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Rapport | Doc. 16252 | 15 septembre 2025

Garantir la liberté de déplacement des membres de l’Assemblée parlementaire dans l’exercice de leurs fonctions

Commission du Règlement, de l’éthique et des immunités

Rapporteur : M. Sergiy VLASENKO, Ukraine, PPE/DC

Origine - Renvoi en commission: Doc.15809, Renvoi 4767 du 9 octobre 2023. 2025 - Quatrième partie de session

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 5 septembre
2025.

(open)
1. La participation des membres de l’Assemblée parlementaire à ses travaux est un droit et une responsabilité. Le bon fonctionnement de l’Assemblée dépend de l’engagement et de la participation de ses membres. Il incombe aux États membres, et en particulier à leurs parlements nationaux, de faciliter la participation des membres de l’Assemblée à ses activités, conformément à leurs obligations internationales.
2. Le Statut du Conseil de l’Europe (STE n°1) et l’Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l’Europe (STE n°2) prévoient des obligations internationales claires et juridiquement contraignantes selon lesquelles il est interdit d’imposer des restrictions d’ordre administratif ou autre au libre déplacement des membres en mission officielle pour l’Assemblée. Il subsiste cependant des obstacles, d'où la nécessité de renforcer la compréhension par les autorités nationales des exigences juridiques et des procédures appropriées à suivre.
3. Les parlements nationaux devraient faciliter les déplacements et la participation des membres de l’Assemblée dans l’exercice de leurs fonctions. Les parlements nationaux doivent s’efforcer d’éliminer les mécanismes ou les pratiques qui entravent le droit des membres de l’Assemblée à participer à ses réunions par le biais de pouvoirs discrétionnaires ou d’ingérences des autorités parlementaires ou politiques. De tels contrôles politiques ou administratifs, ainsi que les retards dans l’octroi des autorisations, ne sont pas appropriés dans une démocratie pluraliste saine et fonctionnelle. La délivrance de ces autorisations ne devrait en aucun cas être laissée à l’appréciation discrétionnaire d’une autorité pour les membres ayant le droit d’assister à une réunion, et toute autorisation devrait être accordée suffisamment à l’avance, la meilleure pratique consistant à approuver la participation à l’ensemble des réunions prévisibles de l’Assemblée pour toute la durée de la session. Par ailleurs, des considérations budgétaires ne sauraient justifier le refus d’autoriser le déplacement des membres appelés à jouer un rôle dans les réunions de l’Assemblée.
4. Au minimum, cette participation devrait être garantie et financée par le parlement national:
4.1. en ce qui concerne les déplacements pour se rendre aux sessions de l’Assemblée, pour tous les membres de la délégation nationale (représentant·es et suppléant·es);
4.2. en ce qui concerne les déplacements pour se rendre aux réunions des commissions:
4.2.1. pour les membres titulaires d’une commission;
4.2.2. pour les membres remplaçants d’une commission, lorsqu’ils remplacent un membre titulaire, ou lorsque le membre remplaçant est rapporteur·e et que l’examen de son rapport figure à l’ordre du jour de la réunion de la commission, ou que le membre remplaçant est candidat·e à la désignation comme rapporteur·e;
4.3. en ce qui concerne les déplacements pour se rendre aux réunions de la Commission permanente, du Bureau ou du Comité présidentiel, lorsque la présence du membre est requise du fait de ses obligations envers son groupe politique, sa délégation nationale, sa commission, ou en raison de l’examen d’un rapport;
4.4. en ce qui concerne l’observation des élections et d’autres commissions ad hoc.
5. En cas de conflit d’obligations, il devrait appartenir au membre de l’Assemblée concerné de déterminer la manière de concilier les obligations contradictoires découlant de son statut de membre de l’Assemblée, de son mandat au sein de son parlement national, ou de toute autre considération pertinente le concernant.
6. S’agissant de la composition des délégations nationales, la décision de retirer le nom d’un membre de la délégation nationale, alors même que ce membre a été proposé par son parti ou son groupe politique national conformément au principe d’une représentation équitable des groupes ou partis politiques, n’est pas sans conséquences, dans la mesure où elle prive le membre concerné de la possibilité de participer aux travaux de l’Assemblée et porte atteinte à l’esprit même de la représentation équitable. En principe, il appartient aux groupes politiques au sein des parlements nationaux de sélectionner leurs membres dans la délégation nationale, sans aucune ingérence.
7. L’Assemblée constate que l’existence de certains obstacles au libre déplacement de ses membres nécessite de clarifier l’application et le fonctionnement des dispositions relatives au régime des immunités parlementaires au sein de l’Assemblée, afin que celles-ci soient plus faciles à suivre pour les autorités nationales. En conséquence, l’Assemblée modifie l’article 73 de son Règlement ainsi que les Lignes directrices sur la portée des immunités parlementaires dont bénéficient les membres de l’Assemblée parlementaire (annexe III du Règlement), reproduits respectivement aux articles 13 et 14 à 19 de la présente résolution, notamment afin de clarifier les points suivants:
7.1. les catégories de déplacements considérés comme relevant de l’exercice des fonctions d’un membre et couverts par l’immunité parlementaire;
7.2. le traitement des restrictions de déplacement imposées dans le cadre d’une procédure pénale et qui entravent la capacité d’un membre à exercer ses fonctions (telles que l’interdiction de voyager, l’assignation à résidence, le couvre-feu ou la détention);
7.3. l’interdépendance entre certaines de ces immunités;
7.4. les mesures pratiques que doivent prendre les autorités parlementaires, judiciaires, d’enquête et de poursuite lorsqu’elles sont saisies d’une affaire soulevant la question des immunités d’un membre de l’Assemblée.
8. L’Assemblée regrette que, dans certains cas, les autorités nationales ne respectent pas les immunités de ses membres, les empêchant ainsi d’exercer leurs fonctions. L’Assemblée décide d’affirmer avec fermeté ces immunités et de les défendre dans les cas où elles ne sont pas dûment respectées. Elle entend soutenir le Président de l’Assemblée dans ses prérogatives, et l’encourage à l’informer de tout incident de ce type afin que les mesures appropriées puissent être prises.
9. L’Assemblée rappelle que l’inviolabilité parlementaire concernant les opinions exprimées ou les votes émis au sein des parlements nationaux et des assemblées interparlementaires constitue un principe démocratique fondamental commun aux États démocratiques et réaffirmé à l’article 14 de l’Accord général sur les privilèges et immunités et à l’article 40 du Statut du Conseil de l’Europe.
10. L’Assemblée condamne la «liste noire» établie par l’Azerbaïdjan, sur laquelle figureraient au moins 77 membres de l’Assemblée issus d’au moins 28 États membres du Conseil de l’Europe, y compris le Président de l’Assemblée. Ces membres ont été inscrits sur cette liste en raison des opinions qu’ils ont exprimées ou des votes qu’ils ont émis à l’Assemblée et font depuis l’objet de «sanctions» telles qu’une interdiction d’entrée sur le territoire azerbaïdjanais. L’Assemblée exhorte les autorités azerbaïdjanaises à respecter de bonne foi les obligations incombant à l’Azerbaïdjan en tant que membre du Conseil de l’Europe et à lever immédiatement toutes les «sanctions» imposées à ces membres en raison d’activités protégées telles qu’un vote ou une opinion exprimée au sein de l’Assemblée.
11. L’Assemblée est préoccupée par les poursuites pénales, motivées par des considérations politiques, engagées par la Fédération de Russie à l’encontre de plusieurs de ses membres. Elle craint que la Fédération de Russie ne cherche à utiliser indûment des mécanismes de coopération internationale, tels qu’Interpol, dans le but de persécuter des parlementaires étrangers et des membres de l’Assemblée. L’Assemblée rappelle que ses membres bénéficient d’immunités parlementaires, notamment l’immunité d’arrestation, de détention ou de poursuite. Aucun mandat d’arrêt, émis par Interpol ou tout autre organisme, ne devrait être délivré ou exécuté dans le cadre de ces procédures pénales à motivation hautement politique, compte tenu de la nature politique de ces affaires et des immunités dont bénéficient les membres de l’Assemblée. L’Assemblée invite Interpol à prendre acte de sa position.
12. L’Assemblée invite tous les États membres du Conseil de l’Europe:
12.1. à l’informer de leurs dispositions nationales relatives à l’immunité parlementaire;
12.2. à fournir aux autorités judiciaires, d’enquête et de poursuite des orientations claires et une formation appropriée concernant les exigences de l’Accord général sur les privilèges et immunités, en s’appuyant sur la version révisée des «Lignes directrices sur la portée des immunités parlementaires dont bénéficient les membres de l’Assemblée parlementaire», afin que ces autorités soient informées des lignes directrices et des mesures à adopter lorsqu’elles sont saisies d’une affaire impliquant les immunités des membres de l’Assemblée;
12.3. à revoir leurs obligations en matière de visa pour les membres de l’Assemblée se déplaçant dans le cadre des activités de l’Assemblée, afin de veiller à ce que la durée et la complexité des formalités; le coût, ainsi que le délai de délivrance du visa soient réduits au minimum nécessaire, conformément à l’article 13 de l’Accord général sur les privilèges et immunités, qui interdit toute «restriction d’ordre administratif ou autre» susceptible d’entraver le libre déplacement des membres de l’Assemblée;
12.4. à veiller à ce que leurs services de police aux frontières et de douane soient correctement informés sur le Conseil de l’Europe, l’Accord général sur les privilèges et immunités et les laissez-passer du Conseil de l’Europe. L’Assemblée note que l’ordre du jour d’une réunion de commission contient la convocation des membres de cette commission. Cette convocation devrait suffire à prouver que les dispositions de l’Accord général sur les privilèges et immunités s’appliquent aux membres qui se déplacent pour assister à cette réunion.

Extrait du Règlement de l’Assemblée parlementaire

13. Article 73 – Levée de l’immunité des représentants et suppléants
13.1. (73.1.) Les membres de l’Assemblée jouissent des privilèges et immunités prévus par l’Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l’Europe (du 2 septembre 1949) et son Protocole additionnel (du 6 novembre 1952). Ces immunités sont accordées pour conserver l’intégrité de l’Assemblée et pour assurer l’indépendance de ses membres dans l’accomplissement de leur mandat européen.
13.2. (73.2.) Toute demande adressée au Président par une autorité compétente d’un État membre et tendant à la levée de l’immunité d’un représentant ou suppléant de l’Assemblée est communiquée en séance plénière ou en réunion de la Commission permanente et renvoyée à la commission du Règlement, de l’éthique et des immunités («la commission du Règlement»).
13.3. (73.3.) La commission du Règlement examine sans délai la demande. Elle peut émettre un avis sur la compétence de l’autorité ayant présenté la demande et sur la recevabilité formelle de celle-ci. Elle ne procède à aucun examen du fond de l’affaire. En particulier, la commission du Règlement ne se prononce en aucun cas sur la culpabilité ou la non-culpabilité du parlementaire, ni sur l’opportunité ou non de le poursuivre au pénal pour les opinions ou actes qui lui sont imputés. Elle donne, dans les meilleurs délais, au membre visé par la demande ou à un autre membre de l’Assemblée le représentant, la possibilité d’être entendu. Le membre visé peut soumettre tout document qu’il juge pertinent. La commission du Règlement peut demander aux autorités nationales compétentes de lui fournir toutes informations et précisions qu’elle estime nécessaires pour déterminer s’il convient de lever l’immunité ou non. Le rapport de la commission du Règlement conclut à un projet de résolution tendant à l’acceptation ou au rejet de la demande de levée de l’immunité. Le rapport de la commission conclut à un projet de résolution tendant à l’acceptation ou au rejet de la demande de levée de l’immunité. Aucun amendement à cette décision ne sera accepté.
13.4. (73.4.) Le rapport est inscrit en tête de l’ordre du jour du premier jour de séance de l’Assemblée suivant son dépôt. La discussion ne porte que sur les raisons qui militent pour ou contre la levée de l’immunité. Lorsque la demande de levée de l’immunité porte sur plusieurs chefs d’accusation, chacun d’eux peut faire l’objet d’une décision distincte.
13.5. (73.5.) Le Président communique immédiatement la décision de l’Assemblée à l’autorité qui a présenté la demande.
13.6. (73.6.) Dans le cas où un membre de l’Assemblée est arrêté ou privé de sa liberté de déplacement en violation supposée de ses privilèges et immunités, le Président de l’Assemblée peut prendre une initiative visant à confirmer les privilèges et immunités du membre, le cas échéant après consultation des organes compétents de l’Assemblée. Le Président de l’Assemblée peut demander aux autorités nationales compétentes de fournir toutes informations ou précisions jugées nécessaires. Un membre ou un ancien membre peut adresser au Président de l’Assemblée une demande en vue de défendre son immunité et ses privilèges. À la demande du Président, le Bureau peut, sous réserve de ratification par l’Assemblée, renvoyer la question à la commission compétente.
13.7. (73.7.) Lorsqu’ils examinent une demande de levée ou de défense de l’immunité reconnue au titre du Conseil de l’Europe à un membre de l’Assemblée, les organes compétents de l’Assemblée interprètent comme suit l’Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l’Europe:
13.7.1. (73.7.a.) Les membres de l’Assemblée (leurs représentants et leurs suppléants) sont protégés contre toutes mesures de détention, toute poursuite judiciaire et toute privation de leur liberté de déplacement lorsqu’ils exercent leurs fonctions en qualité de membres de l’Assemblée ou sont en mission officielle pour l’Assemblée, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur de leur pays. S’ils n’exercent pas d’activités au sens ainsi défini et ne sont pas en mission pour l’Assemblée, leur régime d’immunité nationale s’applique dans leur pays.
13.7.2. (73.7.b.) L’expression «privation de leur liberté de déplacement» inclut les mesures qui prévoient des restrictions administratives, juridiques, judiciaires ou autres au libre déplacement d’un membre de l’Assemblée et comprend la détention, l’assignation à résidence, le couvre-feu, la remise du passeport et l’interdiction de voyager (qu’il s’agisse d’une interdiction absolue de voyager ou de l’obligation d’obtenir une dérogation à l’interdiction auprès d’une autorité judiciaire). Elle ne recouvre pas la mesure qui autorise expressément les déplacements des membres lorsqu’ils exercent leurs fonctions en qualité de membres de l’Assemblée.
13.7.3. (73.7.c) L’expression «lorsqu’ils exercent leurs fonctions» vise toutes les tâches officielles accomplies dans les États membres par les membres de l’Assemblée en application d’une décision prise par un organe compétent de l’Assemblée et, si nécessaire, avec l’accord des autorités nationales pertinentes. Cela comprend (sans s’y limiter) les déplacements nécessaires pour participer:
  • aux sessions de l’Assemblée (tous les membres de l’Assemblée)
  • aux réunions de la Commission permanente (tous les membres de l’Assemblée);
  • aux réunions du Comité présidentiel (membres du Comité présidentiel ou leurs remplaçants);
  • aux réunions du Bureau de l’Assemblée (membres du Bureau ou leurs remplaçants);
  • aux réunions des commissions générales, des commissions ad hoc, y compris les commissions ad hoc d’observation des élections, des sous-commissions et sous-commissions ad hoc (membres titulaires et, le cas échéant, les membres suppléants de ces commissions ou sous-commissions);
  • aux réunions des réseaux, plateformes et alliances de l’Assemblée;
  • aux déplacements dans le cadre d’une mission en qualité de rapporteur de l’Assemblée;
  • aux déplacements dans le cadre d’une mission de représentation pour le compte de l’Assemblée ou d’une commission;
13.7.4. (73.7.d.) En cas de doute, le Bureau de l’Assemblée décide si les activités des membres de l’Assemblée entrent dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions;
13.8. (73.8.) Lorsqu’il existe des motifs de craindre que les immunités et privilèges protégés par l’Accord général sur les privilèges et immunités n’ont pas été pleinement respectés, le Président peut, lors de la partie de session suivante, faire une déclaration dans laquelle il signalera tout obstacle récemment imposé au libre déplacement d’un ou de plusieurs membres de l’Assemblée. Cette déclaration devrait mentionner toute ingérence récente à ces privilèges et immunités et, si nécessaire, peut rappeler aux autorités compétentes les obligations qui leur incombent en vertu de l’Accord général sur les privilèges et immunités;
13.9. (73.9.) Les lignes directrices sur la portée des immunités parlementaires dont bénéficient les membres de l’Assemblée parlementaire sont annexées au présent Règlement en tant que texte pararéglementaire.

Lignes directrices sur la portée des immunités parlementaires dont bénéficient les membres de l’Assemblée parlementaire (annexe de la Résolution 2392 (2021) adoptée par l’Assemblée le 27 septembre 2021 (telle que modifiée))

14. (A.) Objet et principes généraux
14.1. Les principes suivants poursuivent l’objectif de clarifier l’application des règles existantes dans le cadre du Statut du Conseil de l’Europe, de l’Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l’Europe (ci-après “AGPI”) et de son Protocole additionnel
14.2. Les membres de l’Assemblée parlementaire jouissent de privilèges et immunités ayant pour objet de préserver l’intégrité de l’Assemblée et de garantir l’indépendance de ses membres dans l’exercice de leurs fonctions. Ces privilèges et immunités sont conférés par l’article 40 du Statut du Conseil de l’Europe, les articles 13 à 15 de l’AGPI et l’article 3 de son Protocole additionnel.
14.3. Leur mise en œuvre pratique est précisée dans le Règlement et dans les résolutions pertinentes de l’Assemblée, en tenant compte des éléments suivants:
  • la nécessité de protéger l’indépendance de l’Assemblée;
  • l’objectif fonctionnel qui sous-tend le concept d’immunité;
  • les précédents existants.
14.4. L’immunité parlementaire ne relève pas d’un privilège personnel des membres, mais d’un privilège institutionnel dont chaque membre jouit à titre individuel.
15. (B.) Immunités des membres de l’Assemblée parlementaire protégées et garanties par l’Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l’Europe
15.1. Les immunités des membres de l’Assemblée ci-après sont protégées et garanties par l’AGPI, le Statut du Conseil de l’Europe et le Règlement de l’Assemblée:
15.1.1. immunité absolue en ce qui concerne les opinions exprimées et les votes émis lors des réunions de l’Assemblée (article 14 de l’AGPI et article 40 du Statut).
15.1.2. liberté de déplacement des membres de l’Assemblée vers et depuis les lieux de réunion de l’Assemblée – assortie d’une interdiction expresse d’imposer des restrictions d’ordre administratif ou autre à cette liberté de déplacement (article 13 de l’AGPI, article 73 du Règlement). Cela inclut les immunités suivantes et celles qui leur sont liées:
15.1.2.1. immunité de détention – sauf en cas de levée de cette immunité par l’Assemblée (articles 13 et 15 de l’AGPI, article 3 du Protocole additionnel à l’AGPI, article 40 du Statut et article 73 du Règlement)
15.1.2.2. immunité contre d’autres restrictions affectant les déplacements effectués dans le cadre des activités de l’Assemblée, telles que l’imposition d’une interdiction de voyager, d’une assignation à résidence ou d’un couvre-feu, sauf (1) si cette interdiction de voyager autorise expressément tous les déplacements pour se rendre à des réunions de l’Assemblée; (2) si l’Assemblée a levé cette immunité (articles 13 et 15 de l’AGPI lus conjointement, article 40 du Statut et article 73 du Règlement)
15.1.2.3. immunité d’arrestation, sauf en cas de flagrant délit (article 15 de l’AGPI)
15.1.3. immunité de poursuites judiciaires, en particulier:
15.1.3.1. immunité de poursuites sur le territoire de tout autre État membre (article 15.b de l’AGPI, article 3 du Protocole additionnel à l’AGPI, article 40 du Statut et article 73 du Règlement);
15.1.3.2. sur le territoire national, immunité de poursuites selon les mêmes conditions que celles qui sont prévues par le régime national de l’immunité parlementaire en matière de poursuites judiciaires (article 15.a de l’AGPI, article 3 du Protocole additionnel à l’AGPI, article 40 du Statut et article 73 du Règlement); l’application de cette immunité suppose de comprendre la portée de la législation nationale prévoyant l’immunité parlementaire.
16. (C.) Immunité absolue en ce qui concerne les opinions et les votes émis (article 14 de l’Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l’Europe)
16.1. La liberté d’expression étant l’outil le plus précieux permettant aux membres d’exercer leurs fonctions, elle bénéficie d’une protection renforcée. C’est pourquoi l’immunité garantie par l’article 14 de l’AGPI:
16.1.1. revêt un caractère absolu, permanent et perpétuel; elle continue de s’appliquer après la fin du mandat des membres; elle ne peut pas être levée par l’Assemblée parlementaire ni par un parlement national;
16.1.2. constitue un privilège institutionnel, de sorte qu’aucun membre ou ancien membre n’est en droit de demander sa levée ou d’y renoncer;
16.1.3. s’applique à toutes les procédures judiciaires (pénales, civiles ou administratives) qui pourraient résulter d’opinions exprimées ou de votes émis. Par conséquent, aucun parlementaire couvert par une telle immunité ne peut être entendu, y compris en qualité de témoin, concernant des informations obtenues confidentiellement dans l’exercice de ses fonctions parlementaires qu’il ne juge pas opportun de divulguer;
16.1.4. a une portée autonome pouvant différer de celle de l’immunité absolue qui protège les parlementaires nationaux, qu’il convient de déterminer en tenant compte des dispositions statutaires pertinentes, de la jurisprudence des juridictions européennes et des pratiques pertinentes de l’Assemblée;
16.1.5. couvre uniquement, compte tenu de cette protection exceptionnelle, ce qui est strictement nécessaire aux membres de l’Assemblée pour exercer leurs fonctions, mener un débat respectueux ou exprimer des positions critiques, tout en proscrivant l’utilisation abusive des privilèges et immunités à des fins personnelles. Dans cette optique, l’immunité ne couvre pas les activités interdites par le Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire telles que la défense d’intérêts particuliers en échange d’une contrepartie financière;
16.1.6. couvre les votes émis et les opinions exprimées par les membres de l’Assemblée «dans l’exercice de leurs fonctions», compte tenu de la définition actuelle des fonctions essentielles des intéressés;
16.1.7. pourrait, en plus de couvrir les déclarations faites par les membres pendant les débats en plénière ou lors de réunions des commissions et sous-commissions, être également étendue aux déclarations orales et écrites faites par les membres en dehors de locaux officiels, ainsi qu’à d’autres activités accomplies par les intéressés en leur qualité de membres de l’Assemblée s’il existe un lien évident et direct entre ces déclarations ou activités et l’exercice de leurs fonctions en qualité de membres de l’Assemblée;
16.1.8. ne couvre pas une enquête sur les infractions liées à la corruption (par exemple offrir ou demander des avantages indus en échange d’un certain comportement lors d’un vote) étant donné que ces infractions ne concernent pas les opinions exprimées ou les votes émis.
16.2. Il appartient à la juridiction nationale compétente de reconnaître qu’un membre ou un ancien membre bénéficie de l’immunité absolue en raison du lien direct et évident avec ses fonctions parlementaires. Ce faisant, les organes compétents du Conseil de l’Europe et la juridiction nationale doivent coopérer afin d’éviter tout conflit dans l’interprétation et l’application des dispositions du Statut et de l’AGPI.
16.3. Lorsqu’une demande de levée d’immunité lui est soumise par une autorité nationale, l’Assemblée doit tout d’abord vérifier si les faits à l’origine de ladite demande entrent dans le champ d’application de l’article 14 de l’AGPI, auquel cas ladite demande doit être rejetée.
16.4. Il découle de l’article 40.a du Statut, et de l’article 14, lu conjointement avec l’article 13 de l’AGPI, que l’imposition de sanctions, de restrictions en matière de déplacement (entrée et sortie) ou l’établissement d’une «liste noire» de membres de l’Assemblée en raison d’opinions exprimées ou de votes émis au cours des débats de l’Assemblée constitue une violation de l’AGPI, des principes démocratiques et des obligations d’un État en sa qualité de membre du Conseil de l’Europe
17. (D.) Exemption de toute poursuite judiciaire (article 15 de l’Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l’Europe)
17.1. Cette immunité a pour but de protéger les parlementaires contre les pressions indues qui pourraient s’exercer sur eux au titre d’actes ne relevant pas des activités parlementaires habituelles et s’applique comme suit:
17.1.1. les membres de l’Assemblée bénéficient de l’immunité prévue à l’article 15 pendant «la durée des sessions» de l’Assemblée: l’expression couvre toute l’année parlementaire en raison de l’activité continue de l’Assemblée et de ses organes;
17.1.2. les membres de l’Assemblée jouissent des immunités garanties par cette disposition lorsqu’ils ne sont plus membres de leur parlement national, et ce jusqu’à leur remplacement comme membres de l’Assemblée ou jusqu’à l’ouverture de la session suivante;
17.1.3. selon le Statut, la protection accordée aux membres de l’Assemblée s’applique pendant leur mandat à l’Assemblée. Elle pourrait également couvrir les procédures engagées à leur encontre avant de devenir membre de l’Assemblée, dès lors que ces procédures contiennent des preuves de fumus persecutionis. Cette position, qui vise à rendre la protection pleinement effective, est conforme aux pratiques existant dans plusieurs États membres et ne contredit pas le Statut en ce qu’il lie l’acquisition de l’immunité au début du mandat. Elle n’est pas non plus en contradiction avec le principe de fonctionnalité de l’immunité parlementaire dans la mesure où la protection ne sera accordée que si des éléments factuels indiquent que l’intention sous-jacente à la procédure judiciaire antérieure au mandat d’un membre de l’Assemblée est de porter atteinte à l’activité politique de ce dernier et donc à l’Assemblée. Dans tous les autres cas, si les poursuites n’ont d’autre but que la bonne administration de la justice, l’immunité doit être levée à la demande de l’autorité nationale;
17.1.4. l’immunité ne peut être invoquée en cas de flagrant délit; l’objectif de cette disposition étant de rétablir rapidement l’ordre public et de réduire le risque de disparition des preuves, son utilisation par les autorités nationales ne doit pas être inspirée par des préoccupations sans rapport avec la bonne administration de la justice;
17.1.5. la présomption d’innocence doit être respectée à toutes les étapes des procédures de levée de l’immunité;
17.1.6. lors de l’examen d’une demande de levée de l’immunité, l’Assemblée doit prendre en considération les éléments suivants: les poursuites judiciaires engagées contre le membre ne mettent pas en péril le bon fonctionnement de l’Assemblée; la demande doit être sérieuse, c’est-à-dire ne pas être motivée par des raisons autres que celle de rendre la justice. Si aucun de ces éléments ne peut être établi, l’Assemblée devrait normalement proposer de lever l’immunité;
17.1.7. l’immunité ne peut être levée que par l’Assemblée à la demande d’une «autorité compétente» de l’État membre concerné. L’autorité compétente est ordinairement le juge chargé de l’affaire, mais il peut aussi s’agir du procureur général ou du ministre de la Justice. La demande de levée d’immunité peut éventuellement être présentée par une autorité d’un État membre autre que celui dont le membre en question est ressortissant;
17.1.8. lorsqu’un membre doit comparaître en qualité de témoin ou d’expert, il n’est pas nécessaire de demander la levée de son immunité, à condition que l’intéressé ne soit pas obligé de comparaître à une date ou à une heure qui empêcherait ou gênerait l’exercice de ses fonctions parlementaires, ou qu’il puisse être en mesure de communiquer une déclaration par écrit ou sous toute autre forme ne compliquant pas cet exercice.
18. (E.) Immunité à l’égard de toute mesure empêchant les déplacements dans le cadre des activités de l’Assemblée, telles que la détention, l’imposition d’une interdiction de voyager, d’une assignation à résidence ou d’un couvre-feu, sauf si la mesure autorise expressément les déplacements effectués pour les besoins de l’Assemblée (articles 13 et 15 de l’Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l’Europe lus conjointement, article 3 du Protocole à l’Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l’Europe, article 40 du Statut du Conseil de l’Europe, et article 73 du Règlement de l’Assemblée)
18.1. L’article 13 de l’AGPI interdit l’imposition de toute restriction d’ordre administratif ou autre au libre déplacement d’un membre vers et depuis les lieux de réunion de l’Assemblée. Cette immunité a pour but de permettre aux membres de l’Assemblée de se déplacer librement dans le cadre des activités de celle-ci – c’est-à-dire de faire en sorte que les membres de l’Assemblée puissent se déplacer lorsqu’ils exercent leurs fonctions officielles et qu’ils ne soient pas indûment empêchés d’exercer ces fonctions sans une levée appropriée de cette immunité.
18.2. L’expression «lorsqu’ils exercent leurs fonctions» vise toutes les tâches officielles accomplies dans les États membres par les membres de l’Assemblée, en application d’une décision prise par un organe compétent de l’Assemblée et, si nécessaire, avec l’accord des autorités nationales pertinentes. Cela comprend (sans s’y limiter) les déplacements effectués pour se rendre:
  • aux sessions de l’Assemblée (tous les membres de l’Assemblée);
  • aux réunions de la Commission permanente (tous les membres de l’Assemblée);
  • aux réunions du Comité présidentiel (membres du Comité présidentiel ou leurs remplaçants);
  • aux réunions du Bureau de l’Assemblée (membres du Bureau ou leurs remplaçants);
  • aux réunions des commissions générales, des commissions ad hoc, y compris les commissions ad hoc d’observation des élections, des sous-commissions et sous-commissions ad hoc (membres titulaires et, le cas échéant, les membres suppléants de ces commissions ou sous-commissions);
  • aux réunions des réseaux, plateformes et alliances de l’Assemblée;
  • aux déplacements dans le cadre d’une mission en qualité de rapporteur·e de l’Assemblée;
  • aux déplacements dans le cadre d’une mission de représentation pour le compte de l’Assemblée ou d’une commission.
18.3. Cela inclut l’immunité contre l’imposition de toute mesure de restriction des déplacements (détention, assignation à résidence, couvre-feu, interdiction de voyager ou remise du passeport, par exemple), sauf (i) si la mesure autorise expressément tous les déplacements dans le cadre des activités de l’Assemblée; (ii) si l’Assemblée a levé l’immunité du membre concerné
18.4. Un service judiciaire, de poursuite ou d’enquête qui voudrait imposer des mesures restreignant les déplacements d’un membre (détention, assignation à résidence, couvre-feu, interdiction de voyager ou libération sous caution assortie de restrictions de déplacements, par exemple) qui n’autoriseraient pas expressément tous les déplacements liés aux activités de l’Assemblée, doit, préalablement à l’application de telles mesures, demander la levée de l’immunité.
18.5. Cette immunité s’applique comme suit:
18.5.1. les membres de l’Assemblée bénéficient de l’immunité prévue aux articles 13 et 15 pendant «la durée des sessions» de l’Assemblée: l’expression couvre toute l’année parlementaire en raison de l’activité continue de l’Assemblée et de ses organes;
18.5.2. les membres de l’Assemblée jouissent des immunités garanties par cette disposition lorsqu’ils ne sont plus membres de leur parlement national, et ce jusqu’à leur remplacement comme membres de l’Assemblée ou jusqu’à l’ouverture de la session suivante;
18.5.3. selon le Statut, la protection accordée aux membres de l’Assemblée s’applique pendant leur mandat à l’Assemblée. Cette protection pourrait également s’étendre aux procédures engagées à leur encontre ou liées à des événements survenus avant qu’ils ne deviennent membres de l’Assemblée, dans la mesure où la liberté de déplacement des membres est indispensable à l’exercice de leur mandat; une telle protection est donc nécessaire pour assurer la pleine efficacité de cette immunité et de leur rôle. En revanche, si la mesure est nécessaire à la bonne administration de la justice et que les circonstances ne permettent pas d’envisager d’autres solutions, l’immunité doit être levée à la demande de l’autorité nationale;
18.5.4. l’immunité ne peut être invoquée lors d’une détention de courte durée dans le cas de flagrant délit; l’objectif de cette disposition étant de rétablir rapidement l’ordre public et de réduire le risque de disparition des preuves, son utilisation par les autorités nationales ne doit pas être inspirée par des préoccupations sans rapport avec la bonne administration de la justice et la détention doit être de très courte durée;
18.5.5. la présomption d’innocence doit être respectée à toutes les étapes des procédures de levée de l’immunité;
18.5.6. lors de l’examen d’une demande de levée de l’immunité, l’Assemblée doit prendre en considération les éléments suivants: les poursuites judiciaires engagées contre le membre ne mettent pas en péril le bon fonctionnement de l’Assemblée; la demande doit être sérieuse, c’est-à-dire ne pas être motivée par des raisons autres que celle de rendre la justice. Si aucun de ces éléments ne peut être établi, l’Assemblée devrait normalement proposer de lever l’immunité;
18.5.7. l’immunité ne peut être levée que par l’Assemblée à la demande d’une «autorité compétente» de l’État membre concerné. L’autorité compétente est ordinairement le juge chargé de l’affaire, mais il peut aussi s’agir du procureur général ou du ministre de la Justice. La demande de levée d’immunité peut éventuellement être présentée par une autorité d’un État membre autre que celui dont le membre en question est ressortissant;
18.5.8. la restriction de la liberté et des déplacements d’un membre de l’Assemblée nécessite des motifs très graves, dans la mesure où elle l’empêche d’exercer ses fonctions. Lorsque rien n’indique que le suspect se soustraira à la justice, le bon déroulement de l’enquête devrait être assuré, si possible, par d’autres mesures de sûreté (par exemple la libération sous caution).
19. (F.) Guide pratique à l’intention des autorités judiciaires, de poursuite ou d’enquête, concernant l’engagement de poursuites à l’encontre d’un membre de l’Assemblée parlementaire
19.1. Cette partie des lignes directrices se veut un guide pratique pour les enquêteurs, procureurs et juges lorsqu’ils traitent d’affaires pénales impliquant des membres de l’Assemblée.
19.2. La levée préalable de l’immunité est requise dans les cas suivants:
19.2.1. avant l’imposition de mesures restreignant les déplacements d’un membre de l’Assemblée – cela inclut l’arrestation, la détention, l’assignation à résidence, le couvre-feu, l’interdiction de voyager ou la libération sous caution assortie de restrictions de déplacement (par exemple, la rétention du passeport). Si la mesure ne s’applique pas expressément aux déplacements effectués dans le cadre des activités de l’Assemblée, la levée de l’immunité n’est pas nécessaire;
19.2.2. sur le territoire national d’un membre de l’Assemblée, avant l’engagement de poursuites à l’encontre de celui-ci, si la levée de l’immunité est requise par la législation nationale;
19.2.3. sur le territoire de tout autre État membre, avant l’engagement de poursuites à l’encontre d’un membre de l’Assemblée.
19.3. La procédure applicable à la demande de levée de l’immunité est la suivante (sous réserve des règles de procédure nationales éventuellement applicables):
19.3.1. l’«autorité compétente» (habituellement le juge chargé de l’affaire, le procureur général ou le ministre de la Justice) présente au Président de l’Assemblée, par écrit, une demande de levée de l’immunité;
19.3.2. la demande de levée de l’immunité doit préciser les raisons de la demande, en particulier les éléments visés par la levée d’immunité, notamment:
19.3.2.1. si la demande vise à lever l’immunité aux fins (1) d’une restriction de la liberté de déplacement (par exemple, interdiction de voyager, détention, assignation à résidence, couvre-feu ou autre restriction de déplacement); et/ou (2) de l’engagement de poursuites;
19.3.2.2. les accusations ou les infractions visées par la demande;
19.3.2.3. si des mesures moins contraignantes ont été examinées, qui permettraient au membre de continuer à participer pleinement aux activités de l’Assemblée (dans l’affirmative, en quoi consistent ces mesures et les raisons pour lesquelles elles ont été, ou n’ont pas été, retenues);
19.3.3. l’Assemblée, plus précisément la commission du Règlement, de l’éthique et des immunités, examinera sans délai la demande, conformément à la procédure prévue à l’article 73 du Règlement et aux Lignes directrices sur les immunités parlementaires.
19.4. Dans les cas où une autorité judiciaire, d’enquête ou de poursuite a imposé l’une des mesures énumérées au paragraphe 18 ci-dessus à un membre de l’Assemblée sans avoir obtenu la levée de son immunité, les mesures suivantes devraient être prises:
19.4.1. Les autorités parlementaires (en principe le président du parlement national) devraient écrire aux autorités judiciaires, de poursuite et/ou d’enquête concernées afin de leur rappeler l’existence des immunités prévues par l’AGPI et l’impossibilité juridique d’imposer la mesure en question (restriction des déplacements, détention ou, le cas échéant, engagement de poursuites) sans que l’immunité du membre concerné ait été levée par l’Assemblée. Cette lettre devrait expliciter la procédure à suivre pour demander la levée de l’immunité et souligner l’importance de s’abstenir d’appliquer – ou de s’abstenir de maintenir – de telles mesures tant que l’immunité n’a pas été levée.
19.4.2. Si nécessaire, le Président de l’Assemblée écrit au président du parlement national pour lui rappeler les immunités prévues par l’AGPI, en faisant valoir la défense de l’immunité du membre de l’Assemblée concerné et en demandant à la présidence de prendre les mesures nécessaires pour que les autorités nationales (dont les autorités exécutives et judiciaires) aient pleinement connaissance de ces obligations et des mesures à prendre pour demander la levée de l’immunité avant l’imposition de toute mesure de restriction des déplacements (par exemple, détention, interdiction de voyager, assignation à résidence) ou, le cas échéant, avant l’engagement de poursuites judiciaires.

B. Exposé des motifs par M. Sergiy Vlasenko, rapporteur

(open)

1. Introduction

1. L’Assemblée parlementaire ne peut pas fonctionner si ses membres (les représentant·es et leurs suppléant·es) sont empêchés de voyager pour participer aux réunions dans le cadre de leur mandat européen. Les instruments juridiques instituant le Conseil de l’Europe confèrent donc aux membres de l’Assemblée un régime spécial de privilèges et d’immunités afin de leur permettre de contribuer sans entrave à la mission de l’Assemblée.
2. Le présent rapport se fonde sur une proposition de résolution qui précise que «la participation des membres de l’Assemblée aux travaux de cette dernière est un droit et une responsabilité» et qu’il «incombe [...] aux parlements nationaux de faciliter la participation des membres aux activités de l’Assemblée» 
			(2) 
			La proposition de résolution (AS/Pro(2023)07), initialement intitulée «Libre circulation
des représentant∙e∙s à l’Assemblée parlementaire et de leurs suppléant∙e∙s
vers le lieu de réunion et en provenance de celui-ci», a été déposée par
la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles
(ancien nom de la commission du Règlement, de l’éthique et des immunités).
Le 25 juin 2025, la commission a modifié le titre du rapport, pour
le remplacer par «Garantir la liberté de déplacement des membres
de l’APCE dans l’exercice de leurs fonctions».. La proposition de résolution a été déposée après que la commission du Règlement, de l’éthique et des immunités (ci-après «la commission du Règlement») a été informée de diverses situations dans lesquelles des restrictions ou des interdictions, administratives ou autres, avaient été imposées à la liberté de déplacement de membres de l’Assemblée, les empêchant d’accomplir leurs fonctions et de voyager en tant que membres de l’Assemblée, ce qui semblait contraire aux exigences de l’article 13 de l’Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l’Europe, 1949 (STE no 2) (ci-après «AGPI»).
3. Pour les besoins du présent rapport, j’ai envoyé un questionnaire aux délégations nationales, auquel 18 ont répondu 
			(3) 
			Voir la note d’information
AS/Rul(2025)11, dont je demanderai la déclassification.. J’ai également tenu de nombreuses réunions bilatérales avec des membres de l’Assemblée dont la liberté de voyager était restreinte et je me suis rendu en Arménie les 19 et 20 mai 2025. Je suis reconnaissant envers toutes les personnes qui se sont penchées avec moi sur ces questions et je remercie tout particulièrement les autorités arméniennes, qui ont organisé et facilité cette visite très constructive. Ma conclusion générale est que des entraves spécifiques à la liberté de déplacement des membres de l’Assemblée sont imposées dans certaines circonstances ou dans certains pays. Il existe des moyens d’éviter de telles violations de l’article 13 de l’AGPI, comme je l’explique ci-dessous, et je propose des modifications au Règlement de l’Assemblée et aux Lignes directrices sur la portée des immunités parlementaires dont bénéficient les membres de l’Assemblée parlementaire figurant à l’annexe III du Règlement (ci-après «les Lignes directrices sur les immunités parlementaires»). Je propose également de diffuser les bonnes pratiques pour que les autorités nationales puissent mieux comprendre la législation et les exigences applicables.
4. Dans ce rapport, je commencerai par présenter le cadre juridique des immunités applicable aux membres de l’Assemblée (chapitre 2), avant de rappeler les situations dans lesquelles des restrictions ou des interdictions ont été imposées à la liberté de déplacement de membres de l’Assemblée, les empêchant d’exercer leurs fonctions et de voyager en tant que membres de l’Assemblée (chapitre 3). Je formulerai ensuite des conclusions et propositions, concernant notamment les obstacles administratifs imposés par les autorités parlementaires nationales, les dispositions relatives aux conditions d’entrée et de sortie d’un territoire, les restrictions de déplacements imposées à la suite d’enquêtes et poursuites pénales et les mesures tendant à renforcer les conséquences du manquement d’un État membre aux obligations découlant de l’AGPI (chapitre 4).

2. Le cadre juridique des immunités applicable aux membres de l’Assemblée parlementaire

2.1. Dispositions pertinentes des traités internationaux

5. L’article 40(a) du Statut du Conseil de l’Europe, 1949 (STE no 1) est ainsi libellé:
«Le Conseil de l’Europe, les représentants des Membres et le Secrétariat jouissent, sur les territoires des Membres, des immunités et privilèges nécessaires à l’exercice de leurs fonctions. En vertu de ces immunités, les Représentants à l’Assemblée Consultative [Parlementaire] ne peuvent notamment être ni arrêtés ni poursuivis sur les territoires de tous les Membres en raison des opinions ou des votes émis au cours des débats de l’Assemblée, de ses comités ou commissions».
6. Conformément à l’article 40(b) du Statut, les États membres «s’engagent à conclure aussitôt que possible un accord en vue de donner plein effet aux dispositions du paragraphe a [de l’article 40]». Cela a conduit à l’élaboration de l’AGPI. La première phrase de l’article 13 de cet instrument énonce ce qui suit:
«Aucune restriction d’ordre administratif ou autre n’est apportée au libre déplacement des représentants à l’Assemblée Consultative [Parlementaire] et de leurs suppléants se rendant au lieu de réunion de l’Assemblée ou en revenant.»
7. L’article 14 de l’AGPI est ainsi libellé:
«Les représentants à l’Assemblée Consultative [Parlementaire] et leurs suppléants ne peuvent être recherchés, détenus ou poursuivis en raison des opinions ou votes émis par eux dans l’exercice de leurs fonctions.»
8. L’article 15 de l’AGPI est ainsi libellé:
«Pendant la durée des sessions de l’Assemblée Consultative [Parlementaire], les représentants à l’Assemblée et leurs suppléants, qu’ils soient parlementaires ou non, bénéficient:
a. sur leur territoire national, des immunités reconnues aux membres du Parlement de leurs pays ;
b. sur le territoire de tout autre État membre, de l’exemption de toutes mesures de détention et de toute poursuite judiciaire.
L’immunité les couvre également lorsqu’ils se rendent au lieu de réunion de l’Assemblée Consultative [Parlementaire] ou en reviennent. Elle ne peut être invoquée dans le cas de flagrant délit et ne peut non plus mettre obstacle au droit de l’Assemblée de lever l’immunité d’un représentant ou d’un suppléant.»
9. Le premier Protocole additionnel à l’Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l’Europe, 1952 (STE no 10) précise, à son article 3:
«Les dispositions de l’article 15 de l’Accord s’appliquent également – que l’Assemblée Consultative [Parlementaire] soit en session ou non – aux représentants à l’Assemblée ainsi qu’à leurs suppléants, dès lors qu’ils participent à une réunion d’une commission ou d’une sous-commission de l’Assemblée, se rendent au lieu de la réunion ou en reviennent.»
10. L’article 5 de ce même protocole dispose ce qui suit:
«Ces privilèges, immunités et facilités sont accordés aux représentants des membres, non à leur avantage personnel, mais dans le but d’assurer en toute indépendance l’exercice de leurs fonctions en rapport avec le Conseil de l’Europe. Par conséquent, un membre a non seulement le droit, mais le devoir de lever l’immunité de son représentant dans tous les cas où, à son avis, l’immunité empêcherait que justice soit faite et où elle peut être levée sans nuire au but pour lequel l’immunité est accordée.» 
			(4) 
			Dans des résolutions
successives, l’Assemblée a réaffirmé la finalité institutionnelle
des immunités et la nécessité de prévenir le détournement éventuel
de privilèges par les parlementaires à des fins personnelles, ce
qui s’applique également aux décisions relatives à l’applicabilité
et à la levée éventuelle de l’immunité des membres de l’Assemblée (voir,
par exemple, Résolution
2392 (2021), «Lignes directrices sur la portée des immunités parlementaires
dont bénéficient les membres de l’Assemblée parlementaire», par.
4).
11. Il convient de souligner que les immunités des membres du Parlement européen sont régies par les mêmes dispositions et que, par conséquent, les deux institutions ont mutuellement tenu compte de leurs interprétations respectives au fil des décennies.

2.2. Les textes de procédure de l’Assemblée parlementaire

12. Au fil des années, l’Assemblée a adopté plusieurs résolutions et règlements relatifs à l’exercice des privilèges et immunités de ses membres. L’article 73 du Règlement de l’Assemblée (Levée de l’immunité des représentants et suppléants):
  • rappelle les privilèges et immunités énoncés ci-dessus et leur objectif d’«assurer l’indépendance [des membres de l’Assemblée parlementaire] dans l’accomplissement de leur mandat européen» (article 73.1) ;
  • dispose que toute demande de levée d’immunité doit être adressée au Président de l’Assemblée par une autorité compétente, puis communiquée en séance plénière ou en réunion de la Commission permanente et renvoyée à la commission du Règlement (article 73.2) ;
  • définit la procédure suivie par la commission du Règlement: celle-ci peut émettre un avis sur la compétence de l’autorité ayant présenté la demande ; elle ne procède à aucun examen du fond de l’affaire, ne se prononce en aucun cas sur la culpabilité ou la non-culpabilité du parlementaire, ni sur l’opportunité ou non de le poursuivre ; elle entend le membre visé par la demande ou un autre membre de l’Assemblée le représentant ; elle peut demander aux autorités nationales compétentes de lui fournir toutes informations et précisions qu’elle estime nécessaires pour déterminer s’il convient de lever l’immunité ou non ; le rapport de la commission conclut à un projet de résolution tendant à l’acceptation ou au rejet de la demande de levée de l’immunité ; aucun amendement à cette décision ne sera accepté (article 73.3) ;
  • dispose que le rapport est inscrit en tête de l’ordre du jour du premier jour de séance de l’Assemblée suivant son dépôt ; la discussion ne porte que sur les raisons qui militent pour ou contre la levée de l’immunité ; lorsque la demande de levée de l’immunité porte sur plusieurs chefs d’accusation, chacun d’eux peut faire l’objet d’une décision distincte (article 73.4) ;
  • demande que le Président de l’Assemblée communique immédiatement la décision de l’Assemblée à l’autorité qui a présenté la demande (article 73.5) ;
  • prévoit que, dans le cas où un membre de l’Assemblée est arrêté ou privé de sa liberté de déplacement en violation supposée de ses privilèges et immunités, le Président de l’Assemblée peut confirmer les privilèges et immunités du membre concerné ; il dispose également qu’un membre ou un ancien membre peut adresser au Président de l’Assemblée une demande en vue de défendre son immunité et ses privilèges, et précise que le Bureau, à la demande du Président et sous réserve de ratification par l’Assemblée, peut renvoyer la question à la commission compétente (article 73.6) ;
  • apporte des précisions quant à l’interprétation de l’article 15(a) de l’AGPI, de sorte que les membres de l’Assemblée bénéficient de l’immunité de poursuites et de détention dans l’exercice de leurs fonctions de membres de l’Assemblée ou lorsqu’ils sont en mission officielle pour l’Assemblée, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur de leur territoire national (lorsqu’ils n’exercent pas d’activités au sens ainsi défini ou en déplacement pour le compte de l’Assemblée, le régime national s’applique) ; il dispose par ailleurs qu’en cas de doute, le Bureau de l’Assemblée décide si les activités des membres de l’Assemblée entrent dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions (articles 73.7.a, 73.7.b and 73.3.c);
  • précise que les lignes directrices sur les immunités parlementaires contiennent des précisions supplémentaires (article 73.7.d).
13. Les «Lignes directrices sur les immunités parlementaires» portent sur les articles 14 et 15 de l’AGPI. À ce jour, elles ne couvrent pas l’article 13 de l’AGPI.

2.3. Résolutions pertinentes de l’Assemblée parlementaire

14. L’Assemblée a notamment adopté les résolutions suivantes:
  • Résolution 2392 (2021) «Lignes directrices sur la portée des immunités parlementaires dont bénéficient les membres de l’Assemblée parlementaire»: elle analyse le régime d’immunité des membres de l’Assemblée, en se concentrant en particulier sur les articles 14 et 15 de l’AGPI, établit les «Lignes directrices sur la portée des immunités parlementaires dont bénéficient les membres de l’Assemblée parlementaire» (qui figurent désormais à l’annexe III du Règlement) et souligne l’obligation pour les autorités nationales compétentes de demander la levée de l’immunité d’un membre de l’Assemblée avant de lui imposer des restrictions.
  • Résolution 2127 (2016) et Recommandation 2095 (2016) «L’immunité parlementaire: remise en cause du périmètre des privilèges et immunités des membres de l’Assemblée parlementaire»: elles soulignent les risques liés à la perception que les régimes d’immunité soient utilisés pour protéger les discours de haine ou la corruption ; relèvent que l’inviolabilité parlementaire n’est pas nécessaire dans les pays où l’État de droit est bien protégé, mais qu’elle reste indispensable dans certaines démocraties en Europe ; énoncent une série de principes que les États membres doivent prendre en compte lorsqu’ils réexaminent leurs régimes nationaux d’immunité parlementaire.
  • Résolution 2126 (2016) «La nature du mandat des membres de l’Assemblée parlementaire»: elle porte essentiellement sur les restrictions (sanctions «déguisées») imposées par les parlements nationaux des membres et relève les manquements observés dans les procédures nationales, qui permettent de remplacer des membres dans les délégations nationales ou de leur imposer des restrictions de déplacement qui les empêchent de participer aux travaux de l’Assemblée.
  • Recommandation 2083 (2016) et Résolution 2087 (2016) «Les sanctions prises à l’encontre de parlementaires»: l’Assemblée se penche sur la question des mesures restrictives dont les parlementaires étrangers sont la cible (souvent appelées «listes noires»), généralement dans le cadre d’un ensemble de sanctions visant un État ; demande une nouvelle fois aux États membres de respecter les textes statutaires relatifs à la liberté de déplacement et au régime d’immunité ; compte tenu de l’importance croissante de la «diplomatie parlementaire», recommande l’imposition de garanties juridiques régissant l’inscription sur les listes et les procédures de recours pour les personnes concernées figurant sur les listes de «sanctions» ; demande en outre que les membres des délégations d’observateurs et de partenaires pour la démocratie bénéficient des mêmes privilèges et immunités que les membres (ce qui a été approuvé par la suite par le Comité des ministres).
  • Résolution 1490 (2006) «Interprétation de l’article 15.a. de l’Accord général sur les Privilèges et Immunités du Conseil de l’Europe»: elle précise que les immunités des membres de l’Assemblée protègent les membres contre toute arrestation ou détention lorsqu’ils sont en mission officielle pour l’Assemblée et exercent leurs fonctions de membres de l’Assemblée, quel que soit leur pays d’origine, et que cette immunité ne peut être restreinte, sauf si elle a été préalablement levée par l’Assemblée – cette position a été confirmée par la suite dans l’affaire Junqueras (interprétation des dispositions correspondantes applicables au Parlement européen) 
			(5) 
			Affaire C-502/19, Junqueras,
CJUE, 2019..
  • Résolution 1325 (2003) et Recommandation 1602 (2003) «Immunités des membres de l’Assemblée parlementaire»: elles (i) mettent l’accent sur la nature évolutive des fonctions des membres, qui couvrent les missions officielles en dehors de l’enceinte de l’Assemblée, ainsi que les réunions des commissions et de l’Assemblée plénière et (ii) aboutissent à la reconnaissance par les États membres du laissez-passer visant à faciliter les déplacements des membres de l’Assemblée.

2.4. La portée et l’interdépendance des articles 13, 14 et 15 de l’Accord Général sur les Privilèges et Immunités du Conseil de l’Europe

2.4.1. Statut juridique de l’article 13 de l’Accord Général sur les Privilèges et Immunités du Conseil de l’Europe

15. L’article 13 de l’AGPI dispose qu’«[a]ucune restriction d’ordre administratif ou autre n’est apportée au libre déplacement des représentants à l’Assemblée Consultative et de leurs suppléants se rendant au lieu de réunion de l’Assemblée ou en revenant.» Les représentant·es et les suppléant·es sont des «membres» de l’Assemblée et j’utiliserai ci-après le terme «membres» pour désigner ces deux catégories.
16. Le «lieu de réunion» recouvre diverses obligations incombant aux membres dans l’exercice de leurs fonctions, notamment les déplacements pour assister aux sessions plénières ; aux réunions de la Commission permanente, du Bureau ou du Comité présidentiel ; aux réunions des commissions et commissions ad hoc, des sous-commissions et sous-commissions ad hoc, ou d’autres réseaux, alliances ou plateformes ; ainsi que les déplacements dans le cadre des fonctions de rapporteur·e (y compris de corapporteur·e, rapporteur·e général·e et rapporteur·e pour la jeunesse), ou les déplacements dans le cadre d’une mission d’observation des élections ou en tant que représentant·e. Toutes ces obligations font partie des réunions auxquelles s’appliquent le régime des privilèges et immunités. Je propose que ce point soit précisé dans le Règlement pour que la portée de cette disposition soit définie avec plus de clarté et de sécurité juridique.
17. L’article 13 de l’AGPI énonce une obligation internationale contraignante pour tous les États du Conseil de l’Europe, selon laquelle ceux-ci ne peuvent apporter aucune restriction d’ordre administratif ou autre au libre déplacement des membres vers et depuis les réunions de l’Assemblée. L’article 13 ne laisse à ce titre pas de marge d’appréciation aux autorités. Par conséquent, le fait d’autoriser un membre de l’Assemblée à assister à une réunion de l’Assemblée ne relève pas du pouvoir discrétionnaire des autorités, qu’elles soient parlementaires, exécutives, judiciaires, de poursuite, d’enquête ou autres ; il s’agit d’une obligation juridiquement contraignante.

2.4.2. Portée et interdépendance des articles 13, 14 et 15 de l’Accord Général sur les Privilèges et Immunités du Conseil de l’Europe

18. Les immunités protégées par les articles 13, 14 et 15 de l’AGPI sont interdépendantes. Par exemple:
  • les restrictions à la liberté de déplacement résultant de restrictions liées à une arrestation, un placement en détention, des poursuites ou des restrictions de voyage (y compris dans le cadre d’une libération sous caution ou d’une interdiction de voyager) impliquent nécessairement de prendre en considération les articles 13 et 15 de l’AGPI ;
  • les restrictions à la liberté de déplacement imposées aux membres en raison de leurs votes ou des opinions qu’ils expriment lors des réunions de l’Assemblée impliquent nécessairement d’examiner les articles 13 et 14 de l’AGPI.
19. Compte tenu du caractère indissociable de certaines des dispositions des articles 13, 14 et 15 de l’AGPI, ainsi que des enseignements tirés récemment du traitement d’affaires relatives à l’immunité de membres de l’Assemblée, la commission m’a chargé de veiller à ce que toutes mes propositions de modifications ou recommandations soient aussi prises en compte lors de toute réflexion secondaire sur les articles 14 et 15 de l’AGPI, afin d’assurer la cohérence de l’approche adoptée en matière d’immunités des membres de l’Assemblée. Cet aspect est important, notamment pour l’examen des questions suivantes:
  • l’approche à adopter dans le cas de l’imposition potentielle de restrictions de déplacement ou de détention, à la suite de l’ouverture d’enquêtes ou de poursuites pénales, notamment pour défendre et éventuellement lever l’immunité (ce qui suppose d’examiner les articles 13 et 15 de l’AGPI) ;
  • la «liste noire» qui serait appliquée par l’Azerbaïdjan et qui semblerait imposer une interdiction d’entrée sur son territoire à au moins 77 membres en raison de leur vote en tant que membres de l’Assemblée (ce qui suppose d’examiner les articles 13 et 14 de l’AGPI).

2.4.3. Immunités de l’Assemblée parlementaire prévues par l’Accord Général sur les Privilèges et Immunités du Conseil de l’Europe

20. Les immunités parlementaires ci-après sont protégées et garanties par l’AGPI, le Statut et le Règlement:
  • immunité absolue en ce qui concerne les opinions exprimées ou les votes émis lors des réunions de l’Assemblée (article 14 de l’AGPI et article 40 du Statut du Conseil de l’Europe);
  • liberté de déplacement des membres de l’Assemblée vers et depuis les lieux de réunion de l’Assemblée – assortie d’une interdiction expresse d’imposer des restrictions d’ordre administratif ou autre à cette liberté de déplacement (article 13 de l’AGPI, article 73 du Règlement). Cela inclut les immunités suivantes et celles qui leur sont liées:
    • immunité de détention – sauf en cas de levée de cette immunité par l’Assemblée (articles 13 et 15 de l’AGPI, article 3 du Protocole additionnel à l’AGPI, article 40 du Statut et article 73 du Règlement);
    • immunité contre l’imposition d’une interdiction de voyager, (1) sauf si l’interdiction de voyager autorise expressément tous les déplacements pour se rendre à des réunions de l’Assemblée ; ou (2) si l’Assemblée a levé cette immunité (articles 13 et 15 de la GAPI lus conjointement, article 40 du Statut et article 73 du Règlement);
    • immunité d’arrestation, sauf en cas de flagrant délit (article 15 de l’AGPI);
  • immunité de poursuites – en particulier:
    • immunité de poursuites sur le territoire de tout autre État membre (article 15(b) de l’AGPI, article 3 du Protocole additionnel à l’AGPI, article 40 du Statut et article 73 du Règlement);
    • sur le territoire national, immunité de poursuites selon les mêmes conditions que celles prévues par le régime national de l’immunité parlementaire en matière de poursuites (article 15 de l’AGPI, article 3 du Protocole additionnel à l’AGPI, article 40 du Statut et article 73 du Règlement); l’application de cette immunité suppose de comprendre la portée de la législation nationale prévoyant l’immunité parlementaire).
21. Je propose que cette approche plus pragmatique des immunités ainsi que leurs implications pour certaines procédures spécifiques relevant du système de justice pénale soit intégrée à la version révisée des Lignes directrices sur les immunités parlementaires.

3. Situations dans lesquelles des restrictions ou des interdictions ont été imposées à la liberté de déplacement de membres de l’Assemblée parlementaire, les empêchant d’exercer leurs fonctions et de voyager en qualité de membres de l’Assemblée

22. Il convient avant tout de souligner que les restrictions aux déplacements de membres prennent différentes formes et sont de différentes natures, de sorte que les méthodes utilisées pour y répondre sont elles aussi différentes. Dans le questionnaire comme dans mes échanges avec les membres, je me suis efforcé de mieux comprendre le type et la nature des obstacles au libre déplacement des membres de l’Assemblée. Les obstacles suivants ont été identifiés:
  • des règles ou pratiques internes des parlements nationaux restreignent les déplacements ou empêchent la participation des membres, notamment pour les raisons suivantes: (i) un manque de financement ; (ii) des restrictions concernant la participation des suppléant·es/remplaçant·es ; (iii) des contraintes, pour des raisons politiques, imposées par le chef de délégation ou le président du parlement et qui entravent la participation des membres de l’opposition ; (iv) les parlements nationaux ou les groupes politiques empêchent les déplacements des membres lorsque des votes sont prévus dans les parlements nationaux ;
  • des restrictions à la sortie du territoire empêchent les membres de quitter un pays (le cas est plutôt rare, mais peut se produire en période de loi martiale ou en cas de restrictions sanitaires, par exemple lors de la pandémie de covid-19) ;
  • des restrictions à l’entrée sur le territoire, notamment pour des questions de visas, mais aussi à cause des listes noires de parlementaires faisant l’objet de sanctions ;
  • des restrictions aux déplacements sont imposées à la suite de procédures pénales en cours susceptibles d’empêcher ou d’entraver l’exécution par les membres de leur fonction en tant que membres de l’Assemblée (par exemple, interdiction de voyager, assignation à résidence, couvre-feu ou détention).

3.1. Synthèse des réponses au questionnaire

23. Le 18 décembre 2024, j’ai adressé un questionnaire aux secrétaires des délégations nationales à l’Assemblée. J’ai rédigé une note d’information résumant les réponses des 18 délégations ayant répondu 
			(6) 
			Voir
la note d’information AS/Rul(2025)11 op. cit., à savoir: Allemagne, Andorre, Autriche, Belgique, Bulgarie, Croatie, Espagne, France, Irlande, Italie, Lettonie, Liechtenstein, Macédoine du Nord, Malte, Pays-Bas, Portugal, Slovénie et Suède.
24. Dans les réponses figuraient la composition des délégations nationales, les règles en matière de financement des déplacements, les restrictions aux déplacements des parlementaires (notamment en cas de conflit de calendrier), les incidences des procédures pénales sur la liberté de déplacement des membres de l’Assemblée, ainsi que les restrictions à l’entrée et à la sortie du territoire.
25. En ce qui concerne la composition des délégations nationales et la répartition des sièges, la plupart des pays appliquent des méthodes proportionnelles, comme la méthode D’Hondt, parfois en veillant à un équilibre global de la représentation dans les assemblées parlementaires internationales. Pour la plupart, ils accordent une autonomie aux partis ou groupes parlementaires, en leur permettant de désigner directement leurs candidats. La procédure d’approbation formelle des délégations varie. Certains pays exigent que la composition de la délégation soit approuvée par un vote en plénière, ce qui peut avoir une incidence sur la composition de la délégation.
26. Pour ce qui est des règles relatives au financement des déplacements, la plupart des pays permettent à tous les membres d’assister aux réunions plénières de l’Assemblée et prennent en charge leurs frais de déplacement. Dans de nombreux pays, les déplacements des remplaçant·es ne sont pris en charge qu’en l’absence du membre titulaire de la commission, alors que dans d’autres, les membres titulaires et les membres remplaçants d’une commission sont tous autorisés à assister aux réunions de leur commission. Nombre de délégations disposent d’un budget global ou d’une enveloppe globale et, dans certains pays, les déplacements dépendent du budget disponible ou sont soumis à autorisation.
27. Concernant les restrictions de voyage et les priorités parlementaires, les restrictions parlementaires officielles à la participation à l’Assemblée sont rares, mais il existe quelques exceptions ; c’est le cas notamment en Allemagne, en Andorre, en Espagne, à Malte et en Macédoine du Nord. Dans tous les pays, les priorités et les pratiques politiques nationales influencent sensiblement les décisions en matière de participation, en particulier en cas de votes importants au parlement national. La plupart des pays accordent aux parlementaires une large autonomie pour décider de leur participation, mais les décisions qui ont trait aux déplacements sont souvent dictées par les groupes politiques ou la présidence du parlement.
28. Seuls quelques pays ont mis en place des mécanismes formels pour résoudre les conflits entre les responsabilités nationales et les responsabilités internationales. À titre d’exemple, on peut citer l’organisation des réunions plénières et des commissions ainsi que des votes de manière à éviter les conflits avec l’Assemblée 
			(7) 
			Andorre, Autriche et
Macédoine du Nord., la possibilité de voter par procuration aux sessions nationales en cas de participation aux réunions de l’Assemblée 
			(8) 
			Andorre, Bulgarie,
France et Liechtenstein., la possibilité de faire un aller-retour pendant une session de l’Assemblée pour pouvoir voter 
			(9) 
			Belgique., les systèmes d’appariement permettant aux partis de coalition et d’opposition d’équilibrer les votes et les absences 
			(10) 
			Autriche, Irlande,
Pays-Bas et Suède., la coordination de l’ordre du jour parlementaire pour tenir compte de l’absence des membres de l’Assemblée 
			(11) 
			Malte., la participation en ligne 
			(12) 
			Macédoine
du Nord. et le vote à distance 
			(13) 
			Espagne..
29. Aucun des pays ayant répondu au questionnaire n’impose de restrictions formelles à la sortie du territoire. Concernant les visas, certains pays n’exigent généralement pas de visa pour les membres de l’Assemblée détenteurs d’un passeport diplomatique ou officiel, tandis que d’autres en exigent un, en fonction du type de passeport et du pays d’émission. Les autorités nationales fournissent diverses formes d’assistance pour l’obtention d’un visa – notes verbales, traitement accéléré ou exonération des frais pour les missions officielles –, mais la pratique varie considérablement d’un pays à l’autre. Le laissez-passer du Conseil de l’Europe ne constitue généralement pas, à lui seul, un titre suffisant pour autoriser l’entrée sur le territoire d’un pays ; par conséquent, la vérification du caractère officiel de la mission, notamment au moyen d’une note verbale, demeure nécessaire dans la majorité des pays. La connaissance et la reconnaissance du laissez-passer sont très variables ; dans certains pays, il est peu pris en compte, tandis que dans d’autres, il permet d’entrer sur le territoire sans visa.
30. Quant aux incidences des procédures pénales sur la liberté de déplacement des membres de l’Assemblée, les lois et les pratiques varient d’un État membre du Conseil de l’Europe à l’autre. La majorité des pays ayant répondu au questionnaire ont indiqué ne connaître que très peu de cas où des restrictions ont été imposées aux déplacements de parlementaires impliqués dans des procédures pénales, soit parce que cela n’est pas possible, soit parce que cela ne se produit pas en pratique. Certains pays, comme l’Allemagne, la France ou la Lettonie, demanderaient la levée de l’immunité pour restreindre la liberté de déplacement d’un parlementaire. En Macédoine du Nord et au Portugal, si un tribunal imposait des restrictions de déplacement à un parlementaire dans le cadre d’une enquête pénale, une autorisation judiciaire serait nécessaire pour qu’il puisse voyager dans le cadre des activités de l’Assemblée.

3.2. L’Arménie et l’imposition de restrictions aux déplacements d’un membre de l’Assemblée parlementaire

3.2.1. Contexte de la visite et cas de M. Gevorgyan

31. Pour les besoins de ce rapport, je me suis rendu en Arménie les 19 et 20 mai 2025. Ce pays a été choisi, car un membre de l’Assemblée, M. Armen Gevorgyan (Arménie, CEPA), fait l’objet, dans le cadre d’une affaire pénale en cours, de restrictions de déplacement qui affectent sa capacité à participer aux travaux de l’Assemblée dans le cadre de ses fonctions. Plusieurs courriers ont été adressés par les présidents successifs de l’Assemblée aux autorités arméniennes afin de leur rappeler l’immunité dont bénéficie M. Gevorgyan en tant que membre de l’Assemblée, ainsi que les obligations juridiquement contraignantes incombant à l’Arménie en vertu de l’AGPI. Cette visite n’avait en aucun cas pour objet d’enquêter sur cette affaire pénale ni d’exercer une quelconque influence sur celle-ci, ce qui dépasse totalement le cadre de ce rapport. Mon intérêt portait exclusivement sur l’expérience pratique du fonctionnement d’une interdiction judiciaire de voyager, laquelle s’est révélée instructive pour l’examen de l’application de l’article 13 de l’AGPI dans le contexte des restrictions de voyage imposées à un membre siégeant à l’Assemblée.
32. Sans entrer dans les détails de l’affaire de M. Gevorgyan – ce n’est pas l’objet du rapport –, il convient, pour faciliter la compréhension, de préciser que M. Gevorgyan fait l’objet de poursuites pénales dans deux dossiers distincts, tous deux antérieurs à son élection au parlement et donc avant qu’il ne devienne membre de l’Assemblée parlementaire.
  • en 2018, M. Gevorgyan, ainsi que d’autres personnes, a fait l’objet d’une enquête et a été inculpé en relation avec l’usage de la force par la police nationale et les forces militaires le 1er mars 2008, qui avait entraîné la mort de 10 manifestants;
  • M. Gevorgyan a été inculpé en 2021 à la suite d’une enquête sur des allégations de corruption et de blanchiment d’argent.
33. M. Gevorgyan et ses co-accusés contestent ces accusations. M. Gevorgyan estime que les poursuites sont motivées par des considérations politiques. Plusieurs points de procédure ont été soulevés, en particulier concernant (i) le respect et l’étendue de l’immunité parlementaire arménienne de M. Gevorgyan ; (ii) le respect de son immunité en tant que membre de l’Assemblée ; (iii) le régime des prescriptions ; (iv) la conduite des autorités judiciaires, notamment leur impartialité et leur indépendance ; (v) la diligence dans le déroulement de la procédure.

3.2.2. L’immunité parlementaire en Arménie et son incidence sur les immunités de l’Assemblée parlementaire

34. En Arménie, l’immunité parlementaire protège les membres du parlement contre l’ouverture de poursuites pénales et la privation de liberté (sauf en cas de flagrant délit, la détention étant limitée à un maximum de 72 heures), à moins que les autorités n’aient obtenu une autorisation de l’Assemblée nationale (article 96(2) de la Constitution). Dans un arrêt rendu en 2021, la Cour constitutionnelle a précisé que l’article 96(2) exige la libération immédiate des personnes détenues qui sont ensuite élues au parlement. Elle précisait également que lorsqu’une procédure pénale était engagée à l’encontre d’une personne avant son élection à l’Assemblée nationale, il n’était pas nécessaire d’obtenir le consentement de l’Assemblée nationale pour poursuivre la procédure pénale à l’encontre de cette personne (c’est-à-dire qu’un député ne bénéficie pas de l’immunité contre la poursuite d’une procédure pénale engagée avant son élection au parlement). À cet égard, il convient de rappeler que M. Gevorgyan a été élu député en 2021 et que les poursuites sont antérieures à son élection au Parlement.

3.2.3. Application de l’interdiction de voyager dans le cadre d’une procédure pénale et de l’article 13 de l’AGPI

35. Depuis 2018, M. Gevorgyan est frappé d’une interdiction de voyager au titre des «mesures préventives» dont il fait l’objet dans le cadre de cette procédure. Cette mesure est sans doute l’une des moins contraignantes qui puissent être imposées à une personne mise en cause, les autres options étant la mise en liberté sous caution (impliquant le versement d’une garantie) ou encore une interdiction totale de voyager (sans possibilité d’obtenir une dérogation) 
			(14) 
			Depuis
les modifications apportées au Code de procédure pénale, entrées
en vigueur en 2022, l’interdiction de voyager «sur signature» n’est
plus une mesure préventive autorisée. Or, dans le cas de M. Gevorgyan,
le tribunal n’a pas encore examiné la pertinence de cette mesure
en vue de la lever et/ou de la remplacer.. Ainsi, pour chaque réunion de l’Assemblée, M. Gevorgyan doit d’abord obtenir l’autorisation de l’instance chargée de la procédure pénale (tribunal ou enquêteur), ce qui l’oblige à déposer une demande formelle et à comparaître devant un juge, avec tous les frais d’avocat, le temps et les démarches que cela implique. Depuis 2018, M. Gevorgyan rencontre des difficultés à quitter le pays, y compris depuis qu’il est devenu membre du Parlement arménien et membre de l’Assemblée en 2021. Il semble en effet que, lors de l’examen de ses demandes, le tribunal ne soit pas toujours informé de l’obligation légale d’autoriser les déplacements liés aux travaux de l’Assemblée dans le cadre de l’AGPI. En particulier:
  • Entre 2021 et 2022, les autorités judiciaires et/ou d’enquête ont refusé à M. Gevorgyan l’autorisation d’assister aux réunions de l’Assemblée. Dans une lettre datée du 7 avril 2022, le Président de l’Assemblée de l’époque, a confirmé et défendu les immunités de M. Gevorgyan en sa qualité de membre de l’Assemblée. D’autres lettres ont également été adressées aux autorités arméniennes en 2022 et 2023, leur demandant de prendre les mesures nécessaires pour permettre à M. Gevorgyan d’assister aux réunions de l’Assemblée. Certains déplacements ont été autorisés en 2022 et 2023, malgré la persistance de certaines complications.
  • Le juge de première instance chargé de l’affaire de M. Gevorgyan a été démis de ses fonctions le 16 juillet 2024 et n’a été remplacé qu’au mois de septembre 2024. Durant cette période, M. Gevorgyan s’est retrouvé dans l’impossibilité de voyager, en l’absence de juge compétent pour autoriser ses déplacements. Dans une lettre adressée au Président de l’Assemblée nationale arménienne, le Président de l’Assemblée parlementaire, a rappelé les privilèges et immunités dont bénéficie M. Gevorgyan en vertu de l’AGPI et a fait part de ses préoccupations quant au fait que ce dernier ne puisse pas participer aux réunions de l’Assemblée.
  • En novembre 2024, le tribunal anticorruption a refusé la demande de M. Gevorgyan de participer à la réunion de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable, prévue les 5 et 6 décembre 2024. Le 22 novembre 2024, le Président de l’Assemblée parlementaire a donc adressé un courrier au Président de l’Assemblée nationale, pour rappeler l’obligation internationale contraignante qui incombe aux autorités arméniennes de ne pas restreindre la liberté de déplacement des membres de l’Assemblée pour assister aux réunions de celle-ci, et solliciter son intervention. Finalement, M. Gevorgyan a pu participer à la réunion de décembre.
  • En mars 2025, des préoccupations subsistaient quant à la réticence persistante du tribunal à accorder des autorisations de déplacement à M. Gevorgyan pour qu’il puisse participer aux réunions de l’Assemblée. Le 4 avril 2025, le Président de l’Assemblée parlementaire a adressé une nouvelle lettre au président de l’Assemblée nationale arménienne, dans laquelle il soulignait une nouvelle fois les obligations découlant de l’AGPI. Depuis lors, M. Gevorgyan a pu assister aux réunions de l’Assemblée, mais les contraintes administratives restent particulièrement lourdes.
36. Le fonctionnement de l’interdiction de voyager est complexe. En effet, au lieu d’autoriser tous les déplacements liés à l’Assemblée, l’organe chargé de la procédure pénale (le juge ou l’enquêteur) exige une requête distincte pour obtenir une autorisation pour chaque réunion. Cette approche manifestement chronophage constitue un obstacle pratique inutile au fonctionnement efficace de l’article 13 de l’AGPI. En outre, les autorités ne semblent pas faire de distinction entre les déplacements de l’Assemblée qui devraient être protégés de plein droit en vertu de l’AGPI et les autres «voyages d’affaires», qu’il considère apparemment comme relevant tous de son pouvoir discrétionnaire.
37. Lors des réunions, il m’a semblé que les personnes connaissaient plus ou moins l’existence de l’AGPI et de ses exigences. Il était généralement admis que, selon le droit arménien, les obligations internationales contraignantes pour l’Arménie – telles que celles découlant de l’AGPI – faisaient partie intégrante du droit national et primaient sur le droit interne ordinaire. Toutefois, la connaissance concrète de l’AGPI et de ses dispositions spécifiques semblait moins claire.
38. Une meilleure formation et information des enquêteurs, des procureurs et des magistrats sur leurs obligations juridiquement contraignantes lorsqu’ils traitent d’affaires qui concernent l’immunité parlementaire, et plus particulièrement les immunités des membres de l’Assemblée en vertu de l’AGPI, pourraient contribuer à résoudre les difficultés qui se sont posées dans l’affaire de M. Gevorgyan.

3.3. Autres cas observés ces dernières années

39. Au fil des années, les Présidents successifs de l’Assemblée sont intervenus à plusieurs reprises pour défendre les immunités dont bénéficient les membres de l’Assemblée 
			(15) 
			Exemples: en 2024,
concernant l’arrestation et des poursuites engagées contre M. Marcin
Romanowski en Pologne ; depuis 2022, concernant les poursuites contre
M. Armen Gevorgyan en Arménie et les entraves au libre déplacement
de celui-ci ; en 2015, concernant Mme Nadiia
Savchenko, membre ukrainienne de l’Assemblée détenue en Fédération
de Russie ; en 2014, concernant M. Dick Marty, membre suisse de
l’Assemblée, à propos d’une demande de comparution devant un tribunal
au Kosovo* en qualité de témoin ; en 2002 et 2004, concernant le
sénateur italien Raffaele Iannuzzi, membre de l’Assemblée, condamné
à deux peines de prison pour des faits antérieurs à son mandat parlementaire ;
en 1994, concernant M. Paolo Caccia, membre italien de l’Assemblée,
arrêté alors qu’il était encore membre de l’Assemblée (mais après
la dissolution du parlement italien) ; en 2000-2001, concernant
la détention de M. Ilie Ilascu, membre roumain de l’Assemblée, retenu
par les autorités de «Transnistrie». 
			(15) 
			*Toute référence
au Kosovo, que ce soit le territoire, les institutions ou la population,
doit se comprendre en pleine conformité avec la Résolution 1244
du Conseil de sécurité des Nations Unies et sans préjuger du statut
du Kosovo.. Le non-respect par certains États membres des immunités prévues par l’AGPI n’est pas un phénomène nouveau 
			(16) 
			Un
cas notable de levée de l’immunité parlementaire au niveau national,
sans qu’ait été déposée une demande de levée de l’immunité au sein
de l’Assemblée, concernait la Türkiye. Il s’agissait des poursuites
engagées en 2018 contre Mme Filiz Kerestecioğlu
Demir pour des propos tenus lors d’un débat à l’Assemblée.. Toutefois, à d’autres occasions, les États ont clairement cherché à se conformer aux exigences de l’AGPI, notamment en sollicitant une levée d’immunité 
			(17) 
			Voir
par exemple la demande de levée de l’immunité de M. Silvio Berlusconi
par le Tribunal suprême espagnol en 2001 (aucune décision n’a été
rendue en raison de la démission de M. Berlusconi de l’Assemblée)
ainsi que la demande polonaise de levée de l’immunité de M. Marcin
Romanowski en 2024 (qui a abouti à une décision de levée de l’immunité par
l’Assemblée en 2024). ou en veillant à garantir le libre déplacement des membres de l’Assemblée. Ces dernières années, des questions spécifiques ont été soulevées, mettant en évidence les difficultés liées au respect des immunités et du libre déplacement des membres de l’Assemblée, comme exposé ci-dessous.

3.3.1. Ukraine: restrictions administratives dues à l’application de la loi martiale

40. La loi martiale est en vigueur en Ukraine depuis l’agression à grande échelle de la Fédération de Russie. Pour les membres du parlement ukrainien, cela signifie qu’ils doivent obtenir l’autorisation du président du parlement, la Verkhovna Rada, pour chaque déplacement à l’étranger, y compris pour chaque voyage effectué dans l’exercice de leurs fonctions de membres de l’Assemblée. Même si l’instauration de la loi martiale est compréhensible compte tenu des circonstances exceptionnelles, les exigences de la loi martiale créent des obstacles administratifs susceptibles de compromettre l’organisation en temps voulu des déplacements des membres ukrainiens de l’Assemblée.
41. Certains membres de la délégation ukrainienne se sont heurtés à des refus – ou à des menaces de refus – de voyager. Ces problèmes résultaient en partie d’une confusion quant à la définition des missions constituant des voyages «dans l’exercice de leurs fonctions» en tant que membres de l’Assemblée. L’Assemblée a dû expliquer à la Verkhovna Rada que les déplacements pour se rendre aux réunions du Bureau et de la Commission permanente de l’Assemblée – notamment pour un président de commission également membre du Bureau – étaient également indispensables dans le cadre des fonctions de ce membre en tant que membre de l’Assemblée. Cette situation a ainsi fait obstacle aux déplacements, pour les besoins de l’Assemblée, de M. Oleksii Goncharenko (Ukraine, CEPA), qui est président de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées depuis janvier 2024 et qui est donc tenu d’assister aux réunions du Bureau et de la Commission permanente dans le cadre de cette fonction.

3.3.2. Membres de l’Assemblée menacés par des mandats d’arrêt émis par la Fédération de Russie

42. Depuis plusieurs années, et plus particulièrement depuis qu’elle a lancé sa guerre d’agression à grande échelle contre l’Ukraine, la Fédération de Russie a menacé plusieurs membres de l’Assemblée de mandats d’arrêt, que ce soit avant ou après l’ouverture de prétendues procédures pénales. De telles menaces peuvent avoir un effet dissuasif sur les déplacements des membres concernés de l’Assemblée, s’ils n’ont pas l’assurance que les voyages qu’ils effectuent dans l’exercice de leurs fonctions de membres de l’Assemblée seront protégés et qu’ils bénéficieront d’une immunité totale contre toute arrestation ou détention en rapport avec de telles menaces de la part de la Fédération de Russie (voire d’autres pays).
43. Le fait que la Fédération de Russie puisse chercher à détourner les mécanismes d’Interpol pour tenter d’obtenir des mandats d’arrêt à l’encontre de membres de l’Assemblée, par exemple à l’encontre de M. Oleksii Goncharenko (Ukraine, CEPA), est également préoccupant. Selon moi, il serait donc opportun que l’Assemblée informe Interpol les immunités d’arrestation ou de poursuite dont bénéficient les membres lorsqu’ils voyagent dans le cadre de leurs fonctions parlementaires. Dès lors, les mandats d’arrêt seraient injustifiés. En outre, Interpol devrait être informé du caractère hautement politique de ces prétendues poursuites pénales engagées par la Fédération de Russie.

3.3.3. Membres de l’Assemblée confrontés à des obstacles administratifs pour voyager dans le cadre de leurs activités au sein de l’Assemblée

44. Il arrive que des membres de l’Assemblée signalent que l’administration de leur parlement national restreint ou refuse leurs demandes de voyages liés à l’exercice de leurs fonctions parlementaires. Les raisons de ces restrictions – (1) mise en place de procédures administratives bureaucratiques pour approuver les voyages ou (2) refus dans des cas individuels – ne sont pas toujours claires.
45. Dans certains cas, ces refus semblaient motivés par des considérations politiques, par exemple lorsque le chef de la délégation ou le président du parlement appartient à un groupe politique différent de celui du membre concerné et que le refus résulte d’une animosité personnelle ou politique. De tels obstacles et refus ne sauraient, bien entendu, constituer un motif acceptable pour restreindre les droits et obligations en matière de libre déplacement prévus par l’AGPI. Ils compromettent le caractère démocratique et pluraliste des travaux de l’Assemblée, en particulier si les membres de l’opposition se voient empêchés de participer en raison de contrôles et restrictions injustifiés imposés par des membres haut placés de la majorité au pouvoir.
46. Dans d’autres cas, des restrictions ont été imposées parce qu’un vote important devait avoir lieu au parlement national. S’il est compréhensible que les responsables politiques aient un avis sur l’opportunité pour les membres d’être présents lors de votes au parlement national, il devrait revenir aux membres de l’Assemblée – en tenant bien sûr compte des positions de leurs groupes politiques, de l’avis du président du parlement et d’autres considérations – de décider s’ils souhaitent participer à une réunion de l’Assemblée ou donner la priorité à d’autres questions. Il appartient à chaque parlementaire de définir ses priorités, dans la mesure où il est responsable, devant son électorat, des choix qu’il fait et des décisions qu’il prend.
47. Le fait que certains membres de la délégation roumaine aient été empêchés d’assister à la partie de session de juin 2025 de l’Assemblée, apparemment en raison d’un vote important au parlement national concernant la formation du gouvernement, a suscité une certaine inquiétude. Mme Dumitrina Mitrea (Roumanie, CEPA), en particulier, s’est vu refuser l’autorisation de voyager, et ce, malgré son souhait en tant que membre de l’Assemblée (en fin de compte, elle a organisé elle-même son voyage).
48. Ces dernières années, des difficultés ont été signalées concernant Mme Bisara Kostadinovska-Stojchevska (Macédoine du Nord, SOC), membre de l’opposition, qui a été empêchée de voyager (ou dont les autorisations de voyage ont été retardées ou refusées). Ces obstacles semblent résulter d’une combinaison de procédures administratives excessivement complexes nécessitant l’intervention et l’approbation du chef de délégation et du président du parlement, ainsi que de difficultés liées au fait que Mme Bisara Kostadinovska-Stojchevska appartient à un autre parti (d’opposition) et, semble-t-il, à des contraintes budgétaires. La mise en place d’un système plus clair, permettant d’approuver automatiquement tous les déplacements nécessaires dans le cadre des obligations des membres d’une délégation nationale, contribuerait sans aucun doute à éviter de perturber inutilement leur participation effective.
49. Les restrictions de déplacement ne concernent pas uniquement les membres de l’Assemblée, mais également les membres observateurs. Récemment, par exemple, le fait que le Président du Sénat mexicain ait apparemment refusé d’autoriser le sénateur Marko Cortés Mendoza, membre suppléant de la délégation mexicaine à l’Assemblée parlementaire, à se rendre à la partie de session de juin 2025, alors que celui-ci devait remplacer un membre observateur, a suscité des inquiétudes. Il a été suggéré que ce refus était motivé par des raisons politiques, ce qui, là encore, constituerait un motif de refus inapproprié et porterait atteinte aux principes du débat démocratique pluraliste. La Résolution 2087 (2016) et la Recommandation 2083 (2016) ont déjà souligné que les membres des délégations d’observateurs, d’invités spéciaux et de partenaires pour la démocratie devraient bénéficier de protections similaires à celles dont bénéficient les membres de l’Assemblée.

3.3.4. Membres de l’Assemblée dont les déplacements ont été restreints pour des raisons budgétaires ou de financement

50. Il arrive que des membres de l’Assemblée signalent que leurs projets de déplacement dans l’exercice de leurs fonctions ont été restreints ou refusés en raison de restrictions budgétaires ou de financement imposées par leur parlement national. C’est rarement le cas lorsqu’ils doivent participer aux sessions plénières, mais cela peut arriver lorsqu’ils doivent participer à des commissions, des sous-commissions ou des commissions ou sous-commissions ad hoc.
51. Comme l’a clairement montré le questionnaire, si la plupart des délégations nationales financent les frais de déplacement à la session plénière de tous les membres de la délégation nationale, certains pays ont indiqué qu’ils ne finançaient les frais de déplacement des membres suppléants qu’en l’absence du représentant (Croatie, Macédoine du Nord, Portugal, Slovénie, Espagne, par exemple). Par ailleurs, alors que beaucoup de pays financent les voyages des membres titulaires et remplaçants des commissions (Allemagne, France, Suède), certains ne financent les déplacements des remplaçants que lorsqu’ils remplacent un membre titulaire (Autriche, Belgique, Croatie, Irlande, Pays-Bas, Macédoine du Nord, Portugal, Slovénie, Espagne). L’Andorre semble limiter davantage encore la participation aux commissions, en ne finançant que les déplacements effectués pour participer aux commissions présentant un intérêt national. Enfin, de nombreuses délégations nationales disposent d’un budget global ou d’une enveloppe budgétaire, avec des plafonds spécifiques (Croatie, Irlande, Portugal).
52. Les déplacements d’une ancienne membre de la délégation islandaise, Mme Sunna Ævarsdóttir (Islande, SOC), particulièrement active au sein de l’Assemblée de janvier 2017 à janvier 2025, ont donné lieu à des problèmes spécifiques: ses demandes de déplacement ont été refusées en raison des limites budgétaires imposées à ses déplacements pour 2025.

3.3.5. Les «listes noires» établies par l’Azerbaïdjan sur la base des votes des membres sur les résolutions de l’Assemblée

53. L’inviolabilité parlementaire concernant les opinions exprimées ou les votes émis dans les parlements nationaux et les assemblées interparlementaires est un principe démocratique fondamental de toutes les démocraties et est réaffirmée dans l’article 14 de l’AGPI et l’article 40 du Statut du Conseil de l’Europe.
54. L’Azerbaïdjan aurait établi une «liste noire» des membres de l’Assemblée qui ont voté en faveur de certaines résolutions – en particulier la Résolution 2527 (2024), «Contestation, pour des raisons substantielles, des pouvoirs non encore ratifiés de la délégation parlementaire de l’Azerbaïdjan» – ou prononcé des discours dans le cadre des travaux de l’Assemblée, ce qui a déplu au Gouvernement azerbaïdjanais 
			(18) 
			<a href='https://pace.coe.int/fr/news/9570/azerbaijan-pace-president-reacts-to-ban-on-certain-pace-members-entering-the-country'>«Azerbaïdjan:
le Président de l’APCE réagit à l’interdiction faite à certains
membres de l’APCE d’entrer dans le pays»</a>; <a href='https://en.armradio.am/2024/08/26/pace-president-calls-out-bakus-decisions-to-blacklist-76-delegates/'>«PACE
President calls out Baku’s decision to blacklist 76 delegates» –
Public Radio of Armenia</a>; <a href='https://caucasuswatch.de/en/news/pace-president-condemns-azerbaijans-blacklisting-of-members-as-harmful.html'>«PACE
President Condemns Azerbaijan’s Blacklisting of Members as Harmful»
– Caucasus Watch.</a>. Les personnes figurant sur cette liste auraient l’interdiction d’entrer sur le territoire de l’Azerbaïdjan. Le Président Aliyev a récemment annoncé que le Président de l’Assemblée avait été ajouté à cette liste 
			(19) 
			<a href='https://www.1lurer.am/en/2025/04/12/PACE-President-included-in-Baku-s-blacklist-Azerbaijani-Foreign-Ministry/1295482'>PACE
President included in Baku’s blacklist: Azerbaijani Foreign Ministry.</a>.
55. Sur cette «liste noire» figurent au moins 77 membres de l’Assemblée venant des pays suivants: Allemagne, Andorre, Arménie, Autriche, Belgique, Bosnie-Herzégovine, Croatie, Danemark, Espagne, Finlande, France, Grèce, Irlande, Islande, Italie, Lituanie, Luxembourg, Malte, Monaco, Norvège, Portugal, Roumanie, Royaume-Uni, Saint-Marin, Slovénie, Suède, Suisse et Türkiye. Au total, des parlementaires de 38 des 46 États membres du Conseil de l’Europe seraient concernés. L’existence d’une telle liste, établie en réaction à des votes ou des propos exprimés dans l’hémicycle, témoigne d’un manque de bonne foi dans l’approche adoptée par l’Azerbaïdjan à l’égard de ses obligations en tant que membre.
56. Le comportement des autorités azerbaïdjanaises n’a pas seulement conduit à l’établissement de listes, mais a également affecté la liberté de déplacement des membres de l’Assemblée. Ainsi, un membre suisse de l’Assemblée, Niklaus-Samuel Gugger, figure sur la «liste noire». M. Gugger, qui devait participer à une mission d’observation des élections de l’Assemblée parlementaire et de l’OSCE en Azerbaïdjan, a été arrêté au contrôle de l’immigration et retenu pendant trois heures à l’aéroport par la police qui lui a refusé l’entrée, a confisqué son passeport, puis l’a renvoyé en Türkiye. Son passeport ne lui a été restitué qu’à son arrivée sur le territoire turc 
			(20) 
			<a href='https://www.csi-int.org/news/baku-refused-swiss-election-monitor-entry/'>«Baku
deports Swiss election monitor and Nagorno Karabakh supporter</a>»; <a href='https://www.1lurer.am/en/2024/02/05/Swiss-politician-criticizing-Baku-for-aggression-in-Nagorno-Karabakh-was-not-allowed-to-enter-Azerb/1072371'>«Swiss
politician criticizing Baku for aggression in Nagorno-Karabakh was
not allowed to enter Azerbaijan».</a>.

3.3.6. La Pologne et le cas de M. Marcin Romanowski

57. L’arrestation de M. Marcin Romanowski (Pologne, CEPA) et les poursuites engagées à son encontre en Pologne, en 2024, ont conduit le Président de l’Assemblée à défendre son immunité parlementaire, le Procureur général de Pologne à demander la levée de l’immunité de M. Romanowski et l’Assemblée à adopter une résolution levant l’immunité de M. Romanowski 
			(21) 
			Résolution 2572 (2024) «Demande de levée de l’immunité de M. Marcin Romanowski»..
58. À la suite de la levée de son immunité parlementaire, M. Romanowski a quitté la Pologne pour échapper à la justice polonaise et vit depuis en Hongrie. Depuis lors (soit depuis l’automne 2024), M. Romanowski n’a assisté à aucune réunion du Sejm (le parlement polonais) ou de l’Assemblée.
59. Au moment de la présentation des pouvoirs en janvier 2025, le nom de M. Romanowski ne figurait pas sur la liste de la délégation polonaise – à la place, il y avait un espace vide, prévu pour l’un des membres du PiS, le groupe politique de M. Romanowski. Il me semble que le PiS souhaitait que M. Romanowski reste membre de l’Assemblée, mais que les autorités du Sejm – notamment son président – ont retiré son nom, au motif qu’il n’assistait plus aux réunions du Sejm et qu’il se soustrayait à la justice polonaise en vivant en Hongrie. Les autorités du Sejm ont invité le PiS à présenter un candidat suppléant, ce que le parti a refusé de faire. Un espace vide a donc été conservé pour le PiS sur la liste de la délégation nationale polonaise, conformément à la répartition équitable des sièges entre les partis ou groupes politiques au sein de la délégation. Le 26 juin 2025, sous l’autorité de la commission du Règlement, j’ai donc écrit à Mme Agnieszka Pomaska (Pologne, PPE/DC), en tant que cheffe de la délégation nationale polonaise, pour lui demander des précisions sur la procédure et le processus décisionnel ayant conduit à l’exclusion de M. Romanowski de la délégation en janvier 2025. Plus précisément, je lui ai demandé (i) la position du parti PiS, (ii) qui avait pris la décision d’exclure M. Romanowski de la délégation nationale, (iii) les raisons motivant cette exclusion et (iv) le déroulement exact de cette prise de décision. Au moment de la rédaction du rapport, je n’avais reçu aucune réponse à cette lettre.

4. Conclusions et propositions

4.1. Obstacles administratifs dressés par les autorités parlementaires nationales

4.1.1. Composition de la délégation nationale

60. La liberté de circulation des membres de l’Assemblée peut évidemment être affectée par des changements dans la composition d’une délégation nationale. Les délégations nationales à l’Assemblée devraient, conformément aux principes de représentation équitable et de représentation des sexes, et comme le prévoit l’article 6 du Règlement, refléter la composition politique du parlement national concerné.
61. En outre, sous réserve des règles internes d’un parlement national et conformément aux principes de représentation équitable établis dans la Résolution 1798 (2011), «[l]es candidats proposés par un groupe politique devraient en général être acceptés comme membres – représentants ou suppléants – s’ils satisfont aux critères prévus par les règles nationales de procédure» 
			(22) 
			Voir Résolution 1798 (2011) «Représentation équitable des partis ou groupes politiques
des parlements nationaux au sein de leurs délégations à l’Assemblée
parlementaire», par. 6.11..Ceci est évidemment soumis à l’obligation (énoncée à l’article 6.2.c du Règlement) faite à tous les membres de l’Assemblée de s’engager à respecter les objectifs et principes fondamentaux de l’Organisation et à se conformer au Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire.
62. La décision de retirer le nom d’un membre de la délégation nationale alors même que ce membre a été proposé par son parti politique conformément au principe d’une représentation équitable n’est pas sans conséquences, dans la mesure (1) où elle prive le membre concerné de la possibilité de participer aux travaux de l’Assemblée; (2) où les délégations nationales sont souvent constituées et sélectionnées pour la durée du mandat du parlement national, de sorte que cette décision peut interférer avec une répartition convenue; et (3) dans l’esprit d’une représentation équitable, je considère qu’en principe, il devrait appartenir aux partis politiques nationaux de sélectionner leurs membres au sein de la délégation nationale (sans interférence d’autres partis politiques, de la présidence du parlement national ou du comité des présidents). De mon point de vue, c’est la réputation du parti politique qui est engagée dans la sélection de ses membres et il n’appartient à nul autre d’interférer dans ce processus.

4.1.2. L’approche adoptée par les autorités parlementaires et politiques à l’égard de la participation aux réunions de l’Assemblée parlementaire et du financement des déplacements qui y sont liés

63. Si la majorité des délégations nationales et des parlements nationaux utilisent les meilleures pratiques en ce qui concerne la facilitation de la participation et le financement des déplacements des membres afin de leur permettre d’assister aux réunions de l’Assemblée, il existe toutefois de ce point de vue des disparités. Les freins trouvent souvent leurs origines dans une méconnaissance des obligations juridiques découlant de la qualité de membre de l’Assemblée, ou de pratiques administratives inutilement lourdes qui peuvent faire obstacle à une participation pleine et en temps opportun aux travaux de l’Assemblée. Je considère que les normes ci-dessous reflètent les obligations qui s’imposent aux membres et qui devraient être appliquées par toutes les délégations nationales:
  • La participation à toutes les réunions de l’Assemblée devrait être facilitée et les parlements doivent s’efforcer d’éliminer tous les prétendus «contrôles» exercés par les autorités parlementaires ou politiques sur les déplacements des membres de l’Assemblée pour se rendre à ses réunions. La délivrance des autorisations ne devrait en aucun cas être laissée à l’appréciation discrétionnaire d’une autorité pour les membres ayant le droit d’assister à une réunion, et toute autorisation devrait être accordée suffisamment à l’avance, l’idéal étant qu’elle couvre la participation à l’ensemble des réunions attendues de l’Assemblée pour toute la durée de la session.
  • Des considérations budgétaires ne peuvent justifier le refus d’autoriser le déplacement des membres des commissions ou d’autres membres ayant un rôle à jouer dans les réunions de l’Assemblée.
64. Au minimum, cette participation devrait être garantie et financée par le parlement national:
  • en ce qui concerne les déplacements pour se rendre aux réunions plénières (c’est-à-dire, parties de session): pour tous les membres de la délégation nationale (représentantꞏes et suppléantꞏes);
  • en ce qui concerne les déplacements permettant de se rendre aux réunions des commissions:
    • pour les membres titulaires d’une commission;
    • pour les membres remplaçants d’une commission, lorsqu’ils remplacent un membre titulaire, ou lorsque le membre remplaçant est rapporteurꞏe et que l’examen de son rapport est à l’ordre du jour de la réunion de la commission, ou que le membre remplaçant est candidat à l’élection ou à la désignation comme rapporteurꞏe :
  • en ce qui concerne les déplacements pour se rendre aux réunions de la Commission permanente, du Bureau ou du Comité présidentiel: lorsque la présence du membre est requise du fait de ses obligations envers son groupe politique, sa délégation nationale ou sa commission, ou en raison de l’examen d’un rapport.
65. En cas de conflit d’obligations concernant un membre de l’Assemblée, il devrait appartenir à ce dernier (compte tenu de ses priorités personnelles et de celles de son parti politique) de déterminer la manière de concilier ses obligations contradictoires découlant de sa qualité de membre de l’Assemblée, de son mandat au sein de son parlement national, ainsi que de toute autre considération pertinente concernant sa personne. Il ne devrait appartenir à aucune autre autorité d’«autoriser» ou de «refuser» sa présence.

4.2. Conditions d’entrée et de sortie

4.2.1. Visas et conditions d’entrée et de sortie

66. Certains pays continuent d’imposer l’obtention d’un visa aux membres de l’Assemblée qui voyagent dans le cadre des activités de l’Assemblée. Je propose que tous les États membres revoient leurs exigences en matière de visa pour les membres de l’Assemblée qui voyagent dans le cadre des activités de l’Assemblée, afin de veiller à ce que (1) la longueur et la complexité des formalités; (2) le coût; et (3) le délai de délivrance du visa soient réduits au minimum nécessaire, conformément à l’article 13 de l’AGPI qui interdit toute «restriction d’ordre administratif ou autre» entravant le libre déplacement des membres de l’Assemblée.
67. L’approche adoptée par les autorités chargées du contrôle aux frontières des pays de l’espace Schengen – et en particulier celles de la France, de l’Allemagne et de la Suisse – est particulièrement importante étant donné que les réunions plénières de l’Assemblée se tiennent à Strasbourg et que la majorité des réunions des commissions organisées hors de Strasbourg ont lieu à Paris. Si les autorités françaises et allemandes ont confirmé que leurs gardes-frontières sont informés de l’existence des laissez-passer du Conseil de l’Europe, il est regrettable que, dans la pratique, de nombreux gardes-frontières français et allemands semblent mal connaître le Conseil de l’Europe, l’obligation de faciliter les déplacements des membres de l’Assemblée participant aux réunions de l’Assemblée ou les laissez-passer du Conseil de l’Europe. Il arrive parfois, par exemple, que les gardes-frontières cherchent à limiter ou à compter le nombre de jours qu’un membre de l’Assemblée a passé dans l’espace Schengen pour assister à des réunions de l’Assemblée, ce qui laisse penser que l’entrée sur le territoire pourrait lui être refusée au motif que le quota de jours de présence dans l’espace Schengen a été dépassé en raison de sa participation à des réunions de l’Assemblée. Si ces pratiques ne conduisent généralement pas au renvoi d’un membre de l’Assemblée depuis l’aéroport de Francfort ou de Paris, elles peuvent toutefois retarder considérablement leur passage des contrôles aux frontières. Je propose d’inviter les pays membres de l’espace Schengen – et en particulier la France, l’Allemagne et la Suisse – à veiller à ce que leurs gardes-frontières soient informés comme il se doit de l’existence du Conseil de l’Europe (et pas seulement de l’Union européenne), de l’Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l’Europe et du laissez-passer du Conseil de l’Europe, afin d’éviter toute confusion à l’avenir.
68. Je considère que, d’une manière générale, aucune exigence en matière de sortie ne devrait s’imposer aux membres de l’Assemblée et que, lorsque cela est nécessaire pour des raisons exceptionnelles (comme la loi martiale), les procédures ne devraient pas être trop lourdes sur le plan administratif. La délivrance de toute autorisation devrait être automatique ou, à tout le moins, rapide et couvrir toutes les fonctions officielles des membres de l’Assemblée. Afin d’éviter à l’avenir toute confusion quant aux fonctions officielles des membres de l’Assemblée, je propose d’établir, dans l’article 73 du Règlement de l’Assemblée ainsi que dans les Lignes directrices sur la portée des immunités parlementaires, une liste non exhaustive des fonctions officielles couvertes par les immunités de l’Assemblée.

4.2.2. Les «listes noires» basées sur les votes des membres de l’Assemblée et les opinions exprimées au sein de l’Assemblée

69. L’inviolabilité parlementaire concernant les opinions exprimées ou les votes émis au sein des parlements nationaux et des assemblées interparlementaires constitue un principe démocratique fondamental commun aux États démocratiques que consacrent l’article 14 de l’AGPI et l’article 40 du Statut du Conseil de l’Europe.
70. Je propose de préciser dans les Lignes directrices sur la portée des immunités parlementaires qu’«il découle de l’article 14, lu conjointement avec l’article 13 de l’AGPI, que l’imposition de sanctions, de restrictions en matière de déplacement (entrée et sortie) ou l’établissement d’une «liste noire» de membres de l’Assemblée en raison d’opinions exprimées ou de votes émis dans le cadre des débats de l’Assemblée constitue une violation de l’AGPI, des principes démocratiques et des obligations d’un État en sa qualité de membre du Conseil de l’Europe».

4.3. Enquêtes et procédures pénales: interdictions ou restrictions de voyage affectant la capacité d’un membre à se déplacer

4.3.1. Interdictions de voyage et immunités des membres de l’Assemblée parlementaire

71. L’article 13 de l’AGPI énonce une obligation internationale contraignante pour tous les États du Conseil de l’Europe, selon laquelle ces derniers ne peuvent pas imposer de restriction d’ordre administratif ou autre à la liberté de circulation des membres de l’Assemblée vers et depuis les lieux de réunion de l’Assemblée. Par conséquent, autoriser un membre de l’Assemblée à assister à une réunion de l’Assemblée ne relève pas du pouvoir discrétionnaire des autorités, qu’elles soient parlementaires, exécutives, judiciaires, de poursuite, d’enquête ou autres; il s’agit clairement d’une obligation juridiquement contraignante.
72. Il en découle que l’imposition d’une interdiction de voyage à un membre de l’Assemblée, l’empêchant de se rendre aux réunions de l’Assemblée sans l’autorisation explicite d’unꞏe juge, d’unꞏe procureurꞏe ou d’unꞏe responsable d’enquête, est contraire à l’article 13 de l’AGPI. Le même principe est énoncé à l’article 73(6) du Règlement de l’Assemblée, qui dispose que «[d]ans le cas où un membre de l’Assemblée est arrêté ou privé de sa liberté de déplacement […], le Président de l’Assemblée peut prendre une initiative visant à confirmer les privilèges et immunités du membre».
73. Bien que l’article 15 de l’AGPI indique clairement que l’immunité peut être levée si une autorité judiciaire souhaite placer un membre en détention, les articles 13 et 15 ne sont pas explicites quant à la procédure à suivre lorsqu’une autorité souhaite imposer une interdiction de voyager, qui constitue une mesure moins sévère. Dans l’idéal, une interdiction de voyager ne devrait pas être imposée à un membre de l’Assemblée, car cela affecte à l’évidence son mandat et sa capacité à remplir ses fonctions en tant que membre de l’Assemblée. Toutefois, il est concevable qu’un tribunal souhaite restreindre la liberté de circulation d’une personne mise en cause afin de garantir que celle-ci ne puisse se soustraire à la justice. Le placement en détention est une option (qui nécessiterait de demander la levée de l’immunité), mais les principes de la justice exigent de ne pas recourir à la détention si une mesure moins contraignante (telle qu’une restriction de déplacement ou une mise en liberté sous caution) peut être appliquée. Si une autorité judiciaire, de poursuite ou d’enquête souhaite imposer une restriction de voyage, une levée d’immunité serait toutefois nécessaire compte tenu des exigences des articles 13 et 15 de l’AGPI, lus conjointement. Par conséquent, il ressort clairement de la lecture conjointe des articles 13 et 15 de l’AGPI qu’il n’est possible d’imposer une restriction de déplacement à un membre de l’Assemblée que si celle-ci a expressément levé l’immunité du membre.
74. Dès lors, à l’article 73 du Règlement et dans les Lignes directrices sur la portée des immunités parlementaires, il est nécessaire de préciser les éléments suivants:
  • une interdiction de voyager (qu’il s’agisse d’une interdiction absolue ou de l’obligation d’obtenir une autorisation de voyager auprès d’une autorité judiciaire) ne peut être appliquée à un membre de l’Assemblée qu’après levée de son immunité par l’Assemblée en vertu de l’article 73 du Règlement. L’article 73 du Règlement et les lignes directrices figurant à l’annexe III du Règlement requièrent une mise à jour pour clarifier ce point;
  • une interdiction de voyager assortie d’une exemption pour les voyages à destination des lieux de réunion de l’Assemblée ne nécessite pas la levée de l’immunité par l’Assemblée. Une telle interdiction de voyager peut prévoir l’obligation de notifier la participation aux réunions de l’Assemblée (mais non celle de demander l’autorisation d’y participer). Dans ce cas, une liste des réunions de l’Assemblée prévues pour l’année (session) peut être communiquée à l’avance aux autorités compétentes et complétée si des réunions supplémentaires auxquelles doit assister le membre de l’Assemblée concerné sont ajoutées au calendrier.
75. Il est important que les autorités judiciaires, d’enquête et de poursuite soient conscientes des dispositions de l’AGPI et de ce que celles-ci signifient lorsque ces autorités traitent une affaire impliquant un membre de l’Assemblée. Par la force des choses, les questions d’immunité parlementaire, et spécifiquement l’immunité liée à l’Assemblée, ne se présentent que rarement dans le travail quotidien de la plupart des enquêteurs, procureurs et juges. Il est donc essentiel qu’ils soient conscients de la nécessité de consulter les orientations pertinentes lorsque de telles questions se posent. Pour les aider, il conviendrait de mettre à jour les Lignes directrices sur les immunités parlementaires (qui, à ce jour, ne concernent que les articles 14 et 15 de l’AGPI, mais pas l’article 13) et de demander que ces lignes directrices soient intégrées ou mentionnées, selon le cas, dans les documents d’orientation nationaux destinées aux autorités d’enquête, de poursuite et judiciaires compétentes.
76. Il est important que les Lignes directrices sur la portée des immunités parlementaires adoptent une approche pratique afin d’aider les autorités judiciaires et de poursuite à répondre aux défis et questions pratiques spécifiques (tels que la détention, les poursuites ou les restrictions de voyage), et non une simple approche de principe qui peut être moins claire pour les praticiens peu au fait des exigences de l’AGPI. Je propose que l’Assemblée demande à toutes les autorités nationales de diffuser ces lignes directrices mises à jour et de prendre les mesures nécessaires pour qu’elles soient prises en compte dans les directives nationales à l’intention des enquêteurs ou des enquêtrices, des procureurꞏeꞏs et des juges, ainsi que dans leur formation. L’Assemblée pourrait en outre examiner si l’élaboration d’une formation HELP (le programme européen de formation aux droits de l'homme pour les professionnels du droit) axée sur ces lignes directrices serait utile à cet égard.
77. En outre, il est important que les autorités parlementaires, judiciaires, d’enquête et de poursuite au niveau national comprennent la portée et l’application des protections appliquées dans leur propre pays en matière d’immunité parlementaire. Cela est important du point de vue de l’État de droit, l’objectif étant que la loi soit appliquée uniformément et correctement, et parce que cela a une incidence sur l’application de l’article 15 de l’AGPI. Je considère que toutes les autorités nationales devraient communiquer au secrétariat de l’Assemblée et, par son intermédiaire, à la Commission du Règlement toute information utile sur la portée et l’application de leur législation nationale en matière d’immunité parlementaire. Les éléments communiqués devraient être compilés et publiés sur le site Internet de l’Assemblée afin d’améliorer la clarté et la compréhension du fonctionnement des lois sur l’immunité parlementaire des États membres du Conseil de l’Europe et de leur interaction avec l’article 15 de l’AGPI.

4.3.2. Procédure à suivre lorsqu’une levée de l’immunité d’un membre de l’Assemblée parlementaire peut être nécessaire en vertu des articles 13 et 15 de l’AGPI

78. Lorsqu’une autorité judiciaire, d’enquête ou de poursuite souhaite imposer des restrictions à un membre de l’Assemblée, ou peut-être même alors qu’elle a déjà imposé des restrictions à un membre de l’Assemblée – que ce soit au moyen d’une interdiction de voyager, d’un placement en détention ou de l’engagement de poursuites pénales – sans avoir obtenu la nécessaire levée de l’immunité, les mesures suivantes devraient être prises:
  • Les autorités parlementaires (habituellement, la présidence du parlement) devraient écrire aux autorités compétentes pour mettre en avant l’existence des immunités prévues par l’AGPI et l’impossibilité juridique d’imposer la restriction en question (interdiction de voyager, placement en détention ou, le cas échéant, engagement de poursuites) sans que l’immunité du membre concerné ne soit levée par l’Assemblée. Cette lettre devrait expliquer la procédure à suivre pour demander la levée de l’immunité et souligner l’importance de ne pas imposer de telles mesures (ou de les annuler) tant que l’immunité n’a pas été levée.
  • Si nécessaire, la présidence de l’Assemblée écrit à la présidence du parlement national pour lui rappeler les immunités prévues par l’AGPI, en faisant valoir la défense de l’immunité du membre de l’Assemblée concerné et en demandant à la présidence de prendre les mesures nécessaires pour que les autorités nationales (dont les autorités exécutives et judiciaires) aient pleinement connaissance de ces obligations et des mesures à prendre pour demander la levée de l’immunité avant l’imposition de toute mesure d’interdiction de voyager, de détention ou, le cas échéant, l’engagement de poursuites judiciaires.
79. Les Lignes directrices sur la portée des immunités parlementaires devraient être mises à jour afin de clarifier la procédure de demande de levée d’immunité comme suit (sous réserve des exigences procédurales nationales éventuellement applicables):
  • l’«autorité compétente» (habituellement, le ou la juge chargéꞏe de l’affaire, le ou la procureurꞏe généralꞏe ou le ou la ministre de la Justice) présente à la présidence de l’Assemblée, par écrit, une demande de levée de l’immunité;
  • la demande de levée de l’immunité doit préciser les raisons de la demande, en particulier les éléments visés par la levée d’immunité, notamment:
    • si la demande vise à lever l’immunité aux fins (1) d’une détention; (2) d’une restriction de la liberté de déplacement (par exemple, interdiction de voyager ou autre restriction de déplacement); et/ou (3) de l’engagement de poursuites;
    • les accusations ou les infractions visées par la demande;
    • si des mesures moins contraignantes ont été examinées, qui permettraient au membre de continuer à participer pleinement aux activités de l’Assemblée (dans l’affirmative, en quoi consistent ces mesures et les raisons pour lesquelles elles ont été, ou n’ont pas été retenues).

4.3.3. Mise à jour des Lignes directrices sur la portée des immunités parlementaires dont bénéficient les membres de l’Assemblée parlementaire, qui figurent à l’annexe III du Règlement de l’Assemblée, et modification de l’article 73 du Règlement

80. Je propose d’apporter des modifications à l’article 73 du Règlement afin de clarifier davantage les circonstances dans lesquelles les immunités s’appliquent, les procédures à suivre dans le cas où une assistance est nécessaire pour faire valoir cette immunité et les circonstances dans lesquelles une levée de l’immunité est requise, ainsi que de préciser qu’une levée d’immunité est requise:
  • avant l’imposition de restrictions aux déplacements d’un membre de l’Assemblée (à moins qu’il soit expressément prévu que cette restriction ne s’applique pas aux déplacements effectués dans le cadre des activités de l’Assemblée);
  • avant le placement en détention d’un membre de l’Assemblée;
  • avant l’engagement de poursuites à l’encontre d’un de ses ressortissants membre de l’Assemblée par un Etat, dans le cas où le droit national dudit Etat requiert la levée d’immunité; ou
  • avant l’engagement de poursuites à l’encontre d’un membre de l’Assemblée, dans tout autre État membre.
81. Je propose de mettre à jour les Lignes directrices sur la portée des immunités parlementaires, qui ne couvrent actuellement que les articles 14 et 15 de l’AGPI:
  • ajout d’une partie traitant de l’article 13 de l’AGPI;
  • ajout d’une partie destinée à servir de guide pratique pour les enquêteurs ou les enquêtrices, les procureurꞏes et les juges lorsqu’ils sont chargés d’une affaire pénale concernant un membre de l’Assemblée. Cette nouvelle partie devrait définir clairement la procédure à suivre pour demander la levée de l’immunité (en tenant compte des enseignements tirés des affaires relatives à MM. Marcin Romanowski et Armen Gevorgyan). L’objectif est que ces lignes directrices puissent servir de modèle aux autorités nationales lorsqu’elles élaborent leurs propres directives internes sur la marche à suivre dans les affaires pénales impliquant des membres de l’Assemblée.

4.4. Conséquences d’un manquement d’une délégation nationale ou d’un État membre aux obligations qui lui incombent en vertu de l’Accord général sur les privilèges et immunités

82. À l’heure actuelle, le respect et la mise en œuvre concrète de l’AGPI relèvent en grande partie de la compétence de la présidence de l’Assemblée, qui traite les cas individuels qui se présentent conformément à l’article 73.6 du Règlement. La plupart des problèmes ou des problèmes potentiels peuvent être résolus rapidement par des discussions informelles ou formelles, qui peuvent nécessiter que la présidence de l’Assemblée rédige des lettres ou participe à des rencontres, et que les autorités nationales compétentes prennent des mesures pour éviter que la situation ne se reproduise. Toutefois, il arrive que certaines difficultés persistent.
83. Il est nécessaire d’étudier les mesures que l’Assemblée pourrait prendre pour affirmer et défendre clairement les immunités des membres de l’Assemblée lorsque les immunités prévues par l’AGPI ne sont pas respectées. Il serait envisageable que la présidence fasse une déclaration lors d’une partie de session, dans laquelle elle mentionnerait tout obstacle récemment imposé à la liberté de circulation des membres de l’Assemblée et demanderait à l’État concerné et à ses autorités compétentes de prendre les mesures nécessaires pour empêcher que de tels manquements aux obligations énoncées dans l’AGPI ne se reproduisent. Je propose un amendement à l’article 73 afin de clarifier cette possibilité et ainsi d’inciter au respect de l’AGPI, et en particulier des dispositions relatives à la libre circulation prévues par l’AGPI.