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Avis de commission | Doc. 13827 | 23 juin 2015

Examen de l'annulation des pouvoirs déjà ratifiés de la délégation de la Fédération de Russie (suivi du paragraphe 16 de la Résolution 2034 (2015))

Commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles

Rapporteur : M. Egidijus VAREIKIS, Lituanie, PPE/DC

Origine - Renvoi en commission: Résolution 2034 (2015), Renvoi 4128 du 24 avril 2015. Commission saisie du rapport: Commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l’Europe (commission de suivi). Voir Doc. 13800. Avis approuvé par la commission le 23 avril 2015. 2015 - Troisième partie de session

A. Conclusions de la commission

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La commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles est d’avis que la proposition contenue dans le rapport de la commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l’Europe relatif à l’examen de l’annulation des pouvoirs déjà ratifiés de la délégation de la Fédération de Russie (Doc. 13800) est conforme au Règlement de l’Assemblée parlementaire et au Statut du Conseil de l’Europe (STE n°1). Toutefois, la commission souhaite présenter un amendement visant à mettre davantage en conformité la formulation du paragraphe 6 du projet de résolution présenté avec la lettre du Règlement.

B. Amendement proposé

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Amendement A (au projet de résolution)

Dans le projet de résolution, au paragraphe 6, remplacer les mots «décide de ne pas annuler» par les mots «décide de confirmer».

C. Exposé des motifs, par M. Vareikis, rapporteur pour avis

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1. Introduction

1. A l’ouverture de la session ordinaire de 2015 de l’Assemblée parlementaire, les pouvoirs non encore ratifiés de la délégation russe ont été contestés pour des raisons substantielles en vertu de l’article 8 du Règlement eu égard, notamment, à des violations graves du Statut du Conseil de l’Europe et des engagements pris par la Fédération de Russie au moment de son adhésion à l’Organisation, dans le cadre du conflit qui touche l’est de l’Ukraine, ainsi que de l’annexion illégale de la Crimée.

1.1. Les sanctions adoptées par l’Assemblée dans la Résolution 2034 (2015)

2. Le 28 janvier 2015, l’Assemblée adoptait la Résolution 2034 (2015) et, tout en ratifiant les pouvoirs de la délégation russe «afin de favoriser le dialogue avec la Fédération de Russie» et la recherche d’une solution négociée au conflit, elle décidait de suspendre un certain nombre de droits de la délégation russe, pour la durée de la session de 2015 de l’Assemblée, afin «d’exprimer clairement qu’elle condamne la poursuite des graves violations du droit international commises par la Fédération de Russie en Ukraine», à savoir:
  • le droit de vote, le droit de représentation au Bureau de l’Assemblée, au Comité des Présidents et à la Commission permanente (paragraphe 15 de la Résolution 2034 (2015));
  • le droit d’être désigné comme rapporteur, le droit d’être membre d’une commission ad hoc d’observation des élections, le droit de représenter l’Assemblée dans les instances du Conseil de l’Europe ainsi qu’auprès d’institutions et d’organisations extérieures, tant au niveau institutionnel qu’à titre occasionnel (paragraphe 14 de la Résolution 2034 (2015)) 
			(1) 
			Rappelons
que, en avril 2014, l’Assemblée avait réexaminé les pouvoirs déjà
ratifiés de la délégation russe pour des raisons substantielles
et qu’elle avait décidé, en adoptant la Résolution 1990 (2014), «afin de marquer sa condamnation et désapprobation
face aux agissements de la Fédération de Russie à l’égard de l’Ukraine»,
de retirer aux membres de la délégation russe le droit de vote,
le droit d’être représenté au Bureau de l’Assemblée, au Comité des
présidents et à la Commission permanente, et le droit de participer
à des missions d’observation des élections. L’Assemblée avait toutefois décidé
de ne pas annuler les pouvoirs, par souci de maintenir le dialogue
politique. Les «sanctions» décidées par la Résolution 1990 (2014) sont restées en vigueur jusqu’à l’ouverture de la session
de 2015..
3. Par ailleurs, au paragraphe 16 de la Résolution 2034 (2015), l’Assemblée décidait «d’annuler les pouvoirs de la délégation russe lors de la partie de session de juin 2015 si aucun progrès n’est constaté pour ce qui concerne la mise en œuvre du Protocole et du Mémorandum de Minsk ainsi que les demandes et recommandations de l’Assemblée qui figurent dans la présente résolution, en particulier celles relatives au retrait immédiat des troupes russes de l’est de l’Ukraine».

1.2. Suites

4. Le 12 février 2015, M. Alexei Pushkov, président de la délégation russe, informait l’Assemblée de «la suspension jusqu’à la fin de 2015 de l’ensemble des contacts officiels» avec l’Assemblée parlementaire, y compris «toutes les missions que les organes de l’Assemblée pourraient décider d’envoyer en Fédération de Russie».
5. Le 24 avril 2015, le Bureau de l’Assemblée saisissait, au titre du suivi du paragraphe 16 de la Résolution 2034 (2015), la commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l’Europe (commission de suivi) pour rapport et la commission du Règlement pour avis.
6. Le 28 mai 2015, la commission de suivi approuvait son rapport. Dans le projet de résolution adopté, l’Assemblée «regrette profondément l’absence manifeste de progrès en ce qui concerne la mise en œuvre des demandes formulées dans la Résolution 2034 (2015)» et «réitère ses demandes en ce qui concerne l’intervention russe ayant entraîné un conflit militaire dans l’est de l’Ukraine, l’annexion illégale de la Crimée et la dégradation continue de la situation des droits de l’homme dans cette région». Elle décide cependant de proposer «de ne pas annuler, à ce stade, les pouvoirs déjà ratifiés de la délégation russe», afin d’exprimer l’engagement de l’Assemblée «pour un dialogue ouvert et constructif».

2. Observations relatives à l’interprétation de la Résolution 2034 (2015) d’un point de vie réglementaire

7. A l’occasion des précédentes contestations des pouvoirs de la délégation russe, en avril 2014 et en janvier 2015 
			(2) 
			Voir Doc. 13488 et Doc. 13689., la commission du Règlement, tout en rendant un avis jugeant les propositions de la commission de suivi conformes à l’ensemble des règles applicables, s’est autorisée à clarifier certains points de procédure. Par ailleurs, en septembre 2014, la commission a, dans un avis au Bureau de l’Assemblée et à l’invitation de celui-ci, défini une liste générale – non exhaustive – des droits de participation et de représentation des membres aux activités de l’Assemblée et de ses organes pouvant faire l’objet d’une suspension ou d’une privation, dans le cadre de la contestation ou du réexamen des pouvoirs d’une délégation, qui comporte en outre des principes généraux, visant à encadrer la décision de l’Assemblée afin de respecter l’exigence de sécurité juridique qui doit prévaloir pour toute décision de privation ou de suspension de droits 
			(3) 
			Voir l’avis AS/Pro
(2014) 10 def. Ces principes généraux s’appliquant à toute décision
comportant des sanctions en application de l’article 10 du Règlement
sont les suivants: la décision devrait être juridiquement cohérente
et rationnelle sur le plan réglementaire; compréhensible et lisible;
ne pas contenir des sanctions contradictoires ou des sanctions pouvant
donner lieu à interprétation quant à leurs conséquences pratiques;
veiller à la proportionnalité de la sanction au regard des violations
en cause..

2.1. Sur la possibilité pour l’Assemblée de réexaminer des sanctions en vigueur

8. Dans la Résolution 2034 (2015) 
			(4) 
			Précisons
que la Résolution 2034, telle qu’adoptée, intègre des amendements présentés
par les membres de l’Assemblée sur lesquels la commission du Règlement
n’a pas été amenée à se prononcer, s’agissant de leur conformité à
la lettre ou à l’esprit du Règlement., l’Assemblée envisage la possibilité de rétablir certains des droits de la délégation russe qu’elle a suspendus pour la durée de la session 2015, dès la partie de session d’avril 2015, «s’il devait s’avérer que la Russie a fait des progrès tangibles et mesurables pour donner suite aux exigences formulées par l’Assemblée» (paragraphe 15).
9. Cette question n’a pas été soumise à l’Assemblée en avril 2015, à la demande de la commission de suivi qui, compte tenu de «l’absence manifeste de progrès sur les demandes de l’Assemblée formulées dans sa Résolution 2034 (2015)» et du manque de coopération de la délégation russe, a demandé le retrait du débat sur ce sujet de l’ordre du jour de la deuxième partie de session 
			(5) 
			Décision
de la commission de suivi du 17 mars 2015..
10. Dans son avis précité au Bureau, la commission du Règlement s’est prononcée quant au respect du principe de sécurité juridique et de cohérence politique lors du retrait de certains droits («sanctions») dans le cadre de la procédure de contestation des pouvoirs. Notamment, la commission a conseillé d’éviter de fragmenter les sanctions et d’uniformiser leur durée.
11. A cet égard, la commission a rappelé la distinction qu’il convient d’opérer, en matière de sanctions, entre la «privation» et la «suspension» de l’exercice de droits: la privation (la suppression, l’interdiction entraînant la perte de la jouissance d’un droit) est une décision radicale, sans limite de temps, alors que la suspension (interruption, interdiction temporaire) est attachée à la définition d’une durée 
			(6) 
			En avril 2000, l’Assemblée
avait sanctionné la délégation russe, dont les pouvoirs ratifiés
avaient été contestés pour des raisons substantielles en relation
avec le conflit en Tchétchénie, en privant ses membres «de leurs
droits de vote à l’Assemblée et dans ses organes». Toutefois, le
rapport présenté par la commission des questions politiques formulait une
possibilité de réexaminer ces sanctions à la partie de session suivante
de juin 2000. Il n’y a finalement pas été donné suite..
12. Par conséquent, dès lors que l’Assemblée elle-même détermine une durée précise à la suspension de droits objets de la sanction, leur rétablissement avant terme, même en tant que signe d’encouragement au maintien ou à la reprise du dialogue politique, doit être envisagée avec le plus grand discernement, en ce qu’une telle démarche n’est guère conforme au souhait de la commission du Règlement de veiller à «la lisibilité de la sanction, la rationalité et l’homogénéité dans l’application des règles» 
			(7) 
			Voir l’avis AS/Pro
(2014) 10 def..

2.2. Sur la possibilité pour l’Assemblée de réexaminer la confirmation de pouvoirs ratifiés

13. Les pouvoirs de la délégation russe – contestés à l’ouverture de la session ordinaire de 2015 – ont été ratifiés en janvier 2015. Toutefois, le paragraphe 16 de la Résolution 2034 (2015) dispose que l’Assemblée pourra revenir sur sa décision et procéder à l’annulation de ces pouvoirs, en cours de session – lors de sa partie de session de juin 2015.
14. Auparavant, une telle clause de «revérification» de pouvoirs déjà ratifiés a été formulée à deux reprises, en 2011 et 2013, à l’occasion des contestations, pour des raisons formelles, des pouvoirs non encore ratifiés de certaines délégations dont la composition n’était pas conforme aux critères posés par le Règlement s’agissant de la représentation des deux sexes 
			(8) 
			Voir la Résolution 1789 (2011) sur la contestation, pour des raisons formelles, des
pouvoirs non encore ratifiés des délégations parlementaires du Monténégro,
de Saint-Marin et de la Serbie (et Doc. 12488), et la Résolution
1944 (2013) sur la contestation pour des raisons formelles des pouvoirs
non encore ratifiés de la délégation parlementaire d’Islande (et Doc. 13246).. Toutefois, c’est la première fois qu’une telle disposition est consacrée par une résolution adoptée suite à une contestation des pouvoirs pour des raisons substantielles.
15. Le rapporteur note qu’une telle clause trouve son fondement dans la compétence de l’Assemblée de réglementer sa composition, opérant sur la base du Statut du Conseil de l’Europe, le Règlement de l’Assemblée et des résolutions pertinentes. Toutefois, il est d’avis que l’inclusion d’une clause anticipant le réexamen en cours de session des pouvoirs déjà ratifiés d’une délégation en cas de non-conformité aux conditions fixées devrait se pratiquer de manière limitée, la règle générale étant que la ratification effectuée reste valable jusqu’à l’ouverture de la session suivante. L’inclusion de ce type de clauses devrait donc strictement se rapporter à des situations qui ont trait à des non-conformités flagrantes avec les dispositions du Statut du Conseil de l’Europe et/ou du Règlement de l’Assemblée ou à des situations d’urgence 
			(9) 
			«De telles mesures
peuvent notamment être jugées nécessaires si la situation, dans
le pays d’une délégation parlementaire dont les pouvoirs ont été
ratifiés, a fondamentalement changé depuis l’ouverture de la session
ordinaire et constitue une violation grave des principes fondamentaux
qui, déjà consacrés dans le Statut du Conseil de l’Europe, sont en
plus garantis par l’article 6 du Règlement» (rapport sur la contestation
des pouvoirs de délégations nationales dans le courant d’une session
ordinaire, Doc. 7481, 1996).; par ailleurs, les exigences doivent être formulées de manière rigoureuse, spécifique et réaliste.

3. Conformité du projet de résolution présenté par la commission de suivi au Règlement de l’Assemblée

16. Avant de statuer sur la conformité de la proposition formulée par la commission de suivi (Doc. 13800) au Règlement de l’Assemblée, il y a lieu pour la commission du Règlement de s’interroger sur la portée de la démarche de la commission de suivi eu égard au cadre strictement défini par la Résolution 2034 (2015).

3.1. La portée du dispositif du projet de résolution

17. En janvier 2015, l’Assemblée a ratifié les pouvoirs de la délégation de la Fédération de Russie en décidant de suspendre l’exercice d’un nombre de droits de participation et de représentation de ses membres et ce, pour la durée de la session 2015. Faute pour l’Assemblée d’avoir réexaminé ces sanctions, lors de la partie de session d’avril 2015, ainsi qu’elle en avait la possibilité (paragraphe 15 de la résolution), toute initiative de revenir sur la décision prise et de réviser la liste des droits suspendus est devenue forclose pour la durée de la session ordinaire de 2015.
18. L’Assemblée a également décidé (paragraphe 16) qu’elle réexaminerait sa décision de confirmer les pouvoirs de la délégation russe, au cours de sa session de juin 2015, si aucun progrès n’était constaté en ce qui concerne la mise en œuvre des demandes de l’Assemblée contenues dans la Résolution 2034 (2015). Par conséquent, l’action visée par l’Assemblée, libellée en termes clairs et non équivoques, se limite à savoir s’il convient d’annuler ou non les pouvoirs de la délégation russe sur la base des critères établis dans la Résolution 2034 (2015).
19. Le rapporteur se félicite que le rapport de la commission de suivi opère la même analyse et adopte la même approche (paragraphes 8 et 9 de l’exposé des motifs).

3.2. L’analyse de la conformité du dispositif du projet de résolution au regard du Règlement de l’Assemblée

20. Le réexamen des pouvoirs déjà ratifiés de la délégation de la Fédération de Russie s’effectue sur la base d’un rapport de la commission de suivi 
			(10) 
			Conformément
à l’article 9.3 du Règlement la commission de suivi «peut, dans
un rapport prévu à l’ordre du jour de l’Assemblée […], remettre
en question les pouvoirs d’une délégation nationale». , combiné avec le paragraphe 16 de la Résolution 2034 (2015). Le Règlement de l’Assemblée est très clair quant aux options – limitées – qui s’offrent à la décision de l’Assemblée.
21. Aux termes de l’article 10.1 du Règlement, un projet de résolution relatif au réexamen de pouvoirs déjà ratifiés doit contenir dans son dispositif l’une des trois options suivantes:
  • la confirmation de la ratification des pouvoirs;
  • l’annulation de la ratification des pouvoirs;
  • la confirmation de la ratification des pouvoirs, assortie de la privation ou de la suspension, applicable aux membres de la délégation concernée, de l’exercice de certains des droits de participation ou de représentation aux activités de l’Assemblée et de ses organes.
22. Compte tenu du cadre spécifique dans lequel intervient le présent réexamen des pouvoirs de la délégation russe (chapitre 3.1 ci-dessus), le projet de résolution présenté par la commission de suivi ne peut recommander qu’une seule alternative: soit la confirmation par l’Assemblée des pouvoirs de la délégation de la Fédération de Russie, soit l’annulation de ces pouvoirs.
23. Le rapporteur note toutefois que la proposition faite par la commission de suivi au paragraphe 6 du projet de résolution («Afin d’exprimer son engagement pour un dialogue ouvert et constructif avec la délégation russe, l’Assemblée, tout en notant les sanctions actuellement en place, décide de ne pas annuler, à ce stade, les pouvoirs déjà ratifiés de la délégation russe») ne coïncide pas de manière exacte avec le libellé de l’article 10.1.
24. Par conséquent, il conviendrait d’amender le projet de résolution et de remplacer les mots «de ne pas annuler» par les mots «de confirmer» afin que la formulation corresponde aux termes du Règlement, tout en respectant l’objectif sous-tendant le projet de résolution.

3.3. Conséquences sur la recevabilité des amendements présentés au projet de résolution (Doc. 13800)

25. Le projet de résolution présenté pourra naturellement faire l’objet d’amendements, conformément à l’article 10.2 du Règlement. Il y a lieu, par conséquent, pour la commission du Règlement de lever les interrogations susceptibles de se poser quant à la recevabilité de certains d’entre eux eu égard à la portée du dispositif du projet de résolution, tel que spécifié ci-dessus (chapitre 3.1).
26. Ainsi qu’il l’a été indiqué ci-dessus, le mandat assigné à la commission de suivi dans le cadre du paragraphe 16 de la Résolution 2034 (2015), libellé en termes clairs et non ambigus, ne permet l’examen d’aucun amendement qui viserait à faire statuer à nouveau l’Assemblée sur la liste des droits suspendus des membres de la délégation russe, cette question étant close à la discussion jusqu’à la fin de la présente session ordinaire de 2015.
27. Par conséquent, dans la mesure où le projet de résolution présenté dispose que «l’Assemblée, tout en notant les sanctions actuellement en place, décide de ne pas annuler, à ce stade, les pouvoirs déjà ratifiés de la délégation russe», en ce qui concerne le dispositif du projet de résolution, seuls des amendements visant à l’annulation des pouvoirs déjà ratifiés devraient être déclarés recevables.

4. Cohérence du projet de résolution présenté par la commission de suivi au regard des principes s’appliquant dans le cadre de la contestation ou du réexamen des pouvoirs d’une délégation

28. Le rapporteur relève que le rapport de la commission de suivi fait l’état de «l’absence manifeste de progrès en ce qui concerne la mise en œuvre des demandes formulées dans la Résolution 2034 (2015)», déplore «un rejet clair [par la délégation russe] de la proposition de l’Assemblée de maintenir un dialogue ouvert et constructif» et «s’interroge sur l’engagement de la délégation russe de coopérer et d’entretenir un dialogue positif avec l’Assemblée, s’agissant notamment du respect de ses engagements et obligations envers notre Organisation».
29. Sans remettre en cause la conformité du dispositif du projet de résolution au Règlement, mais en ayant à l’esprit la formulation du paragraphe 16 de la Résolution 2034 (2015), le rapporteur relève que la décision de la commission de suivi de confirmer les pouvoirs de la délégation russe, compte tenu des constats opérés dans son rapport (chapitres 2 et 3), pourrait nourrir la critique sur son absence de bienfondé.
30. Bien évidemment, la position de la commission de suivi doit être interprétée en tenant compte d’un contexte global et de l’historique qui a précédé son adoption. La démarche de la commission est emblématique de la détermination de l’Assemblée de maintenir, depuis avril 2014, un dialogue politique dans un contexte très douloureux où les vies de plusieurs milliers d’Européens ont été emportées par le conflit armé et où les conditions de vie d’autres continuent à se détériorer d’une manière inquiétante, comme le détaille le rapport et le souligne le paragraphe 3 du projet de résolution. L’on pourrait aussi faire état des violations récentes du cessez-le-feu, non imputables aux forces ukrainiennes, révélées par la mission spéciale d’observation de l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE), et qui ne vont pas dans le sens d’une solution durable et du règlement pacifique auxquels l’Assemblée aspire.
31. Le rapporteur constate qu’en 2014, à l’initiative commune de l’Assemblée et de la délégation russe, quelques réunions de médiation avaient été organisées et des rencontres avaient eu lieu. Toutefois, en février 2015, la délégation russe a décidé de rompre tout contact officiel avec l’Assemblée. Aucune réunion ou rencontre qui pourrait marquer une reprise du dialogue n’est prévue à ce jour. L’inscription de deux membres de l’Assemblée, de manière arbitraire et non-transparente, sur la liste des hommes et femmes politiques privés d’entrée en Russie jette également le doute sur la volonté des autorités russes, y inclus sa délégation parlementaire, à poursuivre un dialogue actif, ouvert et constructif et, ainsi que le relève le projet de résolution «la conduit à s’interroger sur l’engagement de la délégation russe de coopérer».
32. Le rapporteur déplore que les appels répétés de l’Assemblée à libérer Mme Nadiia Savchenko, membre de l’Assemblée parlementaire, y compris dans la Résolution 2034 (2015), n’aient reçu aucune suite de la part des autorités russes, qui continuent d’ignorer le fait qu’elle jouit de l’immunité parlementaire européenne. Le rapporteur rappelle que, à ce jour, Mme Savchenko est détenue en Russie depuis plus d’un an.
33. Par conséquent, le rapporteur ne peut que plaider en faveur d’une approche cohérente, rationnelle, stratégique et efficace en ce qui concerne l’utilisation de la procédure de contestation des pouvoirs. Le devoir de l’Assemblée est de défendre les normes et les principes du Conseil de l’Europe.
34. On considérera donc que les éléments d’information substantiels dont la commission de suivi fait état dans son rapport, et son analyse de la situation, peuvent tout autant justifier une conclusion inverse de celle décidée par la commission (la non annulation à ce stade des pouvoirs déjà ratifiés). Dès lors, la recevabilité d’un amendement qui viserait, au contraire, l’annulation des pouvoirs déjà ratifiés ne pourrait être mise en cause, puisqu’à l’évidence il s’appuie sur les constats opérés par la commission chargée du rapport.

5. Conclusion

35. La commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles est d’avis que la proposition contenue dans le rapport de la commission de suivi relatif aux pouvoirs de la délégation russe est conforme au Règlement de l’Assemblée et au Statut du Conseil de l’Europe.
36. Cependant, la commission note que la formulation du paragraphe 6 du projet de résolution ne coïncide pas, de manière exacte, avec le libellé de l’article 10.1 du Règlement, et recommande d’amender le projet de texte en conséquence.
37. Par ailleurs, la commission rappelle que le dispositif du projet de résolution est strictement limité par le cadre défini au paragraphe 16 de la Résolution 2034 (2015), libellé en termes clairs et non équivoques. Par conséquent, et compte tenu de la proposition faite par la commission de suivi de confirmer les pouvoirs de la délégation russe, en ce qui concerne le dispositif du projet de résolution, seuls des amendements visant à l’annulation des pouvoirs devraient être déclarés recevables.
38. Enfin, la commission appelle à une approche cohérente, rationnelle et stratégique en ce qui concerne l’utilisation de la procédure de contestation des pouvoirs.