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Addendum au rapport | Doc. 11793 Addendum III | 26 janvier 2009

Visite du Comité des Présidents en Russie dans le but de discuter de la mise en œuvre de la Résolution 1633 (2008) de l'Assemblée parlementaire sur «Les conséquences de la guerre entre la Géorgie et la Russie»

Rapporteur : M. Lluís Maria de PUIG i OLIVE, Espagne, SOC

1. A la suite de l'adoption de la Résolution 1633 (2008) de l’Assemblée parlementaire sur «Les conséquences de la guerre entre la Géorgie et la Russie», le Bureau de l'Assemblée, à sa réunion du 3 octobre 2008, a décidé d'inscrire à l'ordre du jour de la réunion de la Commission permanente organisée à Madrid le 27 novembre 2008 un point sur «Les suites données à la Résolution 1633 (2008)» et d'inclure dans l'avant-projet d'ordre du jour de la partie de session de janvier 2009 de l'Assemblée un rapport sur la mise en œuvre de la Résolution 1633 (2008) de l'Assemblée parlementaire. La commission de suivi a été saisie de cette question pour rapport et la commission des questions politiques et la commission des questions juridiques et des droits de l'homme saisies pour avis. Le Bureau a également demandé à la commission des migrations, des réfugiés et de la démographie de préparer un rapport sur «Les conséquences humanitaires de la guerre entre la Géorgie et la Russie», qui pourrait également être débattu durant la partie de session de janvier 2009. En outre, le Bureau a décidé de charger le Comité des Présidents de se rendre à Tbilissi et à Moscou pour discuter avec les autorités, au plus haut niveau, de la mise en œuvre de la Résolution 1633 (2008) de l'Assemblée parlementaire et de faire rapport à la Commission permanente sur les suites données à cette Résolution.
2. La visite à Tbilissi s'est déroulée les 30 et 31 octobre 2008. Les conclusions du Comité des Présidents à la suite de cette visite figurent dans mon Mémorandum à l’attention du Bureau de l'Assemblée en date du 14 novembre 2008 (AS/Bur (2008) 81). La visite du Comité des Présidents en Russie était prévue pour les 13 et 14 novembre 2008. Toutefois, comme cette date coïncidait avec le Sommet de Nice UE-Russie, bon nombre des réunions à haut niveau nécessaires ne pouvaient pas avoir lieu, et le programme ne respectait en conséquence pas les conditions fixées par le Bureau pour cette visite. Il a alors été décidé de reporter la visite à Moscou au 18 à 20 janvier 2009.
3. Durant la visite à Moscou, du 18 au 20 janvier 2009, le Comité des Présidents s'est entretenu avec M. Boris Gryzlov, Président de la Douma d'État, M. Sergey Mironov, Président du Conseil de la Fédération, M. Sergey Lavrov, ministre des Affaires étrangères, M. Yury Zubakov, Secrétaire adjoint du Conseil de Sécurité, M. Vladimir Lukin, Médiateur de la Fédération de Russie, M. Anatoly Nogovitsyn, adjoint au Chef d’Etat-major du ministre de la Défense, ainsi qu’avec M. Konstantin Kosachev, Président de la Délégation russe auprès de l'Assemblée et d'autres membres de la Délégation.
4. À l'issue de la visite, j'ai fait une déclaration dans laquelle j'exprimais ma satisfaction pour la franchise des discussions tenues avec les autorités russes et pour leur volonté d'entamer un dialogue constructif et ouvert avec l'Assemblée. Le texte de ma déclaration figure en annexe au présent Mémorandum.
5. Du point de vue des autorités russes, la Résolution 1633 (2008), adoptée par l'Assemblée en octobre 2008, est fortement biaisée en défaveur de la Russie et ne tient pas compte de la position russe concernant les événements d'août dernier. Le ministre des Affaires étrangères nous a informés que les autorités russes n'étaient donc pas disposées à mettre en œuvre ses recommandations et conditions. J'ai souligné que, de notre point de vue, la Résolution 1633 (2008) offre une feuille de route totalement transparente, impartiale et concrète pour traiter les conséquences de la guerre, non seulement pour les parties concernées, mais également pour l'Assemblée elle-même. J'ai donc exprimé mon regret que, du fait de la position russe, les autorités russes aient accédé à très peu de demandes de l'Assemblée.
6. Les autorités russes ont réitéré leur position, à savoir qu'elles ne reconsidéreront pas leur reconnaissance de l'indépendance de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud. J'ai pour ma part exprimé le point de vue que la question du statut de ces deux régions, et la reconnaissance par les Russes de leur indépendance, continuera d'être un point de divergence forte avec l'Assemblée, mais j'ai insisté sur le fait que la question du statut ne devrait pas servir d’argument à la Russie pour ne pas répondre aux autres préoccupations de l'Assemblée soulevées dans la Résolution 1633 (2008), et plus particulièrement à celles liées à la stabilité à court et à long terme le long des frontières administratives avec l'Ossétie du Sud et l'Abkhazie, au respect des droits de l'homme de tous les citoyens géorgiens et aux conséquences humanitaires de la guerre entre la Géorgie et la Russie.
7. Les autorités russes ont exprimé leur préoccupation à l’égard de la recrudescence de la tension et des provocations le long des frontières administratives entre la Géorgie et les régions séparatistes de l'Ossétie du Sud et de l'Abkhazie, et du fait que de futures hostilités entre la Russie et la Géorgie ne sont pas à exclure. Sans entrer dans une discussion pour savoir qui est à blâmer pour la recrudescence des tensions et des provocations, j'ai fait remarquer que le Comité des Présidents a déjà exprimé sa préoccupation concernant l'aggravation de la tension et des provocations le long des frontières administratives, après sa visite à Tbilissi. Du point de vue du Comité, ceci étaye la position de l'Assemblée selon laquelle, à l'évidence, il faut une présence continue d’observateurs internationaux, pouvant accéder totalement et sans restriction à tous les secteurs de l'ancienne zone de conflit, et qu'il conviendrait d'établir un format nouveau, internationalisé, pour la force de maintien de la paix. À cet égard, j'ai exprimé notre regret concernant le veto de facto de la Russie à l'extension du mandat de la mission de l'OSCE en Géorgie, en conséquence de la question du statut des deux régions séparatistes. En réponse, les autorités russes ont réitéré leur position selon laquelle la décision concernant l'accès d'organisations internationales à l'Ossétie du Sud et à l'Abkhazie, et leur présence dans ces deux régions, relève des autorités de facto et non de la Russie.
8. Pour ce qui est des circonstances précises dans lesquelles la guerre a éclaté, ainsi que de la séquence exacte des événements d'août 2008, j'ai exprimé ma satisfaction concernant le fait que, dans l'esprit de recommandation de l'Assemblée à cet égard, l'Union européenne a décidé d'établir une commission d'enquête indépendante sur le conflit en Géorgie chargée d'enquêter sur les origines et l'évolution du conflit, et j'ai exprimé mon point de vue que l'Assemblée devrait revenir sur cette question lorsque le rapport et les conclusions de cette mission auront été présentés.
9. Les autorités russes nous ont informés que le Procureur général avait achevé ses investigations concernant le décès de 162 civils d'Ossétie du Sud et de 48 membres des troupes russes durant la guerre, et avait recueilli suffisamment de preuves pour accuser la Géorgie de génocide à l'encontre des Ossètes du Sud. En outre, l'adjoint au Chef d'Etat-major nous a informés que les procureurs militaires ont conclu qu’aucune violation des droits de l'homme ni crime de guerre n'avaient été commis par les troupes russes. Au vu des rapports crédibles comprenant des preuves évidentes que les deux parties au conflit ont commis des violations des droits de l'homme et du droit humanitaire international durant la guerre, j'espère que d'autres enquêtes supplémentaires à ce sujet seront menées par les autorités russes. En outre, je déplore que nous n'ayons reçu aucune indication concernant des enquêtes concrètes au sujet des violations des droits de l'homme commises à l'encontre de Géorgiens ethniques durant et après la guerre, ni concernant des poursuites à ce sujet.
10. Durant notre discussion avec les autorités russes, le Comité des Présidents a rappelé avec insistance qu'il est inacceptable que des personnes résidant en Abkhazie et en Ossétie du Sud ne puissent pas être effectivement couvertes par les mécanismes de protection des droits de l'homme dont elles devraient bénéficier en leur qualité de citoyens d'un État membre du Conseil de l'Europe en vertu de la Convention européenne des droits de l'homme et d'autres conventions applicables de l'Organisation, du fait des conséquences de la guerre entre la Russie et la Géorgie. De notre point de vue, ce «trou noir» dans la protection des droits de l'homme ne devrait pas être toléré au sein de l’Organisation. Nous avons donc suggéré que les organes pertinents du Conseil de l'Europe élaborent un plan d'action complet pour garantir aux personnes résidant en Ossétie du Sud et en Abkhazie les droits établis par la Convention. Ce plan pourrait inclure la mise en place d’une présence sur le terrain dans les deux régions séparatistes, comme le demande l’Assemblée dans sa Résolution 1633 (2008). En l’absence de toute autre enquête crédible, cette présence sur le terrain devrait également enquêter sur les violations des droits de l'homme commises durant et après la guerre et rassembler des preuves de ces violations. J'ai noté avec satisfaction que les autorités russes ne rejetaient pas, en principe, cette possibilité.
11. La Délégation parlementaire russe a insisté expressément sur le fait qu'elle est prête à entamer un dialogue avec ses homologues géorgiens sous l’égide de l'Assemblée et a souligné le rôle que l'Assemblée pourrait jouer à cet égard. De mon point de vue, il s'agit là d'un élément positif qui devrait être discuté durant la partie de session prochaine de l'Assemblée à Strasbourg.
12. À la fin de notre visite, je me suis réjoui de la volonté de toutes les autorités russes d'entamer un dialogue constructif et ouvert avec l'Assemblée, comme nous avons pu à l’évidence nous en rendre compte durant notre visite. J'ai exprimé l'espoir que cette approche aboutira à un dialogue renouvelé sur le respect par la Russie des demandes formulées par l'Assemblée dans sa Résolution 1633, ainsi que sur les conclusions du débat qui va être organisé lors de la partie de session de janvier de l'Assemblée.