1. Origine, portée et objectif du rapport
1. La coopération entre villes
peut concerner un large éventail de communautés urbaines. Elle s’applique évidemment
aux grandes agglomérations comme Berlin, Londres, Moscou et Paris.
Cependant, elle peut aussi intéresser des villes de moins d’un million
d’habitants, voire de quelques milliers d’habitants, et même des villages
qui ne regroupent que quelques centaines de personnes. En effet,
l’établissement de relations constructives ne dépend pas nécessairement
de la taille ou du statut précis des villes et villages, pas plus
que de leurs populations elles-mêmes. Car de telles relations peuvent
tout autant être établies entre les groupes de la société civile,
les institutions culturelles, les sociétés privées et les entreprises
sociales présentes dans les zones urbaines européennes.
2. Le présent rapport soutient qu’une bonne démocratie nécessite
un soutien solide des administrations, des institutions culturelles
et éducatives, des associations et des citoyens, notamment au niveau
local. Par conséquent, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe
devrait favoriser les opportunités culturelles et éducatives qui
s’offrent aux citoyens et faciliter la coopération internationale
dans ce domaine.
3. Les récentes élections européennes ont révélé des sentiments
de défiance et d’aliénation vis-à-vis des responsables politiques
et de leurs institutions. Sur la coopération entre villes, le regard
est différent. Elle échappe davantage à la bureaucratie européenne,
mais aussi au contrôle et aux ingérences du pouvoir national. Cela
tient au fait que la coopération entre villes consiste en échanges
directs entre communautés européennes, en particulier autour des
arts, du patrimoine culturel, du secteur de la création et du dialogue interculturel.
Elle permet de trouver des synergies et de nouer des partenariats,
qui concernent non seulement les institutions et les pouvoirs locaux,
mais aussi le secteur privé et les citoyens. De tels contacts aident
ainsi à rétablir assurance, confiance et enthousiasme.
4. Toutefois, lorsqu’elles s’efforcent de nouer des relations
internationales, les villes se heurtent à des difficultés telles
que des réductions budgétaires, une tendance centralisatrice des
Etats et des gouvernements ou encore une montée des préjugés raciaux.
En conséquence, il n’est pas rare que le patrimoine et la culture se
trouvent relégués au second plan. Ironie de la situation: grâce
aux voyages à bas coût, aux réseaux sociaux et à la pratique d’une
langue commune, les occasions de communication et d’échanges internationaux
n’ont jamais été aussi grandes.
5. Le présent rapport cherche à relier trois thèmes: la nature
et l’objectif de la coopération entre villes, en particulier dans
le domaine de la culture; sa contribution à la démocratie et à la
stabilité en Europe; et la façon dont les gouvernements et institutions
peuvent œuvrer à la promouvoir.
6. Les échanges culturels entre villes et communautés ont plusieurs
effets positifs: meilleure compréhension de leur qualité et diversité;
renforcement du champ d’action et de la volonté politique de les valoriser
et de les gérer; augmentation du nombre de personnes ayant accès
à leur propre patrimoine et participant à la vie culturelle locale;
et création d’emplois et retombées économiques liées au développement du
tourisme culturel.
7. Le présent rapport recommande aussi l’adoption de certaines
mesures, au niveau local comme national, pour encourager la coopération
entre villes dans le domaine de la culture. Les réalisations existantes
devraient être mises en avant. Elles englobent les projets menés
par des artistes et par des associations culturelles ou autres dans
les villes, ainsi que les formidables contributions venant des acteurs
locaux et des initiatives de la société civile.
8. Nous montrerons que la coopération culturelle entre villes
est triplement bénéfique pour l’identité européenne. Elle sensibilise
à la culture en elle-même, ce qui amène à mieux apprécier et respecter
la différence et la diversité, rendant possible une réduction des
clivages entre cultures.
9. Le Conseil de l’Europe soutient depuis longtemps les échanges
culturels et la diversité en Europe, que ce soit par le biais du
Congrès des pouvoirs locaux et régionaux

, de son Centre d’expertise sur la réforme
de l’administration locale, de son soutien à la Convention-cadre
du Conseil de l’Europe sur la valeur du patrimoine culturel pour
la société (STCE no 199, «Convention
de Faro») ou par le biais de sa coordination des Itinéraires culturels
européens et du réseau de plus en plus large des Cités interculturelles.
2. Bref
aperçu historique
10. Il existe en Europe une longue
tradition de coopération internationale entre villes. Elle a contribué
à la paix et à la prospérité sur notre continent – en particulier
via les échanges culturels.
11. Depuis l’époque des villes-Etats de la Grèce antique, les
exemples de coopération entre villes sont innombrables. La Ligue
hanséatique, en particulier, a prospéré pendant plusieurs siècles,
reliant quelque deux cents bourgs et villes-Etats qui cherchaient
à favoriser le commerce et à renforcer leur influence politique.
A partir du XVIe siècle, la montée de
l’Etat-nation a progressivement affaibli l’influence et l’indépendance
des villes européennes.
12. Cependant, vers la fin du XIXe siècle,
les villes retrouvent en partie leur indépendance, car elles éprouvent
un sentiment d’insatisfaction vis-à-vis du nationalisme européen
et ses politiques agressives. Elles se mettent alors à défendre
la paix et la solidarité

,
aboutissant en 1913 à la fondation de l’Union internationale des
villes et pouvoirs locaux (UIV). Mais ce n’est qu’après la seconde
guerre mondiale que les villes prennent une initiative décisive
et trouvent l’autorité morale pour former, au niveau des municipalités,
des contacts et des partenariats entre les nations qui s’étaient
récemment affrontées. C’est la naissance du mouvement dit des «jumelages»

,
soutenu en Europe depuis les années 1950 par le Conseil des communes
et régions d’Europe (CCRE)

.
13. Créé par l’Assemblée parlementaire en 1955, le Prix de l’Europe
récompense des municipalités qui ont institué des jumelages avec
des municipalités étrangères et participent à toute une série d’activités
pour développer les relations avec leurs partenaires européens.
Soixante ans après sa création, le Prix de l’Europe, composé de
quatre récompenses distinctes (le Diplôme européen, le Drapeau d’honneur,
la Plaquette d’honneur et le Prix de l’Europe), est plus utile que
jamais dans la mesure où il constitue un important moyen d’améliorer
les relations entre les citoyens européens.
14. On estime que 70 % des villes du monde sont engagées dans
une certaine forme de coopération internationale et que plus de
11 000 paires de villes, réparties dans 159 pays, sont jumelées

. En 1989, le Parlement européen
a officiellement reconnu le rôle du jumelage entre villes et ouvert
une ligne de financement, reprise dans le nouveau programme «L’Europe
pour les citoyens 2014-2020»

.
15. Comme indiqué, si deux villes ou centres peuvent nouer des
relations bilatérales en vue de poursuivre des intérêts communs,
des relations multilatérales peuvent aussi être établies par plusieurs
villes, notamment par le biais des Eurocités

ou
de réseaux similaires que toute ville peut rejoindre.
16. En 2004, l’UIV a fusionné avec d’autres organisations de communes
pour former une organisation mondiale, Cités et gouvernements locaux
unis (CGLU), représentée en Europe par le CCRE. La naissance de CGLU
traduit le rôle important, aujourd’hui reconnu, que les villes et
leurs administrations ont à jouer aux côtés des organismes internationaux
et nationaux.
3. Principaux
thèmes et tendances de la coopération entre villes
17. Jusque dans les années 1990,
la plupart des jumelages s’articulaient autour de l’éducation et
des échanges culturels, ce qui est toujours le cas. Aujourd’hui
cependant, de nombreuses relations de jumelage sont aussi utilisées
pour favoriser les échanges commerciaux, l’apprentissage et l’emploi
au sein des économies locales respectives des villes, améliorant
ainsi leur propre image.
18. La pratique du jumelage ne s’est pas non plus limitée aux
villes européennes car un grand nombre de relations ont été établies
entre des villes européennes et d’autres villes dans le monde. Elles
reflètent dans une certaine mesure les migrations mondiales. La
branche internationale de l’Association néerlandaise des municipalités

est un exemple: de nombreuses villes
européennes ont noué des relations avec des régions du monde en
développement, qui sont aussi parfois les régions d’origine de leur
propre population immigrée. Ces liens (parfois nommés «diplomatie
des villes

» ou «coopération décentralisée au
développement»), qui consistent essentiellement en l’apport d’une
assistance technique, peuvent aussi comporter des activités de médiation
et de construction de la paix dans d’anciennes zones de conflits,
ce qui se traduit par le renforcement de l’intégrité et de la confiance
dans la ville d’accueil des migrants

.
19. Une autre tendance qui a pu être observée ces dernières années
réside dans la diminution du rôle des pouvoirs locaux et dans l’importance
grandissante des acteurs de la société civile (bénévoles comme professionnels)
dans le maintien des relations internationales

.
20. Ces cinq dernières années, la récession économique a engendré
une baisse des activités internationales (relations bilatérales
comme adhésions à des réseaux). Pour certains, le jumelage entre
villes ne pourra survivre que comme levier de promotion des villes
et de stratégies d’investissement

. Pour
d’autres cependant, il devrait rester libre de se tenir à l’écart
des exigences de performance et des audits de rentabilité et atteindre
son objectif par le biais de liens informels, d’empathie et de pratiques
d’hospitalité

.
21. D’aucuns considèrent que le modèle de jumelage traditionnel
d’après-guerre n’est plus pertinent; dans le climat actuel d’austérité,
d’euroscepticisme et de repliement national, il est plutôt obsolète.
Ainsi, certains affirment que le jumelage de villes et les programmes
d’échanges individuels comme Erasmus touchent surtout un public
de classes moyennes, mais qu’ils n’ont qu’un très faible effet persuasif
sur les groupes sociaux dans lesquels les partis politiques populistes
et xénophobes puisent la plupart de leurs soutiens

.
4. Coopération
entre villes dans le domaine de la culture 
22. «Si c’était à refaire, je commencerais
par la culture». Ces paroles sont souvent attribuées à Jean Monnet.
La culture offre un espace où réunir non seulement des étrangers,
mais aussi des ennemis passés ou potentiels. Elément fort du processus
de réconciliation, la culture a déjà apporté une contribution inestimable
depuis 1945. Au sein des villes et entre les villes, elle peut désormais
aussi contribuer à promouvoir de nombreuses autres actions utiles.
23. Les villes se sont tournées vers plusieurs modalités pour
coopérer dans le domaine de la culture:
- des relations bilatérales de jumelage peuvent commencer
par des échanges culturels et éducatifs, puis évoluer en synergies
dans d’autres domaines liés comme les connaissances techniques,
les entreprises, les échanges commerciaux, l’apprentissage et l’emploi;
par exemple entre la Croatie et le Royaume-Uni, des synergies fonctionnent
entre Dundee et Zadar, ainsi qu’entre Dubrovnik, Zadar et Inverness;
- des collaborations multilatérales, souvent dans le cadre
de programmes de financement de la Commission européenne, par exemple
Interreg, Urbact ou Europe créative, ou encore de la Convention-cadre
du Conseil de l’Europe sur la valeur du patrimoine culturel pour
la société;
- des réseaux de villes comportant un aspect culturel, comme:
- l’Agenda 21 pour la culture
de CGLU
- les Villes créatives de l’Unesco
- le Forum Culture d’Eurocités
- le réseau des Cités interculturelles du Conseil de l’Europe;
- des réseaux de villes consacrés à la culture, notamment:
- le World Cities Culture Forum
- Les Rencontres – Association des villes et régions de
la grande Europe pour la culture
- CreArt (Réseau des villes pour la création artistique)
- les Capitales et Villes européennes de la culture
- l’European Association of Historic Towns and Regions
- l’Inter-City Intangible Cultural Co-operation Network
- l’Organisation des villes du patrimoine mondial
- le Réseau des régions européennes pour un tourisme durable
et compétitif.
4.1. Obstacles
à la coopération
4.1.1. Austérité
financière
24. Une ville fera toujours passer
ses principaux engagements avant ses programmes internationaux,
a fortiori en période d’austérité. Entre autres, les villes sont
juridiquement responsables de la prestation de certains services,
tels que l’éducation, la protection sociale ou la maintenance des
infrastructures essentielles. Dans ce contexte, il est très difficile
de dégager des fonds pour des activités traditionnelles de jumelage
ou d’envisager d’intégrer des réseaux internationaux.
4.1.2. Manque
de pouvoirs et d’initiatives
25. L’une des difficultés auxquelles
les villes peuvent se heurter pour conserver leur caractère international est
le fait qu’elles ne disposent pas de pouvoirs pour prendre des décisions
et mener des actions de façon indépendante. Dans de nombreux pays,
c’est le gouvernement national qui définit le rôle des autorités
locales et répartit les ressources financières depuis le niveau
central, laissant ainsi peu de marge de manœuvre aux villes, même
à celles qui le souhaiteraient.
4.1.3. Dépendance
et obsolescence
26. Même dans les contextes où
des jumelages indépendants, financés par des initiatives locales,
ont été instaurés au fil des ans, ils suscitent moins d’enthousiasme
qu’auparavant. En effet, toute la génération des personnes qui avaient
rejoint de telles associations dans leur jeunesse a pris de l’âge;
ces membres ne participent plus aussi activement et, souvent, ne
sont pas remplacés.
4.1.4. Manque
d’accès et de continuité
27. En outre, s’agissant des réseaux
et projets multi-villes, bon nombre reposent désormais sur des sources uniques
de financement, telles que des subventions de la Commission européenne
limitées dans le temps, par exemple, et ne sont pas suffisamment
capables de s’adapter lorsqu’elles cessent de bénéficier de ces
aides.
28. L’une des contributions à l’enquête qui a été menée émanait
de l’Agenda 21 de la culture (A21C) (campagne de l’organisation
CGLU sur la culture et la durabilité dans une perspective mondiale);
elle reflète le défi que l’Europe doit aujourd’hui relever. Tout
en notant que la collaboration active entre des villes d’Asie et
d’Amérique latine fonctionne bien désormais, la réponse a fait observer
que de nombreuses villes européennes semblent davantage préoccupées
par leur autopromotion et leur image, par la recherche de financements
et les avantages compétitifs à court terme. D’où leur mise en garde:
si, pour sortir de ses préoccupations actuelles, l’Europe empruntait
la voie de l’austérité et de la xénophobie, elle pourrait alors s’étonner
de voir que d’autres parties du monde ont progressé vers des modèles
collaboratifs plus évolués

. Pour combler ce
qui est perçu comme un déficit, A21C indique vouloir associer beaucoup
plus de villes européennes que par le passé dans ses activités futures,
comme l’examen par les pairs et les programmes conjoints de renforcement
des capacités.
29. Cela étant, à la question invitant les personnes interrogées
à donner un exemple de bonnes pratiques de collaboration entre villes
dans le contexte européen, A21C recommande incontestablement l’initiative
Cités interculturelles du Conseil de l’Europe (voir ci-après le
paragraphe 36). De fait, A21C se propose de redéfinir sa propre
stratégie pour les dix prochaines années en s’inspirant de la structure
et de la méthodologie des Cités interculturelles

.
30. Malgré les problèmes décrits ci-dessus, de nouveaux modèles
de coopération internationale entre les villes sont déjà en train
d’être créés et mis en œuvre. Sont énoncés ci-dessous certains des
principaux avantages de la coopération entre les villes, illustrés
par certains exemples de bonnes pratiques.
4.2. Les
avantages de la coopération entre les villes
31. Si les pouvoirs locaux peuvent
renforcer l’identité locale et instaurer les conditions nécessaires
à la coopération internationale, ils ne peuvent – ni ne doivent
– monopoliser le domaine. Leur rôle consiste à créer un espace au
sein duquel de nombreux groupes et services d’intérêt public, la
société civile et le secteur privé peuvent prendre des initiatives
dignes d’intérêt.
32. Les motivations et mécanismes favorisant de telles relations
sont divers, mais il reste un rôle important à jouer pour des organisations
nationales et supranationales telles que le Conseil de l’Europe
lui-même. D’autres avantages décrits ci-dessous sont toujours liés
au leadership des municipalités, mais nombre des plus dynamiques
découlent des initiatives «qui partent de la base».
4.2.1. Création
d’une identité culturelle européenne
33. Après la seconde guerre mondiale,
le mouvement de jumelage a fourni une identité consensuelle et démocratique
aux Etats qui s’étaient affrontés en Europe occidentale. Ensuite,
en 1989, à l’issue de la guerre froide, il a été possible de redéfinir
cette identité. Là encore, des partenariats et réseaux entre les
villes ont été activement établis. Mais plus de vingt-cinq ans se
sont écoulés depuis, et il est aujourd’hui nécessaire de donner
un nouvel élan à cet objectif, et de l’adapter au monde actuel.
Les deux exemples ci-dessous illustrent ces initiatives.
34. CORNERS est une plate-forme d’artistes interculturelle. Lancé
en 2010 par six institutions culturelles – Europe-Intercult (Stockholm),
Exodos (Ljubljana), POGON (Zagreb), Drugo More (Rijeka), City Culture Institute
(Gdansk) et Umeå 2014-Capitale européenne de la culture –, CORNERS
a noué des partenariats avec d’autres établissements, en Bulgarie,
en Espagne, en Géorgie, en Italie, au Kosovo*

, au Royaume-Uni et
en Serbie. Dans sa première phase, cette plate-forme a envoyé, lors
de vastes expéditions, divers groupes d’artistes en ex-Yougoslavie,
dans le Caucase, en Europe orientale, en Laponie, au Pays basque
et en Irlande du Nord, dans le but d’instaurer des coopérations
transnationales. Bénéficiant désormais d’un financement au titre
du programme «Europe créative» de l’Union européenne, elle transforme
ces relations créatives en projets concrets au niveau local. L’un
d’entre eux consiste par exemple à comparer la définition et les
utilisations de l’espace public en Croatie et au Royaume-Uni; un
autre réunit des artistes suédois, polonais et serbes qui entrent
en contact avec des enfants rencontrés dans différents «coins» de
Slovénie

.
35. Pendant des décennies, la région frontalière entre Russie,
Norvège et Finlande en Extrême-Arctique est restée un lieu troublé
et enclavé. Après de terribles destructions pendant la seconde guerre
mondiale, elle a été fermée et placée sous haute sécurité en tant
que frontière entre l’URSS et les pays de l’OTAN. Du fait de leur
situation très au nord, les localités de Kirkenes, Mourmansk et
Nikel ont souffert d’un quasi-oubli; elles n’étaient pas même considérées
comme faisant partie de l’Europe. Aujourd’hui, on reconnaît enfin
une communauté d’intérêts le long de la mer de Barents, autour des
terres ancestrales du peuple same, mais aussi de la gestion future
des riches ressources économiques terrestres et maritimes et du
changement climatique. Cependant, même si la frontière politique
est devenue plus facile à traverser, il reste difficile de créer
des espaces d’échanges entre Norvégiens et Russes. Les arts ont
fourni un vecteur très fructueux, en particulier via le festival
annuel Barents Spektakel, organisé par l’organisation plurilingue
et interculturelle
Pikene på Broen (Les
Filles sur le pont). Interventions d’artistes auprès d’enfants,
public se déplaçant pour assister à diverses coproductions des deux
côtés de la frontière, commandes d’œuvres depuis tout le continent:
les habitants de la région ont maintenant des raisons concrètes
de se sentir pleinement Européens

.
4.2.2. Promotion
de l’appréciation de la diversité et du vivre ensemble
36. Si les villes européennes font
participer leurs citoyens, alors à l’évidence elles renforcent aussi
la démocratie et la stabilité européennes. Les exemples suivants
montrent comment les acteurs internationaux et locaux peuvent collaborer
pour soutenir ce processus:
37. Le réseau des Cités interculturelles a été créé en 2008 par
le Conseil de l’Europe en réponse au Livre blanc sur le dialogue
interculturel et à la faveur de l’Année européenne du dialogue interculturel.
Ses concepteurs soulignent que les villes étaient l’échelon majeur
où serait négocié (pour le meilleur ou pour le pire) le futur d’une
Europe multiethnique. Pour combattre la rhétorique xénophobe, le
réseau s’appuie sur un concept, «La diversité est un atout», selon
lequel diversité et échange sont à envisager comme une opportunité et
une innovation. Il donne aux villes la capacité d’agir pour concevoir
les politiques et les pratiques qui produiront ces ressources et
faciliter la coopération entre les responsables politiques, les
agents publics, la société civile, les entreprises et les médias
dans plus de 60 villes européennes. L’Index des Cités interculturelles
permet aux villes d’analyser leurs pratiques selon un profil en
70 points et de se comparer avec leurs pairs; il leur donne les
moyens de lancer des projets pilotes et de prendre des risques calculés
pour trouver de nouvelles idées. Un organisme supranational fournit
un cadre, tandis que les villes participent activement à la définition
du programme et des priorités, et au partage des coûts.
38. En encourageant les actions collectives entre villes, l’initiative
Cités interculturelles a permis, d’une part, le lancement de plusieurs
projets dérivés et, d’autre part, la transposition, à l’échelle
internationale, de bonnes idées mises en œuvre au niveau local.
Citons, pour la première catégorie, le programme SPARDA (Shaping Perceptions
and Attitudes to Realise Diversity Advantage/Influer sur les perceptions
et les attitudes pour faire de la diversité un avantage), qui vise
à favoriser l’intégration des migrants par l’élaboration de meilleures stratégies
locales de communication. Sept villes partenaires (Coimbra (Portugal),
Had-Dingli (Malte), Limassol (Chypre), Patras (Grèce), Reggio Emilia
(Italie), Lyons (France) et Valence (Espagne)) ont été retenues comme
villes pilotes pour la mise en œuvre de campagnes de communication.
Les résultats ont été encourageants

. Le projet Antirumores, qui relève
de la seconde catégorie, a été conçu pour lutter contre la diffusion
d’informations erronées sur les immigrés à Barcelone. Il a aujourd’hui
été adopté par de nombreuses villes européennes

.
39. La ville de Melitopol, au sud-est de l’Ukraine, a rejoint
le réseau des Cités interculturelles, bien consciente des avantages
potentiels de la diversité. Elle souhaitait premièrement se faire
connaître comme une ville qui est parvenue à maintenir des relations
harmonieuses et sans hostilité entre ses habitants malgré de nombreuses
vagues d’invasions, d’immigration et d’installations; et deuxièmement,
faire de cette promotion un outil pour remédier à la sérieuse dégradation
de son patrimoine et de son environnement entraînée par des années
de difficultés économiques. Au centre de cette stratégie se trouvait
le projet de revitalisation du grand parc de la ville, à l’abandon,
comme «parc interculturel» qui deviendrait à la fois un reflet de
la diversité de la population locale et une destination touristique.
Via le réseau des Cités interculturelles, la ville a lancé une demande
de conseils internationaux, à laquelle a répondu l’Université Fontys
à Tilburg (Pays-Bas), membre du réseau. Celle-ci a réuni une équipe
pluridisciplinaire, dont les membres venaient d’Ukraine, de Norvège,
du Portugal, du Canada, des Pays-Bas et du Royaume-Uni, autour d’un
travail intense et créatif d’évaluation du parc en association avec
les habitants, aboutissant à un plan que Melitopol pourra suivre
dans les années à venir

.
40. Bon nombre de projets de coopération novateurs ont été lancés
dans le cadre de
L’Europe pour les citoyens,
mais une très grande partie d’entre eux se sont étiolés une fois
retombé l’élan donné par l’injection initiale des fonds de l’Union
européenne. Aussi, davantage de projets devraient viser une existence
durable, à plus long terme, afin de se développer et de tirer parti
des liens établis en matière de coopération internationale. Tel
a été le cas du projet «
Cooking Away
Prejudices», notamment, lancé par l’Institut national pour
l’intégration sociale à Vilnius. Des organisations de la société
civile de la Lituanie, de la Lettonie et de l’Estonie se sont associées
au réseau
UNITED for intercultural Action d’Amsterdam
pour mettre au point un modèle efficace de lutte contre la xénophobie
qu’elles ont baptisé «
Travelling Social
Cuisine». Ce projet réunit des jeunes qui participent
ensemble à des ateliers culinaires, sortes de «librairies humaines»
qui proposent d’«emprunter» des personnes d’horizons culturels différents
pour en apprendre davantage sur leur vie et facilitent les discussions.
Il a été considéré qu’il contribuait efficacement à la diminution
du racisme dans les républiques baltes

.
4.2.3. Amélioration
de la gestion et de la protection de la culture et du patrimoine
locaux
41. La culture historique et contemporaine
de l’Europe est exposée à de nombreuses menaces telles que la négligence,
la dégradation de l’environnement, l’aménagement du territoire à
des fins de spéculation et d’exploitation, et le manque de ressources
ou de compétences appropriées en matière de gestion; mais de nombreuses
opportunités se présentent à elle également. Dans le contexte d’austérité
actuel, et au vu des ressources limitées dont on dispose, le gaspillage
ou le double-emploi sont inacceptables. Toutefois, ces phénomènes
sont toujours susceptibles de se produire si les collectivités n’ont
pas la curiosité ou la capacité de tirer les leçons de l’expérience
des autres. La coopération entre les villes est un des moyens les
plus efficaces et efficients de transmettre des connaissances et
des compétences à ceux qui en ont besoin, comme en attestent les
exemples ci-dessous.
42. Conserver l’intégrité du patrimoine bâti d’une ville tout
en le rendant plus accessible est un défi important. Cet objectif
fut celui du projet de coopération entre le département de la Protection
du patrimoine de Varsovie (Pologne) et le Bureau de gestion du patrimoine
de Bergen (Norvège) qui ont échangé leurs expériences et connaissances
sur les moyens de rendre les bâtiments historiques de la ville plus
accessibles aux personnes handicapées sans compromettre leurs caractéristiques
historiques et celles de leurs alentours. Le projet a pris la forme
d’échanges d’experts entre Varsovie et Bergen pour des visites/ateliers.
Il s’est conclu par un séminaire de bilan, à Varsovie, et par la
publication d’un ouvrage bilingue (polonais et anglais)

.
43. La volonté de transposer ces modèles de type «ville à ville»
à une grande échelle a donné naissance au réseau ICCN (
Inter-City Intangible Cultural Co-operation
Network/réseau intercités de coopération culturelle immatérielle)

. Organisation non gouvernementale
(ONG) soutenue par l’UNESCO, ICCN est la seule organisation internationale
composée de pouvoirs locaux et d’organismes culturels dont le but
est de sauvegarder le patrimoine culturel immatériel mondial ainsi
que «la relation indissociable qu’il entretient avec le développement
local durable». De manière appréciable, il affiche aussi son objectif
de «faire la paix culturelle» en s’appuyant sur la compréhension
mutuelle, qui est le résultat du dialogue interculturel. Ce réseau mondial,
qui compte de nombreux membres européens, semble être étonnamment
absent de la majeure partie du nord et de l’est du continent. Son
temps fort consiste en un forum annuel international qui fait expressément appel
à l’enthousiasme des jeunes pour la protection comme pour la création
du patrimoine immatériel.
44. TANDEM est un programme d’échange qui aide les organisations
culturelles à nouer des relations internationales de coopération
sur le long terme. Il soutient le développement des connaissances
en associant des managers culturels travaillant dans différents
pays, ainsi que leurs organisations, dans le cadre d’un programme
annuel de formation et de coopération, qui donne lieu à des projets
conjoints dans leurs villes respectives. Plus largement, il crée
aussi des opportunités de travail en réseau et de recherche de financement avec
des partenaires de projet en Europe et au-delà. Depuis 2011, TANDEM
a rassemblé plus de 200 organisations culturelles indépendantes
et accompagné le développement professionnel de plus de 150 managers
culturels originaires de plus de 80 villes et 25 pays du continent
européen et de son voisinage immédiat. Parmi ses réalisations, on
peut citer la mise en relation de fabricants de textile traditionnel
en milieu rural en République de Moldova avec des stylistes berlinois
de premier plan, et la collaboration d’artistes de Turquie et de
Londres en vue de suivre les parcours et de relater les histoires
de réfugiés syriens en Europe. TANDEM est appuyé par la Fondation
européenne de la culture et MitOst. Son programme actuel consiste
à rapprocher des managers culturels d’Ukraine de leurs pairs au
sein de l’Union européenne

, tandis que son futur programme
d’activités englobera un projet visant à établir des liens entre
les anciennes, les actuelles et les futures villes élues Capitale
européenne de la Culture, et les villes candidates à ce titre.
4.2.4. Renforcement
de la cohésion sociale et de la participation des citoyens
45. L’un des meilleurs garants
du respect des droits de l’homme et des valeurs démocratiques est
la participation active des citoyens, des associations locales et
des entreprises à la vie et aux décisions de leurs communautés.
Paradoxalement, l’un des meilleurs moyens pour dynamiser et développer
une telle initiative locale est de la soumettre à une comparaison
internationale. L’expérience montre que le fait, pour les jeunes et
les groupes de citoyens, d’avoir la possibilité de voyager à l’étranger
pour y rencontrer des personnes attachées aux mêmes valeurs qu’eux
leur permet non seulement de découvrir de nouvelles idées et compétences,
mais aussi d’apprendre beaucoup de choses sur eux-mêmes, qui seraient
restées sous-jacentes ou dont ils n’auraient pas pris conscience
chez eux, comme en attestent les exemples suivants:
46. Des études (citées au paragraphe 20) laissent entendre que
la plupart des activités internationales de coopération menées par
le passé n’ont pas réussi à représenter, aider ou influencer les
communautés ouvrières dans les villes d’Europe. Il existe néanmoins
une organisation qui se consacre spécifiquement à ces questions:
il s’agit de «Banlieues d’Europe», dont le siège est à Lyon (France).
Fondée en 1990, elle compte désormais 118 partenaires internationaux
actifs et 7 500 contacts dans les zones résidentielles urbaines
les plus défavorisées. Le réseau couvre de nombreux sujets, mais
l’art et la culture sont de constants leitmotivs. En 2014, il a
permis aux villes de Belfast, Munich, Turin, Vienne, Cluj-Napoca,
Budapest, Madrid et Lyon de coopérer sur le projet «UrbART», qui
concerne la création d’une plate-forme en ligne répertoriant les
activités culturelles de jeunesse novatrices en Europe. L’un des
objectifs spécifiques de ce projet est de permettre aux participants
de prendre conscience de l’importance de la mobilité et des opportunités
en Europe offertes par le programme Erasmus+. Parallèlement, entre
2013 et 2015, les sept partenaires européens du réseau «7 STEPS»,
situés à Bruxelles, Amsterdam, Londres, Paris, Lyon, Copenhague
et Helsinki, ont mené des activités axées sur des créations chorégraphiques
de danse urbaine

.
47. Les villes de Subotica, au nord de la Serbie, et de Wolverhampton,
au centre de l’Angleterre, nourrissent depuis longtemps des relations
fondées sur le partage d’expériences sur le renforcement de la participation démocratique
dans un environnement pluriethnique. D’étroites relations se sont
nouées entre élus et hauts responsables de chaque municipalité,
initialement sous l’égide du réseau des Agences de la démocratie
locale dans les pays d’ex-Yougoslavie

. L’objectif à long terme était de
créer des liens entre acteurs de la société civile, et les arts
ont servi de vecteur. En particulier, le
Lighthouse
Media Centre de Wolverhampton a produit un documentaire,
destiné à un public serbe et britannique, montrant des artistes
et des musiciens attachés à surmonter les barrières linguistiques
et politiques qui divisent Subotica depuis la guerre civile

.
48. Membre du réseau des Cités interculturelles, l’arrondissement
londonien de Lewisham est aussi pionner dans le domaine de la participation
démocratique des jeunes. Depuis une décennie, il élit chaque année
un Maire des jeunes et un Conseil municipal des jeunes, dotés d’une
influence (avec un budget annuel de 30 000 livres). Le bon fonctionnement
de ce Conseil attire beaucoup de jeunes électeurs et en fait bien
plus qu’un geste symbolique. Ce projet a suscité une vive attention
dans d’autres pays et ces derniers mois, des invitations de villes
du Danemark, de Suède, de Pologne et de Norvège pour partager leurs
idées, élargir leurs horizons et susciter des vocations auprès d’adultes
et de jeunes. L’équipe du Maire des jeunes a aussi organisé des
formations avec Malte, la République tchèque et l’Allemagne. Mais
surtout, Lewisham a noué des liens de longue date avec sa ville
jumelle, Antony, au sud de Paris

.
49. Fondé en 2010, le réseau
Doc Next
Network vise à créer un espace européen dynamique qui
rend plus accessibles les messages médiatiques des jeunes dans le
discours public traditionnel

. Son objectif est de créer une plate-forme
qui donne plus de visibilité aux opinions d’une nouvelle génération
de documentaristes, d’artistes des médias et de jeunes journalistes,
sensibilisant ainsi le public à de nouvelles perspectives européennes.
Ce mouvement unique en son genre offre de nouvelles connexions entre
la culture libre en ligne (remix), l’industrie des médias, des circuits
documentaires, des institutions artistiques, des milieux universitaires
et le cadre européen d’élaboration des politiques. Il repose sur
quatre organisations culturelles indépendantes, qui jouent le rôle
de pivot dans leurs régions respectives:
l’Association
des initiatives créatives «ę» (Varsovie, Pologne), le
British Film Institute (Londres,
Royaume-Uni),
Mode Istanbul (Istanbul,
Turquie) et ZEMOS98 (Séville, Espagne). Depuis 2012, le réseau travaille
en association avec une cinquantaine de jeunes de ces quatre villes,
issus de l’immigration et créateurs dans le domaine des médias,
le réseau, qui redessine l’image des migrants dans différents pays
européens, a inspiré de nombreux autres projets, comme la performance
itinérante de cinéma vivant «
European
Souvenirs»
.
4.2.5. Attirer
l’investissement socio-économique au niveau local
50. De plus en plus, l’on prend
conscience que la mise en œuvre de stratégies durables en matière
de patrimoine et de tourisme culturel, ainsi que la promotion et
le développement d’entreprises créatives, permettent aux collectivités
locales d’obtenir des revenus, d’investir, de créer des emplois
et profils, et de les conserver malgré la mondialisation. Pour réaliser
les économies d’échelle ou atteindre le niveau évolutif de spécialisation
nécessaires dans ces nouvelles économies, de nombreuses villes voient
désormais un avantage à établir ou rétablir les liens avec d’autres
villes, comme le montrent les exemples ci-dessous.
51. Certains mécanismes de mise en concurrence, tels que le concours
de la Capitale européenne de la Culture, permettent désormais à
bon nombre de villes d’améliorer leur image et d’intégrer de nouveaux réseaux
et relations de dimension internationale. L’expérience montre que
la capacité à tirer bénéfice sur le long terme de ces opportunités
de courte durée est assez variable, mais de nombreuses villes ont
fait preuve d’une réelle détermination à établir des relations solides
et durables. La ville de Lille, qui s’est efforcée de capitaliser
sur son statut de Capitale européenne de la culture 2004 par le
biais de l’initiative Lille3000, se distingue tout particulièrement
à cet égard. Ainsi, en 2009, dans le cadre du projet «Europe XXL»,
elle a organisé tout au long de l’année une série de festivals portant
sur les villes et cultures d’Istanbul, Berlin, Riga, Tallinn, Vilnius,
Budapest, Bucarest, Varsovie, Ljubljana, Belgrade, Zagreb, Sarajevo
et Moscou. La plupart des collaborations ainsi mises en place ces
dix dernières années s’inscrivaient dans des initiatives visant
à réanimer l’économie et la structure physique de la conurbation.
Par exemple, en 2012, la ville a organisé l’exposition Futurotextiles
à l’occasion de l’ouverture du Centre Européen des Textiles Innovants
dans la nouvelle zone industrielle de Tourcoing, l’Union. Lille-Métropole
a également été élue Présidente de la Commission Culture de CGLU,
ce qui montre qu’elle a des intérêts d’envergure mondiale, pas seulement européenne.
52. Au point de rencontre entre la Styrie (Autriche), l’est de
la Slovénie et le sud-ouest de la Hongrie, 24 municipalités des
trois régions ont signé un accord de communication et de coopération.
Le projet «24 villes» vise à expérimenter de nouvelles façons de
promouvoir les municipalités et de rendre toute la région plus attractive
pour le tourisme, en développant des programmes culturels et commerciaux
communs. Il s'est traduit tout récemment par l'élaboration en commun
d'une technologie et d'une stratégie publicitaire pour créer un
système téléchargeable de visite par audio-guide, disponible dans
les 24 villes participantes

.
53. La ville écossaise de Dundee et celle de Zadar sur la côte
dalmate en Croatie sont jumelées depuis 1959, et en février 2014,
le Conseil de l’Europe a invité un petit groupe de responsables
de la société civile et de chefs d’entreprise de Dundee à se rendre
à Zadar. Dundee était représentée par son Lord Provost, qui s’est entretenu
avec le Président de la Chambre de Commerce du comté de Zadar. Leurs
discussions ont fait apparaître que Zadar avait un secteur du tourisme
florissant, une importante activité portuaire, un vaste arrière-pays
agricole et un potentiel considérable pour des activités de loisir,
y compris des terrains sur lesquels il est prévu de construire des
parcours de golf, et que la ville de Dundee exerçait des activités
commerciales dans les mêmes domaines et partageait les mêmes intérêts
culturels. Aussi de nouvelles alliances devraient voir le jour.
Il s’agit là d’un bon exemple de la manière dont des villes liées
depuis très longtemps peuvent mettre à jour et recentrer leur relation
afin de l’adapter au contexte européen actuel.
5. Conclusions
54. Au XXIe siècle,
en raison de l’accélération de l’urbanisation, les villes ont, à
l’échelon individuel comme à l’échelle mondiale, une incidence plus
grande que jamais auparavant. Si la coopération internationale entre villes
a toujours été une facette naturelle de la civilisation humaine,
elle n’a jamais été aussi importante ou nécessaire que maintenant.
A l’origine de nombreuses innovations importantes dans les domaines
culturel, social et technologique, elle est aussi un garant essentiel
de la paix et de la réconciliation.
55. Le patrimoine culturel et l’innovation ont toujours été un
motif et un moteur pour la coopération internationale entre les
villes. La culture nous offre des moyens uniques de trouver le compromis
complexe nécessaire à la formation des identités locales, mondiales
et multiethniques, et ce, non pas en fragilisant, mais en renforçant
la démocratie et le capital social.
56. Dans le contexte actuel d’austérité et d’euroscepticisme grandissant,
dont témoignent les récentes élections européennes, la coopération
intercités offre une opportunité plus proche des citoyens. En développant
les activités de coopération et différentes formes d’échange entre
les villes européennes (en particulier par le biais des arts, du
patrimoine culturel, des industries créatives et du dialogue interculturel), nous
créons des connexions et des partenariats créatifs d’un nouveau
genre – associant non seulement les pouvoirs locaux et les partenaires
institutionnels, mais aussi le secteur privé, les associations,
les acteurs culturels et les citoyens en direct –, qui peuvent aider
à réveiller l’enthousiasme et à rétablir la confiance en l’Europe.
57. Ces avantages ne sauraient cependant être considérés comme
acquis, et, à plusieurs niveaux, une action concertée est nécessaire
pour les réaliser.
58. Avec l’aide du Conseil de l’Europe, il convient de soutenir
les instances tant nationales que locales dans ce domaine. L’Organisation
y contribue déjà largement, notamment via son Congrès des pouvoirs
locaux et régionaux, son Centre d’expertise sur la réforme de l’administration
locale, son soutien à la Convention-cadre sur la valeur du patrimoine
culturel pour la société, et sa coordination des Itinéraires culturels
européens et de son réseau de plus en plus large des Cités interculturelles.
59. A l’échelon des métropoles, il est nécessaire de donner un
nouveau souffle aux relations bilatérales et multilatérales établies
de longue date et de constituer de nouveaux réseaux. Les instances
nationales et supranationales jouent un rôle important, car elles
soutiennent les villes en leur déléguant davantage de pouvoirs et
d’initiatives ou en les aidant à définir de nouveaux mécanismes
et de nouveaux réseaux.
60. Les pouvoirs locaux occupent une place stratégique pour maintenir
et développer les relations internationales entre villes, mais au
vu de la conjoncture, ils devraient améliorer leurs performances.
Aussi doivent-ils étendre leur rayon d’action au-delà de paramètres
économétriques trop étroits et ne pas se limiter aux élites cultivées,
mais élargir l’éventail de participation. Il leur faut également
faire preuve de courage politique et de leadership pour résister
au scepticisme à l’égard de l’internationalisme qui se manifeste
dans de larges pans des médias et de l’échiquier politique.
61. Mais si les municipalités jouent toujours un rôle essentiel
dans ce processus, c’est peut-être la société civile qui imprime
à la coopération locale et internationale un élan maximal et toujours
renouvelé, notamment avec l’émergence, aux quatre coins de l’Europe,
d’une «Génération Millenium», qui, avec beaucoup d’aisance, transcende
les frontières et les identités. Pour les villes et les institutions
culturelles, le défi à relever est d’être suffisamment souple et
ouvert pour laisser s’exprimer ces forces informelles et dynamiques
aux côtés de structures politiques, administratives et économiques
plus formalisées.