1. Introduction
1.1. Procédure
1. Le 27 novembre 2015, le Bureau
de l'Assemblée parlementaire a renvoyé la proposition de résolution «25 ans
de CPT: progrès accomplis et améliorations à apporter» à la commission
des questions juridiques et des droits de l'homme pour rapport.
Lors de sa réunion du 26 janvier 2016, la commission m'a nommé rapporteur.
Le 13 octobre 2016, la commission a tenu une audition avec la participation
de M. Lətif H. Hüseynov, ancien Président du Comité européen pour
la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains
ou dégradants (CPT), et de M. Trevor Stevens, ancien Secrétaire
exécutif du CPT. Elle a ensuite procédé à un échange de vues avec
le Président du CPT, M. Mykola Gnatovskyy, le 13 décembre 2016.
1.2. Les
enjeux
2. L'interdiction de la torture
et des traitements inhumains et dégradants (article 3 de la Convention européenne
des droits de l'homme (STE no 5, «la
Convention») est un droit fondamental, intangible, d’une importance
primordiale. Depuis 25 ans, le Comité européen pour la prévention
de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants
(CPT) fait un travail remarquable pour évaluer comment sont traitées
les personnes privées de liberté. Dans sa
Résolution 1808 (2011) «Renforcer les mécanismes de prévention de la torture
en Europe», l’Assemblée a estimé que le CPT était l’un des succès
les plus importants du Conseil de l'Europe.
3. Plus de 25 ans après le début des activités du CPT, il est
important de dresser le bilan de son action et de proposer, si besoin
est, des améliorations à apporter afin que les États membres respectent
les obligations auxquelles ils ont souscrit en ratifiant la Convention
européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements
inhumains ou dégradants (STE no 126,
«la Convention CPT») afin que la justice ne s’arrête pas aux portes
des prisons.
1.3. Travaux
antérieurs de l’Assemblée
4. L’Assemblée apprécie au plus
haut point les travaux du CPT et a maintes fois souligné qu’elle
leur accordait une très grande importance. Elle a constamment souligné
la nécessité de préserver l’efficacité et la crédibilité du CPT.
À cette fin, beaucoup de travaux et un certain nombre de propositions
d’amélioration ont été présentés par l’Assemblée au cours des 20
dernières années.
5. Dès 1997, l’Assemblée demandait le renforcement du CPT dans
sa
Recommandation 1323
(1997) sur le renforcement du mécanisme de la Convention européenne
pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains
ou dégradants. À cette époque, l’Assemblée était préoccupée par
la nécessité d’augmenter les ressources humaines et budgétaires
du CPT pour tenir compte de la ratification de la Convention CPT
par un nombre croissant d’États d’Europe centrale et d’Europe de
l’Est qui avaient récemment adhéré, ou étaient sur le point d’adhérer,
au Conseil de l’Europe. Dans le même temps, l’Assemblée faisait déjà
remarquer qu’il était nécessaire d’améliorer la procédure d’élection
des membres du CPT pour assurer une composition plus équilibrée
en ce qui concerne les critères de formation professionnelle, de
sexe et d’âge. Dans sa
Directive
530 (1997), l’Assemblée a donc décidé d’«accorder une attention
particulière aux critères de la formation professionnelle, du sexe
et de l’âge, afin d’assurer une composition plus équilibrée du CPT
et, notamment, une plus grande participation de spécialistes des
questions pénitentiaires et de médecine légale, ainsi qu’un nombre
accru de femmes parmi ses membres».
6. Dans sa
Résolution
1248 (2001) «Comité européen pour la prévention de la torture (CPT):
composition du Comité», l’Assemblée était préoccupée par le fait
que la composition du CPT n’était pas équilibrée «ni quant à la
présence suffisante des femmes, ni quant à la représentation des
différentes formations professionnelles requises de ses membres».
Cette résolution était une première étape sur la voie du renforcement
du rôle de l’Assemblée dans la procédure de sélection des membres
du CPT.
7. Ensuite, l’Assemblée a adopté la
Résolution 1540 (2007) sur l’amélioration des procédures de sélection des membres
du CPT, soulignant que le maintien de l’autorité du comité dépend
«des valeurs morales, des qualifications professionnelles et de
l’investissement personnel de tous ses membres». L’Assemblée a recensé
les moyens d’améliorer la procédure de sélection des membres du
CPT de sorte qu’elle permette de recommander les candidats les mieux
qualifiés au Comité des Ministres, qui, à son tour, élit les membres
du CPT. La plupart des recommandations formulées par l’Assemblée
dans cette résolution, par exemple motiver succinctement ses recommandations,
ou inviter les chefs des délégations nationales aux réunions de
la sous-commission des droits de l’homme chargée d’examiner les
listes des candidats, sont désormais appliquées couramment dans
la pratique. Certaines, cependant, n'ont pas été appliquées jusqu'à
présent, par exemple lorsqu’il s’agit des entretiens au cas par
cas avec les candidats.
8. L'Assemblée a également adopté la
Résolution 1808 (2011) et la
Recommandation
1968 (2011) sur le renforcement des mécanismes de prévention de
la torture en Europe dans lesquelles elle recommandait, entre autres,
de rendre les procédures de sélection des candidats au CPT plus
transparentes et mieux adaptées aux besoins du CPT; appelait les
États Parties à la convention CPT concernés à interpeller leurs
gouvernements par rapport aux déclarations publiques adoptées par
le CPT en vertu de l’article 10 de la convention en cas de manque
de coopération ou de refus d’améliorer la situation à la lumière
des recommandations du comité; et demandait la modification de la
Convention CPT afin de permettre l'élection des membres du comité
par l'Assemblée parlementaire, ainsi que la publication automatique
des rapports du CPT.
1.4. L’évolution
du CPT sur 25 ans: progrès accomplis et améliorations à apporter
9. Dans son dernier rapport sur
le sujet
,
la commission des questions juridiques et des droits de l'homme soulignait
l’importance primordiale de l'interdiction de la torture et des
traitements inhumains ou dégradants (article 3 de la Convention
européenne des droits de l’homme (STE no 5)).
Elle félicitait le CPT pour son action de grande qualité depuis
plus de vingt ans. Cinq ans après, et plus de 25 ans après le début
des travaux du CPT, je pense qu'il est temps de mesurer le chemin
parcouru et de voir ce qui peut être amélioré.
10. Les travaux du CPT sont d’une importance cruciale et ne seront
jamais terminés, quels que soient les progrès qui peuvent être réalisés
concernant l’éradication de la torture et autres peines ou traitements inhumains
ou dégradants. Comme Trevor Stevens, l'ancien Secrétaire exécutif
du CPT, l’a déclaré à juste titre lors d'une audition devant la
commission: «L'interdiction absolue de la torture et des peines
ou traitements inhumains ou dégradants est – et restera – un produit
fragile. Quels que soient les progrès accomplis par le CPT, le comité
n’a pas réussi à éradiquer la torture et d'autres formes de mauvais
traitements délibérés du continent européen; et il est plus que
plus probable que ni le comité ni aucun autre organisme n’atteindra jamais
cet objectif.»
11. Néanmoins, les réalisations du CPT sont immenses
:
- l’incidence de la torture et
d’autres formes de mauvais traitements délibérés a été réduite dans
certains pays où elle était considérée comme un problème important;
- les conclusions du CPT ont permis de prendre des mesures
contre les personnes responsables de mauvais traitements;
- des mesures de protection contre les mauvais traitements
ont été prises ou renforcées à la suite des recommandations du CPT;
- la sélection et la formation du personnel de police, du
personnel carcéral et du personnel soignant ont été améliorées;
- les conclusions du CPT sont largement et régulièrement
invoquées par la Cour européenne des droits de l’homme.
12. Il suffit en effet, pour prouver la pertinence du CPT, d’examiner
la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. A
titre d’exemple, dans son arrêt pilote
Neshkov
et autres c. Bulgarie ,
la Cour fait presque cent références au CPT!
2. Assurer
la meilleure composition possible du CPT
2.1. Membres
du CPT: niveau élevé des qualifications professionnelles
13. Le succès du CPT dépend incontestablement
des compétences professionnelles, de l'expérience et de l'indépendance
de ses membres. Compte tenu de la difficulté de leur tâche, les
membres du CPT doivent posséder non seulement d’importantes qualifications
professionnelles mais aussi d'autres qualités, comme la discrétion,
la loyauté et la capacité à supporter sur le plan physique et émotionnel
des situations très pénibles. Le rapport intitulé «Améliorer les
procédures de sélection des membres du CPT» (
Doc. 11182) de notre ancien collègue M. Erol Aslan Cebeci examinait
les moyens de garantir l’autorité du CPT en veillant à ce que les membres
du CPT fassent preuve d’une valeur morale, de qualifications professionnelles
et d’un investissement personnel exemplaires. Dans le dernier rapport
établi par notre commission, intitulé «Renforcer les mécanismes
de prévention de la torture en Europe» (
Doc.
12551), le rapporteur, notre ancien collègue M. Jean-Charles
Gardetto, complétait le précédent rapport en fournissant une liste
de tâches à accomplir par les membres du CPT ainsi qu’une liste
des compétences et des qualités que l’on attendait d’eux. Les deux listes
sont assez longues et impressionnantes et illustrent la nature très
exigeante du travail à effectuer. Il est de la plus haute importance
que les États membres, les candidats potentiels mais aussi notre
Assemblée et le Comité des Ministres connaissent mieux ces exigences.
J’ai donc décidé de les rappeler dans mon rapport:
«Tâches
d’un membre du CPT:
- effectuer
des visites d’inspection sur le terrain dans un environnement difficile;
- s’entretenir avec différents
types de personnes privées de liberté, telles que des personnes
placées en garde à vue, en détention provisoire ou purgeant des
peines de prison, des patients psychiatriques, des étrangers retenus
au titre de la législation sur l’immigration, des personnes âgées
et/ou handicapées hébergées dans des maisons d’accueil, etc.;
- travailler avec des interprètes
et au sein d’une équipe composée de personnes de nationalités et
de milieux professionnels différents;
- travailler de longues heures
par jour, et parfois aussi une partie de la nuit, en général pendant
deux semaines dans le cadre d’une visite périodique, et en se déplaçant
presque quotidiennement;
- contribuer à la fin de chaque
visite à la communication immédiate d’informations aux autorités
et fournir des notes écrites détaillées pour alimenter le rapport
du CPT;
- outre le travail sur le terrain,
étudier tous les projets de rapport et contribuer aux discussions
lors des trois sessions plénières par an. Les membres du CPT sont
invités également à participer à plusieurs groupes de travail internes
et à l’examen des normes et méthodes de travail.
Compétences et qualités requises d’un membre
du CPT:
Outre les critères définis dans
la convention, les compétences et qualités ci-après sont essentielles
pour mener à bien les tâches d’un membre du CPT, telles qu’elles
sont décrites ci- dessus:
- avoir les connaissances techniques
nécessaires;
- avoir la motivation nécessaire
pour mener à bien une tâche difficile;
- avoir les compétences de négociation
nécessaires lors des discussions avec les autorités;
- être apte à communiquer, ce
qui suppose une excellente maîtrise de l’une des langues officielles
du Conseil de l'Europe (anglais ou français) permettant de travailler
avec un(e) interprète et de rédiger des notes et rapports dans cette
langue. Une bonne maîtrise de la seconde langue officielle du Conseil
de l'Europe est également nécessaire pour pouvoir communiquer avec
d’autres membres et experts qui travaillent dans cette seconde langue
et être en mesure de lire leurs notes. En outre, toute connaissance d’une
autre langue est précieuse pour le CPT;
- savoir travailler en équipe;
- être capable de supporter,
sur le plan émotionnel, des situations très pénibles;
- être en bonne santé et, dans
la mesure du possible, d’un âge suffisant pour être reconnu(e) comme
une autorité exerçant des responsabilités importantes dans les Etats
membres, mais pas trop élevé pour supporter les contraintes physiques
et psychologiques liées à la mission;
- être disponible et prêt(e)
à consacrer beaucoup de temps (en partie non rémunéré) aux travaux
du CPT;
- être loyal(e) vis-à-vis du
CPT et discret(ète) pour respecter le principe de confidentialité.»
14. Pour résumer, il est crucial
que les membres du CPT soient très qualifiés mais aussi, une fois
élus, disponibles pour exercer efficacement leurs fonctions. Les
candidats doivent donc être en mesure de consacrer suffisamment
de temps pour se préparer et participer aux visites et sessions
plénières du CPT, et contribuer à la rédaction des rapports de visite
et, éventuellement, aux groupes de travail au sein du CPT. Concrètement,
il faut qu’un candidat soit disponible au minimum 40 jours par an.
Il convient de se rappeler également que les membres du CPT peuvent
être aussi invités à participer en urgence à des visites organisées à
brève échéance.
15. Les activités du CPT supposent de participer à des visites
qui peuvent être longues et exigeantes et se dérouler dans des milieux
parfois difficiles. Il est donc également important que les candidats
aient les capacités physiques et mentales de contribuer aux activités
du CPT sur le terrain. Il est conseillé aux candidats de fournir
un certificat d’aptitude médicale avant que leur candidature soit
soumise par la délégation nationale. L’âge des candidats est une
question qui doit être également examinée de près. Il est quelque
peu paradoxal qu’une limite d’âge soit fixée pour les candidats
à un poste de juge à la Cour européenne des droits de l’homme alors
que ce n’est pas le cas pour les membres du CPT, dont les activités
sont physiquement exigeantes
.
16. Les compétences linguistiques ont toujours été une question
importante dans la sélection des candidats à un poste au CPT. Ses
membres doivent avoir une excellente maîtrise d’au moins l’une des
langues officielles du Conseil de l’Europe (anglais et français).
De même, une connaissance, au moins passive, de l’autre langue officielle
s’est révélée être très souhaitable pour faciliter les échanges
avec d’autres membres et experts.
17. L’indépendance et l’impartialité des membres du CPT sont également
des aspects essentiels qui méritent d’être dûment pris en compte
au cours du processus de sélection nationale. Il est évident que
ces deux qualités ne sauraient être mises en cause du simple fait
qu’un candidat est un fonctionnaire ou une personne employée à un
autre titre dans le secteur public. Cependant, un candidat qui est
en position de prendre des décisions concernant la définition et/ou
la mise en œuvre de politiques au niveau national ou qui occupe
à un autre titre des fonctions pouvant donner lieu à un conflit
d’intérêts, ne devrait pas, en principe, être sélectionné
. Sinon, il
convient de disposer de garanties écrites que le candidat concerné
n’occupera plus ce poste ou cette fonction s’il est élu.
2.2. Procédures
de sélection/élection des membres du CPT
18. Parmi les éléments à examiner,
il faudrait revenir sur la demande formulée dans la
Résolution
1808 (2011) de l'Assemblée, selon laquelle les membres du CPT devraient
être élus par l'Assemblée après une procédure d’entretien appropriée.
19. La procédure de désignation des membres du CPT est décrite
en partie dans l’article 5 de la Convention CPT. Comme il est rappelé
dans la
Résolution 1540
(2007) de l'Assemblée, les membres du CPT sont nommés «par
le Comité des Ministres sur proposition du Bureau de l’Assemblée
qui, à son tour, délègue à la sous-commission des droits de l’homme
de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme l’examen
des listes de trois candidats, présentées par les délégations nationales».
20. La
Résolution 1540
(2007) indique qu’il est possible, sans qu’il soit nécessaire
de modifier la convention CPT, de rendre plus efficace en pratique
la procédure de désignation des membres du CPT en améliorant:
- les procédures nationales de
sélection, en garantissant leur transparence et en renforçant les mécanismes
qui doivent conduire à la désignation des candidats les plus qualifiés;
- la procédure au sein de l’Assemblée, en optimisant les
informations sur lesquelles la sous-commission des droits de l’homme
va se fonder pour rédiger sa recommandation et en lui donnant la
possibilité, s’il y a lieu, d’avoir des entretiens avec les candidats
présélectionnés;
- la communication entre l’Assemblée et le Comité des Ministres.
21. La qualité et la transparence des procédures de sélection
nationales varient d'un pays à l'autre. Des améliorations peuvent
être apportées dans de nombreux pays, mais il existe aussi de très
bons exemples qui méritent d’être cités. La procédure de sélection
nationale utilisée en France, par exemple, montre ce qui peut être
accompli lorsque de sérieux efforts sont consentis pour respecter
les critères fixés dans la
Résolution
1540 (2007): appels publics à candidature donnant un délai raisonnable
pour se présenter et large diffusion d’informations sur les membres
du CPT dans différents secteurs présentant un intérêt pour les activités
du CPT; création d’un comité d’experts spécial multidisciplinaire
chargé d’examiner les candidatures, de conduire des entretiens avec
les candidats et de présélectionner les candidats et candidates
les plus qualifiés présentant des qualifications professionnelles
différentes. Il en va de même pour le nouveau processus de sélection
mis en place en 2017 en Norvège pour présenter les candidatures
au CPT: création d’un sous-comité CPT par la délégation norvégienne
auprès de l’Assemblée, larges appels publics à candidatures et publication d’informations
sur le CPT, et enfin entretiens approfondis avec les candidats.
22. Ce type de procédure doit être mené même s’il existe, parmi
les candidats, des membres titulaires qui peuvent être réélus. On
peut comprendre que d’autres candidats potentiels puissent hésiter
à se porter candidat contre un bon titulaire qui peut leur sembler
avantagé dans le processus de nomination. Cependant, il y a toujours
un avantage à figurer sur une liste de candidats en vue d’une future
élection ou à pouvoir être choisi comme expert indépendant pour
des visites spécifiques du CPT. Il est également dans l'intérêt
du CPT de disposer d’une réserve d’excellents experts qui peuvent
être appelés à collaborer sur une base ad hoc
.
23. Quelques pays, certains plus que d’autres, peuvent éprouver
des difficultés à trouver des personnes qualifiées parmi leurs ressortissants.
C’est le cas, en particulier, des petits pays où les non-ressortissants constituent
la majorité de la population et où les conditions d’obtention de
la citoyenneté sont strictes. La Convention CPT permet à une délégation
nationale de présenter un candidat qui n’est pas un ressortissant
. Cependant,
l’article 4.3 précise que le CPT ne peut comprendre plus d'un national
du même État. Dans le cas d’un candidat possédant plusieurs nationalités,
le concept de nationalité effective doit être utilisé. On note par ailleurs
que les listes présentées par une délégation nationale peuvent inclure
un candidat qui n’est pas ressortissant d’un État Partie. Plus généralement,
l’éventail des profils de candidat à un poste au CPT est large (juristes,
agents pénitentiaires, policiers, procureurs, juges, professionnels
de santé, psychologues, travailleurs sociaux, représentants de la
société civile, etc.) et devrait permettre de trouver un nombre
suffisant de candidats qualifiés, même dans les petits pays.
2.3. Propositions
concrètes
24. Il faudrait modifier la Convention
CPT pour changer les modalités d’élection des membres du CPT, ce qui
est un processus de longue haleine et difficile. Cependant, un certain
nombre d’améliorations importantes peuvent être apportées à court
terme sans qu’il soit nécessaire de modifier la Convention CPT.
Il faudrait en priorité améliorer les procédures de présélection
des candidats au niveau national et renforcer la procédure au sein
de l’Assemblée à la lumière des recommandations formulées dans la
Résolution 1540 (2007) «Améliorer les procédures de sélection des membres du
CPT».
25. L’Assemblée pourrait contribuer davantage au processus en
améliorant ses propres procédures et en donnant plus de poids aux
recommandations de son Bureau. Je voudrais faire plusieurs propositions
concrètes à cet égard.
2.3.1. Harmoniser
la présentation des candidats: redéfinir le modèle de curriculum
vitae de l’Assemblée parlementaire pour les candidats au CPT
26. L’élaboration d’une nouvelle
forme de modèle de curriculum vitae tenant compte davantage des particularités
des membres du CPT pourrait être très utile car elle permettrait
d’obtenir tous les renseignements pertinents sur les candidats.
À l’heure actuelle, l’Assemblée encourage les candidats à utiliser
un modèle harmonisé de CV qui est annexé à la lettre qui demande
la soumission d’une liste de candidats et qui est envoyée par le
Secrétaire général de l’Assemblée parlementaire aux présidents des
délégations nationales de l’Assemblée lorsque le mandat du leur
membre du CPT respectif prend fin. L’introduction d’un modèle de
CV est une amélioration qui a eu lieu suite à la
Directive 530 (1997) de l’Assemblée sur le renforcement du mécanisme de la
Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines
ou traitements inhumains ou dégradants
. Cependant, le
modèle de CV actuel est plutôt minimaliste et laisse beaucoup de liberté
aux candidats quant au contenu qu’ils veulent y faire figurer. Je
considère que ce modèle de CV était une amélioration au moment où
il a été introduit mais qu’il est désormais obsolète et doit être
révisé compte tenu des autres CV modèles utilisés au Conseil de
l’Europe. Le nouveau modèle de CV devrait en particulier demander
aux candidats d’évaluer leurs compétences linguistiques conformément
au
Cadre
européen commun de référence pour les langues du Conseil de l’Europe. J’ai donc élaboré un nouveau
modèle de CV (voir l’annexe), que le Bureau de l’Assemblée devra
approuver en temps utile.
2.3.2. Entretiens
à distance axés sur les compétences linguistiques
27. Dans l’idéal, l’Assemblée,
c’est-à-dire la sous-commission des droits de l’homme, devrait s’entretenir directement
avec les candidats, comme il est d’usage à la commission sur l’élection
des juges à la Cour européenne des droits de l’homme. Cependant,
cette approche ne semble pas, pour l’instant, réaliste.
28. Depuis l’entrée en vigueur du Protocole no 2
à la Convention CPT (STE no 152), la
moitié des membres du CPT est réélue tous les deux ans (article
5.4 de la Convention). C’est pourquoi en 2017, par exemple, la sous-commission
des droits de l’homme devra examiner 24 listes du CPT comprenant
chacune trois candidats. Il faudrait 12 jours de travail complet
pour mener à bien tous les entretiens avec les candidats. N’importe
quel membre de notre Assemblée, aussi engagé soit-il, aurait des
difficultés à trouver le temps nécessaire – en plus des parties
de session, des réunions de commissions, des visites d’information
– pour réaliser ces entretiens. La question des coûts devrait être
également examinée.
29. Toutefois, l’Assemblée pourrait déjà améliorer qualitativement
son rôle dans la procédure de sélection en obtenant des faits objectifs
sur les compétences linguistiques des candidats. Un membre du CPT
sans connaissance approfondie du français ou de l’anglais n’est
pas en mesure de contribuer efficacement aux travaux du CPT. Cela
étant, le CPT a connu des cas dans lesquels les compétences linguistiques revendiquées
dans le CV ne correspondaient pas à la réalité. Il est évident que
la sous-commission des droits de l’homme n’est pas capable d’évaluer
les compétences linguistiques à la simple lecture d’un CV. Mais l’Assemblée
pourrait éventuellement organiser des entretiens à distance avec
tous les candidats retenus par les autorités nationales et concentrer
son attention sur les compétences linguistiques. Ce travail pourrait
être effectué par deux membres de la sous-commission (un membre
anglophone et un membre francophone) en utilisant internet. Les
échanges seraient brefs (pas plus de 15 minutes) afin qu’un nombre
raisonnable d’entretiens puissent être effectués en une seule journée.
Il s’agirait d’une procédure efficace et économique d’une plus-value
incontestable pour l’Assemblée, le Comité des Ministres et le CPT.
30. Je propose donc que la sous-commission des droits de l’homme
envisage de nommer chaque mois de janvier une équipe de deux parlementaires
(et deux suppléants) composée d’un anglophone et d’un francophone,
dont le mandat serait de mener des entretiens à distance avec les
candidats afin de vérifier leurs compétences linguistiques.
2.3.3. Vérifier
plus précisément les procédures nationales de sélection
31. La sous-commission des droits
de l’homme devrait jouer un rôle plus actif dans la mise en œuvre
des exigences énoncées dans la
Résolution 1540 (2007): appels publics à candidatures; consultations concernant les
candidats avec des organismes gouvernementaux et non gouvernementaux;
entretiens avec les candidats présélectionnés; participation active
de la délégation nationale à l’Assemblée.
32. En effet, on peut se demander pourquoi, dans certains cas,
les mêmes noms apparaissent sur la liste présentée par les délégations
nationales à l’occasion de deux élections successives, voire plus.
En fait, les délégations nationales sont déjà invitées à fournir
des éléments d’information sur la procédure de sélection nationale,
en complément des noms et des CV des candidats proposés. Il est
possible cependant d’apporter des améliorations sur ce point car,
dans certains cas, les explications sont laconiques ou inexistantes.
33. Il est important que toutes les délégations nationales fournissent
des informations détaillées sur la procédure de sélection. Lorsqu’elles
ne respectent pas les recommandations de l’Assemblée, la sous-commission
des droits de l’homme devrait envisager de rejeter les listes (comme
cela a déjà été fait dans le passé).
3. Nécessité
de sensibiliser davantage les États membres
34. Le succès des travaux du CPT
dépend également du soutien politique apporté par le Conseil de
l'Europe et ses États membres. Partant, il est important d'analyser
comment sensibiliser davantage chaque Etat membre à l’obligation
de satisfaire aux exigences de l'article 3 de la Convention européenne
des droits de l’homme. Lorsqu'un Etat Partie ne coopère pas ou refuse
d'améliorer une situation à la lumière des recommandations du CPT,
ce dernier fait une déclaration publique si la majorité des deux
tiers a été obtenue, après avoir donné la possibilité de s’expliquer
à l'État concerné. La déclaration publique est le dernier moyen de
«tirer la sonnette d’alarme» qu'un Etat ne se conforme pas à son
obligation de coopérer avec le CPT. Permettez-moi de souligner que
le pouvoir de faire une déclaration publique au titre de l'article
10.2 de la Convention n’est utilisé par le CPT qu’en tout dernier
ressort: la déclaration publique sur la Bulgarie en 2015 n’était
que la septième de ce genre depuis la création du CPT en 1989 (
CPT/Inf
(2015)17).
35. Cependant, comme l'Assemblée l'a déjà souligné, le Comité
des Ministres, ainsi qu’elle-même peut-être, n’ont pas toujours
donné les suites nécessaires aux déclarations publiques du CPT.
L'Assemblée doit être plus volontariste et demander également au
Comité des Ministres de réagir aux déclarations publiques du CPT,
au minimum en les inscrivant à son ordre du jour et en se saisissant
sérieusement des problèmes soulevés par le CPT. Malheureusement
il n’y a aucun signe d’amélioration depuis la dernière
Recommandation 1968 (2011) de l’Assemblée, qui invitait le Comité des Ministres
à inscrire d’urgence les déclarations publiques du CPT à son ordre
du jour et à en débattre. La réponse du Comité des Ministres à cette
recommandation soulignait que «toute déclaration publique devrait,
avant tout, être examinée attentivement par les autorités nationales concernées».
Or le Comité des Ministres, qui avait convenu avec l'Assemblée que
le caractère exceptionnel de cette mesure «méritait» d’être inscrit
à son ordre du jour, n'a pas réussi à le faire lorsque le CPT a
fait sa déclaration publique concernant la Bulgarie en 2015.
36. En outre, l'Assemblée devrait donner plus largement suite
aux déclarations publiques émises par le CPT, ce qui s’ajouterait
au débat mené devant la sous-commission des droits de l'homme en
présence du chef de la délégation nationale concernée. Il pourrait
également être utile que le Commissaire aux droits de l’homme du
Conseil de l’Europe prenne des mesures qui lui sont propres lorsqu’une
déclaration publique est faite.
37. Plus généralement, au-delà des déclarations publiques du CPT,
l’Assemblée devrait faire le point, à intervalles réguliers, sur
les mesures prises pour prévenir la torture et autres formes de
mauvais traitements dans les États membres. La commission des questions
juridiques et des droits de l’homme et la commission de suivi pourraient
envisager d’inviter conjointement le Président du CPT à un échange
de vues annuel au cours duquel il pourrait, entre autres, présenter
le rapport annuel du CPT. Les présidents des délégations nationales
auprès de l’Assemblée parlementaire des pays visités par le CPT
durant l’année précédente pourraient être invités à participer à
cet échange de vues.
4. La
publication des rapports du CPT doit devenir plus systématique et
plus rapide
38. En ce qui concerne les visites
effectuées par le CPT, toutes les informations recueillies, les
consultations avec l'État Partie concerné, de même que les rapports
de visite et les réponses des gouvernements, restent confidentiels
aux termes de la Convention CPT. Le principe de confidentialité
est et doit rester un atout pour la coopération du CPT avec les
autorités nationales. Cependant, le CPT publie son rapport si l’État
Partie concerné le demande. Si la publication n’était pas soumise
à chaque fois à l'autorisation spécifique de la Partie concernée,
les constats et les recommandations du CPT seraient divulgués beaucoup
plus rapidement, ce qui accélérerait les débats sur les problèmes
soulevés dans les rapports du CPT. Ces consultations avec toutes les
parties concernées, notamment des parlementaires et des spécialistes
indépendants, pourraient déclencher l’adoption de mesures correctives
et contribuer à résoudre les problèmes (urgents) en suspens. La grande
majorité des États demandent généralement la publication des rapports
du CPT, ce qui est ainsi devenu la pratique générale. Même s’il
faut s’en féliciter, cette pratique emporte des délais. La meilleure pratique
serait de donner une autorisation générale de publication des futurs
rapports. Cela étant, un État Partie devrait toujours avoir la possibilité
de reporter la publication d’un rapport du CPT jusqu'à six mois
après la date de transmission du document.
39. Dans ce contexte, il faut encourager la pratique qui est de
plus en plus utilisée par les États et qui consiste à autoriser
à l'avance la publication des rapports de visite et des réponses
connexes du gouvernement, sachant qu’il est toujours possible, dans
certains cas, de retarder la publication pendant une certaine période.
Suite à l'adoption de la
Résolution
1808 (2011) , la République de Moldova a fait
une demande générale de publication de tous les futurs rapports
de visite du CPT dès que possible après leur transmission, sauf
dans les cas particuliers où elle formulerait une objection ou retarderait
la publication. Cette procédure est désormais dénommée «procédure
de publication automatique». Le CPT indique clairement dans son
21e rapport général
qu’il
privilégie cette approche plutôt que de modifier la Convention CPT:
«Plutôt que d’imposer une publication automatique, le CPT préférerait
que cela soit une politique volontairement adoptée par les États.
À cet égard, le Comité salue la demande récemment faite par le gouvernement
moldave selon laquelle tous les rapports à venir du CPT relatifs
aux visites dans ce pays soient publiés dès que possible après leur
transmission aux autorités, sans autorisation préalable». Sept autres
pays ont ensuite adopté une «procédure» similaire (Autriche, Bulgarie,
Finlande, Luxembourg, Monaco, Suède et Ukraine). L'Assemblée doit
se féliciter de la pratique de publication automatique et encourage
vivement les États Parties à faire de telles demandes générales.
40. Ces «procédures de publication automatique» devraient permettre
au CPT de préserver la confidentialité pendant un certain temps
dans les rares cas où il le juge nécessaire. Le Comité des Ministres et
le CPT ont précisé dans la
réponse à la
Recommandation
1968 (2011) que, dans certaines situations exceptionnelles, la publication
rapide d’un rapport de visite peut avoir des conséquences plus négatives
que positives
.
41. Alors que la publication des rapports de visite du CPT à la
demande des États concernés est devenue une pratique courante, il
est préoccupant de constater que l'Azerbaïdjan et la Fédération
de Russie ne l’adoptent pas. Au contraire, la Fédération de Russie
n’a demandé la publication que de trois rapports sur 23
, et l'Azerbaïdjan de deux sur 10
. La Turquie n'a pas encore demandé
la publication des trois derniers rapports de visite du CPT (concernant
la visite de juin 2015, la visite d’avril 2016 et la visite la plus
récente d’août/septembre 2016)
. Or la Turquie avait jusqu'alors
demandé la publication de tous les rapports (y compris, en 2007,
celle de rapports plus anciens qui n’avaient encore jamais été publiés).
On peut donc espérer qu’il ne s’agit que d’un retard et que la demande
concernant ces trois rapports sera bientôt faite. Il serait regrettable
– compte tenu notamment des nombreuses allégations de torture graves
qui ont été faites suite à la tentative de coup d'État de juillet
2016 – que la Turquie prenne exemple sur l'Azerbaïdjan et la Fédération
de Russie en omettant de demander la publication.
5. Promouvoir
la ratification de l’OPCAT par tous les États membres du Conseil
de l'Europe et une coopération renforcée avec les MNP
42. Il est aussi extrêmement important
de renforcer tous les outils et instruments de prévention de la
torture pour que le CPT puisse remplir sa mission. Même si on constate
une augmentation du nombre de pays européens qui ont ratifié le
Protocole facultatif se rapportant à la Convention des Nations Unies
contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains
ou dégradants (OPCAT), cet instrument n’a toujours pas été ratifié
par la totalité des États membres du Conseil de l'Europe
. Il faut
encourager les États à ratifier l’OPCAT, qui prévoit des mécanismes
nationaux de prévention qui sont une expression concrète de la subsidiarité. Depuis
ses premières visites, le CPT a mis en évidence la nécessité de
mettre en place ces mécanismes de suivi au niveau national. La plupart
des activités ayant trait à la protection des détenus contre les
abus devraient être menées à l’échelle nationale par des MNP indépendants
et efficaces, dotés des ressources juridiques, humaines et financières
nécessaires à la conduite des actions de prévention et de suivi
sur le terrain.
43. Les trois experts invités à une audition devant la commission
sont convenus de l’importance des MNP, qui ont le potentiel de changer
la donne en ce qui concerne la prévention des mauvais traitements.
Dans son
22e Rapport
général, le CPT a souligné qu’«en effet, à condition de disposer
des connaissances et des pouvoirs nécessaires, ainsi que de ressources
adéquates, les mécanismes de contrôle établis au niveau national
(commissions de visiteurs, services du médiateur, etc.) peuvent
intervenir plus souvent, et plus rapidement, que toute instance
internationale
». Il
est dans l’intérêt du CPT de continuer à étudier toutes les possibilités
d’interaction avec les mécanismes de l’OPCAT car «en fait, l’efficacité
des efforts visant à assister les États en Europe à prévenir la
torture et les autres formes de mauvais traitements dépendra, à
l’avenir, dans une large mesure de la qualité de l’interaction entre
le Comité et ces mécanismes
.»
44. Pour renforcer l’efficacité des MNP, l'OPCAT (partie IV) définit
des exigences minimales qui peuvent être résumées comme suit:
- un mandat pour effectuer des
visites préventives;
- des ressources pour mener à bien un programme complet
de visites;
- l’accès à tous les lieux de détention;
- l’accès à toutes les informations pertinentes;
- le droit de mener des entretiens privés;
- l’indépendance;
- l’expertise;
- le droit de formuler des recommandations et de recevoir
une réponse réfléchie;
- le droit de publier des rapports;
- les privilèges et immunités nécessaires;
- la crédibilité .
45. Il existe trois principaux modèles de mécanismes nationaux
de prévention: le modèle «ombudsman/ombudsman plus» (par exemple,
l'Arménie), le modèle «organisme unique et autonome» (par exemple
en France) et le modèle multi-organismes» (par exemple, le Royaume-Uni).
Le CPT n'a jamais privilégié un modèle en particulier. Toutefois,
le degré d'interaction entre le CPT et un MNP et l'attention que
le CPT doit accorder à un pays donné dépendent en grande partie
de l'indépendance et du fonctionnement efficace du MNP. Les mécanismes
de prévention nationaux, quand ils existent, sont trop souvent considérés
comme manquant d'indépendance et/ou de ressources suffisantes.
46. Les États Parties devraient faire tout leur possible pour
faciliter l'échange d'informations et la coordination entre le CPT
et les MNP. Dans son
22e rapport
général, le CPT s’est félicité de la présence d’un représentant
du MNP lors des échanges de fin de visite, lorsque la délégation
a fourni ses observations préliminaires ainsi que des observations
de nature urgente. Les MNP ont pu ainsi être rapidement informés des
préoccupations du CPT et prendre les mesures qu’ils considéraient
appropriées. L’Assemblée devrait inviter les États Parties à veiller
à ce qu’un représentant du MNP ou de tout autre mécanisme national
de suivi pertinent soit présent au cours de ces réunions.
47. Dans le même esprit, les États Parties devraient être davantage
encouragés à prendre des dispositions pour que les rapports de visite
du CPT et les réponses du gouvernement soient mis sans délai à la
disposition des MNP ou de tout autre organisme national de suivi
approprié, à la condition qu’ils soient traités comme confidentiels
jusqu'à leur publication. Des dispositions similaires pourraient
être formulées en ce qui concerne toute correspondance pertinente
confidentielle entre le CPT et les autorités. Il s’agit d’une pratique
qui ajouterait un élément de transparence – fortement encouragé
par l’ancien président du CPT, M. Lətif H. Hüseynov – aux activités
du CPT sans violer le principe de confidentialité. Ces informations
en temps opportun faciliteraient également le travail des MNP.
6. Renforcer
les synergies entre les mécanismes du Conseil de l'Europe et des
Nations Unies
48. Depuis l'entrée en vigueur
de l'OPCAT, le Sous-Comité pour la prévention de la torture et autres traitements
cruels, inhumains ou dégradants (SPT) et le CPT ont cherché à coopérer
efficacement, en dépit de leurs propres contraintes juridiques.
L'organisation de leurs activités respectives en Europe devrait
être fondée sur deux principes directeurs: la complémentarité et
la subsidiarité. Comme le Président du CPT l’a indiqué en novembre
2016 à l'occasion du 10e anniversaire
de l'entrée en vigueur de l'OPCAT, «les synergies entre le CPT et
le SPT, le CPT et les mécanismes nationaux de prévention, doivent
être centrées sur les domaines qui présentent le plus fort potentiel.
(...) Au cours des 27 années d'existence du CPT, [le Comité] a engagé
un dialogue permanent avec chaque Etat membre du Conseil de l'Europe
dans tous les domaines qui relèvent de notre mandat. Par conséquent,
dans l’idéal, nous préférerions que le rôle du SPT en Europe soit moins
axé sur les enquêtes et consiste davantage à rationaliser les mécanismes
nationaux de prévention et à veiller à leur bon fonctionnement.
Ce n’est certainement pas au CPT de se concentrer sur cette question
car [le Comité] [est] très réticent (certaines personnes disent
(...) trop) à dire quoi que ce soit qui empiéterait sur le mandat
exclusif du SPT, qui consiste à évaluer la performance des MNP
». Il serait en effet très souhaitable que
le SPT concentre son attention sur le fonctionnement des mécanismes
nationaux de prévention en Europe et que le CPT accorde la priorité
à ses fonctions ordinaires d’enquête et de suivi exercées dans le
cadre de visites spéciales et périodiques. En dehors de l'Europe,
les États non-membres ont généralement été invités à signer et ratifier
l'OPCAT avant d'envisager l'adhésion à la Convention portant création
du CPT. Le SPT et le CPT devraient tous deux continuer de chercher
à tirer le meilleur parti de leurs ressources limitées.
7. Ressources
humaines
49. Enfin je voudrais aborder mon
dernier point, qui est essentiel, et rappeler que le CPT dépend
aussi du travail de son secrétariat professionnel. Malheureusement,
sur les 10 administrateurs qui travaillent dans les divisions opérationnelles,
trois seulement occupent des postes à titre permanent
.
Il est clair que cette situation n’est pas adaptée à la nature permanente
du travail du CPT.
8. Conclusions
50. Après 25 ans d’un travail de
la plus haute qualité, le CPT est un incontestable succès. Afin
de préserver et de renforcer son efficacité et son impact, et compte
tenu des considérations énoncées ci-dessus, j'ai fait un certain
nombre de suggestions pratiques et concrètes dans le projet de résolution,
en particulier en ce qui concerne:
- de nouvelles améliorations des procédures de sélection,
tant au niveau national qu'au niveau de l'Assemblée;
- des mesures visant à accroître l'accès aux travaux fondamentaux
du CPT et à améliorer la transparence de ses activités, notamment
en examinant la question de la publication automatique des rapports
du CPT et les réponses du gouvernement qui s’y rapportent;
- une participation plus forte de l'Assemblée et de ses
commissions compétentes, qui contribueraient au suivi des recommandations
du CPT, et encourageraient les parlements nationaux à traiter cette question;
- la nécessité pour les États membres du Conseil de l'Europe
de signer et de ratifier l'OPCAT, ainsi que de mettre en place des
MNP efficaces et indépendants;
- le renforcement de tous les instruments relatifs à la
prévention de la torture au niveau international, régional (par
exemple européen) et national et l’optimisation de la coordination
de leurs activités.
51. Dans le projet de recommandation, je suggère en outre d’inviter
le Comité des Ministres à s’engager à examiner, en urgence, toute
déclaration publique faite par le CPT et de veiller à ce que le
CPT dispose de ressources humaines suffisantes et dotées d’un statut
permanent.
52. Ce rapport ne recommande pas d’approche révolutionnaire. L'appel
lancé à plusieurs reprises par l'Assemblée en vue de modifier la
Convention CPT afin que l’Assemblée puisse élire les membres du
CPT reste valable et doit rester l'objectif à long terme de l'Assemblée.
Il semble cependant tout à fait possible d’apporter des améliorations
plus immédiates et très concrètes sans pour autant s’engager dans
un processus d'amendement long et incertain. Je suis convaincu que
nos propositions pourraient faire la différence et avoir un impact
concret sur la prévention de la torture en Europe.