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| Doc. 13922
| 20 novembre 2015
Observation des élections législatives anticipées en Turquie (1er novembre 2015)
Auteur(s) : Commission ad hoc du Bureau
Rapporteur : M. Andreas GROSS,
Suisse, SOC
1. Introduction
1. Lors de sa réunion du 31 août
2015, le Bureau de l’Assemblée parlementaire a décidé d’observer
les élections législatives anticipées en Turquie le 1er novembre 2015
(sous réserve de la réception d’une invitation) et constitué à cet
effet une commission ad hoc de 30 membres (SOC: 11; PPE/DC: 10;
ADLE: 4; CE: 3; GUE: 2) et des corapporteures sur le dialogue postsuivi
avec la Turquie de la commission de suivi, Mme Ingebjørg
Godskesen (Norvège, CE) et Mme Nataša
Vučković (Serbie, SOC). Le Bureau a également autorisé une mission
préélectorale. Le 1er septembre 2015,
M. Reha Denemeç, en sa qualité de président de la délégation turque,
a invité l’Assemblée parlementaire à observer les élections législatives
anticipées. Lors de sa réunion du 28 septembre 2015, le Bureau de
l’Assemblée a approuvé la composition de la commission ad hoc et
nommé M. Andreas Gross (Suisse, SOC) à sa présidence (voir l’annexe 1).
2. En vertu de l’article 15 de l’accord de coopération signé
entre l’Assemblée parlementaire et la Commission européenne pour
la démocratie par le droit (Commission de Venise) le 4 octobre 2004,
un expert de la Commission de Venise a été invité à se joindre à
la commission ad hoc à titre de conseiller. M. Srđan Darmanović a
pris part aux travaux de la commission ad hoc pour le compte de
Commission de Venise.
3. La délégation préélectorale s’est rendue à Ankara les 5 et
6 octobre 2015 pour évaluer l’état des préparatifs et le climat
politique durant la période qui a précédé les élections législatives
anticipées du 1er novembre 2015. La délégation
multipartite était composée de sept membres (voir l’annexe 1). Elle
a rencontré des dirigeants et des représentants des principaux partis
politiques se présentant aux élections, le chef de la mission d’observation
électorale du Bureau des institutions démocratiques et des droits
de l'homme de l’Organisation pour la sécurité et la coopération
en Europe (OSCE/BIDDH), le président de la délégation turque auprès
de l’Assemblée parlementaire, le président de la Commission électorale
suprême (CES), des représentants du ministère de l’Intérieur, le
président et des membres du Conseil supérieur de la radio et de
la télévision (CRST), des représentants de la société civile et
des médias, ainsi que des membres du corps diplomatique à Ankara.
A l’issue de sa visite, la délégation préélectorale a publié une
déclaration (annexe 2).
4. Pour la mission principale d’observation électorale, la commission
ad hoc est intervenue dans le cadre d’une mission internationale
d’observation des élections (MIOE), qui comprenait également la
délégation de l’Assemblée parlementaire de l’OSCE et la mission
restreinte d’observation électorale (MROE) de l’OSCE/BIDDH. M. Jose
Ignacio Sánchez Amor (Espagne) était le coordonnateur spécial de
la mission d’observation à court terme de l’OSCE. Mme Margareta
Cederfelt (Suède) dirigeait la délégation de l’Assemblée parlementaire
de l’OSCE. L’ambassadeur Geert-Hinrich Ahrens conduisait la mission
restreinte d’observation électorale de l’OSCE/BIDDH.
5. La commission ad hoc s’est réunie à Ankara les 30 et 31 octobre 2015
et a participé aux réunions parlementaires d’information conjointes
AP-APCE de l’OSCE. Elle a notamment rencontré des représentants des
principaux partis politiques se présentant aux élections, des membres
du Conseil supérieur de la radio et de la télévision et des représentants
de la société civile et des médias. Le programme des réunions de
la commission ad hoc figure à l’annexe 3.
6. Le jour du scrutin, la commission ad hoc s’est répartie en
16 équipes, qui ont observé les élections à Ankara et dans les environs,
ainsi que dans les régions et les communes d’Istanbul et d’Izmir.
En raison de contraintes de sécurité, il n’a pas été possible de
déployer des équipes dans l’est et le sud-est du pays. Les conclusions
du présent rapport se fondent sur les observations de la mission
préélectorale de l’APCE et de la commission ad hoc, et sur les conclusions
préliminaires publiées par la MROE de l’OSCE/BIDDH.
7. La commission ad hoc a conclu que les élections législatives
anticipées qui se sont déroulées en Turquie le 1er novembre
ont donné aux électeurs la possibilité de choisir entre une multiplicité
de programmes électoraux. Dans le même temps, la situation tendue
sur le plan de la sécurité, en particulier dans le sud-est du pays,
conjuguée à de nombreux incidents violents, notamment des agressions
qui ont visé des membres, des locaux et des équipes de campagne
des partis (surtout ceux du Parti démocratique des peuples ou HDP), a
empêché les candidats de faire librement campagne. En dépit de la
diversité du paysage médiatique, la liberté des médias continue
de faire l’objet de restrictions juridiques excessives. Les enquêtes
qui ont visé des journalistes et des organes de presse accusés de
soutenir le terrorisme ou d’avoir tenu des propos diffamatoires
contre le président, le blocage de sites web, la saisie de force
de certains médias de premier rang et le fait que des fournisseurs
de services numériques aient supprimé de leur offre plusieurs chaînes
de télévision ont restreint l’accès des électeurs à une pluralité
de vues et d’informations. Les élections ont été bien organisées
par l’administration électorale qui en avaient la charge et se sont
globalement déroulées dans le calme, mais la campagne électorale
a été entachée par l’iniquité et, dans une mesure inquiétante, par
la peur. La déclaration publiée par la MIOE après les élections
est reproduite à l’annexe 4.
2. Contexte politique et cadre
juridique
8. A l’issue des élections législatives
du 7 juin 2015, le parlement (comptant 550 membres) était composé du
Parti de la justice et du développement (AKP, 40,87 % des voix)
avec 258 sièges, du Parti républicain du peuple (CHP, 24,95 %) avec
132 sièges, du Parti d’action nationaliste (MHP, 16,29 %) avec 80 sièges
et du Parti démocratique des peuples (HDP, 13,2 %), lui aussi doté
de 80 sièges. 95 % des électeurs étaient représentés au parlement.
L’AKP a perdu la majorité parlementaire qu’il détenait depuis 2002,
alors que pour la première fois dans l’histoire de la Turquie, le
HDP, un parti avec une position prokurde, entrait au parlement en
franchissant le seuil des 10 %. Ces élections ont été observées
par l’Assemblée parlementaire dans le cadre d’une MIOE, qui comprenait
également la délégation de l’Assemblée parlementaire de l’OSCE et
la MROE de l’OSCE/BIDDH
.
9. En l’absence de parti politique majoritaire, le Président
de la République, M. Recep Tayyip Erdoğan, a décidé, le 25 août 2015,
de charger le chef du principal groupe parlementaire, l’ancien Premier
ministre Ahmet Davutoğlu, des négociations en vue de la formation
d’une coalition. Les négociations n’ont pas abouti. M. Erdoğan n’a
pas invité le chef du deuxième plus grand parti (le CHP) à former
une coalition, comme cela se faisait auparavant dans le pays. Un
gouvernement de transition (dit «gouvernement électoral») a ensuite été
constitué, avec M. Davutoğlu au poste de Premier ministre. Le CHP
et le MHP ont déclaré qu’ils ne participeraient pas au gouvernement
de transition, qui a donc été constitué par l’AKP avec des personnalités indépendantes,
un membre du MHP (qui a ensuite été expulsé du parti) et deux membres
du HDP. Toutefois, les deux ministres représentant le HDP ont démissionné
le 22 septembre 2015.
10. Le 25 août 2015, la Commission électorale suprême (CES) a
annoncé que les élections législatives anticipées se tiendraient
le 1er novembre 2015 (26es élections).
La préparation de ces élections anticipées s’est déroulée dans un
environnement totalement transformé sur le plan politique et sécuritaire
par rapport à celui des élections du 7 juin, en raison de la suspension
du processus de paix et de la reprise des affrontements entre les
forces turques de sécurité et le Parti des travailleurs du Kurdistan
(PKK) après deux ans et demi de trêve. De plus, les autorités avaient
engagé la reprise du combat contre le groupe terroriste connu sous
le sigle «EI» («Daesh» an arabe)
, la mouvance Gülen
(récemment renommée «Organisation terroriste de Fethullah Gülen»
(FETÖ) par les autorités turques) et d’autres organisations répertoriées
comme terroristes
. Ces évolutions ont renforcé la
polarisation du pays et les tensions qui en découlent.
11. Comme l’indiquent les rapports précédents de l’Assemblée parlementaire
sur l’observation des élections en Turquie, le cadre juridique du
pays, qui est resté inchangé depuis juin 2015, favorise normalement
la tenue d’élections démocratiques, pour peu qu’il soit pleinement
et efficacement mis en œuvre. Les élections sont principalement
réglementées par la Constitution de 1982, la loi de 1961 sur les
dispositions fondamentales en matière d’élections et de listes électorales
(loi sur les dispositions fondamentales), la loi de 1983 sur les élections
législatives, et la loi de 1983 sur les partis politiques. En 2014,
une modification de la loi sur les partis politiques a abaissé le
seuil permettant aux partis politiques de recevoir un financement
public, et la même année, une révision de la loi sur les dispositions
fondamentales a permis de faire campagne dans n’importe quelle langue.
Alors que le dernier rapport de l’Assemblée sur l’observation des
élections législatives du 7 juin 2015
a décrit longuement
le cadre juridique, il serait peut-être utile de rappeler ici les
points clés qui avaient été signalés par la commission ad hoc en
juin 2015 comme nécessitant des améliorations, et qui sont restés
inchangés depuis les dernières élections législatives, et même les
élections antérieures
:
- Le seuil électoral de 10 %: malgré
les débats publics dont ce seuil a fait l’objet ces derniers mois,
les partis politiques ont encore dû dépasser le seuil électoral
national de 10 % des suffrages valides exprimés pour obtenir des
sièges. L’Assemblée et
la Cour européenne des droits de l’homme n’ont pas cessé de souligner
que ce seuil élevé portait atteinte au pluralisme politique au parlement.
- L’absence de contrôle judiciaire
des décisions de la CES, qui menace la séparation des
pouvoirs et empêche l’accès à tout recours judiciaire effectif en
cas de litige électoral, contrevient au Code de bonne conduite de
la Commission de Venise (section II.3.3). Le récent arrêt rendu
par la Cour constitutionnelle, qui établit que les décisions de
la CES ne peuvent pas être réexaminées quand bien même il a été
porté atteinte à des libertés et des droits fondamentaux, a limité
plus encore la possibilité pour les parties prenantes d’intenter
un recours en justice .
- Les carences du cadre constitutionnel: la
Constitution de 1982, adoptée sous un régime militaire, condamne
et interdit plus qu’elle ne protège les droits de l’homme et les
libertés fondamentales, en ce qu’elle consacre des restrictions
injustifiées du droit à la liberté d’association, de réunion et
d’expression, ainsi que des droits électoraux.
- Le système d’attribution des
sièges: le système d’attribution des sièges relatifs
aux circonscriptions entraîne une disparité importante du nombre
d’électeurs par siège parlementaire, ce qui est contraire au principe
de l’égalité de vote énoncé à la section I.2.2.2.iv du Code de bonne
conduite en matière électorale .
- Les restrictions de la liberté
d’expression: le fait d’insulter le président constitue
une infraction pénale (article 299 du Code pénal). Ce chef d’accusation,
retenu à outrance ces derniers mois, restreint la liberté de parole
et la liberté de faire campagne. En outre, les partis politiques
n’ont pas le droit de promouvoir un certain nombre d’idéologies,
notamment la non-laïcité, et l’existence des minorités. Ces restrictions
entravent la liberté d’association et d’expression et limitent le
pluralisme politique.
- L’absence de cadre juridique
pour l’observation nationale et internationale des élections, en
dépit des recommandations de l’Assemblée et de la Commission
de Venise dans son «Code de bonne conduite» .
- Les restrictions au droit de
vote, qui s’appliquent aux appelés du contingent, aux
élèves d’écoles militaires et aux détenus condamnés pour une infraction
intentionnelle, quelle que soit sa gravité. La Cour européenne des
droits de l’homme a jugé à deux reprises que la privation des droits
électoraux des détenus condamnés était trop étendue et qu’elle devait
être proportionnée aux infractions commises. Cette restriction va
également à l’encontre du Code de bonne conduite de la Commission
de Venise (section I.2.2.2.iv) et d’autres engagements internationaux .
- Les restrictions au droit d’éligibilité pour
les citoyens de plus de 25 ans jouissant de la capacité juridique et
ayant reçu un enseignement primaire: ils ne peuvent pas se présenter
à une élection s’ils n’ont pas achevé le service militaire obligatoire,
ont été interdits d’exercice d’une fonction publique ou ont été condamnés
pour un large éventail d’infractions, y compris mineures (et même
en cas d’amnistie).
3. Administration électorale
et inscription des électeurs / électrices et des candidat/es
12. Les élections ont dans l’ensemble
été organisées de manière professionnelle. L’administration électorale
comprend quatre niveaux: la Commission électorale suprême (CES),
81 commissions électorales provinciales (CEP), 1 067 commissions
électorales de district (CED) et 175 006 commissions de bureau de vote
(CBV). La CES est un organe permanent, composé de 11 juges élus
pour six ans, ayant une autorité et une responsabilité générales
pour la conduite des élections. Les partis politiques éligibles,
c’est-à-dire l’AKP, le CHP, le MHP et le HDP, pouvaient désigner
des membres de la CES sans droit de vote.
13. Chaque province compte une CEP, composée des trois juges ayant
la plus grande ancienneté, qui sont nommés pour un mandat de deux
ans. Les quatre partis politiques ayant obtenu le plus grand nombre
de voix dans la province aux dernières élections générales peuvent
nommer chacun un membre au sein de la CEP, sans droit de vote. Les
CED comptent sept membres et sont présidées par le juge du district
le plus ancien; quatre de leurs membres sont nommés par des partis
politiques et deux sont des fonctionnaires. Les femmes représentaient
environ 27 % des membres des CEP, mais seulement 6 % des membres
des CED. Les CBV doivent être composées de sept membres, dont cinq
sont désignés par des partis politiques et deux sont des fonctionnaires.
14. Avant le jour du scrutin, les membres de la mission préélectorale
de l’Assemblée ont évoqué le déplacement possible des urnes situées
dans des zones touchées par l’escalade de la violence dans des lieux plus
sûrs
; le sujet n’allait pas
sans soulever des questions voire des interrogations quant aux motivations politiques
possibles de tels déplacements. Certaines CED ont opté pour le déplacement,
d’autres ont demandé l’avis de la CES sur la question. Le 3 octobre,
la CES s’est prononcée en faveur de la tenue des élections dans ces
zones, arguant que le déplacement des bureaux de vote en dehors
de leur
mukhtarlik (plus petite
zone administrative) n’était pas conforme à la loi. En conséquence,
plusieurs CED ont décidé de replacer un nombre important de bureaux
de vote dans leur
mukhtarlik d’origine
.
15. Le vote à l’étranger a été organisé du 8 au 25 octobre dans
113 bureaux de vote établis dans 54 pays et 30 postes de douane
turcs. Environ 1,2 million (sur 2,89 millions
) d’électeurs ont voté
à l’étranger. Leurs bulletins de vote ont été transportés par vols
charters et dans des valises diplomatiques dans un centre de dépouillement
à Ankara. Des garanties, telles que la vérification en ligne des
électeurs et le stockage sécurisé du matériel de vote, ont été mises
en place pour assurer l’intégrité de la procédure. La commission
ad hoc a relevé que le taux de participation augmentait régulièrement
depuis l’introduction de la mesure en 2014, comme le demandait l’Assemblée
en 2004: 19 % à l’élection présidentielle de 2014, 32,5 % à l’élection
de juin 2015 et 44 % aux élections de novembre 2015.
16. En Turquie, l’inscription des électeurs est passive. La CES
tient un registre central permanent des électeurs, lié au registre
de l’état civil et des adresses géré par le ministère de l’Intérieur.
Depuis les élections de juin 2015, le nombre total d’électeurs a
augmenté de plus de 300 000 personnes en raison de la proportion de
jeunes ayant eu 18 ans depuis cette date
. La plupart
des interlocuteurs rencontrés par la mission préélectorale de l’Assemblée
et la commission ad hoc n’ont exprimé aucune préoccupation concernant
la fiabilité du registre électoral.
17. Dans l’ensemble, l’inscription des candidats a été ouverte.
A la suite de la période de désignation et de la période d’affichage
public et de contestation, la CES a annoncé que 16 partis politiques,
présentant au total 8 426 candidats, et 21 candidats indépendants
étaient inscrits
. La commission a également
jugé que trois partis ne disposaient pas d’une structure organisationnelle
suffisante et leur a refusé le droit de se présenter aux élections
.
18. La Constitution garantit l’égalité entre les femmes et les
hommes, mais les partis politiques ne sont pas légalement tenus
de désigner des candidates. Certains partis ont mis en place des
quotas par sexe de manière volontaire: le HDP et le CHP ont respectivement
assuré que 50 % et 33 % de leurs candidats étaient des femmes. Le
nombre de candidates sur la liste de l’AKP a baissé depuis juin 2015
.
Les listes des partis comptaient en moyenne 24 % de femmes.
4. Campagne électorale, financement
de la campagne et environnement médiatique
19. Conformément à la législation
électorale, certaines règles de la campagne ont été appliquées dès
le 31 août, alors que la période de la campagne officielle ne démarrait
que dix jours avant le jour du scrutin (du 22 octobre au 31 octobre
à 18 heures), laissant la plus grande partie de la campagne insuffisamment réglementée.
Des règles plus strictes et les principes généraux d’une campagne
équitable ont été appliqués pendant la période de campagne officielle
(par exemple, interdiction de toutes les cérémonies publiques et
de tous les discours sur l’action du gouvernement).
20. Alors que les candidats étaient en général en mesure de délivrer
leurs messages à l’électorat, la campagne a été généralement de
faible intensité: la plupart des partis politiques ont utilisé les
médias sociaux et organisé des campagnes de porte-à-porte et des
petites réunions, se concentrant sur quelques circonscriptions ciblées
dans le pays là où leur parti était susceptible d’accroître le nombre
de sièges au parlement. La commission ad hoc a aussi noté que les
partis politiques ont dû mener une seconde campagne électorale la
même année, sans fonds supplémentaires de l’Etat. Les contraintes
financières ont probablement aussi contribué à la réduction des
effectifs de la campagne électorale. Des chefs de partis ont conclu
un «gentlemen’s agreement» informel pour ne pas utiliser certaines
méthodes de campagne afin d’empêcher le bruit et la pollution environnementale
.
Une visibilité accrue du matériel de campagne, en particulier des drapeaux
et affiches, a été observée les derniers jours de la campagne. Certains
partis ont utilisé des références religieuses
et
trois partis représentés au parlement ont fait campagne à l’étranger
, en
violation de la loi.
21. Aux termes de la Constitution, le président doit être au-dessus
des partis et remplir ses fonctions de manière impartiale. Tout
en participant à des rassemblements antiterroristes organisés dans
le pays et à l’étranger
, le président a exploité les possibilités
de faire campagne pour une majorité stable, et critiqué les figures
de l’opposition, ne respectant par conséquent pas ses obligations
constitutionnelles d’exécution impartiale de son mandat.
22. Le déroulement de la campagne a été, dès le début, terni par
la violence. Comme l’a déploré la délégation préélectorale de l’Assemblée,
la violence politique a pu être observée dans les semaines qui ont précédé
les élections, avec des attaques, dans l’espace de deux jours, du
6 au 8 septembre
, perpétrées contre 400 bureaux du HDP
et lieux de travail des membres du parti du HDP et de quelques locaux
de l’AKP. Elle a également été informée qu’un certain nombre de
membres du HDP, dont des maires, ont été arrêtés et détenus au cours
d’opérations de police, une situation qui était préoccupante
.
Des dépliants de la campagne du HDP ont été confisqués
. Des membres
du CHP, du MHP et du HDP ont fait l’objet d’enquête pour diffamation
des autorités publiques, dont insultes au président. L’AKP a signalé
un certain nombre d’attaques de ses bureaux et de menaces à l’encontre
de ses membres, en particulier dans l’est et au sud-est du pays.
Il a également été fait état d’intimidation des électeurs et de
pression exercée pour voter en faveur de plusieurs forces politiques.
23. A la fin de juillet 2015, la violence s’est intensifiée dans
le sud-est du pays, où vit une grande partie de la population kurde.
Dans plusieurs provinces de l’est et du sud-est du pays, la capacité
de faire librement campagne a été considérablement limitée par la
détérioration de la sécurité et là où des zones de sécurité spéciales
ont été décrétées et/ou des couvre-feux imposés
dans
des zones où les votes sont majoritairement favorables au HDP.
24. La violence a culminé avec l’attaque à la bombe à Suruc le
20 juillet 2015 (32 morts, des dizaines de blessés) et le grave
attentat terroriste perpétré à Ankara le 10 octobre 2015, au cours
duquel plus d’une centaine de personnes ont été tuées et plus de
500 blessées. Le HDP, qui a été visé par cette attaque, n’a plus organisé
de réunion à compter de cette date. L’AKP a annoncé le 12 octobre
que les rassemblements ultérieurs du parti prendraient la forme
de rassemblements anti-terroristes. Le climat de la campagne s’est polarisé
de plus en plus entre l’AKP et les autres partis, et les discours
politiques ont souvent été émaillés de propos très virulents.
25. Les grandes questions concernaient la situation socio-économique,
le «processus de solution» (qui est le terme officiel utilisé pour
décrire le processus de paix) et la campagne de lutte contre le
terrorisme. La proposition de l’AKP visant à établir un système
présidentiel, qui était au cœur de la campagne de juin 2015, a été
moins débattue, bien que figurant dans le manifeste du parti. La
commission ad hoc a toutefois considéré que le climat général de
la campagne, au regard de l’escalade de la violence, tendait à instaurer
un climat de peur et d’insécurité parmi les électeurs, ce qui aurait
très certainement pu avoir une influence sur le choix politique
le jour du scrutin.
26. Comme l’indiquaient les rapports précédents de l’Assemblée,
la législation ne contient pas de dispositions détaillées sur le
financement des campagnes. Le financement des partis par l’Etat
est alloué chaque année, sur une base proportionnelle, aux partis
qui ont reçu au moins 3 % des votes lors des dernières élections
législatives
. La législation prévoit uniquement
certaines restrictions sur le montant et la nature des dons, et
il n’est pas exigé que les sources et montants des dons des campagnes
et les dépenses soient indiqués ailleurs que dans les rapports financiers
annuels des partis politiques, ce qui limite la transparence.
27. En dépit de la diversité du paysage médiatique, commission
ad hoc s’est déclarée très préoccupée par les violations de la liberté
de la presse et de la liberté d’expression. Les restrictions constitutionnelles
et juridiques de la liberté d’expression qui avaient été identifiées
précédemment restent valables. Des dispositions peu claires de la
loi anti-terroriste et de la loi sur la presse ont été excessivement
appliquées au cours de la période électorale. Un certain nombre
de journalistes et de médias ont été poursuivis pour «soutien au
terrorisme». Les enquêtes pénales engagées pour «insulte au Président
de la République» ont été si nombreuses
qu’on
peut se demander avec inquiétude si le recours généralisé à l’article
299 est en conformité avec les normes européennes
.
28. Une pression accrue a été exercée contre les journalistes,
les médias et les groupes de médias ces derniers mois, ce qui a
entraîné une augmentation de l’autocensure, et réduit l’accès des
électeurs à une pluralité de vues et d’informations. Il y a lieu
de relever quelques événements pour illustrer le climat médiatique général
qui prévalait durant la campagne électorale:
- les bureaux du Hürriyet assaillis
par la foule les 6 et 8 septembre 2015 , et l’agression brutale de
son chroniqueur Ahmet Hakan le 1er octobre
2015;
- la cessation de la diffusion de plusieurs chaînes de télévision,
dont la plupart critiques envers le gouvernement, par quatre prestataires
de services numériques, suite à la correspondance du Bureau du Procureur
d’Ankara dans le cadre d’enquêtes en cours sur les accusations de
soutien au terrorisme ;
- d’autres cas liés à des accusations de terrorisme à l’encontre
du groupe de médias Doğan le 15 septembre, le groupe de médias Koza-Ipek
le 1er septembre et les stations de télévision
Samanyolu Haber et Mehtap TV le 15 octobre, qui tous critiquent
le gouvernement;
- le remplacement de la gestion du groupe de médias Koza-Ipek
par des fiduciaires de l’Etat, suite à la décision rendue le 26
octobre par un juge pénal de la paix d’Ankara. Le 27 octobre, des
fonctionnaires sont entrés de force avec la police dans le bâtiment
du groupe de médias Koza-Ipek.
- l’interdiction de rapports sur toute question liée à l’enquête
sur l’attentat d’Ankara, venant de fait criminaliser tout rapport
sur des questions d’intérêt public ;
- la descente de la police dans les bureaux du journal quotidien
kurde Azadiya Welat et l’agence
de presse kurde DIHA à Diyarbakir le 28 septembre, qui a incité
le Conseil de l’Europe à lancer une alerte le 5 octobre. Trente-deux
journalistes kurdes détenus ont été libérés après avoir été interrogés;
- ainsi qu’un grand nombre de restrictions sur internet .
29. Dans ce paysage médiatique tendu, la commission ad hoc était
d’autant plus préoccupée que les sanctions basées sur des rapports
de suivi des médias du Conseil supérieur de la radio et de la télévision (CSRT),
et imposées par la CES aux diffuseurs, ne prévoient pas de recours
effectif en cas de violation de la réglementation. Plusieurs parties
prenantes, dont les membres du CSRT, mettent en question la méthodologie du
CSRT pour la surveillance de la couverture de la campagne. Il ressort
clairement de divers mécanismes de surveillance des médias que ceux-ci
favorisaient ouvertement le parti au pouvoir
, alors que la réglementation applicable
aux médias requiert de tous les radiodiffuseurs qu’ils veillent
à l’impartialité, la véracité et l’exactitude dans leurs émissions
.
L’absence de lignes directrices et de définitions générales sur
la mise en œuvre de ces principes en période électorale, et la composition
politique de ce Conseil
,
ne permettent toutefois pas au CSRT de réglementer la scène médiatique
de manière à garantir un accès équitable des candidats politiques
aux médias en période électorale, ce qui permettrait aux électeurs
de faire un choix bien informé.
30. Les dispositions juridiques régissant le fonctionnement de
la CES et le traitement des plaintes électorales devraient être
clarifiées afin que des recours effectifs et en temps opportun soient
prévues en cas de plaintes électorales. Comme l’ont indiqué les
conclusions préliminaires de la MIOE du BIDDH, la CES a reçu quelque
40 plaintes et recours introduits par des partis politiques, des
députés et d’autres parties prenantes, principalement liés à la
couverture médiatique déséquilibrée et inexacte ainsi que diverses décisions
de l’administration électorale et violations relatives à la campagne.
Alors que la CES a traité efficacement certaines plaintes, d’autres
n’ont pas fait l’objet d’examen quant au fond, et dans certains
cas d’un recours effectif ou opportun. Certaines décisions de la
CES sur les plaintes et recours n’ont pas été suffisamment motivées,
en particulier dans les cas rejetés par la CES, ou dans ceux pour
lesquels elle a estimé ne pas avoir l’autorité pour juger. En l’absence
de délais légaux, la CES n’a pas traité des plaintes liées aux médias,
dont la plupart étaient liées à l’exigence d’impartialité, en temps
opportun, afin d’offrir des voies de recours effectives aux plaignants.
5. Jour du scrutin
31. Le jour de l’élection, le scrutin
était généralement organisé de manière efficace et pacifique dans
les zones observées par la commission ad hoc. Le décompte des voix
a été évalué comme transparent et bien organisé. Le dépouillement
des bulletins et le décompte des voix observé dans plusieurs CED
a été évalué comme étant dans l’ensemble ordonné et efficace, malgré
l’engorgement par moments.
32. Dans les bureaux de vote visités, le scrutin a été, en général,
bien organisé. Malgré les contraintes juridiques empêchant les organisations
non gouvernementales (ONG) d’être accréditées en tant qu’observateurs,
le suivi du processus électoral par la société civile a été de fait
dynamique. La plate-forme de la société civile «Oy ve Ötesi» (Vote
et au-delà) avait l’intention de déployer plus de 60 000 observateurs
et étaient présents dans de nombreux bureaux de vote. A plusieurs
reprises, il a été demandé aux équipes des MIOE et aux observateurs
internationaux de quitter les CBV, parfois par des personnes agissant
au nom des candidats aux élections. Dans plusieurs cas, les observateurs
accrédités au nom des partis politiques se sont vu refuser l’accès.
Après un ordre émis par un gouverneur provincial, des fonctionnaires
de police ont demandé aux représentants d’un groupe d’observateurs
citoyens accrédités au nom des partis politiques de présenter leur
identification.
33. Les membres de la commission ad hoc ont été déployés dans
16 équipes et quatre emplacements (Ankara, agglomération d’Ankara,
Izmir, Istanbul). Ils ont visité environ 200 bureaux de vote. Leurs
conclusions étaient les suivantes:
- les membres de la commission ad hoc ont convenu de conclure
que les élections ont été généralement bien menées dans les bureaux
de vote visités;
- dans quelques bureaux de vote, des tensions pourraient
se faire sentir du fait que les électeurs ont été informés de la
présence importante de certains observateurs des partis. Certaines
équipes étaient confrontées à des questions en entrant dans les
bureaux de vote, mais cela pouvait généralement être surmonté après
discussion avec le Président de la commission électorale. Dans un
cas, une équipe s’est vu refuser l’accès à un bureau de vote, mais
la question a été résolue plus tard, après intervention de la police,
qui a été convoquée par le bureau électoral;
- les membres ont observé une forte participation des personnes
handicapées et des personnes âgées, avec l’aide de membres de la
famille (comme l’autorise la réglementation), ou par des membres
du bureau électoral. Dans certains endroits, des bus ont amené les
électeurs aux bureaux de vote;
- des membres ont été intrigués par le rôle, et l’autorité,
des directeurs des écoles où se trouvaient les bureaux de vote;
- dans plusieurs bureaux de vote visités à la campagne,
il n’y avait pas d’observateurs des partis et peu de représentants
appartenant à «Oy ve Ötesi» (Voter et au-delà);
- de nombreux bureaux de vote étaient dominés par les hommes,
à l’exception d’un bureau de vote uniquement féminin;
- dans un bureau de vote à Kirsehir/Ankara, il a été signalé
qu’un électeur avait été pris en train de photographier son bulletin
de vote dans l’isoloir .
Le président a notifié l’incident à la police. Après consultation
d’une CED, ce vote a été considéré comme valable et a pu être comptabilisé.
34. Le 12 novembre, la CES a annoncé les résultats officiels des
élections; avec un taux de participation de 85,23 %:
- AKP: 49,50 % (317 sièges);
- CHP: 25,32 % (134 sièges);
- MHP: 11,9 % (40 sièges);
- HDP: 10,76 % (59 sièges);
- Parti de la félicité (Saadet): 0,68 % (aucun siège);
- Autres partis politiques: 1,84 % (aucun siège);
35. En ce qui concerne l’égalité entre les femmes et les hommes,
le nombre de femmes députés élues a baissé, passant de 98 à 82 depuis
les élections de juin. 24 % des candidats inscrits sur les listes
des partis étaient des femmes, mais pas à des postes élevés, ce
qui fait que 14,91 % des députés élus sont des femmes (elles étaient
17,8 % en juin 2015). Alors que les femmes jouent un rôle actif
dans la campagne, elles restent sous-représentées dans la vie politique.
Tous les partis politiques devraient donc être vivement encouragés
à mettre en œuvre des quotas de genre comme mesures temporaires
pour assurer une représentation équilibrée des femmes au parlement,
et veiller à ce que les femmes soient éligibles sur les listes des
partis.
6. Conclusions
et recommandations
36. La commission ad hoc a conclu
que les élections ont été bien menées le jour du scrutin, dans une atmosphère
généralement pacifique, malgré le contexte de sécurité difficile
durant la campagne électorale. Ces élections offraient un large
éventail de choix politiques. Le fonctionnement général des bureaux
de vote visités par les membres de la commission ad hoc a été efficace
et transparent. Les processus de dépouillement et le décompte des
votes ont été en général transparents et menés avec célérité. La
commission ad hoc félicite le peuple turc de sa participation active
à l’organisation des élections (avec environ un million de citoyens impliqués
dans les différents niveaux de l’administration électorale), et
sa participation à l’élection, avec un taux de participation élevé,
y compris dans les zones de la partie est et sud-est de la Turquie
touchées par une situation de sécurité défavorable.
37. La commission ad hoc a également salué la volonté et la capacité
croissante d’une société civile dynamique pour impliquer les citoyens
dans la surveillance de ces élections, partis et citoyens observateurs, en
particulier appartenant à «Oy ve Ötesi» (Voter et au-delà), et assurer
leur participation active dans le processus électoral, malgré les
restrictions légales empêchant les observateurs nationaux d’être
accrédités en tant qu’observateurs.
38. La commission ad hoc a noté que le cadre juridique – s’il
est mis en œuvre pleinement et efficacement – est généralement propice
à la tenue d’élections démocratiques. Cependant, la liberté d’association,
de réunion et d’expression, ainsi que les droits de suffrage actif
et passif, sont dans une certaine mesure indûment restreints dans
la Constitution et la législation générale.
39. La commission ad hoc souligne, une fois de plus, qu’un processus
électoral ne se limite pas, tant s’en faut, au jour de scrutin.
Elle regrette que la campagne électorale ait été ternie par un contexte
de sécurité difficile, en particulier dans le sud-est du pays, et
un nombre élevé d’incidents violents, dont les attaques contre les
membres du parti et le personnel de campagne, ainsi que dans les
locaux des partis, ce qui a entravé la capacité des candidats à
faire campagne librement.
40. La couverture médiatique s’est polarisée sur des positions
partisanes, y compris sur la chaîne de télévision publique, le parti
au pouvoir ayant été nettement favorisé. La commission ad hoc a
donc conclu que la campagne électorale a été caractérisée par l’iniquité,
compte tenu des graves restrictions à la liberté des médias, la
criminalisation des voix dissidentes, l’absence de recours effectifs
et opportuns prévus par la Commission électorale suprême (en particulier
concernant une couverture inéquitable des médias) et l’examen judiciaire
des décisions de la CES, et le contexte de peur régnant dans le
pays suite à la reprise des attentats terroristes et la reprise
de la lutte contre le terrorisme.
41. La commission ad hoc souhaite qu’après ces élections législatives,
qui se sont déroulées dans une atmosphère beaucoup plus polarisée,
le dialogue reprenne au sein de la société afin de poursuivre le processus
de démocratisation, ainsi que les pourparlers de paix pour résoudre
la question kurde, qui est une question clé pour la stabilité démocratique
à long terme du pays. En particulier, elle a souligné le rôle que
le président, conformément à ses prérogatives constitutionnelles,
devrait jouer en faveur d’un processus politique inclusif pour faire
face aux problèmes auxquels est confrontée la Turquie, en veillant
à ce que toutes les voix, y compris celles ayant perdu ces élections,
soient en mesure d’être entendues.
42. Nombre de lacunes, qui, à plusieurs reprises ont déjà été
identifiées par l’Assemblée parlementaire, la Commission de Venise
et l’OSCE/BIDDH, restent sans réponse. Par conséquent, la commission
ad hoc encourage vivement les autorités à remédier, avant les prochaines
élections, à ces lacunes dans le cadre de son dialogue post-suivi
avec l’Assemblée parlementaire et des programmes de coopération
du Conseil de l’Europe, et en étroite coopération avec la Commission
de Venise, en particulier:
- à
revoir et adapter la législation électorale et les dispositions
constitutionnelles pertinentes, notamment pour combler les lacunes;
inclure une meilleure protection et réglementation dans le domaine
de la liberté d’expression et de l’utilisation des médias durant
la campagne; améliorer les règles relatives à la campagne et au
financement des partis (en ligne avec les recommandations du Groupe
d'Etats contre la corruption (GRECO) en 2015); revoir la méthode
de répartition des sièges et garantir le principe de l’égalité du
vote en raison des différences significatives dans le poids du vote;
- à abaisser le seuil de 10 %, qui a un impact sur le manque
de représentativité du parlement;
- à mettre en place un mécanisme pour permettre le contrôle
judiciaire des décisions de la CES, et assurer l’accès aux recours
judiciaires en matière électorale, conformément aux recommandations
de la Commission de Venise;
- à évaluer la composition et le fonctionnement du Conseil
supérieur de la radio et de la télévision (CSRT) pour assurer un
bon suivi de la loi sur l’établissement des entreprises de radio
et de télévision qui oblige les radiodiffuseurs à fournir une couverture
impartiale des partis politiques;
- à s’assurer que la CES garantit des recours effectifs
et opportuns en cas de violation de la loi;
- à instaurer une base juridique pour l’observation citoyenne
et internationale, en conformité avec le paragraphe II.3.2 du Code
de bonne conduite en matière électorale de la Commission de Venise,
ce qui contribuerait à améliorer la confiance globale dans le processus
électoral.
Annexe 1 –
Composition de la commission ad hoc
(open)
Sur la base de propositions des groupes politiques
de l’Assemblée, la commission ad hoc se composait comme suit:
- Andreas GROSS (Suisse, SOC),
Président
- Groupe du Parti populaire
européen (PPE/DC)
- Volodymyr
ARIEV, Ukraine*
- Elena CENTEMERO, Italie
- Iryna GERASHCHENKO, Ukraine
- Anže LOGAR, Slovénie
- Ion POPA, Roumanie
- Ionuƫ-Marian STROE, Roumanie
- Imer ALIU, «l’ex-République yougoslave de Macédoine»
- Groupe socialiste (SOC)
- Andreas GROSS, Suisse*
- Josette DURRIEU, France
- Birutè VĖSAITĖ, Lituanie
- Paolo CORSINI, Italie
- Yuliya L’OVOCHKINA, Ukraine
- Alliance des démocrates et
des libéraux pour l’Europe (ADLE)
- André BUGNON, Suisse
- Alfred HEER, Suisse
- Olena SOTNYK, Ukraine*
- Carles JORDANA MADERO, Andorre
- Eerik-Niiles KROSS, Estonie
- Groupe des conservateurs européens
(CE)
- Richard BALFE,
Royaume-Uni
- Christopher CHOPE, Royaume-Uni*
- Groupe de la gauche unitaire
européenne (GUE)
- Tiny
KOX*, Pays-Bas
- Nikolaj VILLUMSEN, Danemark*
- George LOUKAIDES, Chypre
- Corapporteures de la commission
de suivi(ex officio)
- Ms Ingebjørg GODSKESEN, Norvège*
- Ms Nataša VUCKOVIC, Serbie*
- Commission de Venise
- Srđan DARMANOVIĆ, Monténégro
- Secrétariat
- Sylvie AFFHOLDER, Administratrice,
Assemblée parlementaire
- Danièle GASTL, Assistante, Division de l’observation des
élections et de la coopération interparlementaire, Secrétariat
de l’Assemblée parlementaire
- Sevda GÜNDÜZ, Assistante, Division de l’observation des
élections et de la coopération interparlementaire, Secrétariat
de l’Assemblée parlementaire
- Nathalie BARGELLINI, Attachée de presse, Assemblée parlementaire
- Amaya UBEDA DE TORRES, Administratrice, Commission de
Venise
- Denise O’HARA, Secrétaire du Groupe du Parti populaire
européen (PPE/DC)
- Anna KOLOTOVA, Secrétaire du Groupe de la gauche unitaire
européenne (GUE)
* membres de la délégation préélectorale
Annexe 2 –
Déclaration de la mission préélectorale
(open)
Strasbourg, 08.10.2015 – Une délégation multipartite
de sept membres (*) de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe
(APCE) s’est rendue à Ankara les 5 et 6 octobre 2015, à l’invitation
de la délégation turque auprès de l’APCE, pour une visite préélectorale
avant les élections législatives anticipées prévues le 1er novembre
2015.
La délégation note que la campagne pour les élections anticipées
se déroule dans un environnement qui a radicalement changé par rapport
aux élections du 7 juin. En effet, aucun parti n’a à lui seul de
majorité parlementaire, les tentatives de former une coalition ont
échoué, le processus de paix est suspendu et les heurts ont repris
entre les Forces turques de sécurité et le PKK. Ces événements ont
entraîné une polarisation accrue, et un regain de tensions dans
le pays.
La délégation se félicite que tous les partis politiques se
soient engagés à tenir des élections équitables et estime que les
électeurs se verront, une fois encore, offrir un véritable choix.
Elle est cependant sérieusement préoccupée par la situation des
médias. Elle a été informée de cas d’intimidations répétées, de
pressions et d’attaques physiques à l’encontre de journalistes et
de groupes de presse, qui ont culminé par des mouvements de foule
dans les locaux de Hürriyet les 6 et 8 septembre 2015 et l’agression
brutale dont a été victime son chroniqueur Ahmet Hakan le 1er octobre
2015.
La délégation a également été informée d’une nette augmentation
des poursuites intentées à l’encontre de voix critiques, accusées
de «diffamation du Président» (article 299 du Code pénal), ou encore
de «terrorisme»; un certain nombre de restrictions à la liberté
d’expression, notamment sur Internet et les médias sociaux, lui
ont également été rapportées.
Les problèmes de sécurité ont également dominé les discussions
durant la visite préélectorale. La délégation condamne la violence
à motivations politiques observée ces dernières semaines, notamment
les attaques perpétrées, en deux jours, contre 400 bureaux et locaux
professionnels du parti HDP, ainsi que contre des bâtiments d’AKP.
Elle a également été informée qu’un certain nombre de membres du
HDP, dont des Maires, ont été arrêtés et mis en détention lors de
récentes opérations de police, ce qui est préoccupant. La délégation appelle
toutes les parties prenantes politiques à éviter de recourir à la
violence verbale et physique et à agir pour y mettre un terme, ainsi
qu’à adopter une position raisonnable durant la campagne électorale
pour prévenir toute nouvelle escalade qui saperait les processus
démocratiques.
Avec la Commission électorale suprême (CES), la délégation
a également discuté de possibles mesures à prendre pour garantir
la sûreté et la sécurité de tous les électeurs. Une attention particulière
a été portée à la récente décision de la CES de ne pas autoriser
que les urnes dans des quartiers à risque soient déplacées. La délégation
a été informée que, dans certains endroits, des pressions pourraient
être exercées sur les électeurs. La création d’un certain nombre
de «zones de sécurité temporaire spéciales» et les couvre-feux dans
des secteurs majoritairement susceptibles de voter pour le HDP est
très préoccupante, car du fait de cette situation, la peur pourrait
se répandre au sein des électeurs. Les autorités ont assuré à la
délégation que toutes les mesures nécessaires seraient prises pour
garantir la sécurité, en particulier dans l’est et le sud-est de
la Turquie, et pour permettre aux candidats de faire campagne, et
aux citoyens de voter, sans crainte. La délégation estime que l’observation
des élections par des observateurs locaux et internationaux dans
ces zones contestées, si les conditions de sécurité le permettent,
renforcera la transparence du processus électoral et la confiance
dans ce dernier.
Enfin, la délégation rappelle qu’un certain nombre de dysfonctionnement
identifiés durant la mission d’observation des élections de juin
2015 perdurent, par exemple la forte disproportion de la couverture
des différents partis politiques dans les médias appartenant à l’Etat;
l’absence de contrôle judiciaire des décisions de la CES; l’absence
de réglementation du financement de campagne et des partis; et l’impossibilité
pour les ONG nationales de s’enregistrer en tant qu’observateurs.
Le rôle actif joué par le Président de la République durant la période
de campagne, en dépit des dispositions constitutionnelles qui lui
imposent d’exercer sa fonction en toute neutralité, a également
été mis en cause. La délégation réitère l’appel de l’APCE à abaisser le
seuil de 10 %, qui a un impact sur le manque de représentativité
du parlement.
La délégation exprime l’espoir que les élections seront justes
et transparentes, et permettront aux citoyens d’exprimer leur volonté.
Elle se félicite aussi de la capacité croissante d’une société civile
dynamique à associer les citoyens à l’observation de ces élections
et à jouer un rôle actif dans le processus électoral.
Durant sa visite à Ankara, la délégation a rencontré des chefs
et représentants des principaux partis politiques participant aux
élections, des membres du corps diplomatique à Ankara, le Chef de
la Mission d’observation des élections de l’OSCE/BIDDH, des membres
de la délégation parlementaire turque auprès de l’APCE, le Président
et des membres de la Commission électorale suprême (CES), des représentants
du ministère de l’Intérieur, le Président et des membres du Conseil
suprême de l’audiovisuel (CSA) ainsi que des représentants de la
société civile et des médias. Une délégation complète de 32 observateurs
de l’APCE se rendra dans le pays pour observer les élections anticipées
du 1er novembre 2015.
(*) Membres de la délégation préélectorale: Andreas Gross
(Suisse, SOC), Chef de la délégation; Volodymyr Ariev (Ukraine,
PPE/DC); Olena Sotnyk (Ukraine, ADLE); Christopher Chope (Royaume-Uni,
CE); Nikolaj Villumsen (Danemark, GUE); Ingebjorg Godskesen (Norvège,
CE) et Natasa Vuckovic (Serbie, SOC), corapporteures de l’APCE pour
le dialogue postsuivi avec la Turquie
Annexe 3 –
Programme de la mission d’observation des élections (30 octobre-2
novembre 2015)
(open)
Vendredi
30 octobre 2015
09h00-10h00 Réunion de la commission ad hoc de l’APCE:
- Information sur la mission préélectorale
de M. Andreas Gross, chef de la délégation
- Informations données par des membres de la mission préélectorale
- Informations sur la législation électorale, par M. Srđan
Darmanović, Commission de Venise, et Mme Amaya
Ubeda de Torres, membre du Secrétariat
- Dispositions pratiques et logistiques, Secrétariat
10h15-10h30 Ouverture par les chefs des délégations parlementaires:
- M. Ignacio Sánchez Amor, coordinateur
spécial des observateurs de courte durée de l’OSCE
- M. Andreas Gross, chef de la délégation de l’APCE
- Mme Margareta Cederfelt, chef
de la délégation de l’AP-OSCE
10h30-12h30 Réunion d’information de la Mission d’observation
limitée des élections de l’OSCE/BIDDH:
- Introduction et aperçu des résultats à ce jour – Ambassadeur
Geert-Hinrich Ahrens, Chef de Mission
- Contexte politique et campagne – Mme Martina
Barker-Cigániková, analyste politique
- Cadre juridique et plaintes – Mme Marla
Morry, analyste juridique
- Environement médiatique – Mme Elma
Šehalić, analyste média
- Procédures d’administration électorale et du scrutin –
M. Konrad Olszewski, analyste élection
- Questions-réponses
- Point sur la sécurité – M. Wayne Pilgrim, expert en sécurité
14h30-17h45 Réunions avec des représentants de partis politiques:
- M. Yıldız Seferinoğlu, Président
du Centre pour les élections, Parti de la justice et du développement
(AKP)
- M. Erdal Aksünger, Chef Consultant du Président, député
d’İzmir, Parti républicain du peuple (CHP)
- M. Sırrı Süreyya Önder, député d’Ankara, Parti démocratique
des peuples (HDP)
18h00 Réunion avec les interprètes et les chauffeurs des
équipes de l’AP-OSCE et de l’APCE déployées à Ankara
Samedi 31 octobre
2015
09h30-10h30 Table ronde avec des représentants des médias:
- M. Ali Ünal, Représentant à
Ankara, Daily Sabah
- M. Arif Tekdal, correspondant diplomatique, Today’s Zaman Daily
- Mme Zeynep Gürcanli, représentante
du Bureau d’Ankara, Hürriyet
- M. Ahmet Abakay, Président, Association des journalistes
progressistes
10h30-11h30 Table ronde avec des représentants de la société
civile:
- Mme Oya
Özarslan, Présidente, Transparency International
- M. Mehmet Pancaroğlu, Représentant d’Ankara, Vote and
Beyond
- Mme Dilek Ertükel, Directrice
pays, NDI
- Mme Hatice Kapusuz, Présidente
de KA.DER, Ankara,
- Mme Feray Salman, Coordinatrice
générale, Plateforme commune pour les droits de l’homme
11h30-12h00 Réunion avec des représentants du Conseil supérieur
de la radio et de la télévision (RTSC):
- M. İlker Ilgın, Vice-Président
- M. Emir Miracettin Ulucak, Chef du département du suivi
et de l’évaluation
- M. Süleyman Demirkan, membre
- M. Ersin Öngel, membre
12h00-12h30 Briefing régional par les observateurs de longue
durée de la MROE de l’OSCE/BIDDH déployés à Ankara:
- Mme Jurga
Lukšaitė-Roehling, co-ordinatrice des observateurs de longue durée
- Observateurs de longue durée – Equipes à Ankara: Mme Linda
Elisabeth Beijlsmit et Mme Karin Bo Bergquist
Dimanche 1er novembre
2015
07h30 Observation de l’ouverture des bureaux de vote
08h00-17h00 Observation du scrutin
17h00 Observation de la clôture des bureaux de vote, décompte
et présentation des résultats
Lundi 2 novembre
2015
8h30-09h30 Réunion de la commission ad hoc de l’APCE
Débriefing des membres de la commission ad hoc suite à l’observation
des élections
14h00 Conférence de presse jointe
Annexe 4 –
Déclaration de la mission internationale d’observation des élections
(MIOE)
(open)
Turquie:
choix dans les programmes électoraux, mais un scrutin entravé par
la situation tendue sur le plan de la sécurité, les actes de violence
et les restrictions imposées aux médias, selon les observateurs
internationaux
Strasbourg, 02.11.2015 – Les élections législatives anticipées
qui se sont déroulées en Turquie le 1er novembre
ont donné aux électeurs la possibilité de choisir entre une multiplicité
de programmes électoraux. Dans le même temps, la situation tendue
sur le plan de la sécurité, en particulier dans le sud-est du pays, conjuguée
à de nombreux incidents violents, notamment des agressions qui ont
visé des candidats, leurs locaux et leurs équipes, les a empêchés
de faire librement campagne, ont indiqué les observateurs internationaux
dans une déclaration publiée ce jour. Les restrictions auxquelles
sont soumis les médias continuent de poser un grave problème, ont-ils
ajouté.
«Ce scrutin très polarisé a certes permis aux citoyens turcs
de choisir entre des alternatives politiques réelles et crédibles,
mais le fait qu’ils se soient rapidement heurtés à un choix de plus
en plus limité dans la couverture médiatique et les restrictions
de la liberté d’expression d’une manière générale ont pesé sur le
scrutin et demeurent très préoccupants», a estimé Ignacio Sánchez
Amor, coordinateur spécial et chef de la mission d’observation de
courte durée de l’OSCE. «Les agressions physiques dont ont fait
l’objet des candidats, ainsi que d’importants problèmes de sécurité,
en particulier dans le sud-est du territoire, ont été un frein supplémentaire
dans la campagne électorale.»
Le grave attentat à la bombe terroriste perpétré à Ankara
le 10 octobre a considérablement alourdi le climat et le déroulement
de la campagne, qui a de ce fait été temporairement suspendue par
tous les partis politiques. Les messages destinés à l’électorat
ont été instillés dans un climat qui s’est polarisé entre le parti
au pouvoir et les autres candidats, et les discours politiques ont
souvent été émaillés de propos très virulents, selon la déclaration.
Les deux dernières semaines de la campagne ont été marquées par
une hausse du nombre d’agressions et d’arrestations de candidats
et de militants, le Parti démocratique du peuple (HDP) ayant été
ici plus spécialement visé.
«La campagne électorale a malheureusement été entachée par
l’inéquité et, dans une certaine mesure, par la peur», a déclaré
Andreas Gross, chef de la délégation de l’APCE. «D’où la nécessité
absolument cruciale pour le Président de s’engager, pour régler
les problèmes auxquels la Turquie doit faire face, dans un processus politique
dont nul ne soit exclu et de veiller à ce que tous, y compris ceux
qui ont perdu les élections, puissent faire entendre leur voix.»
«Les violences dans le sud-est du pays, à dominance kurde,
ont lourdement pesé sur le scrutin et les récentes agressions et
arrestations de candidats et militants, principalement du HDP, sont
préoccupantes dans la mesure où elles ont entravé leur possibilité
de faire campagne», a déclaré Margareta Cederfelt, chef de la délégation
de l’Assemblée parlementaire de l’OSCE. «Pour qu’un processus électoral
soit réellement démocratique, les candidats doivent avoir le sentiment
qu’ils peuvent mener campagne, et les électeurs celui qu’ils peuvent
se rendre aux urnes en toute sécurité.»
En dépit de la diversité du paysage médiatique, la liberté
d’expression continue de faire l’objet de restrictions juridiques
excessives. Les enquêtes qui ont visé des journalistes et des organes
de presse accusés de soutenir le terrorisme ou d’avoir tenu des
propos diffamatoires contre le Président, le blocage de sites web,
le musellement de certains médias de premier rang et le fait que
des fournisseurs de services numériques aient supprimé de leur offre
plusieurs chaînes de télévision ont restreint l’accès des électeurs
à une pluralité de vues et d’informations, ont estimé les observateurs.
En examinant de plus près la situation sur le terrain médiatique, il
est apparu que trois des cinq chaînes de télévision nationales observées,
dont la chaîne publique, étaient, dans leurs programmes, clairement
favorables au parti au pouvoir.
Les élections ont été bien organisées par les services administratifs
qui en étaient chargés, et la Commission électorale suprême a respecté
tous les délais. Elle a estimé que le scrutin devait malgré tout
se tenir dans les zones touchées par la violence et les commissions
électorales de district ont, conformément à cette décision, déplacé
un nombre non négligeable de bureaux de vote dans plusieurs quartiers.
Dès lors qu’il est pleinement et efficacement mis en œuvre,
le cadre juridique doit normalement favoriser la tenue d’élections
démocratiques. Or, certaines libertés fondamentales, dont le droit
de voter et d’être élu, font l’objet de restrictions excessives
dans la Constitution et la législation. Les observateurs ont relevé
que diverses recommandations adoptées depuis quelque temps déjà,
pour certaines en 2011, par le Bureau des Institutions démocratiques
et des droits de l’homme de l’OSCE et par le Conseil de l’Europe
en vue de remédier à différentes lacunes et ambiguïtés n’avaient
pas été suivies d’effet.
«Une fois de plus, notre appréciation, qui s’est appuyée sur
les observations que nous avons menées ces cinq dernières semaines,
n’est pas clairement tranchée; il y a des points positifs, mais
il y a aussi des choses qui laissent à désirer», a indiqué Geert-Hinrich
Ahrens, qui dirigeait la Mission restreinte d’observation des élections
de l’OSCE/BIDDH. «J’espère que les autorités compétentes tiendront
compte du message contenu dans la déclaration d’aujourd’hui ainsi
que dans le rapport final du BIDDH concernant ce scrutin, et qu’elles s’emploieront
à donner un suivi substantiel aux recommandations que fera le rapport
final.»
Les observateurs soulignent aussi dans la déclaration le fait
que le seuil de 10 % pour les élections législatives limite le pluralisme
politique et que le système utilisé pour déterminer le nombre de
sièges par circonscription aboutit à d’importants écarts concernant
le nombre d’électeurs par siège, ce qui est contraire au principe d’égalité
du vote. Au plan positif, ils relèvent que la liberté de faire campagne
dans la langue de son choix a été garantie par le législateur en
2014.
L’impossibilité de soumettre les décisions de la Commission
électorale suprême à un contrôle juridictionnel va à l’encontre
du principe de la séparation des pouvoirs et empêche tout accès
à des voies de recours judiciaires en matière électorale. Le récent
arrêt rendu par la Cour constitutionnelle dans lequel celle-ci a
indiqué que les décisions de la Commission ne pouvaient être réexaminées
quand bien même il avait été porté atteinte à des libertés et droits
fondamentaux, a limité plus encore la possibilité d’intenter un
recours en justice, ont déclaré les observateurs.
L’inscription des candidats n’a globalement exclu personne
et a laissé aux électeurs un choix réellement ouvert. Néanmoins,
les restrictions qui ont frappé ceux qui n’avaient pas accompli
leur service militaire obligatoire ou qui avaient été condamnés
pour l’un des délits figurant sur une large liste de faits répréhensibles, parfois
mineurs, sont incompatibles avec le droit fondamental de se présenter
aux élections, indique la déclaration.
Les observateurs ont constaté que les listes électorales ont
été perçues comme généralement fiables. Ils ont cependant ajouté
que les restrictions de vote imposées aux appelés du contingent,
aux étudiants des écoles militaires et aux détenus n’étaient pas
conformes aux engagements vis-à-vis de l’OSCE ni à d’autres normes internationales.
Les femmes ont joué un rôle actif dans la campagne, même si
elles demeurent sous-représentées dans la vie politique. La Constitution
garantit l’égalité des sexes; pour autant, les partis politiques
n’ont aucune obligation, au regard de la loi, de proposer des candidatures
féminines. Il est toutefois encourageant de voir que certains partis
ont institué des quotas hommes/femmes et mis en place des mesures
de discrimination positive pour favoriser la participation des femmes.
Environ 24 % des candidatures présentées pour ce scrutin émanaient de
femmes – mais elles n’occupaient pas les places plus élevées dans
les listes.
Le scrutin s’est, dans l’ensemble, déroulé dans le calme et
le vote, tel qu’ont pu le constater les observateurs dans le petit
nombre de bureaux où ils se sont rendus, était organisé de manière
globalement efficace; les observateurs ont toutefois été priés de
quitter les lieux dans sept bureaux de vote, et des observateurs
citoyens accrédités par des partis politiques ont été interdits
d’accès dans certains bureaux. Les procédures de comptage des voix
ont été jugées transparentes et bien organisées, même si les modalités
prévues par la loi n’ont parfois pas été respectées.