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Rapport | Doc. 16183 | 02 juin 2025

Promouvoir la participation inclusive dans la vie parlementaire: égalité de genre, accessibilité et politiques inclusives

Commission sur l'égalité et la non-discrimination

Rapporteure : Mme Maryna BARDINA, Ukraine, ADLE

Origine - Renvoi en commission: Doc. 15291, Renvoi 4590 du 21 juin 2021. 2025 - Troisième partie de session

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 12 mai 2025.

(open)
1. Les parlements en Europe restent à dominance masculine, notamment aux postes de direction et de décision, et cette sous-représentation des femmes dans la vie parlementaire fragilise les institutions et les processus démocratiques. La participation à égalité des femmes et des hommes, dans toute leur diversité, à tous les domaines de la vie sociale et professionnelle, constitue un enjeu de droits humains. La représentation paritaire des femmes et des hommes dans la vie parlementaire est indispensable au bon fonctionnement des démocraties et à la bonne gouvernance.
2. Un parlement est également un lieu de travail où beaucoup d’élu·es et de membres du personnel sont aussi parents. Pourtant, des exigences comme l’obligation de présence physique, ainsi que l’absence d’infrastructures adaptées (dont des structures de garde d’enfants et des lieux permettant d’allaiter) et de locaux accessibles, créent des obstacles supplémentaires à la participation à la vie parlementaire, en particulier pour les femmes, aggravant encore ainsi leur sous-représentation.
3. Les parlementaires, à l’instar de toutes les personnes actives, ont besoin de trouver un équilibre sain et durable entre vie professionnelle et vie privée, or les diverses responsabilités familiales et en matière de soins continuent d’affecter principalement la participation des femmes à la vie parlementaire. Les parlementaires hommes doivent être des acteurs clés du changement pour transformer la vie parlementaire et œuvrer avec les femmes à l’égalité de genre au sein des parlements.
4. Cela étant, l’inclusion ne se limite pas à renforcer la participation des femmes à la vie parlementaire et à répondre aux attentes des jeunes parents. Il convient également de prendre en compte les besoins spécifiques d’autres groupes, comme les personnes en situation de handicap ou à mobilité réduite, qu’elles soient parlementaires ou membres du personnel parlementaire.
5. L’Assemblée parlementaire souligne la nécessité d’atteindre les cibles pertinentes associées aux objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies d’ici à 2030, notamment la cible 5.5 (de l’ODD 5): «Garantir la participation entière et effective des femmes et leur accès en toute égalité aux fonctions de direction à tous les niveaux de décision, dans la vie politique, économique et publique»; la cible 10.2 (de l’ODD 10): «Autonomiser toutes les personnes et favoriser leur intégration sociale, économique et politique, indépendamment de leur âge, de leur sexe, de leur handicap, de leur race, de leur appartenance ethnique, de leurs origines, de leur religion ou de leur statut économique ou autre»; et la cible 16.7 (de l’ODD 16): «Faire en sorte que le dynamisme, l’ouverture, la participation et la représentation à tous les niveaux caractérisent la prise de décisions».
6. L’Assemblée salue le Pacte pour l’avenir, adopté par l’Assemblée générale des Nations Unies en septembre 2024, et sa mesure 8, par laquelle les États se sont engagés «à veiller à ce que les femmes participent pleinement et réellement aux fonctions de direction à tous les niveaux de décision, dans la vie politique, économique et publique, et y accèdent sur un pied d’égalité».
7. L’Assemblée se félicite en outre de la Recommandation générale n°40 sur la représentation égale et inclusive des femmes dans les systèmes de décision, adoptée en octobre 2024 par le Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes.
8. L’Assemblée rappelle la Déclaration de Kigali, adoptée lors de la 145e Assemblée de l’Union interparlementaire (UIP) en octobre 2022, intitulée «Égalité des sexes et parlements sensibles au genre: moteurs du changement pour un monde plus résilient et pacifique».
9. L’Assemblée rappelle également ses Résolution 2386 (2021) «Promouvoir la participation des femmes issues de groupes sous-représentés dans la prise de décision politique et publique», Résolution 2274 (2019) «Pour des parlements sans sexisme ni harcèlement sexuel», Résolution 2222 (2018) «Promouvoir la diversité et l’égalité dans la vie politique», Résolution 2155 (2017), «Les droits politiques des personnes handicapées: un enjeu démocratique» ainsi que Résolution 2111 (2016) «Évaluation de l’impact des mesures destinées à améliorer la représentation politique des femmes».
10. L’Assemblée appelle les États membres et observateurs du Conseil de l’Europe, ainsi que les États dont le parlement bénéficie du statut d’observateur ou de partenaire pour la démocratie auprès de l’Assemblée:
10.1. en ce qui concerne l’égalité entre les femmes et les hommes:
10.1.1. à assurer une participation équilibrée des femmes et des hommes dans tous les domaines de la vie parlementaire, en particulier aux postes décisionnels;
10.1.2. à fixer un objectif de parité de genre dans la représentation politique dans les parlements nationaux, à procéder à une évaluation de la situation au niveau national et à élaborer un plan stratégique visant à atteindre cet objectif par des mesures spécifiques;
10.1.3. à analyser la composition des parlements nationaux en adoptant une approche intersectionnelle, à collecter des données ventilées et à soutenir la recherche sur la participation des femmes à la prise de décision politique, notamment lorsqu’elles sont issues de groupes sous-représentés;
10.1.4. à envisager de recourir aux outils disponibles élaborés par l’UIP, l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes (EIGE) et le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme (BIDDH) de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) pour évaluer la représentation des femmes et des hommes dans les parlements nationaux, afin de pouvoir mettre en place des mesures appropriées;
10.1.5. à sensibiliser à l’impact du sexisme et de la violence fondée sur le genre dans la vie politique, notamment sur le niveau de participation des femmes parlementaires;
10.1.6. à promouvoir et soutenir des réseaux de femmes parlementaires, dont des forums féminins au sein des parlements nationaux;
10.1.7. à élaborer des programmes spécifiques pour que les hommes politiques s’engagent en tant qu’acteurs du changement et œuvrent, avec les femmes dirigeantes, à la réalisation de l’égalité de genre en politique;
10.1.8. à revoir la législation nationale et à abolir, le cas échéant, les dispositions législatives qui restreignent le droit des femmes parlementaires avec enfants à participer à des déplacements professionnels et à effectuer des heures supplémentaires rémunérées si tel est leur souhait;
10.2. en ce qui concerne l’accessibilité des parlements:
10.2.1. à permettre aux personnes en situation de handicap et à mobilité réduite, qu’elles soient parlementaires, membres du personnel ou visiteuses, d’accéder pleinement aussi bien aux locaux du parlement qu’à ses travaux;
10.2.2. à mettre en place des règles et des procédures claires pour que les membres et le personnel du parlement puissent entrer dans les locaux accompagnés d’enfants et de nourrissons;
10.2.3. à autoriser officiellement les femmes à allaiter dans les locaux du parlement et à envisager la mise en place de crèches et d’espaces où changer et nourrir les bébés;
10.2.4. à encourager la coopération entre les parlements et les organisations non gouvernementales concernées en vue de réaliser des audits sur l’accessibilité des locaux et des travaux parlementaires;
10.3. en ce qui concerne les politiques inclusives au sein des parlements:
10.3.1. à élaborer des politiques internes destinées à améliorer, pour les membres et le personnel du parlement, l’équilibre entre vie professionnelle et privée, notamment en encadrant les horaires de travail afin d’éviter les séances et les réunions en fin de journée et en ajustant les dates des sessions en fonction du calendrier scolaire;
10.3.2. à adopter les mesures nécessaires pour que les membres et le personnel du parlement bénéficient de congés parentaux;
10.3.3. à envisager la mise en place de procédures de vote par substitution/ par procuration ou de vote à distance dans certains cas;
10.3.4. à examiner la mise en œuvre de la Résolution 2155 (2017) de l’Assemblée concernant l’accessibilité des informations, procédures et processus électoraux, et à prendre les mesures nécessaires pour combler les éventuelles lacunes;
10.3.5. à promouvoir les réseaux de soutien des groupes minoritaires au sein des parlements nationaux;
10.3.6. à adopter, revoir et/ou mettre à jour, selon le cas, des codes de conduite des parlementaires et membres du personnel pour s’attaquer à la violence, le harcèlement sexuel et moral, le sexisme et les comportements discriminatoires, et à instaurer des procédures de signalement et des sanctions en cas de manquement, conformément à la Résolution 2274 (2019);
10.3.7. à organiser à l’attention de l’ensemble des membres et du personnel des parlements des formations sur l’inclusion, l’intersectionnalité et l’égalité de genre, abordant les politiques et les mécanismes de signalement pertinents.
11. L’Assemblée encourage également les partis politiques des États membres du Conseil de l’Europe:
11.1. à adopter des mesures destinées à promouvoir la participation à leurs structures internes, y compris au niveau de la direction, des femmes et des personnes issues de groupes sous-représentés;
11.2. à évaluer et élaborer une stratégie à long terme visant à répondre aux besoins des personnes issues de groupes sous-représentés – tels que les personnes en situation d’handicap et celles exposées à des discriminations multiples et intersectionnelles, en vue de faciliter leur participation à la vie politique; et à organiser des sessions de renforcement des capacités, sous une forme accessible, pour permettre cette participation;
11.3. à établir des règles de sélection des candidat·es aux élections afin d’assurer la promotion active de l’égalité de genre et de la diversité;
11.4. à revoir leur composition, leurs politiques et leurs pratiques de travail internes, par exemple en s’appuyant sur les outils d’évaluation proposés par le BIDDH, en vue de déterminer des mesures visant à accroître la participation de femmes et d’hommes d’horizons divers et leur représentation;
11.5. à mettre en place en interne des codes de conduite prévoyant des sanctions, des procédures de plainte et la désignation de personnes référentes dûment formées, interdisant la violence, le harcèlement, le sexisme et toute autre forme de discrimination, et à collecter des données sur les incidents et sur les suites données aux cas signalés;
11.6. à mettre en place des actions ciblées pour que les dirigeants des partis politiques s’engagent, en tant qu’alliés, et œuvrent, avec leurs homologues féminines, à l’abolition des pratiques néfastes et des stéréotypes qui perdurent dans la culture organisationnelle des partis politiques.
12. En ce qui concerne son propre fonctionnement, l'Assemblée invite ses groupes politiques à envisager de mettre en œuvre les mesures énumérées au paragraphe 11 ci-dessus, le cas échéant.
13. L'Assemblée demande à sa Secrétaire générale:
13.1. d'envisager la réalisation d'une nouvelle étude conjointe avec l'UIP pour évaluer les progrès réalisés dans la lutte contre le sexisme, le harcèlement et la violence à l'égard des femmes dans les parlements en Europe, selon une approche intersectionnelle;
13.2. d’envisager de réaliser un audit sensible au genre (en utilisant les outils mentionnés au paragraphe 10.1.4 ci-dessus) et un audit de l'inclusivité de l'Assemblée;
13.3. de dispenser une formation au personnel pour le sensibiliser aux besoins des membres, des expert∙es et des visiteuses et visiteurs en situation d’handicap et à mobilité réduite qui participent aux réunions et aux événements de l'Assemblée;
13.4. d’examiner les mesures possibles pour rendre les travaux de l’Assemblée accessibles aux personnes ayant une déficience visuelle.
14. L'Assemblée invite la commission du Règlement, de l'éthique et des immunités et le Bureau de l’Assemblée à envisager de prendre les mesures nécessaires pour permettre la participation en ligne aux réunions des commissions des membres qui ne sont pas en mesure d'y assister en personne en raison de responsabilités en matière de soins, y compris la garde d'enfants de moins de trois ans.

B. Exposé des motifs par Mme Maryna Bardina, rapporteure

(open)

1. Introduction

1. Pour les femmes et les hommes qui travaillent dans les parlements, comme partout ailleurs, concilier vie professionnelle et vie privée est un défi. La capacité des parlements à créer les conditions nécessaires à cette conciliation est cruciale pour garantir une participation inclusive, l’égalité de genre et les autres formes d’égalité et d’inclusivité.
2. Ma propre expérience de jeune députée et les difficultés que j’ai rencontrées, comme d’autres dans la même situation, pour m’acquitter de mes fonctions politiques et législatives sont l’une des raisons d’être du présent rapport. Mon pays a adopté des mesures positives visant à assurer une participation plus égale des femmes et des hommes à la vie parlementaire; elles ont donné des résultats rapides et permis de trouver un meilleur équilibre. La guerre, bien sûr, a créé de nouvelles difficultés (énormes déplacements de personnes sur le territoire ukrainien et à l’étranger, crise humanitaire, bombardements massifs d’infrastructures civiles par la Russie, violences sexuelles liées à la guerre). Parallèlement et à tous les niveaux, les rôles respectifs des hommes et des femmes dans les prises de décision sont en train de changer. Ce point est confirmé par les enquêtes d’opinion: en Ukraine, en novembre 2023, plus de 79 % des personnes interrogées disaient souhaiter un meilleur équilibre entre hommes et femmes dans la vie politique. Ce chiffre n’était que de 66 % en décembre 2021. À travers l’Europe les problèmes subsistent cependant, et divers obstacles viennent encore décourager les femmes qui aspirent à s’engager en politique.
3. Des défis communs ont montré non seulement que les changements étaient urgents, mais aussi qu’il était possible de les mettre en œuvre. Pendant les périodes de confinement dues à la pandémie de covid-19, les restrictions destinées à protéger la santé publique ont suscité l’utilisation des technologies: essor des communications à distance et de la vidéoconférence et développement de nouveaux systèmes de vote à distance sécurisé, par exemple, afin de favoriser et de renforcer la participation. Je tiens à souligner que dans mon pays, l’Ukraine, depuis le début de l’agression russe, ces systèmes innovants assurent la continuité et la stabilité des travaux du parlement.
4. J’ai abordé la question de l’inclusivité en me focalisant sur l’égalité de genre, l’accessibilité et les politiques et attitudes inclusives. Les lieux de pouvoir et d’autorité gardent les traces de convictions patriarcales profondément ancrées, qui perpétuent les inégalités de genre et peuvent entraîner harcèlement et violences. Il existe aussi une tendance à la défiance envers les responsables politiques très jeunes; dans le même temps, l’âgisme vis-à-vis des aînés n’est pas rare dans les institutions décisionnaires, et les aîné·es en pâtissent. Le même type de préjugé s’exerce à l’encontre des femmes, parlementaires ou membres du personnel parlementaire, qui cherchent à concilier maternité et carrière dans la fonction publique. De plus en plus, des hommes politiques plaident pour pouvoir mieux remplir leur rôle de père et participer davantage à la vie familiale, suscitant parfois des critiques, car ces revendications ne sont pas conformes à la conception «traditionnelle» des hommes et de leur rôle dans la société. Ces attitudes négatives peuvent s’additionner, créant des préjugés et discriminations multiples qui justifient l’adoption d’une approche intersectionnelle de la lutte contre le sexisme et les inégalités de genre dans la vie parlementaire et politique.
5. L’Assemblée parlementaire est très bien placée pour examiner ces problèmes, trouver les moyens d’y répondre et rendre nos institutions politiques plus inclusives, et donc plus démocratiques. Parmi les travaux antérieurs pertinents de l’Assemblée figurent la Résolution 2589 (2025) «Les femmes et l’économie: emploi, entrepreneuriat et budgétisation sensible au genre»; la Résolution 2386 (2021) «Promouvoir la participation des femmes issus de groupes sous-représentés dans la prise de décision politique et publique»; la Résolution 2274 (2019) «Pour des parlements sans sexisme ni harcèlement sexuel»; la Résolution 2222 (2018) «Promouvoir la diversité et l’égalité dans la vie politique»; la Résolution 2155 (2017) «Les droits politiques des personnes handicapées: un enjeu démocratique»; la Résolution 2111 (2016) «Évaluation de l’impact des mesures destinées à améliorer la représentation politique des femmes»; et la Résolution 1921 (2013) «Egalité des sexes, conciliation vie privée-vie professionnelle et coresponsabilité».

2. Méthodes de travail

6. Beaucoup de facteurs favorables à une participation inclusive à la vie parlementaire sont d’ordre logistique et procédural. Afin d’obtenir un aperçu des situations nationales dans ce domaine, un questionnaire a été envoyé aux parlements membres et observateurs par l’intermédiaire du Centre européen de recherche et de documentation parlementaires (CERDP). Les questions étaient réparties en trois thèmes: l’adaptation des infrastructures pour assurer une accessibilité inclusive, l’adaptation des procédures parlementaires pour favoriser des pratiques de travail inclusives, et la promotion d’attitudes inclusives. 35 questionnaires remplis, de 30 États membres, ont été reçus en 2022, ce qui m’a donné des informations utiles sur la situation dans les parlements nationaux. Un rapport intitulé «Violences et discours de haine contre les responsables politiques: une menace pour la démocratie» est en cours d’élaboration et devrait couvrir les agressions visant les femmes politiques et leur famille. Cette violence, très souvent perpétrée en ligne et sous couvert d’anonymat porte atteinte à la démocratie et vise à réduire les femmes au silence dans la sphère publique voire à les amener à se retirer de la vie politique.
7. Pour finir, je souhaite remercier les expert·es qui ont pris part aux deux auditions organisées en 2024 pour recueillir des informations, respectivement, auprès de l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes (EIGE) et du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme (BIDDH) de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) concernant leurs travaux sur l’amélioration de l’égalité de genre dans les parlements nationaux et les partis politiques.

3. Vers l’égalité de genre dans les parlements nationaux

8. L’un des six objectifs stratégiques de la Stratégie du Conseil de l’Europe pour l’égalité de genre 2024‑2029 est axé sur la nécessité d’«assurer une participation équilibrée des femmes et des hommes à la vie politique, publique, sociale et économique». La participation est définie comme «équilibrée» lorsqu’il n’y a pas moins de 40 % de personnes de chacun des deux sexes au sein d’une instance de décision politique ou publique.
9. Cependant, la Stratégie actuelle du Conseil de l’Europe fixe comme objectif opérationnel que les États membres «assurent la participation égale des femmes et des filles, des hommes et des garçons, à la prise de décision politique et publique». Comme évoqué dans la Stratégie, ce sont les hommes qui établissent les priorités politiques, et «la culture politique continue de reposer essentiellement sur des modèles patriarcaux, qui créent et renforcent les inégalités structurelles entre les femmes et les hommes» 
			(2) 
			Conseil de l’Europe,
«<a href='https://www.coe.int/fr/web/genderequality/gender-equality-strategy'>Stratégie
pour l’égalité de genre 2024-2029</a>», paragraphe 66, mai 2024..
10. Dans sa Résolution 2111 (2016), l’Assemblée soutenait déjà le principe de la parité des genres, «but ultime en matière de représentation politique».
11. Lors du Sommet de Reykjavík, en mai 2023, les États membres du Conseil de l’Europe ont adopté une série de Principes pour la démocratie qui mentionnent également la nécessité d’une participation «égale» des femmes à la vie politique et publique. Le principe 10 appelle les États membres à garantir «une participation pleine, égale et significative à la vie politique et publique pour tous, en particulier pour les femmes et les filles, sans violence, peur, harcèlement, discours et crimes de haine, ainsi que sans discrimination fondée sur quelque motif que ce soit» 
			(3) 
			Conseil de l’Europe,
«<a href='https://www.coe.int/fr/web/steering-committee-on-democracy/10-principles-for-democracy'>Principes
de Reykjavík pour la démocratie</a>» (annexe III de la Déclaration de Reykjavík)..
12. Au niveau de l’Organisation des Nations Unies (ONU), la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes affirme le droit des femmes de participer à la vie politique et publique dans des conditions d’égalité avec les hommes. La Convention sur les droits politiques de la femme garantit aux femmes, dans des conditions d’égalité avec les hommes, le droit de voter, de se faire élire et d’occuper un poste public sans discrimination. Dans ce domaine, il faut signaler la Recommandation générale n° 40 (2024) sur la représentation égale et inclusive des femmes dans les systèmes de décision, adoptée en octobre 2024 par le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et qui comprend une «feuille de route pour la parité 50/50» entre les femmes et les hommes et appelle à adopter «une stratégie de parité aux niveaux local, national, régional et international et des plans d’action nationaux correspondants pour la parité dans tous les domaines et à tous les niveaux de décision, dans l’objectif concret d’atteindre la parité d’ici à 2030».
13. En octobre 2012, l’Assemblée de l’Union interparlementaire (UIP) a adopté un Plan d’action pour des parlements sensibles au genre 
			(4) 
			UIP, «<a href='https://www.ipu.org/fr/ressources/publications/reference/2016-07/plan-daction-pour-des-parlements-sensibles-au-genre'>Plan
d’action pour des parlements sensibles au genre </a>», 26 octobre 2012.. Selon la définition de l’UIP, un parlement sensible au genre est un parlement qui répond aux attentes et aux intérêts tant des femmes que des hommes dans ses structures, ses méthodes et ses travaux. Un parlement sensible au genre ne pose pas d’obstacles, qu’ils soient matériels, structurels ou culturels, à la pleine participation des femmes et à l’égalité de genre. C’est un parlement qui donne l’exemple, et qui est également plus efficace et plus légitime.
14. En 2016, l’UIP a publié un outil d’autoévaluation de la sensibilité au genre 
			(5) 
			UIP,
«<a href='https://www.ipu.org/fr/ressources/publications/outils/2016-11/parlements-evaluer-la-sensibilite-au-genre-outil-dauto-evaluation'>Parlements:
évaluer la sensibilité au genre, outil d’autoévaluation </a>», 2016. destiné à aider les parlements à identifier leurs forces et leurs faiblesses. En effet, il faut commencer par un état des lieux avant de pouvoir établir et mettre en œuvre une réforme, au moyen d’une feuille de route comprenant des objectifs concrets, des mesures et un calendrier adapté.
15. En 2018, l’EIGE a également mis en ligne un outil d’autoévaluation de la sensibilité au genre à destination des parlements 
			(6) 
			EIGE, «<a href='https://eige.europa.eu/gender-mainstreaming/toolkits/gender-sensitive-parliaments?language_content_entity=en'>Self-assessment
tool on gender-sensitive parliaments</a>», 2018. afin de les aider à identifier leur degré de sensibilité au genre, les moyens d'améliorer la situation et à suivre leur progression vers l’objectif de l’égalité de genre. L’outil s’articule en cinq volets correspondant à différents aspects de la sensibilité au genre dans les parlements: égalité des chances au moment de se faire élire, degré d’influence sur les procédures de travail du parlement, sensibilité au genre dans la législation, etc. L’outil d’autoévaluation en ligne de l’EIGE peut être utilisé par des parlements nationaux, des parlements régionaux avec ou sans pouvoir législatif, et par le Parlement européen 
			(7) 
			Une version générale
de l’outil d’auto-évaluation peut être utilisée par les organisations
de la société civile qui œuvrent à la sensibilisation et à la promotion
de l'égalité entre les femmes et les hommes dans les parlements
et les partis politiques, ainsi que les universitaires travaillant
sur les questions de genre dans la vie politique et la transformation institutionnelle..
16. Avant chaque élection au Parlement européen, l’EIGE recueille régulièrement des données sur la sensibilité au genre des parlements des États membres de l’Union européenne. En juin 2024, l’EIGE a publié un rapport comparatif, fondé sur des données de 2023, sur l’égalité de genre dans les parlements nationaux des États membres de l’Union européenne et au Parlement européen 
			(8) 
			EIGE, «<a href='https://eige.europa.eu/publications-resources/publications/gender-equality-european-parliament-and-national-parliaments-european-union-2023-state-play'>Gender
equality in the European Parliament and in national parliaments
in the European Union – 2023 state of play</a>», 3 juin 2024.. Ce rapport met en évidence la lenteur des progrès vers une représentation équilibrée des genres dans les parlements nationaux, dont un tiers des membres seulement sont des femmes. En outre, seuls 4 % des parlementaires ont moins de 30 ans, et 37 % de ces 4 % sont des femmes. En s’appuyant sur ces données, l’EIGE a conçu un nouvel outil visant à aider les parlements à élaborer, mettre en œuvre, suivre et évaluer des plans d’action pour l’égalité de genre, destinés à mieux intégrer l’égalité entre les hommes et les femmes dans les structures institutionnelles 
			(9) 
			EIGE, «<a href='https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&ved=2ahUKEwiz6JHNi6CKAxXs1QIHHdNoH8oQFnoECBIQAQ&url=https%3A%2F%2Feige.europa.eu%2Fgender-mainstreaming%2Ftoolkits%2Fgender-sensitive-parliaments%3Flanguage_content_entity%3Den&usg=AOvVaw2z9BwhVhY9U1vhfJXbLT7m&opi=89978449'>Gender
Equality Action Plans for Parliaments: Step-by-step tool</a>», 2024..
17. Dans le cadre de sa Base de données statistiques sur le genre, l’EIGE observe régulièrement la représentation des femmes et des hommes dans la prise de décision dans les 27 pays membres de l’Union européenne, au Royaume-Uni, dans six pays candidats à l’adhésion à l’Union européenne (à savoir la Bosnie-Herzégovine, le Monténégro, la Macédoine du Nord, l’Albanie, la Serbie et la Türkiye), dans un pays candidat potentiel (le Kosovo* 
			(10) 
			*Toute référence au
Kosovo dans ce texte, que ce soit le territoire, les institutions
ou la population, doit se comprendre en pleine conformité avec la
Résolution 1244 du Conseil de Sécurité des Nations-Unies et sans
préjuger du statut du Kosovo.) ainsi que dans les trois autres pays membres de l’Espace économique européen (l’Islande, le Liechtenstein et la Norvège). Les données relatives aux décisions politiques concernant les parlements, les gouvernements et les partis politiques, aux niveaux européen et national, sont mises à jour trimestriellement.
18. Le BIDDH a lui aussi engagé des travaux et mis au point des outils sur l’inclusivité des parlements et des partis politiques. Il a notamment publié un guide intitulé «Concrétiser l’égalité de genre dans la vie parlementaire: guide pour les parlements de la région de l’OSCE» 
			(11) 
			BIDDH,
«<a href='https://www.osce.org/odihr/506885'>Realizing
Gender Equality in Parliament: A Guide for Parliaments in the OSCE
Region</a>», 6 décembre 2021., qui couvre la sensibilité au genre dans la représentation, l’élaboration des lois et la supervision et présente des études de cas et des bonnes pratiques. Le guide met en avant plusieurs manières de rendre les parlements plus sensibles au genre, dont les autoévaluations, les audits et les réformes parlementaires. En outre, le BIDDH soutient la création et le développement de commissions et de groupes parlementaires. Il s’attache aussi à renforcer les capacités des femmes actives en politique appartenant à des populations sous-représentées, comme les jeunes ou les Roms.
19. Bien que des progrès non négligeables aient été accomplis en matière de participation des femmes à la vie parlementaire et politique en Europe, ils restent inégaux et lents. Certains défis empêchent la poursuite et l'accélération des progrès, notamment le recul de la démocratie et un phénomène de backlash (retour de bâton) contre les droits des femmes. La tendance actuelle à la droitisation et au populisme en Europe et la montée des mouvements anti-genre, prônant le modèle familial traditionnel, risquent de fragiliser les progrès, voire d’entraîner des retours en arrière.
20. Il existe d’autres sources de préoccupation. Ainsi, tous les parlements nationaux ne sont pas dotés d’un organisme de promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes, et les outils disponibles pour appliquer une approche intégrée de l’égalité de genre (budgétisation sensible au genre, évaluation de l’impact selon le genre) restent peu utilisés. Quant à la ségrégation genrée, elle reste une réalité dans les parlements: rares à la tête des commissions parlementaires, les femmes demeurent surtout présentes dans les commissions chargées des affaires sociales et culturelles.
21. Par ailleurs, certains États membres du Conseil de l’Europe soumettent les femmes salariées enceintes ou ayant des enfants en bas âge à des restrictions légales qui restreignent le droit des femmes parlementaires avec enfants à participer à des déplacements professionnels et à effectuer des heures supplémentaires rémunérées si tel est leur souhait. Prétendument destinées à protéger les droits des femmes, ces dispositions paternalistes restreignent en réalité leurs droits en tant que travailleuses.
22. L’un des principaux obstacles à une inclusion plus rapide des femmes dans les parlements nationaux est le niveau croissant de violence contre les élues 
			(12) 
			BIDDH,
«<a href='https://www.osce.org/odihr/530273'>Addressing
Violence Against Women in Politics in the OSCE Region Toolkit, Tool
1: Introduction to Violence Against Women in Politics</a>», 27 novembre 2022., qui se produit surtout en ligne et cible aussi leurs familles. L’Indice d’égalité de genre 2024, publié par l’EIGE, confirme que la violence à laquelle se heurtent les femmes exerçant un mandat politique ou d’autres fonctions publiques nuit à la participation active des femmes à la vie politique.
23. En octobre 2018, l’UIP et l’Assemblée ont réalisé une étude conjointe intitulée «Sexisme, harcèlement et violence à l’égard des femmes dans les parlements d’Europe», qui révèle un taux de signalement très faible des actes de harcèlement et de violence et pointe le manque de mécanismes de plainte à la disposition des femmes dans les parlements nationaux. En conclusion, l’UIP et l’Assemblée invitent ensemble les parlements nationaux à mener leur(s) propre(s) étude(s) sur ce sujet et à accroître leurs efforts afin de prévenir et combattre les violences fondées sur le genre, en politique et dans l’ensemble de la société.
24. L’Assemblée devrait effectuer une nouvelle étude conjointe avec l’UIP, suivant également une approche intersectionnelle, afin d’évaluer les progrès réalisés dans la lutte contre le sexisme, le harcèlement et la violence à l’égard des femmes dans les parlements d’Europe.
25. En 2021 déjà, l’Assemblée signalait le manque de participation et de représentation dans la prise de décision publique et politique des femmes appartenant à certains groupes: en situation de handicap; jeunes; lesbiennes, bisexuelles, transgenres ou intersexes (LBTI); roms; de couleur; issues de l’immigration; autochtones ou membres de minorités; habitantes de zones rurales, et issues de milieux socio-économiques défavorisés 
			(13) 
			Résolution 2386 (2021), paragraphe 2..
26. En avril 2024 s’est tenu à Palma de Majorque (Espagne) le Sommet des Présidentes d’Assemblée, qui a réuni des présidentes et vice-présidentes de parlements des États membres de l’Union européenne, ainsi que du Parlement européen, pour une série de discussions sur le leadership des femmes dans la vie publique. La déclaration commune adoptée à l’issue de ce sommet plaide pour «la promotion de la parité dans les chambres parlementaires», en visant à la fois le nombre de parlementaires femmes, la composition des organes directeurs et opérationnels des chambres et la composition des délégations auprès des assemblées internationales.
27. J’en suis fermement convaincue: pour que l’égalité de genre devienne pleine et entière dans la vie parlementaire, il faudra que les responsables politiques masculins s’engagent activement, en plus grand nombre et de manière plus visible en faveur de l’égalité de genre en politique. Il s’agit d’un objectif collectif, qui sert l’intérêt de la société dans son ensemble; par conséquent, toutes les personnes engagées en politique devraient œuvrer aux changements nécessaires pour rendre les parlements et les partis politiques plus inclusifs.

Rôle des partis politiques

28. Les partis politiques sont souvent présentés comme les «gardiens» de la démocratie. Sans partis politiques inclusifs, il ne pourra donc y avoir de parlements inclusifs sur le plan de la représentation des femmes, dans toute leur diversité, ainsi que eu égard aux minorités et aux autres composantes de la société. Les choix des partis, étant donné qu’ils décident des listes électorales, déterminent dans une large mesure le résultat final des élections en matière de représentation équilibrée des hommes et des femmes. Il est nécessaire que les partis politiques eux-mêmes agissent pour se transformer et devenir réellement démocratiques et inclusifs, afin de refléter fidèlement la société qu’ils aspirent à représenter au sein des gouvernements et des parlements élus.
29. À mes yeux, il est crucial non seulement d’encourager les partis politiques à créer des sections féminines, mais aussi de promouvoir la représentation égale des hommes et des femmes dans toutes les structures organisationnelles et de modifier, si nécessaire, les documents statutaires des partis. Les partis politiques devraient offrir aux femmes et aux hommes le même accès aux ressources financières, médiatiques, techniques et autres. Des mesures positives pourraient être prises, de surcroît, pour soutenir les membres du parti appartenant à des groupes sous-représentés.
30. Le rapport de l’EIGE sur les parlements nationaux, publié en 2024 
			(14) 
			Voir la
note n°9 ci-dessus., montre que les femmes ont moins de chances que les hommes d’être choisies pour concourir à un scrutin législatif: lors des élections les plus récentes dans 20 États membres de l’Union européenne, elles ne représentaient en moyenne que 34 % des candidatures. La représentation des femmes et des hommes à la tête des partis politiques reste inégale. Selon la note statistique sur l’équilibre hommes-femmes en politique établie par l’EIGE en novembre 2024, la proportion de femmes dirigeantes de grands partis politiques dans l’Union européenne est passée de 16 % en 2011 à 25,8 % en 2024, mais les hommes occupent toujours trois postes de direction sur quatre.
31. En 2014, le BIDDH a publié un manuel destiné à promouvoir la participation des femmes dans les partis politiques 
			(15) 
			BIDDH, «<a href='https://www.osce.org/odihr/120877'>Handbook
on Promoting Women’s Participation in Political Parties</a>», 7 juillet 2014., qui soulignait l’importance de réformes internes dans les partis politiques. Ce manuel dressait un panorama des mesures que les partis pouvaient choisir d’adopter pour améliorer l’égalité de genre dans leurs structures, processus, politiques et activités, afin qu’hommes et femmes jouissent de l’égalité des chances en matière de participation à la vie politique nationale. Concernant les barrières à la progression des femmes comme dirigeantes de partis et candidates aux élections, le manuel aborde: le manque de démocratie et de transparence internes dans les partis, le manque de sensibilité au genre dans la recherche et la sélection de candidat·es et faible décentralisation des processus décisionnels des partis.
32. Le manuel du BIDDH préconise plusieurs actions: mesures pour renforcer la transparence, la justice et l’équité dans les règles, procédures, politiques et pratiques internes des partis; mesures volontaires pour soutenir la participation politique des femmes; institutionnalisation de l’égalité de genre dans les procédures et les politiques du parti; et mise en place au sein du parti des mécanismes favorisant l’égalité de genre, comme des sections féminines. En outre, le manuel soulignait que les stratégies les plus efficaces pour accroître la participation des femmes au sein des partis politiques impliquent la coopération: entre hommes et femmes membres d’un même parti, entre tous les partis politiques sur des sujets d’intérêt commun, et entre les partis et d’autres parties prenantes, comme les organisations de la société civile.
33. Fin 2024, le BIDDH a publié une méthodologie d’audit de genre à l’attention des partis politiques 
			(16) 
			OSCE, «<a href='https://www.osce.org/odihr/574334'>Transforming
political parties from within — Gender audits and action plans —
Tool 2</a>», 8 août 2024., qui comprend un questionnaire en ligne destiné à les aider à mener leurs propres audits et à élaborer des plans d’action en tenant compte des domaines appelant des actions de leur part. Cet outil, qui propose des bonnes pratiques issues de la région de l’OSCE, peut servir de feuille de route pour améliorer l’égalité de genre dans les partis politiques.

4. Accessibilité des infrastructures pour une participation inclusive dans les parlements nationaux

34. Au cours de mes réflexions sur les changements nécessaires à une égale participation des hommes et des femmes à la vie parlementaire, il m’est clairement apparu que d’autres facteurs de discrimination empêchent certaines personnes de s’engager en politique. Locaux et équipements peu accessibles posent souvent problème aux personnes en situation de handicap et aux personnes à mobilité réduite, ainsi qu’aux jeunes parents. Le fait que de nombreux parlements nationaux siègent dans des bâtiments historiques, souvent classés, amplifie les difficultés; cela peut compliquer les travaux de restructuration et de mise en accessibilité.
35. En 2017, l’Assemblée a adopté une résolution inédite sur les droits politiques des personnes handicapées 
			(17) 
			<a href='https://assembly.coe.int/nw/xml/XRef/Xref-XML2HTML-FR.asp?fileid=23519&lang=FR'>Résolution 2155
(2017)</a>.. Toutes les recommandations formulées devraient être pleinement appliquées et faire l’objet d’un suivi, car des mesures concrètes restent nécessaires pour renforcer la participation des personnes en situation de handicap à la prise de décision politique et publique. Comme le montrent les réponses au questionnaire, le principe de l’accessibilité des locaux et des procédures parlementaires ne se traduit pas encore dans les faits dans de nombreux États membres, et il est urgent que cette situation change.
36. Les partis politiques peuvent jouer un rôle très important et devraient s’engager pour une vie politique plus diverse et représentative de la population du pays, y compris les personnes en situation de handicap. Pour favoriser l’inclusion, les partis politiques pourraient mettre en place des comités représentant les personnes en situation de handicap. Ils devraient aussi promouvoir leur participation, les encourager à se présenter aux élections et leur proposer de figurer sur les listes de candidats. Les personnes en situation de handicap constituent une part importante de l’électorat, et les partis politiques devraient s’attacher à créer une culture de participation politique égalitaire.
37. À mon sens, nous devrions aussi préconiser une approche globale de l’accessibilité, couvrant l’accès physique aux bâtiments publics et l’accès à l’information sur les processus électoraux, les procédures de vote et les programmes politiques en versions faciles à lire et à comprendre, avec une interprétation en langue des signes sur demande et des sous-titres pour les vidéos. Les procédures doivent être adaptées aux personnes atteintes de déficience intellectuelle ou d’un handicap psychosocial, et les conditions d’inscription sur les listes électorales ne devraient empêcher personne de participer. Des crédits suffisants devraient être débloqués pour garantir l’accessibilité en général, même en période d’austérité.
38. Sur une note positive, les réponses au questionnaire montrent que les États membres prennent en compte l’accessibilité des bâtiments parlementaires aux personnes à mobilité réduite. Beaucoup ont rénové leurs locaux ou veillent à l’accessibilité de leurs nouvelles constructions. Certains pays, dont le parlement siège dans des bâtiments remarquables sur le plan historique et culturel, ont engagé d’importants efforts pour adapter ces bâtiments. L’Autriche en est un bon exemple, y compris pour les bâtiments qui accueillent des sessions parlementaires de manière temporaire. La plupart des États membres ont désormais des locaux parlementaires accessibles aux personnes à mobilité réduite, même si cela ne s’applique pas toujours à toutes les entrées.
39. Concernant l’accessibilité des locaux parlementaires aux enfants et aux jeunes, dans la plupart des pays, elle ne fait l’objet d’aucune procédure ou exigence spécifique pour les enfants de moins de 18 ans. Ces derniers doivent généralement être accompagnées d’un adulte, qu’ils soient seuls ou fassent partie d’un groupe scolaire. En revanche, lorsque la procédure est complexe ou prend beaucoup de temps, elle peut devenir un obstacle à l’accès aux locaux du parlement ou des commissions pour les parlementaires ou membres du personnel accompagnés d’enfants.
40. L’aménagement, dans les locaux parlementaires, de structures de garde d’enfants et d’espaces destinés à l’accueil des familles peut aider les parlementaires et le personnel à rééquilibrer vie professionnelle et vie privée en conciliant leur travail législatif avec leurs responsabilités familiales. De telles initiatives font des parlements des lieux de travail plus inclusifs. Point important, il convient aussi de supprimer de la législation nationale toutes les restrictions pouvant empêcher les mères de prendre part à des déplacements professionnels ou d’effectuer des heures supplémentaires rémunérées.
41. Seuls quelques pays (tels que l’Espagne, le Portugal, le Royaume-Uni et la Türkiye) ont des parlements équipés de crèches, et elles sont payantes. Certains parlements disposent de salles de jeu non surveillées. La plupart des parlements nationaux ont des espaces permettant de changer ou de nourrir les tout-petits (au minimum, des toilettes équipées de tables à langer). Cependant, ce type d’espace est totalement absent des parlements dans un grand nombre d’États.
42. La plupart des structures ayant répondu au questionnaire confirment fournir sur leur site internet, ou sur demande, des informations concernant l’accessibilité des bâtiments parlementaires aux membres du parlement, au personnel et aux visiteuses et visiteurs, y compris sur les équipements ou espaces pour les personnes accompagnées d’enfants. Il convient de noter, cependant, que beaucoup de pays ont répondu par la négative à cette question.

Rôle des partis politiques

43. L’Autriche a adapté le bâtiment de son parlement, ainsi que ses espaces temporaires, pour les rendre accessibles aux personnes en situation de handicap. Parlementaires, personnel, visiteuses et visiteurs reçoivent des informations sur l’accès au bâtiment. Bien qu’aucune procédure spéciale ne soit en place pour l’accès au bâtiment parlementaire des moins de 18 ans, le personnel de sécurité est invité à traiter ce public avec une attention particulière.
44. Comme l’Autriche, le Danemark n’a pas de procédure spéciale concernant l’accès des moins de 18 ans à son parlement, mais les agent·es de sécurité adaptent leur comportement et les informations données aux enfants et aux jeunes.
45. La République slovaque dispose d’une procédure spéciale pour l’accès au parlement des jeunes enfants, qui sont dispensés de passage au détecteur à métaux.
46. La Suisse a une procédure spéciale pour les enfants de moins de 16 ans, qui peuvent entrer dans les locaux du parlement sans présenter de pièce d’identité.
47. La Belgique fait partie des pays qui assurent l’accessibilité des bâtiments parlementaires aux personnes à mobilité réduite, mais pas à toutes les entrées.
48. Le Parlement de Chypre est accessible aux personnes à mobilité réduite. La configuration des locaux va encore changer, puisqu’un nouveau bâtiment parlementaire est en construction.
49. En Estonie, les personnes à mobilité réduite sont reçues par un·e employé·e qui les accompagne dans le bâtiment. Il en va de même en Slovénie.
50. En Estonie, le parlement comporte aussi une salle de jeu non surveillée, destinée aux enfants de 5 à 10 ans. On y trouve des jouets, des livres, un téléviseur et un lecteur de DVD, ainsi qu’une kitchenette. Les enfants utilisant cet espace sont sous la responsabilité de leur parent.
51. En France, il n’y a pas de crèche au sein du bâtiment parlementaire (une proposition a été formulée en ce sens, mais abandonnée pour diverses raisons, dont le coût élevé). Le Parlement français verse une somme aux parlementaires et le personnel concerné pour leur permettre de confier leurs enfants à l’une des trois crèches privées du quartier.
52. En Serbie, les parlementaires à mobilité réduite ne peuvent entrer dans le bâtiment du Parlement que par une porte à l’arrière du bâtiment. Dans l’hémicycle, seule la dernière rangée de sièges est adaptée à leurs besoins. Il n’y a pas de crèche dans l’enceinte du parlement, entre autres parce qu’il s’agit d’un bâtiment historique, ce qui complique les travaux d’adaptation nécessaires.
53. Le Parlement allemand propose un service de prêt de fauteuils roulants. Le personnel en charge des relations publiques doit, entre autres critères de recrutement, être en mesure de répondre aux besoins des visiteuses et visiteurs gravement handicapés y compris de savoir se servir des dispositifs d’assistance disponibles. Le Bundestag allemand abrite également une crèche: une structure de garde de jour, qui accueille les enfants de six mois à six ans, est ouverte à la fois aux parlementaires et au personnel administratif et politique du Bundestag. Le bâtiment abrite aussi plusieurs espaces de jeu et de puériculture, à la disposition des parlementaires et du personnel.
54. En Grèce, il y a à la fois une crèche et une école maternelle dans les locaux du bâtiment principal du parlement. Elles sont accessibles, sous réserve de places libres, aux enfants des parlementaires et du personnel. Une commission composée de trois membres, mise en place par la personne exerçant la présidence du parlement, s’occupe de l’inscription des enfants et assure le bon fonctionnement de la crèche et de l’école maternelle.
55. Une crèche payante est disponible au sein des parlements d’Espagne, du Portugal, du Royaume-Uni et de Türkiye.
56. Le Parlement suédois dispose d’une crèche gratuite.
57. En Ukraine, une salle de jeux gratuite destinée aux enfants est aménagée dans les locaux des commissions parlementaires; elle n’est pas utilisée actuellement, du fait de la situation en matière de sécurité. Il n’existe pas de procédure spécifique pour octroyer aux personnes de moins de 18 ans l’accès aux bâtiments administratifs ou officiels de la Verkhovna Rada d’Ukraine. Des travaux sont en cours pour faire évoluer l’accueil des enfants de moins de 14 ans et des personnes qui les accompagnent.

5. Adaptation des procédures parlementaires pour favoriser les politiques et pratiques inclusives

58. Le Plan d’action de l’UIP pour des parlements sensibles au genre de 2012 
			(18) 
			voir la note n°5 ci-dessus.préconisait déjà plusieurs mesures destinées à faciliter, parmi les membres et le personnel des parlements, l’équilibre entre vie professionnelle et vie familiale. Il s’agissait notamment de permettre aux femmes allaitantes de voter par procuration ou de transférer leur vote pour ne pas être obligées d’assister aux réunions, de fixer des séances de façon que les parlementaires puissent regagner leur circonscription et passer davantage de temps avec leur famille, d’éviter les votes en fin de journée et d’ajuster les sessions en fonction du calendrier scolaire. L’UIP soulignait aussi l’importance d’accorder un congé parental aux parlementaires, hommes et femmes, et de leur permettre d’en bénéficier réellement. Cependant, dans beaucoup de nos États membres, ces recommandations ne se sont pas encore traduites dans la réalité.
59. Le rapport 2024 de l’EIGE sur l’égalité de genre dans les parlements nationaux 
			(19) 
			voir
la note n°9 ci-dessus., a confirmé cette situation. Il a identifié des dispositions relatives aux congés familiaux dans la moitié des parlements nationaux de l'Union européenne, indiquant que lorsqu'elles existent, ces dispositions dépendent souvent du fait que les parlementaires ont le statut d'employé public ou de fonctionnaire. Seuls de rares parlements ont mis en place le vote par procuration ou à distance, ou l’encadrement des horaires et calendriers des séances pour faciliter la conciliation des responsabilités familiales et professionnelles.
60. La présence au parlement de femmes ou d’hommes accompagnés de nourrissons, la possibilité de venir au travail avec un nourrisson et l’existence d’espaces dévolus à l’allaitement, au change ou à la garde d’enfants sont autant de signes d’inclusivité, puisque ces mesures permettent aux parlementaires qui sont aussi parents de concilier vie professionnelle et vie privée. Continuer à travailler tout en élevant un enfant en bas âge reste un défi pour la plus grande part de la population active, et les parlementaires ne font pas exception. J’ai souhaité connaître l’avis de mes pair·es sur les points à améliorer dans le fonctionnement du parlement de leur pays, et cherché à déterminer si les parlements étaient ouverts à la défense des droits des personnes avec enfants, des personnes en situation de handicap et d’autres groupes minoritaires ou s’il existait des préjugés à leur encontre.
61. La plupart des réponses reçues affirment que l’accès aux chambres parlementaires en compagnie d’un jeune enfant est interdit, bien que de nombreux parlements ne prévoient aucune disposition spécifique sur ce sujet. Signe encourageant toutefois, certains États membres examinent cette question (le Parlement d’Ukraine débat actuellement de l’opportunité d’autoriser la présence de nourrissons dans la salle où se tiennent les votes).
62. Beaucoup de parlements peuvent fournir une assistance adaptée aux parlementaires ou membres du personnel ayant des déficiences visuelles et/ou auditives (langue des signes, sites internet accessibles, braille, etc.), mais beaucoup d’autres n’ont rien prévu de particulier pour les personnes malvoyantes. Certains parlements signalent que cette assistance n’est fournie que pendant les séances parlementaires plénières ou spéciales.
63. Outre ces aspects, le questionnaire envoyé par le CERDP comportait des questions sur la possibilité de voter à distance, par procuration ou par transfert de vote (pour compenser les absences) et sur les autres solutions à la portée des membres devant impérativement s’absenter (congé parental, allaitement, etc.). La plupart des parlements n’autorisent pas le vote à distance, surtout en raison des problèmes de transparence. Dans plusieurs pays cependant, des votes à distance ou des réunions en mode hybride ont pu être autorisés à titre exceptionnel du fait des restrictions liées à la covid-19.
64. Les parlements n’imposent généralement pas de sanction en cas de non-participation aux débats et aux votes. Dans la plupart des pays, les parlementaires ont le droit de s’absenter pour motifs impérieux (maladie, déplacement professionnel, congé parental, décès ou maladie d’un membre de la famille, etc.). Les parlementaires doivent alors informer le ou la président·e du parlement des raisons de leur absence. Cependant, des sanctions (y compris financières) peuvent s’appliquer à celles et ceux qui négligent leurs fonctions sans se justifier.

Rôle des partis politiques

65. Au sein du Parlement autrichien, bien que des mesures aient été prises à l’attention des personnes ayant des déficiences auditives ou visuelles, rien n’est prévu en matière de congé parental ou de difficultés d’ordre familial. Les membres du Conseil national et du Conseil fédéral ne peuvent pas prendre de congé parental, et aucune politique n’est en place concernant l’allaitement pendant les séances plénières. Il n’existe pas non plus de possibilité de vote à distance.
66. En Serbie, la loi prévoit la possibilité de faire plusieurs poses quotidiennes en cas d’allaitement, ce qui s’applique aussi à l’Assemblée nationale. Cependant, les horaires de travail ne tiennent pas compte des besoins des jeunes parents.
67. L’Estonie recourt à l’intelligence artificielle pour fournir un sous-titrage en direct aux personnes malentendantes.
68. En Allemagne, le Bundestag a créé un poste de responsable des questions d’inclusion, dont le ou la titulaire vient en aide aux parlementaires gravement handicapés.
69. La Grèce explique que le vote à distance (par fax ou courrier signé) est autorisé dans certains cas: lorsque les votes sont nominatifs et lorsqu’une décision doit se prendre à la majorité qualifiée. Ces dispositions s’appliquent également aux parlementaires enceintes au cours du dernier mois de grossesse et du mois suivant la naissance.
70. En Islande, un soutien est assuré au cas par cas aux parlementaires en situation de handicap (par le passé, il est arrivé par exemple qu’une personne malvoyante membre du parlement bénéficie d’un chien guide, ou que le parlement assure une interprétation en langue des signes pour une personne sourde députée suppléante).
71. En Macédoine du Nord, l’Institut parlementaire organise une table ronde annuelle avec plusieurs associations de personnes en situation de handicap, afin d’aborder leurs préoccupations. Des cours de langue des signes sont également dispensés aux membres du parlement et du personnel directement engagés dans les relations de l’Assemblée avec le public.
72. L’Espagne a mis en place un accord-cadre avec plusieurs organisations de la société civile afin que les personnes ayant des déficiences visuelles ou auditives puissent pleinement accéder aux informations sur les activités parlementaires, dont l’ensemble des documents produits par la chambre basse.
73. En Slovénie, le vote à distance est à l’étude pour les parlementaires en congé parental. Les membres absents aux sessions, pour quelque raison que ce soit, n’ont pas droit aux défraiements ou aux autres types de rémunération. La Slovénie explique également ne pas prévoir de sanctions en cas de non-participation aux séances du Conseil national, de ses commissions et de ses groupes de travail.
74. En Espagne, le Bureau du parlement peut autoriser par écrit un·e parlementaire à voter à distance, en cas de grossesse, maternité, paternité ou maladie grave l’empêchant de s’acquitter de ses fonctions parlementaires, et compte tenu de sa situation individuelle. Cette mesure n’est possible que pour les votes qui ne peuvent être ni divisés, ni modifiés et dont les modalités peuvent être anticipées et planifiées.
75. Concernant le vote à distance ou par procuration en dehors de situations d’urgence (après la covid-19), les parlementaires peuvent voter par procuration en France, en Géorgie (uniquement en séance plénière), en Grèce (par courrier ou fax, comme déjà évoqué), en Espagne (vote à distance en cas de congé parental ou de maladie, comme déjà évoqué) et en Hongrie (uniquement pour les réunions des commissions, pas en séance plénière). Au Royaume-Uni, la Chambre des lords et la Chambre des communes autorisent les parlementaires en situation de handicap à voter à distance. La Chambre des communes autorise également le vote par procuration en cas de congé parental, ainsi que les accords de transfert informels. La Belgique autorise le vote et la participation à distance. En Roumanie, la Chambre des députés et le Sénat ont conservé la possibilité de vote à distance qui avait été instaurée pendant la pandémie de covid-19.
76. En Lituanie, les réunions des groupes et commissions parlementaires peuvent se tenir en ligne ou au format hybride, mais il n’est pas possible de voter à distance ou par procuration en séance plénière.
77. À l’issue des dernières élections législatives au Royaume-Uni, la Chambre des communes a décidé en juillet 2024 de créer une «commission de modernisation», chargée d’étudier des réformes des procédures, normes et pratiques de travail de la Chambre des communes et de formuler des recommandations à leur sujet. Les discussions portent sur les horaires de travail (c’est-à-dire qu’ils soient compatibles avec une vie familiale), la culture parlementaire, les questions d’accessibilité et les modalités de vote.
78. En Ukraine, les bâtiments administratifs du parlement sont adaptés aux personnes à mobilité réduite, moyennant plusieurs aménagements: bouton d’appel à l’entrée; rampes d’accès au premier étage et ascenseur desservant tous les autres étages, dont l’hémicycle et les salles de conférences; une porte à tourniquet, une plateforme motorisée et des monte-personnes hydrauliques peuvent être utilisés pour accéder au premier étage et, de là, au reste du bâtiment au moyen des ascenseurs. Les parlementaires à mobilité réduite votent depuis la loge latérale de l’hémicycle. Le site internet du parlement a été conçu en tenant compte des besoins des personnes malvoyantes, conformément aux normes en vigueur.

6. Promotion des attitudes inclusives dans la vie parlementaire

79. L’un des objectifs de développement durable (ODD) de l’ONU comprend la cible 10.2 par laquelle les États s’engagent à «d’ici à 2030, autonomiser toutes les personnes et favoriser leur intégration sociale, économique et politique, indépendamment de leur âge, de leur sexe, de leur handicap, de leur race, de leur appartenance ethnique, de leurs origines, de leur religion ou de leur statut économique ou autre».
80. La plupart des réponses au questionnaire affirment que les parlementaires ont conscience que les pratiques et les infrastructures inclusives sont une nécessité démocratique, et que des mesures ont été prises à cet égard. Cependant, certains parlements pointent, et déplorent, le manque de données sur ce sujet.
81. La plupart des parlements nationaux ont un code de conduite des parlementaires, comportant des dispositions générales sur la manière dont ils et elles devraient d’acquitter de leurs fonctions, mais ces textes ne mentionnent que rarement le sexisme ou le harcèlement sexuel (ces thèmes sont couverts par exemple à Chypre, en Grèce, en Macédoine du Nord ou en Suisse). Les parlements nationaux disposent le plus souvent de dispositions générales sur les pratiques discriminatoires et ont mis en place une série de principes éthiques relatifs au respect d’autrui. En outre, certains parlements nationaux disposent d’un organe ou d’un·e agent·e spécifiquement en charge de mettre en œuvre et de suivre l’absence de discrimination dans les pratiques parlementaires.
82. Sur la question des principaux obstacles à la création de locaux et de procédures plus inclusifs (quant au budget, aux politiques ou aux us et coutumes, par exemple), les réponses au questionnaire varient beaucoup selon les pays. Plusieurs signalent ne pas disposer de données sur cette question ou ne l’avoir jamais abordée. Certains États membres pointent des obstacles d’ordre financier, technique ou esthétique, quand d’autres assurent qu’il n’existe aucun obstacle. Certains pays reconnaissent qu’«il reste beaucoup à faire plus globalement, au niveau sociétal» (Chypre) et que «les politiques, us et coutumes» peuvent constituer des obstacles (Lituanie). Dans leurs observations, quelques pays soulignent qu’il est très important pour eux de rendre les parlements plus inclusifs et que des progrès sont en cours en ce sens.

Rôle des partis politiques

83. En Belgique, une enquête interne sur les questions liées au genre a été menée au sein du parlement fédéral. Deux groupes de travail sur les caractéristiques d’un parlement sensible au genre ont été créés, à la Chambre des représentants et au Sénat, pour passer en revue tous les aspects de la vie parlementaire et du fonctionnement interne des deux chambres: services législatifs, documentation, communication interne et externe, gestion des infrastructures et des ressources humaines, patrimoine, etc. En 2021, les présidentes du Sénat et de la Chambre des représentants ont commandé ensemble un rapport d’audit sur l’intégration de l’égalité de genre dans le fonctionnement du Parlement fédéral qui a été examiné le 22 décembre 2023.
84. En France, une cellule de lutte contre le harcèlement, assurée par un prestataire externe, a été créée à l’intention des parlementaires. Elle est accessible 24h/24 et 7j/7, par téléphone et sur un site internet spécifique. Composée notamment de juristes et de psychologues, cette cellule a pour rôle d’écouter et de conseiller les personnes qui la contactent et de leur offrir un accompagnement personnalisé si elles choisissent de signaler les faits. Sa mission s’étend aux allégations de comportements sexistes, d’agressions sexuelles et de harcèlement sexuel ou moral. Les victimes peuvent signaler les faits au/à la Déontologue de l’Assemblée nationale, qui peut également intervenir et contacter l’agresseur ou agresseuse présumé·e.
85. Au Royaume-Uni, un code de conduite parlementaire est mis en avant à travers des affiches, brochures, documents explicatifs électroniques. En 2018, un programme de formation intitulé Valuing Everyone a été déployé dans l’ensemble du parlement pour veiller à ce que chaque personne comprenne, connaisse et prévienne les cas de brimades, de harcèlement et d’inconduite sexuelle. Cette formation a été mise à jour, et en 2022, un séminaire consacré au code de conduite et à son importance (The Behaviour Code, why it matters) a été lancé à destination des nouveaux membres et personnels du parlement, ainsi qu’un programme de sensibilisation. En réaction à des allégations de comportements déplacés, le Parlement britannique a également créé un mécanisme indépendant de plaintes et réclamations (Independent Complaints and Grievance Scheme, ICGS). L’ICGS peut être saisi en cas de brimades, de harcèlement ou d’inconduite sexuelle, par ou contre tout membre de la communauté parlementaire 
			(20) 
			Cela
désigne l’ensemble des personnes qui travaillent pour ou avec le
parlement, y compris les membres et le personnel des deux Chambres,
les services informatiques du parlement, ainsi que les prestataires,
visiteuses et visiteurs. en lien avec ses activités parlementaires. Une analyse indépendante de l’ICGS a été publiée en mai 2024 
			(21) 
			ICGS, «<a href='C:\En cours\Independent Complaints Complaints andand Grievance Grievance SchemeScheme (ICGS)(ICGS)'>Independent
review of the ICGS</a>», 13 mai 2024. L’ICGS et sa permanence n’ont pratiquement pas d’équivalent dans nos États membres. En mai 2024, la commission des normes du Parlement britannique a publié un rapport d’enquête sur les procédures réglementant la conduite des parlementaires, entrelacs complexe composé d’au moins 14 organismes, 3 codes et de nombreuses règles. Le rapport a énoncé plusieurs recommandations visant à simplifier le système et à le rendre plus accessible à la fois aux parlementaires et au grand public.
86. En 2020, le Parlement islandais a réalisé une étude sur l’environnement de travail des membres et du personnel du parlement, laquelle a mis en lumière le besoin de traiter le problème du harcèlement et des brimades sexuels et fondé sur le genre dans les locaux parlementaires. Une nouvelle stratégie, assortie d’un plan d’action, a été préparée en consultation avec tous les partis politiques et adoptée en mai 2023. Elle prévoit des actions de prévention et des lignes directrices sur le traitement des cas de sexisme et de harcèlement, ainsi que des mesures de conseil et de soutien à la personne plaignante tout au long de la procédure. Les membres et le personnel du Parlement islandais reçoivent en outre des formations sur les questions de diversité, d’égalité et d’inclusion.
87. En mai 2024, en Irlande, le groupe de travail sur une participation sûre à la vie politique (composé de parlementaires, d’élu·es au niveau local et de représentant·es de la société civile, des médias et autres spécialistes) a publié un rapport comportant 16 recommandations visant à rendre plus sûre la participation à la vie politique dans le pays 
			(22) 
			Le rapport
(en anglais uniquement) de ce groupe de travail, la Task Force on
Safe Participation in Political Life, est disponible <a href='https://data.oireachtas.ie/ie/oireachtas/parliamentaryBusiness/other/2024-05-15_task-force-on-safe-participation-in-political-life_en.pdf'>ici</a>.. Ce groupe de travail avait été créé devant l’augmentation des agressions, notamment des cas de harcèlement et d’intimidation en ligne contre les personnes actives en politique. Le groupe de travail a conclu que les agressions dans la vie politique posent un réel problème; elles sont fréquentes, et ciblent de manière disproportionnée les femmes et les populations minoritaires 
			(23) 
			Ibid.,
p. 9..
88. Le Danemark signale l’existence d’un mécanisme de lancement d’alerte au sein de son parlement.
89. En Serbie, les parlementaires membres de minorités nationales peuvent s’exprimer devant le parlement dans leur langue maternelle, à condition de l’annoncer au préalable.
90. En Ukraine, le personnel du parlement bénéficie de formations sur l’intégration et la connaissance des questions de genre. De plus, la stratégie de ressources humaines de la Verkhovna Rada adoptée en 2019 prévoit un audit annuel sur le genre, la formation des effectifs, l’élaboration de recommandations méthodologiques et de manuels et la désignation de spécialistes qui veillent au respect des normes d’égalité des genres dans les différentes composantes du parlement.

7. Participation inclusive à l’Assemblée parlementaire et au Parlement européen

7.1. L’Assemblée parlementaire

7.1.1. Représentation des femmes et des hommes

91. Pour que les parlements soient inclusifs du point de vue du genre, l’équilibre de la représentation est indispensable. En 2021, l’Assemblée a adopté la Résolution 2394 (2021) «Représentation des femmes et des hommes à l’Assemblée parlementaire» selon laquelle, à compter de janvier 2023, chaque délégation nationale à l’Assemblée doit «comprendre un pourcentage de femmes au moins égal à celui que compte son parlement» ou, «si cela est plus favorable à la représentation des femmes», respecter le principe de «un sur trois» pour la représentation des femmes dans chaque délégation nationale. Le pourcentage de femmes à l’Assemblée a atteint 46 % en 2024 
			(24) 
			Assemblée
parlementaire, «L’égalité de genre dans le fonctionnement de l’Assemblée
en 2024», Note d’information établie par le Secrétariat, As/Ega/Inf
(2025) 02, 17 janvier 2025. et s’est établi à 47,7 % en avril 2025. Dans sa Résolution 2394 (2021), l’Assemblée s’est engagée formellement à exiger un minimum de 40 % de femmes dans toutes les délégations à compter de janvier 2026.
92. Ces règles ont eu un effet clairement positif sur la représentation des femmes à l’Assemblée, puisque la proportion de femmes au sein des commissions en tant que membres titulaires est passée de 41 % en 2022 à 47 % en 2023 et 50% en 2024. Le pourcentage de femmes rapporteures avait augmenté de 36 % en 2022 à 43 % en 2023, mais il est descendu à 40 % en 2024. Manifestement, les obligations positives en matière de représentation des femmes dans les parlements sont efficaces et peuvent contribuer à renforcer l’inclusivité des parlements dans ce domaine.
93. La Résolution 2394 (2021) prévoit une autre mesure importante: une délégation nationale n’est autorisée à présenter la candidature d’un homme à la vice-présidence de l’Assemblée que si elle comprend au moins 40 % de femmes. Les commissions et commissions ad hoc doivent également comprendre au moins un tiers de femmes parmi leurs rapporteurs. La Résolution 2594 (2025) «Modification de certaines dispositions du Règlement de l’Assemblée», adoptée en avril 2025, modifie l’article 16.3 afin de promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes dans les postes à responsabilité. Elle dispose désormais que «Sur trois candidatures à la vice-présidence présentées successivement par une délégation nationale, au moins une doit être celle d’une femme et une doit être celle d’un homme».
94. En outre, la Résolution 2386 (2021) «Promouvoir la participation des femmes issues de groupes sous-représentés dans la prise de décision politique et publique» souligne la nécessité de promouvoir l’accès et la participation des femmes à la vie politique dans une optique intersectionnelle; en effet, les femmes appartenant à des minorités et les femmes en situation de handicap restent fortement sous-représentées. Cette résolution souligne aussi l’importance d’appliquer une politique de tolérance zéro face aux violences, aux discriminations et aux agressions. Dès 2019, l’Assemblée adoptait la Résolution 2274 (2019) «Pour des parlements sans sexisme ni harcèlement sexuel».
95. L’Assemblée s’est aussi efforcée d’assurer l’équilibre entre les genres dans les groupes d’expert·es et les autres organes comptant au minimum deux membres 
			(25) 
			Résolution 2290 (2019) «Vers un agenda politique ambitieux du Conseil de l’Europe
pour l’égalité de genre», paragraphe 15..

7.1.2. Accessibilité des infrastructures

96. À l’Assemblée, des travaux de rénovation visant à mettre l’hémicycle en conformité avec la réglementation française sur l’accès des personnes à mobilité réduite se sont achevés en 2024. L’entrée principale du Conseil de l’Europe est accessible en fauteuil roulant et tous les niveaux sont équipés d’ascenseurs. Cependant, tous les espaces du Palais de l’Europe utilisés par les membres de l’Assemblée, dont l’hémicycle, ne sont pas pleinement accessibles aux personnes en fauteuil roulant.
97. Le Règlement de l’Assemblée régit «[l’]accès au Palais de l’Europe et [l’]utilisation des locaux» (annexe XVII), couvrant les aspects liés à la sûreté et à la sécurité de l’accès aux locaux du Conseil de l’Europe et à la circulation à l’intérieur des dits locaux, y compris le Bureau de Paris, et bien sûr l’hémicycle (salle des séances) et les salles de réunion des commissions de l’Assemblée. Les locaux du Conseil de l’Europe relevant de la responsabilité du Secrétaire Général, j’aimerais inviter ce dernier à procéder à un examen de l’accessibilité des locaux du Conseil de l’Europe pour les personnes en situation de handicap et à mobilité réduite, y compris les bureaux de Paris, et à voir s’il y a lieu d’apporter des améliorations de manière à offrir un environnement accessible et inclusif aux membres de l’Assemblée et aux personnes qui assistent aux réunions et manifestations organisées dans l’enceinte de l’Organisation. Je me félicite de la préparation en cours d'une publication destinée à informer les personnes en situation d’handicap et à mobilité réduite sur l'accès aux locaux du Conseil de l'Europe.
98. Concernant l’accès des parlementaires accompagnés de nourrissons aux locaux de l’Assemblée, aucune règle spécifique n’est prévue, mais il est possible d’en faire la demande. Il n’existe pas non plus de procédure arrêtée concernant l’accès des personnes de moins de 18 ans à l’Assemblée, hormis le fait qu’elles doivent être accompagnées d’un adulte. Je souhaiterais là aussi inviter le Secrétaire Général à entreprendre un examen de l’accessibilité des locaux du Conseil de l’Europe pour les personnes accompagnées d’un nourrisson et de jeunes enfants et à envisager d’édicter des règles à ce sujet, à des fins de transparence et de prévisibilité, tout en garantissant un environnement inclusif.
99. Il n’y a pas de crèche dans le Palais de l’Europe (pas plus que dans l’ensemble du Conseil de l’Europe); on n’y trouve pas non plus d’espaces adaptés pour changer ou nourrir les bébés. J'ai bien pris note qu’une «salle des familles» est envisagée dans le bâtiment du Palais, ce dont je me réjouis. Ces questions relevant également de la responsabilité du Secrétaire Général et concernant l’ensemble du Conseil de l’Europe, et non uniquement l’Assemblée, j’aimerais inviter le Secrétaire Général à envisager la possibilité d’aménager une crèche et de mettre à disposition, dans les locaux du Conseil de l’Europe, une ou plusieurs salles permettant de changer ou nourrir les bébés.

7.1.3. Politiques et attitudes inclusives

100. Dans la Résolution 1921 (2013) «Égalité des sexes, conciliation vie privée-vie professionnelle et coresponsabilité», l’Assemblée reconnaissait la persistance de l’inégalité hommes-femmes au travail et encourageait les États membres à adopter, dans l’intérêt des femmes comme des hommes, des mesures favorables à la conciliation entre vie professionnelle et familiale. Ces mesures pourraient consister à offrir des services d’assistance aux personnes non autonomes, dont la prise en charge est assurée de façon prépondérante par les femmes; à mettre en place un régime de congé parental permettant aux parents de s’occuper des enfants sur un pied d’égalité; ou encore à prévoir des formes d’organisation du travail plus souples et plus adaptées aux différentes situations familiales, telles que les horaires différenciés et flexibles ou le télétravail.
101. L’Assemblée n’autorise le vote à distance que dans des circonstances exceptionnelles. Le vote par procuration est interdit; toutefois, il est possible de désigner des membres suppléants, et de leur transférer le droit de vote.
102. J’estime que les membres qui ont la charge d’enfants de moins de trois ans devraient être autorisés, sur demande, à participer en ligne aux réunions des commissions. J’invite ainsi la commission du Règlement, de l’éthique et des immunités à examiner cette question, qu’il s’agisse d’interpréter le règlement en vigueur ou d’envisager d’éventuelles modifications.
103. L’Assemblée ne fournit pas d’informations en braille. L’assistance aux parlementaires ou aux membres du personnel ayant des déficiences auditives et/ou visuelles ne fait l’objet d’aucune disposition spécifique. J’aimerais inviter le Secrétariat de l’Assemblée à examiner les mesures susceptibles de remédier à cette situation, en tenant compte des contraintes financières.
104. En novembre 2018, à l’initiative de sa présidente d’alors, Liliane Maury Pasquier, l’Assemblée a lancé une initiative contre le sexisme, le harcèlement et la violence à l’égard des femmes dans les parlements: #PasDansMonParlement. Le but était d’alerter sur la fréquence du sexisme et du harcèlement sexuel dans les parlements et sur leurs effets pour les femmes concernées, ainsi que d’appeler à agir pour mettre un terme au sexisme dans les parlements. Cette initiative faisait suite à la publication d’une étude régionale conjointe de l’Assemblée et de l’UIP qui révélait des niveaux alarmants de sexisme, de harcèlement et de violence à l’égard des femmes dans les parlements nationaux (voir le paragraphe 23, ci-dessus).
105. La Recommandation 2152 (2019) et la Résolution 2274 (2019) «Pour des parlements sans sexisme ni harcèlement sexuel», attiraient l’attention sur la situation, préconisaient des mesures concrètes pour y remédier et rappelaient les obligations en vigueur en matière de droits des femmes, dont le droit de vivre sans violence.
106. Elles ont suscité deux actions spécifiques: 1) la modification du code de conduite de l’Assemblée pour y interdire explicitement le sexisme, le harcèlement sexuel, la violence sexuelle et les comportements sexuels abusifs, et prévoir l’obligation de tenir compte des règles du Conseil de l’Europe en matière de protection de la dignité, et 2) la révision des lignes directrices pour l’observation des élections par l’Assemblée parlementaire afin que la question des violences faites aux femmes, notamment le sexisme et le harcèlement sexuel, y soit systématiquement prise en compte.
107. En décembre 2022, le Conseil de l’Europe a adopté un Code de conduite et une Politique sur le respect et la dignité. Les membres du personnel de l’Assemblée et des délégations nationales, ainsi que les visiteuses et visiteurs, sont tenus d’observer les normes de conduite fixées par le Conseil de l’Europe, qui affirme que l’Organisation «ne tolère aucun comportement irrespectueux». En mai 2023, le Conseil de l’Europe a également adopté une politique en matière de signalement des actes répréhensibles et de protection contre les représaillesSpeak up»). En outre, une Politique sur la diversité, l'égalité et l'inclusion est entrée en vigueur dans l’Organisation le 1er mai 2025.
108. Le Règlement de l’Assemblée établit que chaque membre signe une déclaration écrite affirmant leur adhésion aux objectives et principes fondamentaux du Conseil de l’Europe, et s’engageant à respecter le Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire (article 6.2.c).
109. La Résolution 2594 (2025), évoquée au paragraphe 93 ci-dessus, visait également à renforcer la perspective jeunesse dans les travaux de l’Assemblée. Ainsi, toutes les commissions peuvent désigner un·e rapporteur·e pour la jeunesse, dont le rôle est de présenter le point de vue des jeunes dans les discussions sur des rapports.
110. La commission du Règlement, de l’éthique et des immunités de l’Assemblée prépare actuellement un rapport intitulé «Accroître la participation active et la contribution des parlementaires aux travaux de l’Assemblée parlementaire et de ses commissions», avec Mme Petra Bayr (Autriche, SOC) comme rapporteure. Les actions envisageables dans ce contexte consisteraient à élaborer des programmes de formation, des brochures informatives et un système de mentorat pour aider les membres de l’Assemblée dans leur travail. Ces activités de formation et de mentorat pourraient englober la mise en œuvre des codes de conduite et mécanismes de signalement existants pour les cas de sexisme et de harcèlement, violence ou inconduite à caractère sexuel.

7.2. Parlement européen

7.2.1. Représentation des femmes et des hommes

111. En 2022, le Parlement européen a adopté une résolution sur l’approche intégrée de l’égalité hommes-femmes, qui mentionne l’outil d’auto-évaluation de l’EIGE (voir le paragraphe 15, ci-dessus) et demande la réalisation d’un audit «afin de cartographier la situation actuelle en matière d’égalité entre les hommes et les femmes, d’intégrer les questions d’égalité et de formuler des recommandations liées aux aspects politiques et administratifs des activités du Parlement». La résolution précise que cet audit «s’intéresse à tous les domaines et à tous les indicateurs élaborés dans le cadre de la “boîte à outils pour des parlements sensibles à la dimension de genre”» de l’EIGE 
			(26) 
			Parlement
européen, <a href='https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/TA-9-2022-0072_FR.html'>Résolution
sur l’approche intégrée de l’égalité des femmes et des hommes au
Parlement européen</a>, 10 mars 2022.
112. Le Parlement européen a adopté en 2020 un Plan d’action sur l’égalité entre les hommes et les femmes, accompagné d’une feuille de route pour 2021-2022, avec la rédaction de rapports du suivi tous les semestres. En outre, depuis 2003, chaque commission parlementaire désigne en son sein un·e responsable de l’approche intégrée de l’égalité de genre. En 2009, les membres ainsi désignés ont constitué un réseau: le Gender Mainstreaming Network (GMN).
113. L’équilibre hommes-femmes est une réalité au Parlement européen depuis les élections de 2019 (41 % de femmes, 59 % d’hommes). Cependant, pour la première fois, le Parlement européen élu en juin 2024 a connu une diminution du nombre d’eurodéputées (désormais 38,5 %). Les écarts entre pays de l’Union européenne sont importants: tandis que la Suède a élu 61,9 % d’eurodéputées (13 femmes sur 21), Chypre n’a élu que des hommes (6 sur 6).
114. Étant donné que les élections européennes sont organisées dans chaque État membre de l’Union européenne en suivant les règles nationales, le défi de la parité au Parlement européen doit être relevé dans chaque pays. Cette situation s'applique également à la représentation des groupes minoritaires au Parlement européen, qui doit également être abordée au niveau national.
115. Un débat resurgit régulièrement quant à l’éventualité d’adopter, au niveau de l’Union européenne, des règles visant à uniformiser le mode d’élection des eurodéputé·es dans les différents États membres. Cela pourrait faciliter l’adoption de dispositions en faveur de l’égalité de genre. En 2022, le Parlement européen a adopté une proposition de règlement du Conseil sur l’élection des eurodéputé·es prévoyant un cadre commun pour l’élection du Parlement européen dans les États membres de l’Union européenne, avec notamment des listes alternées ou des quotas. Ces modifications, qui requièrent l’appui unanime des pays de l’Union européenne, n’ont pas encore été approuvées.

7.2.2. Accessibilité des infrastructures

116. Les événements et débats du Parlement européen, sur place ou en ligne, sont ouverts au public. D’après le site internet du Parlement, le service des visites garantit la pleine accessibilité de ses locaux aux personnes en situation de handicap. À Bruxelles, l’hémicycle est accessible aux personnes en fauteuil roulant, et autres personnes en situation de handicap. Une assistance spéciale et de l’interprétation en langue des signes peuvent être fournies sur demande préalable. De même, à Strasbourg, les locaux du Parlement européen sont ouverts aux personnes en situation de handicap.
117. Comme dans certains parlements nationaux, bien que le règlement du Parlement européen ne prévoie pas la présence dans l’hémicycle de parlementaires avec un nourrisson, le ou la président·e peut l’autoriser de fait.
118. Les enfants de moins de 14 ans ne peuvent entrer dans les bâtiments du Parlement européen qu’accompagnés d’un adulte. La feuille de route du Parlement européen sur la diversité appelle à rendre les crèches du Parlement accessibles et inclusives pour tous les enfants, dans toute leur diversité, donc y compris pour les enfants en situation de handicap.

7.2.3. Politiques inclusives

119. En vertu du Règlement intérieur du Parlement européen, «la répartition du temps de parole en plénière tient compte du fait que les députés atteints d’un handicap pourraient avoir besoin de plus de temps» (article 178). Le Parlement européen rend ses méthodes de travail plus inclusives, par exemple en s’assurant que les communications et situations d’urgence puissent être comprises par les personnes en situation de handicap, et notamment de déficience auditive ou visuelle.
120. Le Parlement européen a pris des mesures allant dans le sens de la sensibilité au genre dans ses locaux, comme la mise à disposition de structures de garde d’enfants pour les membres du Parlement et son personnel. Ces structures sont payantes (le tarif est calculé sur la base des revenus et de la situation familiale).
121. Le secrétariat du Parlement européen a élaboré une «feuille de route sur la diversité», qui mentionne la possibilité d’un congé parental pour les parents en situation de handicap, ayant des enfants en situation de handicap ou n’ayant pas droit au congé de maternité ou pour adoption. Le Parlement est également doté, en interne, d’une «feuille de route pour l’égalité entre les femmes et les hommes», qui repose sur un plan d’action et évoque la nécessité d’améliorer l’équilibre entre vie professionnelle et privée. L’unité Égalité, inclusion et diversité (EIDU) du Parlement européen promeut des politiques de ressources humaines favorables à l’égalité des genres et assure le suivi de ces politiques.
122. Concernant les modalités de vote, les eurodéputé·es «votent individuellement et personnellement», ce qui exclue par conséquent le vote à distance, le vote par procuration, les accords de transfert de votes pour compenser les absences ou toute autre solution en cas de motif d’absence impérieux (congé parental, allaitement, etc.).
123. Le Parlement européen dispose aussi d’une feuille de route destinée à accroître la diversité au sein de son secrétariat. Elle est axée sur les questions de handicap, d’orientation sexuelle et de lutte contre le racisme. Les mesures prévues par cette feuille de route couvrent les procédures de recrutement, le programme de stages et les communications internes et externes. La feuille de route est un document interne qui donne des orientations pour rendre l’environnement de travail du Parlement européen plus inclusif. Son objectif est d’intégrer l’égalité, la diversité et le souci de l’inclusion aux travaux du Parlement en adoptant une approche intersectionnelle, destinée à accroître la diversité à tous les niveaux (stages, recrutement, vie professionnelle et privée du personnel, etc.).
124. Au sein du secrétariat du Parlement européen, un point de contact sur le handicap joue le rôle d’un guichet unique: tout le personnel du Parlement peut lui adresser ses demandes et questions en lien avec un handicap. Des points de contact du même type ont également été mis en place sur les questions LGBTIQ+ et de lutte contre le racisme, respectivement, et reflètent l’engagement de l’administration sur ces sujets.

7.2.4. Attitudes inclusives

125. Les eurodéputé·es doivent signer une déclaration confirmant leur engagement à respecter le Code du comportement approprié, qui est l’annexe II du Règlement intérieur du Parlement européen. L’article 10 du Règlement intérieur dispose que les eurodéputé·es «s’abstiennent de toute forme de harcèlement moral ou sexuel et respectent le code du comportement approprié» dans l’exercice de leurs fonctions.
126. Le code précise expressément que les eurodéputé·es «se comportent à l’égard de toutes les personnes travaillant au Parlement européen avec dignité, courtoisie, respect et sans préjugé ni discrimination». Il prévoit que les eurodéputé·es coopèrent pleinement en vue de gérer les situations de conflit ou les cas de harcèlement moral ou sexuel, y compris en réagissant promptement à toute allégation. Les élu·es au Parlement européen doivent participer aux formations spécialisées concernant la prévention des conflits et du harcèlement sur le lieu de travail.
127. Le Parlement européen est doté d’une politique de lutte contre le harcèlement sexuel et moral, appuyée par deux comités consultatifs internes chargés d’examiner les allégations de harcèlement impliquant des eurodéputé·es ou des membres du personnel. L’objectif est d’exclure le harcèlement, que ce soit entre eurodéputé·es, entre ces derniers et les membres du personnel, ou entre membres du personnel du Parlement.
128. Le Règlement intérieur du Parlement européen comporte également un code de conduite en matière d’intégrité et de transparence. Parmi ses principes directeurs, ce code énonce que les membres du Parlement européen «agissent uniquement dans l’intérêt général» et en respectant les principes suivants: «le désintéressement, l’intégrité, la transparence, la diligence, l’honnêteté, la responsabilité et le respect de la dignité et de la réputation du Parlement». Le ou la président·e du Parlement peut consulter, en cas de besoin, un comité consultatif sur la conduite des eurodéputé·es.
129. En avril 2024, les membres du Parlement européen ont approuvé la création d’un organe interinstitutionnel chargé des normes éthiques afin d’élaborer, mettre à jour et interpréter des normes éthiques minimales communes et de publier des rapports sur l’application de ces normes par chaque entité signataire, c’est-à-dire le Parlement européen et les autres institutions de l’Union européenne.

8. Conclusions

130. Mon rapport vise à sensibiliser à la nécessité de rendre les parlements de nos États membres pleinement accessibles et inclusifs, eu égard à leurs locaux, à leur composition, à leurs politiques internes et à leurs pratiques de travail, afin qu’ils puissent remplir au mieux leur rôle en tant qu’institutions démocratiques clés et dûment refléter les sociétés qu’ils représentent – ce qui n’est malheureusement pas encore le cas. Cela suppose de permettre aux femmes parlementaires d’entrer en politique, d’y rester et d’accéder à des postes de décision et à des fonctions dirigeantes au sein des parlements, à l’abri de toute violence, tout en continuant d’honorer leurs obligations familiales, au même titre que leurs homologues masculins.
131. Nos parlements nationaux, à l’instar de notre Assemblée et du Parlement européen, devraient être des lieux de travail inclusifs, exempts de sexisme, racisme, âgisme, validisme et toute autre forme de discrimination. Cela devrait se refléter dans leurs règles et règlements internes, lesquels devraient prévoir des mécanismes et outils appropriés pour prévenir la discrimination et y répondre au moyen de procédures adéquates de signalement et de sanction.
132. Ma volonté de rendre les parlements pleinement accessibles aux personnes en situation de handicap, qu’elles soient parlementaires, membres du personnel ou visiteuses, aux personnes à mobilité réduite, ainsi qu’à celles accompagnées d’enfants, devrait aussi être une priorité pour nos États membres, car l’accessibilité et l’inclusion constituent des impératifs démocratiques au XXIe siècle.