FR18CR05

AS (2018) CR 05

SESSION ORDINAIRE DE 2018

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(Première partie)

COMPTE RENDU

de la cinquième séance

Mercredi 24 janvier 2018 à 10 heures

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Le texte des amendements est disponible au comptoir de la distribution et sur le site internet de l’Assemblée.
Seuls sont publiés dans le compte rendu les amendements et les sous-amendements oraux.

4.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

5.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 10 h 05 sous la présidence de Mme Trisse, Vice-Présidente de l’Assemblée.

LA PRÉSIDENTE – La séance est ouverte.

1. Élection du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe
(Second tour de scrutin)

LA PRÉSIDENTE – L’ordre du jour appelle le second tour de scrutin pour l’élection du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, pour lequel seule la majorité relative est requise.

La liste des candidats et leur notice biographique figurent dans le Doc. 14444. L’avis de la sous-commission des droits de l’homme sur la liste des candidats est présenté dans le Doc. 14455 Addendum 3.

Le scrutin aura lieu dans la rotonde située derrière la Présidence.

Le scrutin sera suspendu à 13 heures. Il reprendra à 15 h 30 et sera clos à 17 heures.

Le dépouillement aura lieu aussitôt après dans les conditions habituelles, sous le contrôle de quatre scrutateurs que nous allons désigner par tirage au sort: M. Sorre, Mme Pashayeva, M. Kobza et M. Destrebecq.

Je leur rappelle qu’ils devront se trouver dans la rotonde derrière la Présidence à 17 heures. Le résultat du scrutin sera annoncé si possible avant la levée de la séance de cet après-midi.

Le scrutin est ouvert.

Nous continuons nos travaux pendant ce temps.

2. Modifications dans la composition des commissions

LA PRÉSIDENTE – Des propositions de modifications dans la composition des commissions ont été publiées dans le document Commissions (2018) 01 Addendum 4.

Ces propositions sont adoptées.

3. Vers un cadre pour une gouvernance sportive moderne
La bonne gouvernance du football
(Débat conjoint)

LA PRÉSIDENTE – L’ordre du jour appelle notre débat conjoint.

Nous entendrons d’abord la présentation par M. Mogens Jensen du rapport de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias intitulé: «Vers un cadre pour une gouvernance sportive moderne» (Doc. 14464 et Addendum).

Ensuite, Mme Brasseur présentera le rapport de la même commission sur «La bonne gouvernance du football» (Doc. 14452).

Je vous rappelle que l’Assemblée a décidé, au cours de sa séance de lundi matin, de limiter le temps de parole des orateurs à 3 minutes.

Nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ces textes, votes inclus, à 12 heures. Nous devrons donc interrompre la liste des orateurs vers 11 h 40, afin de pouvoir entendre la réplique de la commission et de procéder aux votes nécessaires.

Je rappelle que les rapporteurs disposent chacun d’un temps de parole total de 13 minutes, qu’ils peuvent répartir à leur convenance entre la présentation de leur rapport et la réponse aux orateurs.

M. Mogens JENSEN (Danemark), rapporteur de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias* – Le week-end dernier a vu un succès de la diplomatie du sport: Corée du Nord et Corée du Sud se sont rassemblées autour de l’idéal olympique. En dépit de cela, il est encore prématuré, pour le Comité international olympique – le CIO –, de prétendre au prix Nobel de la paix: il doit d’abord mettre sa maison en ordre.

Chaque jour ou presque de nouveaux scandales éclatent: pots-de-vin, corruption, dopage d’État, truquage de matches ou encore paris illégaux. La crise de confiance est telle que, bien souvent, on entend dire que le sport est corrompu. Or le sport, en soi, est pur et porteur de changements très positifs, s’il est entre de bonnes mains.

Les organisations qui régissent le sport doivent avoir les mains propres. Cependant, elles fonctionnent encore selon des modèles archaïques et connaissent fort peu de contre-pouvoirs, de transparence ou d’obligations redditionnelles. À la fin de l’année 2015, le centre de recherche danois dénommé Play the Game a publié un rapport très critique intitulé: «La crise de légitimité de la gouvernance internationale du sport». C’est cette publication qui a déclenché mon propre rapport. L’organisme danois estime que 75 % des 35 fédérations olympiques internationales n’ont pas respecté ne serait-ce que la moitié des critères de gouvernance demandés. Deux ans plus tard, la situation a-t-elle changé?

La réponse est mitigée. D’une part, plusieurs fédérations internationales sportives, même si c’est sous la contrainte, ont réagi en introduisant des cadres réglementaires beaucoup plus rigoureux. Je salue notamment les fédérations de football, de cyclisme et d’athlétisme. Le paysage sportif est en train de changer, et la prise de conscience est très forte sur ce point. En dépit de ses revendications traditionnelles d’autonomie, le mouvement sportif comprend qu’il n’est pas réellement en mesure de résoudre seul les problèmes qu’il rencontre en termes de gouvernance et d’intégrité. D’autre part, toutefois, le mouvement sportif est très lent à se moderniser. Or les défaillances systémiques que l’on observe nécessitent une refonte majeure des structures et des pratiques de gouvernance du sport.

Que faire? Dans mon rapport, je distingue trois piliers. Premièrement, il faut comprendre quels sont les critères d’une bonne gouvernance, du plus petit club aux immenses fédérations internationales, qui représentent un volume d’affaires énorme. L’ensemble doit être harmonisé. Deuxièmement, il faut savoir quelles sont les actions et les outils communs qu’il convient de mettre en place pour assurer cette bonne gouvernance. Troisièmement, il faut encourager des politiques inclusives, afin d’impliquer toutes les parties prenantes.

Il n’y a pas de solution unique. Toutefois, nous devrions appliquer à toutes les organisations des critères communs de base permettant de définir une bonne gouvernance. Ces critères recoupent largement les principes de gouvernance appliqués dans le secteur public non lucratif, ou même au sein des entreprises. Quant à leur mise en œuvre, elle n’a rien de particulièrement sophistiqué: elle relève tout simplement du bon sens.

Restaurer la confiance du public envers le sport commence par le fait de mettre un terme à l’impunité. Les responsables doivent répondre de leurs actes et être traduits en justice. Le mouvement sportif doit être proactif en cas d’allégations de corruption. Plus en amont, il convient de mettre en place des protections réglementaires pour éradiquer la corruption. Ainsi, le mouvement sportif sera soumis à une obligation redditionnelle et sera fondé sur la transparence.

Les gouvernements nationaux ont un rôle essentiel à jouer: ils doivent mettre en œuvre les conventions internationales existantes et les lois nationales destinées à lutter contre la corruption et les discriminations, voire adopter de nouvelles législations pour autoriser des enquêtes, favoriser l’entraide juridique et judiciaire. Le sport ne doit plus être une zone de non-droit, nous l’avons dit à maintes reprises avec Mme Brasseur.

Il est nécessaire d’établir des critères communs, un référentiel de normes, incluant des principes partagés et des mesures concrètes permettant de les mettre en œuvre. Un certain nombre d’organes sportifs ont déjà mis en place leurs propres normes, mais cela reste un ensemble de normes individuelles qui ne forment pas une base commune opérationnelle. L’addendum à mon rapport comprend une étude sur les codes et normes des différentes organisations sportives en vue d’une harmonisation.

Ce travail pourrait servir de base à trois initiatives. Premièrement, le CIO doit mettre à jour ses propres Principes universels de base de bonne gouvernance du mouvement olympique et sportif. À cet égard, je me félicite de ma récente conversation avec des représentants de la Commission d’éthique du CIO, qui m’ont appris que cette mise à jour était est en cours. Deuxièmement, au niveau européen, il faudrait élaborer une nouvelle convention du Conseil de l’Europe sur la bonne gouvernance dans le sport, qui viendrait compléter l’ensemble des conventions régissant déjà le sport au sein du Conseil, et permettrait surtout de suivre leur mise en œuvre. Troisièmement, au niveau mondial, il serait bon qu’un débat très large ait lieu sur ces normes, par le biais d’un processus de certification de l’Organisation internationale de normalisation, l’ISO. La certification ISO présente en effet le grand avantage d’être légitime, car ses normes sont universelles et nul n’en conteste la teneur. Ces normes encouragent des bonnes pratiques, sans obliger à changer la législation nationale, ce qui est souvent un obstacle majeur à l’obtention d’un accord ou à l’adoption d’une convention.

L’harmonisation générale des normes va de pair avec la mise en place d’un système d’évaluation du respect des normes et de suivi de leur mise en œuvre. Jusqu’en 2015, le mouvement sportif dans son ensemble restait hors du cadre de toute évaluation ou de toute enquête portant sur la mise en œuvre de codes, de normes ou de principes. Les modèles actuels ne permettent pas de détecter de façon précoce des faits de corruption, d’où le fait que certains scandales, qui apparaissent au grand jour grâce à des lanceurs d’alerte courageux, remontent en fait à un certain temps.

Je propose donc une «solution smartphone», à savoir un système de notation de l’éthique sportive indépendant, solution semblable à la norme ISO. Elle serait fondée sur le volontariat, élaborée par l’ensemble des parties prenantes et évaluée par des fournisseurs de services privés indépendants. Les résultats de l’évaluation seraient laissés à l’appréciation de la fédération ou de l’organisation. Il faut veiller à ce qu’il existe des responsables de l’harmonisation des normes et du respect de la conformité: d’où la nécessité d’un leadership très fort au sein du mouvement sportif.

Dans le même temps, on constate une nette tendance consistant à faire participer de nouveaux acteurs – qu’il s’agisse des sponsors ou des personnes chargées de l’élaboration des politiques relatives à la jeunesse et au sport –, en particulier les nouvelles plateformes multipartenaires et les nouvelles alliances, qui cherchent à jouer un rôle moteur dans la recherche de solutions mondiales.

En préparant ce rapport, je me suis rendu compte qu’en dehors de quelques travaux clairsemés, il n’existe pas réellement de dimension parlementaire dans le débat sur la gouvernance et l’intégrité du sport. Or les parlements nationaux devraient légiférer, notamment pour s’attaquer à la corruption dans le sport. C’est pourquoi je pense qu’il serait pertinent que notre Assemblée crée une assemblée parlementaire spécifique pour la bonne gouvernance et l’intégrité dans le sport.

Je pense donc qu’il existe une voie que nous pouvons emprunter pour obtenir des résultats concrets dans la mise en place d’une meilleure gouvernance dans le domaine sportif, et je vous remercie par avance de l’attention que vous voudrez bien porter à mes propositions.

LA PRÉSIDENTE – Monsieur le rapporteur, il vous restera 2 minutes pour répondre aux orateurs.

Avant de donner la parole à Mme Brasseur pour la présentation de son rapport, permettez-moi de faire une courte mais très importante remarque. Comme vous le savez peut-être déjà, Mme Brasseur a récemment annoncé qu’elle ne se représenterait pas aux prochaines élections législatives au Luxembourg: après 20 années passées dans cet hémicycle, elle nous dira donc bientôt au revoir.

Anne Brasseur est arrivée pour la première fois à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe en 1993. Durant sa longue carrière à l’Assemblée, elle a préparé un grand nombre de rapports et d’avis sur des sujets aussi variés que la lutte contre l’intolérance, la dimension religieuse du dialogue interculturel, ou encore la transition politique en Tunisie – pour n’en citer que quelques-uns. Au fil des années, elle a également exercé presque toutes les fonctions existant au sein de l’Assemblée: présidente de délégation, de commission, de groupe politique, jusqu’à exercer, de 2014 à 2016, la fonction la plus importante et la plus prestigieuse, celle de Présidente.

Chère Anne, ceci est le dernier rapport que vous présentez devant notre Chambre. Je profite de cette occasion pour vous adresser nos remerciements les plus chaleureux pour votre engagement à nos côtés et pour tout le travail que vous avez accompli au sein de notre Assemblée.

Je vous remercie plus particulièrement d’être celle que vous êtes: une Européenne convaincue, une infatigable défenderesse des droits de l’homme, de la démocratie, et de l’État de droit. Merci enfin, et surtout, d’être pour nous tous une excellente collègue et amie.

Chère Anne, vous avez la parole.

Mme BRASSEUR (Luxembourg), rapporteure de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias – Madame la Présidente, mes chers collègues, je suis très touchée par ces paroles si aimables. Cependant, ce n’est pas tout à fait ma dernière partie de session: je reviendrai au mois d’avril pour vous dire au revoir. Aujourd’hui, je viens vous présenter mon dernier rapport, qui est particulièrement important. Mon discours d’au revoir, vous l’entendrez donc en avril prochain; mais sachez, Madame la Présidente, que vos propos me font du bien. Je vous remercie du fond du cœur.

«Trop peu d’argent nuit au football, trop d’argent tue le football. II faut éviter que le football ne s’autodétruise.» Telles sont les premières phrases du rapport que je vous présente.

Le football n’appartient à personne, à aucune organisation: il appartient à tout le monde – c’est-à-dire à nous tous. Il doit donc être considéré comme un bien commun. De même, le football ne peut se soustraire au droit commun, il ne peut pas s’agir – M. Mogens Jensen l’a souligné lui aussi – d’une zone de non-droit.

Le football, c’est bien plus que marquer des buts, gagner des matches, remporter des coupes. Le sport en général doit se fonder sur des principes et des valeurs; le football, comme sport universel, a le devoir de véhiculer ces valeurs. Pour ce faire, les dirigeants et les joueurs doivent être au-dessus de tout soupçon, ce qui malheureusement est loin d’être le cas. Il y va pourtant de la crédibilité de ce sport universel.

Ensemble, avec les instances du football – je dis bien: ensemble –, nous devons mettre un terme à cette tendance à vouloir cacher, minimiser, «bagatelliser», voire nier les dérives que sont le dopage, le trucage des matches, les discriminations fondées sur le genre, l’homophobie, le harcèlement sexuel, la xénophobie, le racisme, la corruption, les malversations financières, le blanchiment, l’évasion fiscale, ou encore les connexions douteuses entre le monde du football et ceux de la politique et de l’économie – oui, la liste est longue.

Comme l’a écrit Mogens Jensen dans son excellent rapport, il est donc de notre devoir de continuer à exiger que le sport en général, et le football en particulier, se soumette à des contrôles indépendants externes, non seulement pour se conformer au droit commun, mais également pour restaurer la crédibilité que le sport, les sportifs ainsi que les supporters méritent.

Voilà pourquoi je propose d’examiner, avec tous les acteurs concernés, la faisabilité de la mise en place d’un observatoire indépendant destiné à évaluer la gouvernance des organismes de football. Loin de moi l’idée – je tiens à le préciser – de vouloir toucher à l’autonomie du sport. Il appartiendra toujours aux organes sportifs de définir les règles du jeu, la dimension des terrains, la durée des matches ou l’assistance vidéo pour l’arbitrage. Cependant, dès qu’il s’agit d’enjeux commerciaux, de règles financières, de critères d’éthique, des droits de l’homme, il faut que le football se soumette aux normes du droit commun, c’est-à-dire aux règles applicables à tout le monde.

Le projet de résolution sollicite une séparation nette entre les activités commerciales et l’organisation sportive proprement dite.

Nous devrons également mener une réflexion commune sur les excès financiers. Pour moi, un joueur ne peut être considéré comme un objet ayant une valeur marchande, car une telle conception fait penser à la notion d’esclavage.

Il faut endiguer la démesure qui fait exploser les montants payés pour les transferts de joueurs et les commissions des agents, ainsi que les émoluments versés aux joueurs – même s’il s’agit d’un talent hors pair tel que Messi, qui touche, d’après les médias, un revenu annuel de 100 millions d’euros, suivi par Ronaldo avec 39,9 millions d’euros et Neymar avec 36,8 millions d’euros. Sans doute s’agit-il de joueurs exceptionnels, mais ces sommes faramineuses et vertigineuses n’ont tout simplement aucun rapport avec la réalité et sont disproportionnées au regard de celles que touchent les autres joueurs.

Depuis l’adoption de notre dernière résolution sur la gouvernance du football, en 2015, de nombreux progrès ont été réalisés: il faut le reconnaître et en féliciter les responsables, aussi bien à la FIFA – la Fédération internationale de football association – qu’à l’UEFA – l’Union des associations européennes de football. Nous constatons des avancées concernant la protection des droits de l’homme, la protection des mineurs, la promotion des femmes ou encore la lutte contre les discours de haine. La consolidation et la mise en œuvre effective de toutes les réformes entamées demeurent cependant de réels défis: certes, les choses ont avancé sur le plan des procédures, mais en pratique, d’énormes progrès restent à accomplir.

Comme je n’ai pas pu traiter tous les sujets, j’ai rédigé une nouvelle proposition intitulée: «La gouvernance du football et l’éthique: les affaires ou les valeurs?», dans laquelle je demande que d’autres sujets liés soient analysés, tels que la propriété des clubs avec leur financement et leur endettement, le merchandising, les paris sportifs, la vente des billets, ou encore le coût des infrastructures et les autres coûts soutenus par les autorités publiques – donc par le contribuable.

Les excès auxquels nous assistons sont socialement inacceptables. L’effort consenti par les pouvoirs publics ne semble profiter qu’à une poignée de privilégiés. Il faut analyser les liaisons dangereuses et malsaines qui peuvent s’établir entre le sport, le monde des affaires et la politique. Aussi devrons-nous nous déterminer les moyens de freiner les inégalités financières entre joueurs, clubs, ligues et fédérations nationales, afin que la notion de fair-play financier ne demeure pas une coquille vide.

J’appelle votre attention, chers collègues, sur deux notes d’information – l’une sur la FIFA et l’autre sur l’UEFA – que j’ai rédigées en complément de mon rapport. Ces documents ont été publiés sur le site de notre Assemblée. Leur consultation vous permettra de comprendre la structure de ces fédérations et de mesurer les progrès qu’elles ont accomplis depuis le vote de notre Résolution 2053 (2015) sur ce sujet.

Avant de conclure cette brève introduction, je voudrais remercier tous ceux qui m’ont permis de mieux comprendre les rouages complexes – et souvent opaques, hélas! – du monde du football, notamment les dirigeants de la FIFA et de l’UEFA, des experts externes et des journalistes ainsi que les experts du Conseil de l’Europe travaillant dans le cadre de l’Accord partiel élargi sur le sport, sans oublier les experts de la Commission européenne. Surtout, je ne voudrais pas manquer d’exprimer mes plus vifs remerciements à M. Roberto Fasino, chef du secrétariat de la commission de la culture.

Ce rapport n’est pas dirigé contre le football, bien au contraire. Ensemble, nous devons tout mettre en œuvre afin d’éviter de tuer la poule aux œufs d’or – ou plutôt, en l’espèce, le ballon d’or.

LA PRÉSIDENTE – Merci, Madame la rapporteure, il vous restera 5 minutes pour répondre tout à l’heure aux orateurs.

La discussion générale est ouverte. Nous commençons par les porte-paroles des groupes.

M. PSYCHOGIOS (Grèce), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Je remercie Mme la rapporteure de son travail. Le sport et l’exercice physique font pleinement partie de la vie de millions de personnes dans le monde. Aux yeux des membres du Groupe pour la gauche unitaire européenne, le sport – en particulier le football – doit être envisagé sous l’angle des besoins sociaux. Autrement dit, l’accès à des infrastructures sportives de qualité et à la pratique d’une activité physique constitue selon nous un droit social élémentaire.

Dans ce contexte, nous estimons que la pratique de base du sport – en particulier du football – doit être garantie par tous les États membres. Le sport encourage l’éthique, la solidarité, l’esprit d’équipe et le fair-play. Il promeut de nombreux droits de l’homme, notamment la dignité humaine, la diversité et la non-discrimination. Ces caractéristiques, précieuses dans le cadre des activités sportives, permettent également d’éduquer les jeunes de toutes les classes sociales en leur apprenant à partager et à se comporter démocratiquement dans leur vie quotidienne. Le sport peut également constituer un instrument clé pour l’intégration des migrants et des réfugiés. En effet, il promeut la coopération, le dialogue et la participation active de chacun.

En tout état de cause, les phénomènes relevés dans les rapports tels que le dopage, les paris illégaux, la manipulation des compétitions sportives, la violence, les discours racistes, les trafics, la corruption et les cas d’évasion fiscale ont des retombées négatives sur le monde du sport.

Il convient de noter que des progrès ont été enregistrés, notamment en matière de structure de la gouvernance – je pense en particulier à la composition des commissions formant les instances juridictionnelles de l’UEFA et de la FIFA. Nous avons mesuré l’engagement de ces organisations pour ce qui est de lutter contre les discriminations et promouvoir la tolérance et le respect mutuels ainsi que l’égalité entre les sexes et la responsabilité sociale, par le biais de politiques et de programmes spécifiques tels que le Conseil consultatif des droits de l’homme créé par la FIFA. Un certain nombre de problèmes persistent néanmoins.

Par ailleurs, nous nous félicitons des progrès enregistrés par la FIFA et l’UEFA au sujet de l’inclusion de critères visant à protéger les droits de l’homme dans le processus de sélection d’un pays hôte de grands évènements sportifs, conformément à la Résolution 2053 (2015) de l’Assemblée parlementaire relative à la réforme de la gouvernance du football.

En particulier, il faut saluer les initiatives spécifiques visant à superviser et améliorer les conditions de travail en vigueur sur les chantiers des éditions 2018 et 2022 de la Coupe du monde de football, organisées respectivement en Fédération de Russie et au Qatar. Toutefois, il est indispensable que la FIFA poursuive la politique visant à consolider les améliorations constatées dans ces deux pays. Il faut faire en sorte que les avantages accordés aux travailleurs de ce secteur, ainsi que ceux de tous les autres, soient respectés. Enfin, il faut également respecter les communautés, les économies et les produits locaux lors de l’accueil d’un évènement sportif de grande envergure.

M. ZAVOLI (Saint-Marin), porte-parole du Groupe des démocrates libres* – Chers collègues, j’aimerais partager avec vous, au nom du Groupe des démocrates libres, quelques observations à propos de la gouvernance moderne du sport. Il ne fait aucun doute que le football – qui est l’une de mes passions – et le sport en général appartiennent à tous les citoyens et ne sauraient se soustraire aux lois. Des scandales de dopage, de paris illégaux, de truquage des résultats et de corruption ont émaillé le monde du sport, suscitant la méfiance et l’éloignement des supporters.

Rétablir la confiance et la crédibilité du sport suppose d’y rétablir l’intégrité, la transparence et la responsabilité au moyen de mécanismes contribuant à protéger et diffuser un profond changement culturel. Les systèmes de mise en conformité devront être rendus plus contraignants. Pour plusieurs raisons, il importe d’introduire des codes d’éthique et de créer des structures modernes de gouvernance rappelant les grands principes et précisant les compétences de chaque instance; il importe également que la violation de ces normes et de ces principes entraîne des poursuites judiciaires.

Il est à présent nécessaire d’établir des critères communs de bonne gouvernance applicables à toute organisation, de la plus petite à la plus grande. Chacun doit faire preuve d’un engagement accru et consentir davantage d’efforts afin que le monde du sport – tant les sportifs que les équipes techniques et les dirigeants – devienne un modèle pour tous, jeunes et moins jeunes, et ne subisse plus de graves préjudices tels que ceux qu’il a connus. C’est pourquoi je souhaite que nous élaborions des solutions, que nous trouvions les mots justes permettant d’éduquer et de sensibiliser chacun aux grands principes du sport que nous partageons.

Mme HOVHANNISYAN (Arménie), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Je commencerai par féliciter nos rapporteurs, Mme Brasseur et M. Mogens Jensen, de l’excellent travail qu’ils ont accompli. Nous sommes favorables à vos rapports, chers collègues.

Le sujet est d’actualité. Chacun sait que les fonds investis dans le football au niveau mondial augmentent jour après jour en raison de l’intérêt croissant suscité par cette activité. De surcroît, de nouveaux hommes d’affaires et des organisations disposant de ressources financières considérables investissent dans le football mondial afin d’augmenter leurs profits.

À l’évidence, le football est devenu plus qu’un jeu ou un divertissement. C’est une carrière et un modèle d’affaires prometteur, procurant des droits de retransmission en hausse constante, avec la participation aux différents événements sportifs majeurs et une concurrence de plus en plus féroce entre les clubs – surtout les grands –, ce qui augmente les ventes de billets de ces derniers. La mondialisation du football touche également le marché des transferts: le prix des joueurs ne cesse de croître.

On a tendance à considérer que ce n’est pas un problème, qu’un nouveau modèle d’affaires est apparu au profit de l’économie mondiale. Quoi qu’il en soit, la commercialisation du football accroît considérablement l’écart financier entre les grands et les petits clubs. Les grands peuvent se permettre de payer des centaines de millions d’euros pour acquérir un joueur alors que des clubs plus modestes peinent à survivre avec un budget annuel inférieur à 5 % de celui des grands clubs.

Les grands clubs devraient se satisfaire de joueurs aux exigences moindres. Auparavant, des mécanismes tels que la propriété conjointe de joueurs ou des accords pour la participation des jeunes étaient utiles pour les petits clubs, tout en offrant des possibilités d’emploi aux jeunes joueurs dans des clubs un peu plus petits pour accroître leurs compétences et, par la suite, augmenter leur prix sur le marché des transferts. Devenus de grands joueurs, ils arrivaient dans les grands clubs et les petits clubs percevaient de l’argent, ce qui leur permettait de poursuivre leurs activités. Ce modèle a été aboli, ce qui a eu des retombées négatives sur les petits clubs.

L’introduction des nouvelles réglementations sur le fair-play a également eu un effet négatif sur les clubs moyens ou petits. N’oublions pas que les efforts visant à améliorer la transparence du monde du football ont débuté dans les années 1980 et 1990. Toutefois, les mesures prises dans ce domaine n’ont pas pris en compte les différences entre les grands et les petits clubs, entre l’élite et les joueurs de moindre niveau.

Mes chers collègues, je suis favorable aux projet de résolution et de recommandation qui sont soumis à notre vote. Nous devons réfléchir à ce qu’il convient de faire et à ce que nous pouvons entreprendre dans ce domaine.

M. MAVROTAS (Grèce), porte-parole du Groupe des socialistes, démocrates et verts* – Nous examinons deux importants rapports relatifs à la gouvernance sportive. J’évoquerai d’abord celui de Mme Brasseur, concernant le football, lequel n’est pas seulement un sport: c’est aussi un secteur d’activité économique et financière. L’avidité et les risques de dérive font peser sur lui des menaces. La FIFA et l’UEFA souffrent d’un manque de transparence, de mauvaises pratiques et même de cas de corruption. Pour remédier à cette situation, il faut établir des règles de gouvernance strictes. Le rapport propose de mettre en place un système susceptible de garantir la transparence, d’établir des responsabilités et de respecter des principes éthiques.

Des avancées positives ont déjà été réalisées, comme la limitation de la durée des mandats des responsables de la FIFA et de l’UEFA. Il faut soutenir ces efforts et faire en sorte qu’ils soient poursuivis. L’autonomie du mouvement sportif ne doit pas s’accompagner d’un manque de transparence.

Par ailleurs, le rapport de Mme Brasseur évoque l’éducation, la formation et le développement personnel des athlètes. De fait, la vie ne s’arrête pas avec la carrière sportive, c’est-à-dire à l’âge de 30 ou 35 ans.

Enfin, le rapport se réfère au respect des droits de l’homme et au rôle que peut jouer le football pour faire passer des messages concernant le racisme, les discours de haine, ou encore l’égalité des droits au-delà de la condition sociale, de la couleur et de la religion.

Le rapport présenté par M. Mogens Jensen porte sur les fédérations sportives en général. Des scandales – dopage, corruption, ou encore matches truqués – ternissent souvent l’image de l’athlétisme. Nous ne saurions l’accepter. Les fédérations sportives ne doivent pas faire preuve d’opacité. La transparence, la responsabilité peuvent être évaluées selon des indices précis. Il est ainsi possible d’organiser une meilleure gouvernance en fonction de critères. Le rapport souligne le rôle que peut jouer le Conseil de l’Europe dans l’élaboration d’une bonne gouvernance sportive.

Mesdames, Messieurs, le sport est une activité très importante. N’oublions pas ces trois mots clés: transparence, responsabilité et intégrité.

Je félicite Mme Brasseur et M. Mogens Jensen pour ces deux importants rapports.

M. KILIÇ (Turquie), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Tout d’abord, je félicite les deux rapporteurs pour leur travail sur des sujets importants. Les solutions proposées sont d’une importance cruciale.

En tant qu’ancien ministre des Sports de la République de Turquie durant presque quatre ans, je suis conscient des problèmes et des risques qui menacent le football et le sport de façon générale. Dans de nombreuses régions du monde, «football» est le premier mot qui vient à l’esprit quand on parle du sport. La fascination exercée par le football résulte de nombreux facteurs sociologiques, économiques, psychologiques et politiques. Par sa nature, il touche toutes les franges de la société. Malheureusement, comme l’indiquent les rapports, le football, comme le monde sportif en général, se heurte à des problèmes graves.

Les scandales qui ont émergé, ces dernières années, montrent que le secteur sportif, devenu énorme, est désormais un univers où seul l’argent importe, tandis que les vraies valeurs sportives s’effritent. Les allégations de mauvaise gestion financière, de pots-de-vin et de corruption sont devenues légion dans la gestion du monde sportif au niveau international. Cette situation, conjuguée à une culture de l’impunité, aboutit au développement d’allégations graves de problèmes de gestion et de dopage dans de nombreuses fédérations internationales.

Par ailleurs, la propreté du sport n’est pas toujours garantie. Le Conseil de l’Europe est très actif dans ce domaine, de même que d’autres organisations internationales, pour combattre le dopage et prôner un sport propre. Les accusations de manquements aux règles éthiques de la part de certaines institutions, agences de paris, athlètes ou d’autres personnes posent elles aussi problème.

Les propositions faites par les deux rapporteurs pour résoudre les problèmes auxquels se heurte le sport, notamment celles concernant la supervision et l’évaluation éthiques de la gestion du sport sont d’une très bonne qualité.

Enfin, pour l’avenir du sport, il est important de mettre en place des normes en matière de bonne gouvernance mondiale comprenant des principes élémentaires, avec la participation de toutes les parties prenantes. Il est non moins essentiel d’encourager les fédérations nationales à adopter ces normes de bonne gouvernance, sans pour autant s’immiscer dans leur souveraineté ou leur travail quotidien. Dans cette perspective, les fédérations internationales devraient guider et coordonner les fédérations nationales.

M. COMTE (Suisse), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe – Madame la Présidente, chers collègues, les rapports qui nous sont soumis s’inscrivent dans un cadre plus large, dans un travail de longue haleine du Conseil de l’Europe, puisque plusieurs instruments ont été élaborés par notre Organisation dans le domaine du sport – je pense en particulier aux paris truqués et au dopage. Il apparaît donc logique de se préoccuper de la question de la gouvernance. En sport comme en politique, il y a des qualités qui sont communes, notamment la persévérance et l’endurance, qui doivent nous inciter à continuer à nous préoccuper de cette question.

Le sport est à la charnière entre le domaine public et le domaine privé. Certains aspects nécessitent une action des collectivités publiques. Nous voulons toutes et tous que le sport joue un rôle positif dans notre société, un rôle d’intégration, de promotion de la santé et de développement personnel, mais nous savons bien que le sport doit parfois se protéger contre lui-même. Nous devons l’aider à le faire car il recèle aussi un certain nombre de dangers.

Comme l’écrit Mme Brasseur, il est essentiel de ne pas mélanger les rôles: les associations sportives doivent garder leur pleine autonomie. Elles doivent assumer la responsabilité de mettre en œuvre une gouvernance efficace. Il ne doit pas y avoir d’ingérence du politique dans le fonctionnement des organisations sportives. Le passé a montré que l’ingérence politique peut entraîner des problèmes de conflits d’intérêts, de corruption, voire de dopage institutionnalisé. Il ne faut donc pas que le remède soit pire que le mal. Nous devons préserver l’autonomie des organisations sportives. Toutefois, ces dernières ne sont pas au-dessus des lois, et elles doivent rendre des comptes.

C’est d’autant plus vrai que les collectivités publiques mettent souvent de l’argent à disposition des organisations sportives, notamment pour l’organisation de grandes manifestations.

Nous pouvons saluer les efforts qui ont déjà été réalisés par plusieurs organisations sportives pour améliorer leur gouvernance, mais le processus sera de longue durée et bien des efforts sont encore nécessaires. C’est un peu le mythe de Sisyphe: lorsque le rocher est arrivé en haut de la colline, il arrive parfois qu’il retombe de l’autre côté, et tout le travail est à recommencer.

Ce travail de longue haleine va encore nous occuper pendant de nombreuses années. Mais il est essentiel que nous maintenions le dialogue entre les collectivités publiques et les organisations sportives afin d’améliorer la gouvernance et combattre la corruption. Cela ne doit pas être un bras de fer entre les autorités politiques et les organisations sportives: il est tout simplement nécessaire qu’elles travaillent main dans la main pour affronter ces défis. D’ailleurs, les organisations sportives ont aussi besoin de nous pour traduire devant la justice les personnes qui ne respectent pas les règles.

Un changement de mentalité est en train de s’opérer. Cela prendra encore du temps, mais nous pouvons saluer le travail réalisé par notre Assemblée et poursuivre dans cette voie.

M. REISS (France) – Chers collègues, depuis de nombreuses années, nous évoquons dans cette Assemblée la question de la bonne gouvernance du sport, en particulier celle du football. Le comportement de certains joueurs, mais aussi les scandales de corruption, ont donné malheureusement une image déplorable de ce sport.

Ancien sportif, j’ai toujours été attaché à l’exemplarité du sport pour nos jeunes. Cette exemplarité doit venir de tous: sportifs, dirigeants et organismes gestionnaires des compétitions sportives. Chacun doit prendre ses responsabilités et veiller à transmettre, dans le football comme dans d’autres sports, les valeurs de solidarité, d’égalité et de respect, mais aussi le sens de l’effort: autant de valeurs qui peuvent aider les jeunes à se construire et qui, portées par le sport, ne seront que mieux défendues dans la société.

L’exemplarité concerne aussi l’équilibre entre les enjeux sportifs et un véritable fair-play financier. Cette règle de l’UEFA semble avoir été oubliée par certains, alors qu’elle vise à construire un football sain et une concurrence loyale. Les sommes de certains transferts, notamment en France, relèvent parfois de l’indécence, surtout dans un contexte de crise où nombre de nos concitoyens connaissent des difficultés financières. Sur cet aspect, le football est spécifique, puisque dans les autres sports, même professionnels, on est loin d’une telle démesure. C’est une vraie question: quel est le prix du rêve? Quel est le prix d’une équipe capable de gagner la Ligue des champions? Personnellement, je pense que la recherche de l’exploit sportif ne doit pas tout piétiner. L’argent roi signerait la fin des valeurs.

Face à ces dérives, sans parler des problèmes de corruption au plus haut niveau, nous devons être fermes et punir tout acte répréhensible. Des règles ont été fixées pour le fair-play financier: qu’elles soient appliquées. Des personnes sont convaincues de corruption: qu’elles soient condamnées. Des joueurs sont convaincus de dopage: que les punitions soient exemplaires. La popularité du football est indéniable; ce sport doit être capable de redorer son image.

D’une certaine façon, la percée assez récente du football féminin a été salutaire. Loin des excès, les compétitions féminines ont montré un football intéressant et porteur de valeurs. Il convient de noter que la diffusion de compétitions internationales féminines de football à la télévision a été largement suivie en France, preuve d’un intérêt du public, et peut-être d’un public élargi, pour un football propre.

L’engagement de la FIFA pour promouvoir le football féminin peut être salutaire. Nous avons tous en tête le film Joue-la comme Beckham, dans lequel une jeune fille issue de l’immigration indienne en Grande-Bretagne va, par le football, lutter contre les idées reçues. Car c’est aussi cela, l’exemplarité du sport: l’égalité entre filles et garçons, la lutte contre les discriminations – autant de combats qui sont au cœur des valeurs du Conseil de l’Europe.

Bravo, Madame Brasseur et Monsieur Jensen, pour ces excellents rapports!

Lord FOULKES (Royaume-Uni)* – Nous voici face à deux excellents rapports. Mon propos portera sur celui qui traite de la bonne gouvernance du football.

J’ai été président d’un club de football à Édimbourg qui a transféré sa propriété à ses fans par le biais d’une fondation: 8 500 supporters contribuent, à raison de 10 à 500 livres Sterling par mois, au financement du fonctionnement du club et à la gestion de la billetterie. À mon avis, c’est la bonne solution pour les clubs de football.

J’ai vu ce qu’était la gouvernance du football et j’ai identifié trois problèmes.

Le premier est que les fédérations nationales de football pensent qu’elles sont au-dessus des lois. Or elles doivent tenir compte de ce que disent les gouvernements. Nous constatons le même phénomène au niveau international. La pression exercée par la FIFA sur Mme Brasseur et la désinformation véhiculée par cette fédération sur le rapport sont honteuses. Il faut le dire publiquement.

Le deuxième a déjà été évoqué: c’est l’argent. Les transferts mais aussi la propriété des clubs posent problème.

Il devient de plus difficile pour les supporters – et c’est le troisième problème – de s’impliquer dans la vie des clubs. Or ce sont eux qui font vivre les clubs.

Il faut donc soutenir ce rapport en demandant à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe de l’adopter, et remercier Mme Brasseur pour son travail, mais aussi pour son courage face aux pressions qu’elle a subies.

M. WENAWESER (Liechtenstein)* – Je remercie Mme Brasseur et M. Jensen pour leurs rapports et pour leurs déclarations liminaires fort équilibrées, qui vont permettre un bon débat.

N’oublions pas que notre propre Organisation n’est pas à l’abri de toute critique en matière de gouvernance. La FIFA a commencé à essayer de mettre de l’ordre chez elle. Le rapport de Mme Brasseur a provoqué des réactions au sein de cette fédération. Il y a quinze jours, M. Infantino et notre Secrétaire Général, M. Jagland, ont signé une déclaration d’intention manifestant le souhait des deux organisations de travailler ensemble.

Madame Brasseur, je vous remercie vraiment de tout cœur pour le travail que vous avez accompli. Le dialogue permettra d’avancer, mais je pense surtout que la FIFA, à travers les mesures adoptées, a surtout essayé de désamorcer la bombe que constituait votre rapport, de lui faire perdre une grande part de son intérêt et, si je puis dire, de noyer le poisson.

Vous savez que Mark Pieth, expert en droit pénal, a dit après l’éviction du responsable de la Commission d’éthique, que la réforme de la FIFA était morte. Lui-même a travaillé pour la FIFA et a été à l’initiative de tentatives de réforme. MM. Borbély et Eckert ont essayé de mener des enquêtes. Il est vrai que plus de 70 responsables ont été condamnés dans le monde. Des centaines d’autres dossiers devaient être examinés mais, aujourd’hui, ces instructions sont menacées. En fait, on a fait de nombreux pas en arrière.

Dernièrement, il a été dit que la FIFA était un système sans règles. En fait, elle fonctionne en fonction des goûts et des préférences de ses dirigeants.

La FIFA devrait se sentir concernée et se réformer, et notre Assemblée doit rester vigilante et faire en sorte de ne pas être instrumentalisée par la FIFA.

M. STROE (Roumanie)* – Je remercie les rapporteurs pour leur travail qui vient à point nommé, au moment où la bonne réputation du sport est menacée par des scandales de corruption, de triche et de harcèlement.

Le sport occupe depuis toujours une place spéciale dans le cœur des gens. Pendant 2 500 ans, depuis son apparition en Grèce jusqu’à aujourd’hui, le sport a été animé par les mêmes valeurs: excellence individuelle, esprit d’équipe, respect des règles, paix. Ces valeurs transcendent les frontières nationales. C’est pourquoi il est essentiel que les organisations sportives conservent une certaine autonomie afin de les promouvoir et de servir de plateforme pour la diplomatie du sport.

Néanmoins, nous ne pouvons ignorer la face plus sombre du monde sportif décrite en détail par nos collègues. Ainsi que cela est préconisé dans les rapports, il convient de promouvoir des normes de gouvernance sportive plus exigeantes fondées sur les principes de démocratie, de transparence et d’inclusion capables de servir les intérêts de toutes les parties prenantes.

Les autorités publiques figurent au nombre des parties prenantes intéressées et devraient réclamer avec davantage de force publication des comptes et transparence. Les fonds publics sont indispensables pour l’organisation des manifestations sportives de grande envergure. Sans infrastructure publique, sans subvention, championnats du monde et autres coupes du monde ne pourraient exister. Il est donc légitime que les autorités demandent aux organisations sportives de répondre de leur gestion comme le font toutes les entités recevant des fonds publics.

Les États membres doivent nouer un dialogue ferme, veiller à la démocratisation de la gouvernance sportive, prendre des mesures destinées à améliorer la transparence des comptes et la responsabilité des dirigeants.

M. ÖNAL (Turquie)* – Je remercie nos rapporteurs qui ont souligné l’importance et la gravité des problèmes contemporains de corruption tout en formulant des recommandations pour les résoudre. C’est un pas important en avant.

J’ai joué au football en qualité de licencié pendant seize ans. J’ai été arbitre, je connais bien le monde du sport. Je sais que la corruption, la triche, le dopage sont une réalité et entraînent un désintérêt croissant pour le sport en général et le football en particulier.

La réputation du monde sportif est ternie et la mauvaise gouvernance du sport, caractérisée par le manque de transparence et l’impunité pour les auteurs d’infractions, porte une grande responsabilité dans ce phénomène.

Le sport ne doit plus être géré en contradiction avec les normes actuelles de bonne gouvernance. Nous devons établir des normes modernes au niveau international s’imposant à tous les clubs sportifs.

Certes, le football est plus qu’un sport, c’est une activité économique qui doit être profitable. Mais il ne peut être envisagé sous le seul aspect financier car il appartient à la vie sociale des citoyens.

Mme la rapporteure l’a souligné, trop peu d’argent nui au football et trop d’argent tue le football. Cette remarque est très pertinente. L’argent a eu cette influence négative en raison du manque de normes internationales de gouvernance. Je soutiens donc ces rapports et leurs préconisations.

Baroness MASSEY (Royaume-Uni)* – Je félicite les rapporteurs pour leur travail très détaillé. Il n’est jamais facile d’exposer les manquements d’une institution, ils l’ont fait et je salue leur courage.

Le sport est normalement associé à des valeurs positives telles que l’esprit d’équipe, la santé, le bien-être. La majorité des sportifs sont fidèles à ces valeurs mais malheureusement dans les dernières années, la réputation du sport a été ternie. Ce qui a récemment été publié sur la corruption dans le tennis sous le titre Game, set and match-fix, le résume avec éloquence. Nous sommes désormais habitués aux scandales de dopage, de blanchiment d’argent, de paris irréguliers, d’abus sexuels dans le monde sportif.

Une meilleure gouvernance est indispensable à tous les niveaux, local, national et international. Comme le préconisent les deux rapports, il convient d’établir des normes harmonisées et de contrôler leur respect.

Le Royaume-Uni a subi les conséquences négatives des dérives déjà évoquées; les exemples sont nombreux et tristement célèbres. Mais un Code de gouvernance du sport anglais a été publié en avril 2017. J’aimerais le citer. Il exige plus de compétences et de diversité dans les conseils d’administration, avec un minimum de 30% de femmes, une plus grande transparence grâce à la publication d’informations sur la structure, la stratégie et les résultats financiers des organisations sportives, des dispositions statutaires accordant la primauté du conseil d’administration dans la prise de décision.

La Fédération anglaise de football a accepté ces réformes, y compris en ce qui concerne la composition de son conseil d’administration. Je pense que cela fera évoluer les mentalités et débouchera sur un changement d’état d’esprit chez les arbitres, les propriétaires de club, les joueurs, les gouvernements et même les fans et les spectateurs. Tout le monde doit être impliqué avec à la clé de meilleurs exemples de bons comportement pour nos jeunes, ce qui permettra de concrétiser l’idéal du sport.

M. RZAYEV (Azerbaïdjan)* – Il a été souligné, à juste titre, que le sport est en lui-même sain et que les mœurs des dirigeants sportifs doivent être irréprochables. Nous devons soutenir nos sportifs car les footballeurs ne sont pas coupables des manipulations commises à leur insu. Le football est un sport très spectaculaire et les grandes compétitions sont attendues avec impatience par un très grand nombre de gens.

Dans mon pays, les retransmissions sportives sont très suivies. Pour la première fois dans l’histoire du football en Azerbaïdjan, l’équipe du Haut-Karabakh s’est qualifiée pour participer à la Ligue des champions et j’espère qu’elle pourra aller le plus loin possible dans cette compétition. Malheureusement, le club de la ville d’Agdam, au Haut-Karabakh, n’a pas pu jouer dans sa propre ville alors qu’il a été accueilli en Espagne, en Italie et dans d’autres pays encore. En effet, la ville d’Agdam est sous occupation arménienne. J’espère que nous veillerons tous ensemble à ce que ce club puisse participer à d’autres compétitions et accueillir d’autres équipes dans sa ville.

Mme McCARTHY (Royaume-Uni)* – Je soutiens les recommandations du rapport de Mme Brasseur, en particulier le fait que des mesures doivent être prises de toute urgence pour protéger les ouvriers du bâtiment au Qatar et pas seulement ceux qui travaillent à la construction des sites de la future Coupe du monde de football.

Le football est un sport mondial et la Premier League anglaise est suivie par des millions, voire des milliards de personnes de par le monde, y compris dans les endroits les plus reculés du globe. La commercialisation de ce si beau sport est devenue une évidence. Son ampleur est parfois surprenante. Ainsi, le club de Manchester United a un partenaire pour les boissons en Chine, un autre pour les boissons isotoniques en Indonésie et encore un autre pour les compléments nutritionnels au Japon.

Certaines transactions doivent à cet égard nous inciter à la plus grande vigilance. Je pense notamment à celle qu’a effectuée l’année dernière le club de Liverpool FC. Il a conclu un accord de sponsoring avec une société chinoise basée à Hong-Kong, la Tibet Water Resources, par lequel cette société bénéficie de divers droits promotionnels, incluant les médias numériques et l’accès aux sportifs. Un nombre croissant d’entreprises d’embouteillage d’eau cherchent à s’implanter au Tibet pour bénéficier des sources de certains des plus grands fleuves d’Asie et des glaciers du Tibet. On appelle en effet les montagnes du plateau tibétain le «troisième pôle» de notre planète.

On ne peut pas parler véritablement, s’agissant de ce phénomène, de violation des droits de l’homme. Toutefois, le Tibet libre et les acteurs de la société tibétaine ont à juste titre exprimé leur préoccupation quant à des activités qui ne sont rendues possibles qu’en raison de la présence de la Chine. Le peuple tibétain n’a pas eu voix au chapitre sur l’utilisation de ses ressources. L’attractivité des eaux tibétaines ne fait qu’exacerber la menace que font peser le changement climatique et la pollution. En soutenant l’implantation de grandes marques au Tibet, le Gouvernement chinois cherche à normaliser son oppression sur le peuple tibétain, ce qui conduit à détruire la culture du Tibet et à mépriser les droits de l’homme.

Les recommandations de Mme Brasseur sont les bienvenues, mais il faut aller encore plus loin. Il faut veiller, alors que le football continue à s’enrichir, à ce que les droits de l’homme en général, et ceux des Tibétains en particulier, n’en souffrent pas.

M. VALLINI (France) – Il est nécessaire de restaurer la confiance dans les instances dirigeantes du sport, notamment du football, qui doivent faire l’objet de contrôles plus stricts. Il est nécessaire que les États membres se dotent d’organes efficaces permettant de prévenir et de punir les infractions, le dopage ou la corruption. Une convention pourrait être mise en place au sein du Conseil de l’Europe pour faciliter le contrôle des grandes fédérations telles que l’UEFA ou la FIFA. En outre, une norme de certification ISO sur la gouvernance des organisations sportives semble être une idée intéressante. Les subventions publiques pourraient être conditionnées à cette certification.

Je tiens également à dénoncer, comme la rapporteure, le montant indécent des transferts de footballeurs d’un club à l’autre. Ils ont atteint l’été dernier des sommets, notamment en France avec le transfert du joueur brésilien Neymar au PSG. Je pense aussi au cas de Mbappé. Ces transferts ne sont plus supportables. Ils atteignent des montants vraiment inacceptables. Au-delà des règles du fair-play financier, qui sont insuffisantes, il faut envisager la mise en place d’un plafonnement au niveau de nos 47 pays. Ce serait un grand pas qu’accomplirait le Conseil de l’Europe, s’il initiait cette démarche, pour remettre de la morale publique dans le football professionnel. J’ajoute qu’on pourrait aussi envisager qu’un pourcentage du montant de ces transferts soit prélevé par nos États afin d’abonder l’aide publique au développement, notamment en direction de l’éducation sportive des enfants et des jeunes des pays du Sud.

M. VEJKEY (Hongrie)* – La Hongrie est attachée aux valeurs du travail, de l’honnêteté, de la tolérance et de la loyauté. Le football, l’un des sports les plus populaires au monde, doit de même reposer sur les principes du fair-play, du respect mutuel et de la tolérance. C’est pourquoi toutes les personnes qui font partie du monde du football, les entraîneurs, les joueurs, les spectateurs et les organisations locales, nationales et internationales, doivent montrer l’exemple. Les problèmes survenus à la FIFA et les comportements injustifiés, qui sont relatés dans le rapport, doivent faire l’objet d’enquêtes.

Nous nous félicitons de la conclusion d’un accord de coopération entre la FIFA et le Conseil de l’Europe. Il peut être considéré comme un grand pas en avant vers un meilleur respect des droits de l’homme dans le monde du sport.

Aujourd’hui, ce dernier est menacé par une concurrence de plus en plus marquée sur le marché, par l’absence de mécanismes de gouvernance adéquats, par les paris illégaux et par le dopage. Ces problèmes ne pourront être résolus que si l’on respecte l’autonomie du monde sportif et que si l’on agit en étroite coopération avec les organisations sportives et les acteurs du secteur.

Les diverses sollicitations intervenues au niveau international en vue de l’organisation d’événements sportifs ont révélé les problèmes de concurrence et d’influence négative entre la politique et le sport. La Hongrie considère que la Convention du Conseil de l’Europe sur la manipulation des compétitions sportives pourrait constituer un moyen efficace de prévenir et de sanctionner les activités illégales au niveau international. La Hongrie a signé cette convention et elle est déterminée à la ratifier.

M. GOLUB (Ukraine)* – Compte tenu des tentatives de certains acteurs d’utiliser les sports à des fins lucratives et politiques, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe doit prêter une attention toute particulière aux activités de gestion du sport dans les différents pays du monde. Ces activités devraient se dérouler dans la transparence. La victoire définitive sur la corruption dépendra de notre désir commun de lutter en ce sens.

Malheureusement, tous les pays ne choisissent pas la transparence, et cela est vrai tant pour la politique que pour le sport. 2018 sera l’année de la Coupe du monde de football en Fédération de Russie, ce que nous ne pouvons que regretter, l’équipe nationale russe ayant été interdite de Jeux olympiques, interdiction motivée par les tentatives russes de recourir à des méthodes répréhensibles pour obtenir des victoires sportives: doping et corruption caractérisent la gestion du sport en Fédération de Russie. C’est la raison pour laquelle je vous demande, chers collègues, de saisir les organismes compétents en vue de priver la Fédération de Russie du droit d’accueillir la Coupe du monde de football en 2018.

La Fédération de Russie utilise le sport pour atteindre ses objectifs ambitieux et illégaux de politique internationale, des objectifs qui violent les droits de l’homme. Je vous rappelle qu’à la fin des Jeux olympiques de 2014 à Sotchi, le Kremlin a envahi l’Ukraine, annexé la Crimée et commencé la guerre au Donbass. Ainsi, Vladimir Poutine, vainqueur et triomphateur, a mené à bien les Olympiades et enlevé la Crimée à son voisin plus faible que lui.

Le sport devenant un phénomène important dans notre univers mondialisé, nous devons définir pour cette activité des normes rigoureuses et un nouveau code de gestion. La politique de l’État doit stimuler et encourager et non corrompre, contraindre ou présenter de faux bilans. Les organisations sportives doivent se concentrer sur la création de systèmes optimisés et efficaces, sur la mise au point de stratégies permettant d’initier davantage de gens au sport, de donner aux citoyens le goût du sport dès la petite enfance et pour toute la vie et de définir le sport comme l’un des axes stratégiques de fonctionnement et de développement de l’État.

M. MÜLLER (Suisse)* – Je dois tout d’abord vous avouer que j’ai un intérêt dans cette affaire, car j’ai été président du FC Saint-Gall qui, avec le Havre, est le plus ancien club d’Europe continentale. J’ai par ailleurs assuré des fonctions techniques au sein de la FIFA lors de certains matches internationaux, visant à veiller au respect des règles en dehors du terrain et à assurer la sécurité des stades.

Je ferai trois remarques. Tout d’abord, il s’agit là du quatrième rapport du Conseil de l’Europe sur la FIFA et déjà nous parlons d’un cinquième! Je vous rappelle que la FIFA est une organisation sportive mondiale. Les conceptions européennes, notamment celles du Conseil de l’Europe, et le droit européen ne sont donc pas les seuls à s’appliquer. Nous devons également tenir compte du point de vue des organisations supranationales africaines, asiatiques, sud-américaines et océaniennes qui sont tout aussi valables s’agissant de la gouvernance de la FIFA.

Ensuite, en ce qui concerne l’exigence de qualité pour les rapports du Conseil de l’Europe, l’Assemblée parlementaire ne peut se prononcer que sur le texte de la résolution. L’exposé des motifs, en effet, ne peut être modifié, ce qui est gênant, car il manque des éléments factuels dûment établis. Il est incontestable que le Comité exécutif de la FIFA souffrait de corruption. Cependant, faire des allusions, des présomptions ou des suppositions dans l’exposé des motifs n’est pas correct. Ecrire «apparemment», «il semble que», sans citer les sources dénote un problème de fiabilité du rapport. Dans le tableau récapitulatif du rapport de M. Mogens Jensen, en termes de qualité de la gouvernance, la FIFA est mieux notée que le Conseil de l’Europe! Alors, comment peut-il avoir l’audace de vouloir placer la FIFA sous son contrôle politique – ou sa tutelle?

Par ailleurs, il existe des contradictions entre les deux rapports que nous examinons; cela pose un problème de fiabilité et de crédibilité. Il a fallu un certain temps au Conseil de l’Europe lui-même pour rétablir sa crédibilité, après une affaire de corruption. Alors pouvons-nous vraiment prétendre dicter sa conduite à la FIFA?

Enfin, l’approche présentée par le Secrétaire Général Jagland, qui a évoqué dans un protocole d’accord que le Conseil de l’Europe aiderait la FIFA à poursuivre ses réformes, me paraît plus prometteuse. Car avec le rapport Brasseur, nous n’avançons pas; de sorte que je le rejetterai. En revanche, je soutiendrai le rapport de M. Mogens Jensen qui constitue une bonne base pour le dialogue futur.

LA PRÉSIDENTE – M. Petter Eide, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

Mme HEINRICH (Allemagne)* – Si les deux rapports qui nous sont présentés sont remarquables, je parlerai plus particulièrement de celui de Mme Brasseur qui retient davantage l’attention.

Le football est un sport universel. Certes, dans ma circonscription le club de football évolue en troisième division, mais de nombreux jeunes s’engagent dans ce sport, et grâce au rapport de Mme Brasseur je vais pouvoir leur expliquer ce que fait le Conseil de l’Europe. La plupart des gens sont au courant des accusations de corruption qui pèsent sur la FIFA. Nous savons bien que l’attribution des grands événements est sujette à caution, que les stades sont construits par des ouvriers qui travaillent dans des conditions contestables. Les gens le savent, cela les énerve car ils se sentent impuissants, et ils condamnent la FIFA au motif que les dirigeants se servent grassement. Mais s’il est vrai qu’il s’agit du quatrième rapport et qu’un cinquième est à venir, Anne Brasseur dénonce les liens trop étroits qui existent entre le sport, la politique et l’argent, ce qui vaut aussi pour nos organisations nationales. Apparemment, elle a touché un nerf sensible, l’orateur précédent l’a démontré.

On accuse Mme Brasseur de ne défendre que son point de vue personnel et de fonder son rapport sur des rumeurs et des a priori. Je peux vous dire que nous avons travaillé pendant des années pour établir les faits, pour mettre un terme à une histoire sans fin, justement.

La FIFA nous dit qu’elle accepte les critiques constructives, y compris de la part de certains dont l’image est elle aussi entachée de corruption. Eh bien, j’ai une bonne nouvelle pour la FIFA: les critiques d’Anne Brasseur sont très constructives! La rapporteure compte parmi ceux qui œuvrent le plus pour mettre en lumière les phénomènes déviants au sein de notre propre Organisation.

Comme certains l’ont évoqué, nous avons bien cerné les choses. Et pour tous les fanatiques de football, et d’autres sports, je pense qu’il serait bon que les liens entre les gestionnaires des clubs sportifs et les comptes au Panama soient moins étroits, afin qu’on ne puisse retenir qu’une seule image: l’enthousiasme des sportifs et des supporters.

Mme HUOVINEN (Finlande)* – Je remercie les rapporteurs pour leurs rapports exhaustifs. Le football m’a accompagné toute ma vie: mon fils y joue et mon mari le regardent, tous deux sont passionnés par ce sport. Quant à moi, je suis très engagée, depuis plusieurs années, dans la politique sportive en Finlande. La participation de tout un chacun doit être assurée en matière de sport et de gouvernance du sport, notamment celle des femmes et des jeunes. Les immigrés doivent aussi trouver leur place, et pas seulement en tant qu’athlètes.

En Finlande, pour renforcer le dialogue entre les communautés sportives et les décideurs, nous avons cherché de nouvelles voies. Depuis 100 ans, un conseil national joue le rôle d’expert en la matière. Il évalue l’impact du sport dans la société en général, recueille des statistiques concernant la pratique, le respect de la transparence et de l’égalité de genre, et s’intéresse aux questions d’éthique.

Nous avons besoin d’un plus grand nombre de forums internationaux, où les décideurs pourront débattre de tous les aspects de la gouvernance du sport et des questions d’intégrité. Toutes les questions délicates doivent être abordées: dopage, zones sombres de financement, racisme, discours de haine, truquage des matches et défaut de transparence. Le sport doit, certes, être indépendant. Mais, quand le sport est financé par les gouvernements, les citoyens ont le droit d’exiger transparence, ouverture, bonne gouvernance et obligation redditionnelle.

Le sport doit permettre à des personnes d’origines culturelle, politique, religieuse et sociale diverses de dialoguer. Le sport favorise la compréhension mutuelle, la solidarité, la diversité et, en définitive, les droits de l’homme. Le fair-play ne doit pas rester théorique, il doit être un principe qui oriente toutes ces activités. Quant à nous, parlementaires, comme l’écrit Mme Brasseur dans son rapport, notre responsabilité est toute particulière concernant les enfants et les jeunes.

Mme PRUNĂ (Roumanie)* – Nous devons aborder la question sous deux angles. Premièrement, je suis heureuse de voir que nous avons entamé une discussion franche sur la corruption. Je suis représentante d’un parti qui souhaite éradiquer la corruption à tous les niveaux, et je connais très bien les conséquences négatives des pratiques qui en relèvent. Tout acte de corruption, de petite ou de grande ampleur, continuera de ternir l’image du football. Sans réaction, le sport pourrait être anéanti à jamais. Les arguments de nos deux rapporteurs sont convaincants. Un cadre législatif plus robuste, capable d’accélérer les poursuites, est nécessaire, tout comme un observatoire international indépendant, chargé de superviser les questions liées à la gouvernance du football et des autres sports.

Deuxièmement, nous devons examiner comment le football peut promouvoir la tolérance, la responsabilité sociale, mettre en place des programmes d’éducation et des campagnes de sensibilisation pour combattre le harcèlement sexuel ou la discrimination entre les sexes. Arrêtons-nous sur un point: la violence domestique, qui touche de nombreuses femmes et de nombreux enfants. Les cas sont très nombreux, surtout dans les communautés les plus pauvres. Les auteurs sont dans une grande majorité des hommes. Les hommes représentent aussi le public majoritaire du football. Le football pourrait changer la donne dans la vie de ces personnes, car il les touche comme aucune autre institution traditionnelle. Les joueurs sont considérés comme des modèles par des millions de personnes.

L’année dernière, une initiative a eu lieu, soutenue par 61 femmes eurodéputées, par la Commission européenne et par notre Secrétaire Général, M. Jagland. Elle combattait la violence à l’égard des femmes par le biais du football. L’UEFA a été invitée à diffuser, à trois reprises, lors de chaque rencontre intervenant dans ce cadre ou de tout match national, un clip vidéo de quinze secondes, montrant des joueurs célèbres, avec un écran noir et sans fond sonore, où apparaissait l’inscription «Mettons un terme à la violence à l’égard des femmes». Imaginez l’effet produit sur la vie des jeunes hommes en Europe et dans le reste du monde. J’appelle tous les membres ici présents à soutenir cette initiative. Faisons entendre notre voix. Nous n’avons besoin que de trois fois quinze secondes pour diffuser ce message et mettre un terme à la violence à l’égard des femmes.

M. GONÇALVES (Portugal)* – L’évolution récente du sport conduit à de nouvelles préoccupations. Le sport, tel nous l’avons connu, a en partie disparu et s’est ouvert, entre autres, à d’importants intérêts économiques et financiers. Alors que le sport influence des secteurs tels que les médias et la médecine, des dérives préoccupantes ont surgi, comme le dopage, le non-respect des droits des athlètes, la discrimination, le racisme et même des enjeux politiques.

Les valeurs qu’on associe au sport font partie du patrimoine de nos sociétés. Les sportifs sont des références, des icônes, des exemples, et à ce titre, le sport engendre une immense passion auprès des populations, notamment le football. Malheureusement, cette image du sport, école de la vie, est aujourd’hui bien ternie. L’actualité sportive est souvent liée à des scandales, à la corruption et à des faits qui restent souvent impunis.

L’opinion publique considère que le sport est un milieu avec trop d’argent, où se mêlent beaucoup d’intérêts. Le sentiment général est qu’il existe dans le sport un manque de transparence, qui ne peut plus être toléré. Cette nouvelle réalité n’a pas été toujours suivie, par les législateurs, sur le plan national comme international, d’une défense de la transparence sportive.

Les deux projets en discussion aujourd’hui vont dans ce sens. Tous deux appellent à une bonne et nouvelle gouvernance. Ils défendent des changements et des réformes en profondeur dans un secteur qui génère des recettes extraordinaires et qui devient un acteur décisif et stratégique dans le monde économique et, comme le savons tous, dans le monde politique. Aujourd’hui, nous avons face à nous un très grand défi, qui est celui de garantir les valeurs du sport et de l’éthique dans un monde où le sport étend son territoire, mais pas toujours sur des terrains qui sont vraiment les siens. Ainsi, il faut une nouvelle gouvernance sportive adaptée aux nouvelles réalités, avec de nouveaux acteurs, et des institutions qui puissent se réformer, afin de garantir un avenir au sport dans le respect de l’éthique, des droits de l’homme et de la solidarité. Tout ce qui est proposé n’aura d’effet positif qu’avec l’implication de nous tous, parlementaires, dans nos pays respectifs.

Je viens d’un pays, le Portugal, passionné par le sport et surtout par le football. Notre parlement vient d’approuver une nouvelle législation que je considère comme un pas important dans la défense des valeurs de l’éthique, de la loyauté et de la vérité sportive. C’est un premier pas mais c’est un pas important qui doit être repris par nous tous dans nos pays respectifs. Il faut, chers collègues, que l’on revienne aux vraies valeurs du sport.

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège)* – La Norvège est un petit pays de 5 millions d’habitants, mais nous comptons plus de 2 millions d’affiliés à la confédération des sports, qui est la plus grande organisation norvégienne. Elle réunit des gens de tous âges et contribue à la santé publique. En Norvège, la confédération sportive, créée en 1861, a été le premier mouvement de masse. La confédération s’appuie essentiellement sur le travail des volontaires et des bénévoles, même si, dans le sport, l’argent est roi. Tout événement sportif, au niveau tant local que national ou international, doit beaucoup à l’action des bénévoles et des volontaires – la vie 12 000 clubs en dépend. Sans eux, rien ne se ferait, il n’y aurait pas de sport de masse.

Saper l’éthique du sport, c’est menacer la démocratie elle-même: c’est la raison pour laquelle les rapports de M. Jensen et Mme Brasseur sont étroitement liés. Nous avons tendance à associer les sportifs à des valeurs très positives ; ils sont considérés comme des modèles de fair-play dont les performances sont impressionnantes. Alors, chaque fois qu’est dénoncé un cas de tricherie ou de corruption, notre admiration diminue et la méfiance augmente, et l’investissement d’argent public dans le sport se trouve contesté. Plus important encore, une mauvaise gouvernance au niveau international bafoue le travail de tous les volontaires et bénévoles, qui sont, je le répète, indispensables.

Et cela est vrai pour tous les sports. Certes, on parle surtout de la FIFA, laquelle, en réunissant 211 États membres, a d’ailleurs d’autant plus de raisons d’être exemplaire! Le football est le sport qui regroupe le plus grand nombre de pratiquants et de supporters, celui qui attire aussi sans doute le plus d’argent. Il faut néanmoins citer à cet égard les pratiques positives qui existent: un processus de réforme interne à la FIFA a été initié, qui met notamment l’accent sur l’égalité hommes-femmes, ce qui débouchera peut-être sur une plus grande intégration des femmes dans le football, à tous les niveaux; l’accord passé entre la FIFA et le Conseil de l’Europe, visant à mieux défendre les droits de l’homme dans le sport, sur la base des conventions existant en matière de lutte contre le dopage, de trucage des matches et de violence.

Cet accord, et les mesures proposées dans les rapports de M. Jensen et Mme Brasseur – en particulier l’idée d’une nouvelle convention sur la gouvernance du sport –, pourraient permettre d’établir de nouvelles normes applicables à tous les sports.

M. KERN (France) – Je salue les travaux de nos rapporteurs, Mme Brasseur et M. Jensen. Je souscris aux orientations de leurs projets de résolution et de recommandation, qui sont ambitieux et exigeants.

Je partage naturellement leur conviction commune qu’il faut promouvoir une pratique du sport inclusive et une gouvernance transparente. On le sait, la réalité est, hélas, bien différente, et le sport, y compris au niveau olympique, est trop souvent affecté par de multiples scandales.

La France n’est pas restée inactive dans ce domaine. Une loi adoptée en 2017 vise à préserver l’éthique du sport, à renforcer la régulation et la transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs. En termes de gestion des fédérations et des ligues professionnelles, cette loi assure la préservation de l’éthique dans le sport en rendant obligatoire la création d’une charte d’éthique et de déontologie, dont l’application est contrôlée par un comité indépendant spécialement institué à cette fin. Dans un souci de transparence, la loi comporte des dispositions relatives à la prévention des conflits d’intérêts.

Cette loi vise aussi à renforcer la régulation des flux financiers. Le contrôle administratif, juridique et financier des associations et sociétés sportives est accru, de même que celui de l’activité des agents sportifs. Les projets d’achat, de cession et de changement d’actionnaires des sociétés sportives seront mieux évalués.

Plus généralement, vis-à-vis des fédérations sportives et ligues professionnelles, l’action de l’État doit être recentrée sur des missions de coordination, de réglementation et de contrôle, notamment éthique. Il est donc nécessaire de moderniser les modes de gouvernance des fédérations sportives.

En effet, selon moi, l’implication de la puissance publique dans le développement du sport est une nécessité compte tenu, à la fois, des valeurs que porte le sport, de sa dimension territoriale et de son rôle économique croissant. Le soutien au sport fait intervenir l’ensemble des politiques publiques. C’est pourquoi il est indispensable d’assurer la lisibilité de l’action publique. Or, face à des fédérations et des ligues puissantes, l’absence d’un interlocuteur public solide, doté d’une feuille de route claire, constitue assurément une faiblesse pour le développement harmonieux du sport. Dans ce domaine comme dans d’autres, l’effacement de l’État n’est pas une bonne chose.

En novembre dernier, la ministre française des Sports a installé un comité de pilotage sur la gouvernance du sport. L’objectif est de repenser l’organisation du sport français par une autonomie accrue du mouvement sportif et une clarification du rôle et des responsabilités de l’État, des collectivités territoriales, du mouvement sportif et des partenaires privés. D’ici à juin prochain, des propositions seront formulées de afin d’établir en France un nouveau cadre institutionnel et organisationnel du sport et de développer la pratique du sport dans la société.

LA PRÉSIDENTE – Il nous faut maintenant interrompre la liste des orateurs.

J’appelle la réplique de la commission.

M. Mogens JENSEN (Danemark), rapporteur* – Je crois parler aussi au nom d’Anne Brasseur en exprimant mes plus vifs remerciements pour le soutien que les groupes politiques et les orateurs ont apporté à nos deux rapports.

Si le mien peut paraître technique, c’est qu’il propose des outils concrets pour avancer dans la recherche d’une meilleure gouvernance dans le sport international. Certaines organisations sportives ont reconnu notre travail et réagi positivement à nos propositions.

Concernant la FIFA, je précise qu’une réunion a eu lieu entre le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe et cette fédération sur la façon de coopérer dans la mise en œuvre des différentes conventions. Le Secrétaire Général, à qui j’ai indiqué que nous espérions que les messages adressés à la FIFA par nos rapports seraient entendus, a confirmé que nos propositions seraient discutées.

J’aimerais remercier tous ceux qui nous ont aidés à rédiger ces rapports: les experts Jeans Sejer Andersen, Andreas Sellliaas, Antonio de Marco, la Secrétaire Générale adjointe du Conseil de l’Europe, Gabriella Battaini-Dragoni, Stan Frossard, le secrétaire général de l’Accord partiel élargi sur le sport (APES), qui a suivi ces discussions, ainsi que le président de la Fédération nationale danoise du sport, Niels Nygaard. Je remercie également le secrétariat de la commission, qui a effectué un travail considérable. Enfin, merci à toi, Anne: je crois que nous avons formé un bon tandem!

Mme BRASSEUR (Luxembourg), rapporteure – Je m’associe aux remerciements exprimés à l’instant par notre collègue et remercie à mon tour tous ceux qui ont collaboré à l’élaboration de mon rapport, dans notre Assemblée et à l’extérieur, et qui y sont cités. Je remercie également les 24 intervenants qui ont pris la parole aujourd’hui, parmi lesquels six se sont exprimés au nom de leur groupe et 18 à titre personnel; tous – sauf un – soutiennent le texte. Faute de temps, j’ai dû laisser de côté certains aspects du sujet lors de mon intervention liminaire ainsi que dans mon rapport. Je les évoquerai brièvement.

Tout d’abord, le sport féminin – notamment le football féminin – progresse. J’ai en particulier rencontré de formidables joueuses de football, attachées à des valeurs tout aussi valables pour les femmes que pour les hommes et utiles au football comme à nos sociétés. Il importe que les instances dirigeantes du football comportent davantage de femmes et nous devons veiller à ce que les instances nationales assurent également la bonne représentation des femmes.

L’un des orateurs a évoqué les supporteurs. Sans supporteurs, le football n’est rien. Il faut donc leur rendre hommage, les comprendre et les soutenir et ne pas instrumentaliser – comme c’est hélas le cas – leur passion pour le sport, en particulier pour le football, à des fins politiques ou financières. Je n’ai rien contre l’argent, mais je n’aime pas les excès que l’on constate dans le milieu du football.

S’agissant du développement du sport, j’approuve notre collègue français qui préconisait tout à l’heure d’agir davantage en matière d’éducation physique des jeunes, éventuellement par le biais d’un prélèvement sur les transferts de joueurs. Une partie de l’argent dépensé dans ce cadre doit être mis à la disposition du développement sportif. Je rappelle dans mon rapport que l’aide au développement des instances du football doit aller de pair avec le développement de l’éducation des jeunes et de leur formation professionnelle.

Nous ne pouvons obtenir des résultats si nous nous contentons d’apprendre aux jeunes à jouer au football. Un sur mille en fera peut-être sa vie; quant aux autres, il faut leur dispenser conjointement une formation professionnelle afin qu’ils puissent ensuite gagner leur vie hors du monde du football et contribuer eux aussi au développement de leur pays.

Enfin, notre collègue Müller a fait siens les reproches que m’a adressés la FIFA. Selon lui, mon rapport est fondé sur des rumeurs. Or j’ai bien lu le communiqué de la FIFA: il n’y relève aucune erreur. Certes, je procède à des interprétations et j’écris dans mon rapport – dont j’assume l’entière responsabilité – «je pense» ou «je crois», mais j’ai tout de même le droit de penser et d’imaginer! Comme je l’ai par ailleurs indiqué lors d’un entretien avec M. Infantino et Mme Samoura, membres des instances dirigeantes de la FIFA, s’il faut mettre en œuvre les réformes, notamment celles mentionnées dans l’addendum au rapport de M. Jensen, et suivre leur application, il faut surtout adopter l’état d’esprit adéquat – et c’est là où le bât blesse!

Que penser lorsque l’on constate que la FIFA remplace treize des quinze membres de son comité d’éthique? Comment peut-on prétendre que des progrès sont réalisés lorsque le président de la commission de gouvernance de la FIFA est limogé pour avoir osé dire que M. Moutko, Vice-Premier ministre russe chargé des sports, ne peut être membre des instances exécutives? La crédibilité de l’institution n’en sort pas renforcée! Tel est le message que je souhaitais adresser à la FIFA. Malheureusement, il n’y a pas été reçu.

Nonobstant, la majorité de nos collègues soutiennent le rapport de M. Jensen et le mien ainsi que les projets de résolution et le projet de recommandation afférents. Je vous remercie de votre soutien, chers collègues, car le football est un sport fabuleux auquel le soutien de nous tous est indispensable.

Mme de SANTA ANA (Espagne), présidente de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias* – Il faut veiller à la bonne gouvernance du sport en général et du football en particulier, qui sont des composantes essentielles du tissu social et de puissants outils de promotion des valeurs universelles. Dès lors qu’il s’agit de construire des sociétés meilleures, nous ne saurions laisser le sport de côté.

Celui-ci doit être en mesure d’accomplir sa mission essentielle. Nous souhaitons que le message dont il est porteur soit crédible. Pour ce faire, il faut que tous ses acteurs adhèrent explicitement à ses valeurs et que nos comportements procèdent bel et bien des valeurs fondamentales telles que les droits de l’homme, la primauté du droit et la démocratie ainsi que le concept d’espace commun.

Nous devons procéder ainsi en vue du bien commun. Le sport ne saurait être un royaume sur lequel règneraient ses dignitaires. Il faut donc améliorer la situation, sans prétendre donner des leçons – d’autant moins que le monde politique est en proie à des difficultés similaires et que les responsables politiques ne montrent pas toujours l’exemple alors même qu’on le leur demande. Notre Assemblée a un rôle important à jouer en matière d’amélioration de la gouvernance du sport. J’attache une importance toute particulière aux nombreuses propositions énumérées dans les deux rapports, qui visent à établir un partenariat plus étroit entre l’Assemblée parlementaire et les instances de gouvernance du sport.

Les projets de résolution et le projet de recommandation présentés par notre commission comportent des propositions aussi novatrices que concrètes susceptibles de produire des changements significatifs, notamment l’avènement d’une nouvelle culture en matière de gouvernance du sport à l’échelle mondiale. Nombreux sont ceux qui attendent de connaître la décision que nous prendrons aujourd’hui et espèrent que nous pourrons faire réellement évoluer la gouvernance du sport à l’avenir. Nous ne devons pas les décevoir. C’est pourquoi je vous demande, chers collègues, de soutenir sans relâche le projet de résolution et le projet de recommandation, y compris dans vos pays respectifs.

LA PRÉSIDENTE – La discussion générale est close.

Je vous rappelle que l’élection du Commissaire aux droits de l’homme est en cours dans la rotonde située derrière la Présidence. Si vous ne l’avez pas encore fait, vous pouvez voter jusqu’à 13 heures. Le scrutin sera ensuite suspendu et sera repris entre 15 h 30 et 17 heures.

Nous en venons au premier rapport intitulé «Vers un cadre pour une gouvernance sportive moderne» (Doc. 14464 et Addendum).

La commission de la culture a présenté un projet de résolution sur lequel 8 amendements ont été déposés, et un projet de recommandation, sur lequel 3 amendements ont été déposés.

Nous examinons tout d’abord le projet de résolution.

J’ai cru comprendre que la présidente de la commission souhaite proposer à l’Assemblée de considérer les amendements 2, 3, 4, 10, 11, 5, 6 et 1, qui ont été adoptés à l’unanimité par la commission, comme adoptés par l’Assemblée.

Est-ce bien le cas, Madame la présidente?

Mme de SANTA ANA (Espagne), présidente de la commission* – Oui, Madame la Présidente.

LA PRÉSIDENTE – Il n’y a pas d’objection. En conséquence, ces amendements sont déclarés définitivement adoptés.

LE PRÉSIDENT – Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 14464 et Addendum, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (108 voix pour, 7 voix contre et 6 abstentions).

LA PRÉSIDENTE – Nous examinons maintenant le projet de recommandation.

J’ai cru comprendre que la présidente de la commission de la culture souhaite proposer à l’Assemblée de considérer les amendements 7,8 et 9, qui ont été adoptés à l’unanimité par la commission, comme adoptés par l’Assemblée.

Est-ce bien le cas, Madame la présidente?

Mme de SANTA-ANNA (Espagne), présidente de la commission* – Oui, Madame la Présidente.

LA PRÉSIDENTE – Il n’y a pas d’opposition. En conséquence, ces amendements sont déclarés adoptés définitivement.

Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de recommandation contenu dans le Doc. 14464, tel qu’il a été amendé.

Je vous rappelle que la majorité requise est celle des deux tiers des suffrages exprimés.

Le projet de recommandation, amendé, est adopté (126 voix pour, 6 voix contre et 8 abstentions).

LA PRÉSIDENTE – Nous en venons au deuxième rapport sur «la bonne gouvernance du football». La commission de la culture a présenté un projet de résolution sur lequel 3 amendements ont été déposés.

J’ai cru comprendre que la présidente de la commission souhaite proposer à l’Assemblée de considérer les amendements 1, 2 et 3, qui ont été adoptés à l’unanimité par la commission, comme adoptés par l’Assemblée.

Est-ce bien le cas, Madame la présidente?

Mme de SANTA-ANNA (Espagne), présidente de la commission* – Oui, Madame la Présidente.

LA PRÉSIDENTE – Il n’y a pas d’opposition. En conséquence, ces amendements sont déclarés adoptés définitivement.

Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 14452, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (131 voix pour, 5 voix contre et 10 abstentions).

LA PRÉSIDENTE – Je vous rappelle que l’élection du Commissaire aux droits de l’homme est en cours dans la rotonde située derrière la Présidence. Si vous ne l’avez pas encore fait, vous pouvez voter jusqu’à 13 heures. Le scrutin sera ensuite suspendu et sera repris entre 15 heures et 17 heures.

M. Nicoletti, Président de l’Assemblée, remplace Mme Trisse au fauteuil présidentiel.

4. Discours de M. Serzh Sargsyan, Président de l’Arménie

LE PRÉSIDENT* – Monsieur le Président, c’est un honneur insigne et un véritable plaisir de vous souhaiter la bienvenue dans cet hémicycle. Le Conseil de l’Europe est une organisation réunissant 47 États européens et notre Assemblée parlementaire est et demeure une instance paneuropéenne de dialogue politique où les opinions et les aspirations des dirigeants de tous nos États membres devraient être représentées. Par conséquent, votre visite, aujourd’hui, est très importante pour nous.

Monsieur le Président, vous vous êtes rendu à Strasbourg en octobre 2013 alors que l’Arménie présidait le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe. À l’époque, vous veniez d’entamer la première année de votre deuxième mandat présidentiel. Vous nous aviez présenté un programme politique clair et ambitieux, destiné à consolider et à renforcer les institutions démocratiques de l’Arménie.

Vous avez enregistré de nombreux progrès depuis lors. Ce matin, nous avons eu la possibilité d’aborder ensemble les nombreuses mesures que vos autorités ont prises, notamment la réforme constitutionnelle et la réforme électorale, ainsi que le renforcement de l’indépendance du pouvoir judiciaire et l’amélioration de la lutte contre la corruption.

La transition politique vers un nouveau système parlementaire dans votre pays est aujourd’hui pratiquement terminée, mais différentes questions liées à ces réformes restent encore d’actualité. Je tiens à vous dire, Monsieur le Président, que vous pouvez compter sur le plein soutien du Conseil de l’Europe et de notre Assemblée dans ce domaine.

Monsieur le Président, vous êtes bien au fait des difficultés que rencontre aujourd’hui le Conseil de l’Europe. Je crois sincèrement que nous ne pourrons surmonter ces difficultés que si tous les États membres et toutes les institutions du Conseil de l’Europe, ainsi que toutes les parties prenantes concernées, réaffirment leur engagement en faveur des idéaux d’unité européenne et vis-à-vis des valeurs et principes de la démocratie, des droits de l’homme et de l’État de droit.

Grâce à notre discussion ce matin, je sais que l’attachement de l’Arménie à ces idéaux et à des principes est solide. Par conséquent, nous attendons avec impatience votre avis.

Monsieur le Président, merci d’être parmi nous. Vous avez la parole.

M. SARGSYAN, Président de l’Arménie* – Monsieur le Président de l’Assemblée parlementaire, Monsieur le Secrétaire Général, Mesdames et Messieurs les membres de l’Assemblée parlementaire, je commencerai par vous saluer, Monsieur Nicoletti, et vous féliciter chaleureusement pour votre élection à la présidence de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

Votre mandat commence à un moment plutôt difficile, mais je suis persuadé que, grâce à votre expérience considérable et à vos qualités personnelles, vous êtes l’homme de la situation pour garantir le succès et la réputation de l’Organisation.

Je voudrais aussi rendre hommage à Mme Kyriakides, qui a été une brillante Présidente de votre Assemblée.

La dernière fois que j’ai eu l’honneur de m’adresser à vous à cette tribune, c’était en 2013, à l’occasion de la présidence arménienne du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe. Cette présidence a été un moment clé pour notre intégration au sein de la grande famille du Conseil de l’Europe. Je pense que nous avons été à la hauteur de notre mission. Demain, 25 janvier, nous fêterons l’anniversaire de notre adhésion au Conseil de l’Europe, il y aura exactement dix-sept ans.

Au moment où nous avons rejoint cette grande organisation européenne, nous étions conscients du chemin qui s’ouvrait devant nous. Nous savions qu’il ne serait pas facile de construire et de renforcer la démocratie sans le soutien direct et actif du Conseil de l’Europe et de ses différentes structures.

La volonté politique et notre engagement constructif conjoint nous ont permis de surmonter de nombreux obstacles et d’améliorer grandement la situation. Aujourd’hui, au moment où je m’adresse à vous, je peux fièrement affirmer que nous avons honoré nos principaux engagements à l’égard du Conseil de l’Europe en termes de démocratisation du pays. Ce n’est pas simplement moi qui l’affirme; nos progrès ont été dument reconnus par les rapports de suivi des organes du Conseil de l’Europe.

Nous poursuivons nos efforts pour nous intégrer dans l’espace juridique européen. L’Arménie a déjà signé près de 70 conventions. Il ne s’agit pas simplement de tenir nos promesses à l’égard de l’Organisation. Ce faisant, nous mettons aussi en œuvre notre propre credo, nos propres convictions. Nous poursuivrons donc dans le même sens. Le rythme des réformes et des progrès devrait d’ailleurs s’accélérer dès le mois d’avril puisque les amendements constitutionnels entreront alors en vigueur.

C’est aussi à ce moment-là que nous allons mettre en œuvre le programme d’activité prévu par notre nouvel accord de partenariat global et renforcé avec l’Union européenne. Vous le savez, une démocratie est un organisme vivant. Depuis 25 ans, nous engageons de nombreux efforts pour créer notre État, et alimenter cet organisme. Nous savons très bien que la démocratie requiert une vigilance constante et des remises en cause permanentes pour adapter le régime aux changements qui ne cessent de se produire.

C’est dans ce sens qu’avec le soutien appuyé du Conseil de l’Europe, nous avons engagé le processus de réforme constitutionnelle en Arménie. Au mois d’avril, ces réformes constitutionnelles conçues avec le Conseil de l’Europe entreront en vigueur. Nous avons ancré notre système autour des principes du Conseil de l’Europe que sont l’État de droit, la démocratie et la protection des droits de l’homme et avons décidé de mettre en place un régime parlementaire. C’est ce que je vous avais annoncé dans cette enceinte dès 2013.

Depuis notre adhésion, nous avons entendu des encouragements, mais aussi les critiques de nos partenaires, et cela nous a aidés. Pendant tout ce temps, nous avons étroitement coopéré avec la Commission de Venise et ses experts. C’est ainsi que nous avons affiné le paquet de réformes constitutionnelles. Nous travaillons dans une atmosphère de confiance mutuelle et nous allons poursuivre dans ce sens pour mettre en place de nouvelles lois, nécessaires au nouveau cadre constitutionnel.

Un nouveau Code électoral est déjà entré en vigueur en Arménie. Cela a permis des progrès considérables. Ce Code a été approuvé de manière transparente en incluant toutes les parties prenantes. Nous avons fait quelque chose d’inédit: pour la première fois dans l’histoire de notre pays, après un scrutin, nous avons publié les listes d’émargement signées. Ce n’est pas une pratique commune, et cela peut d’ailleurs occasionner certains problèmes en termes de protection des données, mais nous avons tenu à le faire afin de renforcer la confiance des électeurs dans le processus électoral.

Le nouveau Code électoral a fait ses preuves lors des élections législatives d’avril 2017, qui ont été suivies par un grand nombre d’observateurs, dont ceux de votre Assemblée. Il importe de souligner que ce nouveau Code électoral a aussi permis de réserver un certain nombre de sièges de notre Assemblée nationale à des représentants des minorités nationales. C’est encore un pas vers une gouvernance plus inclusive.

Actuellement, est en cours une réforme de la justice, du Code pénal et du Code de procédure pénale. Nous revoyons également les lois sur les référendums et sur la Cour constitutionnelle. Nous savons parfaitement que l’État de droit ne peut être protégé que si notre justice est efficace, indépendante et exempte de toute forme de corruption. Bien entendu, dans ce contexte, nous accordons le plus grand prix à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, qui est essentielle à nos yeux et dont nous nous inspirons pour réformer notre justice.

Nous avons déjà, en vertu de cette jurisprudence, réformé un grand nombre de textes et perfectionné nos pratiques. Cela a permis d’améliorer la situation des droits de l’homme dans notre pays. Ces efforts ne sont pas passés inaperçus: la République d’Arménie figure dans le peloton de tête des pays membres du Conseil de l’Europe lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre correctement les arrêts de la Cour européenne.

Nous sommes également convaincus que la protection des droits de l’homme et la consolidation des valeurs démocratiques ne seront pas possibles si nous ne luttons pas en permanence contre la corruption. C’est une priorité à tous les niveaux de la société et à tous les niveaux du monde politique. L’Arménie cherche à se doter d’une nouvelle boîte à outils. Au cours de l’année 2017, l’Assemblée nationale arménienne a adopté à l’unanimité un paquet de lois qui permettent, pour la première fois, la création d’une entité nationale anti-corruption, et ce dans le respect de toutes les normes internationales. Cette entité commencera à fonctionner en 2018, et c’est le parlement qui en élira les membres.

Ce paquet anti-corruption a aussi permis l’adoption d’une loi sur les lanceurs d’alerte et leur protection. Nous avons également créé une incrimination d’enrichissement illicite. Nous sommes déterminés à poursuivre dans cette voie et ne ménagerons pas nos efforts pour éliminer ce fléau qu’est la corruption.

Mesdames et Messieurs les membres de l’Assemblée, depuis notre adhésion au Conseil de l’Europe, l’Arménie a tout fait pour honorer ses obligations et respecter ses engagements au service des valeurs fondamentales de l’Organisation. Ces dernières années, cette Organisation a connu une crise malheureuse et sans précédent, en partie imputable au comportement irresponsable de certains membres de l’Assemblée qui ont bafoué les valeurs du Conseil de l’Europe et gravement compromis sa réputation.

La grande famille qu’est le Conseil de l’Europe est face à un sérieux défi, peut-être le défi le plus grave depuis sa fondation. Ces cas de corruption de membres de l’Assemblée ainsi que les trucages des votes qui en ont résulté ont été exposés au grand jour. Depuis 2014, il est vrai que toute une série de rapports et de résolutions biaisés et infondés avaient suscité une certaine méfiance de la société arménienne à l’égard de l’Assemblée. Mais toutes ces révélations suscitent l’espoir que ces pratiques de corruption seront éphémères. Nous pensons que les cas de corruption seront dument dénoncés, que les résolutions litigieuses adoptées deviendront caduques et que les individus responsables et les puissances qui les téléguident seront enfin discrédités. Je suis convaincu que la commission d’enquête indépendante permettra de mettre un terme à tous ces problèmes et rétablira la confiance des États membres dans l’Organisation.

Depuis notre adhésion, nous faisons tout pour trouver une solution pacifique au conflit du Haut-Karabakh et nous ferons tout pour avoir une influence sur les autorités du Haut-Karabakh dans la recherche d’une solution. Le Conseil de l’Europe n’est pas une instance à même résoudre ce conflit. Mais je voudrais quand même revenir un moment sur nos engagements.

Il y a 30 ans, tout se passait bien apparemment, la paix sembler régner au Haut-Karabakh. L’image était cependant trompeuse car l’Arménie n’avait jamais accepté la décision prise par Staline d’annexer cette terre à l’Azerbaïdjan.

La population était inquiète – et moi-même à titre personnel, j’étais inquiet – car les autorités de Bakou faisaient tout pour chasser les Arméniens de leur foyer historique. Ainsi, alors qu’en 1926, les Arméniens représentaient 90 % de la population de la province, ils n’étaient plus que 77 % en 1988.

En février 1988, les habitants du Haut-Karabakh se sont élevés contre les politiques menées par Bakou et ont décidé d’exercer leur droit à l’autodétermination. J’étais alors en première ligne lors de ce soulèvement. Le Parlement du Haut-Karabakh a pris une décision, les habitants sont descendus pacifiquement dans la rue pour l’appuyer. Quelle a été la réaction de l’Azerbaïdjan? Les Azéris n’ont pas seulement refusé la décision parlementaire, ils se sont livrés à des massacres dans la ville de Soumgaït à des centaines de kilomètres de là. Ils ont commis des actes de vengeance contre les Arméniens.

D’un côté, décision parlementaire et manifestations pacifiques, de l’autre, violences et massacres. Pour travailler à la résolution du conflit, il faut connaître ces faits. Toute tentative de placer les parties prenantes sur un pied d’égalité est vouée à l’échec car il est impossible de traiter de la même manière les auteurs d’un massacre et leurs victimes.

Le 27 février prochain, nous honorerons la mémoire des victimes du massacre de Soumgaït. La politique du massacre est devenue une politique d’État. L’Azerbaïdjan a déclaré une guerre pour détruire les populations arméniennes du Haut-Karabakh. Face à cette menace d’extermination, le Haut-Karabakh a dû se défendre. Je le répète, j’ai été en première ligne sur ce sujet et je n’ai jamais regretté ce choix personnel.

Cependant, l’heure est venue de résoudre ce conflit. Pour cela, il faut respecter scrupuleusement le régime établi par le cessez-le-feu et l’ensemble des engagements pris par le passé. Il faut remédier à l’injustice pour parvenir à la paix, j’y travaillerai sans relâche.

Les parties doivent assumer la coresponsabilité d’une transition pacifique et trouver une solution médiane. Des négociations sont en cours sous les auspices des coprésidents du Groupe de Minsk mis en place par l’OSCE, seul forum internationalement reconnu pour trouver une solution au conflit. La communauté internationale et notamment le Conseil de l’Europe soutiennent ces efforts.

Alors que la paix est indispensable, malheureusement l’Azerbaïdjan n’y est pas prête ainsi qu’en témoigne l’agression d’avril 2016 contre des civils et des prisonniers de guerre en violation du droit international. Cet événement, qui a ravivé le souvenir atroce des massacres de Soumgait, a entravé le processus de négociation. Force est de constater que l’Assemblée du Conseil de l’Europe a fermé les yeux et a apporté de l’eau au moulin de ceux qui refusaient toute solution pacifique. Je lance ici un appel à tous les membres de l’Assemblée afin qu’ils comprennent bien les répercussions des discours partisans sur la sécurité et la paix, toujours précaires au Haut-Karabakh.

En permanence menacé par la guerre, le Haut-Karabakh cherche à construire un régime démocratique respectueux des droits de l’homme. L’Arménie se tient à ses côtés et ne cessera jamais de défendre sa sécurité, ses droits et intérêts. Comme le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe l’a relevé, il ne peut exister de zones grises en Europe en matière de protection des droits de l’homme.

J’espère que dans un avenir pas trop lointain cette Organisation se rangera du côté du Haut-Karabakh et lui apportera son expertise et son savoir-faire; ses habitants le méritent! Ils ont gagné ce droit depuis longtemps!

La protection des droits de l’homme constitue une priorité pour les autorités du Haut-Karabakh. Elles ont d’ailleurs signé la Convention européenne des droits de l’homme en 2015 et se sont engagées à l’appliquer intégralement. Pour elles, la sauvegarde des droits de l’homme ne renvoie pas à des paroles creuses mais à un choix conscient et déterminé.

Le Haut-Karabakh ne peut demeurer en dehors des processus internationaux seulement parce que les autorités de Bakou en ont décidé ainsi, alors que ces autorités bafouent les droits de l’homme et les libertés fondamentales allant jusqu’à faire enlever des figures de l’opposition à l’étranger.

Cela me conduit à évoquer ici la Cour européenne des droits de l’homme. La Cour est saisie de plusieurs requêtes concernant la situation au Haut-Karabakh. Je comprends bien que la CEDH s’occupe de ces questions, mais elle doit le faire uniquement pour éviter justement les fameuses zones grises et garantir les droits de l’homme partout en Europe. Toutefois, dans ses arrêts et décisions, la CEDH ne doit pas adopter de positions politiques qui pourraient avoir un avoir direct négatif sur le processus de négociation. Il faut que la Cour fasse preuve de beaucoup de modération et évite toute politisation de ses arrêts. Il est important qu’elle les traite sans adopter de position politique qui pourrait impacter négativement les négociations. Elle doit faire preuve de modération et éviter de rendre des arrêts politiques.

Notre situation économique reflète les défis qui sont les nôtres. Notre population désire la prospérité et le bien-être mais la situation régionale difficile entrave notre développement économique. Mais nous mobilisons toutes nos ressources pour essayer d’améliorer la situation, notamment en intégrant différentes structures.

En 2013, après notre adhésion à l’Union économique eurasienne, les sceptiques étaient nombreux dans cette Assemblée. Depuis, l’Arménie a prouvé qu’elle pouvait combiner son engagement dans différentes structures et être un modèle de coopération.

Le 24 novembre dernier, en marge du Sommet du Partenariat oriental, à Bruxelles, l’Arménie et l’Union européenne ont conclu un accord de partenariat global et renforcé, qui ouvre un chapitre nouveau dans les relations bilatérales. L’appartenance de l’Arménie à l’Union économique eurasienne n’est donc pas, de toute évidence, un obstacle à d’autres formes d’engagement.

Nous continuerons à nous engager dans différents cadres internationaux et notamment au sein de l’Organisation internationale de la francophonie, qui constitue pour nous une plateforme unique pour défendre non seulement la langue et la culture, mais aussi les droits de l’homme. Nous aurons d’ailleurs l’honneur d’accueillir le 17e Sommet de la Francophonie en octobre 2018 à Erevan. Le thème général de ce sommet sera «Vivre ensemble» et un «pacte francophone pour le vivre ensemble» sera adopté pour renforcer les droits de l’homme, le dialogue interculturel et le dialogue interreligieux. Pour nous, ce ne sont pas que des mots. Les Arméniens savent trop bien quel est le prix des discours de haine, d’intolérance et de discrimination. Nous luttons sans relâche contre ces fléaux.

Mesdames et Messieurs, nous allons célébrer l’année prochaine le 70e anniversaire de la création du Conseil de l’Europe. Ce sera un moment historique pour notre grande famille qui œuvre pour la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales en Europe depuis près de sept décennies. Notre Organisation a été créée à l’origine par 10 États seulement. Aujourd’hui, elle réunit 47 États européens et une population de 820 millions d’Européens. C’est donc un succès considérable, que nous devons chérir.

Nous ne devons pas ménager nos efforts pour mettre au point un programme positif visant à renforcer le rôle et le poids du Conseil de l’Europe. Mais la mission de notre Organisation va plus loin encore: elle doit jouer un grand rôle non seulement sur le plan politique, mais aussi en termes de civilisation. Je crois que le Conseil de l’Europe a besoin de nouveaux stimuli pour redéfinir son rôle et sa place dans l’architecture politique européenne. Il faut adapter nos mécanismes et nos dispositifs aux exigences du temps présent pour renforcer notre efficacité. D’ailleurs, l’Arménie suit avec intérêt et gratitude les efforts méritoires du Secrétaire Général du Conseil de l’Europe pour réformer l’Organisation. Nous sommes par ailleurs favorables à la réunion d’un 4e Sommet des chefs d’État et de gouvernement du Conseil de l’Europe. Il constituerait une excellente opportunité pour identifier les principaux problèmes de notre continent et actualiser notre conception d’une Europe plus forte et plus inclusive.

Je crois que les pères fondateurs du Conseil de l’Europe seraient très fiers de voir que nous sommes aujourd’hui 47 États membres, unis sous le même toit. C’est un succès dont l’importance ne doit jamais être sous-estimée et chacun d’entre nous doit tout faire pour préserver cette unité. L’Arménie poursuivra son chemin vers des formes plus accomplies d’engagement et de coopération. Elle est disposée à contribuer, par tous les moyens possibles, au succès du Conseil de l’Europe, notre maison commune de la démocratie et de la primauté du droit.

LE PRÉSIDENT* – Monsieur le Président, je vous remercie pour votre discours, qui a vivement intéressé les membres de notre Assemblée.

Un nombre important de collègues ont exprimé le souhait de vous poser une question. Je leur rappelle que les questions ne doivent pas dépasser 30 secondes et qu’ils doivent poser une question et non faire un discours.

Nous commençons par les porte-paroles des groupes.

Mme SCHOU (Norvège), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Monsieur le Président, après deux mandats, vous achevez actuellement dix ans de présidence.

Quel bilan tirez-vous de cette période? Quelles grandes réalisations l’Arménie a-t-elle accomplies dans son agenda européen, notamment dans le cadre de l’accord signé avec l’Union européenne?

M. LE PRÉSIDENT DE L’ARMÉNIE* – Au cours des dix dernières années, l’Arménie a enregistré des progrès substantiels dans son programme européen, à la fois dans ses relations bilatérales avec les pays de l’Union et dans ses relations multilatérales. En 2016 et 2017, le Comité des Ministres et l’Assemblée parlementaire ont souligné, par l’intermédiaire de différents textes, les progrès accomplis par l’Arménie. Permettez-moi de vous donner une illustration de ces progrès. En 2008, lorsque j’ai été élu au poste de Président de la République d’Arménie, nous étions confrontés à des défis importants. Nos relations avec le Conseil de l’Europe étaient tendues et la menace de sanctions était réelle. Dix ans plus tard, nous parlons principalement des réalisations de l’Arménie.

En ce qui concerne les relations de l’Arménie avec l’Union européenne, comme je l’ai indiqué, le 24 novembre, nous avons conclu un nouvel accord global qui ouvre des perspectives substantielles pour notre pays. Nous nous considérons comme des Européens indépendamment de savoir si les Européens nous considèrent comme tels. Notre coopération avec les pays et les organes européens repose sur cette conviction.

Mme BARNETT (Allemagne), porte-parole du Groupe des socialistes, démocrates et verts* – Des entretiens avec des représentants de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan m’ont convaincue que le conflit qui oppose vos deux pays doit cesser et que les deux parties le souhaitent. Il me semble que vos positions respectives ne sont pas si éloignées qu’on peut le penser.

L’Assemblée parlementaire croit fermement au dialogue. Comment peut-elle vous soutenir dans la recherche d’une solution à ce conflit, dans l’intérêt des populations et de leur avenir?

M. LE PRÉSIDENT DE L’ARMÉNIE* – En effet, les Azerbaïdjanais souhaitent, comme nous, que le conflit prenne fin rapidement. Malheureusement, il existe des différences entre ce que les uns et les autres souhaitent.

Que peut faire la communauté internationale? Je pense que le principal obstacle aux négociations est la position maximaliste et peu réaliste de l’Azerbaïdjan. Si la communauté internationale pouvait aider ce pays à se guérir de ses illusions et à adopter un point de vue plus réaliste, alors rapidement tous ses efforts seraient sans doute couronnés de succès.

Ce conflit mortifère est un obstacle au développement de nos deux nations. Il représente une perte humaine, financière et matérielle considérable. Les négociations sont également entravées par le fait malencontreux que les accords auxquels nous sommes parvenus ne sont pas respectés.

Comme vous le savez, en 2016, l’Azerbaïdjan a lancé des opérations militaires considérables dans le but de récupérer le Haut-Karabakh par la force. Depuis lors, des réunions se sont tenues à Vienne, à Saint-Pétersbourg et à Genève, où étaient présents – pour deux réunions au moins – des hauts-représentants et des médiateurs. Nous étions convenus que la meilleure manière de poursuivre les négociations était de recréer des éléments de confiance. C’est la raison pour laquelle un mécanisme international a été élaboré en vue de mener des enquêtes dans les cas de violation du cessez-le-feu, et d’élargir le mandat du représentant spécial.

Malheureusement, tout cela ne s’est pas concrétisé. Bien au contraire, immédiatement après ces réunions, les plus hauts dirigeants d’Azerbaïdjan ont déclaré que ces propos avaient été tenus par la coprésidence et que la question du Haut-Karabakh était une question intérieure.

Dans de telles circonstances, espérer une résolution rapide de ce conflit n’est pas réaliste.

M. TÜRKEŞ (Turquie), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Monsieur le Président, le protocole établi entre l’Arménie et la Turquie n’a jamais été mis en œuvre. Cela veut-il dire que les relations de nos deux pays vont continuer de stagner? Ou est-il envisageable que l’Arménie normalise ses relations dans la région – peut-être après l’élection présidentielle arménienne qui doit se dérouler au mois de mars prochain?

M. LE PRÉSIDENT DE L’ARMÉNIE – Nous ne comprenons pas très bien les exigences de la Turquie. Après mon élection, j’ai remis les pourparlers entre nos deux pays à l’ordre du jour. J’ai d’ailleurs rencontré le Président turc et des pourparlers ont été organisés en Suisse, en présence des représentants du Conseil de sécurité. Deux documents relatifs au rétablissement des relations entre l’Arménie et la Turquie ont été signés dans lesquels il était convenu que les relations devaient être rétablies sans condition préalable, et qu’ensuite seulement, les difficultés qui existent entre les deux pays feraient l’objet de discussions.

Or, après la signature du protocole, la partie turque n’a eu de cesse de fixer des conditions préalables. De mémoire, il n’existe aucun exemple international similaire: une fois qu’un document est signé, que les parties se sont engagées, la morale et l’éthique exigent qu’elles respectent leurs obligations. Neuf ans plus tard, les Turcs exigent toujours que nous prenions des mesures.

Nous n’accepterons jamais de conditions préalables. La Turquie est un pays puissant, au fort potentiel, contrairement à l’Arménie. Mais cela ne veut pas dire qu’elle puisse exiger des conditions préalables, sinon des pays beaucoup plus puissants que la Turquie sur le plan économique ou démographique abuseraient aussi de leur pouvoir. Par ailleurs, je ne pense pas que les autorités et le peuple turcs accepteraient qu’on leur impose quoi que ce soit.

Avant le printemps, ce protocole sera vidé de son sens par la Turquie. Il serait pourtant judicieux que les Turcs maintiennent la stabilité fragile établie dans la région et abandonnent cette position unilatérale de soutien à l’Azerbaïdjan. Je vous rappelle en effet que, au moment des hostilités, en 2016, la Turquie a été le seul pays au monde à apporter son soutien aux actions militaires de l’Azerbaïdjan. En 4 jours, le Premier ministre et le Président turcs ont, à cinq reprises, déclaré leur soutien à l’Azerbaïdjan.

Que pouvons-nous faire dans de telles circonstances? Ce serait faire insulte à notre peuple que d’accepter de faire des concessions unilatérales pour le rétablissement des relations.

Mme RODRÍGUEZ HERNÁNDEZ (Espagne), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Monsieur le Président, vous avez parlé des mesures prises contre la violence, la corruption, la délinquance et pour lutter contre le terrorisme. S’agissant de l’accord d’association entre l’Europe et l’Arménie – un accord ambitieux –, quelles mesures l’Arménie est-elle prête à prendre pour aller encore plus loin?

M. LE PRÉSIDENT DE L’ARMÉNIE – J’ai évoqué dans mon allocution les efforts que nous avons réalisés en Arménie pour éradiquer la corruption, même si ceux-ci n’ont pas porté les fruits attendus. La corruption est, hélas, un phénomène qui existe en Arménie, comme dans bien d’autres pays.

L’année dernière, nous avons promulgué une loi prévoyant la mise en place d’une commission de prévention de la corruption; une législation dans le droit-fil des meilleures normes européennes. Les membres de cette commission sont élus par le Parlement arménien. Nous avons également adopté une loi relative à la protection des lanceurs d’alerte; nous avons qualifié l’enrichissement illicite de délit; et quelque 500 responsables arméniens sont maintenant tenus de soumettre leur déclaration de patrimoine et de revenus.

Pour l’Arménie, c’est là un nombre assez considérable. Cela correspond aux vœux de la société arménienne. En effet, la société civile contribue à faire la lumière sur ces délits et aide à leur prévention.

Quant aux sanctions, tous les ans les condamnations augmentent, notamment celles concernant des délits de corruption. Le taux de criminalité générale, en 2017, a baissé de 20 %: ce taux porte sur des crimes tels qu’homicides ou autres délits graves. Le système de répression des délits lutte avec acharnement contre la criminalité.

Quant à la différence entre l’accord signé avec l’Union européenne et l’accord précédent, le premier nous offre beaucoup plus d’opportunités. Nous envisageons un plan d’action avec l’Union européenne et le Conseil de l’Europe. Ce dernier nous a d’ailleurs soutenus dans notre processus de réformes. L’accord nécessite une ratification par le Parlement arménien et par les parlements nationaux des 27 États membres de l’Union européenne. Cet accord de partenariat élargi et renforcé couvre tous les domaines d’activité. Il a force de loi, il est contraignant au plan juridique. Nous avons toute confiance dans le fait que cette coopération avec l’Union européenne et les autres organisations européennes ne va que s’approfondir, non pas pour montrer que nous coopérons, mais parce que nous nous considérons comme porteurs des valeurs européennes.

M. PSYCHOGIOS (Grèce), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Quel sera l’impact en matière de droits de l’homme et de libertés de cette transition vers un régime parlementaire? Qu’en est-il des libéralisations prévues par la Constitution? Vous savez que le libéralisme économique n’a fait que creuser les inégalités. Que ferez-vous dans ce contexte?

M. LE PRÉSIDENT DE L’ARMÉNIE* – La transition vers un régime à dominante parlementaire est logique, c’est une étape obligée. Un régime parlementaire est plus inclusif et transparent, c’est une forme de gouvernance qui correspond mieux à nos ambitions en matière de renforcement de la démocratie. Je ne suis pas certain d’avoir bien compris la seconde partie de votre question. L’accent mis sur un régime parlementaire permettra de renforcer la protection des droits de l’homme et des libertés. Ce régime aura plus de poids vis-à-vis de la société civile, sera plus responsable, et permettra plus de coopération avec nos partenaires européens.

M. FOURNIER (France) – Monsieur le Président, mes chers collègues, comment l’Arménie réussit-elle à concilier son appartenance au Partenariat oriental de l’Union européenne, d’une part, et son adhésion à l’Union économique eurasiatique, d’autre part? Comment qualifieriez-vous l’état actuel des relations entre l’Arménie et la Fédération de Russie?

M. LE PRÉSIDENT DE L’ARMÉNIE* – Nous sommes déjà en train de concilier ces deux formes de partenariat. Il ne fait aucun doute que notre adhésion à différentes entités d’intégration se poursuivra avec détermination. Depuis 2010, nous négocions avec l’Union européenne pour signer un nouvel accord, période qui a coïncidé avec notre adhésion à l’Union économique eurasiatique. Les représentants des deux unions savaient très clairement que nous souhaitions nous associer aux deux entités.

Lors de la phase initiale, les deux institutions se sont félicitées de notre position. Cependant, le moment est venu où nos collègues de l’Union européenne ont estimé que notre adhésion à ces deux institutions étaient inconciliables. Nous avons donc été contraints de choisir d’adhérer à l’Union économique eurasiatique. L’économie arménienne est attachée, pour de nombreuses raisons, aux pays de cette Union. Notre histoire est séculaire et nos amitiés historiques. Jusqu’à 80 % des citoyens – une écrasante majorité – soutiennent cette idée d’une plus grande coopération avec l’Union économique eurasiatique.

Cela étant dit, je dois mentionner, en reconnaissant le mérite des responsables de l’Union européenne, que la situation a beaucoup évolué. Les perceptions de l’Union européenne ont changé, notamment lors du sommet de Riga. Une approche sur mesure, différenciée, a été choisie, démontrant qu’il est possible de concilier des participations à différentes institutions d’intégration. Nous avons lancé des pourparlers très riches et sommes arrivés à d’excellents résultats. Vous l’avez constaté, le 24 novembre dernier, nous avons signé un accord avec l’Union européenne.

Pour agir sur les deux fronts, il suffit d’être franc et limpide avec ses partenaires, sans dissimuler les processus de négociation en cours et ses propres volontés. Si les engagements ne sont pas incompatibles, pourquoi ne pas conjuguer ces deux formes d’association? Je considère que nous avons une expérience similaire avec l’Organisation du traité de sécurité collective. Nous en sommes membres, et nous coopérons avec l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord. Cette histoire est vieille de plusieurs années, et j’espère qu’une coopération plus étroite pourra se mettre en place à l’avenir entre l’Union européenne et l’Union économique eurasiatique. Cette coopération est l’avenir. Les problèmes actuels et à venir ne sont pas propices au développement. Ces difficultés font en sorte qu’il y a une gabegie de ressources énormes, qui sont détournées de notre programme, celui qui consiste à améliorer la vie des citoyens.

M. SEYIDOV (Azerbaïdjan)* – Vous êtes un leader de la guerre contre l’Azerbaïdjan. Pourquoi n’avez-vous pas mentionné les massacres de Khodjaly, dans lesquels 800 enfants, vieillards et femmes ont été assassinés par les Arméniens? Pourquoi avoir omis de parler du nettoyage ethnique au Haut-Karabakh et dans les sept régions avoisinantes?

Vous essayez d’abuser la communauté internationale! Comment pouvez-vous organiser votre politique si vous n’êtes pas prêt à appliquer les résolutions du Conseil de l’Europe, ni celles des Nations Unies, de l’Union européenne, et des autres organisations internationales qui se sont exprimées sur l’occupation de notre territoire? Comment faire si vous n’êtes pas disposés à accepter ces points de vue internationaux?

M. LE PRÉSIDENT DE L’ARMÉNIE* – Je vais vous demander de vous calmer, et de garder votre sang-froid.

Il serait bon de ne pas déformer mes propos. Je n’ai jamais été chef de guerre, je n’ai pas eu cet honneur: j’ai participé à une lutte légitime, aux côtés du peuple de Haut-Karabakh. Pourquoi n’ai-je pas mentionné ce qu’il s’est passé à Khodjaly, que vous qualifiez de génocide? Pour une raison très simple: immédiatement après ces événements douloureux, le Président de la République d’Azerbaïdjan a communiqué de manière très détaillée sur les faits, et indiqué les véritables instigateurs de ces massacres. Je regrette vraiment: le génocide est une mauvaise chose. Se rendre coupable d’un génocide est grave, et survivre à un génocide n’est pas un honneur, mais une souffrance. Or, en Azerbaïdjan, vous parlez de génocide et je le regrette: pourquoi devez-vous parler de génocide, alors que cela n’a pas existé, du moins pas du fait des Arméniens?

En ce qui concerne le respect de nos engagements vis-à-vis des organisations internationales, vous vous trompez. Aucune organisation internationale – et en particulier pas le Conseil de sécurité des Nations Unies, que vous avez évoqué – n’a adopté une décision qui aurait été rejetée par l’Arménie. Je vous conseille, lorsque vous abordez un sujet, de le faire en connaissance de cause, et d’étudier la question. Le monde entier sait que le Conseil de sécurité des Nations Unies n’a jamais débattu de la question du Haut-Karabakh.

En 1993, ce Conseil a adopté quatre résolutions pour mettre fin aux hostilités dans cette région. Après chaque résolution, l’Azerbaïdjan a déclaré qu’il ne mettrait pas fin aux combats, a lancé ou tenté de lancer de nouvelles offensives, et a, comme chaque fois, essuyé des pertes. Dans ces quatre résolutions, le seul engagement de l’Arménie était d’user de son influence et de son autorité pour que les hostilités prennent fin. Nous avons honoré cet engagement, et c’est à porter au crédit du gouvernement de l’époque.

Le premier responsable du conflit est l’Azerbaïdjan, et c’est de son seul fait si les combats n’ont pas cessé. Comme vous le savez, en 1994, un accord de cessez-le-feu a été signé, mais pas sous l’influence des résolutions du Conseil de sécurité. Malheureusement, les dispositions de cet accord ne sont pas respectées. Pourtant, il dit très clairement que les hostilités doivent cesser, que des solutions politiques doivent s’y substituer, que des pourparlers doivent être engagés. Vos propos illustrent parfaitement votre position maximaliste dans ce processus de négociation. La xénophobie a pris une telle ampleur en Azerbaïdjan que vous avez expressément dit que vous vouliez récupérer les territoires, sans les Arméniens! Cela est impossible, cela n’arrivera jamais.

Le peuple de Haut-Karabakh se bat pour sa liberté et son autodétermination, et cette lutte ne peut que trouver une issue positive, j’en suis convaincu.

LE PRÉSIDENT* – Nous devons maintenant interrompre la liste des questions. Monsieur le Président, au nom de l’Assemblée, je vous remercie très chaleureusement pour votre discours et vos réponses aux questions.

Chers collègues, je vous informe que le scrutin pour l’élection du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe est suspendu, il rouvrira à 15 h 30 et sera clos à 17 heures.

5. Prochaine séance publique

LE PRÉSIDENT* – La prochaine séance publique aura lieu cet après-midi, à 15 h 30, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

La séance est levée à 13 h 05.

SOMMAIRE

1. Élection du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe (Second tour de scrutin)

2. Modifications dans la composition des commissions

3. Vers un cadre pour une gouvernance sportive moderne

      La bonne gouvernance du football

      (Débat conjoint)

      Présentation par M. Mogens Jensen du rapport de la commission de la culture (Doc. 14464 et Addendum) et par Mme Brasseur du rapport de la commission de la culture (Doc. 14452)

      Orateurs: MM. Psychogios, Zavoli, Mme Hovhannisyan, MM. Mavrotas, Kiliç, Comte, Reiss, Lord Foulkes, MM. Wenaweser, Stroe, Önal, Baroness Massey, M. Rzayev, Mme McCarthy, MM. Vallini, Vejkey, Golub, Müller, Mmes Heinrich, Huovinen, Prunᾰ, M. Gonçalves, Mme Christoffersen, M. Kern

      Réponses des rapporteurs et de Mme la présidente de la commission de la culture

      Votes sur un projet de résolution amendé et un projet de recommandation amendé

      Vote sur un projet de résolution amendé

4. Discours de M. le Président de l’Arménie

      M. Sargsyan

      Questions: Mmes Schou, Barnett, M. Türkes, Mme Rodriguez Hernández, MM. Psychogios, Fournier, Seyidov

5. Prochaine séance publique

Appendix 1 / Annexe 1

Representatives or Substitutes who signed the register of attendance in accordance with Rule 12.2 of the Rules of Procedure. The names of members substituted follow (in brackets) the names of participating members.

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l’article 12.2 du Règlement. Le nom des personnes remplacées suit celui des Membres remplaçant, entre parenthèses.

ÅBERG, Boriana [Ms]

AKTAY, Yasin [Mr]

AMON, Werner [Mr]

AMORUSO, Francesco Maria [Mr] (CENTEMERO, Elena [Ms])

ANDERSON, Donald [Lord] (GALE, Roger [Sir])

ANTTILA, Sirkka-Liisa [Ms]

ARIEV, Volodymyr [Mr]

ARNAUT, Damir [Mr]

BADEA, Viorel Riceard [M.] (BRĂILOIU, Tit-Liviu [Mr])

BALÁŽ, Radovan [Mr] (PAŠKA, Jaroslav [M.])

BALFE, Richard [Lord] (ECCLES, Diana [Lady])

BALIĆ, Marijana [Ms]

BARDELL, Hannah [Ms]

BARNETT, Doris [Ms]

BARTOS, Mónika [Ms] (CSÖBÖR, Katalin [Mme])

BATRINCEA, Vlad [Mr]

BECHT, Olivier [M.]

BERNACKI, Włodzimierz [Mr]

BĒRZINŠ, Andris [M.]

BEUS RICHEMBERGH, Goran [Mr]

BEYER, Peter [Mr]

BILDARRATZ, Jokin [Mr]

BİLGEHAN, Gülsün [Mme]

BILOVOL, Oleksandr [Mr]

BLAHA, Ľuboš [Mr]

BLAZINA, Tamara [Ms] (ZAMPA, Sandra [Ms])

BLONDIN, Maryvonne [Mme]

BOSIĆ, Mladen [Mr]

BOUYX, Bertrand [M.] (WASERMAN, Sylvain [M.])

BRASSEUR, Anne [Mme]

BRUIJN-WEZEMAN, Reina de [Ms] (MAEIJER, Vicky [Ms])

BRUYN, Piet De [Mr]

BUDNER, Margareta [Ms]

BUSHATI, Ervin [Mr]

BYRNE, Liam [Mr]

CERİTOĞLU KURT, Lütfiye İlksen [Ms] (ŞAHİN USTA, Leyla [Ms])

CHRISTOFFERSEN, Lise [Ms]

CILEVIČS, Boriss [Mr] (LAIZĀNE, Inese [Ms])

CORLĂŢEAN, Titus [Mr]

CORSINI, Paolo [Mr]

COZMANCIUC, Corneliu Mugurel [Mr] (PLEȘOIANU, Liviu Ioan Adrian [Mr])

CROWE, Seán [Mr]

CRUCHTEN, Yves [M.]

CSENGER-ZALÁN, Zsolt [Mr]

DALLOZ, Marie-Christine [Mme]

DE TEMMERMAN, Jennifer [Mme]

DESTREBECQ, Olivier [M.]

DI STEFANO, Manlio [Mr]

DİŞLİ, Şaban [Mr]

DIVINA, Sergio [Mr]

DUNDEE, Alexander [The Earl of] [ ]

DURANTON, Nicole [Mme]

EBERLE-STRUB, Susanne [Ms]

EIDE, Petter [Mr] (EIDE, Espen Barth [Mr])

ENGIN, Didem [Ms] (BAYKAL, Deniz [Mr])

ESSL, Franz Leonhard [Mr]

ESTRELA, Edite [Mme] (ROSETA, Helena [Mme])

EVANS, Nigel [Mr]

FARMANYAN, Samvel [Mr]

FATALIYEVA, Sevinj [Ms] (GAFAROVA, Sahiba [Ms])

FIALA, Doris [Mme]

FILIPOVSKI, Dubravka [Ms] (PANTIĆ PILJA, Biljana [Ms])

FOULKES, George [Lord] (PRESCOTT, John [Mr])

FOURNIER, Bernard [M.]

FRIDEZ, Pierre-Alain [M.]

GAMBARO, Adele [Ms]

GARCÍA ALBIOL, Xavier [Mr]

GASHI, Afrim [Mr] (HADRI, Shpresa [Ms])

GATTI, Marco [M.]

GERASHCHENKO, Iryna [Mme]

GHILETCHI, Valeriu [Mr]

GILLAN, Cheryl [Dame]

GOGA, Pavol [M.] (KRESÁK, Peter [Mr])

GOLUB, Vladyslav [Mr] (GONCHARENKO, Oleksii [Mr])

GONÇALVES, Carlos Alberto [M.]

GORGHIU, Alina Ștefania [Ms]

GOUTTEFARDE, Fabien [M.]

GOY-CHAVENT, Sylvie [Mme]

GRAF, Martin [Mr]

GRIN, Jean-Pierre [M.] (HEER, Alfred [Mr])

GUNNARSSON, Jonas [Mr]

GUTIÉRREZ, Antonio [Mr]

HAIDER, Roman [Mr]

HAJDUKOVIĆ, Domagoj [Mr]

HALICKI, Andrzej [Mr]

HEBNER, Martin [Mr] (KLEINWAECHTER, Norbert [Mr])

HEINRICH, Gabriela [Ms]

HENRIKSEN, Martin [Mr]

HOPKINS, Maura [Ms]

HOVHANNISYAN, Arpine [Ms]

HOWELL, John [Mr]

HUNKO, Andrej [Mr]

HUOVINEN, Susanna [Ms] (GUZENINA, Maria [Ms])

HUSEYNOV, Rafael [Mr]

HUSEYNOV, Vusal [Mr] (AGHAYEVA, Ulviyye [Ms])

IBRAHIMOVIĆ, Ervin [Mr] (ĆATOVIĆ, Marija Maja [Ms])

JANIK, Grzegorz [Mr] (JAKUBIAK, Marek [Mr])

JENIŠTA, Luděk [Mr]

JENSEN, Michael Aastrup [Mr]

JENSEN, Mogens [Mr]

JONES, Susan Elan [Ms]

JORDANA, Carles [Mr]

KALMARI, Anne [Ms]

KANDELAKI, Giorgi [Mr] (BAKRADZE, David [Mr])

KARLSSON, Niklas [Mr]

KASSEGGER, Axel [Mr] (BURES, Doris [Ms])

KAVVADIA, Ioanneta [Ms]

KERESTECİOĞLU DEMİR, Filiz [Ms]

KERN, Claude [M.] (GROSDIDIER, François [M.])

KESİCİ, İlhan [Mr]

KILIÇ, Akif Çağatay [Mr]

KIRAL, Serhii [Mr] (BEREZA, Boryslav [Mr])

KITEV, Betian [Mr]

KLICH, Bogdan [Mr]

KOBZA, Jiři [Mr] (BENEŠIK, Ondřej [Mr])

KOÇ, Haluk [M.]

KOPŘIVA, František [Mr]

KOX, Tiny [Mr]

KRIŠTO, Borjana [Ms]

KYTÝR, Jaroslav [Mr]

LAMBERT, Jérôme [M.]

LEITE RAMOS, Luís [M.]

LĪBIŅA-EGNERE, Inese [Ms]

LIOVOCHKINA, Yuliya [Ms]

LOGVYNSKYI, Georgii [Mr]

LOMBARDI, Filippo [M.]

LOPUSHANSKYI, Andrii [Mr] (DZHEMILIEV, Mustafa [Mr])

LOUIS, Alexandra [Mme]

LUPU, Marian [Mr]

MALLIA, Emanuel [Mr]

MARKOVIĆ, Milica [Mme]

MAROSZ, Ján [Mr]

MARQUES, Duarte [Mr]

MASIULIS, Kęstutis [Mr] (BUTKEVIČIUS, Algirdas [Mr])

MASSEY, Doreen [Baroness]

MAVROTAS, Georgios [Mr] (KASIMATI, Nina [Ms])

McCARTHY, Kerry [Ms]

MEHL, Emilie Enger [Ms]

MENDES, Ana Catarina [Mme]

MERGEN, Martine [Mme] (HETTO-GAASCH, Françoise [Mme])

MIKKO, Marianne [Ms]

MÜLLER, Thomas [Mr]

MUNYAMA, Killion [Mr] (TRUSKOLASKI, Krzysztof [Mr])

NAUDI ZAMORA, Víctor [M.]

NĚMCOVÁ, Miroslava [Ms]

NENUTIL, Miroslav [Mr]

NICK, Andreas [Mr]

NICOLAE, Andrei [Mr] (TUȘA, Adriana Diana [Ms])

NISSINEN, Johan [Mr]

OBRADOVIĆ, Marija [Ms]

OBRADOVIĆ, Žarko [Mr]

OEHME, Ulrich [Mr] (BERNHARD, Marc [Mr])

OHLSSON, Carina [Ms]

ÖNAL, Suat [Mr]

OOMEN-RUIJTEN, Ria [Ms]

O’REILLY, Joseph [Mr]

OVERBEEK, Henk [Mr] (MULDER, Anne [Mr])

PASHAYEVA, Ganira [Ms]

PAVIĆEVIĆ, Sanja [Ms] (SEKULIĆ, Predrag [Mr])

PELKONEN, Jaana Maarit [Ms]

POCIEJ, Aleksander [M.] (POMASKA, Agnieszka [Ms])

POPA, Ion [M.] (ȘTEFAN, Corneliu [Mr])

PREDA, Cezar Florin [M.]

PRUNĂ, Cristina-Mădălina [Ms]

PSYCHOGIOS, Georgios [Mr] (ANAGNOSTOPOULOU, Athanasia [Ms])

PUTICA, Sanja [Ms]

REISS, Frédéric [M.] (ABAD, Damien [M.])

ROCA, Jordi [Mr] (MATARÍ, Juan José [M.])

RODRÍGUEZ HERNÁNDEZ, Melisa [Ms]

RUSTAMYAN, Armen [M.]

RZAYEV, Rovshan [Mr] (HAJIYEV, Sabir [Mr])

SANTA ANA, María Concepción de [Ms]

SCHENNACH, Stefan [Mr]

SCHNEIDER-SCHNEITER, Elisabeth [Mme] (MAURY PASQUIER, Liliane [Mme])

SCHOU, Ingjerd [Ms]

SCHWABE, Frank [Mr]

ŠEPIĆ, Senad [Mr]

SEYIDOV, Samad [Mr]

SHALSI, Eduard [Mr]

SHARMA, Virendra [Mr]

SILVA, Adão [M.]

ŠIRCELJ, Andrej [Mr]

ŠKOBERNE, Jan [Mr]

SMITH, Angela [Ms]

SOBOLEV, Serhiy [Mr]

SØNDERGAARD, Søren [Mr]

SORRE, Bertrand [M.]

SOTNYK, Olena [Ms]

STANĚK, Pavel [Mr]

STELLINI, David [Mr]

STIENEN, Petra [Ms]

STIER, Davor Ivo [Mr]

STROE, Ionuț-Marian [Mr]

ŞUPAC, Inna [Ms]

SUTTER, Petra De [Ms] (BLANCHART, Philippe [M.])

TAMAŠUNIENĖ, Rita [Ms]

TARCZYŃSKI, Dominik [Mr]

THIÉRY, Damien [M.]

TILKI, Attila [Mr] (GULYÁS, Gergely [Mr])

TOMIĆ, Aleksandra [Ms]

TOPCU, Zühal [Ms]

TRISSE, Nicole [Mme]

TROY, Robert [Mr] (COWEN, Barry [Mr])

TÜRKEŞ, Yıldırım Tuğrul [Mr]

VALLINI, André [M.] (GAILLOT, Albane [Mme])

VAREIKIS, Egidijus [Mr]

VARVITSIOTIS, Miltiadis [Mr] (BAKOYANNIS, Theodora [Ms])

VEJKEY, Imre [Mr]

VEN, Mart van de [Mr]

VENIZELOS, Evangelos [M.] (TZAVARAS, Konstantinos [M.])

VERDIER-JOUCLAS, Marie-Christine [Mme] (MAIRE, Jacques [M.])

WENAWESER, Christoph [Mr]

WOJTYŁA, Andrzej [Mr]

WOLD, Morten [Mr]

YEMETS, Leonid [Mr]

YENEROĞLU, Mustafa [Mr]

ZAVOLI, Roger [Mr] (D’AMBROSIO, Vanessa [Ms])

ZINGERIS, Emanuelis [Mr]

ZOHRABYAN, Naira [Mme]

Also signed the register / Ont également signé le registre

Representatives or Substitutes not authorised to vote / Représentants ou suppléants non autorisés à voter

ATSHEMYAN, Karine [Ms]

BAKRADZE, David [Mr]

BEREZA, Boryslav [Mr]

BESELIA, Eka [Ms]

BULIGA, Valentina [Mme]

CHRISTENSEN, Jette [Ms]

COMTE, Raphaël [M.]

CORREIA, Telmo [M.]

COURSON, Yolaine de [Mme]

GERMANN, Hannes [Mr]

JØRGENSEN, Jan E. [Mr]

KELLEHER, Colette [Ms]

LEŚNIAK, Józef [M.]

LOUHELAINEN, Anne [Ms]

LUNDGREN, Kerstin [Ms]

MAKHMUDYAN, Rustam [Mr]

MARUKYAN, Edmon [Mr]

MELKUMYAN, Mikayel [M.]

OBREMSKI, Jarosław [Mr]

ÖZSOY, Hişyar [Mr]

PALLARÉS, Judith [Ms]

POLETTI, Bérengère [Mme]

RIBERAYGUA, Patrícia [Mme]

RUSSELL, Simon [Lord]

SHEPPARD, Tommy [Mr]

TORNARE, Manuel [M.]

TOUHIG, Don [Lord]

WHITFIELD, Martin [Mr]

Observers / Observateurs

GÁNDARA CAMOU, Ernesto [Mr]

LUNA CANALES, Armando [Mr]

SANTANA GARCÍA, José de Jesús [Mr]

Partners for democracy / Partenaires pour la démocratie

ABUSHAHLA, Mohammedfaisal [Mr]

ALAZZAM, Riad [Mr]

ALQAWASMI, Sahar [Ms]

AMRAOUI, Allal [M.]

ATMOUN, El Mehdi [Mr]

BOUANOU, Abdellah [M.]

CHAGAF, Aziza [Mme]

EL FILALI, Hassan [M.]

EL MOKRIE EL IDRISSI, Abouzaid [M.]

HAMIDINE, Abdelali [M.]

KHADER, Qais [Mr]

LABLAK, Aicha [Mme]

LEBBAR, Abdesselam [M.]

SABELLA, Bernard [Mr]

Appendix 2 / Annexe 2

Representatives or Substitutes who took part in the ballot for the election of the Council of Europe Commissioner for Human Rights / Représentants ou suppléants qui ont participé au vote pour l’élection du/de la Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe

ABAD, Damien [M.] / REISS, Frédéric [M.]

ÅBERG, Boriana [Ms] 

ÆVARSDÓTTIR, Thorhildur Sunna [Ms] 

AMON, Werner [Mr] 

ANAGNOSTOPOULOU, Athanasia [Ms] / PSYCHOGIOS, Georgios [Mr]

ANTTILA, Sirkka-Liisa [Ms] 

ARIEV, Volodymyr [Mr] 

ARNAUT, Damir [Mr] 

BAKOYANNIS, Theodora [Ms] / VARVITSIOTIS, Miltiadis [Mr]

BAKRADZE, David [Mr] / KANDELAKI, Giorgi [Mr]

BALIĆ, Marijana [Ms] 

BARNETT, Doris [Ms] 

BATRINCEA, Vlad [Mr] 

BAYKAL, Deniz [Mr] / ENGIN, Didem [Ms]

BECHT, Olivier [M.] 

BENEŠIK, Ondřej [Mr] / KOBZA, Jiři [Mr]

BEREZA, Boryslav [Mr] / KIRAL, Serhii [Mr]

BERNACKI, Włodzimierz [Mr] 

BĒRZINŠ, Andris [M.] 

BEUS RICHEMBERGH, Goran [Mr] 

BILDARRATZ, Jokin [Mr] 

BİLGEHAN, Gülsün [Mme] 

BLAHA, Ľuboš [Mr] 

BLANCHART, Philippe [M.] / SUTTER, Petra De [Ms]

BLONDIN, Maryvonne [Mme] 

BOSIĆ, Mladen [Mr] 

BRASSEUR, Anne [Mme] 

BRUYN, Piet De [Mr] 

BRYNJÓLFSDÓTTIR, Rósa Björk [Ms] 

BUDNER, Margareta [Ms] 

BUSTINDUY, Pablo [Mr] / GORROTXATEGUI, Miren Edurne [Mme]

BUTKEVIČIUS, Algirdas [Mr] / MASIULIS, Kęstutis [Mr]

CAZEAU, Bernard [M.] 

CENTEMERO, Elena [Ms] / AMORUSO, Francesco Maria [Mr]

CHRISTOFFERSEN, Lise [Ms] 

CHUGOSHVILI, Tamar [Ms] 

CORLĂŢEAN, Titus [Mr] 

CORSINI, Paolo [Mr] 

COWEN, Barry [Mr] TROY, Robert [Mr]

CROWE, Seán [Mr] 

CRUCHTEN, Yves [M.] 

CSENGER-ZALÁN, Zsolt [Mr] 

DALLOZ, Marie-Christine [Mme] 

D’AMBROSIO, Vanessa [Ms] / ZAVOLI, Roger [Mr]

DE TEMMERMAN, Jennifer [Mme] 

DESTREBECQ, Olivier [M.] 

DİŞLİ, Şaban [Mr] 

DIVINA, Sergio [Mr] 

DURANTON, Nicole [Mme] 

DZHEMILIEV, Mustafa [Mr] / LOPUSHANSKYI, Andrii [Mr]

EBERLE-STRUB, Susanne [Ms] 

ECCLES, Diana [Lady] / BALFE, Richard [Lord]

EIDE, Espen Barth [Mr] / EIDE, Petter [Mr]

ESSL, Franz Leonhard [Mr] 

FIALA, Doris [Mme] 

FOURNIER, Bernard [M.] 

FRIDEZ, Pierre-Alain [M.] 

GAILLOT, Albane [Mme] / VALLINI, André [M.]

GALE, Roger [Sir] / ANDERSON, Donald [Lord]

GAMBARO, Adele [Ms] 

GATTI, Marco [M.] 

GERASHCHENKO, Iryna [Mme] 

GONÇALVES, Carlos Alberto [M.] 

GONCHARENKO, Oleksii [Mr] / GOLUB, Vladyslav [Mr]

GORGHIU, Alina Ștefania [Ms] 

GOUTTEFARDE, Fabien [M.]

GOY-CHAVENT, Sylvie [Mme] 

GROSDIDIER, François [M.] / KERN, Claude [M.]

GUNNARSSON, Jonas [Mr] 

GUTIÉRREZ, Antonio [Mr] 

HADRI, Shpresa [Ms] / GASHI, Afrim [Mr]

HAIDER, Roman [Mr] 

HAJDUKOVIĆ, Domagoj [Mr] 

HALICKI, Andrzej [Mr] 

HEER, Alfred [Mr] / GRIN, Jean-Pierre [M.]

HEINRICH, Gabriela [Ms] 

HENRIKSEN, Martin [Mr] 

HETTO-GAASCH, Françoise [Mme] /MERGEN, Martine [Mme]

HUNKO, Andrej [Mr] 

JAKUBIAK, Marek [Mr] / JANIK, Grzegorz [Mr]

JENIŠTA, Luděk [Mr] 

JENSEN, Mogens [Mr] 

JONES, Susan Elan [Ms] 

JORDANA, Carles [Mr] 

KALMARI, Anne [Ms] 

KARLSSON, Niklas [Mr] 

KATSARAVA, Sofio [Ms] 

KAVVADIA, Ioanneta [Ms] 

KERESTECİOĞLU DEMİR, Filiz [Ms] 

KITEV, Betian [Mr] 

KOÇ, Haluk [M.] 

KOPŘIVA, František [Mr] 

KORENJAK KRAMAR, Ksenija [Ms] 

KOVÁCS, Elvira [Ms] 

KOX, Tiny [Mr] 

KRIŠTO, Borjana [Ms] 

KRONBICHLER, Florian [Mr] 

KÜRKÇÜ, Ertuğrul [Mr] 

KYTÝR, Jaroslav [Mr] 

LACROIX, Christophe [M.] 

LAIZĀNE, Inese [Ms] / CILEVIČS, Boriss [Mr]

LAMBERT, Jérôme [M.] 

LEITE RAMOS, Luís [M.] 

LĪBIŅA-EGNERE, Inese [Ms] 

LIOVOCHKINA, Yuliya [Ms] 

LOMBARDI, Filippo [M.] 

LOUIS, Alexandra [Mme] 

LUPU, Marian [Mr] 

MAEIJER, Vicky [Ms] / BRUIJN-WEZEMAN, Reina de [Ms]

MAIRE, Jacques [M.] / VERDIER-JOUCLAS, Marie-Christine [Mme]

MARKOVIĆ, Milica [Mme] 

MAROSZ, Ján [Mr] 

MARQUES, Duarte [Mr] 

MATARÍ, Juan José [M.] / ROCA, Jordi [Mr]

MAURY PASQUIER, Liliane [Mme] / SCHNEIDER-SCHNEITER, Elisabeth [Mme]

McCARTHY, Kerry [Ms] 

MENDES, Ana Catarina [Mme] 

MULDER, Anne [Mr] / OVERBEEK, Henk [Mr]

NAUDI ZAMORA, Víctor [M.] 

NĚMCOVÁ, Miroslava [Ms] 

NENUTIL, Miroslav [Mr] 

NICK, Andreas [Mr] 

NISSINEN, Johan [Mr] 

OBRADOVIĆ, Marija [Ms] 

OBRADOVIĆ, Žarko [Mr] 

OHLSSON, Carina [Ms] 

O’REILLY, Joseph [Mr] 

PANTIĆ PILJA, Biljana [Ms] / FILIPOVSKI, Dubravka [Ms]

PAŠKA, Jaroslav [M.] / BALÁŽ, Radovan [Mr]

PELKONEN, Jaana Maarit [Ms] 

PISCO, Paulo [M.] 

POMASKA, Agnieszka [Ms] / POCIEJ, Aleksander [M.]

PRESCOTT, John [Mr] / FOULKES, George [Lord]

PRUIDZE, Irina [Ms] 

PRUNĂ, Cristina-Mădălina [Ms] 

PUTICA, Sanja [Ms] 

RODRÍGUEZ HERNÁNDEZ, Melisa [Ms] 

ROSETA, Helena [Mme] / ESTRELA, Edite [Mme]

RUSTAMYAN, Armen [M.] 

ŞAHİN USTA, Leyla [Ms] / CERİTOĞLU KURT, Lütfiye İlksen [Ms]

SCHENNACH, Stefan [Mr] 

SCHOU, Ingjerd [Ms] 

SCHWABE, Frank [Mr] 

SEKULIĆ, Predrag [Mr] / PAVIĆEVIĆ, Sanja [Ms]

ŠEPIĆ, Senad [Mr] 

SHALSI, Eduard [Mr] 

SHARMA, Virendra [Mr] 

SILVA, Adão [M.] 

ŠIRCELJ, Andrej [Mr] 

ŠKOBERNE, Jan [Mr] 

SMITH, Angela [Ms] 

SOBOLEV, Serhiy [Mr] 

SØNDERGAARD, Søren [Mr] 

SORRE, Bertrand [M.] 

SOTNYK, Olena [Ms] 

STANĚK, Pavel [Mr] 

STIENEN, Petra [Ms] 

STIER, Davor Ivo [Mr] 

STRIK, Tineke [Ms] 

STROE, Ionuț-Marian [Mr] 

ŞUPAC, Inna [Ms] 

SVENSSON, Michael [Mr] 

TAMAŠUNIENĖ, Rita [Ms] 

TERIK, Tiit [Mr] 

TOMIĆ, Aleksandra [Ms] 

TOPCU, Zühal [Ms] 

TORUN, Cemalettin Kani [Mr] 

TRISSE, Nicole [Mme] 

TRUSKOLASKI, Krzysztof [Mr]/MUNYAMA, Killion [Mr]

TÜRKEŞ, Yıldırım Tuğrul [Mr] 

TUȘA, Adriana Diana [Ms]NICOLAE, Andrei [Mr]

TZAVARAS, Konstantinos [M.]/ VENIZELOS, Evangelos [M.]

VAREIKIS, Egidijus [Mr] 

VEN, Mart van de [Mr]

WENAWESER, Christoph [Mr] 

WOJTYŁA, Andrzej [Mr] 

YAŞAR, Serap [Mme] 

YEMETS, Leonid [Mr] 

YENEROĞLU, Mustafa [Mr] 

ZAMPA, Sandra [Ms] /BLAZINA, Tamara [Ms]