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Rapport | Doc. 15682 | 09 janvier 2023

L'évolution de la procédure de suivi de l'Assemblée (janvier-décembre 2022)

Commission pour le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil de l'Europe (Commission de suivi)

Rapporteur : M. Piero FASSINO, Italie, SOC

Origine - Renvoi en commission: Résolution 1115 (1997). 2023 - Première partie de session

Résumé

Dans son rapport annuel, la commission de suivi dresse le bilan de ses activités de janvier à décembre 2022 et évalue les progrès réalisés dans le respect de leurs engagements d’adhésion et de leurs obligations envers le Conseil de l'Europe par les pays faisant l'objet d'une procédure complète de suivi (Albanie, Arménie, Azerbaïdjan, Bosnie-Herzégovine, Géorgie, Hongrie, République de Moldova, Pologne, Serbie, Türkiye et Ukraine), les trois pays engagés dans un dialogue postsuivi (Bulgarie, Macédoine du Nord et Monténégro), ainsi que les pays soumis à un examen périodique au cours de la période considérée (France, Malte, Pays-Bas, Roumanie et Saint-Marin). La commission se félicite des progrès accomplis, note les défis à relever et, le cas échéant, exprime également ses préoccupations face aux reculs. Sur cette base, elle formule des recommandations aux pays concernés.

En outre, le rapport présente un certain nombre de recommandations visant à renforcer l'efficacité et la cohérence interne des travaux de la commission.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 14 décembre
2022.

(open)
1. L'Assemblée parlementaire reconnaît le travail accompli par la commission pour le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil de l'Europe (commission de suivi) dans l'accomplissement de son mandat tel que défini dans la Résolution 1115 (1997) (modifiée) sur la «Création d'une commission de l'Assemblée pour le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil de l'Europe (commission de suivi)». Elle salue en particulier le travail de la commission dans l'accompagnement des 11 pays faisant l'objet d'une procédure complète de suivi (Albanie, Arménie, Azerbaïdjan, Bosnie-Herzégovine, Géorgie, Hongrie, République de Moldova, Pologne, Serbie, Türkiye et Ukraine), des trois pays engagés dans un dialogue postsuivi (Bulgarie, Monténégro et Macédoine du Nord) dans leurs efforts pour se conformer pleinement aux obligations et engagements qu'ils ont contractés lors de leur adhésion au Conseil de l'Europe, ainsi que des pays faisant l’objet d’un suivi périodique de leurs obligations d'adhésion, qui a été effectué en 2022 pour la Hongrie, Malte et la Roumanie et se poursuit actuellement pour la France, les Pays-Bas et Saint-Marin.
2. L'Assemblée prend note de l'attention continue que la commission porte à l'évolution des relations entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan.
3. Elle félicite la sous-commission sur les conflits concernant les États membres du Conseil de l'Europe pour les travaux qu'elle a entrepris pendant la période considérée en ce qui concerne les conséquences de la guerre entre la Fédération de Russie et la Géorgie, et en particulier les faits récents survenus dans les régions géorgiennes d'Abkhazie et de Tskhinvali/Ossétie du Sud, ainsi que l’évolution récente du processus de règlement du conflit transnistrien.
4. Elle confirme qu'à la suite de la décision du Comité des Ministres du 16 mars 2022 d’exclure la Fédération de Russie du Conseil de l'Europe avec effet immédiat, en réaction à l'agression russe contre l'Ukraine, la procédure de suivi concernant la Fédération de Russie a été immédiatement close, le mandat de la commission de suivi étant limité aux États membres du Conseil de l'Europe.
5. L'Assemblée se félicite des évolutions positives constatées et des progrès réalisés au cours de la période de référence dans les pays faisant l'objet d'une procédure complète de suivi ou engagés dans un dialogue postsuivi; elle exprime son inquiétude face à certains développements négatifs et à certaines lacunes persistantes et invite instamment tous ces pays à intensifier leurs efforts pour honorer pleinement leurs obligations de membre et leurs engagements d'adhésion au Conseil de l'Europe tout en étant prête et déterminée à coopérer et à aider les États membres à cet égard. En particulier:
6. En ce qui concerne les pays soumis à la procédure de suivi complète:
6.1. s’agissant de l'Albanie: l'Assemblée se félicite que les principaux partis d'opposition aient repris les travaux au parlement à la suite des élections législatives de 2021. Elle appelle la majorité au pouvoir et l'opposition à surmonter la polarisation profonde et la crise politique systémique dans le pays. L'Assemblée note avec satisfaction que le parlement a prolongé le délai constitutionnel pour le contrôle de tous les juges et procureurs du pays. Elle prend note de la nouvelle carte judiciaire proposée et encourage toutes les parties prenantes à veiller à ce que cette nouvelle carte ne compromette pas l'accès des citoyens au système judiciaire. L'Assemblée constate avec satisfaction que toutes les structures de lutte contre la corruption sont désormais pleinement opérationnelles et espère que cela se traduira par un nombre accru de condamnations pour corruption de haut niveau, laquelle reste un problème. Tout en se réjouissant que les autorités aient annoncé leur intention de retirer de l'ordre du jour du parlement le «paquet d'amendements contre la diffamation», elle exprime sa profonde inquiétude face à la dégradation de l’environnement médiatique. Elle appelle les autorités à s'abstenir de toute action ou politique qui pourrait avoir un effet négatif sur la liberté d'expression et la liberté des médias dans le pays;
6.2. s’agissant de l'Arménie: se référant à la Résolution 2427 (2022), l'Assemblée se félicite des progrès notables réalisés dans le développement démocratique de l'Arménie et appelle les autorités à achever la réforme du cadre électoral, à poursuivre la réforme du système judiciaire et à renforcer la liberté des médias. L’Assemblée décide de continuer à suivre avec attention les développements concernant les équilibres institutionnels et l’enracinement d’une culture démocratique;
6.3. s’agissant de l'Azerbaïdjan: l'Assemblée se réjouit de l’engagement affiché par les autorités en faveur du dialogue politique mais regrette qu'en général, la situation en Azerbaïdjan ne se soit pas améliorée et qu'un certain nombre de préoccupations concernant l'État de droit, la démocratie pluraliste et les droits humains restent sans réponse. Il s'agit notamment des graves inquiétudes que suscitent l'indépendance du pouvoir judiciaire, la liberté des médias et la liberté d'expression, la liberté d'association et la liberté politique, ainsi que les allégations de torture et de mauvais traitements commis par les services répressifs et les conditions de détention insatisfaisantes;
6.4. s’agissant de la Bosnie-Herzégovine: l'Assemblée prend note de la tenue d'élections générales et appelle les élus à procéder sans délai à la formation d'institutions au niveau de l'État et des entités et à adopter les réformes essentielles demandées par l'Union européenne, le Groupe d’États contre la corruption (GRECO) et l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). L'Assemblée invite également les autorités nouvellement constituées à entreprendre des réformes constitutionnelles et électorales afin de mettre la Constitution en conformité avec la Convention européenne des droits de l'homme (STE no 5), conformément au groupe d'affaires Sejdić et Finci;
6.5. s’agissant de la Géorgie: se référant à la Résolution 2438 (2022), l'Assemblée se félicite des progrès accomplis par la Géorgie dans le respect de ses obligations et engagements et encourage toutes les forces politiques à répondre aux recommandations et préoccupations restantes exprimées dans cette résolution. À cet égard, elle reste préoccupée par l'extrême polarisation politique du pays qui compromet les réformes et la participation des parties prenantes aux réformes nécessaires à la poursuite de la consolidation démocratique et de l'intégration euro-atlantique du pays. L'Assemblée invite instamment les autorités à mettre en œuvre une évaluation approfondie et indépendante de leurs réformes du système judiciaire, afin d'orienter les réformes futures visant à garantir une véritable indépendance du système judiciaire dans le pays. Elle prend note de l’évolution récente de la situation des médias et des préoccupations exprimées à cet égard. Elle encourage les autorités à prendre toutes les mesures possibles pour réduire les tensions qui secouent l’environnement médiatique. L'Assemblée réitère son soutien total à la souveraineté et à l'intégrité territoriale de la Géorgie à l'intérieur de ses frontières internationalement reconnues, et fait part de ses préoccupations concernant l'occupation illégale et l'annexion rampante par la Fédération de Russie des régions géorgiennes d'Abkhazie et de Tskhinvali/Ossétie du Sud, une situation qu’elle condamne. Elle encourage les autorités à donner suite aux 12 recommandations de l'Union européenne afin que le pays puisse obtenir le statut de candidat à l'adhésion à l'Union européenne auquel il aspire légitimement;
6.6. s’agissant de la Hongrie: se référant à la Résolution 2460 (2022), l'Assemblée rappelle sa décision du 13 octobre d'ouvrir une procédure de suivi pour traiter les questions relatives à l'État de droit et à la démocratie, notamment la concentration excessive des pouvoirs et le recours à des ordres juridiques spéciaux ou à des lois cardinales, qui sont restées largement sans réponse. Elle invite les autorités hongroises à revoir leur cadre électoral à la lumière de l'avis 2021 de la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) et à améliorer l’environnement médiatique de manière à garantir l'équité du processus électoral. Elle demande aux autorités hongroises de réviser d'urgence la loi relative aux services de sécurité nationale et d'abroger la législation relative à la «diffusion de fausses informations». Prenant note des mesures prises pour améliorer le fonctionnement des institutions démocratiques, renforcer la transparence du processus législatif et améliorer le cadre de la lutte contre la corruption, l'Assemblée encourage vivement les autorités à solliciter l'expertise du Conseil de l'Europe pour s'assurer de la conformité de ces mesures avec les précédentes recommandations de la Commission de Venise et du GRECO;
6.7. s’agissant de la République de Moldova: l'Assemblée reconnaît que le pays a été confronté à de nouveaux défis considérables causés par la guerre qui a éclaté dans l'Ukraine voisine, ainsi que par la pandémie et la crise énergétique et économique. Elle félicite les autorités moldaves pour leur gestion de la crise des réfugiés et la résilience et la solidarité dont a fait preuve la population. L'Assemblée appelle les autorités à poursuivre sans faiblir les réformes entreprises pour rétablir l'État de droit et la confiance dans les institutions de l'État, en consultation avec toutes les parties prenantes. Elle se félicite de la coopération constructive établie avec la Commission de Venise, en particulier pour la réforme du système judiciaire et du ministère public. Elle encourage les autorités à adopter le nouveau Code électoral, conformément aux recommandations de la Commission de Venise. L'Assemblée se réfère à la Résolution ... (2023) «Le respect des obligations et engagements de la République de Moldova» et invite les autorités à la mettre en œuvre;
6.8. s’agissant de la Pologne: l'Assemblée souligne le rôle exemplaire joué par le pays dans le contexte de l'agression russe contre l’Ukraine, ainsi que l'aide considérable apportée à ce pays, notamment en accueillant plus de 1,4 million de réfugiés ukrainiens sur son territoire. Dans le même temps, l'Assemblée reste très inquiète en ce qui concerne l'indépendance du pouvoir judiciaire et l’adhésion du système judiciaire aux règles et normes européennes en matière d'État de droit. Elle est aussi profondément préoccupée par les jugements du Tribunal constitutionnel qui considèrent que l'article 6 (droit à un procès équitable) de la Convention européenne des droits de l’homme est incompatible avec la Constitution polonaise dans certaines conditions. L'Assemblée réaffirme sa position selon laquelle ces jugements constituent une remise en cause inacceptable de la suprématie de la Convention et vont à l'encontre de l'obligation qu'ont tous les États membres d'appliquer pleinement la Convention et les arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme. Elle appelle les autorités polonaises à exécuter sans condition les arrêts de la Cour, notamment en modifiant la Constitution si nécessaire. L'Assemblée considère que le manque d'indépendance du Conseil national de la magistrature est un obstacle majeur qui empêche le pays de respecter ses engagements en matière d'État de droit et elle appelle à la réforme du Conseil national de la magistrature conformément aux recommandations de la Commission de Venise;
6.9. s’agissant de la Serbie: l'Assemblée se félicite de l'adoption en janvier 2022, par référendum, des amendements constitutionnels visant à dépolitiser le système judiciaire, et de l’élaboration d’une législation secondaire visant à faciliter leur mise en œuvre en coopération avec la Commission de Venise. Elle encourage les autorités serbes à prendre pleinement en compte les recommandations de la Commission de Venise. L'Assemblée salue l'adoption d'amendements à la législation électorale et l'élection d'un parlement plus ouvert et pluraliste en avril 2022, mais elle invite instamment les autorités à s'attaquer aux problèmes de longue date tels que l'accès aux médias, le financement des campagnes électorales, la pression exercée sur les électeurs, et à adopter des mesures permettant l'examen et l'audit publics des listes électorales. Pour ce qui est de la lutte contre la corruption, l'Assemblée se félicite des progrès constatés par le GRECO, notamment l'adoption d'un code de conduite à l’usage des parlementaires. Elle encourage les autorités à adopter une stratégie de lutte contre la corruption et à remédier aux lacunes en matière de prévention de la corruption chez les personnes exerçant des fonctions dirigeantes. L'Assemblée reste préoccupée par le niveau de violence à l'encontre des journalistes et par l'environnement médiatique. Rappelant les difficultés rencontrées par les organisateurs du défilé de l'Europride en septembre 2022, l'Assemblée demande instamment aux autorités de garantir pleinement la liberté de réunion. En outre, l’Assemblée attend des autorités serbes qu’elles poursuivent le dialogue pacifique avec le Kosovo* 
			(2) 
			Tout
au long de ce texte, toute référence au Kosovo, que ce soit à son
territoire, à ses institutions ou à sa population, doit se comprendre
en pleine conformité avec la Résolution 1244 du Conseil de sécurité
des Nations Unies et sans préjuger du statut du Kosovo. en vue de résoudre toutes les questions en suspens;
6.10. s’agissant de la Türkiye: rappelant la Résolution 2459 (2022), l'Assemblée se félicite de l'abaissement du seuil électoral de 10 à 7 %. Elle réitère cependant ses préoccupations concernant le contexte électoral général, notamment les amendements électoraux adoptés en avril 2022 à la lumière des recommandations de l’avis de juin 2022 de la Commission de Venise, l'état de la liberté d'expression et des médias, l'indépendance du pouvoir judiciaire et la procédure en cours visant à interdire le deuxième plus grand parti d'opposition, le Parti démocratique des peuples (HDP). Elle appelle les autorités turques à mettre fin aux arrestations de journalistes et de militants de la société civile, qui compromettent davantage l'exercice des droits démocratiques. En ce qui concerne l'exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme, elle demande aux autorités turques de veiller à l'exécution de l'arrêt Kavala, à la remise en liberté de ce dernier et de ses coaccusés. Elle encourage vivement les autorités turques à coopérer avec la Commission de Venise pour assurer la conformité du cadre juridique et constitutionnel avec les normes du Conseil de l'Europe et à mettre en œuvre ses recommandations et, à tout le moins, à appliquer la législation électorale dans un esprit qui permettra de garantir des conditions de concurrence équitables;
6.11. s’agissant de l'Ukraine: l'Assemblée note qu'en raison de l'agression militaire de la Fédération de Russie, aucun suivi normal des obligations et engagements ne peut avoir lieu. Elle salue les efforts considérables déployés par les autorités ukrainiennes pour assurer le fonctionnement continu des institutions démocratiques et de l'État de droit, malgré la situation difficile causée par la guerre. À cet égard, l'Assemblée se félicite de la ratification de la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique (STCE no 210, «Convention d'Istanbul») le 18 juin 2022. Tout en se félicitant des réformes et des initiatives législatives qui sont mises en œuvre, notamment pour soutenir son statut de candidat à l'Union européenne, l'Assemblée invite instamment les autorités à veiller, en dépit de la situation difficile, à ce que les normes et principes de la démocratie et de l'État de droit soient maintenus autant que possible. L'Assemblée encourage les corapporteurs sur le suivi de l'Ukraine à continuer à suivre de près ces développements.
7. En ce qui concerne les pays engagés dans un dialogue postsuivi:
7.1. s'agissant de la Bulgarie: l'Assemblée est pleinement consciente que la crise politique majeure à laquelle la Bulgarie est confrontée depuis juillet 2020 en raison de scandales de corruption et qui a entraîné quatre élections législatives anticipées consécutives, a inévitablement eu une incidence négative sur les progrès réalisés dans la mise en œuvre des recommandations formulées dans la Résolution 2296 (2019). Une solution est nécessaire pour sortir de l'impasse électorale et elle requiert un compromis. L’Assemblée exprime sa disponibilité à assister la Bulgarie dans ce processus. Elle demande instamment aux autorités de traiter les préoccupations restantes concernant la corruption de haut niveau, la transparence de la propriété des médias, les droits humains des minorités, ainsi que le discours de haine et la violence à l'égard des femmes. Parallèlement, elle se félicite du bon déroulement des élections qui se sont tenues dans le respect des libertés fondamentales;
7.2. s’agissant du Monténégro: rappelant la Résolution 2374 (2021), l'Assemblée se félicite de l'évolution de la lutte contre la corruption mais regrette que les nominations à la Cour constitutionnelle et au Conseil judiciaire, nécessaires pour améliorer l'État de droit et le fonctionnement des institutions démocratiques, n'aient pas pu être menées à bien. L'Assemblée appelle les partis politiques à procéder à ces nominations sans délai et à mettre en œuvre les recommandations du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (BIDDH/OSCE) concernant le processus électoral avant les prochaines élections présidentielle et législatives;
7.3. s’agissant de la Macédoine du Nord: l'Assemblée se félicite de la signature d’un accord bilatéral concernant l'adoption d'un cadre de négociation par le Conseil de l'Union européenne en juillet 2022. L'Assemblée encourage les forces politiques de Macédoine du Nord à trouver un compromis politique pour que le pays continue de progresser sur la voie de l’intégration à l’Union européenne. L'Assemblée encourage également les autorités à poursuivre les réformes engagées pour renforcer l'État de droit, la démocratie et les droits humains, à publier tous les résultats du recensement et, sur la base des progrès significatifs recensés par le Comité consultatif de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales, à assurer la mise en œuvre concrète de la législation visant à protéger les minorités nationales. Dans le domaine de la justice, l'Assemblée encourage le pays à appliquer les recommandations de juillet 2022 du GRECO et notamment à adopter le nouveau code d'éthique à l’usage des parlementaires et ses lignes directrices.
8. En ce qui concerne les pays qui font actuellement l'objet de la procédure d’examen périodique des obligations découlant de l’adhésion au Conseil de l’Europe:
8.1. s’agissant de Malte: se référant à la Résolution 2451 (2022), l'Assemblée réitère sa recommandation à la majorité au pouvoir et à l'opposition d'envisager une réforme de grande ampleur du Parlement maltais afin de mettre en place un parlement exerçant à temps plein, capable d’assurer un véritable contrôle parlementaire et de reprendre l'initiative législative. La vulnérabilité persistante du secteur public maltais à la corruption reste un sujet de préoccupation. Dans ce contexte, l'Assemblée regrette que les autorités maltaises n'aient pas suivi sa recommandation de supprimer le programme national de «citoyenneté par investissement». Si l'environnement médiatique reste préoccupant, l'Assemblée se félicite de la mise en place d'un comité d'experts des médias, dirigé par l'ancien président de la Commission d'enquête indépendante sur le meurtre de Mme Daphne Caruana Galizia, et de la réponse du gouvernement à ce sujet, ce qui est un signe que les autorités souhaitent répondre à ces préoccupations;
8.2. s’agissant de la Roumanie: se référant à la Résolution 2466 (2022), l'Assemblée se félicite de la réforme en cours du système judiciaire en Roumanie et est convaincue que les trois projets de loi sur la justice – sur le statut des magistrats, sur l'organisation du pouvoir judiciaire et sur le Conseil supérieur de la magistrature – prendront en compte les recommandations de la Commission de Venise demandées par la commission de suivi. Elle note avec satisfaction que la Roumanie progresse dans le respect des normes du Conseil de l'Europe dans des domaines essentiels pour le fonctionnement des institutions démocratiques, notamment le système judiciaire et la lutte contre la corruption. Elle regrette cependant que certaines questions suscitent toujours une certaine inquiétude, notamment la liberté des médias et la transparence insuffisante de l’emploi des fonds publics par les partis politiques, qui financent des médias pour influer sur leur contenu;
8.3. s’agissant de Saint-Marin: l'Assemblée se félicite des réformes récentes visant à renforcer le système d'équilibre des pouvoirs et l'indépendance du pouvoir judiciaire dans le pays. L'Assemblée souligne que ces réformes ne doivent pas être considérées comme la fin du chemin, mais comme le point de départ de réformes permanentes visant à garantir le fonctionnement efficace des institutions démocratiques et à répondre à toute préoccupation concernant leur vulnérabilité aux conflits d'intérêts et à la corruption. Dans ce contexte, l'Assemblée exhorte les autorités saint-marinaises à veiller à ce que les lois et les réformes soient pleinement et systématiquement mises en œuvre afin de garantir leur efficacité et des résultats tangibles aux yeux des citoyens de Saint-Marin.
9. L'Assemblée réitère son soutien aux efforts déployés par sa commission de suivi pour assurer le suivi des obligations de tous les États membres découlant de leur adhésion au Conseil de l’Europe dans le cadre des rapports périodiques de suivi. Elle est consciente des conditions spécifiques et des exigences procédurales liées à l'élaboration de ces rapports, constate qu'une seule période de renvoi de deux ans, conformément à l'article 26 du Règlement, est insuffisante, et décide de traiter cette question lors de la prochaine révision générale de son règlement. Dans ce contexte, l'Assemblée se félicite de la décision de la commission de réviser ses méthodes de travail internes afin de mieux tenir compte de l'actualité et de l'évolution de la situation dans les États membres.
10. L'Assemblée déplore le problème persistant de la disponibilité insuffisante des rapporteurs de suivi. Elle invite les groupes politiques à faire en sorte que la disponibilité des rapporteurs à effectuer leur travail soit un critère important lors de la désignation des membres de la commission et des candidats à un mandat de rapporteur, et leur conseille de recourir plus fréquemment à des transferts de mandats de rapporteurs entre les groupes afin de remédier à la pénurie de rapporteurs pour les mandats vacants. Dans le même temps, elle invite la commission à étudier la possibilité de réviser la limite actuelle du mandat de cinq ans pour les rapporteurs d'un pays faisant l'objet d'une procédure de suivi complète ou engagé dans un dialogue postsuivi, et d’opter pour trois mandats de trois ans, ce qui permettrait tant de révoquer des rapporteurs que de conserver des rapporteurs disponibles et compétents pour un pays donné.
11. L'Assemblée prend note du fait qu'actuellement 13 des 30 rapporteurs et seulement 28 des 87 membres de la commission sont des femmes. L'Assemblée souligne la nécessité d'une représentation plus équilibrée entre hommes et femmes dans les désignations par les groupes, tant pour les membres de la commission que pour les mandats de rapporteur.
12. L'Assemblée note avec satisfaction la poursuite de l'excellente coopération avec la Commission de Venise qui fournit à la commission des compétences juridiques sur le fonctionnement des institutions démocratiques dans certains pays.
13. L'Assemblée invite la commission à poursuivre les réflexions qu’elle a engagées sur les moyens d'accroître l'efficacité et l'impact de ses travaux.

B. Exposé des motifs par M. Piero Fassino, rapporteur

(open)

1. Introduction

1. La procédure de suivi de l’Assemblée parlementaire s’appuie sur la Résolution 1115 (1997) sur la création d’une commission de l’Assemblée pour le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil de l’Europe (commission de suivi), telle que modifiée par les Résolutions 1431(2005), 1515 (2006), 1698 (2009), 1710 (2010), 1936 (2013), 2018 (2014), 2261 (2019), 2325 (2020), 2357 (2021) et 2428 (2022). La Résolution 1115 (1997) définit le mandat de la commission de suivi et précise qu’elle «est chargée de veiller au respect des obligations contractées par les États membres aux termes du Statut du Conseil de l’Europe, de la Convention européenne des droits de l’homme (STE n° 5) et de toutes les autres conventions de l’Organisation auxquelles ils sont parties, ainsi qu’au respect des engagements pris par les autorités des États membres lors de leur adhésion au Conseil de l’Europe».
2. Aux termes du paragraphe 14 de la Résolution 1115 (1997) telle qu’amendée, la commission de suivi est tenue de rendre compte à l’Assemblée, une fois par an, de l’évolution générale des procédures de suivi. En accord avec la pratique établie, la commission m’a chargé, en ma qualité de président, de faire rapport sur ses activités sur la période allant de janvier à décembre 2022.
3. Conformément à son mandat, la commission de suivi veille au respect par tous les États membres des obligations découlant de leur adhésion au Conseil de l’Europe et, s’il en est, des engagements spécifiques qu’ils ont contractés. Actuellement, onze pays sont soumis à une procédure de suivi complète (l’Albanie, l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Bosnie-Herzégovine, la Géorgie, la Hongrie, la République de Moldova, la Pologne, la Serbie, la Türkiye et l’Ukraine).
4. À la suite de la décision du Comité des Ministres adoptée le 16 mars 2022 d’exclure la Fédération de Russie du Conseil de l’Europe avec effet immédiat, en réaction à l’agression russe contre l’Ukraine, le pays ne relève plus du mandat de la commission de suivi dont la compétence ne porte que sur les États membres du Conseil de l’Europe.
5. Faisant suite à la décision de l’Assemblée du 26 octobre 2022, une procédure de suivi complète a été ouverte à l’égard de la Hongrie en raison «des questions de longue date relatives à l’État de droit et à la démocratie largement laissées sans réponse par les autorités».
6. Trois pays sont actuellement engagés dans un dialogue postsuivi (la Bulgarie, le Monténégro et la Macédoine du Nord), qui concerne les États qui ont progressé et peuvent, à l’issue du suivi complet, accéder à cette procédure. C’est une procédure moins intensive qui porte sur un nombre limité de questions en suspens. Selon le Règlement, un deuxième rapport de postsuivi doit permettre de déterminer s’il est envisageable de mettre fin au suivi parlementaire à l’égard du pays concerné ou s’il convient de soumettre à nouveau ce dernier à une procédure de suivi complète.
7. Par ailleurs, conformément à son mandat, la commission de suivi est chargée d’assurer et d’évaluer le respect des obligations contractées par tous les États membres, y compris ceux qui ne font l’objet d’aucune des deux procédures de suivi susmentionnées, aux termes du statut du Conseil de l’Europe, de la Convention européenne des droits de l’homme et de toutes les autres conventions conclues au sein de l’Organisation auxquelles ils sont parties. En vertu de la Résolution 2261 (2019), depuis 2019, la commission de suivi choisit les pays à soumettre à un examen périodique conformément à ses méthodes de travail internes, en opérant des choix motivés par des raisons de fond, tout en maintenant l’objectif de consacrer, au fil du temps, des examens périodiques à tous les États membres. Les rapports relatifs à trois pays sélectionnés lors du premier cycle (la Hongrie, la Roumanie et Malte) ont été présentés devant l’Assemblée et examinés en 2022. Ceux concernant les trois autres pays choisis en 2021 (les Pays-Bas, Saint-Marin et la France) sont en cours d’élaboration et devraient être soumis à l’Assemblée en 2023.
8. La commission de suivi possède en outre une sous-commission sur les conflits concernant les États membres du Conseil de l’Europe, conformément à l’article 49 du Règlement de l’Assemblée et à la décision révisée de la commission du 24 mai 2022 (voir annexe), qui définit son mandat comme couvrant une «situation dans laquelle il est mis fin à un conflit armé actif, sans qu’un traité de paix ou un autre cadre politique ne règle le conflit à la satisfaction des belligérants. D’où la possibilité, au plan légal, d’une reprise du conflit à tout moment et, dès lors, la création d’un climat d’insécurité et d’instabilité».
9. Les commentaires par pays présentés ci-dessous ont été élaborés sur la base des rapports, notes et déclarations des rapporteurs, ainsi que des débats de la commission de suivi (auxquels participent des représentants de la majorité au pouvoir et de l’opposition des pays concernés, conformément à l’article 10 de la Résolution 1115 (1997)), et des constats d’autres mécanismes de suivi du Conseil de l’Europe. Tous ces documents ont été communiqués aux rapporteurs respectifs avant d’être publiés et je me suis efforcé, dans la mesure du possible, d’intégrer leurs commentaires, le cas échéant.

2. Aperçu des activités de la commission

2.1. Observations générales

10. La situation sanitaire s’étant nettement améliorée en Europe, les rapporteurs chargés du suivi ont été en mesure de reprendre pleinement leurs activités qui avaient été considérablement entravées pendant la pandémie. La nature spécifique du mandat de la commission de suivi suppose des rapporteurs qu’ils se rendent dans le pays dans le cadre de l’élaboration de chaque rapport. À cet égard, la commission part du principe que des réunions en ligne ne sauraient remplacer le dialogue politique direct avec les autorités, de sorte que les restrictions en matière de déplacement ont grandement pesé sur le travail des rapporteurs.
11. Au cours de la période considérée, les rapporteurs ont effectué un certain nombre de visites dans les pays placés sous leur responsabilité respective, notamment deux en Türkiye, et une en République de Moldova, ainsi qu’en Hongrie, en Albanie, en France (réunions avec la société civile), au Monténégro, en Roumanie et à Saint-Marin.
12. Dans le même temps, toutefois, les bonnes pratiques mises en place pendant la pandémie ont été maintenues et les contacts en ligne établis entre les rapporteurs et les différentes parties prenantes, en particulier les représentants de la société civile des pays concernés, sont désormais une méthode de travail courante. S’ils ne peuvent se substituer au dialogue politique direct avec les autorités, ils permettent néanmoins aux rapporteurs d’approfondir leurs connaissances.
13. À l’initiative de certains rapporteurs, plusieurs auditions et échanges de vues ont eu lieu dans le cadre des réunions de la commission, notamment sur la Hongrie, la France, les Pays-Bas, la Serbie, l’Ukraine, la Bosnie-Herzégovine et la Türkiye. La commission a également tenu une audition concernant les développements intervenus récemment en Espagne, ainsi que sur les procédures de suivi au sein du Conseil de l’Europe.
14. En 2022, la commission de suivi s’est réunie lors des quatre parties de session ainsi qu’à cinq reprises en dehors des sessions parlementaires. À la suite de la condamnation de M. Osman Kavala à une peine de réclusion à perpétuité aggravée, la commission de suivi a décidé de reporter sa réunion à Ankara prévue en mai et de la remplacer par une réunion à Paris.
15. Au cours de la période considérée, la commission de suivi a soumis à l’Assemblée sept rapports spécifiques à des pays: «Contestation pour des raisons substantielles des pouvoirs non encore ratifiés de la délégation parlementaire de la Fédération de Russie»; «Le fonctionnement des institutions démocratiques en Arménie»; «Respect des obligations et engagements de la Géorgie»; «Le respect par Malte des obligations découlant de l’adhésion au Conseil de l’Europe»; «Le respect des obligations et engagements de la Türkiye»; «Le respect des obligations découlant de l’adhésion au Conseil de l’Europe de la Hongrie» et «Le respect des obligations découlant de l’adhésion au Conseil de l’Europe de la Roumanie».
16. Le rapport relatif au respect des obligations et engagements de la République de Moldova a été adopté par la commission le 14 décembre et devrait être examiné par l’Assemblée en janvier, lors de la première partie de session 2023.
17. L’avant-projet de rapport sur «Le respect par Saint-Marin des obligations découlant de l’adhésion au Conseil de l’Europe» a été approuvé par la commission et transmis aux autorités concernées en vue de la tenue d’un débat à l’Assemblée au cours de la deuxième partie de session d’avril 2023.
18. Au cours de la même période, la commission a examiné et déclassifié les notes d’information sur la procédure de suivi parlementaire concernant la Fédération de Russie, ainsi que sur le respect des obligations et engagements de l’Albanie et de la Bosnie-Herzégovine.
19. Les rapporteurs sur l’Albanie, l’Arménie, la Hongrie, la République de Moldova, le Monténégro, la Roumanie, Saint-Marin, la Serbie et la Türkiye ont fait des déclarations concernant l’évolution de la situation dans les pays sous leur responsabilité.
20. Compte tenu des évènements qui se sont produits en Arménie à la frontière avec l’Azerbaïdjan, la commission a proposé de tenir un débat d’actualité lors de la quatrième partie de session de l’Assemblée, en octobre 2022. En conclusion, l’Assemblée a chargé la commission de suivi de continuer à suivre la situation.
21. Comme les années précédentes, l’excellente coopération avec la Commission de Venise s’est poursuivie tout au long de la période considérée. Des échanges de vues ont eu lieu avec la présidente de la Commission de Venise et sa secrétaire. La commission a sollicité l’avis de la Commission de Venise sur le projet de loi relatif au démantèlement de la section d’enquête sur les infractions pénales au sein du système judiciaire en Roumanie, ainsi qu’au sujet de trois projets de lois relatifs à la justice: sur le statut des magistrats, sur l’organisation du pouvoir judiciaire et sur le Conseil supérieur de la magistrature en Roumanie; mais aussi sur les projets d’amendements au Code pénal turc concernant la disposition sur les «informations fausses ou trompeuses»; sur les modifications de la législation électorale turque; sur la loi sur les médias en Azerbaïdjan; et sur les amendements de décembre 2021 portant sur la loi organique sur les tribunaux de droit commun de Géorgie.
22. La sous-commission sur les conflits concernant les États membres du Conseil de l’Europe a tenu deux auditions. La première était consacrée aux développements récents relatifs au processus de règlement du conflit transnistrien, à laquelle ont participé M. Oleg Serebrian, Vice-Premier ministre chargé de la réintégration de la République de Moldova, et M. Claus Neukirch, chef de la mission de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) à Chisinau. À cette occasion, la sous-commission a réitéré son intention d’organiser un séminaire sur la contribution du Conseil de l’Europe à la promotion des droits humains dans la région transnistrienne de la République de Moldova, avec la participation des autorités moldaves et des autorités de facto de Tiraspol. La deuxième audition a porté sur les développements récents intervenus dans les régions géorgiennes d’Abkhazie et de Tskhinvali/Ossétie du Sud et sur l’état d’avancement des discussions internationales de Genève, avec la participation de M. Lasha Darsalia, premier Vice-ministre des Affaires étrangères de Géorgie.

2.2. Pays faisant l’objet d’une procédure de suivi complète

2.2.1. Albanie

23. Les corapporteurs, M. Joseph O`Reilly (Irlande, PPE/DC) et M. Asim Mollazada (Azerbaïdjan, CE/AD), ont effectué une visite d’information en Albanie du 29 juin au 1e juillet 2022. Ils ont présenté à la commission une note d’information qui a été examinée et déclassifiée le 10 octobre 2022.
24. Après les élections législatives qui ont eu lieu le 25 avril 2021, les principaux partis d’opposition en Albanie ont réintégré le Parlement albanais et participent désormais pleinement à ses travaux. Il s’agit là d’une évolution très positive car, comme l’ont souligné à maintes reprises la commission et l’Assemblée, le retour de l’ensemble des partis et forces politiques au parlement, qui est l’espace constitutionnel approprié pour l’interaction politique, est une condition préalable essentielle pour résoudre la crise politique systémique que traverse le pays.
25. Malheureusement, les événements au sein du principal parti d’opposition, le Parti démocratique, semblent avoir donné lieu à une scission entre les structures du parti, notamment entre les membres du groupe parlementaire dirigé par l’ancien Président albanais et chef du parti, M. Berisha, et ceux restés fidèles à l’ancien chef de la formation, M. Basha. Comme l’ont souligné les rapporteurs, il est important que la crise interne et la fracture au sein du Parti démocratique ne conduisent pas à une nouvelle cassure entre le groupe parlementaire et la structure du principal parti d’opposition, au risque sinon d’aggraver la crise politique dans le pays et d’anéantir les progrès réalisés dans ce domaine à la suite des élections législatives tenues l’an passé.
26. Le mandat du Président Meta a pris fin le 24 juillet 2022. Le Président albanais est élu par le parlement à la majorité des trois cinquièmes de l’ensemble de ses membres. Toutefois, si aucun candidat ne parvient à recueillir une telle majorité au cours des trois premiers tours de scrutin, la majorité requise pour élire le Président sera abaissée à la majorité absolue de 50 % des suffrages exprimés plus un, lors des tours de scrutin suivants.
27. Le premier tour de l’élection présidentielle a eu lieu le 16 mai 2022. Malheureusement, aucune démarche sérieuse n’a été entreprise pour trouver un candidat de compromis qui fasse l’objet d’un consensus entre la majorité et l’opposition et aucun candidat n’a été proposé lors des trois premiers tours. Le Parti socialiste a fini par proposer au quatrième tour la candidature du général de division Bajram Begaj, qui était jusqu’alors le chef d’état-major général des forces armées albanaises. M. Begaj a été élu par 78 voix pour, quatre contre et une abstention, malgré le boycott de la majeure partie de l’opposition.
28. Il est regrettable que la majorité au pouvoir et l’opposition ne soient pas parvenues à s’accorder sur un candidat de consensus. L’exigence de la majorité des trois cinquièmes a été inscrite dans la Constitution afin d’assurer au Président un large soutien de la part de l’ensemble des forces politiques et, partant, la possibilité de s’imposer. Le recours délibéré au mécanisme antiblocage sans même essayer de trouver un candidat de compromis pour les trois premiers tours de scrutin est manifestement contraire à l’esprit de la Constitution et met en évidence le niveau de polarisation de l’environnement politique.
29. Le processus de vérification de l’intégrité de tous les juges et procureurs albanais, sous supervision internationale, se poursuit sans relâche. Avancée positive, le 10 février 2022, le Parlement albanais a adopté des amendements à la Constitution prolongeant jusqu’au 31 décembre 2024 le mandat de la Commission indépendante des qualifications qui procède au contrôle, ainsi que celui des commissaires publics, qui représentent l’intérêt public dans le processus de vérification. Cette prolongation devrait permettre à la Commission indépendante des qualifications de finaliser la procédure concernant les 250 postes restants. Le nombre considérable de révocations et de démissions de juges et de procureurs, y compris ceux qui occupent des fonctions très importantes, met en évidence la rigueur du processus de vérification mais aussi sa nécessité indéniable pour le pouvoir judiciaire en Albanie. Cela étant, il est arrivé que ce contrôle nuise à l’efficacité de la justice dans le pays. Fort heureusement, le quorum de six juges requis pour la Cour constitutionnelle a été atteint à la fin de l’année 2020. De même, la Haute Cour n’est devenue opérationnelle qu’en juillet 2021, après la nomination de six nouveaux juges.
30. La nouvelle carte judiciaire, actuellement en cours d’élaboration, constitue une réforme essentielle du pouvoir judiciaire. Elle permettra de réduire le nombre de tribunaux, notamment les juridictions d’appel et administratives. L’un des principaux objectifs de cette réforme est de veiller à une utilisation efficace des ressources qui ont considérablement diminué, en raison notamment du processus de vérification de l’intégrité. Cependant, la carte proposée suscite certaines controverses par crainte qu’elle n’éloigne davantage le système judiciaire des citoyens albanais, au risque d’ébranler la confiance du public dans la justice proprement dite. Ce point est certes préoccupant, mais il convient également de noter qu’à l’heure actuelle, de nombreux tribunaux fonctionnent en sous-effectif et ont du mal à apurer l’arriéré d’affaires, ce qui limite également l’accès des citoyens à la justice.
31. La lutte contre la corruption et la criminalité organisée reste une priorité pour le pays. La Structure spécialisée de lutte contre la corruption et la criminalité organisée (SPAK), qui comprend le Bureau du procureur spécial et le Bureau national d’enquêtes, est désormais pleinement opérationnelle. La SPAK a engagé un certain nombre d’actions à l’encontre de fonctionnaires pour des faits de corruption, mais elles restent relativement rares, compte tenu notamment de la corruption généralisée évidente, mise en lumière par les résultats du processus de vérification. Malheureusement, le nombre de condamnations de hauts fonctionnaires accusés de corruption demeure très faible, créant ainsi un sentiment d’impunité. Il convient de s’attaquer à ce problème en priorité.
32. Le paysage médiatique albanais a hélas continué à se détériorer. Cette dégradation est extrêmement préoccupante car un environnement médiatique libre et pluraliste est une condition essentielle au bon fonctionnement d’une démocratie. Selon le Classement mondial de la liberté de la presse 2022 établi par Reporter sans frontières et publié le 3 mai 2022, l’Albanie a perdu 20 places par rapport à 2021 et se situe désormais au 103e rang sur 180 pays (1 étant la meilleure place). D’après ce rapport, la liberté de la presse est menacée par une régulation des médias entachée de partisanerie et l’intégrité physique des journalistes est menacée par le manque de protection contre les violences exercées par des membres du crime organisé et des forces de l’ordre. La proposition dudit « dispositif antidiffamation » a suscité des inquiétudes à cet égard. Bien que ce projet ait été retiré par les autorités à la suite de l’avis très négatif rendu par la Commission de Venise, il n’a jamais été officiellement rayé de l’ordre du jour du parlement, restant ainsi une source de préoccupation pour les médias albanais. Les autorités ont fait savoir que le retrait formel de ce dispositif du calendrier parlementaire interviendrait sous peu, ce qui, une fois effectif, pourrait permettre d’améliorer l’environnement médiatique dans le pays.
33. L’incrimination de la diffamation, même si elle n’est plus passible d’une peine d’emprisonnement, et le recours accru aux poursuites stratégiques contre la mobilisation publique ou SLAPP ont un effet dissuasif et constituent de sérieux motifs de préoccupation. Il est instamment demandé aux autorités albanaises de dépénaliser totalement la diffamation et d’adopter une législation permettant de lutter contre l’utilisation abusive des poursuites-bâillons visant à museler les voix critiques.
34. Le 18 septembre 2021, le Gouvernement albanais a établi l’Agence des médias et de l’information. Sa mise en place et la centralisation des informations ont suscité de vives inquiétudes parmi un large éventail d’acteurs nationaux et internationaux qui assimilent cette instance à un ministère de la propagande de facto, ayant pour but de renforcer le contrôle des autorités sur les médias au détriment de la liberté des médias. À ces craintes s’ajoute l’inquiétante interdiction faite à certains journalistes par le Premier ministre Rama de participer pendant de longues périodes aux conférences de presse du gouvernement, après avoir posé des questions qui ne lui convenaient pas. Les autorités sont priées de répondre en priorité aux préoccupations relatives à l’environnement des médias, afin de garantir un paysage médiatique véritablement libre et pluraliste dans le pays.

2.2.2. Arménie

35. Au cours de la partie de session de janvier, l’Assemblée a examiné un rapport et adopté la Résolution 2427 (2022) sur le fonctionnement des institutions démocratiques en Arménie. Elle a reconnu des progrès notables en matière de développement démocratique et défini des priorités pour le pays, à savoir notamment la réforme du cadre électoral, la promotion de la culture démocratique, la poursuite de la réforme du pouvoir judiciaire et le renforcement de la liberté des médias.
36. Au cours de la période considérée, la majeure partie du débat politique et l’attention des médias se sont concentrés sur le conflit avec l’Azerbaïdjan, perçu comme une menace existentielle, ainsi que sur les conséquences de l’agression russe contre l’Ukraine. L’Arménie a accueilli des dizaines de milliers de ressortissants russes qui ont fui leur pays après le déclenchement de la guerre, puis après l’annonce de mobilisation partielle. Cet afflux massif de professionnels, pour la plupart qualifiés, pourrait avoir à long terme des effets bénéfiques sur l’économie arménienne, bien qu’il ait entraîné une hausse brutale des coûts du logement à Erevan.
37. Le 24 mars, des membres des forces armées azerbaïdjanaises ont franchi la ligne de cessez-le-feu et sont entrés dans une partie du territoire placée sous contrôle de soldats russes de maintien de la paix dans le Haut-Karabakh, suscitant la colère et l’inquiétude de la population arménienne quant au sort des habitants. Les autorités arméniennes ont dénoncé les pressions exercées sur la population arménienne du Haut-Karabakh en vue de l’expulser du territoire, évoquant le risque de campagne de nettoyage ethnique.
38. Le 13 avril, le Premier ministre Pachinian a annoncé que le Gouvernement arménien était prêt à engager le processus de conclusion d’un traité de paix avec l’Azerbaïdjan pour mettre fin au conflit qui dure depuis plus de 30 ans. Certains membres de l’opposition ont appelé à rejeter tout accord avec l’Azerbaïdjan qui ferait perdre à l’Arménie le contrôle du Haut-Karabakh et ont réclamé la démission du gouvernement, déclenchant ainsi une longue série de manifestations. Pendant plusieurs semaines, l’une des principales places d’Erevan a été occupée et des manifestations organisées sur la voie publique ont bloqué la circulation dans la ville. Un usage excessif de la force par la police et des arrestations administratives massives de manifestants ont été signalés à plusieurs reprises. Les corapporteurs, M. Kimmo Kiljunen (Finlande, SOC) et Mme Boriana Åberg (Suède, PPE/DC), ont suivi de très près l’évolution de la situation concernant le défenseur des droits humains de la République d’Arménie. Dans ce contexte, tant les manifestants que les membres de la majorité ont fréquemment tenu des propos incendiaires et clivants.
39. En septembre, de violentes hostilités ont éclaté alors même que les discussions relatives à la conclusion d’un traité de paix et à un règlement de la crise frontalière semblaient progresser. L’Azerbaïdjan a bombardé le territoire arménien, frappant des infrastructures civiles et occupant plusieurs localités. Plus de 200 militaires arméniens et 80 soldats azerbaïdjanais ont perdu la vie, 7 600 civils ont été déplacés et 20 soldats arméniens ont été faits prisonniers. Des informations faisant état de crimes de guerre et de traitements inhumains présumés perpétrés par les forces armées azerbaïdjanaises ont été portées à la connaissance des corapporteurs et du président de la commission de suivi.
40. La période examinée a également été marquée par diverses tentatives de médiation internationale. Une rencontre trilatérale orchestrée par le président du Conseil européen, Charles Michel, avec la participation du Premier ministre arménien Pachinian et du Président azerbaïdjanais Aliyev, a eu lieu en août à Bruxelles. À l’issue d’une autre rencontre entre les deux dirigeants, le 6 octobre, en présence du Président français et du Président du Conseil de l’Union européenne, une mission civile de l’Union européenne a été dépêchée le long de la frontière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, afin d’aider à apaiser les tensions et de contribuer à la délimitation de la frontière entre les deux pays. Le Premier ministre Pachinian et le Président Aliyev se sont à nouveau rencontrés à Sotchi, le 31 octobre, en présence du Président Poutine. Les dirigeants ont adopté une déclaration commune dans laquelle ils se sont engagés «à s’abstenir de recourir à la menace ou à l’emploi de la force », et «à aborder et régler tous les litiges uniquement sur la base de la reconnaissance mutuelle de la souveraineté, de l’intégration territoriale et de l’inviolabilité des frontières». Ils ont par ailleurs «souligné l’importance des préparatifs actifs à la conclusion d’un traité de paix entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie».
41. Au cours de la partie de session d’octobre, l’Assemblée a tenu un débat sur les hostilités militaires entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie et son Bureau a chargé la commission de suivi de suivre la situation. Les corapporteurs ont fait une déclaration 
			(3) 
			<a href='https://pace.coe.int/fr/news/8856/pace-co-rapporteurs-on-armenia-concerned-by-reports-of-alleged-war-crimes-or-inhuman-treatment-perpetrated-by-azerbaijan-s-armed-forces-'>Déclaration</a> des corapporteurs (13 octobre 2022). appelant les autorités azerbaïdjanaises à se retirer immédiatement de toutes les parties du territoire de l’Arménie et à libérer les prisonniers de guerre sous leur contrôle.

2.2.3. Azerbaïdjan

42. Le dernier rapport sur le fonctionnement des institutions démocratiques en Azerbaïdjan remonte à octobre 2017. À la suite de la visite effectuée par les corapporteurs dans le pays en juillet 2019, une note d’information a été préparée et déclassifiée.
43. Sur un plan général, la situation en Azerbaïdjan ne s’est pas améliorée et un certain nombre de problèmes persistants concernant l’État de droit, la démocratie pluraliste et les droits humains n’ont toujours pas été réglés. De graves préoccupations portent notamment sur l’indépendance du pouvoir judiciaire, la liberté des médias et la liberté d’expression, la liberté d’association et des libertés politiques, ainsi que sur des allégations de torture et de mauvais traitements par les agents des forces de l’ordre et des conditions de détention insatisfaisantes.
44. Un grand nombre d’arrêts rendus récemment par la Cour européenne des droits de l’homme mettent en évidence « une troublante tendance marquée à l’arrestation et à la détention arbitraires de personnes critiques à l’égard du gouvernement, de militants de la société civile et de défenseurs des droits humains au moyen de poursuites engagées en guise de représailles et d’un détournement du droit pénal au mépris de la prééminence du droit ». Cette privation arbitraire de liberté est souvent assortie de violations des libertés d’expression et de réunion.
45. Dans de nombreux arrêts, la Cour a conclu à des violations de l’article 18 de la Convention (utilisation abusive des dispositions de droit pénal relatives à l’arrestation et à la détention à des fins non autorisées par la Convention) et de l’article 6 (droit à un procès équitable). Le maintien en détention de personnes incarcérées pour des motifs politiques en Azerbaïdjan est extrêmement préoccupant.
46. Le décret de grâce signé par le Président Ilham Aliyev le 27 mai 2022, prévoyant la libération de 168 personnes condamnées, a bénéficié à au moins 22 prisonniers politiques présumés dont M. Salekh Rustamly, membre du parti d’opposition extraparlementaire, le Front populaire d’Azerbaïdjan (PPFA), M. Afgan Sadygov, directeur du portail d’information Azel.TV, M. Pasha Umudov, chauffeur particulier du président du PPFA, ainsi qu’à plusieurs condamnés dans l’affaire Ganja. S’il y a lieu de saluer la libération de personnes emprisonnées de manière injustifiée, la question des procès inéquitables et des accusations fabriquées de toutes pièces n’est toujours pas résolue. Par ailleurs, d’après les défenseurs des droits humains, les prisons abritent encore aujourd’hui des personnes détenues pour des motifs de nature politique.
47. En ce qui concerne l’affaire emblématique d’Elchin Sadigov, célèbre avocat défenseur des droits humains et représentant légal de nombreux militants de l’opposition, arrêté le 10 septembre 2022, le même jour que le journaliste renommé Avaz Zeynalli, directeur d’une chaîne de TV internet, et à l’encontre desquels le tribunal avait ordonné le placement en détention provisoire pendant quatre mois pour corruption, il convient de noter que la Cour d’appel de Bakou a libéré M. Sadigov le 17 septembre 2022 et l’a assigné à résidence (la Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe avait fait une déclaration le 13 septembre dans laquelle elle demandait instamment aux autorités de le libérer immédiatement).
48. En février 2022, la commission de suivi, alertée par la société civile et des journalistes indépendants en Azerbaïdjan, a sollicité l’avis de la Commission de Venise concernant la loi sur les médias, adoptée par le Milli Majlis le 30 décembre 2021. La Commission de Venise a adopté son avis en juin 2022 dans lequel elle conclut que de nombreuses dispositions ne sont pas conformes aux normes du Conseil de l’Europe en matière de liberté d’expression et de liberté des médias et ne permettent pas aux médias d’exercer efficacement leur rôle de défenseurs des intérêts publics. Elle a adressé un certain nombre de recommandations aux autorités azerbaïdjanaises, les appelant instamment à abroger ou à réviser la loi.
49. S’agissant des hostilités entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, la situation toujours tendue malgré le cessez-le-feu au cours de la période considérée a été marquée par des flambées de violence ponctuelles le long de la frontière entre les deux pays qui ont fait de nombreuses victimes et causé des dégâts importants (voir chapitre 2.6).
50. Au cours de la partie de session d’octobre, l’Assemblée a tenu un débat sur les hostilités militaires entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie et son Bureau a chargé la commission de suivi de suivre la situation. Les rapporteurs, M. Ian Liddell-Granger (Royaume-Uni, CE/AD) et Mme Lise Christoffersen (Norvège, SOC) envisagent de se rendre dans le pays en février 2023.

2.2.4. Bosnie-Herzégovine

51. En 2021, les autorités de la Republika Srpska avaient appelé au retrait unilatéral de l’entité des éléments fondamentaux de l’ordre constitutionnel établi au cours des 26 années de mise en œuvre des accords de Dayton, brandissant ainsi la menace d’une sécession avec l’État de Bosnie-Herzégovine. Le 10 décembre 2021, l’Assemblée nationale de la Republika Srpska a demandé au gouvernement de l’entité de présenter des projets de loi amorçant le processus de séparation dans un délai de six mois. Les États-Unis, le Parlement européen et le Royaume-Uni ont réagi en adoptant des sanctions à l’encontre de M. Dodik, Président de la Republika Srpska, et de certains de ses plus proches alliés politiques dans l’entité.
52. Pendant plusieurs mois, les partis politiques de la Fédération ont mené des discussions sur la législation électorale afin de trouver un moyen de sortir de l’impasse dans laquelle se trouve la Fédération, qui est dirigée par un gouvernement intérimaire mis en place dans le cadre du mandat 2014-2018. Les soutiens internationaux ont déployé beaucoup d’efforts pour aider à trouver un accord qui permettrait de remédier aux violations de la Convention européenne des droits de l’homme constatées par la Cour dans les affaires Sejdić et Finci, Zornić et d’autres, ainsi qu’aux déficiences du processus électoral relevées par le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (BIDDH/OSCE), le Groupe d’États contre la corruption (GRECO) et la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise). Cependant, aucun consensus n’a été atteint. Le Haut Représentant a décidé de mettre en œuvre certaines décisions le 7 juin et le 27 juillet respectivement, pour assurer le financement des prochaines élections et modifier la législation électorale afin de contribuer à prévenir la fraude électorale et d’améliorer la transparence.
53. Dans le but de favoriser l’intégration de la Bosnie-Herzégovine dans l’Union européenne, une réunion a été organisée le 12 juin avec le président du Conseil européen, les trois membres de la présidence de Bosnie-Herzégovine et les chefs des partis politiques représentés au parlement. Un accord politique a été conclu à cette occasion, dans lequel les dirigeants politiques se sont engagés à entreprendre les réformes électorales et les réformes constitutionnelles limitées nécessaires pour assurer le plein respect des décisions de la Cour européenne des droits de l’homme et de la Cour constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine, des recommandations de la Commission de Venise et celles de l’OSCE/BIDDH et du GRECO. Un train de réformes essentielles devrait être adopté dans un délai maximum de six mois à compter de la formation des nouvelles autorités nationales à la suite des élections.
54. Au cours de la partie de session de juin, la commission a abordé ces développements alors que les corapporteurs, M. Zsolt Németh (Hongrie, CE/AD) et Mme Ekaterina Zaharieva (Bulgarie, PPE/DC) présentaient une note d’information sur le système électoral en Bosnie-Herzégovine et qu’un échange de vues sur l’exécution des décisions de la Cour était organisé avec la participation du Service de l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme.
55. M. Németh a participé à la mission internationale d’observation des élections (MIOE). Des élections présidentielles et législatives ont été tenues le 2 octobre au niveau de l’État et au sein des deux entités. La mission d’observation a conclu que les élections ont été concurrentielles et dans l’ensemble bien organisées, dans le respect des libertés fondamentales pendant la campagne. Cependant, l’environnement électoral est resté marqué par l’échec des réformes, un manque de confiance généralisé dans les institutions publiques et un discours de division ethnique.
56. S’agissant de la présidence tripartite de la Bosnie-Herzégovine, le candidat de l’opposition Denis Bećirović a été élu membre bosniaque, le coprésident sortant Željko Komšić a remporté le siège croate et Željka Cvijanović a obtenu le siège serbe. En ce qui concerne la Republika Srpska, Milorad Dodik a remporté la présidence face à la candidate de l’opposition Jelena Trivić, après qu’un nouveau décompte des voix ait été ordonné. Pour ce qui est des organes parlementaires, les partis affichant une appartenance ethnique marquée ont pu maintenir leur position forte dans la plupart des parlements du pays.
57. Peu après la fermeture des bureaux de vote, le Haut Représentant a promulgué deux décisions, l’une modifiant la Constitution de la Fédération et l’autre portant amendement de la loi électorale. Ces deux décisions, appelées «functionality package» (paquet fonctionnalité), ne concernent que la mise en place postélectorale des organes élus indirectement et visent à améliorer la fonctionnalité de la Fédération de Bosnie-Herzégovine. Certains partis les ont vivement critiquées, estimant qu’elles renforçaient la division de l’électorat selon des considérations ethniques. L’ampleur réelle de ces mesures sera évaluée dans le rapport final de la MIOE et les corapporteurs suivront attentivement ces développements.
58. Peu de temps après les élections, le 12 octobre, et conformément à l’accord conclu le 12 juin, la Commission européenne a recommandé que la Bosnie-Herzégovine obtienne le statut de pays candidat, étant entendu qu’un certain nombre de mesures seront prises pour renforcer la démocratie, le fonctionnement efficace des institutions publiques, l’État de droit, la lutte contre la corruption et la criminalité organisée, ainsi que pour garantir la liberté des médias et améliorer la gestion des migrations dans le pays. Il reste aux partis politiques représentés au sein des institutions publiques à parvenir à un compromis sur la réforme électorale et constitutionnelle, conformément à la Convention européenne des droits de l’homme.

2.2.5. Géorgie

59. Le 28 avril 2022, l’Assemblée a adopté la Résolution 2438 (2022) «Le respect des obligations et engagements de la Géorgie» dans laquelle elle a salué les progrès continus et significatifs réalisés par le pays dans le respect de ses obligations en tant que membre du Conseil de l’Europe et de ses engagements d’adhésion. Dans le même temps, l’Assemblée a fait part de ses inquiétudes face à un nombre de préoccupations et de lacunes qui restent à traiter et a donc décidé de poursuivre la procédure de suivi à l’égard de la Géorgie.
60. L’Assemblée a précisé que les recommandations contenues dans la Résolution 2438 (2022) et le rapport qui l’accompagne donnent une idée claire des progrès que la Géorgie doit réaliser avant l’ouverture d’un dialogue postsuivi, sous réserve qu’il n’y ait pas de retour en arrière ou de régression par rapport aux progrès accomplis à ce jour. Parallèlement, l’Assemblée a également souligné que toute avancée dans la procédure de suivi nécessitera l’engagement total et la volonté politique, y compris la volonté de travailler ensemble, tant des autorités au pouvoir que de l’opposition.
61. Malheureusement, depuis l’adoption de la résolution, certaines des réformes indispensables à la consolidation démocratique du pays et au renforcement du fonctionnement des institutions garantes de l’État de droit semblent au point mort, ce qui a amené la communauté internationale à s’interroger sur le soutien réel apporté à ces réformes. Cette situation se reflète dans le score obtenu par la Géorgie dans le rapport «Nations in Transit 2022» de Freedom House, qui a légèrement diminué, passant de 36 à 35, ainsi que dans le net recul enregistré par le pays au classement mondial de la liberté de la presse 2022 établi par Reporters sans frontières, passant de la 60e à la 89e place.
62. Des préoccupations concernant l’environnement médiatique en Géorgie ont également été exprimées à la suite de la condamnation controversée de Nika Gvaramia, directeur de la chaîne de télévision Mtavari Arkhi proche de l’opposition, à une peine d’emprisonnement de trois ans et demi pour abus de pouvoir et détournement de fonds présumés alors qu’il dirigeait la chaîne Rustavi 2. M. Gvaramia, qui avait interjeté appel, a vu sa condamnation confirmée le 2 novembre 2022 par la cour d’appel de Tbilissi. Certains acteurs nationaux et internationaux, dont le Défenseur public géorgien, ont remis en question les accusations et le moment où elles ont été portées. Sans vouloir juger du bien-fondé des faits reprochés à M. Gvaramia, il est clair que son placement en détention a nui à l’environnement politique et médiatique du pays. Certains interlocuteurs ont suggéré que le président géorgien devrait envisager de gracier M. Gvaramia. Les autorités sont encouragées à prendre toutes les mesures possibles pour réduire les tensions dans l'environnement médiatique.
63. Comme l’a souligné l’Assemblée, l’une des caractéristiques de la Géorgie tient au fait que les autorités nationales successives ont toujours entretenu des relations cordiales et constructives avec les partenaires internationaux du pays et répondu à leurs préoccupations et recommandations, même concernant les points de désaccord. Les propos de plus en plus durs tenus par certains représentants de la majorité au pouvoir au sujet des craintes et critiques exprimées par des partenaires internationaux de la Géorgie sont donc préoccupants et ont vraisemblablement pesé sur les suites données à la demande d’adhésion de la Géorgie à l’Union européenne. Toutes les forces politiques sont invitées à poursuivre la coopération habituelle, à la fois cordiale et constructive, avec les partenaires internationaux, laquelle constitue la pierre angulaire de la politique internationale du pays.
64. Le 2 mars 2022, face au profond bouleversement de l’environnement géopolitique consécutif à l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie, la Géorgie a introduit une demande d’adhésion immédiate à l’Union européenne.
65. Le 17 juin 2022, la Commission européenne a rendu ses avis sur les demandes d’adhésion de l’Ukraine, de la République de Moldova et de la Géorgie. Elle y recommandait d’accorder à l’Ukraine et à la République de Moldova le statut de candidat, étant entendu que ces deux pays devaient poursuivre les réformes politiques requises. Dans le même temps, critiquant clairement l’environnement politique du pays, elle a recommandé de donner à la Géorgie la perspective d’adhérer à l’Union européenne, ajoutant que le statut de pays candidat devrait lui être accordé une fois seulement que 12 priorités 
			(4) 
			<a href='https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:52022DC0405&from=EN'>Avis</a> de la Commission européenne sur la demande d'adhésion
de la Géorgie à l'Union européenne. auront été traitées de manière satisfaisante. Ces dernières mettent notamment en exergue la nécessité pour les forces politiques de conjuguer leurs efforts afin de remédier au problème de polarisation extrême de l’environnement politique et de renforcer les institutions démocratiques et l’État de droit dans le pays. Il convient de souligner que les 12 conditions de la Commission européenne portent sur les mêmes domaines que les recommandations formulées par l’Assemblée dans la Résolution 2438 (2022), et qu’elles sont dans une large mesure similaires à celles-ci. Un certain nombre de réformes ont été lancées et la coopération avec la Commission de Venise, ainsi que ses avis, ont été sollicités pour guider les réformes, ce qui doit être salué.
66. Dans ce contexte, il convient de noter que, dans sa Résolution 2438 (2022), l’Assemblée a fait part de ses vives préoccupations quant à l’environnement politique extrêmement tendu et polarisé en Géorgie, mû par des stratégies politiques à somme nulle et par l’absence de compréhension et de compromis de la part de l’opposition comme de la majorité au pouvoir qui campent l’une et l’autre sur leurs positions et se retranchent derrière le rôle qui est le leur. De l’avis de l’Assemblée, ce climat politique, qui empêche toute forme de coopération constructive entre la majorité au pouvoir et l’opposition et affecte la mise en œuvre de réformes cruciales, est un obstacle de taille à la consolidation démocratique de la Géorgie.
67. Malheureusement, l’environnement politique n’a pas connu d’amélioration notable, comme en témoigne l’absence de consensus et de coopération entre l’opposition et la majorité au pouvoir concernant la demande d’adhésion de la Géorgie à l’Union européenne ou la mise en œuvre des réformes nécessaires pour remplir les conditions d’obtention du statut de pays candidat. Je tiens à réitérer l’appel lancé par l’Assemblée dans sa Résolution 2438 (2022) à l’ensemble des forces politiques du pays, aussi bien de la majorité au pouvoir que de l’opposition, à placer le bien commun de la nation au-dessus de toute stratégie politique partisane étroite et à coopérer conjointement et de manière constructive, dans l’intérêt de la consolidation de la démocratie et de l’intégration euro-atlantique de la Géorgie.
68. L’Assemblée a rappelé à plusieurs reprises son soutien indéfectible à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de la Géorgie à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues. Par ailleurs, elle a fait savoir qu’elle était préoccupée et condamnait l’occupation illégale et l’annexion progressive par la Fédération de Russie des régions géorgiennes d’Abkhazie et de Tskhinvali/Ossétie du Sud, qui causent une situation désastreuse sur le terrain en matière sécuritaire et humanitaire, et du point de vue des droits humains, avec une militarisation et des restrictions de la liberté de circulation illégales qui prennent de plus en plus d’ampleur. Cette question est devenue particulièrement sensible dans le contexte de l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie. Le 15 septembre 2022, la sous-commission sur les conflits concernant les États membres du Conseil de l’Europe a tenu un échange de vues sur les développements récents intervenus dans les régions géorgiennes d’Abkhazie et de Tskhinvali/Ossétie du Sud ainsi que sur l’état d’avancement des discussions internationales de Genève, avec la participation de M. Lasha Darsalia, premier Vice-ministre des Affaires étrangères de Géorgie. Elle est convenue que les corapporteurs pour ce pays devraient continuer de suivre attentivement l’évolution de la situation dans ces deux régions géorgiennes.

2.2.6. République de Moldova

69. L’année 2022 a été marquée par la guerre qui a éclaté dans l’Ukraine voisine et placé la République de Moldova face à de sérieux défis socio-économiques et à de graves problèmes de sécurité. Lors de leur visite dans le pays en juin 2022, les rapporteurs, Mme Inese Lībiņa-Egnere (Lettonie, PPE/DC) et M. Pierre-Alain Fridez (Suisse, SOC), ont salué la manière dont les autorités moldaves géraient la crise des réfugiés ainsi que la résilience de la population et la solidarité dont celle-ci faisait montre alors que plus de 700 000 réfugiés avaient afflué dans le pays et près de 100 000 s’y étaient installés. Ces bouleversements sont venus s’ajouter aux problèmes liés à la pandémie et à la crise énergétique qui avaient secoué le pays l’année précédente et qui ont débouché sur une crise économique et une forte inflation.
70. Les autorités moldaves ont réussi à maintenir le dialogue avec l’administration de facto de la région transnistrienne de la République de Moldova et à désamorcer les tensions, malgré les possibles répercussions de l’agression russe sur la région (et la présence de l’armée russe). Ces points ont été examinés en mars au sein de la sous-commission sur les conflits concernant les États membres du Conseil de l’Europe, en présence du Vice-premier ministre chargé de la Réintégration, Oleg Serebrian (voir paragraphes 22 et 161). Les tensions avec l’Entité territoriale autonome de Gagaouzie-Yeri (ATUG) ont été exacerbées par la situation dans la région, comme la décision de l’assemblée régionale de l’ATUG d’autoriser l’utilisation du Ruban de Saint-Georges ou d’adopter une législation anti-LGBT, en violation du droit moldave. La guerre en Ukraine a accéléré le programme européen de la République de Moldova, qui a demandé à l’Union européenne d’ouvrir les négociations d’adhésion le 2 mars. Le 23 juin, le Conseil européen a accordé le statut de pays candidat à la République de Moldova et à l’Ukraine.
71. Les rapporteurs se sont félicités de la poursuite des réformes prioritaires dans le domaine de la justice et de la lutte contre la corruption lancées par le parti de la Présidente Sandu (Action et Solidarité), qui jouit d’une majorité stable, malgré les difficultés liées à la réorganisation d’institutions publiques jusque-là «captives» et au manque de personnel. Des progrès notables ont été observés, notamment la création de la commission d’évaluation de l’activité des juges et des procureurs («commission de pré-évaluation») qui devrait rapidement jouer un rôle clé dans le renforcement de l’indépendance et de l’intégrité du pouvoir judiciaire et du ministère public. Une nouvelle procureure générale chargée de la lutte contre la corruption a été nommé.
72. Les autorités moldaves ont continué à coopérer étroitement avec le Conseil de l’Europe. Les rapporteurs ont tenu compte des conclusions de la Commission de Venise, qui a émis cinq avis sur des questions juridiques et deux mémoires amicus curiae à la demande des autorités, dont des avis sur les mesures spécifiques prises pour préserver la souveraineté du pays, y compris les amendements au Code des services de médias audiovisuels, et sur l’interdiction de l’utilisation de certains symboles en vertu de la loi sur la lutte contre les activités extrémistes. La Commission de Venise a également préparé un avis sur le projet de Code électoral.
73. Les rapporteurs ont aussi suivi les affaires pénales de niveau élevé ouvertes en 2021 (en particulier à l’encontre de l’ancien Président Dodon, du Bloc des socialistes, actuellement sous contrôle judiciaire, et de Marina Tauber, du parti SHOR, placée en résidence surveillée), ainsi que la procédure engagée contre le procureur général suspendu, M. Stoianoglu. Les rapporteurs ont salué la détermination des autorités à lutter efficacement contre la corruption, tout en les appelant à respecter les garanties procédurales et exigences de l’État de droit. Le ministre de la Justice a déposé un recours en inconstitutionnalité contre le parti SHOR pour financement illégal présumé et atteinte à l’intégrité du pays, suite à quoi la Cour constitutionnelle a sollicité un mémoire amicus curiae à la Commission de Venise sur la déclaration d'inconstitutionnalité d'un parti politique.
74. Les rapporteurs ont soumis leur projet de rapport à la commission de suivi le 14 décembre, en vue de sa présentation à la partie de session de janvier 2023.

2.2.7. Pologne

75. Aucune visite d’information n’a pu être effectuée en Pologne, des contraintes nationales ayant bouleversé le calendrier des rapporteurs et leur disponibilité. Mme Azadeh Rojhan Gustafsson (Suède, SOC) et M. Pieter Omtzig (Pays-Bas, PPE/DC) ont l’intention de se rendre dans le pays début 2023.
76. Dans le contexte de l’agression de la Russie contre l’Ukraine, la Pologne a joué un rôle exemplaire en fournissant une assistance considérable à l’Ukraine. En septembre 2022, selon l’Agence des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR), près de 1,4 million de réfugiés ukrainiens avaient demandé à bénéficier d’une protection temporaire en Pologne – plus que dans n’importe quel autre pays de l’Union européenne. Le pays mérite d’être félicité pour le rôle qu’il joue au sein de la communauté internationale vis-à-vis de l’Ukraine et pour la solidarité dont il ne cesse de faire preuve envers l’Ukraine et les Ukrainiens.
77. Cependant, les développements observés dans les domaines de l’indépendance du pouvoir judiciaire et de l’adhésion aux normes européennes en matière d’État de droit restent malheureusement une source de vives préoccupations qui pèsent sur les relations de la Pologne avec les organisations internationales et l’Union européenne en particulier.
78. Pour rappel, dans l’arrêt qu’elle a rendu le 7 mai 2021 dans l’affaire Xero Flor w Polsce sp. Z oo. c. Pologne (requête no 4907/18), la Cour européenne des droits de l’homme a jugé que l’élection des juges à la Cour constitutionnelle en 2015 avait été irrégulière, rendant illégale la composition de la formation de jugement à laquelle ces juges avaient participé (en ce qu’il ne s’agissait pas d’un tribunal établi par la loi). Au lieu d’exécuter cet arrêt, conformément aux obligations nées de la Convention européenne des droits de l’homme qui leur incombent, les autorités ont saisi la Cour constitutionnelle polonaise pour qu’elle examine la constitutionnalité, au regard de la constitution, de l’article 6 de la Convention. Le 24 novembre 2021, la Cour constitutionnelle a jugé que l’article 6.1 de la Convention européenne des droits de l’homme (droit à un procès équitable devant un tribunal indépendant) n’était pas compatible avec la Constitution polonaise s’il était appliqué à la Cour constitutionnelle ou utilisé pour donner à la Cour de Strasbourg le droit d’évaluer la légalité du processus d’élection des juges de la Cour constitutionnelle. En réponse, se prévalant des compétences que lui confère l’article 52 de la Convention, la Secrétaire Générale a demandé aux autorités polonaises de lui fournir, avant le 7 mars 2022, des explications sur la manière dont le droit interne assure la mise en œuvre effective des articles 6 et 32 de la Convention à la suite de l’arrêt de la Cour constitutionnelle. La réponse a été reçue le 8 mars 2022.
79. Dans l’intervalle, le 22 juillet 2021, la Cour européenne des droits de l’homme a rendu un arrêt dans l’affaire Reczkovicz c. Pologne (requête no 43447/19), dans lequel elle a dit à l’unanimité qu’il y avait eu violation de l’article 6.1 de la Convention dans la procédure disciplinaire engagée contre la requérante (une avocate), et que la chambre disciplinaire de la Cour suprême ne pouvait être considérée comme un «tribunal établi par la loi» au sens de la Convention. Comme dans l’affaire Xero Flor c. Pologne, le ministre de la Justice a saisi la Cour constitutionnelle polonaise pour qu’elle examine la constitutionnalité, au regard de la Constitution, de la première phrase de l’article 6.1 de la Convention. Le 10 mars 2022, la Cour constitutionnelle a rendu un arrêt dans lequel elle a conclu que l’article 6.1 de la Convention était incompatible avec la Constitution dans la mesure où elle étend l’expression «droits et obligations de caractère civil» au droit individuel d’un juge d’exercer une fonction administrative dans la structure du pouvoir judiciaire ordinaire du système juridique polonais; en déterminant si un «tribunal» est «établi par la loi», elle permet à la Cour européenne des droits de l’homme d’ignorer les dispositions de la Constitution, les statuts et les arrêts de la Cour constitutionnelle polonaise, d’examiner les statuts concernant le système judiciaire et la compétence des tribunaux, ainsi que le statut régissant le Conseil national de la magistrature et de créer de manière indépendante des normes relatives à la procédure de nomination des juges nationaux. Le 16 mars, la Secrétaire Générale du Conseil de l’Europe a demandé aux autorités polonaises de lui fournir des informations supplémentaires sur la manière dont le droit polonais assurerait la mise en œuvre effective des articles 6 et 32 de la Convention à la suite de cette décision. La réponse des autorités polonaises a été reçue le 23 juin 2022.
80. Le 9 novembre 2022, la Secrétaire Générale a présenté au Comité des Ministres son rapport 
			(5) 
			<a href='https://rm.coe.int/rapport-de-la-secretaire-generale-en-vertu-de-l-article-52-de-la-convention/1680a8eb56'>https://rm.coe.int/rapport-de-la-secretaire-generale-en-vertu-de-l-article-52-de-la-convention/1680a8eb56.</a> en vertu de l’article 52 de la Convention, qui contient une analyse juridique des réponses des autorités polonaises. Ce rapport a été publié le 23 novembre après avoir été discuté par le Comité des Ministres. Dans son analyse, la Secrétaire Générale a clairement indiqué que la Pologne, comme tous les autres pays, est obligée de mettre en œuvre la Convention et de se conformer aux arrêts de la Cour européenne, même si, dans des cas extrêmes, cela nécessiterait de modifier la Constitution. Il ressort clairement du rapport que les décisions de la Cour constitutionnelle relatives à la compatibilité de la Convention avec la Constitution polonaise constituent un défi inacceptable à la suprématie de la Convention européenne des droits de l’homme et vont à l’encontre de ses obligations de membre.
81. Afin de débloquer les fonds de relance de l’Union européenne qui avaient été gelés pour non-respect par la Pologne des engagements en matière d’État de droit qu’elle avait pris envers l’Union européenne, ainsi que pour mettre fin à la condamnation par la Cour européenne de justice à une astreinte d’un million d’euros par jour pour ne pas avoir suspendu les activités de la chambre disciplinaire des juges, les autorités polonaises ont adopté des amendements à la loi sur la Cour suprême et aboli la chambre disciplinaire. Ces modifications sont entrées en vigueur le 15 juillet 2022. Toutefois, la Commission européenne a jugé qu’elles n’étaient pas suffisantes pour répondre à ses préoccupations et débloquer les fonds. D’autres réformes sont nécessaires. Le Conseil national de la magistrature qui, comme l’a fait valoir la Cour européenne des droits de l’homme, ne peut plus être considéré comme étant indépendant et est placé sous le contrôle politique des autorités, demeure un obstacle sérieux. On voit mal comment la Pologne pourrait respecter ses engagements en matière d’État de droit envers l’Union européenne et le Conseil de l’Europe sans réformer le Conseil national de la magistrature.

2.2.8. Serbie

82. En mai 2019, la commission de suivi a examiné les commentaires des autorités serbes sur un avant-projet de rapport sur le suivi de la Serbie. Conformément à la décision des (précédents) corapporteurs, la présentation du projet de rapport à la commission a cependant été reportée. Par la suite, l’élaboration du rapport a été retardée par la pandémie, de nouveaux changements au niveau des rapporteurs, les élections législatives de juin 2021 et les élections législatives et présidentielles anticipées d’avril 2022. L’année 2022 a également été marquée par la nomination de nouveaux rapporteurs par la commission de suivi, à savoir Mme Christoffersen (Norvège, SOC) 
			(6) 
			Mme
Christoffersen m’a remplacé en février 2022, après mon élection
à la présidence de la commission de suivi. Elle a démissionné en
octobre 2022 après avoir été nommée rapporteure chargée du suivi
de l’Azerbaïdjan). Mme Decroix a remplacé M. Liddell-Grainger (Royaume-Uni,
CE/AD). en février 2022, Mme Eva Decroix (République tchèque, CE/AD) en mai 2022 et M. Axel Schäfer (Allemagne, SOC) en décembre 2022.
83. Le 16 janvier 2022, 59 % des électeurs serbes ont approuvé des amendements constitutionnels visant à réduire l’influence politique au sein du système judiciaire, conformément à la majorité des recommandations formulées par la Commission de Venise en décembre 2021. Les rapporteurs y ont vu une première étape importante et une condition préalable à la dépolitisation du pouvoir judiciaire et à la consolidation de l’État de droit, tout en relevant que le pays restait confronté à des défis démocratiques, notamment l’absence d’une opposition viable au parlement et un environnement polarisé.
84. En ce qui concerne les élections d’avril 2022, des modifications importantes du cadre électoral ont été adoptées le 4 février 2022, à l’issue de larges consultations interpartis. La mission ad hoc d’observation des élections de l’Assemblée a relevé que, malgré le bon déroulement du scrutin, les élections avaient été marquées par plusieurs lacunes procédurales systématiques et que des recommandations formulées de longue date n’avaient pas été suivies d’effet, notamment en ce qui concerne l’accès aux médias, le financement des campagnes, les mesures visant à lutter contre les pressions exercées sur les électeurs ainsi que le contrôle et l’audit publics des listes électorales. Le Président sortant, M. Vučić, a été réélu au premier tour avec 60 % des voix. Le résultat de ces élections a permis de constituer un parlement plus pluraliste, avec une majorité parlementaire formée par la coalition menée par le Parti progressiste serbe (SNS), le Parti socialiste de Serbie (SPS), l’Alliance démocratique des Croates de Vojvodine (DSHV) et l’Alliance des Hongrois de Vojvodine (SVM). Le parlement s’est à nouveau réuni en août 2022 ; le gouvernement dirigé par la Première ministre sortante, Mme Brnabić, a prêté serment le 26 octobre 2022.
85. Dans le domaine de l’État de droit, les autorités serbes ont élaboré une législation d’application des amendements constitutionnels sur le pouvoir judiciaire. Dans son avis d‘octobre 2022 sur trois projets de loi sur l’organisation des tribunaux, les juges et le Conseil supérieur de la magistrature, la Commission de Venise a loué les efforts consacrés à la préparation globale de ce paquet législatif et relevé que le système judiciaire serbe était toujours caractérisé par un esprit hiérarchique et de multiples formes d’évaluations et de contrôles. Elle a souligné la nécessité de changer la culture juridique prévalant au sein du système judiciaire et émis plusieurs propositions concrètes pour améliorer les projets de loi.
86. Dans son deuxième Rapport de conformité intermédiaire de mars 2022 (Quatrième cycle d’évaluation), le GRECO reconnaît que des progrès ont été faits, notamment en ce qui concerne la modification de la loi relative à la prévention de la corruption conformément à ses recommandations, l’amélioration de la transparence du processus d’élaboration des lois, l’établissement d’un dispositif plus efficace pour la participation du public au processus législatif à un stade très précoce et l’adoption d’un code de conduite pour les parlementaires. Des progrès ont également été constatés dans la prévention de la corruption des procureurs et des juges. Une nouvelle stratégie anti-corruption et son plan d’action doivent encore être élaborés. En juillet 2022, le GRECO a publié son Rapport d’évaluation du Cinquième cycle sur la prévention de la corruption parmi les personnes occupant de hautes fonctions de l’exécutif (PHFE), dans lequel il met en avant le rôle de l’Agence pour la prévention de la corruption ainsi que la nécessité d’élaborer une stratégie publique sur la prévention de la corruption couvrant explicitement les PHFE et les forces de police, et de contrôler systématiquement et de manière approfondie les déclarations de patrimoine des PHFE.
87. La liberté des médias demeure un sujet de préoccupation. En 2022, la Plateforme du Conseil de l’Europe pour renforcer la protection du journalisme et la sécurité des journalistes a déclenché 14 alertes (qui n’ont suscité qu’une seule réaction de la part des autorités), qui concernaient notamment des agressions, des menaces ou des intimidations à l’encontre de journalistes. Le rôle et l’indépendance de l’Organe de supervision des médias électroniques sont également sujets à caution depuis qu’il a délivré, en juillet 2022, des licences de radiodiffusion nationales d’une durée de huit ans aux quatre mêmes fréquences nationales que lors de la période précédente, malgré les avertissements pour non-respect de ses obligations légales.
88. La lutte contre la discrimination a été au centre de la partie de session d’octobre 2022 de l’Assemblée. Face aux tentatives d’interdire l’Europride pour des raisons de sécurité, le Rapporteur général de l’Assemblée sur les droits des personnes LGBTI, Christophe Lacroix, a lancé un appel en faveur du respect de la liberté d’expression et de réunion. L’Europride a finalement pu avoir lieu le 17 septembre, avec un itinéraire raccourci. L’Assemblée a examiné ce point en octobre, dans le cadre d’un débat d’actualité intitulé «Les menaces d’interdiction des manifestations Pride dans les États membres du Conseil de l’Europe».
89. La situation a aussi été marquée par des tensions avec le Kosovo* 
			(7) 
			* Toute
référence au Kosovo dans le présent document, qu’il s’agisse de
son territoire, de ses institutions ou de sa population, doit être
entendue dans le plein respect de la Résolution 1244 du Conseil
de sécurité de l’Organisation des Nations Unies, sans préjuger du
statut du Kosovo. , notamment au sujet des plaques minéralogiques et par l’absence de progrès dans les négociations sur l’accord global juridiquement contraignant sur la normalisation de leurs relations dans le cadre du dialogue facilité par l’Union européenne.

2.2.9. Türkiye

90. En 2022, la commission de suivi a porté toute son attention à la préparation d’un rapport de suivi à mi-parcours sur la Türkiye, consacré essentiellement au système judiciaire, à l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme et à la préparation des élections présidentielles et législatives de 2023.
91. Les rapporteurs de l’Assemblée, John Howell (Royaume-Uni, CE/AD) et Boriss Cilevičs (Lettonie, SOC), se sont rendus dans le pays du 20 au 24 mars 2022 et se sont félicités des échanges francs et ouverts qu’ils ont eus avec les autorités turques. Ils sont retournés en Türkiye du 18 au 20 mai, à la suite de la condamnation du philanthrope Osman Kavala à la peine de prison à perpétuité aggravée – en dépit d’un arrêt de décembre 2019 de la Cour européenne des droits de l’homme qui, ayant estimé que son placement en détention provisoire était illégal, avait demandé aux autorités de le libérer. De retour de Türkiye, les rapporteurs de l’Assemblée ont précisé que «la solution dans l’affaire Kavala [était] entre les mains du système judiciaire turc, qui [avait] la capacité de trouver une solution juridique conforme à l’arrêt de Strasbourg».
92. En février 2022, le Comité des Ministres a lancé une procédure d’infraction pour non-exécution de l’arrêt de la Cour dans l’affaire Osman Kavala, que la Cour a confirmé en juillet 2022. À la suite du rapport de la commission et à la Résolution 2459 (2022), l’Assemblée a invité les présidents de l’Assemblée et du Comité des Ministres «à poursuivre des relations étroites et à utiliser pleinement les moyens dont ils disposent respectivement, si le manquement de la Türkiye à ses obligations devait perdurer».
93. La commission demeure préoccupée par des questions soulevées de manière récurrente, dont la répression exercée à l’encontre des membres de l’opposition politique, y compris les procédures visant à lever l’immunité parlementaire (de membres de partis d’opposition, pour l’essentiel), la tentative de dissolution du Parti démocratique des peuples (HDP), les restrictions à la liberté d’expression et des médias et l’interprétation trop large de la législation antiterroriste. Dans sa Résolution 2459 (2022), l’Assemblée exhortait les autorités à engager des réformes de toute urgence pour restaurer la pleine indépendance du pouvoir judiciaire et un système efficace de freins et de contrepoids. Pour les rapporteurs, la peine de prison infligée au chef de l’opposition Canan Kaftancıoğlu et l’arrestation de la présidente de l’Association turque des médecins Şebnem Korur Fincancı sont autant de mesures regrettables. La commission a également conclu que le changement de système politique adopté en 2017 – bien qu’il s’agisse du droit souverain de tout État membre – a gravement affaibli les institutions démocratiques en Türkiye et rendu les mécanismes d’équilibre des pouvoirs dysfonctionnels et défaillants.
94. Le 24 novembre, les rapporteurs ont salué la décision de la Cour de cassation d'annuler les peines d'emprisonnement de quatre militants des droits humains dans le procès Büyükada, tout en s'attendant à un nouveau procès rapide du Président honoraire d'Amnesty International Türkiye, Taner Kılıç, conformément à l’arrêt de mai 2022 de la Cour européenne des droits de l’homme.
95. La commission a porté une attention particulière à l’environnement électoral global en vue des élections présidentielles et législatives de 2023. La législation électorale a été révisée le 25 avril 2022. Tout en se félicitant de l’abaissement du seuil électoral de 10 % à 7 %, la commission a dit partager les préoccupations exprimées par la Commission de Venise dans son avis de juin 2022 concernant d’autres dispositions relatives à la composition des bureaux électoraux ou à l’abus de pouvoir pendant les campagnes électorales. Par ailleurs, malgré la demande de l’Assemblée et de la Commission de Venise de ne pas la promulguer, la «loi sur la désinformation» a été adoptée le 13 octobre. Les rapporteurs de l’Assemblée ont déploré une disposition qui prévoit des peines de prison pour qui diffuse des «informations fausses ou trompeuses», déclarant qu’elle constituait «une ingérence qui n’est ni nécessaire, ni proportionnée dans la liberté d’expression», susceptible de compromettre la tenue d’élections libres et équitables.
96. Dans sa Résolution 2459 (2022), l’Assemblée exhortait également les autorités à être attentives à la situation des détenus gravement malades. Les rapporteurs ont accueilli favorablement la remise en liberté, le 27 octobre, de l’ancienne députée Aysel Tuğluk, qui aurait être libérée depuis longtemps. Le 14 décembre, la commission de suivi a organisé une audition sur le suivi de la Résolution 2459 (2022) afin d’évaluer la mise en œuvre des recommandations de l’Assemblée.

2.2.10. Ukraine

97. Du fait de l’agression militaire de la Fédération de Russie contre l’Ukraine, les corapporteurs, M. Alfred Heer (Suisse, ADLE) et M. Birgir Thórarinsson (Islande, PPE/DC), n’ont pas pu se rendre dans le pays, en dépit de leurs efforts et de ceux déployés par la délégation ukrainienne pour organiser leur visite.
98. L’Assemblée suit de près la situation engendrée par l’agression de la Fédération de Russie et l’a examinée en détail dans plusieurs documents, à savoir: «Conséquences de l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine» (Doc. 15477), «Conséquences de l’agression persistante de la Fédération de Russie contre l’Ukraine: rôle et réponse du Conseil de l’Europe» (Doc 15506), «L’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine: faire en sorte que les auteurs de graves violations du droit international humanitaire et d’autres crimes internationaux rendent des comptes» (Doc. 15510), «Conséquences humanitaires et migrations internes et externes en lien avec l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine» (Doc 15547) et «Nouvelle escalade dans l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine» (Doc 15631).
99. Alors que la guerre retenait toute l’attention, les autorités ont poursuivi sans relâche leurs efforts pour que les institutions démocratiques et l’État de droit continuent à fonctionner, malgré une situation rendue difficile par la guerre. Qui plus est, de nombreuses réformes et initiatives législatives ont été élaborées et fait l’objet de débats à la Verkhovna Rada, du fait également de la demande d’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne et du statut de candidat qui lui a été accordé. Les autorités méritent d’être félicitées pour leurs efforts, mais il importe, parallèlement, de faire en sorte que les normes et principes de la démocratie et de l’État de droit soient respectés autant que possible, malgré les difficultés.
100. Aucun suivi normal des obligations et des engagements de l’Ukraine n’est possible tant que la guerre se poursuit ; cela étant, les rapporteurs ont continué à suivre la situation dans le pays concernant les réformes en cours et le fonctionnement des institutions démocratiques. À cet égard, la commission a organisé un échange de vues avec Mme Mariia Mezentseva, présidente de la délégation ukrainienne, lors de la partie de session de juin, et les rapporteurs et des représentants du parti Solidarité européenne ont tenu une visioconférence sur les réformes en cours en Ukraine, le 10 novembre 2022.
101. L’Ukraine a poursuivi son action visant à renforcer les institutions de lutte contre la corruption. Le 28 juillet 2022, le procureur général Andriy Kostin a nommé Oleksandr Klymenko à la tête du Bureau du procureur spécialisé dans la lutte contre la corruption (SAPO). M. Kostin lui-même n’avait été nommé procureur général que la veille, le 27 juillet 2022, en remplacement de Mme Irina Venediktova, limogée le 19 juillet pour n’avoir pas réagi de manière appropriée face aux très nombreux cas de collaboration avec la Fédération de Russie dans les parquets ukrainiens 
			(8) 
			Plus
de 651 procédures pénales ont été ouvertes contre des employés de
bureaux de procureurs et des représentants des forces de l’ordre
pour trahison et activités de collaboration présumées.. Le mandat du directeur du Bureau national de lutte contre la corruption (NABU), Artem Sytnyk, étant arrivé à échéance le 16 avril, son successeur devrait être nommé d’ici fin 2022. Compte tenu du rôle important du NABU dans la lutte contre la corruption en Ukraine, les autorités sont instamment priées de faire le nécessaire pour que le successeur de M. Sytnyk, qui bénéficie également de la pleine confiance du peuple ukrainien, soit nommé sans retard excessif.
102. Le 5 novembre 2021, le Président Zelensky a signé l’entrée en vigueur de la loi dite anti-oligarque. Bien que les objectifs recherchés soient louables, la loi soulève un certain nombre de questions, notamment le fait qu’une personne peut être déclarée oligarque, et par conséquent considérablement limitée dans ses droits, par une décision du Président en concertation avec le Conseil national de sécurité et de défense, qui disposerait d’un très large pouvoir discrétionnaire à cet égard et dont la décision ne peut faire l’objet d’aucun recours devant les tribunaux. Le Commissaire aux droits de l’homme de la Verkhovna Rada (médiateur), a fait part de ses inquiétudes quant à la constitutionnalité de la loi, que la Verkhovna Rada a soumise à la Commission de Venise pour avis. Malheureusement aucun avis n’a pu être adopté à cause de la guerre. La loi étant déjà appliquée, il est important que la Commission de Venise ne tarde pas à finaliser son avis et que la Verkhovna Rada donne rapidement effet à ses recommandations et prenne en compte ses éventuelles préoccupations.
103. La Verkhovna Rada a adopté le projet de loi sur les médias le 30 août, en première lecture. Cette loi qui vise, entre autres, à réglementer les médias en ligne et à renforcer les pouvoirs de l’organe national de régulation des médias, aurait été élaborée avec l’assistance de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe. Or, plusieurs organisations de médias nationales et internationales ont émis des réserves à propos du projet de loi qui, selon elles, conférerait aux autorités un pouvoir discrétionnaire trop important sur les médias et pourrait restreindre la liberté d’expression en Ukraine. Malgré les conditions particulières imposées par la guerre, les autorités sont instamment priées de veiller à ce que le projet de loi final soit pleinement conforme aux normes et principes du Conseil de l’Europe en matière de liberté d’expression et de liberté des médias.

2.3. Dialogue postsuivi

2.3.1. Bulgarie

104. Le dernier rapport de postsuivi a été examiné par l’Assemblée en juin 2019. À cette occasion, elle a décidé de poursuivre le dialogue postsuivi et invité les rapporteurs à continuer à évaluer les progrès réalisés dans cinq domaines de préoccupation spécifiques, notamment la corruption à haut niveau, la transparence de la propriété des médias, les droits humains des minorités, les discours de haine et la violence à l’égard des femmes.
105. Depuis juillet 2020, la Bulgarie fait face à une crise politique majeure qui a entraîné la tenue de quatre élections législatives anticipées successives – le 4 avril 2021, le 11 juillet 2021, le 14 novembre 2021 (le jour de l’élection présidentielle) et le 2 octobre 2022. Sur les 17 derniers mois, la Bulgarie a été dirigée pendant neuf mois par des gouvernements provisoires.
106. La crise avait été déclenchée par des scandales de corruption, un manque de respect de l’État de droit et les manifestations de rue qui ont suivi. Depuis lors, l’environnement politique est marqué par une fragmentation du paysage politique. La situation a été aggravée par des préoccupations socio-économiques de plus en plus fortes et un discours polarisé sur les politiques énergétiques et l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie.
107. À la suite des élections législatives anticipées de novembre 2021, sept partis et coalitions politiques ont fait leur entrée au parlement: à la surprise générale, une nouvelle coalition, Nous continuons le changement (PP), fondée en mai 2021 (deux mois avant les élections de juillet 2021) par deux ministres du gouvernement provisoire de mai 2021, est arrivée en tête avec 25,3 % des suffrages; Citoyens pour le développement européen de la Bulgarie (GERB-SDS) – (22,4 %); Mouvement des droits et libertés (DPS) – 12,8 %; BSP pour la Bulgarie (BSP) – 10 %; Il y a un tel peuple (ITN) – 9,3 %; Bulgarie démocratique (DB) – 6,2 % et Revival – 4,8 %. Le PP a formé un gouvernement de coalition dirigé par Kiril Petkov avec le BSP, l’ITN et le DB, qui a permis de sortir le pays de l’impasse créée par les deux élections législatives anticipées précédentes qui n’avaient permis à aucun parti de former un gouvernement.
108. Par la suite, la coalition a connu des tensions dues notamment à la nomination de hauts responsables et à la question de l’envoi d’armes en Ukraine. Le 8 juin 2022, le parti ITN a quitté le gouvernement en raison de désaccords au sujet du budget de l’État, de la politique fiscale et de la levée du veto de la Bulgarie à l’ouverture des négociations d’adhésion à l’Union européenne de la Macédoine du Nord. Le 2 août 2022, au lendemain du vote de défiance au parlement et suite à l’échec des trois mandats à former un nouveau gouvernement, le Président Rumen Radev a dissous le parlement, conformément à la Constitution, nommé un gouvernement intérimaire et fixé au 2 octobre la tenue de nouvelles élections.
109. Les élections d’octobre 2022 ont été marquées par la lassitude des électeurs, comme en témoigne le faible taux de participation (39,3 %). Pour les observateurs du Conseil de l’Europe, elles ont permis une véritable mise en concurrence des différents candidats, les libertés fondamentales ont été respectées et le cadre électoral légal a constitué une base globalement adéquate pour la conduite d’élections démocratiques. Malgré un calendrier serré, le scrutin a été bien géré.
110. Le GERB-SDS a obtenu 24,4 % des suffrages (+8 sièges par rapport aux élections précédentes); le PP 19,5 % (-14 sièges); le DPS 13,2 % (+2 sièges); Renouveau 9,8 % (+14 sièges); le BSP 8,9 % (-1 siège); le DB 7,1 % (+4 sièges). Avec 3,7 % des suffrages, le parti ITN n’a pas atteint le seuil de 4 % des suffrages exprimés requis et n’est donc pas représenté au parlement.
111. Malheureusement, les élections n’ont pas résolu la crise politique et la composition actuelle du parlement ne prête pas à l’optimisme puisqu’il n’y a pas de majorité pour former un gouvernement stable. Au moment de la rédaction du rapport, il est encore trop tôt pour savoir si un gouvernement pourra être formé ou si de nouvelles élections anticipées devront être organisées au début de l’année prochaine.
112. Les rapporteures de suivi, Mme Thórhildur Sunna Ævarsdóttir (Islande, SOC) et Mme María Valentina Martínez Ferro (Espagne, PPE/DC) (toutes deux nommées en 2022), ont participé aux missions d’observation des élections législatives par l’Assemblée et suivent la situation en Bulgarie. Jusqu’à présent, la crise les a empêchées de préparer le rapport de postsuivi complet qui, conformément au règlement, mettra fin au dialogue postsuivi et sortira la Bulgarie du suivi de l’Assemblée ou soumettra le pays à la procédure de suivi générale.

2.3.2. Monténégro

113. En 2022, le Monténégro a été secoué par une forte crise politique qui est aussi le résultat de changements intervenus depuis le scrutin de 2020, lequel a marqué un tournant historique dans l’histoire du pays en écartant le DPS (Parti démocratique des socialistes) du pouvoir.
114. Début février 2022, le gouvernement de M. Krivokapić a été contraint de démissionner à l’issue d’un vote de défiance au parlement. Le 3 mars, le Président de la République Milo Đukanović a demandé à son ancien vice-Premier ministre Dritan Abazović de former un gouvernement. Le 28 avril, au terme de longues négociations pour parvenir à une majorité au sein d’un parlement divisé, le parlement a approuvé le nouveau gouvernement de coalition dirigé par M. Abazović (Premier ministre), le DPS s’engageant à lui apporter son soutien sans en faire partie. Le principal objectif du nouveau gouvernement était d’appliquer les réformes nécessaires pour accélérer l’adhésion du Monténégro à l’Union européenne, y compris celles recommandées par les organes de suivi du Conseil de l’Europe.
115. La visite du pays effectuée du 10 au 13 juillet par Damien Cottier (Suisse, ADLE) et Nicos Tornaritis (Chypre, PPE/DC) a permis aux corapporteurs de se livrer à un examen approfondi des progrès accomplis dans les quatre domaines prioritaires dans lesquels l’Assemblée souhaite poursuivre le dialogue postsuivi, à savoir l’indépendance du pouvoir judiciaire, la confiance dans le processus électoral, la situation des médias et la lutte contre la corruption.
116. Les autorités ont présenté un certain nombre de projets de loi et se sont dites convaincues que la réforme électorale examinée par une commission parlementaire spéciale sera adoptée avant la tenue de nouvelles élections. La nomination des juges de la Cour constitutionnelle et des membres du Conseil de la justice ne devrait être qu’une question de semaines. Les nominations à la Cour constitutionnelle sont urgentes car l’incapacité des partis politiques à surmonter leurs désaccords laisse de nombreux postes vacants et le départ à la retraite de l’un des juges, en octobre, laissera la Cour sans quorum. Tous les partis politiques sont conscients de l’importance de ces nominations pour l’État de droit et le bon fonctionnement des institutions démocratiques.
117. Les progrès en matière de lutte contre la corruption sont très encourageants. Les évaluations précédentes ont conclu que le cadre juridique était satisfaisant mais qu’il manquait une volonté politique pour le mettre en œuvre. Le bilan des enquêtes, des poursuites et des condamnations définitives est faible. Une série d’affaires de grande importance est attendue pour démontrer l’engagement à combattre la corruption. Au cours de leur visite, les corapporteurs ont rencontré le procureur général spécial, qui leur a dit recevoir tout le soutien dont il avait besoin de la part des autorités, aussi bien en termes de personnel que de moyens matériels. Dans les semaines qui ont précédé la visite, l’arrestation de l’ancienne présidente de la Cour suprême du Monténégro, Vesna Medenica, ainsi que de l’ancien Président du tribunal de commerce, Blažo Jovanić, pourrait être le signe d’une volonté politique de s’attaquer à la corruption.
118. Le débat politique s’est toutefois concentré sur l’adoption d’un accord entre le gouvernement et l’Église orthodoxe serbe. De tels accords existent avec toutes les autres communautés religieuses, mais les liens avec l’Église orthodoxe serbe sont extrêmement sensibles au Monténégro et nombreux sont ceux qui considèrent que le contenu de l’accord est illégal et inconstitutionnel. À la suite de la décision du gouvernement de conclure cet accord, le DPS a retiré son soutien à Abazović et le 20 août, le parlement a adopté une nouvelle motion de censure. Le gouvernement d’Abazović reste provisoirement en place jusqu’à la formation d’un nouveau gouvernement ou la convocation d’élections législatives anticipées.
119. Le 20 septembre, le Président Đukanović a proposé de convoquer des élections anticipées après avoir refusé de valider le candidat au poste de Premier ministre proposé par les trois blocs politiques au pouvoir, Miodrag Lekić. Le Premier ministre sortant, Dritan Abazović, a accusé le Président Đukanović d’abuser de ses droits constitutionnels et de bloquer le dialogue politique.
120. Cette situation a compromis l’adoption de la réforme électorale et la désignation des juges à la Cour constitutionnelle. Le parlement n’ayant pas réussi à procéder à l’élection des juges à sa séance du 21 octobre, la Cour constitutionnelle ne dispose plus du quorum nécessaire pour statuer sur les litiges électoraux. Dans une déclaration 
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			<a href='https://pace.coe.int/fr/news/8879/montenegro-pace-co-rapporteurs-regret-that-the-parliament-did-not-proceed-to-the-election-of-judges-of-the-constitutional-court'>Déclaration</a> des corapporteurs (28 octobre 2022). du 28 octobre, les corapporteurs ont déploré que le parlement ne soit pas parvenu à prendre cette décision urgente et indispensable.

2.3.3. Macédoine du Nord

121. En février 2022, les corapporteurs de l'Assemblée sortants, Mme Lise Christoffersen (Norvège, SOC) et M. Zsolt Csenger-Zalán (Hongrie, PPE/DC) ont soumis à la commission une note d'information faisant le point sur les principaux faits nouveaux survenus dans le pays depuis l'adoption de la Résolution 2304 (2019). Depuis lors, la commission a nommé de nouveaux corapporteurs, à savoir Mme Sibel Arslan (Suisse, SOC) en février 2022 et Mme Ria Oomen-Ruijten (Pays-Bas, PPE/DC) en octobre 2022.
122. A la suite de la démission du Premier ministre, M. Zaev, en décembre 2021, le parlement a approuvé le 23 janvier 2022, par 62 voix (sur 108), la nomination d’un nouveau gouvernement dirigé par M. Kovacevski et composé de ministres issus de l’Union sociale-démocrate de Madécoine (SDSM), de l'Union démocratique pour l'intégration (DUI), du nouveau partenaire de la coalition, le parti Alternative, et du Parti démocratique des Albanais (DPA). Le parlement compte actuellement 42% de députées et 35% de députés issus des communautés non majoritaires, soit les chiffres les plus élevés jamais enregistrés.
123. Le pays a poursuivi son programme pro-européen. Malgré la signature d'un traité d'amitié bilatéral en 2017, la Bulgarie a bloqué l'adoption d'un cadre de négociation par le Conseil de l'Union européenne (qui avait décidé, en mars 2020, d'ouvrir les négociations d'adhésion). Les deux parties ont finalement accepté la «proposition française» (la France assumait alors la présidence du Conseil de l'Union européenne), qui exigeait une révision constitutionnelle aux fins d’inclure une référence à la minorité bulgare dans le préambule de la Constitution. (Cette proposition a déclenché des manifestations qui ont eu lieu le 2 juillet à Skopje). La Bulgarie a levé son veto le 24 juin. Le 16 juillet, le Parlement de la Macédoine du Nord a approuvé une motion visant à modifier la Constitution (l'opposition a boycotté le vote), tout en s'engageant à discuter des questions en suspens avec le Gouvernement bulgare. La Macédoine du Nord et la Bulgarie ont signé un accord bilatéral le 17 juillet qui a ouvert la voie à l'ouverture des négociations d'adhésion à l'Union européenne le 19 juillet. Cependant, la révision de la constitution ne fait pas l’objet d’une majorité au Parlement de Macédoine du Nord. La Commission européenne a également mentionné dans son rapport 2022 la polarisation persistante qui existe au parlement entre les partis au pouvoir et l'opposition, le «blocage actif» du parlement par le principal parti d'opposition, l’Organisation révolutionnaire intérieure macédonienne – Parti démocratique pour l’unité nationale macédonienne (VMRO-DPMNE), depuis mai 2022, et l'absence de consensus qui retarde les nominations importantes de hauts responsables. Sur une note positive, le parlement a nommé, en novembre 2022, deux nouveaux juges à la Cour constitutionnelle. Trois autres juges doivent être nommés pour que la Cour constitutionnelle puisse fonctionner dans sa pleine capacité.
124. Les rapporteurs ont suivi de près l'évolution de la situation en ce qui concerne la protection des minorités nationales. Tous les résultats du recensement de 2021 n'ont pas encore été publiés. Le Comité consultatif de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales (CCMN) a publié le 21 septembre 2022 son Cinquième avis sur la Macédoine du Nord, notant que le pays a fait des progrès significatifs dans la protection juridique des minorités nationales (nouvelle loi sur la prévention et la protection contre la discrimination, stratégie «Une société ouverte et inclusive»), mais ont noté que leur mise en application concrète est problématique. La question de la participation des minorités à l'administration de l'État continue également de poser un problème.
125. Dans le domaine de la lutte contre la corruption, la Macédoine du Nord, qui affichait en 2021 un score de 39/100 sur l'indice de perception de la corruption de Transparency International (contre 35 en 2019 et 2020), était classée 87e sur 180 pays (91e en 2020). L'addendum au deuxième rapport de conformité du GRECO (quatrième cycle d'évaluation) publié le 4 juillet indique qu'un nouveau Code de déontologie à l’usage des députés et de nouvelles Lignes directrices connexes étaient en cours d'élaboration. Sous réserve d'un certain nombre d'améliorations et de simplifications, ce code fournira «un cadre approprié pour promouvoir l’intégrité et guider le comportement éthique des députés», en ce qui concerne notamment les conflits d’intérêts, les relations avec les lobbyistes, les cadeaux, etc.
126. Dans l'ensemble, le GRECO a noté que les progrès de la mise en œuvre de ses recommandations avaient été modestes. En ce qui concerne le pouvoir judiciaire, le GRECO a pris note de l’extension de l’éventail des sanctions applicables aux juges et s'est félicité de l'adoption d'un nouveau code de déontologie à l’usage du Conseil des procureurs publics. Il a cependant réitéré ses craintes relatives au fait que les intentions antérieures des autorités de retirer officiellement le ministre de la Justice de la composition du Conseil de la magistrature ne s’étaient toujours pas concrétisées, malgré l’influence politique que ce ministre est susceptible d’exercer.
127. La Commission d'État pour la prévention de la corruption continue de jouer un rôle proactif. Donnant suite au Rapport de conformité du Cinquième cycle d'évaluation du GRECO de 2021, la Macédoine du Nord a adopté des amendements à la loi sur les affaires intérieures et à la loi sur la police en avril 2022.

2.4. Examens périodiques

2.4.1. France 

128. Les travaux sur l'examen périodique des obligations de la France découlant de son adhésion ont été limités au cours du premier semestre de l'année en raison des campagnes électorales liées à l’élection présidentielle et aux élections législatives, que les rapporteures Mme Fiona O’Loughlin (Irlande, ADLE) et Mme Yelisaveta Yasko (Ukraine, PPE/DC) ont suivies de près.
129. Selon le rapport final de l'OSCE/BIDDH, la campagne électorale a été concurrentielle et s'est déroulée dans un climat d’apaisement et d’ouverture, ainsi que dans le respect des libertés fondamentales. Tous les candidats ont élaboré des programmes de campagne complets, abordant sans détour l'augmentation du coût de la vie, la réforme des retraites, la criminalité, l'emploi, les soins de santé, l'immigration et d'autres questions. La guerre en Ukraine a dominé le cycle de l'information tout au long de la campagne. Celle-ci a été marquée par une visibilité généralement équilibrée des femmes, qu’elles aient été intervenantes ou participantes, et par l’inclusion de messages sur l'égalité des genres dans les discours de la plupart des candidats. Le matériel de campagne était également accessible aux personnes souffrant de différents handicaps.
130. Certaines préoccupations ont été soulevées quant à l'influence de la concentration croissante de la propriété des médias sur la liberté éditoriale. La couverture médiatique disproportionnée du candidat d'extrême droite à la présidence, M. Éric Zemmour, qui a entraîné l'intervention des instances de régulation, a pu avoir une influence sur les thèmes, la tonalité et l'issue de la campagne.
131. Le premier tour de l'élection présidentielle a placé clairement en tête trois candidats : le président sortant M. Emmanuel Macron, la candidate d'extrême-droite Mme Marine Le Pen et le candidat d'extrême-gauche M. Jean-Luc Mélenchon. Au second tour, M. Emmanuel Macron a été réélu face à Mme Marine Le Pen. Les élections législatives qui ont suivi ont confirmé la division de l'électorat en trois blocs principaux: une coalition de gauche et d'écologistes, «la Nouvelle union populaire écologique et solidaire» (Nupes), une coalition centrale soutenant le président Macron, «Ensemble citoyens  et le parti d'extrême droite soutenant Marine Le Pen, «Rassemblement national». Avec 245 sièges, la coalition soutenant M. Emmanuel Macron n'a pas atteint la majorité absolue tandis que l'union de la gauche et des écologistes a obtenu 142 sièges et que le Rassemblement national a fait une percée inattendue, obtenant 89 sièges et surclassant le parti de droite traditionnel «Les Républicains».
132. L'absence de majorité absolue pour le président élu est un fait qui n’avait jamais eu de précédent en France depuis l’adoption du mandat présidentiel de 5 ans en 2000. M. Emmanuel Macron a nommé Mme Élisabeth Borne au poste de Première ministre, la deuxième femme à assumer de telles responsabilités en France après Mme Édith Cresson en 1991. Faute de majorité absolue, le gouvernement est sous la menace d'un vote de défiance, tandis que le président a le pouvoir constitutionnel de convoquer des élections législatives anticipées.
133. La commission a entendu Mme Claire Hédon, Défenseure des droits de la République française, en avril. Dans le sillage des élections législatives, les corapporteurs ont tenu plusieurs réunions avec d'importantes organisations de la société civile, notamment lors d'une visite de pays en septembre. L'exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme, notamment en ce qui concerne la situation dans les prisons françaises, le fonctionnement du système judiciaire, les pratiques en matière d'application de la loi et l'indépendance des médias ont fait partie des sujets abordés.
134. La nouvelle délégation parlementaire française à l'Assemblée a reçu ses pouvoirs lors de la partie de session d'octobre et à cette occasion, la commission a procédé à un échange de vues sur l'état de la procédure en présence de M. Bertrand Bouyx, président de la délégation parlementaire française et vice-président de notre Assemblée.
135. À la suite de la décision du Bureau de proroger la validité du mandat de trois rapports d'examen périodique, les corapporteures ont prévu de rendre visite aux autorités peu après la partie de session de janvier 2023 afin de soumettre le rapport final pour débat au cours de la partie de session de juin.

2.4.2. Hongrie

136. En 2022, la commission de suivi a achevé l’élaboration du rapport d'examen périodique sur le respect des obligations découlant de l'adhésion de la Hongrie au Conseil de l'Europe qu’elle avait initié en 2020. La commission était convenue que le rapport se concentrerait sur l'indépendance du pouvoir judiciaire, la situation des médias et les questions de bonne gouvernance.
137. Cette année a été marquée par l'organisation d'élections législatives le 3 avril 2022, qui se sont soldées par la victoire de l'Alliance civique hongroise (Fidesz) et de son partenaire de coalition, le Parti populaire chrétien-démocrate (KDNP). En conséquence, cette coalition bénéficie, presque sans interruption depuis 2010, d'une majorité parlementaire des deux tiers.
138. Le BIDDH a noté que les élections avaient été organisées de manière efficace et professionnelle mais qu'elles avaient été entachées d'un manque de transparence et d'équilibre dans la couverture médiatique. La campagne, qui s’est déroulée dans un climat très négatif, a été caractérisée par de nombreuses intrications entre la coalition au pouvoir et le gouvernement. Les dépenses importantes et non réglementées engagées par des entités autres que les candidats à l'élection, notamment par le biais de publicités sur les réseaux sociaux, ont largement favorisé le parti au pouvoir et confirmé les préoccupations antérieures du GRECO concernant le financement des partis politiques et des campagnes électorales. Dans son avis d'octobre 2021, la Commission de Venise avait averti que le principal effet de la réforme électorale serait de favoriser les candidats sortants. La commission de suivi est donc parvenue à la conclusion que le cadre électoral actuel ne garantit pas des conditions propices à la tenue d'élections équitables.
139. Après ces élections, les rapporteurs de l'Assemblée, MM. George Papandreou (Grèce, SOC) et Eerik-Niiles Kross (Estonie, ADLE), ont effectué une visite dans le pays en juin 2022. Ils ont exprimé leur inquiétude concernant le recours à des ordres juridiques spéciaux, en particulier la déclaration récente de l’«état de danger» (votée le 24 mai 2022) faisant suite au déclenchement de la guerre en Ukraine, malgré une majorité parlementaire des deux tiers dont jouit la coalition au pouvoir. Leurs préoccupations ont ensuite été confirmées par la décision du Parlement hongrois de prolonger, à compter du 1er novembre 2022, l’«état de danger» jusqu'à 180 jours, autant de fois que nécessaire, un acte qui a poussé les rapporteurs à réagir.
140. La commission a observé que l'exercice incontesté du pouvoir par la même coalition a réduit l'efficacité du système de freins et contrepoids et a renforcé l'influence de la coalition au pouvoir sur les organes de l'État et les principales institutions indépendantes. Les questions relatives à l'État de droit et à la démocratie soulevées par l’Assemblée depuis 2013, notamment la concentration excessive des pouvoirs, sont restées largement sans réponse. L'utilisation généralisée de lois cardinales, le déséquilibre des pouvoirs entre les organes judiciaires et, plus récemment, la création de «fondations d'intérêt public» sont également préoccupants.
141. La commission de suivi a conclu lors de sa réunion du 14 septembre que les effets cumulés des mesures préjudiciables à l'indépendance du pouvoir judiciaire, à la situation des médias, à la transparence et à l'obligation pour les institutions de l'État de rendre des comptes compromettent globalement le fonctionnement des institutions démocratiques. Elle a proposé de continuer à suivre de près les développements relatifs au fonctionnement des institutions démocratiques et de l’État de droit en Hongrie.
142. Le 13 octobre, pendant la session plénière, l’Assemblée a décidé, dans sa Résolution 2460 (2022), d’ouvrir une procédure de suivi à l’égard de la Hongrie jusqu’à ce que les préoccupations susmentionnées soient traitées de manière satisfaisante. La commission devrait désigner deux corapporteur·e·s pour le suivi de la Hongrie lors d’une prochaine réunion.

2.4.3. Malte

143. Le 23 juin 2022, l'Assemblée a adopté la Résolution 2451 (2022) «Le respect des obligations découlant de l'adhésion au Conseil de l'Europe de Malte» en se fondant sur un rapport d'examen périodique élaboré par les corapporteurs MM. Bernard Fournier (France, PPE/DC) et George Loucaides (Chypre, GUE).
144. Dans cette résolution, l'Assemblée notait que les rapports de la Commission de Venise et de la Commission d'enquête indépendante établie par les autorités maltaises sur recommandation de l'Assemblée à la suite de l'assassinat de Mme Daphné Caruana Galizia avaient mis au jour un dysfonctionnement systémique des institutions démocratiques et de l'État de droit ainsi qu’une culture d'impunité de la classe politique pour ce qui est des conflits d'intérêts et de la corruption.
145. L'Assemblée s'est donc félicitée des réformes ultérieures engagées par les autorités en ce qui concerne l'indépendance du pouvoir judiciaire et les procédures de nomination à des postes officiels, mais elle a estimé qu'une réforme complète et globale des institutions démocratiques et du système de freins et de contrepoids de Malte était encore nécessaire et urgente. Elle a donc formulé une série de recommandations concrètes à cet égard et a notamment recommandé aux autorités de mettre en œuvre une réforme en profondeur du Parlement maltais dans le but de créer une instance à temps plein capable d'assurer un contrôle parlementaire approprié et de reprendre l'initiative législative.
146. La vulnérabilité persistante du secteur public maltais à la corruption reste un sujet de préoccupation. Malgré la perception élevée de la corruption, une stratégie globale cohérente visant à prévenir ce fléau dans les institutions publiques fait toujours défaut. Cette situation a créé une culture de l'impunité à laquelle les autorités doivent s'attaquer comme une extrême priorité. Dans ce contexte, l'Assemblée a recommandé à Malte de supprimer son programme de «citoyenneté par l’investissement». Malheureusement, aucune mesure n'a été prise en ce sens par les autorités. Le 29 septembre 2022, la Commission européenne a assigné Malte devant la Cour de justice de l’Union européenne au sujet de ce programme, faisant écho aux réserves de l'Assemblée. Parallèlement, en juin de cette année, le Groupe d'action financière (GAFI) a retiré Malte de sa liste grise des juridictions faisant l'objet d'une surveillance renforcée, ce qui est une évolution positive.
147. La polarisation de l’espace médiatique et les défis auxquels sont confrontés les médias, notamment les menaces visant directement des journalistes, ont une incidence négative sur la liberté de la presse à Malte et restent un sujet de grave préoccupation. La création d'un comité d'experts des médias, dirigé par le juge Michael Mallia, ancien président de la Commission d'enquête indépendante sur le meurtre de Mme Daphne Caruana Galizia, et la réponse du gouvernement à ce sujet est un signal positif indiquant que les autorités souhaitent répondre à ces préoccupations, ce dont il faut se féliciter.
148. Malte continue d'être l'un des pays européens où le nombre de poursuites stratégiques contre la mobilisation publique per capita demeure le plus élevé. Cette situation est préoccupante. Le comité d'experts des médias susmentionné a proposé trois projets de loi dont le parlement est actuellement saisi et qui visent à lutter contre les abus découlant de ces poursuites. Il est important que ces dispositions légales soient adoptées et mises en œuvre sans plus attendre.

2.4.4. Pays-Bas

149. L'élaboration du rapport sur les Pays-Bas n’a fait que commencer en raison de la charge de travail de la commission de suivi. Grâce à la prolongation de la saisine jusqu'au 19 septembre 2023, les rapporteurs, M. Antonio Gutiérrez Limones (Espagne, SOC) et Mme Stephanie Krisper (Autriche, ADLE) auront davantage de temps pour mener à bien leur travail.
150. Le 14 septembre 2022, la commission a tenu une audition sur le fonctionnement des institutions démocratiques aux Pays-Bas en mettant un accent particulier sur l’affaire des allocations familiales, avec la participation de M. Chris Van Dam, ancien président de la commission d'enquête parlementaire sur les allocations familiales de la Chambre des représentants des Pays-Bas, Mme Claire Bazy Malaurie, Présidente de la Commission de Venise, et M. Ruard Ganzevoort, Chef de la commission d'enquête parlementaire sur l'efficacité de la législation anti-discrimination du Sénat néerlandais.
151. Les rapporteurs ont l'intention de se rendre à La Haye au début de l'année 2023.

2.4.5. Roumanie

152. Les rapporteurs ont présenté un avant-projet de rapport à la commission en juin 2022. Le document contenait un certain nombre de préoccupations concernant l'État de droit, la démocratie pluraliste et le respect des droits humains, lesquelles avaient été soulevées lors des contacts noués avec des représentants de la société civile nationale et internationale en Roumanie, et en se fondant sur les rapports de suivi des différents organes de suivi du Conseil de l'Europe. L’avant-projet a ensuite été envoyé à la délégation roumaine pour commentaires et a servi de base aux discussions des rapporteurs avec les autorités roumaines lors de leur visite à Bucarest du 4 au 5 juillet 2022. Le rapport révisé et le projet de résolution tenant compte des conclusions de la visite et des commentaires des autorités ont été soumis à la commission de suivi et adoptés le 14 septembre 2022. Le débat à l'Assemblée a eu lieu le 13 octobre 2022 et la Résolution 2466 (2022) a été adoptée à cette occasion.
153. La commission de suivi a prêté une attention particulière à la réforme en cours du système judiciaire en Roumanie. Le 24 janvier 2022, elle a demandé l'avis de la Commission de Venise sur le projet de loi démantelant la Section chargée des enquêtes sur les infractions commises au sein du pouvoir judiciaire et le 14 septembre 2022, elle lui a demandé son avis sur trois projets de loi sur la justice: sur le statut des magistrats, sur l'organisation du pouvoir judiciaire et sur le Conseil supérieur de la magistrature. L'avis de la Commission de Venise sur le premier sujet a été pris en compte dans le rapport; le second est attendu en décembre 2022. La commission s'est déclarée convaincue que les réformes en cours se poursuivront en coopération avec la Commission de Venise et le GRECO et conformément à leurs recommandations.
154. La commission a noté avec satisfaction que depuis son adhésion, la Roumanie a fait des progrès considérables vers le respect des normes du Conseil de l'Europe dans des domaines essentiels pour le fonctionnement des institutions démocratiques, notamment le système judiciaire et la lutte contre la corruption.
155. Cependant, certains points suscitent une certaine inquiétude, notamment en ce qui concerne la liberté des médias et le manque de transparence qui caractérise l’utilisation des fonds publics par les partis politiques pour financer des médias dans le but d’influer sur leur contenu.
156. La commission est convenue de continuer à suivre l'évolution de la situation en Roumanie dans le cadre de son suivi périodique. Elle estime également qu’il serait bon d'envisager l'élaboration du prochain rapport sur la Roumanie dans un délai de cinq ans.

2.4.6. Saint-Marin

157. Le 3 février 2021, Saint-Marin a été sélectionné pour un examen périodique de ses obligations de membre découlant de l’adhésion au Conseil de l'Europe. Cette décision a été ratifiée par l'Assemblée le 19 mars 2021. Le 19 avril 2021, M. Andrej Hunko (Allemagne, GUE) et M. Viorel-Riceard Badea (Roumanie, PPE/DC) ont été nommés rapporteurs pour Saint-Marin. Dans le cadre de la préparation de leur rapport, les rapporteurs ont effectué une visite d'information dans le pays du 24 au 26 octobre 2022. Il est prévu que leur rapport sur le respect par Saint-Marin des obligations découlant de l’adhésion au Conseil de l’Europe soit débattu par l'Assemblée lors de sa partie de session d'avril 2023.
158. Saint-Marin est à la fois un micro-État et la plus ancienne République existante au monde, dont les structures de gouvernement ont évolué à partir des structures de la République romaine. Son indépendance historique à l'égard des puissances extérieures, sa dépendance à l'auto-gouvernance par ses citoyens, ainsi que les conditions et les défis liés au fait qu'il s'agit d'un micro-État, ont entraîné le développement d'un système de gouvernement unique basé sur des structures de gouvernement collégiales qui sont partagées entre les citoyens pour des mandats déterminés. Il en résulte une très grande proximité entre les citoyens et leurs structures politiques et gouvernementales, ainsi qu'entre les différentes branches du pouvoir qui sont souvent imbriquées. Si cette situation est le reflet de la société resserrée et interconnectée du pays, elle soulève également des questions sur le fonctionnement du système d'équilibre des pouvoirs et de séparation des pouvoirs dans le pays, notamment en ce qui concerne l'indépendance du pouvoir judiciaire. En outre, des questions ont été soulevées, notamment par le GRECO dans le cadre de son quatrième cycle d'évaluation, concernant la vulnérabilité de ces institutions aux conflits d'intérêts et à la corruption.
159. À l'issue de leur visite, les corapporteurs se sont donc félicités des réformes en cours visant à renforcer l'indépendance du pouvoir judiciaire et le système de freins et de contrepoids dans le pays. Dans le même temps, ils ont souligné que ces réformes ne devaient pas être considérées comme la fin du chemin, mais comme le point de départ de nouvelles réformes visant à garantir que le fonctionnement de ces institutions reste bien adapté aux défis posés par le fait que Saint-Marin est un micro-État, et à remédier à toute vulnérabilité de ces institutions aux conflits d'intérêts et à la corruption. Dans ce contexte, les rapporteurs ont souligné la nécessité pour les autorités de veiller à ce que ces réformes, ainsi que les lois et décrets adoptés, soient effectivement mis en œuvre de manière complète et cohérente. Cela contribuera également à maintenir la confiance des citoyens de Saint-Marin dans les institutions démocratiques et dans leur fonctionnement efficace.

2.5. Sous-commission sur les conflits concernant les États membres du Conseil de l’Europe

160. Comme déjà indiqué aux paragraphes 22 et 71, au cours de la période considérée, la sous-commission a organisé deux auditions sur l’évolution de la situation concernant le processus de règlement du conflit transnistrien avec la participation de M. Oleg Serebrian, Vice-premier ministre pour la réintégration de la République de Moldova et de M. Klaus Neukirch, Chef de la mission de l'OSCE à Chisinau. Elle a également reconfirmé son intention d'organiser un séminaire sur la contribution du Conseil de l'Europe à la promotion des droits humains dans la région de Transnistrie de la République de Moldova, avec la participation des autorités moldaves et des autorités de facto de Tiraspol, ainsi que sur les faits nouveaux survenus dans les régions géorgiennes d'Abkhazie et de Tskhinvali/Ossétie du Sud et sur l'état d'avancement des discussions internationales de Genève avec la participation de M. Lasha Darsalia, premier Vice-ministre des Affaires étrangères de Géorgie.
161. La sous-commission a tenu un échange de vues sur son programme de travail et ses activités futures et a décidé d'organiser un séminaire sur « les aspects des droits humains dans le processus de règlement du conflit transnistrien et le rôle du Conseil de l'Europe » début 2023 à Strasbourg. Elle a également réfléchi à l'organisation et au format possibles d'une réunion sur les liens entre la paix et la justice et a décidé de revenir sur cette question.

2.6. Les hostilités militaires entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan

162. Les rapporteurs sur l'Arménie (M. Kimmo Kiljunen, Finlande, SOC et Mme Boriana Åberg, Suède, PPE/DC) et sur l'Azerbaïdjan (M. Ian Liddell-Grainger, Royaume-Uni, CE/AD et Mme Lise Christoffersen, Norvège, SOC) ont continué à suivre de près l'évolution des relations entre les deux pays, notamment en ce qui concerne (la question du) Haut-Karabakh.
163. Le 11 janvier 2022, de nouvelles hostilités militaires ont éclaté à la frontière arméno-azerbaïdjanaise, au cours desquelles trois Arméniens et un militaire azerbaïdjanais auraient été tués. La mise en œuvre des deux déclarations trilatérales du 11 janvier 2021 et des 9-10 novembre 2020 a été remise en question. Dans le même temps, le mécanisme de médiation officiel, le groupe de Minsk de l'OSCE, sous la présidence conjointe de la Fédération de Russie, des États-Unis et de la France, semblait être dans l'impasse. En conséquence, des efforts de médiation parallèles ont été développés par la Fédération de Russie, l'Union européenne et les États-Unis.
164. Le 4 février, des entretiens en ligne ont eu lieu entre le Premier ministre Pashinian et le Président Aliyev, avec la participation du Président français Emmanuel Macron et du Président du Conseil européen, Charles Michel, afin de faciliter les négociations de paix.
165. Le 8 mars, le gazoduc par lequel le gaz est fourni de l'Arménie au Haut-Karabakh a été endommagé sur une section située dans une zone qui est sous le contrôle de l'Azerbaïdjan suite à la guerre de 2020, coupant l'approvisionnement en gaz de la population du Haut-Karabakh. L'Azerbaïdjan n'a pas autorisé l'accès de l'Arménie à la section du gazoduc endommagée et, après 10 jours de négociations, a réparé le gazoduc lui-même. Une semaine plus tard, le 24 mars, le cessez-le-feu a été rompu dans la région lorsque les troupes azerbaïdjanaises ont avancé dans la zone de responsabilité des casques bleus russes.
166. Le 8 avril et le 23 mai, deux réunions supplémentaires entre le Président Aliyev et le Premier ministre Pashinian ont eu lieu à Bruxelles en présence du Président du Conseil européen Charles Michel. Une commission bilatérale sur la délimitation et la démarcation des frontières a été créée mais n'a pas encore obtenu de résultats concrets.
167. Le 30 juillet, des violations du cessez-le-feu ont été signalées dans la région du Haut-Karabakh et sur la frontière internationalement reconnue entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan. Le 2 août, la mission russe de maintien de la paix a confirmé que l'Azerbaïdjan avait violé le cessez-le-feu à plusieurs reprises. L'Arménie et l'Azerbaïdjan ont exprimé leur mécontentement quant à la mise en œuvre des déclarations trilatérales. L'Azerbaïdjan a exigé le retrait complet des forces armées arméniennes du territoire du Haut-Karabakh; l'achèvement d'un corridor sous son contrôle pour relier l'Azerbaïdjan continental à l'enclave de Nakhitchevan; et la construction d'une nouvelle route remplaçant le corridor de Lachin entre l'Arménie et le Haut-Karabakh.
168. Le 31 août, une quatrième réunion entre le Président Aliyev et le Premier ministre Pashinian a eu lieu à Bruxelles avec la médiation du Président du Conseil européen. Des progrès ont été réalisés, puisqu'il a été décidé de discuter du texte d'un traité de paix dans un délai d'un mois, de résoudre les questions humanitaires en suspens, de réunir la Commission de délimitation des frontières à Bruxelles en novembre et de débloquer les voies de transport.
169. Les 12, 13 et 14 septembre 2022, de nouvelles hostilités ont éclaté à grande échelle le long de la frontière arméno-azerbaïdjanaise, lorsque les forces armées azerbaïdjanaises ont mené une offensive de l’autre côté de la frontière et avancé en territoire arménien internationalement reconnu, avec notamment des frappes d'artillerie et l'utilisation de drones, frappant des cibles sur le territoire arménien tout en affirmant avoir répondu à des «provocations arméniennes de grande ampleur». Un cessez-le-feu a été conclu, mais il s’agissait des pires affrontements depuis 2020; 200 soldats arméniens et 80 militaires azerbaïdjanais ont été tués et plus de 7 500 civils arméniens ont dû fuir leurs maisons.
170. Les 6 et 7 octobre, une réunion à deux tours entre le Président Aliyev et le Premier ministre Pashinian, sous la médiation de l'Union européenne et de la France, a eu lieu à Prague. Une déclaration a été adoptée dans laquelle, pour la première fois, l'Azerbaïdjan et l'Arménie ont reconnu mutuellement leur intégrité territoriale. Il a été convenu qu'une mission civile de l'Union européenne patrouillerait pendant deux mois à la frontière entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan afin d'aider à réduire les tensions et de fournir une assistance à la Commission de délimitation des frontières.
171. Le 10 octobre, à l'initiative de la commission de suivi, l'Assemblée a tenu un débat d'actualité intitulé «Hostilités militaires entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie, en particulier les frappes contre des implantations et infrastructures civiles». Le 13 octobre, les corapporteurs pour l'Arménie ont publié une déclaration appelant les autorités azerbaïdjanaises à se retirer immédiatement de toutes les parties du territoire de l'Arménie et à libérer les prisonniers de guerre sous leur contrôle.
172. Le 1er novembre, une quatrième réunion trilatérale a eu lieu à Sotchi entre les Présidents Poutine et Aliyev et le Premier ministre Pashinian. Dans la déclaration tripartite finale, l'Arménie et l'Azerbaïdjan ont réitéré leur engagement à s'abstenir de recourir à la force ou à la menace de recours à la force, et sont convenus de discuter et de résoudre toutes les questions problématiques uniquement sur la base de la reconnaissance mutuelle de la souveraineté, de l'intégrité territoriale et de l'inviolabilité des frontières, conformément à la Charte des Nations unies et à la déclaration d'Alma-Ata de 1991.

2.7. Fédération de Russie

173. Jusqu'à son exclusion du Conseil de l'Europe le 23 mars 2022, la Fédération de Russie était soumise à un suivi parlementaire complet. Les rapporteurs de l'époque, M. Axel Schäfer (Allemagne, SOC) et Mme Ria Oomen-Ruijten (Pays-Bas, PPE/DC), se sont rendus à Moscou du 28 juin au 1er juillet 2021. Suite aux discussions menées lors de leur visite, ils avaient l’intention d’élaborer, sur la base des recommandations de la Commission de Venise, une feuille de route accompagnée d'un calendrier concret, laquelle recenserait les mesures concrètes visant à répondre aux préoccupations soulevées. Ils étaient convenus avec la délégation russe de définir, en avril 2022, des actions concrètes se traduisant par des modifications tangibles de la législation assorties de délais pour leur réalisation.
174. Au cours de la première partie de session de 2022, le 24 janvier 2022, les pouvoirs non encore ratifiés de la délégation russe ont été contestés pour des raisons substantielles et de procédure sur la base des articles 8 et 7 du Règlement de l'Assemblée. Les principaux motifs de contestation concernaient des violations des principes fondamentaux du Conseil de l'Europe consacrés par l'article 3 et le préambule de son Statut (STE n° 1), le non-respect par la Fédération de Russie des recommandations de l'Assemblée qui lui avaient été adressées et figurant dans des résolutions antérieures pertinentes, en particulier les Résolutions 1990 (2014), 2034 (2015), 2063 (2015), 2292 (2019), 2320 (2020) et 2363 (2021), de nouvelles violations de l'État de droit et de la démocratie, du respect des libertés fondamentales et des droits humains, et, plus généralement, le non-respect par la Fédération de Russie de ses engagements et obligations au sein du Conseil de l'Europe. La contestation des pouvoirs a fait suite à des contestations similaires soumises en juin 2019 (lors du retour de la délégation russe à l'Assemblée après son absence depuis 2015), en janvier 2020 et en janvier 2021.
175. Conformément à l’article 8.3 du Règlement, la commission de suivi a été saisie pour rapport sur les raisons substantielles et la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles pour avis. Conformément à la pratique de la commission, j'ai été chargé, en tant que président de la commission, de l’établissement du rapport.
176. Le rapport approuvé par la commission et soumis à l'Assemblée (Doc.15443) souligne la dégradation de la situation en ce qui concerne le pluralisme, les droits humains et les libertés fondamentales dans la Fédération de Russie, qui s’est manifestée par la répression des opposants politiques, de la société civile indépendante, des voix dissidentes et des journalistes exprimant des critiques. Déplorant la fermeture de Mémorial et la situation critique de M. Alexei Navalny, le rapporteur évoquait par ailleurs les graves lacunes constatées lors des élections législatives de 2021 et exprimait les craintes suscitées par la détérioration des relations avec ses voisins et l'escalade des tensions menaçant la sécurité européenne.
177. Dans le même temps, la commission a souligné que l'Assemblée constituait la seule plateforme parlementaire paneuropéenne encourageant l’instauration d’un dialogue politique avec la participation de tous les pays européens. Elle a donc estimé que l'approbation des pouvoirs serait bénéfique à l'objectif poursuivi par le Conseil de l'Europe et permettrait à l'Assemblée de favoriser le dialogue politique sur les moyens possibles de remédier aux lacunes concernant le fonctionnement des institutions démocratiques de la Fédération de Russie et de suivre les progrès dans ce domaine. Elle a également souligné les avantages évidents que l'accès à la Cour européenne des droits de l'homme offrait aux 160 millions de citoyens russes, bien que d'autres délégations aient mis en doute la volonté des autorités russes d'appliquer les arrêts de la Cour jugés contraires à leurs objectifs politiques. La commission a donc proposé que l’Assemblée ratifie les pouvoirs de la Fédération de Russie et reprenne l’examen des progrès accomplis lors de la présentation du rapport de suivi dans le courant de l’année (Résolution 2422 (2022)).
178. L’exclusion de la Fédération de Russie a mis fin à la procédure de suivi parlementaire, qui est strictement réservée aux États membres. Certes, l'Assemblée peut, et doit, poursuivre ses travaux relatifs à la situation politique en Fédération de Russie, mais le mandat de la commission de suivi se limite aux États membres du Conseil de l'Europe et ne peut donc concerner la Fédération de Russie que dans la mesure où ses politiques touchent à des questions couvertes par la procédure de suivi d'autres États membres. C'est particulièrement le cas pour les travaux de la sous-commission sur les conflits entre les États membres du Conseil de l'Europe.
179. Afin de préserver le travail accompli par la commission de suivi à l'égard de la Fédération de Russie avant l’exclusion, les anciens rapporteurs ont décidé, avec l'accord de la commission, de préparer une note d'information (AS/Mon(2022)09). Cette note n'avait pas pour objet d'évaluer l'état d'exécution des obligations et engagements de la Russie envers le Conseil de l'Europe, ni de recenser les préoccupations restées en suspens concernant la démocratie, l'État de droit et les droits humains dans la Fédération de Russie pendant toute la période couverte par le présent rapport. Ces informations figurent dans les rapports de la commission de suivi soumis à l'Assemblée ou dans les notes d'information déclassifiées établies au cours des 26 années de procédure de suivi concernant la Fédération de Russie. Il s'agissait plutôt de faire le point sur la procédure de suivi parlementaire concernant la Fédération de Russie et sur le travail accompli par la commission et les rapporteurs en vue de recenser les éventuelles lacunes, d’y réfléchir et de tirer des enseignements pour l'avenir.

3. Quelques réflexions sur la manière d'améliorer les méthodes de travail de la commission de suivi pour améliorer son efficacité et renforcer son impact

180. Dans le rapport d’activité 2021, mon prédécesseur a soulevé la question de l’établissement des rapports de suivi, et en particulier de la validité des saisines pour des examens périodiques de suivi. Pour rappel, conformément au Règlement, la commission de suivi dispose d'un mandat permanent pour traiter avec les pays soumis à une procédure complète de suivi ainsi qu'avec les pays engagés dans le dialogue postsuivi. L’établissement d'un tel rapport ne nécessite pas une saisine particulière du Bureau. Le mandat de la commission l'oblige à présenter les rapports par pays avec une certaine fréquence qui, malheureusement, pour un certain nombre de raisons, ne peut pas toujours être respectée.
181. La situation est différente en ce qui concerne les examens périodiques de suivi. Après que l'Assemblée eut décidé que la commission établirait des rapports de suivi périodiques sur les États membres qui ne sont pas soumis à une procédure de suivi complète sous la forme de rapports distincts à l'Assemblée, sur la base d'un processus de sélection fondé sur des raisons substantielles, la commission est convenue dans ses méthodes de travail internes, qu'elle choisirait, une fois par an, un certain nombre de pays pour un tel rapport. Elle a ainsi choisi trois pays pour le premier cycle en 2019 (Malte, Hongrie et Roumanie), et trois pays pour le second cycle en 2020 (France, Pays-Bas et Saint-Marin). Elle a l’intention de procéder au choix de nouveaux pays à l’issue de la modification de certaines dispositions réglementaires.
182. Actuellement, conformément à l'article 26 du Règlement, le mandat concernant l’établissement d’un rapport périodique de suivi est de deux ans. L'expérience a montré que cette période est trop courte et ce constat a conduit la commission à demander régulièrement des prolongations de mandat. Si d’autres commissions de l'Assemblée n’éprouvent pas de difficultés à respecter ce délai strict, la procédure spécifique qui existe au sein de la commission de suivi empêche quasiment celle-ci de s’y conformer.
183. Plusieurs raisons ralentissent considérablement l’élaboration des rapports périodiques, notamment le mode de désignation des rapporteurs impliquant des groupes politiques (deux pour chaque rapport), le processus d'élaboration en plusieurs étapes comprenant une visite et un certain délai pour que les autorités fassent des commentaires et, enfin et surtout, la nécessité de pouvoir compter sur une situation politique stable favorisant le dialogue politique dans le pays concerné. Concrètement, cela signifie par exemple qu’en période pré- ou post-électorale, ou encore de crise politique, toute visite du pays concerné ou discussion sur le rapport est exclue car cela pourrait être perçu comme une ingérence dans les affaires intérieures du pays.
184. La question de la disponibilité des rapporteurs et des changements fréquents les concernant a déjà été évoquée par mon prédécesseur mais, malheureusement, la situation à cet égard ne s'est guère améliorée depuis le dernier rapport d’activité. En particulier, les élections à venir dans les pays des rapporteurs et leur participation aux campagnes électorales les empêchent souvent de remplir leurs engagements au sein de la commission de suivi. En outre, il existe un risque très réel qu’ils quittent l’Assemblée après les élections, soit pour occuper d'autres fonctions, soit parce qu'ils ne sont pas réélus. Le problème des changements de rapporteurs est parfaitement illustré par le nombre de nominations auxquelles la commission a procédé au cours de la période considérée et qui s'est élevé à 11. J'invite les groupes politiques à désigner plus soigneusement les candidats à un mandat de rapporteur pour le suivi des rapports d'examen périodique et à tenir compte non seulement de leurs compétences mais aussi de leur disponibilité.
185. En conclusion, la validité de deux ans des saisines pour les rapports de suivi périodique crée une situation très insatisfaisante à laquelle il convient de remédier. Au cours de discussions internes à la commission, les membres ont indiqué qu'ils souhaitaient porter le délai d’élaboration des rapports d'examen périodique à au moins trois ans avec une possibilité de prolongation. Ce problème devenant de plus en plus aigu, la commission, lors de sa réunion d'octobre 2022, m'a invité à écrire au Bureau pour demander la modification du Règlement à cet égard.
186. Lors de sa réunion d'octobre, le Bureau a montré qu'il comprenait parfaitement cette question et a prolongé la validité des rapports d'examen périodique en cours (France, Pays-Bas, Saint-Marin) de 6 mois, jusqu'au 19 septembre 2023. En même temps, il a demandé à la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles d'examiner la question de la durée de validité des saisines pour les rapports de suivi périodique dans son rapport plus général sur l'amélioration du Règlement. Je suis convaincu que la position de la commission de suivi sur la durée de validité sera prise en considération par la commission du Règlement et que les articles pertinents du Règlement seront modifiés en conséquence.
187. Une autre question qui a été examinée par la commission de suivi concerne sa réactivité face à l'évolution de la situation dans les États membres. Le processus actuel de sélection des rapports périodiques a été critiqué car il ne répond pas de manière appropriée à l'actualité et à l'évolution de la situation dans les États membres, qu'elle soit favorable ou inquiétante pour cette Assemblée. Afin de rendre la commission plus réactive et capable de faire face aux évolutions futures, la commission est convenue que le processus de sélection soit révisé afin de ne pas se limiter à la décision prise chaque année en décembre et de lui permettre de choisir spécifiquement un pays qui fera l’objet d’un suivi périodique.

Annexe – Décision révisée 
			(10) 
			Adoptée
par la commission de suivi à sa réunion du 24 mai 2022. de créer une sous-commission sur les conflits concernant les Etats membres du Conseil de l'Europe

(open)
1. La commission de suivi décide de créer une sous-commission sur «les conflits concernant les États membres du Conseil de l'Europe» conformément à l'article 49 du Règlement de l’Assemblée.
2. Pour les compétences et les activités de la sous-commission, le terme «conflit» s'entend d'une «situation dans laquelle il est mis fin à un conflit armé actif, sans qu'un traité de paix ou un autre cadre politique ne règle le conflit à la satisfaction des belligérants. D'où la possibilité, au plan légal, d'une reprise du conflit à tout moment et, dès lors, la création d'un climat d'insécurité et d'instabilité.»
3. La sous-commission a pour mandat d'étudier, en se fondant sur les conclusions des corapporteurs concernés, comment la mise en œuvre des normes ainsi que le respect des obligations et engagements à l'égard du Conseil de l'Europe peuvent être assurés dans les régions en proie aux actuels conflits non résolus concernant les États membres du Conseil de l'Europe et qui, du fait de ces conflits, ne sont pas sous le contrôle des autorités de l'État membre dont elles relèvent. Elle examinera en particulier comment les normes et principes du Conseil de l'Europe dans le domaine de la démocratie, de l'État de droit et des droits de l'homme peuvent être préservés dans ces régions. Dans ce contexte, toute mesure prise par la sous-commission sera neutre quant au statut et ne pourra pas être interprétée comme une reconnaissance explicite ou implicite du statu quo de fait.
4. Par ailleurs, à ce propos, la sous-commission vise à faciliter la coordination et à harmoniser les approches adoptées par les équipes respectives de corapporteurs s'agissant du (des) conflit(s) au(x)quel(s) le pays qui relève de leur compétence est partie. A cet égard, la sous-commission étudiera également les moyens par lesquels la procédure de suivi peut venir à l'appui de l'action des structures et mécanismes en place pour assurer la médiation dans les conflits non résolus au sein de l'espace géographique du Conseil de l'Europe.
5. Il convient de souligner que la sous-commission n’a pas pour objet d’offrir une alternative aux mécanismes diplomatiques et politiques déjà établis pour le règlement de ces conflits. Elle n’entend pas être un mécanisme de règlement de conflit en tant que tel et ne le prétend pas. Au contraire, son but est d’examiner comment l’Assemblée, par l’intermédiaire de sa commission de suivi, peut appuyer les travaux des mécanismes de règlement de conflit qui ont été créés pour les conflits en question. Parallèlement, la sous-commission étudiera et soutiendra la possibilité que le Conseil de l'Europe joue un rôle plus formel, s'il est opportun de le faire, dans les mécanismes adéquats de règlement des conflits.
6. Dans la pratique, et dans le cadre de ses compétences décrites ci-dessus, la sous-commission travaillera sur les conflits concernant l'Ossétie du Sud/Géorgie et l'Abkhazie/Géorgie, le nord de Chypre, le Haut-Karabakh et les autres territoires occupés, la Transnistrie et l’Ukraine 
			(11) 
			Dans
l’attente des développements concernant l'agression russe contre
l'Ukraine..
7. L’objectif principal de la sous-commission est d’influer positivement sur l’environnement dans lequel opère le mécanisme de règlement des conflits. Par conséquent, la sous-commission ne développera ses travaux sur un conflit particulier que si elle a obtenu l’accord de la (des) délégation(s) des Etats membres concernés 
			(12) 
			Lors de sa réunion
du 9 mars 2021, la sous-commission est convenue qu'il est entendu
que cette exigence n'est pas applicable aux échanges de vues avec
des experts indépendants et des représentants d'organismes internationaux
visant à informer la sous-commission.. Pour les mêmes raisons, l’un des principaux critères permettant à la sous-commission de décider de travailler sur un conflit devrait être la possibilité d’établir un dialogue constructif avec toutes les parties au conflit, y compris les communautés qui vivent dans la zone de conflit.
8. Via sa commission mère, la sous-commission coordonne ses activités avec celles des autres commissions de l'Assemblée.
9. La sous-commission se compose :
9.1. des corapporteurs de la commission de suivi pour l'Arménie, l'Azerbaïdjan, la Géorgie, la République de Moldova, la Türkiye et l'Ukraine ;
9.2. d’un membre de la commission de suivi au titre de chacun des États membres qui sont parties aux conflits en vertu du mandat de la sous-commission : Arménie, Azerbaïdjan, Chypre, Géorgie, République de Moldova, Türkiye et Ukraine. Dans le cas où plus d'un membre de ces pays est membre de la commission de suivi, le membre de la sous-commission est désigné par la délégation nationale en question parmi ses membres de la commission de suivi;
9.3. de droit, des présidents de la commission des questions politiques et de la démocratie et de la commission des questions juridiques et des droits de l'homme, dans la mesure où ils ne relèvent pas de la catégorie a);
9.4. des présidents des groupes politiques de l'Assemblée, dans la mesure où ils ne relèvent pas des catégories a), b) et c);
9.5. du président de la commission de suivi, conformément à l'article 49.6.
10. Les membres de la sous-commission ne peuvent pas être remplacés.
11. Pour favoriser des échanges de vues en toute liberté dans la sous-commission, les procès-verbaux des réunions de cette dernière resteront limités aux membres de la sous-commission, sauf décision contraire spécifique de celle-ci.