1. Le dialogue ne peut qu’être bénéfique pour la société
et devrait être encouragé, en particulier le dialogue entre différentes
expériences culturelles. Comme le fait remarquer à juste titre Mme
Brasseur, le Conseil de l’Europe traite de cette question dans son
«Livre blanc sur le dialogue interculturel» de 2008.
2. Compte tenu du caractère multiculturel de l’Europe, le dialogue
interculturel est essentiel à la cohésion sociale. Bien qu’ils n’aient
pas le même héritage historique et culturel, les peuples d’Europe
sont unis par des valeurs universelles communes: la démocratie,
la primauté du droit et le respect des droits de l’homme, notamment
le respect de la diversité culturelle.
3. La religion est une dimension de la culture à laquelle beaucoup
accordent une grande importance, ce qui influence leur façon d’appréhender
les réalités de ce monde. La religion a joué un rôle majeur dans
l’histoire de l’Europe, notamment dans la création d’un système
de valeurs communes. Le caractère laïc de l’Europe d’aujourd’hui
ne va pas dans le sens de l’élimination du rôle public des religions
en tant que vecteurs de valeurs.
4. Nous devons saluer les efforts déployés par plusieurs chefs
religieux pour promouvoir la paix, la tolérance et la compréhension
mutuelle, et pour éliminer la haine au sein des peuples de différentes
religions et cultures. Citons l’exemple de l’initiative Vlatadon
du Patriarcat œcuménique de l’Eglise orthodoxe, qui a rassemblé
des hauts représentants de différentes religions de la région des
Balkans en 2001 en vue de favoriser la tolérance entre les différentes
religions; la Journée mondiale de la prière pour la paix à Assise (initiative
de l’Eglise catholique sous le pontificat du pape Jean-Paul II)
réunissant des représentants de différentes religions; la lettre
ouverte aux chrétiens de 2007 signée par 138 dignitaires de l’islam;
le Dialogue théologique entre l’Eglise orthodoxe et l’Eglise catholique
et l’adoption du document conjoint de Ravenne.
5. Dans sa
Recommandation
1804 (2007) «Etat, religion, laïcité et droits de l’homme»,
l’Assemblée recommandait au Comité des Ministres de recenser et
de diffuser des exemples de bonnes pratiques en matière de dialogue
avec des responsables des communautés religieuses. Pour le rapporteur,
un exemple en la matière est celui de la participation active de
hauts représentants de l’Eglise orthodoxe bulgare au sauvetage de
l’ensemble de la communauté juive de Bulgarie en 1943, durant l’Holocauste.
6. Dans cette même recommandation, l’Assemblée réaffirme «qu’une
des valeurs communes en Europe, qui transcende les différences nationales,
est la séparation de l’Eglise et de l’Etat». C’est un principe généralement
admis qui domine la vie politique et institutionnelle dans les pays
démocratiques. Ainsi, dans sa
Recommandation
1720 (2005) sur l’éducation et la religion, l’Assemblée
notait que «la religion de chacun, y inclus l’option de ne pas avoir
de religion, relève du domaine strictement privé».
7. Il n’existe pas de disposition unique en Europe pour les relations
entre les Etats et les communautés religieuses. Dans les Etats membres
du Conseil de l’Europe, on rencontre différents dispositifs: le
modèle prévoyant une séparation claire entre l’Etat et les religions,
celui de «l’Eglise d’Etat», celui du «concordat» entre l’Eglise
et l’Etat et celui de «l’Eglise prédominante». Tous ces modèles
sont compatibles avec l’article 9 de la Convention européenne des
droits de l’homme. Dans certains Etats membres, aucune disposition particulière
ne s’applique à ces relations.
8. L’Assemblée reconnaît l’importance du dialogue interculturel
et sa dimension religieuse, et se déclare «prête à participer à
l’élaboration d’une stratégie globale du Conseil de l’Europe en
la matière». Elle estime cependant que, «dans le respect du principe
de séparation de l’Eglise et de l’Etat, le dialogue interreligieux
ou interconfessionnel n’est pas du ressort des Etats ou du Conseil
de l’Europe».
9. Les religions, au même titre que les autres parties prenantes,
sont en droit d’exprimer leurs points de vue sur la société. Des
douzaines d’organisations religieuses et non religieuses sont déjà
représentées au Conseil de l’Europe, en vertu du statut participatif
des organisations non gouvernementales.
10. Comme l’a maintes fois affirmé l’Assemblée, la liberté d’expression
est l’un des droits de l’homme les plus importants. Le projet de
recommandation présenté par la commission de la culture, de la science
et de l’éducation indique dans son paragraphe 4 que «la liberté
de religion ainsi que la liberté d’avoir une vision philosophique
ou laïque du monde sont indissociables de l’acceptation sans réserve,
de la part de tous, des valeurs fondamentales inscrites dans la
Convention». Au paragraphe 10, l’Assemblée rappelle «la nécessité de
sauvegarder les droits des personnes ayant des convictions humanistes
qui adhèrent à ces mêmes valeurs fondamentales». Dans la mesure
où la protection des droits de chacun ne peut être subordonnée à l’acceptation
ou à l’adhésion aux valeurs, je propose – dans un souci de clarté
et pour éviter toute équivoque – une légère reformulation de certains
passages.
11. Le même paragraphe 10 fait référence aux «personnes ayant
des convictions humanistes». Cela pouvant paraître restrictif, je
propose de remplacer cette expression par «personnes non croyantes».
Pour la même raison, il serait judicieux de remplacer, à l’alinéa
17.1, «principales organisations humanistes» par «représentants
des associations non religieuses pertinentes».
12. Toujours au paragraphe 10, il est fait référence à l’obligation
qu’ont les Etats de «veiller à (…) éviter qu’un soutien privilégié
accordé à certaines religions ne devienne, dans les faits, disproportionné
et discriminatoire». Pour éviter toute équivoque et par souci de
clarté, il serait préférable de supprimer le qualificatif «discriminatoire».