1. Introduction
1. La crise politique qui a éclaté en Arménie après
l’élection présidentielle du 19 février 2008 et dont le point culminant
ont été les tragiques événements des 1er et
2 mars 2008 a été suivie de près par l’Assemblée parlementaire et
a été au centre de la procédure de suivi engagée au titre de l’Arménie
ces 15 derniers mois. Dans la
Résolution
1609 (2008) qu’elle a adoptée le 17 avril 2008, l’Assemblée a énoncé
quatre exigences concrètes en vue de résoudre la crise politique.
C’est ainsi qu’elle a invité les autorités arméniennes:
- à abroger, conformément aux
recommandations de la Commission européenne pour la démocratie par le
droit (Commission de Venise), les amendements apportés le 17 mars
2008 à la loi relative à la tenue de réunions, assemblées, rassemblements
et manifestations;
- à engager immédiatement une enquête indépendante, transparente
et crédible sur les événements du 1er mars
2008 et les circonstances qui les ont déclenchés;
- à libérer toutes les personnes détenues sur la base d’accusations
apparemment artificielles et politiquement motivées et qui, à titre
personnel, n’ont commis ni actes de violence ni infractions graves;
- à engager, avec toutes les forces politiques du pays,
un dialogue ouvert et sérieux sur les réformes du système politique,
du processus électoral, de la liberté et du pluralisme des médias,
de la liberté de réunion, de l’indépendance du judiciaire et du
comportement de la police, que l’Assemblée avait demandées au paragraphe
8 de la Résolution 1609
(2008).
2. Le 25 juin 2008, l’Assemblée a adopté la
Résolution 1620 (2008) sur la mise en œuvre par l’Arménie, de la
Résolution 1609 (2008). Dans cette Résolution, l’Assemblée considérait que,
malgré la volonté politique manifestée par les autorités pour répondre
aux demandes formulées dans la
Résolution 1609 (2008), les progrès étaient insuffisants pour satisfaire aux
exigences énoncées dans cette résolution. Par conséquent, l’Assemblée
a décidé d’envisager la possibilité de suspendre le droit de vote
de la délégation arménienne lors de sa partie de session de janvier
2009 si les conditions de la
Résolution
1609 (2008), ainsi que celles énoncées dans la
Résolution 1620 (2008), ne sont pas remplies d’ici là.
3. Sans préjudice des autres conditions énoncées par l’Assemblée,
nos travaux se sont concentrés sur deux exigences qui doivent, à
nos yeux, être résolues en priorité en vue de surmonter la crise
politique, à savoir: engager une enquête indépendante, transparente
et crédible sur les événements des 1er et 2 mars 2008
et les circonstances qui les ont déclenchés; ainsi que libérer toutes
les personnes détenues sur la base d’accusations apparemment artificielles
et politiquement motivées liées à ces événements.
4. Compte tenu de la controverse politique qui s’est fait jour
autour des événements des 1er et 2 mars,
ainsi que des versions divergentes auxquels ils ont donné lieu,
il est crucial d’engager une enquête indépendante, transparente
et crédible en vue d’établir la vérité sur ce qui s’est réellement
passé les 1er et 2 mars 2008 ainsi que
sur les circonstances qui ont déclenché les événements en question.
Cette vérité est essentielle au processus de réconciliation entre
les différentes forces politiques du pays. De plus, ce n’est qu’une
fois que la vérité aura été établie que toutes les autorités et
toutes les forces politiques concernées seront en mesure de s’attaquer
aux causes profondes de la crise en vue de garantir que de tels
événements ne se reproduiront pas à l’avenir.
5. D’autre part, comme nous l’indiquions dans de précédents rapports
, et comme l’indiquait également l’Assemblée
dans sa
Résolution 1620
(2008), la détention continue de partisans de l’opposition
en relation avec les événements des 1er et
2 mars 2008 est un sujet de dispute qui continue de nuire aux relations
entre les autorités et l’opposition, ce qui sape la possibilité
d’instaurer un dialogue constructif sur les réformes demandées par
l’Assemblée et, en fin de compte, sur la normalisation de la vie
politique en Arménie. Par ailleurs, comme l’indiquait l’Assemblée
dans sa
Résolution 1643
(2009), la nature des accusations portées à l’encontre des
partisans de l’opposition ainsi que les questions relatives aux
procédures juridiques engagées contre eux, peuvent donner à penser
qu’un nombre non négligeable de ces personnes ont été inculpées
et emprisonnées pour des motifs politiques, ce qui risque d’avoir
de graves conséquences si on ne s’attaque pas à ce problème.
6. Le 27 janvier 2009, l’Assemblée a adopté la
Résolution 1643 (2009) sur la «mise en œuvre par l’Arménie, des
Résolutions 1609 (2008) et
1620 (2008)». Dans cette Résolution, l’Assemblée indiquait qu’elle demeurait
insatisfaite et profondément préoccupée par la situation des personnes
privées de leur liberté à la suite des événements des 1er et
2 mars 2008. Elle considérait néanmoins que les mesures prises par
les autorités en vue de l’ouverture d’une enquête indépendante,
transparente et crédible, les grâces accordées par le Président
de l’Arménie ainsi que l’initiative prise par le Président de l’Assemblée
nationale de réviser les articles 225 et 300 du Code pénal constituent
une indication de la volonté des autorités arméniennes de satisfaire
aux demandes formulées par l’Assemblée dans ses
Résolutions 1609 (2008) et
1620 (2008). C’est la raison pour laquelle l’Assemblée avait décidé,
à ce stade, de ne pas suspendre les droits de vote des membres de
la délégation arménienne auprès de l’Assemblée parlementaire et
avait invité la commission de suivi de l’Assemblée à examiner, sur
une base permanente, les progrès réalisés par les autorités arméniennes dans
la mise en œuvre des résolutions pertinentes de l’Assemblée et de
proposer toute mesure supplémentaire que la situation lui imposerait
de prendre.
7. Lors de la réunion qu’elle a tenue à Valence les 30 et 31
mars 2009 et lors de celle qu’elle a tenue à Strasbourg du 27 au
29 avril 2009, la commission de suivi a examiné les progrès effectués
par l’Arménie pour ce qui concerne la mise en œuvre des résolutions
pertinentes de l’Assemblée. A ces deux occasions, nous nous sommes
félicités des modifications apportées aux problématiques articles
225 et 300 du Code pénal arménien, lesquelles, de l’avis de la Commission
de Venise, constituent une nette amélioration de la loi en ce qu’elles
réduisent les possibilités d’en donner une interprétation abusive
ou trop large. Toutefois, lors de ces réunions, nous avons également
souligné que ce qui comptera en définitive, lorsque l’Assemblée
évaluera le respect par les autorités arméniennes des demandes qu’elle
a exprimées dans ses
Résolutions
1609 (2008),
1620 (2008) et
1643 (2009), ce sera l’impact de ces changements sur la libération
des personnes détenues en relation avec les événements des 1er et
2 mars 2008. Suite aux discussions qu’elle a eues sur les développements
intervenus récemment en Arménie, la commission de suivi a, lors
de la réunion qu’elle a tenue à Strasbourg du 27 au 29 avril 2009,
décidé de demander au Bureau de l’Assemblée d’inscrire au calendrier de
sa partie de session de juin la question du fonctionnement des institutions
démocratiques en Arménie.
8. Le présent rapport a pour objet de faire le bilan des développements
intervenus récemment eu égard à la mise en œuvre par les autorités
arméniennes des demandes formulées par l’Assemblée à propos de la résolution
de la crise politique qui a éclaté après l’élection présidentielle
de 2008. Pour les travaux que nous avons accomplis au cours de ces
quinze derniers mois, nous nous sommes fondés sur la conviction
selon laquelle la meilleure façon de garantir la mise en œuvre des
changements et des réformes demandés par l’Assemblée, dans l’intérêt
de l’Arménie, est d’entretenir un dialogue ouvert et constructif
avec les autorités arméniennes, notamment avec son parlement. Parallèlement,
nous avons toujours précisé que nous n’hésiterons pas à demander
des sanctions si ce dialogue n’est pas couronné de succès et s’il
apparaît que les autorités manquent de la volonté politique nécessaire
pour satisfaire aux demandes de l’Assemblée.
9. Dans notre évaluation, cette approche s’est révélée globalement
positive. Résultat de cette volonté de dialogue ainsi que des efforts
déployés par d’autres institutions du Conseil de l’Europe et notamment
par le Commissaire aux droits de l’homme et la Commission de Venise
– avec lesquels nous avons travaillé en étroite coopération au cours
de ce processus – des progrès ont été accomplis et des initiatives
ont été et sont prises par les autorités en vue de satisfaire aux
demandes de l’Assemblée. Les progrès sur les questions qui nous occupent
ont par moments été bien lents et nous regrettons que, de temps
à autre, les autorités semblaient être disposées à agir uniquement
sous la pression de l’Assemblée et sous la menace de sanctions.
10. Des progrès ont toutefois été accomplis ces quinze derniers
mois, avec pour point d’orgue l’adoption par l’Assemblée nationale,
le 19 juin 2009, d’une déclaration d’amnistie générale soumise par
le Président de l’Arménie à l’Assemblée nationale le 16 juin 2009.
En conséquence, sinon la totalité, la plupart du moins des personnes
privées de liberté en liaison avec les événements des 1er et
2 mars 2008 ont été libérées. Si la libération de ces personnes
ne marque pas l’aboutissement du processus de résolution de la crise
politique consécutive à l’élection présidentielle de février 2008,
et si d’autres actions demeurent nécessaires à cet égard, les autorités,
par l’adoption de cette déclaration d’amnistie, ont non seulement
répondu à une exigence cruciale de l’Assemblée mais, surtout, elle
a ouvert un nouveau chapitre dans la normalisation de la vie politique
arménienne.
11. D’autres développements importants sont intervenus à l’échelon
interne pendant les trois derniers mois, qui ont modifié le paysage
politique de l’Arménie.
12. Le 15 mars 2009, le Congrès national arménien (HAK), la coalition
des partis d’opposition soutenant M. Levon Ter-Petrossian, a annoncé
qu’il participera aux élections municipales d’Erevan qui se tiendront
le 31 mai 2009, et a nommé son président, M. Levon Ter-Petrossian,
candidat à la fonction de maire d’Erevan. De plus, les membres de
la coalition au pouvoir ont décidé de participer aux élections municipales
en tant que partis distincts.
13. Conformément à la loi sur l’administration locale d’Erevan,
qui est entrée en vigueur en janvier 2009 à la suite des changements
constitutionnels de 2005, le maire d’Erevan est élu au scrutin indirect.
Le conseil municipal est élu au scrutin proportionnel et les têtes
de liste de chaque parti sont également les candidats de ces partis
au poste de maire d’Erevan. Le maire est alors élu par le conseil
municipal nouvellement élu. Il convient de noter que la capitale
héberge plus de 40 % de la population totale du pays et qu’elle
est à l’origine de plus de la moitié de la production économique
du pays. C’est la raison pour laquelle les élections municipales
d’Erevan revêtent une dimension nationale.
14. Dans notre déclaration du 5 mai, nous nous sommes félicités
de la candidature de M. Ter-Petrossian qui constitue un signal clair
de la part du Congrès national arménien, lequel indique par là qu’il
souhaite surmonter la crise politique et jouer son rôle de force
politique au sein des institutions démocratiques du pays. Parallèlement,
nous en avons appelé aux autorités et à tous les acteurs politiques
pour qu’ils veillent à ce que ces élections soient entièrement conformes
aux normes démocratiques du Conseil de l’Europe. Ces élections ont
été observées, au nom du Conseil de l’Europe, par le Congrès des
Pouvoirs locaux et régionaux de l’Europe. Les partis de l’opposition
ont allégué que les élections au Conseil municipal d’Erevan du 31
mai 2009 avaient été entachées de fraudes et de violations. Dans
la déclaration qu’elle a publiée le lendemain du scrutin, la mission
d’observation du Congrès a déclaré que «[sa] satisfaction de voir
les citoyens élire leur conseil municipal a été tempérée par les
manquements dans la conduite du scrutin». Les autorités ont reconnu
que des irrégularités s’étaient produites, indiquant cependant qu’elles
étaient localisées et n’avaient pas pesé sur le résultat global
des élections. Le Procureur général a engagé des poursuites contre
un certain nombre de personnes pour des fraudes électorales commises
lors de ces élections.
15. Autre développement, la Fédération révolutionnaire arménienne
(Dashnaktsutyun) a annoncé qu’elle quittait la coalition gouvernementale
parce qu’elle désapprouve la signature, par l’Arménie et la Turquie,
d’une feuille de route en vue de normaliser leurs relations. Cette
décision a augmenté le nombre des partis composant l’opposition
au sein de l’Assemblée nationale, qui s’en est trouvée globalement
renforcée.
16. Du 15 au 18 juin 2009, dans la semaine qui a précédé la partie
de session de juin de l’Assemblée, nous avons effectué une visite
supplémentaire en Arménie afin d’évaluer les progrès réalisés par
les autorités arméniennes concernant le respect des exigences de
l’Assemblée. Lors de notre visite, nous avons rencontré notamment
le Président de l’Arménie, le Président de l’Assemblée nationale,
le ministre des Affaires étrangères, le Procureur général, le Défenseur
des droits de l’homme de l’Arménie, le Président de la Commission
d’enquête parlementaire ad hoc, le Président de la Commission permanente
de l’Assemblée nationale sur la science, l’éducation, la culture,
la jeunesse et le sport (responsable de la réforme des médias), les
membres du groupe d’enquête dissous, le Président et les membres
de la délégation nationale arménienne auprès de notre Assemblée,
des représentants de l’opposition, parmi lesquels le dirigeant du
Congrès national arménien, les avocats des dirigeants de l’opposition
dont les affaires sont en cours d’examen devant les tribunaux, les
familles des victimes des événements des 1er et
2 mars 2008, ainsi que des représentants de la société civile et
des membres de la communauté diplomatique d’Erevan. Nous tenons
à remercier l’Assemblée nationale d’Arménie, ainsi que le Représentant
spécial du Secrétaire Général du Conseil de l’Europe à Erevan, pour
ce programme d’excellente qualité ainsi que l’hospitalité et l’assistance
dont notre délégation a bénéficié. Nos constatations et conclusions
sur cette visite sont contenues dans le présent exposé des motifs,
qui modifie et actualise le texte examiné lors de la réunion de
la commission de suivi tenue le 5 juin 2009 à Paris. Nous avons
également préparé un avant-projet de résolution pour examen et adoption
par la commission.
2. Mise
en œuvre des exigences de l’Assemblée
2.1. Liberté de réunion
17. Dans sa
Résolution
1620 (2008), l’Assemblée accueillait favorablement l’adoption des
amendements à la loi relative à la tenue de réunions, assemblées,
rassemblements et manifestations, conformément aux recommandations
de la Commission de Venise et aux demandes de l’Assemblée. Toutefois,
elle avait également exhorté les autorités arméniennes à garantir
la liberté de réunion dans la pratique et donc à faire en sorte
qu’aucune restriction injustifiée ne soit imposée aux rassemblements
organisés par l’opposition dans le respect de la loi relative à
la tenue de réunions, assemblées, rassemblements et manifestations,
notamment au regard des lieux demandés.
18. Toutefois, comme mentionné dans notre précédent rapport
, un certain nombre de manifestations demandées
par l’opposition ont eu lieu sur la base d’un accord de dernière
minute entre la police et les organisateurs et non sur celle d’une
autorisation explicite de tenir le rassemblement de la part de l’administration
municipale d’Erevan. De plus, un certain nombre de manifestations
spontanées ont été dissoutes par la police. C’est la raison pour
laquelle dans notre rapport nous avions instamment prié les autorités
de tenir leur promesse et de veiller à ce que le droit fondamental
à la liberté de réunion soit pleinement respecté en Arménie.
19. Malheureusement, les pratiques évoquées ci-dessus se sont
poursuivies au cours de ces derniers mois, malgré les critiques
de l’Assemblée. Le 9 février 2009, le Congrès national arménien
a demandé au Conseil municipal arménien l’autorisation de tenir
un rassemblement le 1er mars 2009, devant
le Matenadaran au centre d’Erevan, en vue de commémorer les événements
des 1er et 2 mars. Cette demande a été
rejetée par le Conseil municipal qui a proposé, à l’instar de ce
qu’il avait fait pour certains des rassemblements précédents, un
autre lieu de réunion, à savoir un stade de football à Erevan. Cette
proposition avait été rejetée par les organisateurs qui ont jugé
le lieu de remplacement inadéquat. Les organisateurs qui estimaient
que le rejet de leur demande n’avait pas été notifié dans le délai
prévu par la loi et donc que la manifestation avait été autorisée,
ont maintenu leur intention d’organiser ladite manifestation au
centre d’Erevan, ce que la police a finalement autorisé mais sans
l’autorisation explicite des autorités municipales d’Erevan. De
plus, un certain nombre de «manifestations spontanées» de groupes
de personnes demandant que le public puisse participer au rassemblement
de l’opposition du 1er mars 2009 auraient
été dissoutes par la police.
20. Nous avons connaissance d’un certain nombre d’autres cas dans
lesquels les demandes des partis d’opposition d’organiser des manifestations
et des réunions publiques avaient été rejetées par les autorités municipales
de différentes localités pour des raisons qu’on pourrait estimer
douteuses. Toutefois, nous regrettons que, dans la plupart des cas,
sinon dans tous, les organisateurs de ces manifestations n’aient
pas fait appel des décisions des autorités municipales devant les
tribunaux
, ce qui constitue pourtant un droit explicitement
énoncé dans la loi relative à la tenue de réunions, assemblées,
rassemblements et manifestations. Cela signifie concrètement que
les tribunaux n’ont pas eu la possibilité de s’exprimer à propos de
l’interprétation à donner de la loi relative à la tenue de réunions,
assemblées, rassemblements et manifestations, et, en fin de compte,
prévient toute possibilité pour la Cour européenne des droits de
l’homme de se prononcer sur ces cas. Nous sommes bien sûr conscients
qu’une éventuelle requête auprès de la Cour de Strasbourg n’affecterait
pas la décision de refuser d’autoriser un rassemblement particulier,
mais un possible arrêt de la Cour constituerait une importante ligne
directrice à la fois pour les autorités et pour les organisateurs
à propos de l’interprétation de la loi relative à la tenue de réunions,
assemblées, rassemblements et manifestations en pleine conformité
avec le droit à la liberté de réunion énoncé dans la Convention
européenne des droits de l’homme. Par conséquent, nous encourageons
les organisateurs qui se voient refuser leurs demandes à utiliser
tous les moyens nationaux légaux à leur disposition pour contester
le refus.
2.2. Enquête indépendante,
transparente et crédible sur les événements du 1er mars 2008 et
les circonstances qui les ont déclenchés
21. Le 16 juin 2008, l’Assemblée nationale arménienne
a adopté une résolution dans laquelle elle constituait une Commission
parlementaire ad hoc «chargée d’enquêter sur les événements des
1er et 2 mars 2008 ainsi que les circonstances
qui les ont déclenchés». Toutefois, en raison de la composition
de cette commission, dont la plupart des membres appartenaient à
la coalition gouvernementale, et en raison du boycottage dont elle
a fait l’objet de la part des forces loyales à M. Ter-Petrossian,
le Commissaire aux droits de l’homme, ainsi que l’Assemblée, ont
conclu qu’elle n’aurait pas, aux yeux de l’opinion arménienne, la
crédibilité et l’impartialité requises. C’est la raison pour laquelle
le Commissaire a proposé la création d’un petit groupe d’experts indépendants
pour établir les faits en ce qui concerne les événements des 1er et
2 mars 2008 et les circonstances qui les ont déclenchés. Ce groupe
devrait être composé sur la base de la parité entre l’opposition et
la coalition gouvernementale et d’un consensus mutuel à propos de
ses membres. La commission d’enquête parlementaire devrait alors
être chargée de tirer les conclusions politiques en se fondant sur
les résultats du groupe d’experts. Cette proposition a été acceptée
par les autorités et l’opposition. Le groupe d’enquête, composé
de deux membres nommés par la coalition gouvernementale, un membre
nommé par le parti Héritage, un membre nommé par le Congrès national
arménien et un membre nommé par le défenseur des droits de l’homme
d’Arménie a été officiellement créé par décret présidentiel le 23
octobre 2008.
22. Au cours de la visite que nous avons effectuée en Arménie,
nous avons rencontré, le 15 janvier 2009, les membres du groupe
d’enquête. A cette date, nous craignions déjà qu’en raison de la
controverse politique à propos de la situation des personnes privées
de liberté à la suite des événements des 1er et
2 mars 2009 ainsi que de l’assertion émise à cette époque par les
autorités, selon laquelle les événements des 1er et
2 mars 2008 avaient pour objet d’usurper le pouvoir et de renverser,
dans la violence, l’ordre constitutionnel d’Arménie, les membres
du groupe d’enquête, et plus particulièrement ceux nommés par l’opposition
et le gouvernement, auraient du mal à mener leurs travaux avec la
neutralité requise. De plus, malgré le fait que les travaux dudit
groupe d’enquête devaient être menés de manière totalement confidentielle,
on a observé des fuites vers la presse, qui trouvent leur origine
chez les deux parties, à propos des enquêtes en cours au sein du
groupe ont mis à rude épreuve les relations de travail entre les
membres du groupe. Toutefois, nous espérons que ces derniers seront
en mesure de surmonter ces difficultés et d’accomplir leurs tâches conformément
au mandat énoncé dans le décret présidentiel.
23. Malheureusement, les travaux du groupe d’enquête se sont heurtés
à de graves problèmes. Le 5 mai 2009, après que le contenu de son
rapport à la Commission d’enquête parlementaire ad hoc eut été révélé
à la presse d’opposition, M. Vahe Stepanian
,
président du groupe, a annoncé que lui-même ainsi que les membres
nommés par la coalition gouvernementale allaient suspendre leur
participation au groupe jusqu’au 18 mai 2009, afin de «prendre un
peu de repos après des travaux difficiles». Le groupe d’enquête s’est
à nouveau réuni le 17 mai 2009 mais a suspendu ses travaux quelques
jours plus tard, M. Vahe Stepanian ayant annoncé, le 20 mai 2009,
sa démission en raison des tensions insurmontables qui paralysent les
travaux du groupe et du fait qu’il n’était plus en mesure de concilier
les différentes parties. Bien que le Défenseur des droits de l’homme
se soit déclaré prêt à nommer un nouveau membre du groupe, celui-ci
a véritablement cessé de travailler à partir de ce moment et il
a été dissous par décret présidentiel le 9 juin 2009. Les documents
collectés par le groupe d’enquête ont par la suite été soumis à
la Commission d’enquête parlementaire ad hoc.
24. Les véritables raisons de la dissolution du groupe d’enquête
sont controversées. Les autorités en font porter la seule responsabilité
aux membres du groupe représentant l’opposition qui, selon eux,
ont politisé ses travaux et essayé, plutôt que d’établir des faits,
d’endosser le rôle de la police et du ministère public. De leur côté,
les membres de l’opposition affirment que les autorités ont décidé
de dissoudre le groupe d’enquête lorsqu’il est devenu clair qu’il
mettait au jour des éléments qui remettaient gravement en cause
la version officielle des événements des 1er et
2 mars 2008. En outre, les membres du groupe représentant l’opposition affirment
que les autorités ont toujours été réticentes à coopérer pleinement
avec le groupe et à lui fournir toutes les informations qu’il demandait.
Selon eux, cette attitude est une autre preuve que les autorités
n’ont jamais sincèrement souhaité que l’enquête aboutisse.
25. Lors de notre rencontre avec le Défenseur des droits de l’homme
et le Président du groupe d’enquête dissous, l’un et l’autre ont
déclaré que les représentants nommés par les autorités et par l’opposition
avaient la même part de responsabilité dans la politisation des
travaux du groupe. Ils nous ont indiqué, en conclusion, que ces
membres avaient continué de travailler en tant que représentants
des forces politiques qui les avaient désignés, plutôt qu’en tant
qu’experts indépendants, comme le prévoyait le décret instituant
le groupe d’enquête. Ils ont regretté, à cet égard, le faible niveau
de professionnalisme des membres désignés par les deux camps.
26. Lors de notre rencontre avec les anciens membres du groupe
d’enquête, les tensions insurmontables qui les opposaient et la
volonté permanente de part et d’autre de politiser les débats étaient
clairement visibles. De notre point de vue, il est par conséquent
difficile d’imaginer que le groupe d’enquête, sous cette forme, aurait
pu accomplir sa mission avec le professionnalisme et l’impartialité
qui leur étaient demandés. Cela étant, nous ne pouvons que regretter
la rapidité et la manière avec lesquelles les autorités ont dissous
le groupe d’enquête, sans qu’il y ait eu de véritable concertation
avec l’opposition lorsque des problèmes sont apparus au sein du
groupe. Cette attitude risque de renforcer les soupçons, au sein
de l’opinion publique arménienne, selon lesquels les autorités auraient
dissous le groupe d’enquête lorsque ses conclusions commençaient
à devenir embarrassantes pour le pouvoir.
27. L’enquête indépendante, transparente et crédible sur les événements
du 1er et 2 mars 2008, et les circonstances
qui les ont déclenchés, est l’une des exigences-clés formulées par
l’Assemblée. Nous soulignons, à cet égard, qu’une enquête indépendante,
transparente et crédible sur les événements des 1er et 2 mars 2008,
et les circonstances qui les ont déclenchés, demeure cruciale pour
surmonter la crise politique et pour garantir qu’un tel effondrement
du système démocratique ne puisse se répéter à l’avenir. C’est la
raison pour laquelle il ne faut pas que la dissolution du groupe
d’enquête vienne entraver la conclusion d’une enquête indépendante
et crédible demandée par l’Assemblée.
28. Depuis la dissolution du groupe d’enquête, la Commission d’enquête
parlementaire ad hoc est à présent le seul organe à mener une enquête
générale sur les événements des 1er et
2 mars 2008 et sur leurs circonstances, de sorte que ses travaux
ont maintenant une importance accrue. Cette commission a continué de
travailler parallèlement au groupe d’enquête et elle a semble-t-il
fait preuve dans ses travaux d’une indépendance plus grande qu’on
ne l’avait pensé initialement. Elle aurait ainsi produit un certain
nombre de constatations et de conclusions importantes, qui pour
certaines remettraient en question la version des autorités concernant
les événements des 1er et 2 mars 2008.
Par ailleurs, le Front révolutionnaire arménien ayant quitté la
coalition gouvernementale, la prédominance de cette dernière sur
la commission s’en est trouvée relativement réduite. Nous suggérons
que l’Assemblée nationale examine les possibilités de renforcer le
rôle de l’opposition dans les travaux de la commission, en vue d’accroître
sa crédibilité auprès de l’opinion publique arménienne. Cependant,
nous tenons à souligner qu’en définitive ce seront les résultats
de l’enquête parlementaire qui permettront de savoir si les exigences
d’impartialité et de crédibilité ont été respectées et si d’autres
investigations sont nécessaires.
29. Nous nous inquiétons vivement de témoignages de membres du
groupe d’enquête, y compris de son président, selon lesquels les
autorités auraient souvent été réticentes à coopérer pleinement
avec le groupe et à lui fournir les informations qu’il demandait.
Ce problème a aussi été mentionné par le Président de la Commission
d’enquête parlementaire ad hoc, qui nous a indiqué que sa commission
avait également rencontré des difficultés pour obtenir les informations
complètes qu’elle avait demandées et que la coopération de certains
organes de l’Etat, notamment les forces de l’ordre et les services
de sécurité et d’enquête, laissait fortement à désirer. A cet égard,
nous rappelons que, dans sa
Résolution
1643 (2009), l’Assemblée invitait les autorités arméniennes à s’assurer
que les investigations demandées par l’Assemblée reçoivent la coopération la
plus entière possible et un accès illimité aux informations de la
part de tous les organismes et fonctionnaires de l’Etat sans exception.
30. En dépit de ses conditions de travail tendues, tous les anciens
membres du groupe d’enquête ont convenu que ce dernier avait trouvé
des preuves et établi des faits qui pourraient être utiles pour
l’enquête, un rapport préliminaire ayant même été adressé à la Commission
d’enquête parlementaire ad hoc. Il est important que les constatations
et les conclusions du groupe d’enquête soient prises en compte dans
l’investigation. Nous demandons donc instamment à la Commission
d’enquête parlementaire ad hoc de demander à tous les anciens membres
du groupe d’enquête de lui soumettre leur témoignage individuel,
et de publier ces constatations et conclusions combinées, ainsi
que tous les éléments pertinents que le groupe pourrait avoir recueillis,
comme le prévoit le décret présidentiel instituant le groupe d’enquête.
La publication de ces témoignages contribuerait aussi, dans une
certaine mesure, à démentir les allégations selon lesquelles le groupe
aurait été dissous parce que ces constatations embarrassaient les
autorités.
31. Nous nous inquiétons tout particulièrement du fait que l’enquête
du Procureur général sur les dix décès survenus en liaison avec
les événements des 1er et 2 mars 2008
n’a, à ce jour, abouti à aucun résultat concret. Nous avons pris
clairement conscience des conséquences humaines de cet échec à l’occasion
d’une rencontre très émouvante avec les proches des victimes, qui
se sont plaints du manque d’informations de la part des autorités
compétentes et ont indiqué avoir le sentiment d’être mis à l’écart
par les organes chargés d’enquêter sur les décès de leurs proches
disparus. Nous appelons donc instamment les autorités à garantir que
ces enquêtes soient menées de façon satisfaisante et dans les meilleurs
délais. A ce sujet, nous nous félicitons de la décision du Président
arménien de demander au Procureur général d’adresser à la Commission d’enquête
parlementaire ad hoc un rapport approfondi sur ses investigations
concernant les dix décès, afin que cette commission puisse évaluer
les investigations menées à ce jour et progresser dans ses conclusions.
2.3. Libération des
personnes privées de liberté à la suite des événements des 1er et
2 mars 2008
32. A la suite de notre visite de janvier 2009, le Président
de l’Assemblée nationale a signé, le 22 janvier 2009, un décret
instituant, au sein de l’Assemblée, un groupe de travail spécial
chargé de rédiger, dans un délai d’un mois et en coopération avec
les organes compétents du Conseil de l’Europe, des amendements aux articles
225 et 300 du Code pénal de l’Arménie afin de remédier aux lacunes
juridiques que présentent lesdits articles et de les aligner sur
les normes du Conseil de l’Europe.
33. Conformément au décret du Président de l’Assemblée nationale,
le groupe de travail a, dès le début de ses travaux, cherché à coopérer
avec la Commission de Venise du Conseil de l’Europe. Le 2 février,
le Président de ce groupe de travail, M. Davit Harutyunyan a rencontré,
à Tbilissi, des représentants de la Commission de Venise. Le 19
février 2009, le groupe de travail a demandé à la Commission de
Venise d’émettre un avis sur les projets d’amendements au Code pénal
soumis au parlement. Le 26 février 2009, le Parlement a adopté ces
amendements en première lecture. La Commission de Venise a adopté
son avis sur ces amendements les 13 et 14 mars 2009, à la suite
de quoi les recommandations de la Commission de Venise ont été prises
en compte dans les amendements qui ont été adoptés en deuxième et
dernière lecture le 18 mars 2009. Ces amendements ont ensuite été
ratifiés par le Président de l’Arménie le 20 mars 2009.
34. Alors que l’ancien article 300 définissait l’usurpation de
pouvoir comme des actions visant à s’emparer du pouvoir par la violence
ou à renverser par la violence l’ordre constitutionnel, le nouvel
article définit aujourd’hui l’usurpation de pouvoir comme la prise
de pouvoirs du Président de la République, de l’Assemblée nationale,
du Gouvernement ou de la Cour constitutionnelle par la violence,
la menace de la violence ou tout autre moyen non prévu dans la Constitution
de l’Arménie, en limitant ainsi considérablement le champ d’interprétation.
35. S’agissant de l’article 225 (émeutes) du Code pénal, l’article
amendé contient à présent une définition claire des émeutes et pénalise
l’organisation (en tant qu’acte volontaire) d’émeutes et non la
simple participation violente à de tels événements. En outre, l’ancien
article 225-3 qui était problématique (émeutes accompagnées de meurtres)
a été supprimé. Les émeutes ont maintenant été ajoutées en tant
que circonstances aggravantes aux articles du Code pénal traitant
du crime, qui dans ces articles est clairement défini comme la privation
illégale et volontaire de la vie d’une personne.
36. Dans son avis
,
la Commission de Venise a considéré que les amendements proposés
au Code pénal représentent globalement une amélioration par rapport
aux dispositions actuelles en ce qu’ils réduisent les possibilités
de leur donner une interprétation abusive ou trop large. Dans nos
déclarations, nous nous sommes félicités de ces amendements dans
lesquels nous voyions une amélioration globale du Code pénal ainsi
qu’un pas important vers la résolution de la situation des personnes
privées de liberté en liaison avec les événements des 1er et
2 mars 2009, suite à des accusations apparemment artificielles et
politiquement motivées. Nous n’avons toutefois pas manqué de souligner
que ce qui permettra, en définitive, d’établir si les exigences
de l’Assemblée à cet égard ont été respectées, c’est l’impact de
ces amendements sur la situation de ces personnes. De plus, nous
avons également souligné qu’il existe d’autres catégories de personnes
privées de liberté en liaison avec les événements de mars qui sont
considérées comme problématiques par l’Assemblée et qui ne sont
pas couvertes par les modifications apportées au Code pénal.
37. Suite aux modifications apportées au Code pénal, le Procureur
général a révisé les chefs d’inculpation contre les sept membres
de l’opposition qui sont considérés comme les meneurs des événements
des 1er et 2 mars 2008. Les charges portées
contre tous les sept au titre de l’article 300 (usurpation de pouvoir)
ont été abandonnées et celles portées au titre de l’article 225-3
(émeutes accompagnées de meurtres) ont été modifiées et relèvent
maintenant de l’article 225-1 (organisation d’émeutes). L’abandon
des charges au titre de l’article 300 revêt une importance particulière
car il confirme que les autorités ont accepté la conviction que nous
nous étions forgée de longue date et selon laquelle les événements
des 1er et 2 mars 2008 ne peuvent être
considérés comme une tentative de coup d’Etat.
38. Suite aux modifications intervenues, les sept membres de l’opposition
ont été poursuivis uniquement au titre de l’article 225-1, sauf
pour ce qui concerne M. Sasun Mikaelyan qui est également poursuivi
au titre de l’article 235 (possession illégale d’armes à feu) et
M. Miasnik Malkhasyan qui est également poursuivi au titre des articles
38 (complicité) et 316 (violence contre un représentant des autorités)
du Code pénal. De plus, étant donné que les événements des 1er et
2 mars ne sont plus considérés comme une tentative organisée de renverser
le pouvoir de l’Etat, la procédure engagée contre les sept a été
divisée en cinq procédures distinctes.
39. Des interrogations se sont fait jour à propos de la décision
du Procureur général d’engager des poursuites contre les sept personnes
au titre de l’article 225-1 en vertu duquel il doit être établi
que la personne inculpée ait personnellement organisé les émeutes.
Toutefois, nous estimons qu’il appartient à présent aux tribunaux
de se prononcer sur la question de savoir si les inculpations prononcées
au titre de l’article 225-1 récemment amendé peuvent être étayées.
Les instances judiciaires se seraient effectivement montrées critiques
pour ce qui concerne les poursuites engagées au titre de l’article
225-1.
40. Il est troublant de constater qu’un nombre assez important
de témoins à charge ont prétendu avoir fait l’objet de pressions
de la part de la police pour effectuer des faux témoignages contre
les sept membres de l’opposition faisant actuellement l’objet de
poursuites judiciaires. C’est ce qui a amené le Défenseur des droits de
l’homme de l’Arménie à publier, le 7 mai 2009, une déclaration dans
laquelle il exprime ses vives préoccupations à propos des nombreuses
plaintes qui parviennent à son Bureau à propos de la manière dont la
police obtient des «preuves» en exerçant des pressions sur les témoins
potentiels. Cette question constitue pour nous une source de vives
préoccupations.
41. Le 13 mai 2009, la cour a estimé, à la suite d’une expertise
psychiatrique, que M. Shant Harutiunian –un des sept membres de
l’opposition faisant l’objet d’une procédure judiciaire – ne jouissait
pas de toutes ses facultés mentales lors des actions qu’il avait
entreprises les 1er et 2 mars 2008 et
a donc décidé d’abandonner les poursuites et de le libérer. De plus,
depuis notre dernier rapport, trois autres personnes ont introduit,
en liaison avec les événements de mars 2008, un recours en grâce
auquel il a été donné suite.
42. Comme mentionné ci-dessus, toutes les catégories de personnes
privées de liberté en liaison avec les événements des 1er et
2 mars ainsi que celles dont le maintien en détention est jugé problématique
par l’Assemblée ne sont pas couvertes par les modifications apportées
au Code pénal en mars 2009. Cela est notamment le cas pour les personnes
accusées et inculpées uniquement sur la base de témoignages de la police,
en l’absence de preuves irréfutables. Dans la
Résolution 1620 (2008), l’Assemblée estimait que les jugements fondés sur le
seul témoignage de la police sans preuve corroborante ne sont pas
acceptables. Malheureusement, les autorités n’ont à ce jour pris
aucune mesure pour remédier à cette question. Cela est particulièrement
préoccupant à la lumière du nombre croissant d’allégations selon
lesquelles la police avait fait pression sur des témoins pour les
inciter à effectuer de faux témoignages à l’encontre d’un certain
nombre de membres de l’opposition.
43. Suite aux préoccupations exprimées à propos de la nature des
accusations et des procédures judiciaires engagées à l’encontre
des personnes détenues après les événements de mars 2008, nous avons
la profonde conviction que seule la libération de toutes les personnes
arrêtées dans le cadre des événements des 1er et 2 mars
2008 qui n’avaient pas commis à titre personnel de crime violent
débouchera sur le dialogue et la réconciliation dont l’Arménie a
si cruellement besoin. Nous avons ainsi, à de nombreuses reprises,
proposé que le Président envisage de recourir à son droit constitutionnel
de gracier les personnes privées de liberté à la suite des événements
des 1er et 2 mars 2008. Toutefois, lors
des entretiens que nous avons eus avec lui, le Président a indiqué
qu’il serait réticent à effectuer une telle démarche tant que ces
affaires seraient encore à l’examen devant les instances judiciaires.
44. Maintenant que les affaires contre des dirigeants de l’opposition
– désormais au nombre de six – arrivent à une conclusion devant
les instances judiciaires, on observe dans la presse de nombreux
signaux et rapports selon lesquels les autorités arméniennes envisagent
sérieusement la possibilité de gracier les personnes arrêtées en
liaison avec les événements de mars 2008. En effet, le 28 mai 2009,
répondant aux questions de la presse à l’occasion de la fête nationale
de l’Arménie, le Président a déclaré que: «Une
amnistie a été annoncée pour la dernière fois en 2006. Si au cours
de ces trois années l’idée d’annoncer une nouvelle amnistie a mûri
au sein de la société, alors je suis prêt à user de mon droit constitutionnel.
J’en appelle donc aux forces politiques et au conseil public pour
qu’ils présentent, au Cabinet du président, leur recommandation sur
la nécessité et les conditions d’une amnistie; et s’il apparaît
que la majorité de la société estime, après mûre réflexion, que
l’amnistie est nécessaire, j’userai de mon droit constitutionnel
et demanderai à l’Assemblée nationale d’adopter une loi[d’amnistie]” Cette réponse a immédiatement
été suivie de déclarations de nombreux dirigeants et personnalités
politiques, y compris le Défenseur des droits de l’homme de l’Arménie, qui,
tous, ont indiqué que le moment était venu pour une amnistie générale
en liaison avec les événements des 1er et
2 mars 2008.
45. Le 16 juin 2009, le Président arménien a finalement adressé
à l’Assemblée nationale une proposition d’amnistie générale. Cette
proposition a été examinée dès le lendemain par la Commission permanente
de l’Assemblée nationale sur les questions politiques et juridiques,
sous la présidence de M. Davit Harutyunyan, qui préside aussi la
délégation arménienne auprès de notre Assemblée. Le Président arménien
ayant accepté les changements proposés par la Commission permanente
sur les questions politiques et juridiques, l’amnistie générale
a été adoptée par l’Assemblée nationale réunie en session extraordinaire
le 19 juin 2009.
46. Du fait de la décision de ne faire bénéficier de l’amnistie
que les personnes privées de liberté en relation avec les événements
des 1er et 2 mars 2008 dont l’affaire
a été jugée par un tribunal, la forme de cette amnistie est relativement
complexe
.
Elle consiste en une amnistie générale pour les personnes condamnées
à des peines de prison allant jusqu’à 3 ans et pour les personnes
accusées d’infractions passibles d’une peine de prison n’excédant
pas 3 ans. De plus, le décret prévoit une amnistie pour certaines
catégories de personnes condamnées à des peines de prison de 3 à
5 ans. Ces catégories incluent notamment les personnes âgées, les
personnes ayant des problèmes de santé, les anciens combattants
et les personnes condamnées en relation avec les événements des
1er et 2 mars 2008. Les personnes de
ces catégories dont la peine dépasse 5 ans d’emprisonnement ne seront
pas libérées, mais verront leur peine réduite de moitié. L’amnistie
exclut expressément les personnes condamnées en vertu de certains
articles du Code pénal portant globalement sur les infractions violentes
aggravées ou la détention illégale d’armes.
47. Actuellement, six affaires sont encore en instance devant
les tribunaux, concernant six membres de l’opposition considérés
par les autorités comme des «meneurs». Leurs affaires, au moment
de la rédaction, sont proches de leur dénouement, les verdicts étant
attendus dans les prochains jours. Des peines de prison de 6 ans
ont été requises contre cinq de ces six personnes, qui devraient
donc très probablement être couvertes par l’amnistie, puisque les
tribunaux arméniens prononcent généralement des peines moins sévères que
celles qui ont été requises par le ministère public. Une seule de
ces personnes, accusée de détention illégale d’armes, ne devrait
pas être libérée, mais verra sa peine réduite de moitié. Les autorités
nous ont assuré à plusieurs reprises que ces affaires seraient jugées
dans les prochains jours. Toutefois, en cas de retard, nous demanderons
aux autorités que les personnes concernées soient libérées en attendant
la conclusion de leur procès.
48. Du fait de l’amnistie, sinon la totalité, la plupart du moins
des personnes privées de liberté en relation avec les événements
des 1er et 2 mars 2008 seront libérées.
Nous projetons d’examiner chacune des quelques affaires restantes
afin de veiller à qu’elles ne concernent pas des personnes relevant
des catégories de condamnation que l’Assemblée juge problématiques.
49. Un petit nombre de personnes poursuivies en relation avec
les événements des 1er et 2 mars 2008,
y compris au titre de l’article 225 du Code pénal, sont actuellement
en fuite. Cependant, l’amnistie leur sera aussi applicable, au terme
de leur procès, si elles se présentent d’elles-mêmes aux autorités
avant le 31 juillet 2009. Compte tenu de la longueur des procédures
judiciaires contre les autres membres de l’opposition, nous demandons
aux autorités de permettre à ces personnes de rester en liberté
en attendant la conclusion de leur procès.
50. Par principe, les actions civiles ne sont pas couvertes par
l’amnistie. Certains, dans l’opposition, craignent par conséquent
que les autorités engagent des actions civiles contre les personnes
poursuivies pour organisation d’émeutes (article 225-1 du Code pénal),
au motif des dommages contre des biens publics occasionnés par ces
émeutes. Il est évident que toute action civile engagée par une
autorité publique sous ce motif irait à l’encontre – et sera considérée
par nous comme allant délibérément à l’encontre – de l’intention
et de la finalité de l’amnistie. Nous demandons donc instamment
aux autorités de veiller à ce qu’aucune autorité publique n’engage
une telle action en responsabilité civile.
51. L’amnistie ne présuppose pas que les personnes condamnées
aient reconnu leur culpabilité. Ces personnes conservent donc pleinement
leurs droits de faire appel de leur condamnation, même après avoir été
libérées au titre de l’amnistie.
52. En conclusion, nous nous félicitons vivement de la proposition
d’une déclaration d’amnistie de la part du Président de l’Arménie,
et de son adoption rapide par l’Assemblée nationale d’Arménie. Par
cette mesure, les autorités arméniennes ont répondu à une exigence
cruciale de l’Assemblée. Bien que les autorités aient ouvert avec
cette amnistie un nouveau chapitre important dans le processus de
normalisation de la vie politique arménienne, le processus n’est
toutefois pas achevé et d’autres mesures importantes restent encore
à prendre, en particulier pour ce qui concerne l’enquête transparente,
crédible et impartiale exigée par l’Assemblée. Nous soutiendrons
et accompagnerons pleinement ce processus dans le cadre de la procédure de
suivi régulière de l’Assemblée concernant l’Arménie.
2.4. Réforme des médias
53. Dans la
Résolution
1609 (2008), l’Assemblée a considéré qu’il faut garantir l’indépendance
vis-à-vis de tout intérêt politique ou économique aussi bien de
la Commission nationale de radio et de télévision (l’organe de régulation
des médias en Arménie) que du Conseil de télévision et de radiodiffusion.
Elle a en outre considéré que la composition de ces organes devrait
être révisée afin d’assurer qu’ils soient véritablement représentatifs
de la société arménienne. Par ailleurs, dans la
Résolution 1620 (2008), l’Assemblée a rappelé que l’Arménie a besoin d’un environnement
de médias pluralistes et, faisant référence à l’arrêt de la cour
de Strasbourg à propos du refus d’accorder une licence de radiodiffusion
à la chaîne A1+, a appelé les autorités à garantir une procédure
ouverte, équitable et transparente d’octroi des licences conformément
aux principes directeurs adoptés le 26 mars 2008 par le Comité des
Ministres du Conseil de l’Europe et à la jurisprudence de la Cour
de Strasbourg.
54. Comme nous l’avons mentionné dans notre précédent rapport,
l’Assemblée nationale d’Arménie a établi, en étroite consultation
avec les services compétents du Conseil de l’Europe, une série de
mesures législatives en vue de la réforme des médias. Certaines
mesures-clés portent sur la procédure de nomination des membres
de la Commission nationale de radio et de télévision et du Conseil
de télévision et de radiodiffusion, en vue de garantir l’indépendance
de ces deux organes et, partant, celle de leurs travaux. Dans son
avis sur les amendements à la loi relative à la radiotélédiffusion,
l’experte engagée par le Conseil de l’Europe note que pratiquement
toutes les importantes recommandations formulées par les experts
du Conseil de l’Europe ont été adoptées. Toutefois, elle note également
qu’un certain nombre de questions restent en suspens. Les membres
des organes de régulation mentionnés ci-dessus sont, pour moitié,
nommés par le Président de l’Arménie et pour moitié, par l’Assemblée
nationale. Alors que les amendements instaurent, pour les membres
nommés par l’Assemblée nationale, une procédure de nomination qui
est largement conforme aux normes internationales, la procédure
de nomination par le Président n’est pas fixée dans la loi sur la
radio et la télévision. C’est pourquoi l’avis recommande que le
Président publie une ordonnance établissant une procédure pour les
nominations présidentielles à ces deux organes qui refléterait celle
énoncée dans la loi relative aux nominations par l’Assemblée nationale.
L’avis note que, tant qu’une telle procédure n’aura pas été instaurée,
les nominations ne seront pas conformes aux normes du Conseil de
l’Europe et que ces organes ne pourront être considérés comme étant
indépendants tant que tous leurs membres n’auront pas été nommés par
le biais d’une procédure politiquement neutre. Par ailleurs, l’avis
recommande que la liste d’incompatibilité avec l’appartenance à
ces organes devrait être étendue en vue d’en exclure les hommes
politiques en activité.
55. Nous soutenons fermement ces recommandations ainsi que toutes
les autres qui figurent dans l’avis et invitons les autorités à
y donner suite. Par ailleurs, nous notons que les amendements ne
stipulaient pas explicitement que la composition des deux organes
de régulation devraient refléter un vaste échantillon de la société
arménienne. Nous recommandons au parlement d’envisager d’adopter
de nouveaux amendements en vue de garantir que, dans le cadre de
la procédure de nomination énoncée dans la législation actuelle,
les deux organes reflètent la société arménienne.
56. Le 9 septembre 2008, l’Assemblée nationale d’Arménie a adopté
un amendement à la loi sur la radio et la télévision annulant l’adjudication
des fréquences de radiodiffusion jusqu’en 2010, lorsque l’introduction
de la radiodiffusion numérique en Arménie aura été achevée. Cet
amendement a été vivement critiqué par l’opposition arménienne.
Dans la
Résolution 1643
(2009), l’Assemblée a déclaré que, sans vouloir porter de jugement
sur les raisons qui sous-tendent cet amendement, les autorités ne
devraient pas invoquer les exigences techniques de l’introduction
de la radiodiffusion numérique comme raison pour ajourner indûment la
mise en place d’une procédure ouverte, équitable et transparente
de délivrance des licences de radiodiffusion comme l’a demandé l’Assemblée.
Le Conseil de l’Europe a chargé un analyste d’évaluer les implications
techniques de l’introduction de la radiodiffusion numérique en Arménie.
Ses conclusions préliminaires sont actuellement en cours d’examen
auprès des autorités arméniennes.
2.5. Autres réformes
nécessaires pour remédier aux causes sous-jacentes de la crise
57. Dans la
Résolution
1609 (2008), l’Assemblée appelait les autorités et l’opposition
à engager un dialogue sur la réforme du système politique, du judiciaire
et de la police, ainsi que sur une réforme électorale en vue de
remédier aux causes sous-jacentes de la crise politique qui a éclaté
après l’élection présidentielle de février 2008.
58. Les initiatives prises par les autorités dans ces domaines
n’ont pas encore été finalisées. Depuis notre dernier rapport, nous
avons placé l’accent sur l’enquête indépendante sur les événements
des 1er et 2 mars 2008 ainsi que sur
la libération des personnes privées de liberté en liaison avec ces
événements. Cependant, les événements des 15 derniers mois ont montré
clairement que les réformes demandées par l’Assemblée sont pertinentes
et qu’il est plus que jamais nécessaire que les autorités les mettent
en œuvre sans plus tarder.
59. La controverse générale concernant les élections d’Erevan
montre que l’opinion publique doute encore fortement du caractère
démocratique du processus électoral. Cette méfiance, ainsi que les
carences et les violations observées, soulignent la nécessité d’une
réforme électorale. Ce processus a été engagé après les élections
présidentielles au sein d’un groupe de travail spécial créé par
l’Assemblée nationale, mais celui-ci n’a eu dernièrement qu’une
activité limitée. L’Assemblée nationale devrait maintenant donner
la priorité aux travaux de ce groupe de travail afin de modifier
le droit électoral. Toutes les forces politiques, représentées ou non
au Parlement, devraient être associées étroitement à ce processus,
et les modifications devraient réunir un large consensus parmi ces
forces. En outre, la Commission de Venise devrait être invitée à
donner un avis sur ces modifications, et ses recommandations devraient
être prises en compte avant que les modifications soient adoptées
en dernière lecture.
60. Les conclusions préliminaires de la Commission d’enquête parlementaire
ad hoc, de même que celles du groupe d’enquête, ont soulevé de graves
interrogations concernant le comportement de la police pendant et
après les événements des 1er et 2 mars
2008. De plus, lors des procès des sept dirigeants de l’opposition, plusieurs
témoins de l’accusation qui avaient témoigné contre les accusés
se sont rétractés, indiquant que la police avait obtenu ces témoignages
sous la contrainte. Ces faits soulignent la nécessité d’une réforme profonde
de la police ainsi que de la mise en place d’un authentique contrôle
public des forces de police, comme le demande l’Assemblée. Une coopération
devrait être recherchée avec les organes compétents du Conseil de
l’Europe, et ce processus devrait être engagé sans retard.
61. Dans les rapports précédents, le fait que les tribunaux acceptaient
d’office les demandes de mise en détention du ministère public était
déjà mentionné comme posant problème. De surcroît, les procédures judiciaires
contre les sept membres de l’opposition ont renforcé le sentiment
que l’indépendance de la justice est encore loin d’être satisfaisante
en Arménie. Des réformes doivent être engagées sans retard pour
changer cette situation, qui explique dans une large mesure la méfiance
de la population vis-à-vis des autorités.
3. Conclusion
62. Grâce aux efforts de l’Assemblée et d’autres organes
du Conseil de l’Europe, et également à l’excellente coopération
avec la délégation arménienne auprès de l’Assemblée ces quinze derniers
mois, les autorités ont accompli certaines avancées vers le respect
des exigences de l’Assemblée. Les modifications controversées de
la loi relative à la tenue de réunions, d’assemblées, de rassemblements
et de manifestations ont été abrogées, une enquête sur les événements
des 1er et 2 mars 2008 a été ouverte,
d’importants changements ont été apportés aux dispositions du Code
pénal qui posaient problème et plusieurs réformes recommandées par
l’Assemblée ont été engagées. Ce processus a aujourd’hui pour point
d’orgue une amnistie grâce à laquelle, sinon la totalité, la plupart
du moins des personnes privées de liberté en relation avec les événements des
1er et 2 mars 2008 seront libérées. Même
si la déclaration d’amnistie signifie que les autorités ont accédé à
une exigence essentielle de l’Assemblée et, surtout, que l’Arménie
a franchi une étape décisive sur la voie de la normalisation politique
et de la résolution de la crise, ces succès ne doivent pas être
considérés comme marquant la fin du processus. La commission de
suivi devrait soutenir et accompagner pleinement ce processus dans
le cadre de la procédure de suivi régulière de l’Assemblée concernant
l’Arménie.
***
Commission chargée du rapport: commission
pour le respect des obligations et engagements des Etats membres
du Conseil de l’Europe (commission de suivi)
Renvoi en commission: Résolution n° 1115 (1997)
Projet de résolution approuvé
à l’unanimité par la commission le 22 juin 2009
Membres de la commission: M. Serhiy Holovaty (Président), M. György
Frunda (1er Vice-président), M. Konstantin Kosachev (2e
Vice-président), M. Leonid Slutsky (3e Vice-président), M. Aydin
Abbasov, M. Pedro Agramunt,
M. Miloš Aligrudić, Mme Meritxell Batet Lamaña, M. Ryszard Bender, M. József Berényi, M. Luc
van den Brande, M. Mevlüt Çavuşoğlu,
M. Sergej Chelemendik, Mme Lise Christoffersen,
M. Boriss Cilevičs, M. Georges
Colombier, M. Telmo Correia,
Mme Herta Däubler-Gmelin, M. Joseph Debono
Grech, M. Juris Dobelis, Mme Josette Durrieu, M. Mátyás Eörsi, Mme Mirjana
Ferić-Vac, M. Giuseppe Galati, M. Jean-Charles Gardetto, M. József Gedei, M. Marcel
Glesener, M. Charles Goerens, M. Andreas Gross, M. Michael Hagberg, M. Holger Haibach, Mme Gultakin Hajibayli, M. Michael Hancock, M. Davit Harutyunyan, Mme Olha Herasym’yuk,
M. Andres Herkel, M. Kastriot
Islami, M. Mladen Ivanić,
M. Miloš Jevtić, Mme Evguenia Jivkova,
M. Emmanouil Kefaloyiannis, M. Hakki Keskin,
M. Haluk Koç, Mme Katerina Konečná, M. Jaakko Laakso, Mme Sabine
Leutheusser-Schnarrenberger, M. Göran Lindblad, M. René van der
Linden, M. Eduard Lintner,
M. Pietro Marcenaro, M. Bernard Marquet,
M. Dick Marty, M. Miloš Melčák, M. Jean-Claude Mignon, M. João Bosco Mota Amaral, Mme Yuliya Novikova, M. Theodoros Pangalos, Mme Elsa Papadimitriou, M. Alexander Pochinok, M. Ivan Popescu, Mme Maria Postoico, Mme Marietta de Pourbaix-Lundin, M. Christos Pourgourides, M. John Prescott, Mme Mailis Reps, M. Andrea Rigoni, M. Ilir Rusmali, M. Armen Rustamyan, M. Indrek Saar, M. Oliver Sambevski, M. Kimmo Sasi, M. Samad Seyidov, M. Sergey
Sobko, M. Christoph Strässer, Mme Chiora Taktakishvili,
M. Mihai Tudose, Mme Öslem Türköne, M. Egidijus Vareikis, M. José Vera Jardim, M. Piotr Wach, M. Robert Walter, M. David Wilshire, Mme Renate Wohlwend,
Mme Karin S. Woldseth, Mme Gisela Wurm, M. Andrej Zernovski.
N.B.: Les noms des membres qui ont participé à la réunion
sont indiqués en gras
Secrétariat de la commission: Mme Chatzivassiliou,
M. Klein, Mme Trévisan, M. Karpenko