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Addendum au rapport | Doc. 12112 Add. | 25 janvier 2010
Le fonctionnement des institutions démocratiques en Bosnie-Herzégovine
Commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l'Europe (Commission de suivi)
1. Introduction
1. Depuis l’adoption par la commission de suivi, le
17 décembre 2009, du projet de rapport sur le fonctionnement des
institutions démocratiques en Bosnie-Herzégovine, plusieurs événements
politiques importants se sont produits. Certains de ces événements
sont directement liés à l’objet du rapport, d’où la nécessité pour
la commission d’adopter des amendements au projet de résolution
et au projet de recommandation.
2. Le présent addendum vise à rendre compte des événements politiques
qui concernent des questions traitées dans le rapport et à proposer,
le cas échéant, des amendements ponctuels au projet de résolution
et au projet de recommandation. Si ces amendements sont approuvés,
nous suggérons qu’ils soient déposés par le président de la commission
de suivi, au nom de la commission.
2. Arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Sejdić et Finci c. Bosnie-Herzégovine
3. Le 22 décembre 2009, la Cour européenne des droits
de l’homme a rendu son arrêt dans l’affaire Sejdić et
Finci c. Bosnie-Herzégovine . Les requérants, M. Dervo Sejdić, d’origine
rom, et M. Jakob Finci, d’origine juive, deux personnalités politiques
importantes en Bosnie-Herzégovine, se plaignaient de la violation
de leurs droits protégés par la Convention européenne des droits
de l’homme (CEDH) et ses Protocoles additionnels nos 1 et 12; ils
affirmaient que les dispositions constitutionnelles en vigueur les
empêchaient de se porter candidats aux élections à la présidence
de la Bosnie-Herzégovine et à la Chambre des peuples de l’Assemblée parlementaire
de la Bosnie-Herzégovine, car ils n’avaient déclaré leur appartenance
à aucun des «peuples constituants». La Cour a estimé – comme nous
nous y attendions – que le maintien de l’interdiction faite aux requérants
de se présenter aux élections à la Chambre des peuples ne repose
pas sur une justification objective et raisonnable et qu’il est
donc contraire à l’article 14 combiné avec l’article 3 du Protocole
no 1 à la CEDH. De même, la Cour a conclu que la condition préalable
litigieuse à la candidature aux élections présidentielles de Bosnie-Herzégovine
constitue une violation de l’article 1 du Protocole no 12 à la CEDH. Dans
l’exposé de ses motifs, la Cour cite abondamment les avis de la
Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission
de Venise); ces avis démontrent la possibilité d’envisager des modes d’élection
à la présidence de la Bosnie-Herzégovine et à la Chambre des peuples
qui n’excluent aucune des diverses communautés de la Bosnie-Herzégovine
du processus politique, tout en préservant les mécanismes de partage
du pouvoir établis par l’Accord de paix de Dayton dans le but légitime
d’instaurer la paix et le dialogue entre les trois principales communautés
ethniques de la Bosnie-Herzégovine, c’est-à-dire entre les trois
«peuples constituants».
4. En vue d’exécuter l’arrêt rendu par la Cour dans cette affaire,
les autorités de Bosnie-Herzégovine sont tenues de prendre des mesures
générales appropriées, qui, selon nous, devront notamment consister
à modifier la Constitution conformément aux recommandations de la
Commission de Venise. Nous réaffirmons à cet égard que le temps
est un facteur majeur: pour que les élections législatives prochaines
se déroulent dans le respect des normes de la CEDH, il faut élaborer
et adopter les amendements à la Constitution au cours des deux prochains
mois. En conséquence, nous exhortons de nouveau l’ensemble des acteurs
de la scène politique à s’associer pleinement à un dialogue digne
de ce nom et constructif sur des propositions concrètes d’amendements
à la Constitution, dans le droit-fil des recommandations de 2005
de la Commission de Venise, afin d’adopter un train de réformes
dans un délai qui permette d’organiser les élections législatives
de 2010 conformément à la Constitution révisée.
3. Adoption de la loi sur la cessation des activités du bureau du médiateur de la Republika Srpska
5. Nous nous réjouissons de l’adoption, le 23 décembre
2009, par l’Assemblée nationale de la Republika Srpska (RS), de
la loi sur la cessation des activités du bureau du médiateur de
la RS. L’adoption de cette loi était l’un des éléments essentiels
de la mise en œuvre de l’engagement pris par la Bosnie-Herzégovine d’instaurer
un bureau de médiation unique au niveau de l’Etat . L’Union européenne
considère quant à elle l’adoption de cette loi comme une condition
préalable indispensable à la libéralisation du régime des visas
pour les citoyens de la Bosnie-Herzégovine. Nous appelons les autorités
compétentes de la RS à appliquer cette loi rapidement. Dans le même
temps, nous observons que l’Assemblée nationale de la RS a aussi
demandé au Gouvernement de la RS de préparer une loi sur le respect
des droits de l’homme en RS, qui porterait notamment sur les activités
des institutions responsables de la protection des droits de l’homme.
Nous continuerons à suivre ce processus dans un avenir proche, afin
d’évaluer les conséquences de cette nouvelle loi qu’il est prévu
d’adopter pour le fonctionnement du bureau de médiation unique qui
doit être établi au niveau de l’Etat.
4. La situation dans la ville de Mostar
6. Egalement, sur le plan positif, nous constatons que,
conformément à la décision récente du haut représentant , le conseil
municipal de Mostar a finalement élu un maire, M. Ljubo Beslic (HDZ
BiH), le 18 décembre 2009, soit quatre cent trente-huit jours après
la tenue des élections locales. M. Beslic l’a emporté au troisième
tour de scrutin, en recueillant les suffrages de 17 des conseillers
présents, tandis que le candidat du SDA, M. Suad Hasandedic, a obtenu
15 voix. Ces résultats serrés montrent que l’équilibre des forces politiques
au sein du conseil municipal est fragile; il est donc nécessaire
que tous les acteurs politiques coopèrent de manière constructive
pour assurer le bon fonctionnement de l’administration municipale.
7. Le 23 décembre 2009, le nouveau maire de Mostar a adopté le
budget municipal pour 2009, conformément aux modalités prévues dans
la décision du haut représentant portant modification du statut
de la ville. Nous attendons maintenant de tous les partis politiques
représentés au conseil municipal qu’ils fassent en sorte que le
budget pour 2010 puisse être adopté rapidement.
5. Escalade inquiétante des tensions politiques dans la Republika Srpska
8. Le 14 décembre 2009, le Gouvernement de la Republika
Srpska a rejeté la décision du haut représentant de prolonger le
mandat des juges et procureurs internationaux qui travaillent dans
les chambres de la Cour d’Etat de la Bosnie-Herzégovine chargées
de juger les crimes de guerre et au sein du parquet ; selon le
gouvernement, en adoptant cette décision, le haut représentant a
outrepassé les pouvoirs prévus par l’Accord de paix de Dayton. Le
28 décembre 2009, l’Assemblée nationale de la Republika Srpska,
réunie en session extraordinaire, a examiné la position du gouvernement
et adopté ses propres conclusions. Dans ces conclusions, l’Assemblée
nationale de la RS rejette la décision du haut représentant, qu’elle
juge «inacceptable, inconstitutionnelle et illégale». En outre,
les conclusions imposent au Gouvernement de la RS d’élaborer des
amendements à la loi de la RS sur les référendums. Elles prévoient,
une fois ces amendements adoptés, la tenue d’un référendum sur la
décision du haut représentant.
9. Le haut représentant a immédiatement réagi à ces mesures en
déclarant que la position du Gouvernement de la RS du 14 décembre
et les conclusions de l’Assemblée nationale de la RS du 28 décembre
emportaient violation de l’Accord de paix de Dayton . Cette prise de
position du haut représentant a été appuyée par la suite par le
comité directeur du Conseil de mise en œuvre de la paix, qui a fait
une déclaration le 8 janvier 2010. Dans cette déclaration, les ambassadeurs
des Etats membres siégeant au comité directeur approuvent sans réserve
les actions et décisions du haut représentant et lui apportent leur soutien
dans l’exercice des pouvoirs dont il dispose pour assurer le plein
respect de l’Accord de paix de Dayton; ils réaffirment aussi le
caractère inacceptable de toute tentative d’empêcher le haut représentant
de remplir le mandat prévu à l’annexe 10 .
10. Nous sommes vivement préoccupés par le durcissement de la
position du Gouvernement de la RS et de l’Assemblée nationale de
la RS. Ainsi que cela est indiqué dans notre rapport sur le fonctionnement
des institutions démocratiques en Bosnie-Herzégovine et dans des
rapports précédents de l’Assemblée, nous estimons que les autorités
de l’Etat de Bosnie-Herzégovine et des entités sont soumises à l’obligation
juridique d’appliquer les décisions prises par le haut représentant
dans le cadre de son mandat, défini dans l’Accord de paix de Dayton
et par le Conseil de mise en œuvre de la paix et confirmé dans les
résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU. De plus, le haut représentant
a pris la décision en question car l’Assemblée parlementaire de
Bosnie-Herzégovine n’avait ni prolongé le mandat des juges et procureurs
internationaux ni pris de dispositions pour les remplacer en temps
voulu par des magistrats de Bosnie-Herzégovine. Il est donc essentiel
d’assurer la mise en œuvre pleine et entière de cette décision.
11. Nous tenons à souligner, une fois encore, que la contestation
des décisions du haut représentant, notamment au moyen d’un référendum,
n’aide pas le pays à avancer, alors que des progrès seraient indispensables,
notamment dans la perspective de la fermeture du bureau du haut
représentant, qui, de l’avis unanime, devrait finir par intervenir.
Au lieu de contester ses décisions, les autorités de l’Etat et des
entités devraient coopérer étroitement avec le haut représentant
pour élaborer et adopter les lois nécessaires à l’application des
principales réformes; cela favoriserait la mise en œuvre du volet
civil de l’Accord de paix de Dayton et permettrait de préparer la
fermeture du bureau du haut représentant.
6. Complément d’information sur les préoccupations au sujet du pluralisme des médias
12. Depuis l’approbation de notre projet de rapport sur
le fonctionnement des institutions démocratiques en Bosnie-Herzégovine,
nous avons eu connaissance d’autres éléments qui font craindre un
manque de pluralisme des médias. Ainsi, nous avons été informés
de la décision récente du Gouvernement de la RS d’accorder aux médias
locaux une subvention, financée par le budget de l’entité, d’un
montant de 5 millions de marks convertibles. Seul le journal Euroblic, dont les propriétaires
sont suisses, aurait refusé cette subvention. Nous avons aussi appris
que, dans le contexte actuel, les partis d’opposition de la Republika
Srpska n’avaient que des possibilités limitées de faire entendre
leur voix dans les médias. Cela est d’autant plus inquiétant que débutera
sous peu la campagne pour les élections législatives de 2010.
13. Nous appelons les autorités de Bosnie-Herzégovine à assurer
le pluralisme des médias et à veiller à ce que tous les partis politiques
aient accès aux médias dans des conditions d’égalité, afin de garantir
une couverture équitable et impartiale de la campagne électorale
à l’approche des élections législatives d’octobre 2010.
7. Complément d’information sur la mise en œuvre de la stratégie nationale de réforme judiciaire
14. Depuis l’approbation de notre projet de rapport sur
le fonctionnement des institutions démocratiques en Bosnie-Herzégovine,
la troisième conférence ministérielle destinée à examiner la mise
en œuvre de la stratégie nationale de réforme de la justice s’est
tenue le 22 décembre 2009.
15. Nous avons été informés que les participants à la conférence
avaient noté que la mise en œuvre de la stratégie n’avançait pas
aussi bien qu’il le fallait. La mise en œuvre de plusieurs projets
majeurs n’a toujours pas commencé ou a pris beaucoup de retard.
En conséquence, les progrès sont limités, voire inexistants, dans un
certain nombre de domaines: l’harmonisation des procédures de sélection
des juges dans les cours constitutionnelles de l’Etat et des entités;
l’adoption d’une loi unique sur le ministère public dans la fédération; l’harmonisation
des normes et des règles concernant l’exécution des sanctions pénales
et les administrations pénitentiaires en Bosnie-Herzégovine; la
création de structures institutionnelles chargées de la planification stratégique
et de l’élaboration des politiques et capables de favoriser la mise
en conformité du secteur judiciaire de la Bosnie-Herzégovine avec
les acquis communautaires, dans les ministères de la Justice de l’Etat
et des entités et dans la commission judiciaire du district de Brčko.
16. De plus, les institutions et les partenaires clés ne sont
pas suffisamment engagés dans la mise en œuvre et ne participent
pas activement aux sessions des groupes de travail et au secrétariat
technique de la stratégie. Cela ralentit davantage la mise en œuvre
des projets planifiés.
17. Nous partageons ces préoccupations et appelons, une fois encore,
les autorités de Bosnie-Herzégovine à accélérer la mise en œuvre
des principales réformes liées à la réalisation du reste des engagements
pris à l’égard du Conseil de l’Europe, en particulier s’agissant
des stratégies nationales sur les crimes de guerre et sur la réforme
judiciaire.
8. Toujours pas d’accord sur la réforme constitutionnelle
18. Malgré la poursuite des consultations à haut niveau
entre les principaux acteurs politiques de Bosnie-Herzégovine et
les représentants de l’Union européenne et des Etats-Unis, aucun
accord n’a encore été trouvé sur le train de réformes constitutionnelles.
Cela est regrettable car le temps est un facteur majeur: si une réforme
constitutionnelle n’est pas mise en œuvre dans les prochains mois,
il sera impossible d’organiser les élections législatives d’octobre
2010 sur la base de nouvelles règles, dans la mesure où la législation
électorale n’aura pu être modifiée à temps. De plus, il est désormais
nécessaire de mener une réforme constitutionnelle pour se conformer
à l’arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l’homme en
l’affaire Sejdić et Finci c. Bosnie-Herzégovine (voir
les paragraphes 3 et 4 ci-dessus).
19. Dans ce contexte, nous appelons tous les acteurs politiques
à participer activement à des débats constructifs sur un ensemble
complet de réformes constitutionnelles, en tirant pleinement parti
du savoir-faire des experts de la Commission de Venise.
20. Par ailleurs, nous réitérons notre proposition de lancer un
large débat, avec la participation des principales parties prenantes,
en Bosnie-Herzégovine et dans la communauté internationale, y compris
les membres du Conseil de mise en œuvre de la paix et, en particulier,
les institutions de l’Union européenne et les voisins de la Bosnie-Herzégovine,
afin d’examiner les obstacles que la Bosnie-Herzégovine rencontre actuellement
sur la voie de l’intégration euro-atlantique et de trouver des moyens
de les lever.
Annexe – Propositions d’amendements au projet de résolution et au projet de recommandation
(open)1. Amendements au projet de résolution
Amendement no 1
Supprimer le paragraphe 2.1.
Amendement no 2
A la fin du paragraphe 2, insérer un nouveau paragraphe libellé ainsi:
«2.3. des réformes en matière de décentralisation et le transfert effectif de compétences sectorielles et de ressources financières aux municipalités de la Fédération de Bosnie-Herzégovine et de la Republika Srpska.»
Amendement no 3
Au paragraphe 5, après la première phrase, insérer le passage suivant:
«Elle prend note de l’arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Sejdić et Finci c. Bosnie-Herzégovine, dans lequel la Cour estime que le maintien de l’interdiction faite aux requérants de se présenter aux élections à la Chambre des peuples et à la présidence de la Bosnie-Herzégovine, au motif qu’ils n’ont déclaré leur appartenance à aucun des trois «peuples constituants», emporte violation de l’article 14 combiné avec l’article 3 du Protocole no 1 à la Convention européenne des droits de l’homme, et de l’article 1 du Protocole no 12 à la Convention. Pour se conformer à l’arrêt de la Cour, les autorités de Bosnie-Herzégovine doivent mettre en œuvre une réforme constitutionnelle.»
Amendement no 4
Au paragraphe 6, dans la première phrase, remplacer les mots «dans le cadre du «processus de Butmir»» par les mots «sur la réforme constitutionnelle».
Amendement no 5
Remplacer le paragraphe 10.4 par un nouveau paragraphe, libellé ainsi:
«10.4. à faire aboutir la réforme de l’institution du médiateur au niveau de l’Etat en démantelant effectivement les bureaux des médiateurs au niveau des entités;».
Amendement no 6
Après le paragraphe 10.5, insérer un nouveau paragraphe 10.6, libellé ainsi:
«10.6. à assurer le pluralisme des médias et à veiller à ce que tous les partis politiques aient accès aux médias dans des conditions d’égalité, afin de garantir une couverture équitable et impartiale de la campagne électorale à l’approche des élections législatives d’octobre 2010;».
2. Amendement au projet de recommandation
Amendement no 7
Après le paragraphe 2.2, insérer un nouveau paragraphe 2.3, rédigé ainsi:
«2.3. d’envisager de lancer un large débat, avec la participation des principales parties prenantes, en Bosnie-Herzégovine et dans la communauté internationale, y compris les membres du Conseil de mise en œuvre de la paix et, en particulier, les institutions de l’Union européenne et les voisins de la Bosnie-Herzégovine, afin d’examiner les obstacles que la Bosnie-Herzégovine rencontre actuellement sur la voie de l’intégration euro-atlantique et de trouver des moyens de les lever.»