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Rapport | Doc. 13204 | 02 mai 2013

Les budgets et priorités du Conseil de l’Europe pour l’exercice biennal 2014-2015

Commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles

Rapporteur : M. Rudy SALLES, France, PPE/DC

Origine - Renvoi en commission: Décision du Bureau, Renvoi 3935 du 8 mars 2013. 2013 - Commission permanente de mai

Résumé

Le deuxième cycle biennal du programme et budget 2014-2015 du Conseil de l’Europe sera marqué par une croissance zéro en terme nominal, pour la première fois depuis la création de l’Organisation. Cette mesure obligera l’Organisation à centrer ses efforts sur ses missions statutaires et en particulier sur les droits de l’homme, l’Etat de droit et la démocratie tout en continuant d’exercer une pression pour réduire le poids des dépenses de personnel dans le budget. L’Assemblée parlementaire participera aux efforts collectifs demandés pour rester dans les limites d’un budget gelé. Elle restera vigilante quant aux décisions qui seront prises afin que l’Organisation dispose du personnel le mieux qualifié pour ses besoins tout en préservant sa mémoire institutionnelle et la qualité de ses travaux.

A. Projet d’avis 
			(1) 
			Projet
d’avis adopté à l’unanimité par la commission le 25 avril 2013.

(open)
1. La crise économique et financière que traversent nombre d’Etats membres fragilise la stabilité démocratique du continent européen. L’Assemblée parlementaire considère que le Conseil de l’Europe a les atouts nécessaires pour maintenir et renforcer cette stabilité en Europe. Il faut garder à l’esprit que, dans une période troublée par la crise, les Etats membres ont d’autant plus besoin de coopérer, de concerter leurs efforts pour maintenir la stabilité démocratique du continent européen et d’aider les pays où les tensions sont les plus vives.
2. Dans une période où les Etats membres sont soumis à des politiques de réduction des déficits, le Conseil de l’Europe doit faire des efforts afin d’économiser et de mieux gérer ses ressources. Aussi l’Assemblée prend-elle acte de la volonté d’une majorité d’Etats membres de soumettre le Conseil de l’Europe, et ce pour la première fois depuis sa création en 1949, à une croissance zéro en terme nominal pour l’exercice biennal 2014-2015.
3. L’Assemblée, comprenant les difficultés qu’une telle décision ne manquera pas d’avoir sur l’élaboration du budget du Conseil de l’Europe pour 2014 et 2015, accepte une réduction de ses crédits pour le prochain cycle biennal et pour plus de détails renvoie à sa Résolution …. (2013) sur les dépenses de l’Assemblée parlementaire pour l’exercice biennal 2014-2015.
4. Cependant, l’Assemblée regrette que le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe n’ait présenté ses priorités pour l’exercice biennal 2014-2015 que le 22 avril 2013, laissant au rapporteur général de l’Assemblée sur le budget insuffisamment de temps pour pouvoir préparer un avis circonstancié tant sur le budget et le programme du Conseil de l’Europe pour 2014 et 2015 que sur les dépenses de l’Assemblée.
5. L’Assemblée estime néanmoins que le Conseil de l’Europe ne doit pas être affaibli par une politique budgétaire pénalisante qui pourrait conduire l’Organisation à faire des choix dommageables pour ses missions statutaires à moyen et long terme.
6. L’Assemblée reconnaît que la décision prise par le Comité des Ministres de mettre en place un programme et un budget biennaux représente une avancée mais elle regrette que ce dernier ne soit pas allé au bout de la logique en mettant un terme au principe d’annualité budgétaire. En réalité, le Conseil de l’Europe reste régi par le principe de budget annuel avec seulement une perspective biennale.
7. Dans ces conditions, l’Assemblée réitère sa demande répétée dans ses précédents avis budgétaires, de modification de l’actuel article 70 du Règlement financier du Conseil de l’Europe, afin que le solde non dépensé en fin d’exercice soit laissé à la disposition de l’Organisation et mis en compte de réserve. Le Conseil de l’Europe ne peut pas être comparé à une entreprise dont le bénéfice constaté en fin d’exercice doit être reversé aux Etats membres.
8. L’Assemblée appuie le choix du Secrétaire Général du Conseil de l’Europe de centrer l’action de l’Organisation sur les trois piliers opérationnels que sont les droits de l’homme, l’Etat de droit et la démocratie et de les traiter sur un pied d’égalité. Cependant, ce traitement égalitaire doit tenir compte des spécificités existantes dans les piliers droits de l’homme et démocratie, qui comprennent des organes statutaires et conventionnels (Cour européenne des droits de l’homme, Assemblée parlementaire et Congrès des Pouvoirs Locaux et Régionaux du Conseil de l’Europe).
9. L’Assemblée souhaite pouvoir disposer dans les meilleurs délais d’un bilan complet sur les trois années de réformes dont l’objectif était de revitaliser et de donner un nouvel élan politique au Conseil de l’Europe.
10. S’agissant des structures de l’Organisation, l’Assemblée soutient pleinement le renforcement de la capacité opérationnelle du Conseil de l’Europe sur le terrain, notamment dans la mise en œuvre de programmes de coopération ciblés destinés aux Etats membres et aux pays des régions voisines de l’Organisation.
11. L’Assemblée demande que les bureaux extérieurs du Conseil de l’Europe ne se limitent pas à la seule gestion des programmes de coopération financés par l’Union européenne et continuent d’être des points de contact pour l’organisation des autres missions du Conseil de l’Europe dans les pays concernés.
12. Considérant la période budgétaire tendue actuelle, l’Assemblée estime nécessaire qu’une évaluation soit faite de la pertinence de maintenir ou non des bureaux du Conseil de l’Europe à Genève, Vienne et Varsovie, qui ne sont pas directement liés à la mise en œuvre de programmes de coopération ou autres missions de l’Organisation.
13. S’agissant des priorités pour 2014 et 2015, l’Assemblée prend note des choix stratégiques du Secrétaire Général du Conseil de l’Europe concernant les domaines prioritaires suivants, qui sont également couverts par le programme de travail et les rapports en préparation au sein de l’Assemblée pour 2014 et 2015:
13.1. la lutte contre la corruption;
13.2. la lutte contre l’intolérance et le discours de haine;
13.3. la protection des minorités et des groupes vulnérables;
13.4. la consolidation de l’espace juridique du Conseil de l’Europe;
14. Par ailleurs, l’Assemblée est en faveur de la recherche de synergies au niveau du Conseil de l’Europe, dans le respect des règles statutaires de l’Organisation. Dans cette logique, elle pense que les activités de gouvernance démocratique aux niveaux local et régional pourraient être regroupées sous l’autorité du Congrès des Pouvoirs Locaux et Régionaux, dont les membres sont étroitement impliqués dans le développement de normes dans le domaine de la démocratie locale et régionale.
15. S’agissant des élections et compte tenu du rôle important joué par l’Assemblée au travers de ses missions d’observation d’élections et de monitoring, l’Assemblée suggère qu’une coopération renforcée soit établie entre, d’une part, l’Assemblée et la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) et, d’autre part, les autres structures du Conseil de l’Europe actives dans le domaine de l’assistance électorale. L’Assemblée remercie la Commission de Venise et ses experts pour l’excellente coopération établie sur le terrain à l’occasion de l’observation des élections législatives ou présidentielles qui se déroulent dans les Etats membres.
16. L’Assemblée se félicite de la réussite du premier Forum mondial de la Démocratie, organisé à Strasbourg en octobre 2012, qu’elle avait appelé de ses vœux notamment dans son Avis 259 (2006) sur le Budget du Conseil de l’Europe pour 2007 et de sa Recommandation 1886 (2009) sur l’avenir du Conseil de l’Europe à la lumière de ses 60 années d’expérience. Elle souhaite que cette initiative se pérennise et que Strasbourg soit reconnue comme le «Davos» de la démocratie.
17. Concernant les droits de l’homme, l’Assemblée soutient les initiatives visant à mettre en œuvre les mesures contenues dans la Déclaration de Brighton faisant suite à la Conférence de haut niveau sur l’avenir de la Cour européenne des droits de l’homme d’avril 2012. Elle souligne en particulier le lancement en mars 2013 du Programme européen de formation aux droits de l’homme pour les professionnels du droit (le Programme HELP).
18. L’Assemblée considère que la poursuite des actions dans le domaine de la lutte contre la violence à l’égard des femmes, sans oublier la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels, pour lesquelles elle reste très engagée, doit également rester une priorité.
19. S’agissant de la lutte contre la corruption et la criminalité, l’Assemblée souhaite qu’une attention particulière soit accordée à la lutte contre la contrefaçon de produits médicaux et soutiendra les initiatives prises en vue de la signature et de la ratification de la Convention du Conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique (Convention Médicrime, STCE n° 211) ainsi que toutes les actions qui pourront être entreprises dans la lutte contre le trafic des organes humains et les autres formes de corruption comme le trucage de matchs, des thèmes qui ont été portés par l’Assemblée.
20. Depuis de nombreuses années, le Conseil de l’Europe bénéficie d’un soutien constant de l’Union européenne à ses différents programmes de coopération (de l’ordre de 25 millions d’euros par an) ainsi que de contributions volontaires des Etats membres (s’ajoutant aux contributions obligatoires) estimées à entre 10 et 12 millions d’euros par an. L’Assemblée invite le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe à négocier un partenariat avec l’Union européenne afin de mettre en place un système stable et pérenne de financement des programmes joints, comme elle l’avait déjà demandé dans son Avis 281 (2011) sur les budgets et priorités du Conseil de l’Europe pour les exercices 2012 et 2013, et l’encourage à inclure dans les nouveaux programmes joints une dimension parlementaire.
21. Par ailleurs, tenant compte qu’une partie importante des actions du Conseil de l’Europe peuvent être considérées comme de l’aide publique au développement, l’Assemblée soutient l’initiative prise par la Secrétaire Générale adjointe du Conseil de l’Europe d’engager des négociations avec l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) afin que le Conseil de l’Europe puisse présenter sa candidature et intégrer la liste des Organisations éligibles au système d’aide publique au développement (APD) de l’OCDE. Elle charge sa commission des questions politiques et de la démocratie d’appuyer cette initiative dans son rapport sur les activités de l’OCDE.
22. Dans cette perspective, l’Assemblée invite le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe à renforcer et à professionnaliser la structure interne existante au sein du Secrétariat du Conseil de l’Europe en charge de la mobilisation des ressources, comme elle l’avait déjà suggéré dans son Avis 281 (2011), ou à défaut d’envisager l’externalisation de la collecte de fonds.
23. Concernant la politique du personnel en général, l’Assemblée s’interroge sur le bien-fondé des mesures récentes prises par le Comité des Ministres qui lui semblent être dictées par un seul impératif: faire des économies, au risque de rendre le Conseil de l’Europe moins attractif que d’autres organisations internationales.
24. L’Assemblée recommande au Secrétaire Général et au Comité des Ministres de mettre en place une politique contractuelle permettant au Conseil de l’Europe d’attirer, former et retenir les personnes les plus compétentes afin de garantir que l’Organisation dispose du personnel qu’il lui faut pour répondre à ses besoins actuels et futurs, en ayant à l’esprit la nécessité de préserver la mémoire institutionnelle de l’Organisation et en tenant compte du lieu du siège.
25. L’Assemblée demande également au Secrétaire Général du Conseil de l’Europe de veiller à la bonne application dans toutes les instances du Secrétariat général de l’article 12 du Statut du Conseil de l’Europe (STE n° 1), qui précise que «les langues officielles du Conseil de l’Europe sont le français et l’anglais». L’Assemblée ne peut pas accepter que la qualité de la communication de l’Organisation soit une victime collatérale d’une politique d’austérité budgétaire.
26. Enfin, l’Assemblée prend note de la décision prise de ne plus inviter de journalistes de différents pays européens, lors de ses parties de session.

B. Exposé des motifs, par M. Salles, rapporteur

(open)

1. Introduction

1. Lors de son élection en 2009, le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, M. Thorbjørn Jagland, avait annoncé sa volonté de procéder à un vaste train de réformes afin de «revitaliser le Conseil de l’Europe». Au cours de l’année 2010, un certain nombre de mesures ont été prises en matière de politique de ressources humaines afin de maîtriser les dépenses de personnel (doublement de la périodicité des échelons des agents permanents, rationalisation des indemnités du personnel) et concernant la présence extérieure du Conseil de l’Europe.
2. L’année 2011, quant à elle, a été marquée par d’autres avancées dans la réforme, en particulier la refonte de la présentation du budget et programme incluant une réduction du nombre des comités intergouvernementaux et une restructuration majeure du Secrétariat général qui a abouti en 2012 à la mise en œuvre du premier programme et budget biennaux du Conseil de l’Europe.
3. Alors que nous préparons le deuxième exercice biennal, j’aimerais obtenir du Secrétaire Général du Conseil de l’Europe un bilan de l’ensemble de ses réformes en vue d’identifier les défis auxquels le Conseil de l’Europe devra faire face au cours des deux prochaines années, dans le contexte de crise que nous connaissons et que le Secrétaire Général, dans son intervention devant l’Assemblée parlementaire le 22 janvier 2013, a résumé en parlant d’une situation politique et économique préoccupante.
4. Lors de la réunion de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles à Paris le 18 mars 2013, la Secrétaire Générale adjointe du Conseil de l’Europe, Mme Gabriella Battaini-Dragoni, ainsi que l’Ambassadeur de Lituanie, M. Gedeminas Šerkšnys, président du Groupe de rapporteurs sur le programme, le budget et l’administration (GR-PBA), ont pu partager avec les membres de la commission les enjeux et difficultés du prochain exercice biennal.
5. Avant d’entrer dans le vif du sujet, j’aborderai la question des comptes audités du Conseil de l’Europe pour 2010 et 2011 ainsi que les principaux faits qui auront marqué les années 2011 et 2012.

2. Audit des comptes 2010 et 2011

6. La Cour des comptes française a réalisé l’audit externe des états financiers consolidés du Conseil de l’Europe pour les années 2010 et 2011 et a conclu que les états financiers consolidés préparés et présentés conformément aux normes IPSAS 
			(2) 
			Normes comptables internationales
du secteur public. donnaient une image fidèle de la situation financière du Conseil de l’Europe. En conséquence, l’auditeur externe a pu formuler une opinion sans réserves sur les comptes de l’Organisation.
7. Les dépenses de personnel (y compris les juges de la Cour européenne des droits de l’homme) représentent encore un poids important (72,6 %) dans les dépenses opérationnelles de 2011, et ont progressé de moins de 1 % entre 2010 et 2011, ce qui indique que les mesures prises par le Secrétaire Général pour maîtriser les dépenses de personnel ont commencé à produire leurs effets. Par ailleurs, l’auditeur a demandé que des provisions pour charges soient comptabilisées dès lors qu’il existe un contentieux relatif à l’application de dispositions statutaires touchant les agents.
8. Enfin, la Cour des comptes a également procédé à des audits de performance touchant différents secteurs du Secrétariat général. En 2010, les audits de performance ont porté sur la gestion des recettes, les ressources humaines, le complexe de restauration snack et cafétéria, le secrétariat de l’Assemblée parlementaire et les programmes joints avec l’Union européenne. En 2011, cinq autres audits de performance ont été réalisés et ont porté sur la gestion des comptes spéciaux et des ressources humaines, et des secrétariats de la Banque de développement du Conseil de l’Europe, du Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO) et de la Cour européenne des droits de l’homme.
9. A l’issue de ces audits de performance, l’auditeur a formulé tout un ensemble de recommandations relatives à divers aspects de fonctionnement. Notons simplement que s’agissant de notre Assemblée, l’auditeur a reconnu la bonne qualité de sa gestion. D’une manière générale, les recommandations des auditeurs, qui ont pour but d’améliorer le fonctionnement des différents services, sont prises en compte et mises en œuvre par le secrétariat.

3. Année 2011, deuxième phase des réformes

10. Au cours de l’année 2011, le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe a lancé un deuxième train de mesures marqué, en particulier, par l’introduction du premier programme et budget biennal (2012-2013) et le passage en revue de la pertinence des conventions du Conseil de l’Europe. Au cours de cette même période, l’Organisation a également revu la structure de ses comités intergouvernementaux et le système de conférences des ministres spécialisés. Enfin, une restructuration des secteurs opérationnels du Secrétariat a été menée, pour mieux les adapter aux nouvelles missions et défis de l’Organisation.
11. Cette restructuration a conduit à la dissolution de deux Directions générales (Cohésion sociale et Démocratie et Affaires politiques), dont les activités opérationnelles ont été affectées aux deux Directions générales restantes rebaptisées Direction générale des Droits de l’homme et de l’Etat de droit (DG I) et Direction générale de la Démocratie (DG II). Pour coordonner ce nouvel ensemble, une Direction générale des Programmes a été mise en place et rattachée en 2012 directement à la Secrétaire Générale adjointe. Les autres activités plus politiques (relations extérieures, conseil et planification politique) ont été placées sous la supervision directe du Secrétaire Général.
12. En matière de personnel, l’année 2011 a été marquée non seulement par la modification des règles d’attribution des échelons aux agents avec le doublement de l’intervalle entre les échelons et la suppression de certaines indemnités, mais également par la suppression de 16 postes permanents et de 5 fonctions.
13. Par ailleurs, le cadre juridique régissant les conférences des ministres spécialisés et les comités intergouvernementaux a été révisé afin de permettre de travailler de manière plus focalisée et d’améliorer les synergies avec le Comité des Ministres. S’agissant des conventions, il convient de mentionner que deux traités internationaux ont été ouverts à la signature: la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (STCE n° 210), d’une part, et la Convention du Conseil de l’Europe sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique (Convention Médicrime, STCE n° 211), d’autre part.
14. Ces deux conventions ont une importance majeure pour notre Assemblée. En effet, pour la première, dite «Convention d’Istanbul», l’Assemblée a joué un rôle important pour promouvoir la ratification de cette convention. Quant à la seconde, elle a vu le jour grâce aux efforts très importants déployés par l’Assemblée et en particulier par son rapporteur sur cette question, Bernard Marquet (Monaco). Cette convention est l’aboutissement d’un travail de longue haleine lancé par l’Assemblée avec sa Recommandation 1794 (2007) sur la qualité des médicaments en Europe.
15. Quatre autres conventions sont également entrées en vigueur:
  • la Convention européenne sur les fonctions consulaires (STE n° 61);
  • la Convention cadre du Conseil de l’Europe sur la valeur du patrimoine culturel pour la société (STCE n° 199);
  • la Convention européenne en matière d’adoption des enfants (révisée) (STCE n° 202);
  • le Protocole d’amendement à la Convention d’entraide administrative en matière fiscale (STCE n° 208) (pour lequel l’Assemblée a été consultée et a pu donner un avis circonstancié 
			(3) 
			Voir l' Avis 277 (2010) et le Doc.
12161. ).
16. 2011 a également été l’année du lancement de la campagne Un sur Cinq contre la violence sexuelle à l’égard des enfants, pour laquelle notre Assemblée s’est fortement mobilisée au travers d’activités de promotion au niveau parlementaire, et qui a pu être lancée grâce à une généreuse contribution financière de l’Allemagne de 100 000 €.
17. S’agissant de la situation des Roms en Europe, il convient de relever la nouvelle approche du Conseil de l'Europe concernant les questions roms, avec la création d'une équipe transversale qui sert de trait d’union entre les différents projets qui sont réalisés au Conseil de l'Europe, ainsi que la création d’un nouveau Comité ad hoc d’experts sur les questions roms (CAHROM).
18. Enfin, concernant la Cour européenne des droits de l’homme, le Comité directeur pour les droits de l’homme a été chargé de donner suite aux mesures décidées lors des Conférences à haut niveau d’Interlaken (février 2010) et d’Izmir (avril 2011), notamment concernant les lignes directrices pour la sélection des candidats au poste de juge à la Cour et la préparation de l’adhésion de l’Union européenne à la Convention européenne des droits de l’homme (STE n° 5, «la Convention»).

4. Année 2012

19. Parmi les nouvelles mesures mises en œuvre en 2012 figure les nouveaux programme et budget biennaux. La programmation biennale répond aux vœux exprimés par notre Assemblée. Le résultat est-il à la hauteur de ce que l’Assemblée souhaitait, à savoir que les crédits non dépensés de l’année N soient entièrement reportés sur l’année N+1 comme elle l’avait suggéré dans son Avis 281 (2011) sur les budgets du Conseil de l’Europe pour les exercices 2012-2013? Rien n’est moins sûr.
20. La réalité est différente, car dans les faits le budget-programme biennal est en réalité un budget qui reste annuel dans son fonctionnement avec une perspective budgétaire sur deux ans. Ainsi, il y a bien une clôture du budget 2012 en fin d’exercice annuel avec quelques activités, dont l’exécution a été retardée, reportées avec leurs crédits sur 2013 pour un montant total de 255 000 €. Ainsi, le Comité des Ministres n’a pas souhaité franchir le pas en adoptant un vrai budget pour deux ans.
21. Néanmoins, le mérite de cet exercice a été pour le secrétariat d’éviter un travail prenant pour élaborer le budget 2013, puisque ce dernier avait été pré-adopté avec le budget de l’année 2012, les discussions budgétaires se limitant aux différents ajustements à intégrer dans le budget 2013.
22. En matière de ressources humaines, le Secrétaire Général a poursuivi en 2012 sa politique de réduction des coûts de personnel, en supprimant du tableau des emplois 24 postes et 2 fonctions. D’autre part, sous la pression du Comité des Ministres, le Secrétaire Général a présenté un nouveau projet de 3e régime de pension pour les nouveaux agents du Conseil de l’Europe. Ce régime s’ajoute aux deux régimes existants actuellement (le régime de pension coordonné, le nouveau régime de pension – commun au Conseil de l’Europe et à l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)). Ce nouveau régime ne concernera que le Conseil de l’Europe et il sera beaucoup moins favorable aux futurs pensionnés (en termes de prestations versées notamment). Contrairement aux orientations principales de la Résolution 1882 (2012) de l’Assemblée sur une pension décente pour tous, l'âge de la retraite obligatoire n'a pas augmenté mais la réforme a conduit à une réduction de 12,5 % du taux d'accumulation. Cela peut avoir un impact négatif sur la qualité du personnel recruté par l'Organisation.
23. La réforme de la présence extérieure du Conseil de l’Europe et la nouvelle approche en matière de programmation a facilité une augmentation du volume général des recettes extraordinaires, notamment grâce à l’instauration de liens plus étroits avec les capitales des Etats grands donateurs, la Commission européenne et les délégations de l’Union européenne sur le terrain. Au total, plus de 37,7 millions d’euros de contributions volontaires ont été versés au Conseil de l’Europe durant l’année 2012, contre 32,5 millions en 2011.
24. L’Assemblée a, quant à elle, reçu 164 000 € de contributions volontaires pour la dimension parlementaire de la campagne pour la promotion de la Convention d’Istanbul (violence à l’égard des femmes) et de la campagne Un sur Cinq contre la violence sexuelle à l’égard des enfants.
25. Concernant les activités du Conseil de l’Europe dans le domaine de la démocratie participative, il convient de relever en particulier certains événements importants pour l’Organisation et pour notre Assemblée: le premier Forum mondial pour la Démocratie, tenu à Strasbourg, la Conférence des Présidents de Parlement et une Assemblée des jeunes en marge de la partie de session d’octobre 2012 de l’Assemblée.
26. Cette année a également été marquée par l’élection du nouveau Commissaire aux droits de l’homme, Nils Muižnieks, et de la nouvelle Secrétaire Générale adjointe du Conseil de l’Europe, Gabriella Battaini-Dragoni.
27. Par ailleurs, il convient également de noter que le Centre européen pour l’interdépendance et la solidarité mondiales (Centre Nord-Sud), que notre Assemblée a soutenu depuis son origine, a vécu une année 2012 très difficile suite au retrait de plusieurs Etats membres. Je rappellerai que notre Assemblée avait adopté en 2009 la Recommandation 1893 (2009) appelant le Comité des Ministres à ouvrir ce Centre à tous les Etats membres du Conseil de l’Europe. Je reste convaincu que le Centre Nord-Sud a toute sa place dans le cadre du dialogue de coopération avec les pays voisins.
28. En matière d’Etat de droit, j’aimerais souligner en particulier la finalisation de la convention sur le trafic d’organes humains, un sujet sur lequel notre Assemblée s’est mobilisée, et un projet qu’elle a appelé de ses vœux dans sa Résolution 1782 (2011) sur l’enquête sur les allégations de traitement inhumain de personnes et de trafic illicite d’organes humains au Kosovo* 
			(4) 
			* Toute référence au
Kosovo dans le présent document, qu’il s’agisse de son territoire,
de ses institutions ou de sa population, doit être entendue dans
le plein respect de la Résolution 1244 du Conseil de sécurité de
l’Organisation des Nations Unies, sans préjuger du statut du Kosovo..
29. En ce qui concerne le pilier droits de l’homme, il convient de souligner le succès de la Conférence de Brighton chargée d’établir un programme précis de travaux relatif à l’efficacité du système de la Convention européenne des droits de l’homme aux niveaux européen et national, dont les premiers résultats sont l’adoption d’un projet de Protocole no 15 portant amendement à la Convention, sur lequel l’Assemblée a adopté un avis en avril 2013 
			(5) 
			Avis 283 (2013), Doc. 13154.. Par ailleurs, les négociations entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne pour finaliser l’accord d’adhésion à la Convention de cette dernière ont repris mi-juin 2012, pour arriver en avril 2013 à un accord préliminaire global sur les modalités d’adhésion.

5. Priorités 2014-2015

30. Le Conseil de l’Europe se prépare à son deuxième exercice biennal. Toutefois, d’une part, la situation financière actuelle d’un nombre important d’Etats membres engagés dans des politiques contraignantes d’austérité budgétaire, et d’autre part, la décision récente du Conseil européen de réduire le budget de l’Union européenne pour la période 2014-2020 – même si cette mesure a été retoquée par le Parlement européen – ne militent pas pour une attitude très positive vis-à-vis du budget de notre Organisation.
31. En effet, la volonté d’un grand nombre d’Etats membres est de stabiliser voire, pour certains, de réduire le montant de leur contribution, et donc d’imposer une croissance zéro en terme nominal (pas d’inflation) à l’Organisation. Avec un tel scénario appliqué au budget ordinaire, le manque à gagner pour l’Organisation peut être évalué à une somme située entre 5 et 6 millions d’euros pour 2014 et un montant similaire pour 2015 (sur la base d’un taux d’inflation de 2 % appliqué sur 300 millions d’euros de budgets).
32. Le Conseil de l’Europe devra trouver en interne les ressources nécessaires pour absorber les différents ajustements obligatoires et autres coûts induits liés aux différentes augmentations des prix, tout en continuant à réduire le ratio actuel de dépenses de personnel par rapport aux dépenses d’activités.
33. Compte tenu de ces difficultés, je pense que le Comité des Ministres devrait modifier la règle actuelle concernant le solde non dépensé en fin d’exercice qui, selon l’article 70 du Règlement financier, doit être rendu aux Etats membres. Ce solde devrait être plutôt laissé à la disposition de l’Organisation. Cette mesure pourrait en tout cas être appliquée sur le reliquat de la première année du cycle biennal.
34. Dans une période de restrictions budgétaires affectant la plupart des Etats membres, notre Organisation doit également faire des efforts afin d’économiser et mieux gérer ses ressources. Les réformes et les orientations du Secrétaire Général du Conseil de l’Europe s’inscrivent dans cette logique. Mais il faut garder à l’esprit que, dans une période troublée par la crise, les Etats ont d’autant plus besoin de coopérer, de concerter leurs efforts pour maintenir la stabilité démocratique du continent européen et d’aider les pays où les tensions sont les plus vives. Pour cela le Conseil de l’Europe a besoin de ressources et il ne faudrait pas franchir la ligne rouge en touchant aux missions statutaires de notre Organisation.
35. Dans ce contexte, notre Assemblée ne peut pas rester à l’écart de l’effort qui est demandé à tous et refuser de réduire ses dépenses. Cette réduction est rendue nécessaire en raison d’ajustements obligatoires (liés au passage d’échelons d’un certain nombre d’agents et les effets en année pleine de l’ajustement salarial de 2013) que l’Organisation doit assumer. Le projet de résolution concernant les dépenses de l’Assemblée 
			(6) 
			Doc. 13205. donne plus de détail sur l’effort demandé à l’Assemblée (à savoir une réduction de 145 000 € et 80 000 € de notre budget pour 2013 et 50 000 € de plus pour 2015 dont 70 % concernant les dépenses de personnel du Secrétariat de l’Assemblée).
36. S’agissant des réformes, je m’étonne qu’aucun bilan n’ait été encore soumis. Il serait utile de pouvoir disposer d’un tel document afin de voir si les réformes mises en œuvre ont bien permis de revitaliser le Conseil de l’Europe.
37. A propos des choix stratégiques définis par le Secrétaire Général pour 2014 et 2015, je peux les partager car ils sont également couverts par le programme de travail de notre Assemblée. Un certain nombre de thèmes me semblent importants à relever du fait de l’intérêt marqué par notre Assemble, comme par exemple la lutte contre la violence à l’égard des femmes ou la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels ainsi que les activités liées à la lutte contre le trafic de médicaments contrefaits ou d’organes humains.
38. Sur les synergies à trouver en interne, j’y suis favorable à condition qu’elles respectent pleinement les spécificités statutaires des organes qui composent le Conseil de l’Europe. Je vois une certaine logique à rapprocher du Congrès les activités de gouvernance aux niveaux local et régional et d’avoir une coopération renforcée entre, d’une part, la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) et notre Assemblée et, d’autre part, les autres structures de l’Organisation actives dans le domaine de l’assistance électorale.
39. Concernant les aspects financiers, je constate que le Conseil de l’Europe bénéficie d’un soutien constant à la fois de l’Union européenne (de l’ordre de 25 millions d’euros par an, depuis plusieurs années), et d’Etats membres ou non membres (s’ajoutant aux contributions obligatoires et qui sont estimées à entre 10 et 12 millions d’euros). La part des ressources extrabudgétaires ayant tendance à augmenter, il y a là une voie à explorer et j’aimerais signaler l’initiative prise par la Secrétaire Générale adjointe visant à faire intégrer le Conseil de l’Europe dans la liste des organisations éligibles au système d’assistance publique au développement (APD) de l’OCDE. Cette liste est ouverte à toutes les organisations dont tout ou une partie du budget peut être considéré comme une aide au développement. Intégrer cette liste permettrait à l’Organisation de recevoir beaucoup plus de contributions extrabudgétaires.
40. Enfin, je souhaite mentionner la politique du personnel, qui fait l’objet de beaucoup de réformes, plus ou moins bien acceptées. J’aimerais simplement rappeler que l’intérêt de l’Organisation est de permettre aux personnes les plus compétentes de rejoindre le Conseil de l’Europe afin qu’il dispose du personnel le mieux qualifié pour ses besoins tout en préservant le personnel existant, qui constitue sa mémoire institutionnelle, et la qualité de ses travaux dans le respect de son bilinguisme.
41. Pour finir, j’aimerais préciser que, le Secrétaire Général n’ayant soumis ses priorités pour le cycle biennal 2014-2015 que tardivement, le 22 avril, je n’ai guère eu de temps pour préparer un avis plus complet et plus détaillé. Je souhaiterais à l’avenir qu’un document d’une telle importance – il doit marquer la vie de l’Organisation pour les deux prochaines années – soit soumis plus tôt afin de permettre au rapporteur de l’Assemblée sur le budget et à la commission du Règlement de disposer de plus de temps pour l’étudier et préparer leur avis. Je noterai simplement la décision prise par le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe de ne plus inviter de journalistes lors des parties de session de notre Assemblée.