1. Introduction et dispositions réglementaires
pertinentes
1. Lors de la séance d’ouverture
de l’Assemblée parlementaire le 23 janvier 2017, Mme Elena
Centemero (Italie, PPE/DC) et plusieurs membres de l’Assemblée ont
contesté les pouvoirs non encore ratifiés de la délégation nationale
slovaque auprès de l’Assemblée parlementaire pour des raisons formelles,
conformément à l’article 7.1.b du
Règlement, au motif que ladite délégation ne comportait aucune femme
en qualité de représentante, en méconnaissance de l’article 6.2.a.
2. La
Résolution 1781
(2010) «30 % au moins de représentants de chaque sexe au sein
des délégations nationales de l’Assemblée» a modifié les articles
6.2.
a et 7.1.
b du Règlement, et a fixé de nouvelles
conditions relatives à la représentation des sexes, en renforçant
les dispositions existantes visant à promouvoir une participation
plus équilibrée des femmes et des hommes.
3. L’article 6.2.
a, deuxième
phrase, dispose que:
«Les délégations nationales doivent comprendre
un pourcentage de membres du sexe sous-représenté au moins égal
à celui que compte actuellement leur parlement et, au minimum, un
membre du sexe sous-représenté désigné en qualité de représentant».
4. L'absence de l'inclusion d'au moins un membre du sexe sous-représenté
en qualité de représentant dans une délégation nationale est expressément
reconnue par l'article 7.1.
b du
Règlement comme un motif qui justifie la contestation des pouvoirs
de cette délégation:
«Les pouvoirs peuvent être contestés par au
moins dix membres de l’Assemblée présents dans la salle des séances,
appartenant à cinq délégations nationales au moins, se fondant sur
des raisons formelles basées sur (...) les principes énoncés dans
l’article 6.2 selon lesquels les délégations parlementaires nationales
doivent être composées de façon à assurer une représentation équitable
des partis ou groupes politiques existants dans leurs parlements
et comprendre, en tout état de cause, un membre du sexe sous-représenté
désigné en qualité de représentant.»
5. La commission du Règlement, des immunités et des affaires
institutionnelles doit donc examiner si la composition de la délégation
slovaque a méconnu les principes établis par l’article 6.2.a du Règlement de l’Assemblée.
6. Enfin, aux termes de l’article 7.2, «[s]i la commission conclut
à la ratification des pouvoirs, elle peut transmettre au Président
de l’Assemblée un simple avis dont il donnera lecture en Assemblée
plénière ou en Commission permanente, sans que celles-ci en débattent.
Si la commission conclut à la non-ratification des pouvoirs ou à
leur ratification assortie de la privation ou de la suspension de
certains des droits de participation ou de représentation, le rapport
de la commission est inscrit à l’ordre du jour pour débat dans les
délais prescrits».
2. Conformité
de la composition de la délégation parlementaire de la République
slovaque avec l’article 6.2 du Règlement de l’Assemblée
7. Le parlement slovaque – le
Conseil national de la République slovaque – a présenté les pouvoirs
de sa délégation pour la session 2017 de l’Assemblée. Il ressort
de ces pouvoirs que la délégation slovaque ne comporte aucune femme
en qualité de représentante.
2.1. Pouvoirs
des membres de la délégation slovaque transmis le 13 janvier 2017
8. La délégation parlementaire
slovaque se compose, en application des articles 25 et 26 du Statut
du Conseil de l'Europe (STE no 1), de
cinq représentants et cinq suppléants. Le rapport du Président de l’Assemblée
sur la vérification des pouvoirs des représentants et des suppléants
pour la première partie de la session ordinaire de 2017 de l'Assemblée
(
Doc. 14236) mentionne que la composition de la délégation parlementaire
slovaque s’établit de la manière suivante:
Représentants
Mr Peter KRESÁK (MOST – HÍD)
Mr Róbert MADEJ (Social Democracy (SMER))
Mr Ján MAROSZ (Ordinary People and Independent Personalities
(OLANO))
M. Jaroslav PAŠKA (Slovak National Party (SNS))
Mr Martin POLIAČIK (Freedom and Solidarity (SaS))
Suppléants
Mr Tibor BERNAŤÁK (Slovak National Party (SNS))
M. Pavol GOGA (Social Democracy (SMER))
Ms Renáta KAŠČÁKOVÁ (Freedom and Solidarity (SaS))
Mme Veronika REMIŠOVÁ (Ordinary
People and Independent Personalities (OLANO))
Mr Péter VÖRÖS (MOST – HÍD)
9. Les pouvoirs de la délégation
slovaque ont été transmis par courrier adressé au Président de l’Assemblée,
daté du 11 janvier 2017. Ce courrier mentionne la décision du Conseil
national de la République slovaque du 11 octobre 2016 (
Résolution n° 247), désignant M. Marosz en remplacement de Mme Verešová, représentante,
et celle du 23 novembre 2016 (
Résolution
n° 333) désignant M. Madej comme représentant et président
de la délégation, en remplacement de Mme Nachtmannová,
nommée secrétaire d’Etat à l’éducation, la science, la recherche
et au sport
.
Après réception de ces pouvoirs, le Service de la Séance de l’Assemblée parlementaire
s’est mis en relation avec le secrétariat de la délégation. Il a
été indiqué au secrétariat de l’Assemblée, par courrier électronique
que, le Conseil national n’étant pas en session, il n’était plus
possible d’opérer une modification de la délégation en temps utile
avant la partie de session de l’Assemblée. Toutefois, le Service
de la Séance a reçu copie d’un courrier adressé le 18 janvier 2017
par Mme Natalia Blahova, présidente du
groupe parlementaire du parti
Sloboda
a Solidarita (SaS) / Freedom and Solidarity, au Président du
Conseil national, M. Andrej Danko, annonçant l’intention du groupe
de proposer de désigner Mme Renáta Kaščáková,
suppléante dans la délégation transmise à l’Assemblée, en qualité
de représentante, et M. Martin Poliačik, représentant dans la délégation
transmise, en qualité de suppléant. L’assurance a été donnée que
ce changement dans la composition de la délégation sera mis à l’ordre
du jour de la session du Conseil national qui débute le 31 janvier
2017.
10. Rappelons que la mention des dispositions réglementaires de
l’article 6 figure expressément dans le courrier adressé chaque
année par le Secrétaire général de l’Assemblée parlementaire aux
présidents des parlements des Etats membres au début du mois précédant
l’ouverture de la nouvelle session, afin que ceux-ci en tiennent
compte dans la désignation de leurs délégations.
2.2. Evaluation
11. La contestation des pouvoirs
de la délégation slovaque se fonde sur une méconnaissance de la disposition
concernant la désignation, en qualité de représentant, au sein d’une
délégation d’au minimum un membre du sexe sous-représenté (l’article
6.2.
a du Règlement). Au vu
de la composition de la délégation figurant ci-dessus, ainsi que
du tableau de la représentation des hommes et des femmes au sein
du Parlement slovaque
et
au sein de la délégation parlementaire, il apparaît clairement que
les femmes constituent la catégorie du sexe sous-représenté.
12. Conformément à l’article 25 du Statut, les membres (représentants
et suppléants) d’un Etat membre du Conseil de l'Europe auprès de
l’Assemblée sont «élus par [leur] parlement en son sein ou désignés
parmi les membres du parlement selon une procédure fixée par celui-ci».
Le Règlement établit, par ailleurs, les conditions à satisfaire
en matière de composition des délégations ayant trait, notamment,
à la représentation équitable des partis ou groupes politiques ou
à la désignation des membres du sexe sous-représenté.
13. La délégation visée par la contestation des pouvoirs ne remplit
pas, à l’évidence, la condition fixée à l’article 6.2.a d’avoir au sein d’une délégation
nationale au moins un membre du sexe sous-représenté en qualité
de représentant.
14. Il convient de rappeler la position de principe de l’Assemblée
réaffirmée dans sa
Résolution
1585 (2007) relative au principe d’égalité des sexes à l’Assemblée
parlementaire suivant lequel les parlements nationaux doivent s’assurer
que les délégations nationales à l’Assemblée comprennent un pourcentage
de femmes au moins égal à celui que compte leurs parlements nationaux
«en se fixant comme objectif une proportion de 30 % au minimum,
tout en gardant à l’esprit que le seuil devrait être de 40 %».
15. L’Assemblée a déjà eu à connaître d’une contestation des pouvoirs
des délégations de l’Irlande et de Malte, en 2004, au motif que
celles-ci ne comportaient pas au moins une femme parmi leurs membres,
ce qui constituait une obligation réglementaire à l’époque des faits.
L’Assemblée avait alors décidé
de ratifier les pouvoirs des délégations
irlandaise et maltaise en assortissant, toutefois, la ratification
d’une suspension du droit de vote des membres des délégations concernées
à l’Assemblée et dans ses organes jusqu’à ce que les compositions
de ces délégations soient conformes à l’article 6.2.
a du Règlement.
16. Dans l’exposé des motifs figurant dans le rapport, la commission
du Règlement a considéré qu’il était «excessif de déclarer que l’ensemble
de la délégation nationale n’est pas en conformité avec le Règlement et de
refuser l’accréditation des pouvoirs de tous les membres», et que
«l’Assemblée ne peut sélectionner elle-même lequel des sièges alloués
à une délégation parlementaire nationale n’est pas correctement
pourvu et ne peut arbitrairement déclarer que les pouvoirs de tel
ou tel membre de la délégation concernée ne sont pas ratifiés».
17. Un second précédent est intervenu en janvier 2011, lorsque,
à l’ouverture de la session de l’Assemblée de 2011, l’Assemblée
avait examiné une contestation, pour des raisons formelles, des
pouvoirs non encore ratifiés des délégations parlementaires du Monténégro,
de Saint-Marin et de la Serbie, reposant sur le même motif, à savoir
qu’elles ne comprenaient aucune femme en qualité de représentante.
L’Assemblée avait alors adopté la
Résolution 1789 (2011), sur la base d’un rapport de la commission du Règlement,
par laquelle elle décidait de ratifier les pouvoirs des délégations
parlementaires concernées mais de suspendre leurs membres de leur
droit de vote à l’Assemblée et dans ses organes à compter du début
de la partie de session suivante et jusqu’à ce que la composition
de ces délégations soit conforme au Règlement.
18. La commission du Règlement avait alors relevé, dans son rapport
, que, «pour des parlements de petite taille,
il peut être difficile de composer des délégations parlementaires
qui respectent tous les critères fixés par la Règlement – représentation
équitable des partis ou groupes politiques, et représentation des
sexes. (…) La commission admet également que les procédures dans
certains parlements ne leur permettent pas de modifier la composition
de leurs délégations parlementaires aisément, dès lors que ces procédures
prévoient la désignation des délégations pour la durée d’une législature,
la consultation ou la décision des groupes politiques, ou la nécessaire
ratification de la composition en séance plénière».
19. En juin 2013, l’Assemblée a examiné la contestation des pouvoirs
de la délégation parlementaire islandaise, qui ne comprenait aucune
femme en qualité de représentante. Dans sa
Résolution 1944 (2013), l’Assemblée décidait de maintenir la même position
que celle qui avait prévalu en 2011, en ratifiant les pouvoirs de
la délégation islandaise sous la réserve d’une suspension du droit
de vote de ses membres à compter du début de la partie de session
suivante si la composition de la délégation n’était pas mise en
conformité avec le Règlement
.
3. Conclusions
20. La commission du Règlement,
des immunités et des affaires institutionnelles considère que les
pouvoirs de la délégation parlementaire slovaque ont été valablement
contestés au motif que la délégation ne comportait pas au moins
une femme en qualité de représentante et ce, en méconnaissance de
l’article 6.2.a du Règlement.
21. Lors de sa réunion du 24 janvier 2017, la commission du Règlement
a entendu les observations de M. Madej, président de la délégation
slovaque.
22. La commission du Règlement a considéré que, dans le cas dont
elle est saisie, il convenait d’adopter à l’égard de la délégation
slovaque la même position que celle qui a prévalu en 2011 et en
2013, en se référant à la
Résolution
1789 (2011).
23. En conséquence, conformément à l’article 10.1 du Règlement
,
et compte tenu des assurances fournies par le parlement slovaque,
la commission a décidé de proposer à l’Assemblée de ratifier les
pouvoirs de la délégation parlementaire, mais de prévoir la suspension
automatique du droit de vote de ses membres à l’Assemblée et dans
ses organes, conformément à l’article 10.1.
c du
Règlement, à compter de la partie de session d’avril 2017 si la
composition de la délégation n’a pas été mis en conformité avec
l’article 6.2.
a du Règlement
à cette date et de nouveaux pouvoirs présentés, s’agissant de la
désignation d’au moins une femme en qualité de représentante, et
jusqu’à ce qu’elle le soit.
Remarques additionnelles
24. L’obligation qui incombe aux
délégations d’inclure au moins un membre du sexe sous-représenté
en qualité de représentant pourrait ne pas être respectée par une
délégation, sans pour autant que celle-ci encoure une contestation
de ses pouvoirs: en effet, il arrive que des parlements s’affranchissent, temporairement,
de cette obligation lorsqu’elles ne procèdent pas à la nomination
de l’intégralité de leur délégation, de sorte que les sièges de
représentants soient pourvus uniquement par des hommes. Tel est
le cas à la suite d’élections législatives, lorsqu’un parlement
présente les pouvoirs temporaires d’une délégation composée provisoirement
des seuls membres réélus de la précédente délégation. La commission
du Règlement devrait considérer que ces circonstances ne sauraient
valoir renonciation à l’article 6.2 et aux principes qu’il consacre,
et qu’une contestation de pouvoirs dans un tel contexte serait valablement
fondée.