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A. Projet de
résolution
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B. Projet de recommandation
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Rapport | Doc. 16196 | 06 juin 2025
La protection des droits humains dans et par le sport: obligations et responsabilités partagées
Commission de la culture, de la science, de l'éducation et des médias
A. Projet de
résolution 
(open)1. Le Conseil de l’Europe et son
Assemblée parlementaire se sont engagés de longue date à promouvoir les
droits humains, la démocratie et l’État de droit dans le sport,
lequel constitue un instrument efficace pour favoriser l’inclusion,
l’égalité, l’intégrité et la dignité humaine.
2. L’Assemblée rappelle en particulier la Résolution 2420 (2022) et la Recommandation 2221
(2022) «La gouvernance du football: les affaires et les valeurs»,
ainsi que la Résolution
2465 (2022) «Pour des règles du jeu équitables – Mettre fin à la
discrimination à l’égard des femmes dans le monde du sport».
3. Elle tient à réaffirmer les principes inscrits dans la Charte
européenne du sport révisée, la Convention sur la manipulation de
compétitions sportives (STCE n°215, «la Convention Macolin, 2014) la Convention contre
le dopage (STE n° 135, 1989) et son Protocole additionnel (STE n° 188,
2002), ainsi que la Convention sur une approche intégrée de la sécurité,
de la sûreté et des services lors des matches de football et autres manifestations
sportives (STCE n° 218, «la Convention de Saint-Denis», 2017).
4. Les droits humains doivent être respectés et protégés dans
tous les environnements sportifs, du sport amateur au sport professionnel,
y compris pendant les phases de candidature, d’organisation, et
de déroulement de grandes manifestations sportives internationales
et même après la fin de celles-ci en termes d’héritage. L’Assemblée:
4.1. salue les travaux de l’Accord
partiel élargi sur le sport (APES), en particulier dans le domaine
de la protection des enfants et de leurs droits, grâce au projet
du Conseil de l’Europe «Donnons de la voix», ainsi que dans le domaine
de l’égalité entre les femmes et les hommes dans le sport, pour
lequel l’APES continue de mettre au point diverses solutions possibles,
y compris en mettant en œuvre les recommandations du projet conjoint
de l’Union européenne – Conseil de l’Europe «Tous·tes ensemble»: pour
une plus grande égalité de genre dans le sport;
4.2. reconnaît l’action menée par la Fédération internationale
de football Association (FIFA), le Comité international olympique
(CIO), l’Union Européenne des Associations de Football (UEFA), World Athletics
et les fédérations sportives internationales pour renforcer la protection,
lutter contre les abus et la discrimination et intégrer les considérations
relatives aux droits humains et à l’égalité entre les femmes et
les hommes dans la gouvernance;
4.3. demeure cependant fortement préoccupée par les informations
persistantes faisant état d’abus, de discrimination et de violations
des droits humains en lien avec la pratique sportive et de grands événements
sportifs, en particulier lorsque les instances dirigeantes du sport
et les pays hôtes ont failli à leurs responsabilités;
4.4. est profondément inquiète face aux abus généralisés et
systématiques dont sont victimes des enfants et des adultes vulnérables
dans le sport, notamment les agressions psychologiques, émotionnelles,
physiques et sexuelles, souvent favorisés par des cultures organisationnelles
toxiques, l’impunité et l’absence de mécanismes de réparation tenant
compte des traumatismes subis;
4.5. note avec préoccupation que les systèmes actuels d’évaluation
du respect des droits humains dans le cadre des procédures de candidature
et d’organisation de grands événements sportifs sont souvent opaques,
mal appliqués et ne prévoient pas de voies de recours accessibles
aux victimes;
4.6. appelle à agir plus résolument pour renforcer la responsabilité,
la transparence et le respect des normes internationales relatives
aux droits humains dans la gouvernance du sport, en coopération
avec les autorités nationales et internationales et les instances
dirigeantes du sport;
4.7. salue le travail de Play the Game et du projet ClearingSport,
qui vise à introduire de nouvelles normes, collaborations et mécanismes
pour lutter contre la criminalité, la corruption et autres atteintes à
l’intégrité dans le sport.
5. Compte tenu de ce qui précède, en ce qui concerne la lutte
contre les abus dans le sport, l’Assemblée invite instamment les
États membres du Conseil de l’Europe:
5.1. à inscrire la promotion et la protection des droits humains
dans les cadres nationaux de politique sportive en tant qu’obligation
juridique et éthique;
5.2. à exiger des organisations sportives relevant de leur
juridiction qu’elles adoptent et mettent en œuvre des mesures en
faveur des droits humains, notamment une politique de tolérance
zéro à l’égard des abus et de la discrimination;
5.3. à veiller à la nomination d’agent·es de protection de
l’enfance dans les fédérations sportives travaillant avec des mineur·es,
sur la base d’un cadre convenu par les différentes parties prenantes
du monde sportif;
5.4. à mettre en place des unités nationales indépendantes
chargées de la sécurité dans le sport ou à renforcer celles existantes,
afin de soutenir les victimes, d’enquêter sur les cas d’abus et
de coordonner les actions de sensibilisation et de prévention;
5.5. à soutenir l’APES dans l’amélioration des outils de bonne
gouvernance et de protection des enfants, grâce notamment à l’adoption
et au suivi de normes pertinentes;
5.6. à participer activement aux efforts internationaux visant
à définir et à promouvoir un code international pour un sport sûr,
calqué sur le Code mondial antidopage et le Code du Mouvement olympique
sur la prévention des manipulations de compétitions, ainsi qu’à
en contrôler le respect;
5.7. à surveiller le rôle de la publicité commerciale et des
influenceurs dans le sport, particulièrement dans les secteurs de
l’alcool et des jeux d’argent, ainsi que les effets qu’ils peuvent
avoir sur le bien-être et la santé des mineur·es.
6. L’Assemblée appelle également toutes les fédérations sportives
nationales et internationales:
6.1. à
intégrer dans leurs statuts, codes de conduite et règlements des
dispositions contraignantes en matière de droits humains et de protection;
6.2. à mettre en place des mécanismes de signalement tenant
compte des traumatismes subis et centrés sur les victimes, accessibles
à tous les pratiquant·es d’un sport, qui garantissent l’anonymat
et soient proposés en plusieurs langues;
6.3. à organiser une formation obligatoire en matière de protection
et de droits humains à l’attention des entraîneur·es, arbitres,
responsables sportifs et autres personnes en contact avec des enfants
et des personnes vulnérables;
6.4. à inclure des victimes d’abus dans les organes décisionnels
et les conseils consultatifs et à les associer aux processus d’élaboration
des politiques;
6.5. à publier des rapports annuels sur la protection et le
respect des droits humains, y compris des données sur les plaintes
et les mesures disciplinaires;
6.6. à veiller à coopérer pleinement avec les pouvoir publics
et les services répressifs en cas de soupçon ou de signalement d’abus.
7. Au vu de ce qui précède, l’Assemblée soutient également fermement
la création d’une entité mondiale indépendante, multisports, dédiée
à la sécurité dans le sport, qui offre soutien et réparation aux
athlètes, quelle que soit la juridiction dont ils relèvent.
8. En ce qui concerne la lutte contre la discrimination et la
promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes dans le sport,
l’Assemblée:
8.1. rappelle que le
sport doit être un espace exempt de toute forme de discrimination,
notamment fondée sur le genre, l’identité de genre, l’orientation
sexuelle, la race, l’origine ethnique, la religion et le handicap;
8.2. salue les efforts déployés par la FIFA, le CIO, l’UEFA,
World Athletics et les fédérations internationales pour fixer des
objectifs en matière d’égalité de genre dans la participation et
la gouvernance, mais constate la persistance d’inégalités entre
les femmes et les hommes à tous les niveaux du sport.
9. L’Assemblée invite par conséquent les États membres du Conseil
de l’Europe:
9.1. à soutenir la
recherche et la collecte de données en utilisant des indicateurs
normalisés sur l’égalité de genre et la diversité dans le sport,
en s’inspirant des indicateurs utilisés pour le projet conjoint de
l’Union européenne – Conseil de l’Europe «Tous·tes ensemble», afin
de permettre la comparabilité des données;
9.2. à financer la mise en place de programmes nationaux et
de partenariats avec des organisations non gouvernementales et des
associations sportives visant à accroître la participation et la
visibilité des femmes et des filles dans le sport;
9.3. à sanctionner les pratiques discriminatoires dans le sport
et à garantir aux victimes de violences ou de harcèlement fondés
sur le genre l’accès à la justice;
9.4. à promouvoir des approches intersectionnelles de l’inclusion,
en veillant à prendre en compte les besoins spécifiques des groupes
marginalisés;
9.5. à travailler en collaboration avec les médias pour lutter
contre les stéréotypes de genre et à garantir une couverture équilibrée
du sport féminin, en s’appuyant là encore sur les travaux du projet conjoint
«Tous·tes ensemble», notamment lors de ses sessions d’information,
qui ont permis de constituer un réseau de professionnel·les des
médias sportifs.
10. L’Assemblée demande également instamment aux fédérations sportives:
10.1. de coopérer autant que possible
avec l’APES à la mise en œuvre des recommandations marquant l’aboutissement
du projet conjoint de l’Union européenne – Conseil de l’Europe «Tous·tes ensemble»
et de contribuer à des répertoires en ligne sur les politiques sportives
inclusives et les bonnes pratiques;
10.2. d’adopter et de mettre en œuvre des plans d’action en
faveur de l’égalité de genre assortis d’objectifs mesurables, notamment
en matière d’égalité salariale et de représentation au sein des instances
dirigeantes;
10.3. de soutenir les programmes de mentorat et de développement
du leadership destinés aux femmes, y compris les entraîneures, les
arbitres et les dirigeantes;
10.4. de s’investir dans des campagnes visant à lutter contre
la masculinité toxique et à promouvoir des modèles positifs pour
les jeunes sportifs et sportives.
11. En ce qui concerne la mise en place de conditions en matière
de droits humains pour les grandes manifestations sportives, l’Assemblée:
11.1. se déclare préoccupée par le
fait que de grands événements sportifs internationaux continuent d’être
attribués à des pays hôtes qui ne sont pas réputés pour leur respect
des droits humains, en l’absence de mécanismes de contrôle adéquats;
11.2. soutient fermement l’inclusion de conditions contraignantes
en matière de droits humains dans les processus de candidature et
d’organisation de toutes les grandes manifestations sportives, y compris
de mécanismes permettant d’en suivre le respect pendant le déroulement
des compétitions et même après la fin de celles-ci en termes d’héritage;
11.3. salue l’exemple donné par la Déclaration des droits humains
pour l’EURO 2024 et l’EURO féminin 2025 de l’UEFA et encourage sa
reproduction et son extension à l’ensemble des prochains événements
organisés par toutes les fédérations sportives.
12. L’Assemblée appelle également les fédérations sportives internationales
et les organisateurs de manifestations:
12.1. à exiger une évaluation des risques en matière de droits
humains, détaillée et contextuelle, en tant que condition de recevabilité
d’une candidature;
12.2. à inclure dans les critères minimaux d’éligibilité le
respect des droits internationaux liés au travail, de la liberté
d’expression, de l’égalité de genre et des normes de protection
de l’enfance;
12.3. à élaborer des plans d’action exécutables en matière de
droits humains, assortis de calendriers et de cadres de référence,
pour toutes les candidatures acceptées;
12.4. à mettre en place des organes de contrôle indépendants
dotés de pouvoirs leur permettant d’enquêter, d’évaluer la conformité
et d’imposer des sanctions, et notamment de confier à un autre pays l’organisation
d’une manifestation en cas de violations graves;
12.5. à collaborer activement avec les pouvoirs publics pour
faciliter l’accès effectif des victimes d’abus liés à l’organisation
d’événements sportifs à des voies de recours, y compris à des mécanismes judiciaires
et extrajudiciaires;
12.6. à donner la priorité à la transparence et à l’engagement
public tout au long du processus de candidature, d’évaluation et
d’organisation en mettant à profit la visibilité des athlètes de
haut niveau pour remettre en question les normes et les pratiques
préjudiciables et promouvoir des valeurs inclusives;
12.7. à nouer un dialogue structuré avec le Conseil de l’Europe,
l’Union européenne et les agences concernées des Nations Unies afin
d’élaborer des protocoles en matière de droits humains dans des domaines
clés tels que la liberté d’expression, l’égalité de genre et la
protection de l’enfance pour l’organisation de grandes manifestations
sportives.
13. Par ailleurs, l’Assemblée recommande à l’APES:
13.1. d’élaborer de nouvelles lignes
directrices sur l’évaluation du respect des droits humains dans
les candidatures à des événements sportifs et de fournir une assistance
technique aux pays candidats;
13.2. de faciliter le dialogue et la coopération inter-régionaux
en ce qui concerne l’évaluation des risques pour les droits humains
dans le sport, en particulier avec les économies émergentes et les
pays à faible revenu.
14. Il est temps d’opérer un changement de paradigme dans la gouvernance
du sport: un changement qui accorde une place centrale à la dignité,
aux droits humains et au bien-être de tous les athlètes et de toutes
les parties prenantes impliqués dans les activités sportives. La
gouvernance du sport doit être en phase avec les valeurs démocratiques,
les droits humains, la transparence et l’intérêt public, en particulier
lorsqu’elle s’exerce à l’échelle internationale dans des contextes
juridiques et culturels différents.
15. L’Assemblée souligne que seule une approche coordonnée, inclusive
et multi-parties prenantes est à même de garantir la réalisation
des droits humains dans et par le sport.
16. Enfin, l’Assemblée décide de continuer de suivre l’évolution
de la situation, dans le cadre notamment de l’Alliance parlementaire
pour la bonne gouvernance et l’intégrité dans le sport, et de travailler
de concert avec les instances sportives, les gouvernements et la
société civile pour faire en sorte que la promesse du respect des
droits humains dans le sport devienne une réalité pour tous et toutes.
B. Projet de recommandation 
(open)1. L’Assemblée parlementaire rappelle
la Résolution ... (2025) «La protection des droits humains dans
et par le sport: obligations et responsabilités partagées», qui
appelle à l’adoption de normes contraignantes en matière de droits
humains à tous les niveaux du sport, afin en particulier de combattre
les abus, la discrimination et les inégalités entre les femmes et
les hommes, et demande instamment aux gouvernements et aux organismes
sportifs de renforcer la protection, la transparence et la responsabilité,
d’assurer une participation inclusive et de prendre en compte les
droits humains dans l’organisation des grandes manifestations sportives.
2. Considérant qu’une approche coordonnée et multi-parties prenantes
est essentielle pour parvenir à un changement durable, l’Assemblée
réaffirme le rôle unique que joue le Conseil de l’Europe dans la
promotion des droits humains, de la démocratie et de l’État de droit
dans et par le sport, notamment par le biais de ses conventions
sur le sport et de l’Accord Partiel Élargi sur le Sport (APES).
3. Tout en saluant des initiatives telles que «Donnons de la
voix» et «Tous·tes ensemble», ainsi que les travaux de l’APES dans
le domaine du sport inclusif plus généralement, l’Assemblée demeure
préoccupée par les informations persistantes faisant état d’abus,
de discrimination et de violations des droits humains dans le sport,
qui touchent en particulier les enfants, les femmes et les groupes
marginalisés.
4. Afin d’aider les États membres du Conseil de l’Europe et les
organisations sportives à aligner la gouvernance sur les normes
relatives aux droits humains, l’Assemblée recommande au Comité des
Ministres:
4.1. de renforcer le
mandat et les ressources de l’APES pour promouvoir les droits humains
dans le sport, notamment en poursuivant l’élaboration d’orientations
sur la bonne gouvernance, les mesures de protection et les politiques
de lutte contre la discrimination;
4.2. de charger l’APES d’élaborer des dispositions types applicables
aux législations nationales et aux règlements sportifs visant à
prévenir les abus, à garantir des environnements sportifs sûrs et
à soutenir les victimes;
4.3. d’inviter l’APES à continuer de mettre au point des outils
techniques et des indicateurs pour contrôler le respect des normes
internationales en matière de droits humains et d’égalité de genre
à tous les niveaux du sport, en collaboration avec les autorités
nationales et la société civile;
4.4. d’encourager l’APES à œuvrer en collaboration avec les
partenaires internationaux, notamment l’Union européenne et les
agences des Nations Unies, à la définition et à la promotion d’un
Code international pour un sport sûr;
4.5. de demander à l’APES d’aider les États membres et les
organismes sportifs à réaliser des évaluations des risques pour
les droits humains dans le cadre de grandes compétitions, de donner
des conseils sur l’intégration de conditions en matière de droits
humains dans les processus de candidature et d’organisation, et
de faciliter le dialogue interrégional, en particulier avec les
économies émergentes et les pays à faible revenu.
5. L’Assemblée estime que l’APES est bien placé pour coordonner
une approche à l’échelle du Conseil de l’Europe en faveur d’un sport
sûr, inclusif et fondé sur des valeurs et des droits. Elle invite
le Comité des Ministres à veiller à ce que l’APES dispose de la
capacité institutionnelle lui permettant de remplir cette mission urgente
et de plus en plus importante.
C. Exposé des motifs par M. Kim Valentin, rapporteur
(open)1. Introduction
1. Le 25 avril 2023, j’ai déposé,
avec d’autres membres, une proposition de résolution intitulée «La protection des droits humains dans et
par le sport: obligations et responsabilités partagées», qui a été renvoyée
pour rapport à la commission de la culture, de la science, de l'éducation
et des médias.
2. Comme le soulignent plusieurs résolutions de l’Assemblée parlementaire
et les
priorités du Conseil de l’Europe dans le domaine du sport pour 2022-2025, la protection des droits humains dans un sport fondé
sur des valeurs doit rester fermement inscrit à l’ordre du jour
des gouvernements et des organisations sportives.
3. Il faut que la gouvernance du sport vise à défendre la dignité
humaine et à promouvoir les droits humains, et les événements sportifs
devraient devenir un outil puissant pour déclencher de véritables avancées
dans la protection des droits humains et des libertés fondamentales,
tout au long du processus, depuis la sélection des pays hôtes jusqu’à
l’organisation et au déroulement des compétitions, et même après la
fin de celles-ci en termes d’héritage.
4. La Résolution 2420
(2022) et la Recommandation
2221 (2022) «La gouvernance du football: les affaires et
les valeurs» appellent à la mise en place de conditions strictes
en matière de droits humains et à une évaluation plus rigoureuse
de la conformité dans le cadre de la procédure d’appel d’offres
pour l’organisation de grandes compétitions. Elles appellent également
à l’amélioration de la protection des mineur·es et des jeunes sportifs
et sportives contre la violence et les abus dans le sport, et au
renforcement des politiques de lutte contre la discrimination et
d’égalité entre les femmes et les hommes.
5. Mon rapport entend assurer le suivi de ces questions et notamment
la manière dont ces appels sont mis en œuvre dans l’ensemble des disciplines sportives,
et pas seulement dans le football, en étroite collaboration avec
les principales organisations sportives internationales et d’autres
parties prenantes concernées.
6. J’ai tenu deux réunions en ligne avec le personnel du Comité
international olympique (CIO), le 29 novembre 2023, sur les faits
nouveaux en matière de sport sûr, et le 29 février 2024, sur les
droits humains et l’égalité des sexes, qui ont contribué à éclairer
la présente note d’information.
7. La commission de la culture, de la science, de l'éducation
et des médias a organisé quatre auditions au cours des deux dernières
années
, axées respectivement sur les trois domaines
abordés dans ce rapport, à savoir le «sport sûr», la lutte contre
la violence et les abus dans le sport; la promotion de l’égalité
entre les femmes et les hommes dans le sport; des conditions strictes
en matière de droits humains et une évaluation rigoureuse des candidatures
à l’organisation de grandes compétitions, avec la participation
d’expert·es et de fédérations sportives.

8. Les 4 et 5 novembre 2024, à Athènes, l’Assemblée a organisé,
en coopération avec le Parlement hellénique, une conférence
parlementaire intitulée «Promouvoir la sécurité, l’intégrité, l’égalité
et l’inclusion dans le sport». L’événement, qui a réuni des parlementaires,
des responsables politiques, des athlètes, des organisations sportives
et des spécialistes de divers domaines, visait à étudier les dimensions
multiformes du sport.
9. Dans le cadre d’une visite d’information préalable au débat
de l’Assemblée sur le sport prévu en juin 2025, une délégation de
l’Assemblée s’est rendue au siège de la FIFA (Fédération internationale
de football Association) à Zurich le 21 mai 2025, pour des échanges
approfondis avec la direction et des expert·es de la FIFA. Les discussions
ont porté sur les principales questions abordées dans mon rapport,
en particulier sur la nécessité d’imposer des conditions strictes
en matière de droits humains pour l’attribution et l’organisation
des grands événements sportifs internationaux, notamment la Coupe
du monde de la FIFA 2034 en Arabie saoudite. La délégation a salué
l’ouverture au dialogue de la FIFA, tout en soulignant l’importance
de garanties renforcées afin que le sport respecte pleinement les
droits humains, la dignité, l’inclusion et les valeurs démocratiques
.

2. Appel à l’unité mondiale dans la lutte contre les abus dans le sport
2.1. Comprendre la violence et les abus dans le sport
10. La première audition a eu lieu
le 1er juin 2023 à Londres, à l’invitation
du Parlement britannique. Elle a porté sur l’élimination de l’exploitation,
des abus et du harcèlement dans le sport, avec la participation
de plusieurs organisations sportives, de sportifs et sportives et
d’autres parties prenantes pertinentes
.

11. La commission de la culture, de la science, de l'éducation
et des médias a entendu des témoignages personnels éloquents de
victimes d’agressions dans le sport, ainsi que les mesures prises
par les principales instances dirigeantes du sport pour garantir
un environnement sûr aux joueurs et aux sportifs hommes et femmes,
et leurs engagements à en faire plus.
12. Les débats ont mis en évidence le fait que les agressions
sexuelles, physiques et émotionnelles dans le sport sont graves
et répandues et que les sportifs et sportives dénoncent de plus
en plus les agressions émotionnelles comme faisant partie de la
culture du sport. Olivia Jasriel et Patrice Evra, deux sportifs
de haut niveau ayant été victimes d’agressions sexuelles qui se
sont exprimés devant la commission, travaillent sans relâche pour
que les auteurs d’agressions sexuelles dans le monde du sport soient
traduits en justice
. Ils ont appelé les
instances sportives à briser les tabous et à faire face aux agressions
commises sur les mineur·es
, et incité les pouvoirs
publics en général, et les parlementaires en particulier, à prendre
des mesures urgentes et plus résolues pour lutter contre l’impunité,
protéger les victimes et les témoins de violences, prévenir les agressions
futures et trouver une solution globale et unifiée pour toutes les
disciplines sportives.


13. Alexandre Husting, Président du Conseil de direction de l’Accord
partiel élargi sur le sport (APES) du Conseil de l’Europe, a expliqué
comment l’APES aide les pouvoirs publics responsables du sport et
les organisations sportives à mener cette action de prévention de
la violence et de protection des victimes.
14. Malheureusement, comme dans d’autres secteurs de la société,
les cas signalés ne sont que la partie émergée de l’iceberg, car
la plupart des victimes préfèrent ne pas porter plainte en raison
de la peur, de la honte, de l’ignorance, des tabous, de la culture
de la «masculinité toxique» dans certaines disciplines sportives
et du manque d’accès
ou de confiance dans les systèmes de signalement. Beaucoup de victimes dénoncent
le fait d’être exposées à des menaces et à la revictimisation en
raison de l’absence de professionnel·les et d’un soutien tenant
compte des traumatismes. Étant donné l’incapacité des pouvoirs publics,
des instances sportives, des organisations de la société civile
et des autres parties prenantes à instaurer un environnement sûr
et valorisant pour tous et toutes, beaucoup de victimes et de témoins
craignent de dénoncer la violence.

15. L’audition a mis en évidence les conséquences dévastatrices
et durables pour les victimes, notamment les blessures, les troubles
du développement physique, la perte de l’estime de soi, les mauvais
résultats scolaires et sportifs, la déformation de l’image corporelle,
les troubles alimentaires, l’automutilation, la dépression, l’angoisse
et les troubles liés à la consommation de substances psychoactives.
Dans les cas extrêmes, les victimes sont contraintes de cesser de
pratiquer leur sport; dans les situations les plus graves, les agressions
ont même entraîné la mort.
16. Pour les organisations sportives, la violence peut donner
lieu à des sanctions pénales et autres, mettre en évidence une mauvaise
gouvernance, nuire gravement à leur réputation et entraîner une
perte de talents et de revenus en raison d’un manque de confiance
dans la capacité et la volonté de créer un environnement sûr.
2.2. Lutter contre la violence dans le sport aux niveaux national et international: un impératif en matière de droits humains
17. Les pouvoirs publics, les organisations
sportives et les autres parties prenantes doivent veiller à ce que le
sport devienne un environnement sûr et stimulant pour tous et toutes,
conforme aux droits humains et promouvant ceux-ci, et protégeant
les groupes les plus vulnérables de la société, notamment les mineur·es, les
sportifs et sportives LGBTIQ, en situation de handicap ou de haut
niveau, ainsi que les femmes.
18. L’APES œuvre activement à la lutte contre les abus et la violence
dans le sport par le biais de ses réseaux intergouvernementaux et
de la Charte
européenne du sport révisée. Il encourage le dialogue entre les pouvoirs publics,
les fédérations sportives et les ONG afin de rendre le sport plus
éthique, plus inclusif et plus sûr. Le projet «Donnons
de la voix» de l’APES aide les autorités nationales à élaborer des
feuilles de route pour la mise en œuvre de politiques de protection
de l’enfance, y compris la création de postes de responsables de
la protection de l’enfance dans le sport
.

19. La stratégie mise en œuvre par le Comité international olympique
(CIO)
pour renforcer la protection dans
le sport au niveau local et soutenir les sportifs et sportives consiste
à adopter une approche ascendante qui peut être adaptée au niveau
local. Elle a commencé par la mise en place de deux pôles régionaux
pilotes de protection dans le sport en Afrique australe et dans
les îles du Pacifique. Le CIO soutient également les travaux initiaux
d’une plateforme de protection au niveau européen. Ces pôles font
office de points centraux de coordination, ils fournissent aux sportifs
et sportives des conseils en toute indépendance et les aident à accéder
à un accompagnement psychosocial et à une aide juridique par l’intermédiaire
des services locaux existants, dans leur langue et en tenant compte
de la culture et de l’environnement de chacun. Ils seront supervisés
par un groupe de travail international pour la sécurité dans le
sport, également sur la base d’un cadre international pour un sport
sûr, qui s’appuiera sur les normes internationales existantes et
qui définira les différents rôles des États et des organisations
sportives
.


20. Les «Objectifs
stratégiques de la FIFA pour 2024-2027» précisent la volonté de la FIFA de promouvoir un sport
sûr dans le cadre d’actions plus larges pour protéger les droits
humains. Le programme FIFA Guardians, mis en place par le département
Protection et prévention à l’égard des enfants de la FIFA, fournit un
cadre visant à aider les 211 associations membres à réduire les
risques de préjudice, notamment aux enfants, dans le football et
à réagir de manière appropriée
. La FIFA a également intégré des
protocoles de prévention dans l’organisation de ses coupes du monde
, et
s’emploie à renforcer les normes de protection dans les académies
de football du monde entier, dans le cadre entre autres de son programme
Football for Schools, mis en œuvre dans une centaine de pays.


21. Depuis plusieurs années, la FIFA étudie la possibilité de
mettre en place une entité indépendante chargée d’appuyer les enquêtes
sur les agressions dans le sport. Une telle entité soutiendrait
les actions en cours pour élaborer des solutions nationales afin
de veiller à ce que les cas d’agressions dans le sport soient traités
à tous les niveaux et dans tous les pays. Un groupe de pilotage
intérimaire multipartite a été formé pour envisager la création
d’une telle entité avec sept fédérations sportives internationales
et, le 1er juin 2023, il a publié un rapport
final avec des recommandations de haut niveau aux fédérations
sportives fondatrices. À Londres, la FIFA a réitéré son appel aux
mondes sportif et politique pour qu’ils s’unissent afin de faire
face à la multitude de problèmes auxquels ils sont actuellement
confrontés
. En décembre 2024,
la FIFA a confirmé la création de l’Unité de soutien pour la sécurité
dans le football, qui offrira des conseils de spécialiste et des services
de soutien aux victimes de violence dans le football. L’entité sera
placée sous la direction d’une commission indépendante soutenue
par des conseillers et conseillères spéciaux et un groupe consultatif composé
de victimes d’agressions
.


22. Plusieurs fédérations sportives internationales ont pris des
mesures en élaborant une politique de sauvegarde. Ashley Ehlert,
Secrétaire générale adjointe de la Fédération internationale de
hockey sur glace (IIHF), a qualifié la violence de «menace la plus
grave sur le sport à laquelle nous serons jamais confrontés». Elle
a mis en évidence une «culture toxique que l’IIHF est déterminée
à éradiquer». La campagne sur l’intégrité a aidé la fédération à
mettre en évidence des lacunes et à comprendre les travaux supplémentaires
qui sont nécessaires au niveau local (formation des entraîneur·es,
renforcement des règles, etc.). Cependant, la Fédération a estimé
qu’un niveau d’implication internationale serait capital pour mettre
en place un système efficace
.

23. Parmi les autres exemples notables, on peut citer World Athletics
(WA), qui avait appelé chaque fédération membre à mettre en place
sa propre politique et ses propres procédures de sauvegarde d’ici
la fin de 2023, en proposant des orientations, des formulaires de
déclaration et des formations
. Une étude publiée en décembre 2023 a également recensé et traité
les comportements abusifs et menaçants de nature raciste ou sexualisée
visant les athlètes sur les plateformes de médias sociaux X et Instagram.
En prévision des Jeux olympiques de 2024, WA avait aussi investi
dans des systèmes d’intelligence artificielle pour protéger davantage
les sportifs et sportives contre les agressions en ligne, elle a
formé ces derniers et a soutenu d’autres recherches pour lutter
contre le discours de haine et la violence dans le sport. Le CIO
a par ailleurs mis en place, lors des Jeux olympiques de Paris 2024,
un nouveau service de protection contre les abus en ligne alimenté
par l’intelligence artificielle
.


24. Les ONG sont actives dans ce domaine. Mme Maud De Boer Buquicchio,
ancienne présidente de l’ONG End Child Prostitution, Child Pornography
and Trafficking of Children for Sexual Purposes (ECPAT), a présenté
des données pertinentes sur la prévalence et les caractéristiques
de la violence interpersonnelle à l’encontre des mineur·es dans
et en dehors du sport dans six pays européens
.
Des recherches sur l’ampleur et les effets de la violence dans le
sport sont nécessaires dans les pays du Sud, où la prévalence des agressions
peut être plus élevée et les obstacles au signalement presque insurmontables,
avec potentiellement plus de 200 millions d’enfants victimes de
violences sexuelles dans le sport.

25. Les changements proposés en matière de gouvernance et de réglementation
du sport comprennent des mesures visant à intégrer les droits humains
et la voix des victimes dans le fonctionnement et la gouvernance de
tous les organes sportifs, notamment par la promotion d’un cadre
international pour un sport sûr, ancré dans le Code international
olympique. La protection doit être renforcée au niveau national
et lors des compétitions internationales, et les sportifs et sportives
doivent avoir accès à des systèmes de signalement indépendants et
sûrs, avec le soutien de la communauté internationale et de toutes
les disciplines sportives.
2.3. Appel à l’action
26. Le message clair qui ressort
de l’audition est que les autorités et les organismes sportifs doivent
œuvrer de concert pour renforcer la prévention, mieux protéger les
victimes et lutter contre l’impunité. Cela peut se faire par les
moyens suivants:
- intégrer les droits humains et les normes de bonne gouvernance dans la gestion et les opérations sportives, notamment par le biais d’un code international pour un sport sûr qui serait signé par les organisations sportives, à l’instar du Code mondial antidopage ou du Code du Mouvement Olympique sur la prévention des manipulations de compétitions;
- mettre en œuvre des politiques de sauvegarde, y compris des systèmes de prévention, de protection et de signalement sûrs:
a. au niveau national, réunir toutes les principales parties prenantes, car les disciplines sportives ne fonctionnent pas en vase clos et elles doivent respecter le système juridique national et collaborer avec les services de protection et de soutien au niveau national;b. dans le contexte des compétitions internationales;- créer des entités indépendantes pour un sport sûr aux niveaux national et international, ou intégrer cette compétence dans des organismes existants, afin d’apporter soutien et protection aux victimes et de garantir des enquêtes tenant compte des traumatismes et conformes aux droits humains;
- inscrire dans la législation nationale l’obligation pour les organisations sportives proposant des disciplines et des activités sportives aux enfants de nommer un·e agent·e de protection de l’enfance;
- coopérer pour promouvoir la vérification des antécédents et le recrutement en toute sécurité, en réduisant le risque que des personnes reconnues coupables d’agressions obtiennent un emploi dans d’autres pays ou dans d’autres disciplines sportives;
- associer les enfants et les victimes d’abus dans le sport ainsi que leurs défenseurs et défenseuses à la conception, à la mise en œuvre et à l’évaluation de stratégies, de politiques et de mesures;
- tirer parti du pouvoir et du potentiel de diffusion du sport pour sensibiliser, responsabiliser et inciter à l’action afin de remettre en cause la tolérance envers la violence et la masculinité toxique et de promouvoir un sport sûr et ouvert à tous et toutes, grâce à des programmes éducatifs
;
- organiser des auditions parlementaires au niveau national afin de collecter des données, d’analyser les lacunes de la législation et des politiques, et de promouvoir des mesures de sauvegarde et de responsabilisation, y compris une entité mondiale pour un sport sûr.
27. Le CIO devrait être encouragé à soutenir des solutions à la
fois au niveau national, en renforçant la protection et la gestion
appropriée des cas, et au niveau international, par la création
d’une entité indépendante, mondiale et multisports pour soutenir
les victimes et enquêter sur les cas relevant de la compétence des
fédérations sportives internationales.
28. Les fédérations sportives internationales devraient toutes
être encouragées:
- à renforcer les politiques de sauvegarde et à utiliser des codes, des règlements, des accréditations et d’autres mesures incitatives pour veiller à ce qu’elles soient mises en œuvre et contrôlées;
- à rendre obligatoire la formation à la protection des mineur·es pour les entraîneur·es et les arbitres, ainsi que pour les personnes en contact régulier avec les enfants;
- à revoir la manière dont les enquêtes et les procédures disciplinaires sont menées pour veiller à ce qu’elles tiennent compte des traumatismes et qu’elles soient centrées sur les victimes;
- à donner aux victimes l’accès à des systèmes de signalement et de protection fiables, en acceptant une responsabilité accrue par le biais de solutions multisports telles que des entités indépendantes pour un sport sûr au niveau national et une entité indépendante pour un sport sûr au niveau mondial;
- à inclure des victimes dans la gouvernance et la gestion opérationnelle;
- à renforcer la coopération entre les différentes parties prenantes.
29. Les autorités, les organismes sportifs et les autres parties
prenantes devraient également:
- utiliser pleinement les plateformes multipartites telles que l’APES pour traiter ces questions et investir davantage dans l’élaboration de politiques de protection et de conseils sur les mesures de filtrage et de recrutement sûrs conformes aux droits humains. L’APES devrait par ailleurs fournir des conseils et des outils pour renforcer la protection des enfants dans le sport, en ce qui concerne notamment la création d’entités sportives nationales sûres;
- poursuivre les recherches et la collecte de données et soutenir les études sur la violence sexuelle dans le sport dans les pays du Sud, ainsi que sur d’autres formes de violence telles que la négligence, le harcèlement, les formes extrêmes d’entraînement, les méthodes d’entraînement inappropriées, etc.;
- responsabiliser les victimes d’agressions et interagir en toute sécurité avec elles lors de la conception, de la mise en œuvre et de l’évaluation de projets, de stratégies et de mesures;
- lancer une grande campagne de sensibilisation en profitant en particulier de grands événements sportifs avec la participation de sportifs et sportives de haut niveau.
3. Lutter contre les discriminations et réaliser l’égalité entre les femmes et les hommes dans le sport
30. Le 27 mai 2024, à Copenhague,
la commission de la culture, de la science, de l'éducation et des
médias a tenu une deuxième audition avec la participation de Mme Charlotte Girard-Fabre,
Secrétaire générale de la Fédération Internationale des Officiels
de Sport (IFSO), Pays-Bas, et Présidente du Comité Consultatif de l’APES,
Conseil de l’Europe; de Mme Nagin Ravand,
coach licenciée d’UEFA, GLOBALL, Danemark, et de Mme Annaliza Tsakona,
Directrice des relations internationales et affaires publiques de
la FIFA.
31. La discrimination et la violence n’ont pas leur place dans
le sport, qui a la capacité d’être un vecteur important de l’égalité
de genre, de l’inclusion et de la lutte contre la violence sexiste.
32. La Résolution 2465 (2022) «Pour des règles du jeu équitables – mettre fin
à la discrimination à l’égard des femmes dans le monde du sport»,
fondée sur le rapport de Mme Edite Estrela
(Portugal, SOC), fait état de progrès considérables dans la participation
des femmes et des filles dans le sport. Toutefois, la violence,
le sexisme, la discrimination fondée sur le genre et les inégalités
de salaire et de statut subsistent et empêchent les femmes de pratiquer
le sport en toute sécurité. La résolution ne se contente pas de
lancer un appel fort à la lutte contre la violence, elle invite
également les fédérations sportives à s’engager à promouvoir activement l’égalité
entre les femmes et les hommes et à investir dans le développement
du sport féminin, tant au niveau professionnel qu’amateur.
33. Le projet conjoint de l’Union européenne – Conseil de l’Europe «All
In Plus» («Tous·tes ensemble») vise à s’attaquer au déséquilibre
entre les sexes dans le sport (en collectant des données dans 21 juridictions,
en créant une bibliothèque en ligne d’exemples de bonnes pratiques,
en améliorant la couverture médiatique insuffisante et souvent biaisée
des sports féminins, et en proposant des sessions d’information
sur l’égalité de genre aux professionnel·les des médias), en coopération
avec le CIO et l’Union Européenne de Radio-Télévision (UER).
34. Les indicateurs normalisés
devraient
être utilisés à l’échelle mondiale pour collecter des données permettant
de comparer les informations. La Division Sport du Conseil de l’Europe
collabore avec d’autres organismes collectant des données à l’échelle
mondiale dans le domaine de l’égalité dans le sport. Une formation
sur mesure est également indispensable pour garantir qu’à tous les
niveaux (national, sport amateur, etc.), il y ait davantage de sensibilisation
aux préjugés inconscients et à la nécessité de la parité hommes-femmes
dans le sport.

35. Le Conseil de l’Europe a également réalisé un travail important
sur la
protection et la promotion des droits humains des athlètes intersexes
et transgenres dans les compétitions sportives et prépare une boîte
à outils éducative à cette fin. Le Cadre du CIO sur l’équité, l’inclusion
et la non-discrimination sur la base de l’identité sexuelle et de
l’inter-sexuation constitue lui aussi une référence importante dans
ce domaine. Des mesures efficaces doivent être prises pour prévenir,
combattre et réprimer l’utilisation d’insultes discriminatoires
en référence à l’orientation sexuelle ou à l’identité de genre pendant
et en relation avec des événements sportifs.
36. Le 29 février 2024, j’ai eu l’occasion de discuter de la stratégie
du CIO en matière d’égalité des sexes, en ligne, avec Mme Charlotte Groppo,
responsable de l’égalité de genre, de la diversité et de l’inclusion
auprès du CIO. S’appuyant sur l’Agenda
olympique 2020, le CIO a fixé deux engagements clés pour aider à créer
un monde plus égalitaire entre les sexes grâce au sport en 2024: consolider
les Jeux olympiques, car ils constituent l’une des plateformes mondiales
les plus efficaces pour promouvoir l’égalité des sexes, l’inclusion et
la diversité (50 % de participation aux Jeux olympiques Paris 2024);
et soutenir l’accélération du passage à une représentation
significative des femmes dans les organes de gouvernance, de direction et de prise de décision au sein du Mouvement
olympique.
37. Le CIO poursuivra dans cette voie avec les Jeux olympiques
de Milan-Cortina 2026, qui seront les jeux d’hiver les plus équilibrés
à ce jour en matière de représentation hommes-femmes avec 47 % de
femmes en lice, puis avec les Jeux olympiques de Los Angeles 2028
où non seulement les quotas alloués sont paritaires, mais où tous
les sports d’équipe compteront au moins autant d’équipes féminines
que masculines. Par ailleurs, le CIO continuera de promouvoir l’égalité
de genre dans et à travers le sport au-delà du terrain, en aidant
les organisations locales à éliminer les obstacles qui empêchent
les femmes et les filles d’accéder au sport et en aidant le Mouvement
olympique à établir une représentation plus équilibrée au sein des
organes de décision.
38. À Copenhague, Mme Girard-Fabre
a présenté les résultats du projet «Tous·tes ensemble» et souligné la
nécessité de promouvoir la visibilité de la diversité dans tous
les événements sportifs, et de lutter contre la discrimination intersectionnelle.
Mme Ravand a quant à elle mis en avant
un programme de formation d’ambassadrices, appelé SELF, qui a déjà
formé 11 ambassadrices pour qu’elles deviennent des modèles pour
les jeunes filles dans le domaine du football.
39. Le cadre réglementaire de la FIFA comprend des règles contraignantes
portant sur les congés maternité, la grossesse, les droits à congé
en cas d’adoption, l’allaitement, la santé menstruelle et bien d’autres aspects
.
Pour la Coupe du monde féminine 2023 de la FIFA, la Fédération a
investi 499 millions de dollars, soit une augmentation de 218 %
par rapport à l’édition 2019. Elle a également uniformisé les conditions
et les services pour la Coupe du monde féminine de 2023 par rapport
aux normes en vigueur pour la Coupe du monde masculine de 2022 au
Qatar (nombre de délégué·es par équipe, déplacements internationaux
et nationaux, normes d’hébergement, camps de base et installations
des équipes, etc.). Il s’agit là d’un pas dans la bonne direction,
même s’il est encore possible d’aller plus loin. Le Président Infantino
a également souligné l’objectif d’atteindre l’égalité salariale
entre les hommes et les femmes avant les Coupes du monde 2026 et 2027,
appelant les diffuseurs et sponsors à offrir un soutien équitable,
un objectif que l’Assemblée devrait pleinement soutenir.

4. Conditions relatives aux droits humains et évaluation de la conformité dans le cadre de la procédure d’appel d’offres pour l’organisation de grandes compétitions
40. Une troisième audition s’est
tenue le 4 décembre 2024 à Paris, avec la participation de M. Niels Lindholm,
Responsable de la conformité et de la gestion des risques, World
Athletics; M. Stephen Cockburn, Directeur adjoint et responsable
de la justice économique et sociale à Amnesty International UK,
et représentant de Sport & Rights Alliance; et M. Alexandre Husting,
Président du Comité de Direction de l’APES, Conseil de l’Europe.
À cette audition s’est ajoutée, le 12 mars 2025 à Paris, la contribution de
la FIFA, représentée par M. Andreas Graf, conseiller en responsabilité
sociale, et Mme Annaliza Tsakona, responsable
senior des relations internationales et des affaires publiques.
41. Au paragraphe 20 de sa Résolution
2420 (2022) «La gouvernance
du football: les affaires et les valeurs», l’Assemblée appelait la FIFA et l’UEFA à revoir les
conditions que les pays candidats à l’organisation de grands événements
de football doivent respecter en matière de sauvegarde des droits
humains, et à prévoir, si cela n’est pas encore le cas:
«- une évaluation détaillée contextuelle
sur le respect des droits humains comme l’un des critères essentiels
pour la recevabilité de la candidature de tout pays; cette évaluation
devant se fonder sur des rapports actualisés des institutions internationales
compétentes et/ou des organisations non gouvernementales indépendantes
et reconnues pour leurs compétences dans le domaine; s’agissant des
États membres du Conseil de l’Europe, les rapports et les analyses
des organes de contrôle de l’Organisation sur le respect des normes
fondamentales des droits humains devraient être pris en considération;
- l’obligation de respecter des critères minimaux prédéterminés
concernant, par exemple, les droits des travailleurs (y compris
migrants), l’égalité entre les femmes et les hommes (notamment,
mais pas seulement, dans le sport), la protection des athlètes mineurs
contre les abus sexuels et toute forme de violence, la lutte contre
toute discrimination dans le sport et la sauvegarde des droits civils
et politiques fondamentaux, en particulier la liberté d’expression
– y compris la liberté des médias – et la liberté de réunion pacifique,
et cela tant en relation avec l’organisation des compétitions en
question, qu’au-delà de celles-ci;
- l’identification, dans le cadre de l’évaluation détaillée,
des mesures requises pour satisfaire aux critères minimaux susmentionnés,
avec un calendrier de mise en œuvre que le pays devrait respecter
afin que sa candidature puisse être prise en considération, et un
plan d’action en matière de droits humains que le pays doit s’engager
à respecter si sa candidature est finalement retenue; en ce qui
concerne les droits des travailleurs, le rôle de l’OIT devrait être
mis en valeur de manière systématique et les pays hôtes devraient
s’engager à coopérer avec l’OIT pour élaborer et mettre en œuvre
des réformes nécessaires;
- le caractère obligatoire des engagements en question
non seulement par les associations nationales, mais aussi – et principalement
– par les gouvernements des pays hôtes, qui doivent être garants
du respect des droits humains par tous les organismes publics ainsi
que par tout opérateur privé relevant de leur juridiction, impliqués
dans l’organisation de l’événement en question;
- la mise en place de mécanismes efficaces de contrôle
du respect des engagements pris, y compris des procédures spécifiques
pour l’évaluation régulière, par des acteurs externes indépendants,
des mesures prises pour prévenir les risques relatifs aux droits
humains concernant l’organisation de l’événement en question, ainsi
que des mécanismes de dialogue direct avec les autorités publiques
des pays hôtes pour analyser et résoudre les problèmes éventuels;
- l’accessibilité dans les pays hôtes de voies de recours
effectives, avec des organes indépendants compétents pour enquêter
sur toute violation des droits humains, la sanctionner et en ordonner
la réparation;
- des sanctions adéquates à l’encontre des pays hôtes
et de leurs associations nationales en cas de violation des engagements
pris ou de non-exécution des mesures de suivi indiquées par les
organes de contrôle, qui doivent comprendre la décision de confier
à un autre pays l’organisation de la compétition en question».
42. Le présent rapport s’inscrit également dans le prolongement
de cette résolution. Il repose sur les propositions qu’elle comporte,
vise à promouvoir des conditions strictes en matière de droits humains
pour toutes les grandes manifestations sportives, et pas seulement
pour le football.
43. La Résolution 2420
(2022) formule des recommandations pratiques détaillées à l’intention
de la FIFA et de l’UEFA, qui devraient être élargies à d’autres
grandes organisations sportives afin de veiller au respect des droits
humains ainsi que des obligations sociales et environnementales
des pays hôtes. L’objectif de la résolution et du présent rapport
est conforme aux principes de la Charte européenne du sport révisée
en 2021, qui fait référence à la nécessité pour un pays de respecter
les droits humains lorsqu’il se porte candidat à l’organisation
d’événements sportifs, mais aussi tout au long du cycle de vie de
ces événements.
44. Depuis 2017, la FIFA exige, publie et met en œuvre des engagements
en matière de respect des droits humains ainsi que des plans d’action
au niveau des processus de candidature et de l’organisation de ses grandes
compétitions
.
L'UEFA occupe une position de leader dans le domaine des grands
événements, avec des pratiques exemplaires récentes dans ce domaine,
notamment la Déclaration des droits humains en vue de l’UEFA EURO
2024 signée en 2023 entre l'UEFA et la Fédération allemande de football
(DFB), dans laquelle l'UEFA et les autres parties à la déclaration
s'engagent à respecter et à protéger les droits humains en appliquant
un ensemble complet de mesures visant à garantir le bien-être et
la sécurité de tous les participant·es
. S'appuyant sur la coopération avec
les principales parties prenantes, l'UEFA EURO 2025 féminin, qui
se déroulera cet été en Suisse, sera à nouveau marqué par une déclaration
officielle sur les droits humains, signée par plusieurs instances,
avec la participation officielle du Conseil de l'Europe en tant
que membre du Conseil consultatif des droits humains de l'UEFA EURO
2025 féminin, aux côtés de représentant·es de la société civile,
de spécialistes en matière de diversité et d'inclusion, d'autorités
publiques, d'associations nationales et d'anciens joueurs et joueuses,
afin de garantir un large éventail de perspectives et une approche
globale de la protection des droits humains.


45. Des progrès ont été accomplis dans l’intégration des obligations
à respecter en matière de droits humains dans les règlements de
candidature et les accords relatifs à l’organisation de compétitions
telles que la Coupe du monde de la FIFA, les Jeux olympiques, l’EURO
de l’UEFA et les compétitions internationales organisées par World
Athletics, autant de points qui ont également été discutés lors
de l’audition de décembre 2024. Cependant, selon les organisations
de défense des droits humains, le manque de clarté, d’applicabilité
et de transparence de ces mesures persiste. De plus, les politiques
en matière de droits humains sont actuellement limitées à quelques
grandes organisations sportives, et de nombreux événements sportifs sont
encore attribués sans critères rigoureux en la matière dans leurs
processus de candidature. Il est donc nécessaire de renforcer la
transparence dans la prise de décision et le suivi du respect des
exigences relatives aux droits humains, car l’amélioration des conditions
posées dans les appels d’offres est essentielle pour garantir que
les grandes compétitions sportives respectent les valeurs qu’elles
prétendent représenter.
46. L’absence de force exécutoire demeure un problème majeur.
Dans la plupart des cas, les titulaires de droits individuels ne
peuvent pas invoquer directement les dispositions relatives aux
obligations en matière de droits humains car ils ne sont pas signataires
des accords découlant de l’application des règlements encadrant les
procédures de candidature et d’organisation des compétitions. Seuls
les organismes sportifs internationaux, en leur qualité de propriétaires
des droits, ainsi que les entités hôtes, disposent de la faculté de
contester l’application de ces clauses et d’engager une action en
cas de manquement contractuel. Dès lors, ces dispositions n’offrent
pas réellement aux personnes victimes d’atteintes aux droits humains
dans le cadre des grands événements sportifs de voies supplémentaires
pour faire valoir leurs droits et obtenir réparation
. La
FIFA impose aux pays hôtes de s’assurer de l’accès à des voies de
recours effectives au sein de leur juridiction, conformément aux
obligations qui leur incombent en vertu du droit international,
et a mis en place des mécanismes de réclamation distincts, compte
tenu de sa responsabilité en vertu des Principes directeurs des
Nations Unies
.


47. Les récents processus de candidature à l’organisation de certains
grands événements sportifs internationaux, notamment la Coupe du
monde 2034 de la FIFA pour laquelle l’Arabie saoudite, seule candidate,
s’est vu officiellement attribuer l’organisation le 11 décembre 2024,
ont suscité une vive controverse
. Concernant les processus d’attribution
des Coupes du monde de la FIFA 2030 et 2034, les évaluations indépendantes
en matière de droits humains réalisées par Amnesty International
et Sports & Rights Alliance ont mis en évidence des risques
majeurs pour les deux compétitions, notamment en ce qui concerne
le maintien de l’ordre, les discriminations, les droits des travailleurs
et travailleuses et les expulsions forcées
. Par ailleurs, les stratégies en
matière de droits humains soumises par les entités hôtes ont été jugées
insuffisantes à leurs yeux, en raison d’un manque d’engagements
concrets et d’une consultation insuffisante des parties prenantes.


48. S’agissant de l’Arabie saoudite, la candidature de ce pays
a été considérée comme présentant de graves risques, notamment l’exploitation
de travailleurs et travailleuses migrants, la discrimination à l’égard des
supporters, les expulsions forcées et la répression de journalistes
et de militant·es. Amnesty a recommandé d’interrompre le processus
de candidature à l’organisation de l’édition 2034 de la Coupe du monde
en raison de l’inadéquation de la stratégie en matière de droits
humains proposée par ce pays, qui ne répond pas aux risques majeurs.
L’évaluation de la FIFA a été considérée comme une «singulière tentative
de blanchiment» et la Fédération a été accusée ne pas tenir compte
des problèmes avérés pour justifier un résultat décidé à l’avance
.

49. Le 3 décembre 2024, la présidente de la commission de la culture,
de la science, de l'éducation et des médias, Mme Helleland,
a adressé une lettre au président Infantino exhortant la FIFA à
établir des règles claires et applicables pour l’Arabie saoudite,
ainsi que pour tout autre pays hôte. Elle a également invité des représentants
de la FIFA à participer à une rencontre
.

50. Dans sa réponse du 10 janvier 2025, le secrétaire général
de la FIFA, Mattias Grafström, a réaffirmé que la Fédération avait
tenu compte des droits humains ainsi que des principes de transparence
et d’inclusivité pour répondre à ces préoccupations. Selon lui,
le processus de candidature a été équitable, transparent et conforme
aux normes internationales en matière de droits humains, et l’accent
a été mis sur les progrès potentiels, sur la base de critères précis,
plutôt que sur l’exclusion. Depuis 2017, la FIFA a intégré des exigences
en matière de droits humains dans ses documents relatifs aux procédures
de candidature et d’organisation des manifestations, demandant aux
pays candidats de fournir une évaluation contextuelle sur les droits
humains réalisée par une entité compétente et indépendante, une
stratégie concernant le respect des droits humains s’appuyant sur
ladite évaluation ainsi que plusieurs garanties et engagements dans
ce domaine de la part des gouvernements des pays hôtes. Il s’agit
notamment de conseils techniques donnés par le Bureau des droits
de l’homme des Nations Unies.
51. La candidature de l’Arabie saoudite comprenait des engagements
en matière de droits du travail, de diversité, de sécurité et de
liberté d’expression, comme indiqué dans la stratégie en matière
de droits humains élaborée à l’occasion de la Coupe du monde de
la FIFA 2034 de juillet 2024
. La FIFA estime que ces engagements
constituent une base solide pour mettre en œuvre des programmes
visant à faire face aux risques que la compétition présente pour
les droits humains. Elle considère également que ce tournoi peut servir
de catalyseur à l’adoption de réformes de plus grande envergure
dans le pays hôte.

52. C’est également sur cet aspect que se sont concentrées les
discussions, lors de la rencontre à Zurich, le 21 mai 2025, d’une
délégation de l’Assemblée avec la direction et des expert·es de
la FIFA. Si l’adoption de critères en matière de droits humains
dans les règlements de candidature reste essentielle, de telles
exigences deviennent inopérantes dès lors que les organisations
sportives font passer d’autres objectifs avant le respect de ces
droits. Les instances dirigeantes du sport international devraient
donc veiller à faire des considérations relatives aux droits humains
un facteur crucial lors de l’attribution des droits d’organisation
de leur compétition et dûment user de leur influence auprès des
pays qui se portent candidats. La délégation a demandé à la FIFA de
clarifier ses évaluations des risques en matière de droits humains
pour l’Arabie saoudite, en insistant sur la nécessité d’un suivi
indépendant, de protections concrètes pour les groupes vulnérables
lors de la Coupe du monde 2034, et de conséquences claires en cas
de non-respect – des aspects qui restent incertains à ce stade.
53. La commission de la culture, de la science, de l'éducation
et des médias apprécie grandement l’ouverture au dialogue dont fait
preuve la FIFA, ainsi que sa participation régulière aux auditions
et aux discussions bilatérales. L’objectif de mon rapport, ainsi
que celui du dialogue mené par l’Assemblée avec les fédérations
sportives en général, n’est pas de les critiquer, mais de contribuer
à promouvoir le renforcement de ces exigences et de ces processus.
54. World Athletics, qui a aussi fait preuve d’un engagement sans
faille et d’une grande ouverture au dialogue, a renforcé son engagement
en faveur des droits humains en les intégrant dans la gouvernance,
les politiques et les règlements des manifestations. Son groupe
de travail sur les droits humains a recentré son attention sur l’impact
des décisions sur les personnes, sous la supervision du comité des
risques. Une politique des droits humains, publiée en 2024, garantit
l’équité et la justice dans les décisions importantes, y compris
le parrainage. Les règles d’éligibilité des athlètes transgenres
et DDS (qui présentent des différences de développement sexuel)
dans les compétitions féminines d’élite ont été élaborées en tenant
compte des consultations avec les parties prenantes, tandis que
la participation au stade amateur reste ouverte à tous et toutes.
L’évaluation des droits humains fait désormais partie intégrante
des candidatures à l’organisation d’événements, de la sélection
des officiels et de l’évaluation des conditions de travail.
55. Les mesures de sauvegarde de World Athletics comprennent des
protocoles contre les comportements abusifs et des protections contre
le harcèlement en ligne. Les initiatives en matière d’égalité de
genre ont permis d’accroître la présence de femmes à la tête des
fédérations d’athlétisme et d’atteindre la parité femmes-hommes
au sein des conseils. Les programmes de participation des jeunes
ont touché 500 000 enfants dans le monde, y compris dans les zones
de conflit. Les athlètes peuvent exprimer leurs opinions politiques
dans le respect d’autrui. Les recommandations incluent la promotion
du dialogue interrégional sur le sport et les droits humains, en
particulier dans les marchés émergents, et le soutien aux petites
fédérations par le biais de forums collaboratifs. World Athletics
reste déterminé à assurer la sécurité des événements et à poursuivre
son engagement auprès du Conseil de l’Europe.
56. Il convient de noter, entre autres exemples, le mécanisme
de règlement des griefs ouvert à tous et toutes mis à disposition
par le CIO pendant les Jeux olympiques. La Hotline Intégrité
et Conformité permet aux participant·es de signaler des cas de manipulation
de compétitions, d’abus ou de harcèlement, d’infraction au Code
d’éthique du CIO et d’autres problèmes liés à l’intégrité, ainsi
que des violations de la liberté de la presse. La ligne d’assistance
est complétée par le Cadre
du CIO pour protéger les athlètes et les autres participants du harcèlement et des abus dans le sport pendant la
période des Jeux. Le processus de candidature précoce du CIO pour
les Jeux olympiques de 2036, qui inclut des candidatures à haut
risque, nécessite aussi une plus grande transparence et des consultations
plus poussées.
57. Par ailleurs, le contrôle de la communauté internationale
lié à l’organisation d’événements sportifs de grande envergure dans
des zones à haut risque peut inciter les gouvernements des pays
hôtes à engager des réformes. Cela s’est notamment produit pour
la Coupe du monde de la FIFA 2022 au Qatar, où les conditions de
travail se sont améliorées (salaire minimum, amélioration de la
législation en matière de santé et de sécurité) avant la compétition,
sous la pression de divers acteurs, notamment les médias, les syndicats,
les associations de football et les sponsors.
58. À titre d’exemple, lorsque la candidature du Qatar a été évaluée
en 2010, ni les droits humains ni les droits des travailleurs et
travailleuses n’avaient été pris en compte et la FIFA a intégré
en 2017 des obligations précises en matière de respect des droits
humains. Cela étant, le Qatar s’est engagé à protéger ces droits
dans le cadre de son programme de protection sociale des travailleurs
et travailleuses mis en place après 2013
, ainsi qu’au titre de la stratégie
conjointe de développement durable avec la FIFA. Dans les rapports précédents,
tout en soulignant les défis posés au Qatar en matière de droits
humains, l’Assemblée a reconnu le travail effectué par la FIFA et
ce pays en vue de la compétition, et a notamment déclaré que «les
efforts de la FIFA, ainsi que l’excellent travail de l’OIT [Organisation
internationale du Travail], du mouvement syndical international
et d’autres organisations actives au Qatar, méritent d’être salués»
. En ce qui concerne la candidature
de l’Arabie Saoudite à l’organisation de la Coupe du Monde de la
FIFA 2034, l’expérience passée met en exergue la nécessité d’entreprendre
rapidement des réformes en s’inspirant des enseignements tirés du
Qatar.


59. Il est urgent de renforcer les mécanismes indépendants de
surveillance et d’évaluation du respect des droits humains lors
des grands événements sportifs. Cela peut se faire de deux manières:
définir des critères précis et mettre en place un mécanisme d’évaluation,
ou inciter les organisateurs à élaborer et adopter leurs propres
critères. Même les systèmes consistant à montrer du doigt et dénoncer,
qui n’ont pas de conséquences juridiques mais exercent une pression
morale en obligeant les parties prenantes à respecter des engagements
convenus, ont prouvé leur efficacité par le passé.
60. Bien que le Conseil de l’Europe ait élaboré des lignes directrices
et des recommandations sur la gouvernance du sport, seuls trois
de ces instruments ont une portée juridiquement contraignante et
incluent des mécanismes de suivi rigoureux, tels que des visites
d’évaluation et des comités de suivi. Il s’agit des conventions
qui portent, respectivement, sur la lutte contre le dopage, sur
la sécurité et les services lors des événements sportifs, ainsi
que sur la manipulation des compétitions sportives
. Le manque de mécanismes de suivi
solides et les limites évidentes de ceux qui existent sont des problèmes
préoccupants. Pour réaliser une évaluation systématique et effective
de la conformité, il existe un certain nombre d’options disponibles, notamment
l’auto-évaluation par les États membres ou des systèmes plus formels
assortis de règles définies, de critères et d’un suivi actif.

61. S’agissant de la plateforme APES du Conseil de l’Europe, les
organisations sportives participent à la rédaction de ses recommandations,
mais leur mise en œuvre repose principalement sur la persuasion
morale. Les parties prenantes acceptent des principes tels que la
non-discrimination, la bonne gouvernance et la santé des athlètes
au cours du processus de rédaction, mais ces documents n’établissent
aucune responsabilité formelle dans ces domaines, les principaux
destinataires étant les États membres. Tel que discuté lors de l’audition
tenue en décembre 2024, il pourrait être utile de recourir à l’approche
de la dénonciation publique pour rappeler aux parties prenantes
leur implication dans l’élaboration de ces documents et les responsabiliser publiquement.
Il s’agit là du niveau maximal de suivi que l’on puisse assurer
pour les documents politiques non contraignants.
62. Tout en reconnaissant le dialogue ouvert et régulier entretenu
avec la FIFA, qui s’implique également très activement dans les
secteurs conventionnels du Conseil de l’Europe, ainsi que dans les
domaines de la protection et de l’égalité entre les femmes et les
hommes, la commission de la culture, de la science, de l'éducation
et des médias estime que l’adhésion de la FIFA à l’APES, comme c’est
le cas pour l’UEFA et d’autres organisations sportives, contribuerait
à l’amélioration des relations bilatérales.
63. L’analyse de la situation actuelle met également en évidence
les limites de l’influence du Conseil de l’Europe au-delà de l’Europe.
Si les membres européens souscrivent généralement aux politiques
d’égalité de genre, aux règles relatives à la non-discrimination
et au principe de la transparence, les contacts avec les organisations
sportives non européennes sont rares, voire inexistants, ce qui
restreint la capacité à promouvoir l’adoption de normes similaires
à l’échelle mondiale.
64. Dans l’optique des grandes compétitions sportives, notamment
la Coupe du monde en Arabie saoudite, l’objectif devrait être de
renforcer la collaboration avec les pays hôtes afin d’apporter des
changements positifs, d’assurer une protection efficace de tous
les travailleurs, travailleuses et participant·es concernés ou impliqués dans
les compétitions, et de promouvoir des réformes plus vastes en matière
de droits humains. J’estime que le Conseil de l’Europe devrait jouer
un rôle à cet égard, en coopération avec l’Union européenne et d’autres agences
des Nations Unies.
5. Conclusions et recommandations
65. Les auditions organisées par
la commission de la culture, de la science, de l'éducation et des
médias ont montré que la gouvernance du sport devait se fonder sur
les valeurs de la démocratie, des droits humains et de la primauté
du droit, ainsi que sur les valeurs du vivre ensemble, telles que
la sécurité, la tolérance, la dignité, le respect, le fair-play
et la solidarité.
66. Pour que le sport défende et promeuve ces valeurs, les dirigeant·es,
gestionnaires et responsables des organisations sportives, ainsi
que les athlètes, entraîneur·es, agent·es, arbitres, sponsors et
partenaires commerciaux, entre autres, devraient collaborer avec
les gouvernements nationaux et les organisations internationales
afin de faire respecter les droits humains et de se montrer à la
hauteur des normes de nos sociétés démocratiques.
67. Le présent rapport met en évidence certaines des menaces qui
pèsent sur le sport ainsi que les violations flagrantes des droits
humains, de la bonne gouvernance et de l’intégrité, à savoir la
violence et le racisme, le harcèlement sexuel et la discrimination
de genre, l’exploitation humaine ou le trafic de jeunes athlètes,
mais aussi les liens douteux entre le sport et les plus hauts niveaux
de la hiérarchie politique, le dopage, les paris illégaux, la manipulation
des compétitions sportives
,
la corruption, les pots-de-vin, l’achat de votes lors des candidatures
à l’organisation de grands événements sportifs, les pratiques financières abusives,
les cas de fraude fiscale, le blanchiment de capitaux, et autres.

68. Le monde du sport a pris des mesures importantes pour lutter
contre ces fléaux, prévenir les violations des droits humains et
lutter contre les discriminations afin de parvenir à une plus grande
égalité. Il reste cependant beaucoup à accomplir pour que les droits
humains, la sécurité et l’inclusivité deviennent des priorités dans
le sport, notamment dans le cadre des grandes compétitions.
69. Enfin, je souhaite également faire référence aux conclusions de la conférence
parlementaire d’Athènes. Préparées par la rapporteure de la conférence,
Mme Elda Moreno, elles incluent quatre
grands appels à l’action accompagnés de recommandations concrètes,
qui s’avèrent également pertinentes pour mon rapport et essentielles
à la résolution de l’Assemblée, dans quatre domaines stratégiques,
à savoir:
- intégrer les droits humains et les principes de bonne gouvernance dans le sport;
- investir dans la prévention et la protection;
- renforcer l’obligation de rendre des comptes;
- établir une coopération multi-parties prenantes efficace.
70. L’Assemblée devrait reconnaître le potentiel immense du sport
pour promouvoir l’inclusion, l’égalité et la dignité humaine, et
souligner la nécessité d’intégrer de toute urgence la protection
des droits humains dans toutes les activités sportives, en particulier
dans le cadre des grandes manifestations internationales.
71. Tout en saluant les initiatives prises par des organisations
comme le CIO, la FIFA et World Athletics pour renforcer la protection
des droits humains et les normes en la matière, je n’en demeure
pas moins profondément préoccupé par les informations persistantes
faisant état d’abus, de discrimination et de violations systématiques
des droits dans le sport. Les mesures de protection doivent être
contraignantes, faire l’objet d’un suivi indépendant et tenir compte
des traumatismes subis. Les cadres nationaux devraient inscrire dans
la loi la protection des droits humains dans le sport, et prévoir
la mise en place d’organismes indépendants chargés de la sécurité
dans le sport, qui soutiennent les victimes et encouragent les activités d’éducation
et de sensibilisation.
72. Je tiens également à souligner les inégalités persistantes
auxquelles sont confrontés les femmes et les groupes marginalisés,
qui nécessitent instamment l’adoption de stratégies concrètes et
mesurables visant à promouvoir la diversité et l’égalité de genre
tant sur le terrain qu’en dehors. J’appelle à combattre de manière rigoureuse
les pratiques discriminatoires et à une plus grande mobilisation
des médias pour lutter contre les stéréotypes.
73. L’attribution de grandes manifestations sportives à des pays
qui ne sont pas réputés pour leur respect des droits humains reste
une préoccupation majeure. L’Assemblée devrait exiger que les processus
de candidature et d’organisation des compétitions soient soumis
à des conditions contraignantes en matière de droits humains, prévoyant
un contrôle indépendant et l’accès des victimes d’abus à des voies
de recours. Des initiatives telles que la Déclaration des droits
humains pour l’EURO 2024 et l’EURO féminin 2025 de l’UEFA sont à
saluer, mais des normes plus générales et exécutoires sont jugées
indispensables. Le Conseil de l’Europe, en coopération avec l’Union
européenne et d’autres agences des Nations Unies, devrait jouer
un rôle actif et renforcer sa collaboration avec les pays hôtes,
y compris ceux qui ne sont pas membres de l’Organisation, afin d’induire
des changements positifs, d’assurer une protection efficace de tous
les travailleurs, travailleuses et participant·es concernés ou impliqués
dans les compétitions, et de promouvoir des réformes plus vastes
en matière de droits humains.
74. Enfin, l’Assemblée devrait recommander une coopération accrue
entre les différentes parties prenantes, en particulier dans le
cadre de l’Alliance parlementaire pour la bonne gouvernance et l’intégrité
dans le sport, et appeler instamment à un changement de paradigme
dans la gouvernance du sport afin de garantir le respect des principes
de transparence, de responsabilité et de dignité humaine. La commission
de la culture, de la science, de l'éducation et des médias devrait
continuer à assurer une surveillance active afin de veiller à ce que
le sport devienne un véritable vecteur de promotion des droits humains
pour tous et toutes.