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Rapport d’observation d’élection | Doc. 13654 | 16 décembre 2014

Observation des élections législatives en Tunisie (26 octobre 2014)

Auteur(s) : Commission ad hoc du Bureau

Rapporteur : M. Andreas GROSS, Suisse, SOC

1. Introduction

1. Lors de sa réunion du 2 septembre 2014, le Bureau de l’Assemblée parlementaire a décidé, sous réserve d’y être invité, d’observer les élections législatives en Tunisie le 26 octobre 2014, a constitué un commission ad hoc composé de 11 membres (SOC: 3; PPE/DC: 3; CE: 2; ADLE: 2; GUE: 1) et a autorisé une mission préélectorale.
2. Le 10 septembre 2014, l’Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE) a invité le Conseil de l’Europe à observer les élections.
3. Lors de sa réunion du 29 septembre 2014, le Bureau a approuvé la composition de la commission ad hoc (voir annexe 1) et nommé M. Andreas Gross (Suisse, SOC) à la présidence de cette commission ad hoc.
4. Selon l’article 15 de l’accord de coopération signé entre l’Assemblée parlementaire et la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) le 4 octobre 2004, «[l]orsque le Bureau de l’Assemblée décide d’observer des élections dans un pays où la législation électorale a été précédemment examinée par la Commission de Venise, l’un des rapporteurs de la Commission de Venise sur cette question pourra être invité en qualité de conseiller juridique à participer à la mission d’observation de l’Assemblée». Conformément à cette disposition, le Bureau de l’Assemblée a invité un expert de la Commission de Venise à participer à la commission ad hoc en qualité de conseiller.
5. Puisque la 4e partie de session de l’Assemblée de 2014 a eu lieu du 29 septembre au 3 octobre, l’organisation d’une mission préélectorale environ un mois avant les élections n’a pas été possible.
6. Pour la mission d’observation des élections, la commission ad hoc s’est réunie à Tunis du 23 au 27 octobre 2014. Le programme des réunions figure à l’annexe 2 et la déclaration publiée après les élections figure à l’annexe 3.
7. La commission ad hoc remercie le chef et les agents du Bureau du Conseil de l’Europe à Tunis pour l’organisation du programme et leur aide logistique.

2. Cadre juridique

8. Les citoyens tunisiens ont voté pour l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), afin de remplacer l’Assemblée constituante, qui a été élue le 23 octobre 2011 et a, depuis, joué le double rôle d’organe chargé de la rédaction de la Constitution et d’organe législatif transitoire. Selon la nouvelle Constitution adoptée le 26 janvier 2014, les membres de l’ARP siégeront pour une durée de cinq ans. L’ARP comprendra 217 membres, le même nombre que l’Assemblée constituante.
9. Le dirigeant du parti politique ou de la coalition remportant le plus grand nombre de sièges à l’ARP devra former un gouvernement dans un délai d’un mois, ce délai pouvant être prolongé une fois.
10. L’ARP a été élue selon un système de représentation proportionnelle régionale à liste fermée au plus fort reste.
11. La loi électorale impose la parité des sexes sur les listes et toutes les listes de candidats doivent présenter une liste alternée de femmes et d’hommes. La loi prévoit aussi la représentation des jeunes en disposant que les listes des candidats dans toutes les circonscriptions comptant au moins quatre sièges, doivent comprendre un candidat et une candidate de moins de 35 ans parmi les quatre premiers candidats. Le système électoral est resté inchangé depuis 2011.
12. Il existe 33 circonscriptions électorales divisées en districts intérieurs et extérieurs: 27 circonscriptions intérieures et six circonscriptions extérieures: deux en France, une en Italie, une en Allemagne, une pour l’Amérique et le reste de l’Europe non représenté, et une pour le monde arabe et le reste du monde non représenté.
13. La Commission de Venise n’a pas été invitée à rendre un avis sur la loi électorale par les autorités tunisiennes, mais des experts de la Commission de Venise ont été invités à participer à des échanges de vues avec les membres de l’Assemblée constituante au stade de préparation de la loi.
14. Conformément à la loi électorale, tout citoyen tunisien qui a atteint l’âge de 18 ans la veille du jour des élections et qui est inscrit sur les listes électorales peut voter, à l’exception des personnes condamnées à une peine complémentaire au titre de l’article V du Code pénal, les militaires, tel que défini par la loi fondamentale générale des militaires et des agents des forces de sécurité intérieure (officiers et forces de sécurité intérieure, de la garde nationale, de la protection civile, des prisons et des centres de détention pour mineurs, et des forces des sécurité attachées au Président de la République et aux personnalités officielles) ainsi que les personnes placées sous tutelle légale parce qu’atteintes de troubles mentaux, tant que la tutelle est effective.
15. La Commission de Venise a exprimé ses préoccupations sur l’exclusion totale des forces de sécurité et de défense militaire du processus électoral.

3. Administration électorale, enregistrement des listes des électeurs et des candidats

16. L’organe chargé des élections en Tunisie est l’Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE). Cette instance permanente est chargée d’organiser des élections et des référendums démocratiques, libres, pluralistes, justes et transparents. Légalement, elle est composée de neuf membres indépendants, neutres et compétents élus par l’Assemblée des représentants du peuple pour un mandat unique de six ans, un tiers des membres étant remplacé tous les deux ans. Outre le Conseil des commissaires, l’ISIE comprend un secrétariat exécutif et des commissions régionales dans chaque circonscription électorale.
17. La Tunisie compte 10 569 bureaux de vote et 405 bureaux hors du pays pour les Tunisiens de l’étranger. Les bureaux de vote ont été répartis de telle sorte qu’aucun bureau n’ait plus de 600 électeurs inscrits. Chaque bureau de vote compte un président et trois assesseurs chargés de diverses tâches et responsabilités.
18. Les bureaux de vote ont été regroupés en centres de vote. Chaque centre de vote compte un président et un ou plusieurs agents d’information, selon le nombre des bureaux de vote que compte le centre. Le but des centres de vote est de coordonner les opérations logistiques et de faciliter le travail des bureaux de vote.
19. L’inscription des électeurs s’est faite en deux phases: la phase I a eu lieu du 23 juin au 29 juillet et la phase II du 5 au 26 aout. L’inscription des électeurs devait initialement se terminer le 22 juillet, mais le délai a été prolongé par l’ISIE à cause du faible taux de participation. L’ISIE a annoncé que les personnes inscrites sur les listes électorales durant la phase II ne pouvaient être candidates aux élections législatives et présidentielle.
20. 5 285 136 citoyens se sont inscrits pour voter aux élections législatives et présidentielle (premier tour prévu le 23 novembre), dont 359 530 électeurs vivant à l’étranger. Parmi les inscrits, 50,5 % étaient des femmes. Les 4 242 548 citoyens inscrits pour les élections de l’Assemblée constituante de 2011 ne devaient pas s’inscrire une deuxième fois; ils pouvaient confirmer leur inscription par un système de SMS et changer de centre de vote en ligne, le cas échéant.
21. La Constitution de 2014 énonce que «l’Etat œuvre à réaliser la parité entre la femme et l’homme dans les conseils élus» et la loi électorale dispose que les listes des candidats doivent respecter la parité entre les sexes et présenter des listes alternées d’hommes et de femmes. En cas de non-respect, la liste des candidats est rejetée. Toutefois, aucune parité n’est requise concernant les têtes de liste dans toutes les circonscriptions pour les mêmes partis ou coalitions. En conséquence, sur 1 327 listes de candidats, seulement 145 avaient une femme en tête de liste.
22. Un total de 1 327 listes de candidats étaient en lice pour les élections, dont 97 listes à l’étranger. Sur les listes inscrites en Tunisie, 810 émanaient de partis politiques, 170 de coalitions et 347 de candidats indépendants.
23. Au cours des deux dernières années, la Tunisie a connu un phénomène de recomposition et de fusion des partis politiques, visant à prévenir la fragmentation qui avait été sévèrement sanctionnée par les électeurs lors des élections de 2011.
24. Les petits partis de toute tendance idéologique n’ont toutefois pas réussi à s’unir dans un paysage politique polarisé, dominé par le parti islamique Ennahdha (qui occupait 89 des 217 sièges de l’ARP, et représentait donc une large majorité) et par Nidaa Tounes («L’appel de la Tunisie»), un parti laïque lancé en 2012 pour se positionner comme concurrent laïque potentiel d’Ennahdha et rassemblant un large éventail d’opinions politiques. Nidaa Tounes a construit en 2013 une coalition avec d’autres partis laïques, dont Al Massar, Joumhouri et Afek Tounes, mais cette coalition s’est dissoute avant les élections.
25. Si Ennahdha et Nidaa Tounes étaient considérés comme les principaux concurrents, on pensait aussi qu’Afek Tounes, Al Massar et le Front Populaire (un groupe de huit partis dont les orientations regroupaient entre autres le marxisme-léninisme, la social-démocratie et le panarabisme) réussiraient à obtenir un certain nombre de sièges à l’ARP.
26. Les bureaux de vote à l’étranger ont été ouvert les 24, 25 et 26 octobre.
27. Les observateurs des élections législatives comprenaient des représentants de la société civile tunisienne et d’organisations internationales, des agents des candidats et des partis et des représentants des médias étrangers et nationaux. L’ISIE a accrédité 463 observateurs internationaux provenant de neuf organisations internationales et 9 142 observateurs locaux.

4. Campagne électorale et environnement médiatique

28. La campagne officielle a eu lieu du 4 au 24 octobre et celle pour les listes des candidats dans les circonscriptions électorales à l’étranger du 2 au 22 octobre.
29. La loi électorale prévoit de nombreuses interdictions sur les modalités de campagne et les lieux où la campagne peut avoir lieu. Elle dispose que la campagne doit respecter des principes fondamentaux tels que la neutralité des bureaux administratifs publics, des lieux de culte, et des médias nationaux, ainsi que la transparence du financement, l’égalité entre candidats et la non-incitation à la violence, à la haine et à la discrimination. Elle interdit toute campagne et distribution de documents de campagne dans les locaux et par des membres des administrations publiques, des institutions publiques, ou des institutions privées non ouvertes au public. L’utilisation des ressources administratives de l’Etat est proscrite. En outre, la loi interdit de faire la campagne dans «les établissement éducatifs, universitaires et professionnels».
30. La loi électorale a été conçue pour assurer l’égalité d’accès aux médias publics par toutes les listes de candidats. Celles-ci peuvent utiliser des médias nationaux et électroniques pour faire campagne; toutefois, l’utilisation de médias étrangers est interdite sauf lorsqu’elle concerne le vote à l’étranger. La publicité politique, définie comme toute campagne gratuite et/ou payée supposant d’utiliser des méthodes et des techniques de marketing en faveur d’un candidat dans l’intention d’obtenir l’adhésion des électeurs, est interdite par la loi électorale pendant toute la période électorale, à l’exception des journaux partisans qui peuvent «faire de la propagande» sous la forme d’annonces publicitaires pour leur parti ou liste de candidats. La décision conjointe de l’ISIE et de la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (HAICA), en date du 5 juillet 2014, dispose que les listes des candidats bénéficieront d’une couverture médiatique proportionnelle au nombre de listes dans la circonscription. Les listes de candidats bénéficieront chacune de trois minutes d’antenne gratuite sur les stations de radio et de télévision nationales.
31. La loi électorale interdit toute diffusion ou publication d’enquêtes d’opinion portant directement ou indirectement sur les élections pendant la période de la campagne électorale, ainsi que la veille du scrutin. Cette interdiction s’étend aux études et aux commentaires journalistiques sur ces enquêtes.
32. Toutes les formes de campagne sont interdites le 25 octobre, la veille du scrutin et le jour des élections lui-même.
33. Le 20 octobre, l’ISIE a ouvert le Centre des média pour les élections, pôle de communication entre l’ISIE, les journalistes et le public concernant les élections législatives.
34. Les campagnes électorales, telles que prévues par la loi électorale, sont financées par des fonds privés et publics et autofinancées. Chaque liste de candidats reçoit une subvention en tant qu’aide publique au financement des campagnes électorales. La subvention publique n’est pas fixe dans toutes les circonscriptions mais calculée selon des critères parmi lesquels la taille de la circonscription, le nombre d’électeurs et le coût de la vie. Elle va de 2 250 à 5 850 dinars tunisiens. Le montant total des dépenses de campagne autorisé pour chaque liste de candidats est le quintuple du niveau des fonds publics qu’elles ont reçus.
35. Toute liste qui obtient moins de 3 % de votes valides et/ou ne remportant aucun siège doit rembourser l’intégralité de la subvention publique. La moitié de la subvention est versée sept jours avant le lancement de la campagne et la deuxième moitié dans un délai d’une semaine à compter de l’annonce des résultats définitifs des élections, à condition que la liste de campagne présente des justificatifs et les comptes de transfert à la Cour des comptes démontrant que le premier versement a été dépensé pour la campagne.
36. La loi électorale autorise des dons privés d’individus (limités à 20 fois le salaire minimum, environ 6 000 dinars tunisiens). Elle interdit le financement étranger des campagnes électorales à l’exception des fonds contribuant aux campagnes dans les circonscriptions à l’étranger. L’achat de voix et les dons anonymes sont également proscrits.
37. L’ISIE et la Cour des comptes, en coordination avec la Banque Centrale et le ministère des Finances, sont chargés de contrôler le financement de la campagne. Tous les fonds reçus et déboursés doivent être signalés à la Cour des comptes dans un délai de 45 jours à compter de la date de l’annonce des résultats définitifs des élections. Les listes des candidats doivent aussi publier leurs états financiers dans un quotidien tunisien dans un délai de deux mois à compter de l’annonce des résultats définitifs.
38. Conformément à la loi, les listes de candidats et les partis considérés comme étant en infraction seront passibles de sanctions financières, électorales ou pénales selon la violation. En cas de non présentation des comptes de campagne, la Cour des comptes prononce des sanctions financières s’élevant jusqu’à 25 fois le plafond des dépenses et la destitution du candidat élu. Si un parti dépasse le plafond des dépenses électorales, la Cour des comptes impose des sanctions financières proportionnelles à ce dépassement. S’il dépasse ce plafond de 75 %, les sanctions financières s’accompagnent de la destitution du candidat élu. Si les candidats reçoivent des fonds de sources étrangères et qu’ils ne sont pas candidats à une circonscription à l’étranger, la Cour des comptes impose des sanctions pénales (3 à 5 ans d’emprisonnement) et destitue le candidat élu. En cas d’achat de votes, la Cour des comptes impose une sanction financière (une amende allant de 1 000 à 3 000 dinars tunisiens) et une sanction pénale (6 mois à 3 ans d’emprisonnement) à la personne tentant d’acheter des voix.
39. L’ISIE a signalé plus de 4 500 violations au cours de la campagne électorale (affiches déchirées ou collées dans des lieux interdits, recours à la publicité politique et événements publics de campagne non autorisés), mais la très grande majorité d’entre elles n’ont pas eu d’effet significatif sur le processus électoral.
40. En tout état de cause, de nombreux partis politiques ont mené des activités avant la période de campagne électorale qu’ils jugeaient normales (porte à porte, distribution de tracts, organisation de cafés politiques, installation de tentes ou de tables dans des lieux stratégiques, etc.). La plupart des grands partis ont fait paraître leur programme des semaines avant le début officiel de la campagne. Les plateformes électorales traitaient de questions analogues, allant de la restauration de l’autorité de l’Etat à la lutte contre le chômage. La nécessité d’une stratégie globale de lutte contre le terrorisme a aussi été un dénominateur commun de nombreuses plateformes.
41. En général, le droit à la liberté d’expression et d’association a été respecté. Si des tensions entre partis ont eu lieu pendant toute la période électorale, elles ne se sont pas exprimées pendant la campagne. Même si de nombreux événements électoraux ont eu lieu au même endroit et en même temps, ils n’ont donné lieu à aucune altercation.
42. Certains interlocuteurs ont informé la commission ad hoc de préoccupations de citoyens liées à la possibilité d’actions terroristes le jour du scrutin et à la possibilité d’achat de voix, particulièrement à la campagne. Certains ont aussi affirmé que les médias audiovisuels et la presse écrite avaient davantage couvert Nidaa Tounes et Ennadha que les petits partis et coalitions.

5. Jour du scrutin

43. Les règles du scrutin étaient les suivantes. On a vérifié les documents d’identité des électeurs, à leur entrée dans les bureaux de vote, ainsi que d’éventuelles traces d’encre. Un des scrutateurs a alors vérifié que l’électeur était inscrit sur la liste électorale et lui a demandé d’apposer sa signature sur celle‑ci. L’électeur devait ensuite plonger son index gauche dans l’encre. On lui donnait ensuite un bulletin de vote timbré au dos à chaque coin, puis on le guidait jusqu’à un isoloir vide où il devait marquer une liste de candidats et plier le bulletin pour que la marque reste secrète et le timbre visible. Il plaçait ensuite son bulletin de vote dans l’urne.
44. Les électeurs aveugles ou handicapés physiques ne pouvant écrire du fait de leur handicap pouvaient être accompagnés par leur conjoint ou un parent ayant le droit de vote. Faute d’accompagnateur, le président devait demander à l’un des électeurs présents dans le bureau de vote d’aider l’électeur handicapé. Les accompagnateurs ne pouvaient aider plus d’un électeur et ne devaient pas influencer son choix.
45. Le vote et le dépouillement ont eu lieu au bureau de vote. Le dépouillement devait commencer immédiatement après la fin du scrutin et les bulletins devaient être comptés publiquement et en présence d’observateurs et de représentants des listes des candidats. Les résultats de chaque bureau de vote devaient être affichés dans un endroit du bureau de vote accessible au public puis être transférés dans des sacs dans les centres correspondants.
46. La commission ad hoc s’est divisée en cinq équipes qui ont observé le scrutin et le dépouillement à Tunis et dans ses environs ainsi que dans les régions de Sfax, de Sousse, d’Ariana, de Bizerte, de Mateur, de Carthage, de La Marsa, de Kairouan et de Cap Bon.
47. Pour ce qui est du processus et de l’organisation du jour du scrutin, le vote s’est en général bien passé. Les équipes n’ont constaté aucune irrégularité significative. Le scrutin s’est déroulé dans la transparence et dans un climat calme et discipliné.
48. Des observateurs citoyens et des représentants des candidats étaient présents dans tous les bureaux de vote visités, contribuant à la transparence du processus. Ils semblaient être bien organisés et bien connaître les procédures.
49. La clôture du scrutin et le dépouillement étaient moins bien organisés, car certains agents des bureaux de vote semblaient perplexes quant aux procédures. Néanmoins, les membres de la commission ad hoc estiment que cela n’a pas eu d’effet sur les résultats.
50. La commission ad hoc a été particulièrement impressionnée par la maturité politique dont les perdants ont fait preuve en acceptant les résultats du scrutin et en contribuant ainsi à dépasser la polarisation de la société tunisienne.
51. Les résultats finaux ont été annoncés par l’ISIE le 21 novembre. Les nombres de sièges à l’Assemblée des représentants du peuple sont respectivement: Nida Tounes 86 sièges; Ennadha 69 sièges; Union patriotique libre (UPL) 16 sièges; Front populaire 15 sièges; Afek Tounes 8 sièges; Congrès pour la République (CPR) 4 sièges; Courant démocratique, Al Moubadara et Mouvement du Peuple: 3 sièges chacun; Courant de l’Amour (Mahabba): 2 sièges; Al Joumhouri, Alliance démocratique, Mouvement des démocrates socialistes, Rad el iîtibar, La Voix des agriculteurs, Al Majd al-Jerid et Front national du salut: 1 siège chacun.
52. Le taux de participation a été de 67,72 %

6. Conclusions et recommandations

53. Les élections législatives du 26 octobre 2014 ont marqué une étape cruciale dans la transition post-révolutionnaire de la Tunisie. Elles se sont déroulées de manière libre, inclusive et transparente. L’Assemblée des représentants du peuple qui a été élue est véritablement représentative du peuple, et jouit de la légitimité requise pour prendre des décisions essentielles et nécessaires.
54. La commission ad hoc a été impressionnée par la manière dont l’administration électorale a organisé son travail et par ses interactions avec les observateurs et la société civile dans l’intérêt de l’intégrité du processus électoral. Même si l’ISIE disposait d’un temps limité pour organiser les élections, elle a réussi à mener le processus sans irrégularités majeures.
55. Aucun processus démocratique n’étant parfait, la commission ad hoc présente quelques suggestions pour apporter d’éventuelles améliorations lors des élections futures, à savoir:
  • les médias devraient encourager le débat et la comparaison entre les différents programmes et politiques pour que les citoyens appréhendent mieux les problèmes et fassent un choix éclairé le jour du scrutin;
  • les règles sur le financement des campagnes électorales pourraient être révisées pour permettre aux partis d’accroître légalement leurs dépenses électorales tout en garantissant une transparence absolue sur la source de leur financement;
  • les responsables politiques et les diverses institutions devraient poursuivre leurs efforts pour encourager les jeunes, les femmes et les groupes défavorisés à participer au processus électoral qui est, pour eux, la seule manière de se faire entendre.
56. L’Assemblée parlementaire est prête à continuer d’œuvrer avec les autorités du pays et l’Assemblée des représentants du peuple pour conforter leurs efforts sur la voie de la démocratisation et concernant le respect des normes du Conseil de l’Europe.

Annexe 1 – Composition de la commission ad hoc

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Sur la base de propositions des groupes politiques de l’Assemblée, la commission ad hoc se composait comme suit:

  • Andreas GROSS (Suisse, SOC), Chef de la délégation
  • Groupe socialiste (SOC)
    • Andreas GROSS, Suisse, Président
    • Ingrid ANTIČEVIĆ-MARINOVIĆ, Croatie
    • Carina HÄGG, Suède
  • Groupe des conservateurs européens (EC)
    • Reha DENEMEC, Turquie
    • Mehmet TEKELIOĞLU, Turquie
  • Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (ADLE)
    • André BUGNON, Suisse
    • Adele GAMBARO, Italie
  • Venice Commission
    • Serguei KOUZNETSOV, Chef de division, coopération avec les Etats voisins
  • Secretariat
    • Bogdan TORCĂTORIU, Administrateur, Division de la coopération parlementaire et de l’observation des élections
    • Franck DAESCHLER, Assistant administratif principal

Annexe 2 – Programme de la commission ad hoc (23-27 octobre 2014)

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Jeudi 23 octobre 2014

14h30-15h30 Réunion de la commission ad hoc:

  • Ouverture de la réunion par M. Andreas Gross, chef de la délégation
  • Présentation des faits récents dans le domaine de la législation électorale et des activités de la Commission de Venise en Tunisie
  • Organisation pratique et logistique, par le Secrétariat

16h00-18h00 Réunion avec les membres du corps diplomatique

19h00 Réunion avec les représentants des médias

  • Dar Assabah, Raja Chaabane
  • RTCI/Courrier de l’Atlas, Rached Cherif
  • Le Temps, Zied Dabbar
  • La vie londonienne, Mehdi Jlassi
  • Tuniscope, Abir Feres
  • Radio Shems Fm, Feres Khiari
  • Mosaïque Fm, Hechem Laamari

Vendredi 24 octobre 2014

8h45 Réunion avec M. Mohamed Moncef Marzouki, Président de la Tunisie

11h00-11h30 Réunion avec M. Rachid Ghannouchi, Président d’Ennahdha

11h45-12h15 Réunion avec M. Ahmed Seddik, membre du Conseil du Front Populaire

12h45-13h15 Réunion avec M. Beji Caid Essebsi, Président de Nidaa Tounes

13h30-14h00 Réunion avec M Mohamed Chafik Sarsar, Président de l’Instance supérieure indépendante pour les élections

16h00-16h30 Réunion avec M. Faouzi Ben Abderrahmane, cofondateur de Afek Tounes

16h30-17h00 Réunion avec M Samir Taieb, Secrétaire général de Al Massar

17h00 Réunion avec le professeur Kais Said, professeur en droit constitutionnel

18h00 Réunion avec les représentants des ONG (dont les organisations internes d’observation des élections)

Samedi 25 octobre 2014

8h30-9h30 Présentation de M. Nicolas Kaczorowski, Directeur du Bureau de la Fondation internationale des systèmes électoraux en Tunisie

10h00-11h30 Réunion avec M. Mustapha Ben Jaafar, Président de l’Assemblée constituante

Réunion avec M. José Antonio De Gabriel, Chef adjoint de la mission d’observation des élections, Union européenne

Dimanche 26 octobre 2014

Observation des élections

Lundi 27 octobre 2014

8h00-9h00 Débriefing de la commission ad hoc

11h00 Conférence de presse

Annexe 3 – Déclaration de la commission ad hoc

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Les élections législatives en Tunisie ont été exemplaires et marquent la fin d’une étape cruciale dans la transition postrévolutionnaire

«Je souhaite féliciter le peuple tunisien pour la qualité exceptionnelle du processus électoral, qui marque une étape cruciale dans la transition postrévolutionnaire», a déclaré Andreas Gross, Chef de la délégation de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) qui a observé les élections législatives en Tunisie le 26 octobre 2014. «Les élections ont été libres, inclusives et transparentes. L’Assemblée des Représentants du peuple qui a été élue représente véritablement le peuple, et jouit de la légitimité requise pour prendre les décisions essentielles et nécessaires dans l’intérêt national», a-t-il ajouté.

La délégation souhaite attirer l’attention sur la nature exemplaire des élections et espère que les perdants feront preuve de la même maturité politique que les citoyens en acceptant les résultats du scrutin, pour contribuer non seulement à la mise en place rapide de la nouvelle législature mais aussi pour contribuer à dépasser la polarisation de la société tunisienne.

La délégation a été impressionnée par la manière dont l’administration électorale a organisé son travail et par ses interactions avec les observateurs et la société civile dans l’intérêt de l’intégrité du scrutin du 26 octobre 2014.

Il est évident qu’un processus démocratique ne saurait être parfait et la délégation de l’APCE a quelques suggestions d’améliorations éventuelles à faire pour les futures élections, et notamment les éléments suivants.

Les médias devraient encourager le débat et la comparaison entre les différents programmes et politiques afin que les citoyens puissent mieux appréhender les problèmes et faire un choix éclairé le jour du scrutin.

Les règles sur le financement des campagnes électorales devraient être révisées pour permettre aux partis d’accroître légalement leurs dépenses électorales tout en garantissant une transparence absolue sur la source de leur financement.

Les responsables politiques et les diverses institutions devraient poursuivre leurs efforts pour encourager les jeunes, les femmes et les groupes défavorisés à participer au processus électoral qui est, pour eux, la seule manière de se faire entendre.

La délégation de l’APCE qui comptait 10 membres a séjourné en Tunisie du 22 au 27 octobre. A cette occasion, elle a rencontré le Président de la Tunisie, le Président de l’Assemblée Constituante, le Président de l’Instance Supérieure Indépendante pour les élections (ISIE), les dirigeants des principaux partis politiques et les représentants des médias et de la société civile, le corps diplomatique et les organisations internationales. Le jour même des élections, la délégation a été divisée en cinq équipes qui ont observé le scrutin à Tunis et dans les environs ainsi que dans les régions de Sfax, de Sousse, d’Ariana, de Bizerte, de Mateur, de Carthage, de La Marsa, de Kairouan et de Cap Bon.

L’Assemblée continuera d’aider activement ses partenaires tunisiens dans leurs efforts de démocratisation du pays. Une autre délégation se rendra en Tunisie pour observer le premier tour de l’élection présidentielle le 23 novembre 2014, et l’Assemblée examinera les deux rapports sur les élections en Tunisie lors de sa partie de session de janvier 2015 à Strasbourg.