission de suivi
dans sa note d’information, la situation en matière de liberté d’expression
et de médias reste préoccupante. En 2024, la
Plateforme du Conseil de l’Europe pour renforcer la protection
du journalisme et la sécurité des journalistes a lancé au moins
14 alertes, notamment pour des cas de dénigrement de journalistes
critiquant le gouvernement ou de menaces de mort les visant (au
23 octobre 2024).
80. En ce qui concerne la lutte contre la discrimination et la
protection des droits des minorités, selon le
rapport de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance
(ECRI) d’avril 2024, depuis 2017, des progrès ont été réalisés et
des bonnes pratiques ont été développées dans un certain nombre
de domaines (en particulier en ce qui concerne le retrait des contenus
discriminatoires des manuels scolaires et des matériels pédagogiques,
la lutte contre le discours de haine et, pour ce qui est en particulier
des Roms

, la garantie d’une fréquentation préscolaire
et scolaire accrue des élèves et la résolution du problème de l’absence
de documents d’identité personnels). Toutefois, certaines questions
restent préoccupantes et devraient être traitées (telles que les
préjugés contre les personnes LGBTI, les discours de haine envers
toutes sortes de minorités, l’absence de documents d’identité pour
les réfugiés et les demandeurs d’asile, la ségrégation de fait des
Roms dans l’éducation et les expulsions forcées de Roms). Une délégation
du Comité consultatif de la Convention-cadre pour la protection
des minorités nationales s’est rendue dans le pays du 24 au 28 juin
2024 pour évaluer les progrès réalisés en matière de protection
des minorités nationales. Son cinquième avis devrait être adopté
en 2025.
2.2.9. Türkiye
81. En 2024, la commission de suivi
s’est concentrée sur les élections locales en Türkiye, l’indépendance du
pouvoir judiciaire, les conditions carcérales et l’exécution des
arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme, notamment dans
les affaires de M. Osman Kavala

, homme d’affaires, philanthrope
et défenseur des droits humains, et M. Selahattin Demirtaş

,
ancien membre de la Grande Assemblée nationale et coprésident du
Parti démocratique du peuple (HDP). L’organisation d’une visite
d’information des corapporteur·es a été reportée à plusieurs reprises
depuis janvier 2023 en raison de l’évolution de la situation politique
et de changements de rapporteur·e.

Enfin, le corapporteur,
M. Stefan Schennach (SOC, Autriche), a effectué une visite d’information
à Ankara et à Istanbul du 11 au 14 juin 2024
![(27)
Malheureusement la
corapporteure, Mme Mortimer, n’a pas
pu y participer en raison des élections législatives organisées
au Royaume‑Uni le 4 juillet 2024. Voir la <a href='https://pace.coe.int/fr/news/9508/pace-monitor-ending-visit-again-urges-turkish-authorities-to-implement-strasbourg-court-judgments'>déclaration</a> que M. Schennach a publiée après sa visite [18 juin 2024].](/nw/images/icon_footnoteCall.png)
.
82. La situation politique en Türkiye a évolué avec les élections
locales du 31 mars 2024, qui se sont soldées par une victoire de
l’opposition: le Parti républicain du peuple (CHP) a surtout gagné
dans les grandes villes et sur la côte méditerranéenne, tandis que
le Parti de l’égalité et de la démocratie du peuple (DEM), qui a
succédé au HDP, l’a emporté dans de nombreuses provinces du sud-est
du pays. Le scrutin a été observé par la mission d’observation électorale
du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe,
qui s’est félicitée du taux de participation élevé et de son déroulement
pacifique et professionnel
![(28)
<a href='https://www.coe.int/fr/web/portal/-/council-of-europe-congress-local-elections-in-t%C3%BCrkiye-overall-well-organised-and-respecting-the-will-of-the-voters'>Déclaration</a> de la mission d’observation du Congrès [1er avril
2024].](/nw/images/icon_footnoteCall.png)
. Après les élections, les autorités ont
continué de révoquer les maires élus dans les communes dirigées
par le parti DEM et de les remplacer par des gouverneurs nommés
par le ministre de l’Intérieur, bien qu’une tentative de révocation
d’un comaire élu de la ville de Van ait échoué à la suite d’une
décision du Conseil électoral suprême. En juin 2024, le comaire
élu de Hakkari a été arrêté et condamné de manière expéditive à
une peine de 19 ans et 6 mois d’emprisonnement pour des infractions
liées au terrorisme.
83. En ce qui concerne l’indépendance du pouvoir judiciaire, la
structure du Conseil des juges et des procureurs (HSK) est l’une
des questions les plus problématiques, qui est suivie dans le contexte
de la mise en œuvre de l’arrêt Kavala de la Cour européenne des
droits de l’homme (dans le cadre des mesures de caractère général).
Le problème tient à ce que la majorité des membres du HSK sont nommés
par les pouvoirs exécutif et législatif, ce qui n’est pas conforme
aux normes européennes

. Cette situation
soulève des doutes quant à l’indépendance du pouvoir judiciaire
par rapport au pouvoir politique en raison du rôle du HSK dans la nomination
et la révocation des juges et des procureurs et dans la prise de
décisions relatives à leur carrière. Par conséquent, le 18 avril
2024, la commission de suivi a demandé à la Commission de Venise
un avis sur les dispositions pertinentes de la Constitution et de
la législation turques

. Le 17 mai 2024, les corapporteur·e·s
ont fermement condamné les peines prononcées dans «l’affaire Kobané»,
notamment la condamnation de M. Demirtaş à une peine de 42 ans de
prison
![(31)
<a href='https://pace.coe.int/fr/news/9471/pace-turkiye-monitors-express-dismay-at-verdicts-in-the-kobane-case'>Déclaration</a> des corapporteur·es [17 mai 2024].](/nw/images/icon_footnoteCall.png)
.
A l’issue de sa visite d’information du 11 au 14 juin 2024, le rapporteur
a noté que de nombreux détenus étaient maintenus en détention à
des centaines de kilomètres de leur famille et que les procès se
déroulaient souvent à des centaines de kilomètres du lieu des infractions
présumées

.
84. En ce qui concerne les condition de détention, dans sa
Résolution 2528 (2024) «Allégations de torture systémique et de peines ou traitements
inhumains ou dégradants dans les lieux de détention en Europe»

, l’Assemblée
s’est inquiétée du fait que «malgré le message de “tolérance zéro”
affiché par les autorités, le recours à la torture et aux mauvais
traitements en garde à vue et en prison a augmenté ces dernières
années, reléguant au second plan les progrès antérieurs de la Türkiye
dans ce domaine». Lors de sa dernière visite (
ad
hoc) dans le pays en février 2024, le CPT a examiné principalement
le traitement des personnes détenues dans des prisons de haute sécurité
ainsi que la situation des personnes LGBTI et des femmes détenues

. D’après les
Statistiques Pénales Annuelles sur les populations carcérales (SPACE
I) du Conseil de l’Europe pour 2023, la Türkiye présente le taux
d’incarcération le plus élevé en Europe avec 405 détenus pour 100 000 habitants.
Lors de sa visite en juin 2024, le corapporteur, M. Schennach, s’est
rendu dans les prisons de Sincan (Ankara), Marmara (Istanbul) et
Edirne

.
85. En ce qui concerne l’exécution des arrêts rendus par la Cour
européenne des droits de l’homme contre la Türkiye, au 20 septembre
2024, 458 affaires (138 «arrêts de principe» et 320 «affaires répétitives»)
étaient sous surveillance du Comité des Ministres

. Les arrêts non exécutés
de la Cour européenne des droits de l’homme concernent principalement
des recours abusifs à la privation de liberté (
Kavala c. Turquie et groupe d’affaires
Selahattin Demirtaş (no
2) c. Turquie)

; l’illégalité
de la détention; des violations du droit à la liberté d’expression
et d’information; des violations du droit à la liberté de réunion
et d’association; des violations du droit à la liberté de pensée,
de conscience ou de religion; le fonctionnement de la justice; l’inefficacité
des enquêtes sur les actions des forces de sécurité et leur impunité;
la violence domestique et diverses violations liées à la situation
dans la partie nord de Chypre

. En ce qui concerne le fonctionnement
de la justice, le Comité des Ministres surveille actuellement l’exécution
de l’arrêt
Yüksel Yalçınkaya c. Türkiye dans
lequel la Cour européenne des droits de l’homme a jugé que la condamnation
du requérant (un enseignant) pour appartenance à une organisation
terroriste armée, fondée sur l’utilisation d’une application de
messagerie cryptée (ByLock), était contraire à l’article 6 (droit
à un procès équitable), à l’article 7 (pas de peine sans loi) et à
l’article 11 (liberté de réunion et d’association) de la Convention
européenne des droits de l’homme

. Cet arrêt pourrait avoir
des implications considérables pour des milliers de personnes confrontées
à des accusations similaires en Türkiye. Au moins 8 000 requêtes
concernant ce problème sont actuellement pendantes devant la Cour
européenne des droits de l’homme.
86. L’exécution des arrêts
Kavala c.
Turquie et de ceux du groupe d’affaires
Selahattin Demirtaş (no
2) c. Turquie a été évoquée lors
de la visite du corapporteur en Türkiye. M. Schennach a rencontré
M. Kavala à la prison de Marmara (Istanbul) et M. Demirtaş à la
prison d’Edirne

. Bien que l’on ait pu espérer, à
l’issue de la visite, que les autorités trouveraient un moyen juridique
d’exécuter l’arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l’homme
dans l’affaire d’Osman Kavala et qu’elles le libèreraient sous peu,
il n’y a malheureusement pas eu d’évolution positive dans cette
affaire.
2.2.10. Ukraine
87. Compte tenu des progrès réalisés
par l’Ukraine dans la mise en œuvre des réformes nécessaires pour adhérer
à l’Union européenne, le Conseil européen est convenu, lors de sa
réunion des 14 et 15 décembre 2023, d’ouvrir des négociations d’adhésion
avec l’Ukraine. La première conférence intergouvernementale au niveau
ministériel s’est tenue le 25 juin 2024 à Luxembourg dans le but
d’ouvrir des négociations d’adhésion avec l’Ukraine.
88. Le mandat de M. Alfred Heer (Suisse, ADLE) en tant que corapporteur
a expiré le 11 octobre 2024. Son successeur devrait être désigné
lors de la réunion de la commission en janvier 2025.
89. Comme indiqué dans le précédent rapport d’activité, les autorités
et la société ukrainiennes ont poursuivi leurs efforts pour assurer
le fonctionnement des institutions démocratiques et de l’État de
droit malgré la guerre d’agression de la Fédération de Russie contre
l’Ukraine. Les rapporteurs pour l’Ukraine ont continué à suivre l’évolution
de la situation en Ukraine, mais une visite d’information prévue
au printemps 2024 avec la délégation ukrainienne a malheureusement
dû être reportée. Cette visite, essentielle au bon déroulement de la
procédure de suivi concernant l’Ukraine, devrait désormais avoir
lieu au premier semestre de 2025, une fois le/la rapporteur·e désigné·e.
2.3. Dialogue
postsuivi
2.3.1. Albanie
90. Le 17 avril 2024, l’Assemblée
a adopté la
Résolution 2544
(2024) «Le respect des obligations et engagements de l’Albanie».
Compte tenu des progrès réalisés par ce pays pour respecter ses
obligations et engagements envers le Conseil de l’Europe, et reconnaissant
la volonté politique clairement exprimée par les autorités albanaises
et par l’ensemble des forces politiques du pays, de traiter, en
priorité et en étroite coopération avec l’Assemblée et les organes
compétents du Conseil de l’Europe, les préoccupations et recommandations
restantes énoncées dans la
Résolution 2544
(2024) et le rapport qui l’accompagne, l’Assemblée a décidé
de clore la procédure de suivi à l’égard de l’Albanie et d’engager
un dialogue postsuivi. Parallèlement, soulignant l’importance des
problèmes qu’il reste à régler, l’Assemblée a demandé à la commission
de suivi d’envisager de proposer que l’Albanie fasse de nouveau
l’objet de la procédure de suivi complète dès le prochain rapport
établi dans le cadre du dialogue postsuivi, s’il s’avérait qu’aucun
progrès tangible et concret n’a été réalisé à ce moment-là pour
répondre aux principales préoccupations et recommandations de l’Assemblée
ayant trait à la lutte contre la corruption, à la protection des
minorités, à la liberté des médias et à la liberté d’expression.
91. L’Assemblée se félicitait de ce que la crise politique systémique
prolongée que connaît le pays depuis des années ait commencé à perdre
de son intensité, tout en reconnaissant que les causes profondes
de cette crise n’avaient toujours pas été traitées. Elle se déclarait
préoccupée par la polarisation persistante de l’environnement politique
en Albanie, qu’elle considérait être le talon d’Achille de la consolidation
démocratique du pays, dans la mesure où cette polarisation sape
le système d’équilibre des pouvoirs et limite le contrôle parlementaire.
92. L’Assemblée saluait la réforme administrative et territoriale
de l’Albanie, qui a considérablement réduit le nombre de communes
et renforcé l’efficacité de l’autonomie locale et la fourniture
de services aux citoyens. Cela étant, elle soulignait que toute
modification future du nombre de communes ou de leur périmètre devrait reposer
sur un large consensus entre les différentes parties prenantes.
Dans ce contexte, l’Assemblée était préoccupée par les conséquences
directes de la réforme territoriale et administrative sur l’exercice
des droits des minorités dans le pays, d’autant plus qu’un certain
nombre de droits fondamentaux des minorités comme le droit à l’enseignement
dans les langues minoritaires et celui d’utiliser les langues minoritaires
dans l’administration locale ne sont accordés au niveau local que
si la population minoritaire concernée représente plus de 20 % de
la population, seuil qui, de l’avis de l’Assemblée, est excessivement
élevé.
93. Tout en reconnaissant que les minorités nationales sont bien
intégrées dans la société albanaise, à quelques exceptions près,
l’Assemblée déclarait être préoccupée par l’adéquation du cadre
juridique régissant la protection des droits des minorités. Trois
décrets d’application importants, qui sont essentiels à la mise
en œuvre des dispositions de la loi de 2017 sur la protection des
minorités nationales, n’ont toujours pas été adoptés. L’Assemblée
a instamment demandé aux autorités albanaises d’adopter, sans plus
attendre, les trois décrets d’application qui régissent respectivement
le droit de libre identification, le droit à l’enseignement dans les
langues minoritaires et à leur emploi dans les relations avec les
autorités, et la procédure de reconnaissance des minorités nationales.
94. L’Assemblée saluait les progrès significatifs qui ont été
accomplis dans la lutte contre la corruption systémique encore très
répandue en Albanie et contre les préoccupations persistantes que
suscite l’imbrication de la criminalité organisée avec les intérêts
économiques et politiques du pays. Elle saluait également les avancées
réalisées dans la réforme de la justice, visant à renforcer son
indépendance et son efficacité. Dans ce contexte, l’Assemblée se
félicitait de la mise en œuvre de la procédure de réévaluation de tous
les juges et procureurs, qu’elle considère être une grande réussite,
malgré les effets considérables, quoique temporaires, de cette procédure
sur le fonctionnement des principales institutions judiciaires en Albanie.
95. Le 11 septembre 2024, M. Ionuţ-Marian Stroe (Roumanie, PPE/DC)
a été désigné corapporteur pour le dialogue postsuivi avec l’Albanie.
2.3.2. Bulgarie
96. Le 6 mars 2024, la commission
a adopté un projet de résolution sur le dialogue postsuivi avec
la Bulgarie. Les corapporteurs ont basé leur rapport sur les conclusions
de deux visites à Sofia et d’une visite à Bruxelles pour des consultations
informelles avec la Commission européenne, sur les auditions, avec
la participation de différentes parties prenantes, tenues dans le
cadre de réunions de la commission et sur les conclusions d’un certain
nombre de mécanismes de suivi.
97. Les corapporteurs ont reconnu les progrès incontestables réalisés
par la Bulgarie concernant les réformes et le cadre législatif indispensables
mis en place dans les domaines du système judiciaire, de la lutte contre
la corruption à haut niveau, des médias, des droits humains des
minorités, de la lutte contre le discours de haine et de la violence
à l’égard des femmes. Ils ont estimé que les autorités avaient manifesté
de manière fiable leur volonté d’assurer la pérennité et l’irréversibilité
des réformes. Cela étant, ils ont aussi appelé l’attention sur certains
sujets de préoccupation non encore réglés et invité les autorités
à traiter ces problèmes sans plus attendre.
98. En conclusion, les corapporteurs ont proposé – et la commission
a accepté – de mettre fin au dialogue postsuivi avec la Bulgarie,
estimant que les réformes en cours avaient mis le pays sur la bonne
voie.
99. Le débat à l’Assemblée a été programmé pour la session d’avril
2024, et le rapport a été déposé et rendu public (
Doc. 15947).
100. Cela dit, après l’annonce inattendue de la tenue d’élections
législatives anticipées en Bulgarie, prévues pour le 9 juin 2024,
le rapport a été retiré de l’ordre du jour de la partie de session
d’avril. En effet, notre commission et l’Assemblée ont pour habitude,
depuis longtemps, de ne pas mettre en débat, ni d’adopter des rapports
de suivi sur des pays qui sont en campagne électorale nationale.
101. Le 26 juin 2024, la commission a tenu un échange de vues sur
la situation post-électorale en Bulgarie, avec la participation
du président de la commission ad hoc pour
l’observation des élections législatives anticipées.
102. Il est rapidement apparu que la nouvelle composition du Parlement
bulgare ne permettrait pas la mise en place d’un gouvernement et
qu’une fois de plus, la Bulgarie devait organiser des élections
législatives anticipées. Ce vote, qui s’est déroulé le 27 octobre
2024, était le septième en un peu plus de trois ans, sans compter
les élections européennes et les deux tours de l’élection présidentielle.
La mission d’observation électorale de l’Assemblée a salué la bonne
organisation des élections, mais s’est déclarée préoccupée par l’absence
persistante de progrès décisif vers une sortie de l’impasse, qui
est l’illustration des crises politiques récurrentes. Elle a appelé
les forces politiques à dépasser les clivages partisans pour rompre
le cycle des gouvernements de courte durée ou chargés d’expédier
les affaires courantes, et pour mettre en place des solutions politiques
durables afin d’éviter l’institutionnalisation de la crise politique.
Les dirigeants politiques et les législateurs devraient envisager
d’apporter des changements dans le système électoral qui pourraient
être plus propices à la formation de gouvernements stables.
103. Le 11 septembre 2024, les corapporteurs ont attiré l’attention
de la commission sur un autre fait inquiétant, à savoir l’adoption
par le Parlement bulgare d’une modification de la loi sur l’éducation
interdisant «la propagande et la promotion LGBTQ+ » dans les établissements
scolaires. Cette nouvelle disposition rend illégal le fait d’« encourager »
une « orientation sexuelle non traditionnelle » et une identité
de genre « autre que biologique ». Adoptée à la surprise générale
et sans débat public, à une large majorité de 159 voix pour, 22 contre
et 13 abstentions, cette disposition a déclenché protestations et
manifestations.
104. Les corapporteurs suivent de près la situation en Bulgarie
et prévoient de se rendre dans le pays dès qu’un nouveau gouvernement
sera formé.
2.3.3. Monténégro
105. En 2021, l’Assemblée a adopté
une première résolution dans le cadre du dialogue postsuivi avec
le Monténégro. Dans cette
Résolution 2374
(2021), elle a décidé de poursuivre le dialogue postsuivi et
a énuméré une série d’exigences en ce qui concerne l’indépendance
du pouvoir judiciaire, la confiance dans le processus électoral,
la lutte contre la corruption et la situation des médias. En vertu
du Règlement de l’Assemblée, le dialogue postsuivi ne peut faire
l’objet que de deux rapports, et donc d’une seule autre résolution
de post-suivi. Si, dans cette seconde résolution, l’Assemblée ne
décide pas de mettre fin au dialogue postsuivi avec le Monténégro,
le pays sera de nouveau soumis à une procédure de suivi complète.
106. En novembre et décembre 2023, le dernier juge de la Cour constitutionnelle
et les trois membres non professionnels restants du Conseil de la
magistrature ont été nommés par le parlement, ce qui répond à une demande
de longue date des corapporteurs
![(41)
<a href='https://pace.coe.int/fr/news/8921/montenegro-a-fully-functional-constitutional-court-must-be-put-in-place-without-delay-say-pace-co-rapporteurs'>Déclaration</a> des corapporteurs [9 décembre 2022].](/nw/images/icon_footnoteCall.png)
.
107. Au cours de la période couverte par le rapport, la volonté
de mener des réformes au Monténégro a été motivée et façonnée par
le processus d’adhésion à l’Union européenne. En janvier 2024, l’Union
européenne « a salué les efforts déployés par le Monténégro […]
pour respecter les critères provisoires concernant l’État de droit »
et a ajouté que « le Monténégro doit en particulier […] reprendre,
poursuivre, accélérer et approfondir les réformes en matière d’indépendance,
de professionnalisme et de responsabilité de l’appareil judiciaire. » Au
cours du premier semestre de 2024, le Monténégro a accéléré les
réformes pour satisfaire aux normes fixées par la Commission européenne
avant la publication du « rapport d’évaluation des critères provisoires » en
juin 2024.
108. Au cours des six premiers mois de 2024, la Commission de Venise
a rendu, concernant le Monténégro, deux avis urgents relatifs à
la loi sur la prévention de la corruption et à la loi sur la saisie
et la confiscation des avantages matériels provenant d’activités
criminelles, ainsi que trois avis urgents sur les suites données
aux avis concernant la loi sur le Conseil judiciaire et les juges,
la loi relative au Bureau spécial du ministère public et la loi
relative au Ministère public.
109. Dans tous ces avis, la Commission de Venise indique qu’elle
comprend les raisons d’agir dans l’urgence, mais regrette profondément
qu’un processus de consultation et d’élaboration plus approfondi
n’ait pas été mené. Selon ses termes, « lorsque les décisions portent
sur des questions d’une importance majeure pour la société, comme
la justice pénale et la lutte contre la corruption, des consultations
larges et approfondies sont des conditions clés pour l’adoption
d’un cadre juridique opérationnel et acceptable par les personnes
actives dans le domaine concerné », notant qu’une procédure d’adoption
des lois transparente démocratique, inclusive et soumise à l’obligation
de rendre des comptes» est primordial pour l’épanouissement de l’État
de droit

.
110. En juin 2024, l’Union européenne a convenu que, dans l’ensemble,
le Monténégro avait satisfait aux critères provisoires. L’Union
a donc fixé les critères de clôture pour l’adhésion applicables
au système judiciaire, à la lutte contre la corruption et aux droits
fondamentaux. Le Monténégro est tenu de mettre en œuvre une réforme
globale de la justice, de mettre en place des systèmes solides et
efficaces pour prévenir et combattre la corruption et de veiller
à la mise en œuvre et à l’application effectives de la Convention européenne
des droits de l’homme. Selon l’Union européenne, il sera essentiel
que le Monténégro affiche un bilan solide et convaincant en matière
de mise en œuvre dans tous les domaines, démontrant que les réformes donnent
des résultats concrets, avec des effets tangibles et irréversibles
sur les secteurs concernés
![(43)
Conférence
sur l’adhésion à l’Union européenne – Monténégro – Position commune
de l’Union européenne, chapitre 23: Pouvoir judiciaire et droits
fondamentaux [anglais seulement].](/nw/images/icon_footnoteCall.png)
.
111. La volonté des autorités de mener à bien les réformes est
incontestable et doit être saluée. Les réformes adoptées vont dans
la bonne direction et rapprochent le Monténégro du respect des obligations
qui lui incombent en tant que membre du Conseil de l’Europe et de
ses engagements découlant de son adhésion à l’Organisation, et donc
de la fin du dialogue postsuivi. Les corapporteurs de la commission
de suivi procéderont à l’évaluation des réformes et de leur mise
en œuvre, et prévoient d’organiser une visite dans le pays à cette fin,
une fois achevée leur mise en place.
2.3.4. Macédoine du Nord
112. En 2024, les corapporteurs,
Mme Sibel Arslan (Suisse, SOC) et M. Joseph
O’Reilly (Irlande, PPE/DC), ont suivi de près l’évolution de la
situation en Macédoine du Nord. Une visite dans le pays a été reportée
en raison des élections du printemps, puis de la non-disponibilité
des rapporteurs.
113. En Macédoine du Nord, 2024 a été une année électorale. L’élection
présidentielle s’est déroulée en deux tours, les 25 avril et 8 mai
2024. Ils ont donné la victoire à une candidate du parti de droite
VMRO-DPMNE (Organisation révolutionnaire intérieure macédonienne
– Parti démocratique pour l’unité nationale macédonienne), Mme Gordana
Siljanovska-Davkova, qui a été élue première femme cheffe de l’État.
114. Des élections législatives ont eu lieu le 8 mai 2024. Elles
ont été remportées, à 43 % des suffrages, par le parti VMRO-DPMNE,
qui était dans l’opposition depuis sept ans. Le parti social-démocrate
(SDSM), alors au pouvoir, a obtenu un peu plus de 15 %, suivi par
le parti minoritaire au sein de la coalition gouvernementale, la
DUI (Union démocratique pour l’intégration), qui représente les
Albanais de souche, avec 13,8 % des voix, et l’opposition albanaise
unie Vlen, avec 10,7 % des voix. Les élections se sont déroulées
dans un contexte de mécontentement des électeurs à l’égard de la
classe politique, la plupart ayant le sentiment que ni le gouvernement,
ni l’opposition n’ont la volonté de répondre aux appels de longue
date pour des réformes d’envergure et pour l’accélération du processus
d’intégration européenne.
115. Les deux élections ont été observées par l’Assemblée, conjointement
avec le BIDDH de l’OSCE. Dans son
rapport d’observation des élections, l’Assemblée les a jugées compétitives et bien menées,
compte tenu du défi que représente l’organisation simultanée de
deux élections, et malgré les allégations d’achat de voix et de
rhétorique négative pendant la campagne. Les libertés fondamentales,
y compris la liberté des médias, ont été respectées.
116. Le 23 juin 2024, le parlement a approuvé le nouveau gouvernement
présenté par le Premier ministre Hristijan Mickoski, à une majorité
de 77 voix pour et 22 contre, sur les 120 sièges que compte le parlement.
La coalition au pouvoir est composée du parti VMRO-DPMNE, de l’alliance
albanaise VLEN/VREDI et du ZNAM, parti ethnique macédonien dissident
des sociaux-démocrates. M. Mickoski a annoncé que le gouvernement resterait
attaché à l’intégration européenne et continuerait de soutenir l’Ukraine
dans la guerre d’agression menée par la Fédération de Russie.
117. Quant à l’adhésion du pays à l’Union européenne, elle est
toujours retardée en raison d’un différend avec la Bulgarie sur
l’histoire, la langue et la culture des Balkans. Le gouvernement
précédent avait accepté la demande de la Bulgarie d’insérer dans
la Constitution de la Macédoine du Nord une référence à une minorité ethnique
bulgare, mais il ne disposait pas de la majorité parlementaire nécessaire
pour effectuer ce changement. Le nouveau Premier ministre a déclaré
que son gouvernement ne modifierait la Constitution que si la Bulgarie
approuvait d’abord l’adhésion de la Macédoine du Nord à l’Union
européenne. M. Mickoski a également invoqué le fait que la Bulgarie
n’avait pas encore exécuté les arrêts de la Cour européenne des droits
de l’homme relatifs à l’enregistrement des associations de Macédoniens
vivant dans ce pays. Les relations avec la Bulgarie et aussi avec
l’Union européenne se sont encore tendues après que les ambassadeurs
de l’Union européenne réunis à Bruxelles le 25 septembre 2024 ont
décidé de faire avancer le processus d’adhésion de l’Albanie à l’Union,
indépendamment de celui de la Macédoine du Nord (les deux pays ayant
entamé les négociations d’adhésion en même temps, le 19 juillet
2022).
118. Le Comité des Ministres surveille actuellement l’exécution
de 40 arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme concernant
la Macédoine du Nord, dont 18 arrêts de principe

. Trois arrêts/groupes d’arrêts font l’objet
d’une procédure de surveillance soutenue: les affaires concernant
les mauvais traitements infligés par la police et l’absence d’enquête
effective sur ces faits (groupe
Kitanovski)

, l’arrêt
X. 
concernant l’absence de
législation sur les conditions et procédures de modification du
sexe des personnes transgenres sur les certificats de naissance,
et les affaires concernant le refus d’enregistrer certaines associations
en tant qu’entités religieuses (groupe
Archidiocèse
orthodoxe d’Ohrid 
).
En 2024, le Comité des Ministres a relevé des avancées dans la mise
en œuvre du groupe d’affaires
Kitanovski et,
en ce qui concerne l’arrêt
X.,
il a instamment demandé aux autorités d’achever le processus législatif
menant à l’adoption d’une nouvelle loi sur l’enregistrement de l’état
civil.
119. En mai 2024, le CPT a publié le
rapport de sa visite périodique d’octobre 2023 dans le pays.
Dans ce rapport, il a conclu qu’il n’y avait pas eu d’amélioration
depuis 2019 dans le traitement des personnes privées de liberté
par la police. Le CPT a constaté certaines améliorations dans les
prisons de Skopje, Štip et Prilep, mais la situation dans la prison
d’Idrizovo reste alarmante en raison des mauvais traitements physiques
infligés par le personnel et de l’isolement prolongé des détenus
difficiles, des niveaux de violence élevés entre détenus, des mauvaises
conditions d’hygiène et de sécurité, ainsi que de la corruption
et du favoritisme généralisés parmi le personnel. Le CPT a conclu
que les soins de santé étaient insuffisants et qu’il était nécessaire
d’engager une réforme stratégique du système pénitentiaire mettant
l’accent sur l’élimination de la corruption au sein du personnel
et sur la professionnalisation de l’administration pénitentiaire
par des nominations transparentes, fondées sur le mérite et dépolitisées.
Le 8 octobre 2024, le Président du CPT, Alan Mitchell, et le Vice-Gouverneur
de la Banque de développement du Conseil de l’Europe (CEB), Tomáš
Boček, ont eu un échange de vues constructif avec le Premier ministre,
Hristijan Mickoski, sur l’accélération du processus de réforme pénitentiaire
dans le pays. M. Mickoski a été informé de la situation désastreuse
de la prison d’Idrizovo. En réponse, le Premier ministre a déclaré
que son gouvernement reconnaissait l’importance capitale de la réforme
pénitentiaire pour le système de justice pénale et que le pays respecterait
ses engagements internationaux. Il a reconnu que le système pénitentiaire
avait besoin d’investissements plus importants.
120. Le 15 janvier 2024, l’ancienne Commissaire aux droits de l’homme
du Conseil de l’Europe, Dunja Mijatović, a écrit aux Premiers ministres
des États membres du Conseil de l’Europe de la région de l’ex-Yougoslavie

. Dans ces lettres, elle recommandait
aux autorités de prendre un certain nombre de mesures pour affronter
le passé violent et progresser plus résolument vers la cohésion
sociale, la justice et la réconciliation. Dans sa
lettre
au Premier ministre de la Macédoine du Nord (en anglais), tout en reconnaissant que le conflit dans
ce pays avait été de bien moindre ampleur que dans d’autres pays
de la région, elle a invité les autorités à prendre des mesures
concrètes pour mieux respecter les droits des victimes, en se confrontant aux
griefs liés au passé dans un souci de cohésion sociale (elle recommandait
notamment d’abroger l’interprétation authentique de 2012 de la loi
d’amnistie de 2002, d’instruire les dossiers transférés par le Tribunal
pénal international pour l’ex-Yougoslavie aux tribunaux nationaux,
et de réformer le système éducatif).
2.4. Rapports de suivi périodiques
2.4.1. Grèce
121. En décembre 2023, la commission
a sélectionné la Grèce pour son examen périodique des obligations contractées
par les pays lors de leur adhésion au Conseil de l’Europe. Elle
a été saisie pour élaborer un rapport en janvier 2024. En raison
de la vacance prolongée d’un poste de corapporteur, le travail d’élaboration
du rapport n’a pas encore commencé.
2.4.2. Pays-Bas
122. En janvier 2021, la commission
a sélectionné les Pays-Bas pour son examen périodique, et elle a
été saisie pour élaborer un rapport en mars 2021. En raison des
nombreux changements de rapporteurs, le Bureau a prolongé la validité
du renvoi jusqu’en mars 2025.
123. Les rapporteurs ont présenté l’avant-projet de rapport à la
commission le 30 mai 2023. Le document a été envoyé aux autorités
néerlandaises pour commentaires, la commission prévoyant de le soumettre
à l’examen de l’Assemblée en octobre 2023.
124. Toutefois, le 7 juillet 2023, des désaccords sur les politiques
d’immigration ont entraîné la chute du gouvernement de M. Rutte.
Des élections générales anticipées ont été organisées le 22 novembre
2023. Or la commission de suivi a pour habitude de ne pas mettre
en débat des rapports de pays qui sont en campagne électorale pour
éviter qu’ils soient instrumentalisés à des fins politiques.
125. Après une longue période de tractations, un nouvel accord
de coalition a été signé le 16 mai 2024 et un nouveau gouvernement
a été formé en juillet 2024, avec, à sa tête, M. Dick Schoof, un
ancien chef du Service de renseignement néerlandais sans affiliation
politique. Cette coalition gouvernementale est composée du Parti
pour la liberté (PVV), du Parti populaire pour la liberté et la
démocratie (VVD), du parti Nouveau contrat social et du Mouvement
agriculteur-citoyen (BBB).
126. Jusqu’au troisième mardi de septembre, date à laquelle, comme
le veut la tradition, le roi Willem-Alexander a présenté au parlement
les plans de politique générale élaborés par le gouvernement, le
nouveau cabinet s’est employé à traduire les principaux points de
l’accord de coalition en objectifs politiques concrets. Il va maintenant
s’attacher à mettre en œuvre ces politiques.
127. Le 3 octobre 2024, la commission de suivi a tenu un échange
de vues sur la procédure à suivre, au cours duquel le rapporteur
a souligné qu’en raison du résultat des élections, le premier avant-projet
de rapport était largement obsolète.
128. Les rapporteurs ont donc décidé de revoir leur rapport après
une visite et des échanges avec les nouvelles autorités. Ils espèrent
que ces discussions viendront confirmer la détermination des autorités
à répondre aux préoccupations exprimées par la Commission de Venise
et la Direction Générale Droits humains et État de droit du Conseil
de l’Europe dans leur avis conjoint sur les garanties juridiques
de l’indépendance du pouvoir judiciaire par rapport au pouvoir exécutif,
qui a été élaboré à la demande de la commission de suivi en 2023.
129. Pour permettre aux rapporteurs de respecter les délais imposés
par la procédure de suivi, la commission est convenue de demander
au Bureau de prolonger la validité du renvoi jusqu’en mars 2026.
2.4.3. Espagne
130. En décembre 2023, la commission
a sélectionné l’Espagne pour son examen périodique des obligations contractées
par les pays lors de leur adhésion au Conseil de l’Europe. Elle
a été saisie pour élaborer un rapport en janvier 2024. Le 6 mars
2024, Mme Elvira Kovács (Serbie, PPE/DC)
et M. Caspar van den Berg (Pays-Bas, ADLE) ont été nommés corapporteurs.
En raison de l’actualité politique dans les pays des rapporteurs
et de la démission de l’un d’eux, le travail d’élaboration du rapport
n’a pas encore commencé. Le 3 décembre 2024, Mme Valentina
Grippo (Italie, ADLE) a été nommée rapporteure en remplacement de
M. Caspar van den Berg.
2.4.4. Suède
131. En décembre 2023, la commission
a sélectionné la Suède pour son examen périodique des obligations contractées
par les pays lors de leur adhésion au Conseil de l’Europe. Elle
a été saisie pour élaborer un rapport en janvier 2024. Le 6 mars
2024, Mme Yelizaveta Yasko (Ukraine,
PPE/DC) et Mme Anne Stambach-Terrenoir (France,
GUE) ont été nommées corapporteures. En raison de l’actualité politique
dans les pays des rapporteures, le travail d’élaboration du rapport
n’a pas encore commencé.
3. Quelques réflexions sur l’efficacité
et l’impact des travaux de la commission
132. Pour être en mesure d’effectuer
un suivi systématique et efficace, d’assurer la continuité du dialogue politique
avec le pays concerné et de produire des résolutions de qualité,
pertinentes et en temps utile, l’Assemblée doit disposer de rapporteurs
suffisamment disponibles pour exécuter les tâches importantes et souvent
chronophages qui leur incombent.
133. Une rotation importante des rapporteurs a eu lieu en 2024.
Lors de la partie de session d’octobre 2024, des appels à candidature
ont été lancés afin de pourvoir sept postes vacants de corapporteurs
de suivi pour l’Albanie, l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Bosnie-Herzégovine,
la Grèce, l’Espagne et la Türkiye, respectivement.
134. L’élaboration des rapports de suivi périodiques sur la Grèce,
l’Espagne et la Suède, pays qui ont été sélectionnés par la commission
de suivi en décembre 2023, n’a pas encore commencé, en raison de
l’absence ou de la non disponibilité de certains corapporteurs.
De même, les rapports de suivi sur la Serbie et la Macédoine du
Nord sont en suspens depuis longtemps.
135. La procédure de suivi présente des demandes spécifiques qui
placent la commission dans une situation tendue. En effet, pour
chaque pays, deux corapporteurs sont nécessaires afin d’assurer
l’équilibre politique, et si l’un d’eux vient à manquer, les possibilités
d’action de l’autre sont limitées. Par exemple, il ou elle ne peut pas
effectuer de visite dans le pays sous sa responsabilité (à quelques
exceptions près). Pourtant, le dialogue politique direct avec les
différentes parties prenantes est un élément absolument essentiel
de l’élaboration des rapports de suivi et, sans visite, le travail
sur le rapport ne peut pas avancer. Il va sans dire que les deux corapporteurs
sont nécessaires pour valider et soumettre un projet de rapport
à l’examen de la commission.
136. Cette année s'est avérée très intense pour la commission et
son mandat. Plusieurs événements survenus sur notre continent ont
souligné que les travaux de la commission restent pertinents et
nécessaires.
137. Suite au Sommet de Reykjavík, la commission de suivi a insisté
sur le rôle de ses rapports, qui constituent un mécanisme d’alerte
précoce permettant de repérer et de traiter les diverses situations
et évolutions qui, dans les États membres du Conseil de l’Europe,
risquent de constituer une menace pour l’État de droit, la sécurité
démocratique et les relations de bon voisinage. En conséquence,
dans sa
Résolution 2534 (2024), l’Assemblée a invité la commission de suivi à poursuivre
sa réflexion sur les mécanismes permettant de renforcer sa réactivité
et sa capacité à réagir rapidement à l’évolution de la situation
dans les États membres qui ne font pas l’objet d’une procédure de
suivi complète et qui ne sont pas engagés dans un dialogue postsuivi ni
soumis à un examen périodique de leurs obligations envers le Conseil
de l’Europe.
138. Pour ce faire, la commission a mené, au cours de la période
de référence, un certain nombre de réflexions internes sur ce sujet
et a organisé une audition conjointe avec la commission des questions politiques
et de la démocratie sur le thème « Renforcement des mécanismes d’alerte
précoce en cas de menaces à la sécurité démocratique ». L’un des
principaux objectifs de cette réunion était d’assurer une cohérence
et une complémentarité claires entre les travaux de ces commissions,
qui ont toutes deux un rôle clé à jouer dans ce domaine. À cet égard,
il ne fait aucun doute que la commission de suivi joue un rôle essentiel
en détectant précocement les changements qui surviennent dans nos
États membres et notamment les éventuels dysfonctionnements des
institutions démocratiques et de l’État de droit susceptibles de
menacer la stabilité interne, sociale et politique de ces pays ainsi
que leur sécurité démocratique. Les résultats de cette audition
conjointe donneront lieu à de nouvelles consultations au sein de
la commission l’an prochain, notamment sur l’intégration structurelle
de cette problématique dans les travaux de la commission et sur
le choix des pays devant faire l’objet d’un examen périodique.
139. La possibilité pour la commission de suivi de solliciter l’avis
de la Commission de Venise a été un instrument important pour détecter
d’éventuels dysfonctionnements des institutions démocratiques et
de l’État de droit dans les pays et y faire face. Il serait souhaitable
de faire davantage appel à ce mécanisme, qui suscite un intérêt
grandissant et une demande croissante des membres de la commission,
dans le contexte du renforcement des capacités d’alerte précoce
de cette dernière mentionnées ci-dessus, notamment en ce qui concerne
les propositions de demande d’avis sur les pays qui ne font pas
l’objet de l’élaboration d’un rapport dans le cadre de l’une des
procédures de suivi de l’Assemblée. Dans ce contexte, il est important
de noter qu’aux termes de son mandat, la commission est expressément
chargée de veiller à ce que tous les États membres du Conseil de
l’Europe respectent les obligations découlant de leur adhésion à
l’Organisation, suivi qu’elle s’est engagée à renforcer.
140. En ce qui concerne les éventuelles autres mesures propres
à accroître l’efficacité et l’impact de la procédure de suivi parlementaire,
je souhaiterais également proposer l’introduction d’une nouvelle
pratique, qui aurait certaines conséquences budgétaires, mais qui
contribuerait de manière significative à notre objectif. Je propose
que tous nos textes adoptés relatifs à la procédure de suivi soient
systématiquement traduits dans la langue du pays auquel ils se rapportent.
En effet, ils seraient ainsi beaucoup mieux connus des acteurs locaux
et du grand public, notamment des autorités et de la société civile,
qui n’auraient plus à compter sur les médias locaux comme intermédiaires.
Il est inutile de souligner à cet égard que dans les pays où la
liberté des médias suscite des inquiétudes, le message véhiculé
peut ne pas être le reflet exact de nos textes. Je suis persuadé
que le coût de la traduction serait compensé par la visibilité ainsi
apportée.