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Rapport | Doc. 12107 | 11 janvier 2010

Les seuils électoraux et autres aspects des systèmes électoraux ayant une incidence sur la représentativité des parlements dans les Etats membres du Conseil de l'Europe

Commission des questions politiques et de la démocratie

Rapporteur : M. Hendrik DAEMS, Belgique

Résumé

Pour toute démocratie, le choix du système électoral est l’une des plus importantes décisions institutionnelles. Le système électoral a une incidence manifeste sur la représentativité et des conséquences profondes sur l’ensemble de la vie politique du pays concerné. Il n’y a pas de modèle unique qui pourrait être recommandé à tous les pays comme étant le meilleur. Le choix dépend de plusieurs facteurs, notamment du contexte historique et du système politique et de partis.

L’Assemblée a pour objectif de parvenir à une entente commune sur les principes dont le respect permet de qualifier les élections de «libres et équitables», conformément aux normes démocratiques et quel que soit le type de système électoral, et de s’assurer de leur mise en œuvre dans toutes les élections qui se déroulent sur le territoire des Etats membres du Conseil de l’Europe afin de faire du Conseil de l’Europe le plus vaste espace d’élections «libres et équitables».

A. Projet de résolution

(open)
1. L’Assemblée parlementaire renvoie à ses travaux antérieurs relatifs au processus électoral, en particulier à ses Résolutions 1546 (2007) sur le Code de bonne conduite des partis politiques, 1591 (2007) sur le vote à distance, 1590 (2007) sur le vote à bulletin secret, 1547 (2007) sur la situation des droits de l’homme et de la démocratie en Europe, 1617 (2008) sur la situation de la démocratie en Europe, 1653 (2009) sur la démocratie électronique, et au Doc. 11628 sur le fonctionnement des institutions démocratiques en Europe et l’évolution de la procédure de suivi de l’Assemblée.
2. Par ailleurs, l’Assemblée se félicite des acquis d’autres secteurs du Conseil de l’Europe dans le domaine électoral, en particulier des travaux de la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise), notamment de son Code de bonne conduite en matière électorale.
3. L’Assemblée se félicite de l’issue du Forum 2009 du Conseil de l’Europe pour l’avenir de la démocratie consacré aux systèmes électoraux, qui s’est tenu à Kiev (Ukraine).
4. Le droit de tous les citoyens d’être représentés dans les processus décisionnels politiques ainsi que la représentativité d’organes élus sont des principes fondamentaux des démocraties contemporaines. Toute assemblée élue devrait refléter la composition politique de l’électorat ainsi que d’autres aspects importants tels que la répartition géographique, l’appartenance sexuelle et ethnique ou d’autres identités de groupes, notamment d’âge ou de vulnérabilité spécifique. La légitimité de tout système démocratique dépend en grande partie de la conviction de toutes les catégories de la société qu’elles disposent d’un accès approprié aux institutions décisionnelles.
5. La démocratie représentative repose sur des élections libres et équitables, indispensables pour veiller au respect de la volonté du peuple lorsqu’il s’agit de former la législature et le gouvernement à tous les niveaux.
6. Pour toute démocratie, le choix du système électoral est l’une des plus importantes décisions institutionnelles. Ce système a une incidence manifeste sur la représentativité et des conséquences profondes sur l’ensemble de la vie politique du pays concerné. Différents systèmes électoraux peuvent aboutir à des résultats très différents. Le système électoral détermine en grande partie un certain nombre de processus administratifs, y compris la création d’un gouvernement.
7. Il existe tout un éventail de types de systèmes électoraux dans les Etats membres du Conseil de l’Europe, chacun avec ses avantages et ses inconvénients. Il n’y a pas de système électoral unique pouvant servir de modèle à tous les pays. Le choix dépend de plusieurs facteurs, notamment du milieu historique et du système politique et de partis.
8. L’Assemblée a pour objectif que chacun s’entende sur l’ensemble des principes qui font que des élections seront considérées comme «libres et équitables», conformément aux normes démocratiques et quel que soit le type de système électoral, et de s’assurer de leur mise en œuvre dans toutes les élections qui se déroulent sur le territoire des Etats membres du Conseil de l’Europe, lequel constitue ainsi la plus vaste zone au monde d’élections «libres et équitables».
9. L’existence d’un environnement démocratique sain et, en particulier, de libertés fondamentales telles que la liberté d’association, la liberté d’expression et la liberté de la presse, par exemple, est l’une des conditions préalables à la tenue d’élections libres et équitables. Les critères utilisés pour déterminer si des élections sont libres et équitables ont été fixés par l’Assemblée dans ses nombreux rapports sur l’observation d’élections dans les Etats membres et non membres du Conseil de l’Europe.
10. Dans toute démocratie, l’expression du plus grand nombre d’opinions doit être possible. Priver des catégories de personnes du droit à être représentées ne peut que nuire au système démocratique.
11. L’égalité hommes-femmes dans les processus décisionnels est un aspect majeur de représentation équitable. L’Assemblée insiste sur l’importance de garantir aux femmes un accès égal aux organes élus. Pour cela, des mesures transitoires peuvent s’avérer nécessaires, notamment des quotas.
12. Toutes les autres formes de discrimination au sein du processus électoral – que ce soit à l’encontre de membres de groupes minoritaires ou d’autres catégories de personnes vulnérables – nuisent également à la démocratie.
13. La démocratie interne des partis et leurs procédures aboutissant à la présélection des candidats aux élections revêtent une importance fondamentale pour la représentativité des organes élus et, par voie de conséquence, pour la légitimité de l’ensemble du système politique. Ces procédures internes varient considérablement d’un parti à l’autre, même au sein d’un même pays.
14. Le choix fait par l’électeur d’une personne pour le ou la représenter, sur la base d’une liste de candidats proposée par le parti, doit avoir un réel impact sur le résultat final. Cela est un sujet de préoccupation en particulier lorsqu’il s’agit du remplacement d’un siège vacant. Selon les procédures de certains partis, le successeur n’est pas forcément le second candidat qui a eu le plus de votes. Les procédures internes des partis pour les remplacements doivent tenir compte du choix individuel de l’électeur.
15. L’Assemblée renvoie à sa Résolution 1546 (2007) sur le Code de bonne conduite des partis politiques et demande instamment aux partis des Etats membres du Conseil de l’Europe de souscrire à ses principes, en particulier concernant leur transparence interne pour la désignation de candidats, le respect de règles claires et justes pour le financement des campagnes, et le remplacement des sièges vacants.
16. L’ensemble des règles régissant les campagnes électorales, en particulier le financement, la divulgation des données financières par les partis et les candidats, la liberté de la presse, l’accès aux médias, à l’information et à un système de plaintes et de recours qui permet une procédure accélérée de résolution des litiges, doivent se conformer aux normes démocratiques.
17. Il convient de revoir les procédures de vote et de les améliorer dans bon nombre d’Etats membres du Conseil de l’Europe. L’emploi des outils de la technologie de l’information et de la communication (TIC) et la mise en place de différentes formes de vote électronique, y compris du vote électronique à distance, devraient être envisagés.
18. La transparence et la cohérence des règles sur les travaux des commissions électorales, la méthode de désignation de leurs membres, la nécessité de l’équilibre et de l’impartialité de leur composition ainsi que la formation des agents doivent garantir un degré élevé d’impartialité, d’indépendance et de compétence professionnelle.
19. L’observation des élections est l’un des éléments importants qui permettent d’inspirer confiance dans les systèmes électoraux. Il importe que les règles sur le processus d’observation et le statut des observateurs nationaux et internationaux, ainsi que sur une procédure de recours effective, s’appuient sur la Déclaration de principe des Nations Unies pour l’observation internationale d’élections et sur le Code de conduite des observateurs internationaux.
20. Le renforcement de la confiance dans un système électoral peut largement contribuer à accroître l’intérêt des citoyens pour le processus politique dans son ensemble et, par conséquent, à surmonter le sentiment de détachement et de mécontentement politique à leur encontre.
21. L’Assemblée est d’avis que le Conseil de l’Europe peut fortement contribuer à la réalisation de cet objectif, promouvoir plus avant et mettre en œuvre ces principes dans ses Etats membres. Des mesures approfondies de réglementation, le partage des bonnes pratiques et le renforcement du contrôle et du suivi sont nécessaires.
22. L’Assemblée demande donc aux Etats membres du Conseil de l’Europe:
22.1. de contribuer à ce que chacun s’entende sur l’ensemble des principes qui font que des élections sont considérées comme «libres et équitables», conformément aux normes démocratiques, quel que soit le type de système électoral, et de s’assurer de leur mise en œuvre;
22.2. de garantir un environnement démocratique sain, respectueux des libertés fondamentales telles que la liberté d’association, la liberté d’expression et la liberté de la presse en conformité avec les critères utilisés pour déterminer si les élections sont libres et équitables;
22.3. d’examiner la possibilité d’abaisser les seuils légaux supérieurs à 3 %, et de supprimer d’autres obstacles, y compris les cautions électorales élevées, qui empêchent la représentation des petits partis ou des candidats indépendants aux organes élus;
22.4. de renforcer les mécanismes nationaux pour promouvoir un accès équilibré des femmes et des hommes aux organes élus, et d’envisager des mesures transitoires telles que la mise en place de quotas;
22.5. de supprimer les dispositions obsolètes qui privent de leurs droits électoraux certaines catégories de la population (notamment de certaines catégories de détenus);
22.6. d’examiner la possibilité, si cela n’a pas été déjà fait, d’accorder le droit de vote aux immigrants qui résident de manière légale dans le pays concerné aux élections locales et régionales;
22.7. de s’assurer que le cadre législatif encourage la mise en œuvre par les partis politiques de leurs principes démocratiques internes;
22.8. de veiller à ce que les règles sur les campagnes électorales, en particulier sur le financement, la divulgation des données financières par les partis et les candidats, l’accès aux médias, à l’information et à un système de plaintes et de recours qui permet une procédure accélérée de résolution des litiges, soient conformes aux normes démocratiques;
22.9. d’examiner régulièrement différentes formes de procédures de vote en vue de les améliorer et d’étudier la possibilité d’employer des outils de TIC ainsi que la mise en place de différents types de vote électronique, y compris le vote électronique à distance, si cela n’a pas encore été fait;
22.10. d’examiner si les procédures nationales pour le remplacement de fonctions législatives demeurent appropriées sur le plan démocratique;
22.11. de s’assurer que les règles sur les travaux des commissions électorales, leur mode de désignation, leur composition équilibrée et impartiale, se conforment aux normes démocratiques;
22.12. de mettre en œuvre les dispositions de la Déclaration de principe des Nations Unies pour l’observation internationale d’élections.
23. Elle demande également aux partis politiques des Etats membres du Conseil de l’Europe:
23.1. de respecter les principes du Code de bonne conduite des partis politiques, en particulier ceux afférents à la démocratie, à la transparence et à la responsabilité de rendre compte internes des partis;
23.2. d’adopter des règles équitables et transparentes pour la sélection et la désignation de candidats aux organes élus, et d’encourager en particulier la désignation de membres de groupes sous-représentés tels que les jeunes, les membres de minorités, les immigrants ou les personnes handicapées;
23.3. d’établir une stratégie de long terme qui prévoit une formation et des projets spéciaux dans le but d’accroître l’assurance, les connaissances et l’expérience des groupes sous-représentés;
23.4. d’étudier l’expérience des partis politiques qui ont mis en place des quotas pour la sélection et la désignation de candidats aux élections et d’examiner une telle possibilité dans leurs propres pratiques;
23.5. de fixer des règles équitables et transparentes pour le financement des campagnes, en conformité avec la législation nationale pertinente; d’élaborer des règles internes qui compléteraient et renforceraient la législation nationale, en particulier, en matière de transparence et de responsabilité;
23.6. d’établir des règles claires et équitables pour le remplacement des sièges vacants dans les organes élus;
23.7. d’observer les principes d’équité et de fixer des normes générales de conduite durant les campagnes électorales.
24. Elle invite les membres des délégations parlementaires auprès de l’Assemblée:
24.1. à soumettre la question des normes dans les différentes étapes du processus électoral dans le cadre des activités de leurs parlements nationaux;
24.2. à lancer la réflexion sur les procédures internes des partis politiques dans le domaine électoral au sein de leurs partis respectifs;
24.3. de promouvoir les travaux de l’Assemblée et ses documents dans le domaine électoral, en particulier les résultats du Forum pour l’avenir de la démocratie.
25. L’Assemblée soutient la Commission de Venise dans la poursuite de ses précieux travaux dans le domaine du processus électoral.
26. L’Assemblée demande aux participants du Forum pour l’avenir de la démocratie de tenir compte des conclusions générales de ce dernier et de les traduire en actions spécifiques.
27. L’Assemblée décide de suivre la question des systèmes électoraux sous ses différents aspects et de promouvoir des solutions satisfaisantes à l’échelon parlementaire dans les Etats membres du Conseil de l’Europe.

B. Projet de recommandation

(open)
1. L’Assemblée parlementaire renvoie à sa Résolution … (2010) sur les seuils électoraux et autres aspects des systèmes électoraux ayant une incidence sur la représentativité des parlements dans les Etats membres du Conseil de l’Europe. Elle renvoie également à ses résolutions et recommandations antérieures qui traitent de différents aspects du processus électoral.
2. L’Assemblée recommande au Comité des Ministres d’en appeler aux gouvernements des Etats membres pour qu’ils donnent les suites appropriées aux points soulevés dans la Résolution … (2010).
3. L’Assemblée recommande au Comité des Ministres, en tirant parti de sa position unique d’espace de dialogue pour la coopération paneuropéenne, de contribuer à ce que chacun s’entende sur l’ensemble des principes qui font que des élections sont considérées comme «libres et équitables», conformément aux normes démocratiques et quel que soit le type de système électoral, et de s’assurer de leur mise en œuvre à chaque élection qui se déroule sur le territoire des Etats membres du Conseil de l’Europe, devenant ainsi la plus vaste zone au monde d’élections «libres et équitables».
4. De plus, l’Assemblée invite le Comité des Ministres:
4.1. à lancer une réflexion approfondie et à travailler sur le cadre réglementaire et les réglementations spécifiques en lien avec le processus électoral dans les Etats membres du Conseil de l’Europe, en particulier eu égard:
4.1.1. aux commissions électorales;
4.1.2. aux seuils électoraux ainsi qu’à toute autre question qui peut désavantager les partis mineurs et les candidats indépendants d’avoir accès aux organes élus;
4.1.3. à l’incidence des systèmes électoraux sur l’accès des femmes aux organes élus;
4.1.4. à l’égalité d’accès aux organes élus pour les personnes issues de groupes minoritaires et vulnérables;
4.1.5. au financement des campagnes électorales;
4.1.6. aux procédures de vote;
4.1.7. à l’observation des élections;
4.2. à examiner la possibilité d’élaborer des lignes directrices sur les principes qui régissent le processus électoral.

C. Exposé des motifs, présenté par M. Daems, rapporteur

(open)

1. Introduction

1. La démocratie représentative est un principe fondamental du système démocratique. Elle repose sur l’organisation d’élections libres et équitables. Le droit de tous les citoyens à être représentés ainsi que la représentativité des organes élus sont des enjeux essentiels de l’ensemble du processus démocratique.
2. Les élections sont au cœur de la démocratie représentative et constituent le symbole et l’acte par excellence des sociétés démocratiques modernes.
3. Le choix du système électoral est l’une des décisions institutionnelles les plus importantes de toute démocratie. Les modalités du système électoral affectent évidemment la représentativité et ont en fait des conséquences profondes pour l’ensemble de la vie politique d’un pays. Différents systèmes électoraux peuvent donner des résultats très différents. Le système électoral détermine en grande partie un certain nombre de processus administratifs, y compris la création d’un gouvernement.
4. Le présent rapport examine différentes caractéristiques des systèmes électoraux concernant les organes législatifs qui sont utilisés dans les Etats membres du Conseil de l’Europe. Il tente d’évaluer leur impact sur la représentativité des parlements et, plus généralement, sur le fonctionnement des institutions démocratiques.
5. Le but de ce rapport est de développer une approche comparative sur le sujet afin de rendre possibles de nouvelles évaluations qui, dans l’idéal, pourraient conduire à l’élaboration de normes communes en ce domaine, dans le cadre du Conseil de l’Europe.
6. La première version du présent rapport représentait la contribution de l’Assemblée parlementaire à la dernière session du Forum pour l’avenir de la démocratie, intitulée «Systèmes électoraux», qui a eu lieu à Kiev du 21 au 23 octobre 2009. Ayant été l’un des trois rapporteurs généraux au forum, j’ai tiré parti des débats et conclusions de cette session pour enrichir et étoffer le rapport, et pour élaborer un projet de résolution et un projet de recommandation qui seront examinés par l’Assemblée.
7. J’ai concentré mon travail sur le système électoral en tant que tel plutôt que sur le contexte dans lequel il fonctionne. Il va sans dire que l’existence d’un environnement démocratique sain respectant les libertés fondamentales telles que la liberté d’association, la liberté d’expression et la liberté de la presse, par exemple, est une des conditions préalables à la tenue d’élections libres et équitables. Ce rapport présuppose que de telles conditions sont remplies. Les personnes souhaitant connaître les critères utilisés pour déterminer si des élections sont libres et équitables sont invitées à se reporter aux travaux pertinents de l’Assemblée parlementaire et à ses nombreux rapports sur l’observation d’élections dans des Etats membres et non membres du Conseil de l’Europe 
			(1) 
			 Voir, par exemple,
les rapports les plus récents sur l’observation des élections en
Albanie, Bulgarie, Moldova..
8. Je ne me suis pas appesanti non plus sur le grave problème de l’absence d’égalité des chances qui empêche certaines catégories sociales vulnérables (jeunes, personnes âgées, handicapés, immigrés) d’être représentées équitablement au sein des organes élus, ni la question de la représentation des femmes dans les organes élus. J’attire à ce sujet l’attention sur le travail des commissions pertinentes et, en particulier, le rapport récemment adopté par la commission sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes, intitulé «Augmenter la représentation des femmes en politique par les systèmes électoraux» 
			(2) 
			 Voir le Doc. 12097., qui fera l’objet d’un débat en regard du présent rapport.
9. Le présent rapport doit en outre être envisagé dans le contexte plus large de la réflexion que mène actuellement l’Assemblée parlementaire sur la démocratie et le fonctionnement des institutions démocratiques dans les Etats membres du Conseil de l’Europe. Je pense en particulier aux débats organisés tous les deux ans sur l’état de la démocratie en Europe ainsi qu’à la participation active de l’Assemblée à toutes les sessions du Forum pour l’avenir de la démocratie. La commission des questions politiques, par ailleurs, a consacré une grande partie de ses travaux à différents aspects du système démocratique, notamment la définition de critères d’évaluation de la qualité de la démocratie, la démocratie au sein des partis politiques, parmi d’autres.
10. Il importe de souligner ici la coopération fructueuse qui existe entre l’Assemblée parlementaire et la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise). L’Assemblée fait systématiquement appel à l’expertise de la commission pour les questions juridiques se rapportant à l’Etat de droit et au fonctionnement des institutions démocratiques.
11. Le présent rapport s’appuie, entre autres, sur les informations contenues dans le rapport comparatif sur les seuils et autres caractéristiques des systèmes électoraux empêchant certains partis d’accéder au parlement, préparé par le Conseil des élections démocratiques de la Commission de Venise, ainsi que sur d’autres documents élaborés par le Conseil. Je me suis servi également d’une excellente étude comparative réalisée par l’Institut international pour la démocratie et l’assistance électorale (IDEA).
12. Selon moi, ce texte doit être considéré comme une invitation à engager un large débat et une réflexion étendue sur différents éléments susceptibles d’affecter la représentativité de nos organes élus, et non comme une série de conclusions définitives. Il offre même, me semble-t-il, une excellente occasion de procéder à un échange de vues fructueux sur les expériences, les exemples et les pratiques de nos pays respectifs.

2. Caractéristiques des systèmes électoraux

2.1. Type de système électoral et méthode de dépouillement des suffrages au niveau de la circonscription

13. Un système électoral spécifie la forme du scrutin, l’ensemble des suffrages valides et la méthode de dépouillement du scrutin, ainsi que les modalités de répartition du pouvoir électoral entre les électeurs et la définition des circonscriptions d’électeurs dont les suffrages sont comptabilisés séparément. Différents systèmes électoraux peuvent aboutir à des résultats très différents, en particulier lorsqu’une préférence majoritaire ne s’exprime pas clairement.
14. Le système majoritaire et le système à la majorité relative, qui, d’un point de vue historique, sont les systèmes électoraux les plus anciens, reposent sur le principe selon lequel le candidat qui l’emporte est celui qui recueille le plus grand nombre de suffrages dans une circonscription électorale. Dans le système majoritaire, le représentant doit obtenir pour être élu 50 % + 1 voix, tandis que, dans le système à la majorité relative, un candidat peut être élu avec un nombre de voix inférieur à la majorité. Le pourcentage lui permettant d’être élu peut même être assez bas, en fonction du nombre de candidats en lice.
15. Le système majoritaire comprend souvent d’autres spécifications visant à éviter la situation dans laquelle il n’y aurait pas de gagnant, ce qui pourrait arriver dès lors que plus de deux candidats se présentent aux élections. C’est ainsi qu’un système à deux tours peut être utilisé. Si le premier tour ne donne pas un vainqueur recueillant la majorité absolue des suffrages, un second tour permet de départager les concurrents. Le second tour des élections a lieu à une autre date, le plus souvent environ une semaine plus tard.
16. Dans le système majoritaire à scrutin de ballottage, si aucun candidat n’obtient la majorité au premier tour, un second tour est organisé et seuls les deux candidats ayant recueilli le plus grand nombre de voix au premier tour sont autorisés à se présenter de nouveau au second tour. Le gagnant est celui qui recueille le plus grand nombre de suffrages au second tour.
17. Dans le système à la majorité relative, le nombre de candidats n’est pas réduit au second tour. Le candidat qui emporte le second scrutin est celui qui recueille le plus grand nombre de suffrages, qu’il ait obtenu la majorité ou non. Toutefois, dans certaines versions de ce système, un seuil est imposé aux candidats pour pouvoir participer au second tour.
18. Dans le système de vote alternatif, les électeurs indiquent un ordre de préférence pour les différents candidats. Pour être élu, un candidat doit recueillir la majorité des suffrages. Si aucun candidat n’obtient la majorité en première préférence, le candidat qui a le moins de premières préférences est éliminé et les deuxièmes préférences indiquées sur les bulletins de vote des électeurs qui avaient choisi ce candidat sont alors comptabilisées et reportées sur les autres candidats. Le processus d’élimination et de report des voix est répété jusqu’à ce qu’un candidat atteigne la majorité.
19. Dans le scrutin majoritaire uninominal à un tour, les électeurs doivent simplement cocher le nom de leur candidat favori. Le résultat est déterminé par le nombre de voix: le vainqueur est le candidat ayant recueilli le plus grand nombre de suffrages (règle du first past the post).
20. Dans le système à circonscription uninominale, chaque circonscription élit un représentant, ce qui crée un lien solide entre eux: le représentant a des obligations à l’égard d’une circonscription spécifique définie en termes géographiques. Dans le système à circonscription plurinominale, deux solutions sont possibles: le vote groupé et le votelimité. Le système de vote groupé donne à chaque électeur autant de voix qu’il y a de sièges à pourvoir et les gagnants sont les candidats qui recueillent le plus grand nombre de suffrages; le problème est parfois que ce système permet au parti recueillant la majorité des voix d’emporter tous les sièges d’une circonscription, ce qui peut conduire à un écart excessif entre le nombre de sièges et le nombre de voix effectivement obtenues. Dans le système de votelimité, chaque électeur dispose d’un nombre de voix inférieur au nombre de sièges à pourvoir, de façon à ce que la majorité ne puisse emporter la totalité des sièges d’une circonscription électorale.
21. Le système majoritaire et le système à la majorité relative sont les systèmes électoraux les plus fréquemment utilisés, habituellement en combinaison avec des circonscriptions uninominales. Ce système tend généralement à attribuer un nombre disproportionnellement élevé de sièges au parti majoritaire et il en résulte par conséquent un gouvernement fort reposant sur un seul parti qui contribue à la stabilité du système politique et qui n’a aucun besoin de recourir à la formation de gouvernements de coalition.
22. Le système majoritaire et le système à la majorité relative ont tous deux l’avantage de la simplicité, de la stabilité et d’une représentation fondée sur des circonscriptions. Ils sont faciles à comprendre pour l’électeur. Ils produisent en général des gouvernements stables.
23. Comme chaque circonscription territoriale est représentée par son unique député, le système majoritaire et le système à la majorité relative adhèrent à l’idée que chaque représentant doit avoir le soutien d’une majorité d’électeurs de sa circonscription. Il existe également de solides relations entre un représentant et l’ensemble de sa circonscription.
24. Le fait que les groupes de plus petite taille ne sont pas représentés de manière effective dans le système majoritaire et le système à la majorité relative peut aussi être considéré comme un avantage dans la mesure où cela incite les groupes minoritaires à s’intégrer à un groupe plus important, ce qui paraît souhaitable à la fois pour chaque groupe minoritaire, qui peut ainsi obtenir un soutien politique conforme à tout ou partie de ses intérêts, et pour le groupe de plus grande taille, qui obtient ainsi le soutien électoral de la minorité.
25. D’autre part, ces systèmes peuvent également inciter les citoyens à procéder à un «vote tactique», c’est-à-dire à soutenir un parti qui ne correspond pas toujours exactement à leurs attentes, mais est davantage en mesure d’obtenir un siège au sein des organes élus que le parti qui a leur faveur.
26. D’aucuns affirment parfois que ces systèmes réduisent le choix politique: les petits partis ne constituent pas une véritable option, puisqu’il leur est en tout état de cause impossible de siéger au parlement.
27. Certains détracteurs soutiennent que l’existence d’un exécutif fort n’est pas nécessairement un atout, dans la mesure où il confère au gouvernement une majorité si confortable qu’il ne se sent pas contraint de rechercher un compromis ou d’engager un débat sur des questions importantes.
28. Ces systèmes peuvent également avoir des effets indésirables. Au Royaume-Uni, à deux reprises depuis la seconde guerre mondiale, précisément en 1951 et en février 1974, le parti ayant obtenu le moins de voix a en réalité obtenu le plus grand nombre de sièges. Cette situation s’explique notamment par le fait que, lorsque plusieurs partis se présentent aux élections, ce qui est le cas au Royaume-Uni, il leur est possible de remporter une circonscription en recueillant moins de 50 % des voix par suite du fractionnement des suffrages obtenus par les candidats adverses. Le fait que les différentes circonscriptions comportent un nombre inégal d’électeurs explique également ce résultat.
29. Le découpage des circonscriptions électorales joue donc ici un rôle important dans la mesure où leur composition politique, raciale, ethnique, religieuse ou linguistique peut influer sur les résultats d’une élection. Le tracé des circonscriptions doit être régulièrement redéfini afin que celles-ci demeurent relativement égales au plan démographique.
30. Le système proportionnel est aujourd’hui le plus utilisé en Europe. Ce système vise à favoriser la création d’un parlement reflétant exactement la composition de l’électorat dans toute sa diversité. La taille des circonscriptions est à cet égard décisive puisque plus le nombre de circonscription est élevé, plus il est difficile d’assurer une proportionnalité complète.
31. Ici encore, différentes solutions spécifiques sont envisagées. Le système à listes de parti est l’une de ces solutions: la représentation proportionnelle assure à chaque parti politique la possibilité d’obtenir une représentation correspondant à la part des suffrages qu’il a recueillie. Pour être élu, un parti doit obtenir un certain quotient des voix. Ce quotient est obtenu en divisant le nombre total des suffrages exprimés par le nombre de candidats + 1 puis en ajoutant 1 au résultat. Seul le nombre prescrit de candidats à élire peut atteindre le quotient. Lorsqu’un parti obtient des sièges, il désigne ses représentants au parlement en partant du haut de la liste préétablie de candidats. Ce système ne requiert pas la redéfinition du tracé des circonscriptions électorales. Le scrutin porte généralement sur des circonscriptions plurinominales relativement étendues dont les limites correspondent fréquemment aux divisions administratives.
32. Le système préférentiel à listes de parti: dans ce système, l’électeur peut influer sur la composition des listes de parti. Le vote préférentiel permet à l’électeur de choisir parmi les candidats figurant sur la liste d’un parti un ordre de priorité différent de celui indiqué par le parti.
33. Le vote unique transférable: ce type de système électoral repose sur des circonscriptions plurinominales de petite taille; le tracé des circonscriptions électorales doit par conséquent être régulièrement redéfini. L’électeur classe les candidats par ordre de préférence. Les suffrages recueillis par le candidat ayant obtenu le plus petit nombre de voix sont reportés sur les autres candidats sur la base des deuxièmes préférences des électeurs qui ont voté pour ce candidat, afin que leurs voix ne soient pas perdues.
34. Dans les systèmes électoraux mixtes, l’attribution des sièges se fait sur la base de différentes formules. L’électeur vote deux fois, une fois pour un candidat et une fois pour un parti. Les systèmes électoraux mixtes prennent des formes variables, car les modalités de vote ainsi que la proportion des sièges attribués sur la base de circonscriptions uninominales ou de listes de parti influent fortement sur le résultat des élections. En outre, la relation entre sièges de circonscription et sièges de listes de parti, qui est essentielle, varie selon le type de système électoral mixte.
35. Les systèmes mixtes avec compensation proportionnelle: dans ces systèmes, le nombre final de sièges est calculé en soustrayant le nombre de sièges de circonscription obtenus par chaque parti du nombre total de sièges auxquels il peut prétendre sur la base de sa liste de parti. Les sièges de liste de parti servent ainsi à corriger d’éventuelles disproportionnalités. Les résultats sont effectivement proportionnels, à condition que le parti obtienne un pourcentage de voix supérieur au seuil électoral prévu.
36. Les systèmes parallèles: dans ces systèmes, les deux séries de sièges sont au contraire ajoutées l’une à l’autre. Les deux listes sont entièrement indépendantes et les sièges de listes de parti ne peuvent donc servir à corriger d’éventuelles disproportionnalités dues au nombre de sièges de circonscriptions uninominales.
37. On peut souligner, en conclusion, que le système majoritaire à la majorité relative favorise le bipartisme et la mise à l’écart des petits partis, tandis que la représentation proportionnelle encourage, en général, le multipartisme et bénéficie aux petits partis. Autrement dit, avec le scrutin proportionnel, le système des partis est plus concurrentiel et morcelé.
38. Le scrutin proportionnel produit souvent des gouvernements de coalition qui, même si grâce aux seuils légaux ils bénéficient d’une certaine stabilité, risquent de ne pas être en mesure de tenir leurs promesses électorales puisqu’il leur faut parvenir à un consensus avec les autres partenaires de la coalition sur le choix de la politique à mener.
39. Les coalitions peuvent en outre conférer aux petits partis un pouvoir disproportionné. Il s’agit là d’une question préoccupante, compte tenu notamment de la montée de l’extrémisme.
40. Le fait que les élus entretiennent en général moins de rapport avec leur circonscription est également sujet à critique.
41. Il importe de souligner qu’il existe aussi parfois d’importantes différences à l’intérieur d’une même famille de systèmes. Néanmoins, le choix d’un type de système électoral (majoritaire/à la majorité relative, mixte, proportionnel) a un effet de seuil important; en effet, ce mécanisme a en tant que tel d’importantes conséquences générales sur l’exclusion ou l’intégration des petits partis et, par conséquent, sur le morcellement des partis.

2.2. Seuils légaux

42. Aucun système électoral, qu’il s’agisse d’un système majoritaire, proportionnel ou mixte et quel que soit le mode de calcul des voix, ne peut garantir que tous les candidats ayant recueilli des suffrages soient élus. Autrement dit, aucun système n’est en pratique parfaitement proportionnel. Un certain minimum de voix est toujours nécessaire pour permettre à un candidat (un parti) d’accéder à la représentation au parlement (attribution d’un siège). Le pourcentage minimal de voix requis pour être élu est appelé «seuil d’exclusion». Tout système électoral comporte un seuil naturel.
43. Cependant, certains Etats, en particulier ceux qui sont dotés d’un système proportionnel ou mixte, ont institué artificiellement des seuils par le biais de la législation. Les candidats (partis) qui ne recueillent pas le nombre minimal de suffrages prescrit par la loi n’obtiennent aucun siège au parlement.
44. Le pourcentage correspondant au seuil d’exclusion varie d’un pays à l’autre. Il peut être fixé très bas (comme aux Pays-Bas: 0,67 %) ou très haut (10 % en Turquie, 8 % en Géorgie, 7 % en Russie, 6 % en Moldova). Dans la majorité des Etats membres du Conseil de l’Europe dotés de systèmes mixtes, le seuil légal se situe entre 4 et 5 %, tandis que dans les pays utilisant le système proportionnel, il s’établit généralement entre 3 et 5 %.
45. Un certain nombre d’Etats membres du Conseil de l’Europe dotés d’un système électoral proportionnel, parmi lesquels la Bosnie-Herzégovine, la Finlande, l’Islande, l’Irlande, le Luxembourg, le Portugal, la Suisse et «l’ex-République yougoslave de Macédoine», n’appliquent aucun seuil légal.
46. Pour comparer les seuils entre pays, la plus grande prudence s’impose. En effet, certains Etats appliquent un seuil au niveau de la circonscription ou du district électoral (par exemple l’Espagne), d’autres le font uniquement au niveau national (par exemple la Pologne), tandis que d’autres encore appliquent un seuil aux deux niveaux (par exemple la Suède). Il existe en outre des différences quant au stade du processus électoral où intervient l’application du seuil d’exclusion, à savoir au premier tour, au second tour ou à une étape ultérieure de l’attribution des sièges. Un autre élément à prendre en compte est le fait de savoir si le seuil s’applique aux partis ou aux coalitions de parti. Enfin, autre fait important, les dimensions des circonscriptions et d’autres caractéristiques du système électoral peuvent affecter fortement le degré d’ouverture du système.
47. L’Assemblée parlementaire a exprimé à plusieurs reprises son point de vue sur la question des seuils légaux. Dans sa Résolution 1547 (2007) sur l’état des droits de l’homme et de la démocratie en Europe, elle a déclaré que, dans les démocraties bien établies, un seuil supérieur à 3 % lors des élections législatives est injustifié. Dans une démocratie, l’expression du plus grand nombre d’opinions doit être possible. Priver de nombreuses catégories de personnes du droit à être représentées ne peut que nuire à un système démocratique. C’est pourquoi, dans cette résolution, l’Assemblée parlementaire a appelé les Etats membres à examiner la possibilité d’abaisser les seuils supérieurs à 3 % qui s’appliquent lors des élections parlementaires. Dans son rapport d’activité pour 2008, la commission de suivi a formulé des recommandations spécifiques invitant certains pays à abaisser ce seuil 
			(3) 
			 Voir le Doc. 11628..

2.3. Seuils naturels

48. Le seuil de représentation que l’on qualifie de naturel (ou caché, effectif ou informel) existe dans tous les systèmes électoraux, indépendamment de l’éventuelle existence d’un seuil légal. Il correspond au pourcentage de voix nécessaire pour obtenir un siège dans une circonscription.
49. Le seuil naturel dépend principalement du nombre moyen de représentants élus par circonscription, mais d’autres facteurs peuvent le modifier, comme la formule de répartition des sièges (d’Hondt, Saint-Laguë, Hare), le nombre de partis politiques en lice ou le nombre de sièges à l’assemblée. En général, une circonscription dans laquelle il y a un nombre assez faible de sièges à pourvoir requiert un pourcentage relativement élevé de voix par circonscription pour élire un représentant. A l’inverse, plus le nombre de sièges à pourvoir est élevé, plus le seuil naturel est bas.
50. Il n’existe certes pas de formule universelle permettant une évaluation exacte du seuil naturel dans chaque système électoral, mais il est possible de l’estimer à partir du nombre de sièges que compte chaque circonscription.
51. D’après ces estimations, dans les systèmes majoritaires ou à la majorité relative, les seuils naturels peuvent atteindre 50 % (France) ou 35 % (Royaume-Uni). Ils sont moins élevés dans les systèmes mixtes (11,3 % en Hongrie), et encore plus faibles dans les systèmes proportionnels (Finlande, 5 %; Belgique, 9,2 %; Islande, 10,8 %; Irlande, 15 %; Luxembourg, 4,8 %; Portugal, 6,7 %, Espagne, 9,7 %; Suisse, 9 %).
52. Même si le seuil naturel peut globalement jouer un rôle important au niveau des circonscriptions, il ne saurait être considéré comme l’équivalent d’un seuil naturel national ou du seuil légal national.
53. Les seuils naturels empêchent toutefois les partis nouveaux ou minoritaires d’obtenir une représentation équitable, voire les privent de toute représentation, avec autant d’efficacité que les seuils légaux.
54. Par ailleurs, l’existence d’un seuil légal de 5 %, par exemple, peut se révéler vide de sens; un parti ne peut en effet obtenir de sièges s’il recueille moins de 5 % des voix, indépendamment de l’imposition ou non d’un seuil légal.
55. Le niveau du seuil naturel dépend fortement de la répartition particulière du soutien dont bénéficient les partis, de la taille et du nombre de circonscriptions, ainsi que du nombre de sièges pourvus dans chaque circonscription.
56. Alors que les seuils naturels ont tendance à accentuer le décalage entre le pourcentage de voix obtenues et le nombre de sièges qui en résulte, ce dont profitent manifestement les plus grands partis, les seuils légaux engendrent habituellement une répartition proportionnelle des sièges entre les différents partis qui réussissent à les dépasser.

2.4. Seuils au sens plus large

57. Il existe d’autres mécanismes qui empêchent les petits partis d’être à armes égales avec les grands. Ils résultent de dispositions réglementaires ou constitutionnelles conçues pour freiner ou bloquer les partis qui souhaitent s’inscrire, présenter des candidats ou obtenir de toute autre manière officielle l’accès au scrutin, et pour restreindre inéquitablement l’accès au financement des campagnes et au temps d’antenne dans les médias. D’une part, les petits partis qui tentent de percer ont généralement de bonnes chances de réussir dans les systèmes politiques qui œuvrent en faveur de l’égalité dans la concurrence entre les partis, c’est-à-dire ceux où tous les partis sont égaux dans l’accès au scrutin, à une campagne gratuite dans les médias, à des financements publics directs et à des subventions indirectes de l’Etat. A l’inverse, la tâche est plus difficile pour les petits partis confrontés à un environnement plus dur quand de tels moyens publics font l’objet d’ententes qui favorisent les partis institutionnels déjà représentés au parlement, et qui protègent ainsi les politiciens au pouvoir.
58. Les petits concurrents se heurtent à des obstacles encore plus difficiles dans les régimes qui manipulent les élections et favorisent manifestement le parti au pouvoir par l’affectation des fonds publics.
59. De nombreux systèmes électoraux prévoient diverses formes de restriction de la participation au scrutin. Il s’agit parfois d’une caution électorale: elle se pratique surtout dans certains pays d’Afrique (Sénégal et Mali), mais aussi en Europe, comme en Slovaquie (au moins lors des élections au Parlement européen de 2009).
60. L’inscription peut également être une source d’entrave: une somme disproportionnée est parfois exigée lors du dépôt de candidature et peut interdire l’accès des petits partis ou des candidats indépendants aux organes élus.
61. Signatures: divers pays exigent d’obtenir un certain nombre de signatures pour qu’une personne puisse se présenter. Il peut s’agit de signatures d’électeurs «normaux» (en Finlande, un candidat doit réunir 100 signatures d’électeurs s’il veut se présenter à une élection), de celles d’élus (comme en France, avec le système des «grands électeurs»), ou d’une combinaison des deux systèmes (comme en Autriche, où la signature de trois membres du parlement remplace des centaines de voix d’électeurs «ordinaires»).
62. Par ailleurs, le financement est un autre paramètre qui a un impact considérable sur l’issue d’un scrutin. C’est notamment le cas des fonds publics, y compris les financements directs et indirects de l’Etat.
63. Enfin, l’accès équitable et sans discrimination aux médias est également une condition indispensable au caractère libre et équitable des élections.

2.5. Jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme: arrêt du 8 juillet 2008, Yumak et Sadak c. Turquie

64. Dans le cas mentionné ci-dessus, les requérants se plaignaient du seuil de 10 % fixé par la loi électorale de Turquie, qui les ont empêchés d’être élus à l’Assemblée nationale en 2002. En raison de ce seuil, environ 45 % des électeurs ont voté pour des candidats qui n’ont pas réussi à franchir cette limite.
65. La Cour a estimé que le seuil électoral de 10 % imposé sur le plan national pour une représentation des partis politiques au parlement portait atteinte aux droits électoraux des requérants. Le seuil légal avait toutefois pour but légitime d’éviter une fragmentation parlementaire excessive et non fonctionnelle, et donc de renforcer la stabilité gouvernementale.
66. La Cour a noté que la barre des 10 % constituait le seuil de représentation national le plus élevé des Etats membres du Conseil de l’Europe. Seuls trois autres Etats membres avaient opté pour des seuils élevés (7 % ou 8 %). Un tiers des Etats imposaient un seuil de 5 %, et 13 Etats avaient placé la barre à un niveau inférieur.
67. La Cour a toutefois estimé qu’en l’espèce, et considérant le contexte politique spécifique de ces élections et les correctifs et autres garanties susceptibles de contrebalancer les effets en pratique du seuil électoral de 10 % contesté, ce dernier n’avait pas porté atteinte à la substance même du droit des requérants protégé par l’article 3 du Protocole no 1. Par conséquent, ce seuil légal de 10 % ne constituait pas une violation des droits électoraux.

2.6. Observations générales

68. Pour terminer ce chapitre II, intitulé «Caractéristiques des systèmes électoraux», précisons qu’il vise à soumettre au lecteur des informations susceptibles d’alimenter sa réflexion. Il n’est en rien destiné à tirer quelque conclusion que ce soit ou à affirmer qu’un système est meilleur ou pire qu’un autre.
69. Aucun système ne saurait en effet être recommandé à l’ensemble des pays comme étant le meilleur. Chacun d’eux présente des avantages et des inconvénients et ils dépendent tous, dans une large mesure, du contexte historique, du système politique et de la configuration des partis.
70. Un système électoral résulte fondamentalement d’un processus politique, et ce n’est pas un domaine dans lequel des experts techniques indépendants peuvent préconiser une solution qui serait la seule valable. En effet, le contexte politique est un des principaux paramètres à prendre en compte dans l’évaluation d’un tel système.
71. Il importe avant tout de veiller à ce que les différentes étapes du système électoral, quelle que soit la forme qu’il prenne, reposent sur les principes démocratiques et se conforment aux normes démocratiques. Le Conseil de l’Europe et l’Assemblée parlementaire ont ici, selon moi, un rôle important à jouer. J’y reviendrai plus longuement dans une partie ultérieure du présent exposé des motifs.

3. Procédures internes des partis pour la sélection et la désignation de candidats

72. La désignation des candidats aux élections est capitale pour la crédibilité et la légitimité du processus électoral et, d’ailleurs, du système politique dans son ensemble. Son incidence sur la représentativité d’un organe élu est évidente.
73. Les démocraties modernes reposent sur les partis politiques, qui sont l’un des principaux moyens de canaliser différents points de vue et de défendre une variété d’intérêts dans le processus décisionnel politique. Les partis politiques sont capables de rassembler et de mobiliser les citoyens, de regrouper et d’articuler les intérêts et les exigences, de faciliter les compromis, de proposer un programme apportant des réponses à ces demandes, de recruter des dirigeants politiques et des candidats pour occuper des fonctions électives, d’élaborer des politiques et de les mettre en œuvre ou de surveiller leur application, et d’organiser le parlement et le gouvernement.
74. La législation nationale des pays démocratiques considère les partis comme des associations privées chargées de définir librement leurs propres règles, procédures et structures internes, à l’instar des autres groupes d’intérêt de la société civile. Une intervention ou une réglementation excessives par l’Etat pourraient être perçues comme des menaces pour les principes fondamentaux des libertés civiles.
75. La démocratie et les procédures internes des partis qui aboutissent à la présélection des candidats aux élections revêtent une importance fondamentale pour la représentativité des organes élus et, par voie de conséquence, pour la légitimité de l’ensemble du système politique. Ces procédures internes varient considérablement d’un parti à l’autre, même au sein d’un même pays.
76. L’Assemblée parlementaire s’est intéressée à cette question importante. Dans son rapport sur le Code de bonne conduite des partis politiques, M. Van der Brande a insisté sur le fait que les bonnes pratiques de sélection et de nomination des candidats doivent promouvoir les principes et pratiques démocratiques à tous les niveaux, y compris national, régional et local. Le processus devrait être initié de la base vers le sommet, avec un grand respect pour le niveau du parti local. Un problème spécifique relatif à une liste nationale pour les élections parlementaires et un risque d’abus de pouvoir par les dirigeants d’un parti doivent être abordés. Cela implique la transparence et l’égalité les plus grandes.
77. Dans les pays d’Europe, il existe tout un éventail de procédures internes des partis pour la sélection des candidats. Cela s’explique par les interactions complexes entre le droit national, les processus décisionnels internes aux partis et le contexte historique. L’on constate cependant que plus les partis sont affaiblis par la perte de membres et/ou de voix, plus ils sont disposés à ouvrir le processus de désignation des candidats. Le débat récent au sein du parti socialiste français sur l’instauration de primaires dans les élections présidentielles illustre bien le débat.
78. Les primaires ont traditionnellement joué un rôle plus important dans les pays anglophones que dans ceux du reste de l’Europe occidentale. Mais, depuis les années 1990, le phénomène est de plus en plus visible dans la politique de ces derniers (comme au Danemark, en Finlande et en Belgique). De plus, nombre de partis ont volontairement entrepris de vastes réformes afin de promouvoir la démocratie interne (comme en Allemagne, en Norvège et au Royaume-Uni).
79. A l’évidence, le système électoral exerce une influence sur le rôle des partis dans la sélection et la désignation des candidats. Dans un système électoral majoritaire uninominal à un tour fondé sur les candidats, par exemple, le rôle des partis se limite presque exclusivement à assurer le soutien politique de leur candidat et à recueillir les contributions au financement de la campagne électorale. Dans un système proportionnel à liste bloquée, par contre, les partis conservent des prérogatives très importantes, notamment pour définir la place de chaque candidat sur la liste.
80. La succession des candidats élus est également une question importante. Il arrive assez fréquemment que la personne prenant la succession d’un siège vacant n’ait pas de légitimité électorale. La législation nationale règle rarement cette question de manière satisfaisante, alors qu’elle est de la plus haute importance pour la légitimité et la représentativité des organes élus. Il serait intéressant que les Etats membres du Conseil de l’Europe mettent en commun les informations et les données tirées de l’expérience dont ils disposent sur ce sujet.
81. Le point final que je souhaite aborder dans cette section concerne l’impact de la démocratisation interne sur le fonctionnement général des partis politiques. La sélection des candidats a été démocratisée de diverses manières. Dans ses formes les plus modérées, cette démocratisation a eu des retombées positives sur l’organisation des partis (avec par exemple une augmentation de la participation des membres), mais son effet n’est pas certain. Quand elle est radicale, par contre, il est probable qu’elle nuise à la cohésion des partis ainsi qu’à la qualité de la démocratie représentative. Cela peut également saper la loyauté des candidats d’un parti, ces derniers devenant de plus en plus indépendants.
82. Toutes ces questions sont extrêmement importantes pour la représentativité des parlements et pour la légitimité démocratique du système politique dans son ensemble. J’ai la conviction qu’elles appellent un examen attentif et une analyse détaillée, sur la base d’exemples et de bonnes pratiques de nos pays membres. J’espère qu’il en résultera un débat intéressant, et que les membres de cette commission me feront part de leur expérience et de leurs idées au cours de la discussion du présent document pour que des recommandations et des propositions puissent être formulées.

4. Les systèmes électoraux et leur impact sur la création de l’exécutif

83. Les chances de mettre en place un gouvernement stable et efficace ne reposent pas uniquement sur le système électoral, mais le choix d’un tel système a un impact considérable sur la création de l’exécutif.
84. Comme je l’ai déjà indiqué, les systèmes majoritaires ont, dans l’ensemble, plus de chances d’engendrer un organe législatif au sein duquel un parti peut créer l’exécutif et réunir assez de voix pour mettre en minorité l’ensemble de l’opposition, tandis qu’avec les systèmes à la proportionnelle la probabilité d’un gouvernement de coalition est plus grande. A l’inverse, il est également possible que les systèmes proportionnels permettent à un parti d’obtenir la majorité absolue, et que des élections au scrutin majoritaire ne confèrent à aucun parti une majorité confortable. Cela dépend beaucoup d’autres paramètres tels que la structure du système des partis, le contexte historique et la nature de la société concernée.
85. L’expérience montre toutefois que les systèmes proportionnels entraînent un morcellement des parlements. Les gouvernements sont souvent le fruit d’une coalition et sont parfois minoritaires. Cette conséquence est fréquemment considérée comme un inconvénient. Cependant, dans les pays habitués à une telle situation, il arrive que le système proportionnel incite les partis à parvenir à un compromis dès la campagne électorale, ce qui est plutôt ressenti comme un avantage.

5. Les systèmes électoraux et la représentativité des organes élus

86. Comme nous l’avons démontré plus haut, les systèmes électoraux varient d’un Etat membre du Conseil de l’Europe à l’autre et chacun d’eux présente des avantages et des inconvénients. Le fait est qu’il serait difficile, voire impossible, d’en choisir un et de l’ériger en modèle parfait pour le recommander aux autres Etats. Ils sont habituellement le produit de l’histoire et de la vie politique et dépendent pour beaucoup du système politique, de la configuration des partis et de la culture du pays.
87. La représentativité des organes élus et, conséquence logique, leur légitimité figurent au cœur du débat sur les systèmes électoraux. En d’autres termes, le parti qui se présente aux élections devrait obtenir, au sein de cet organe élu, un nombre de sièges qui corresponde à peu près à la proportion des suffrages exprimés en sa faveur.
88. Il importe qu’une assemblée élue soit avant tout la transposition de la composition politique de l’électorat. Mais il convient également de garantir qu’elle tienne compte des autres aspects importants que sont, notamment, la géographie, le sexe, l’appartenance ethnique ou les autres éléments identitaires d’un groupe (âge, vulnérabilité particulière, etc.).
89. La représentativité des organes élus est une condition indispensable à leur légitimité et, partant, à la confiance des citoyens à l’égard du processus politique. De fait, le seul moyen de surmonter l’indifférence croissante affichée par les électeurs à l’égard de la politique que l’on peut observer dans certains pays depuis quelques années et qui se traduit, notamment, par un faible taux de participation aux élections, consiste à convaincre les citoyens qu’ils ont un rôle à jouer dans le processus politique de prise de décision.
90. Les seuils, qu’ils soient légaux ou naturels, ainsi que les seuils au sens large, ont d’importantes répercussions sur la représentativité d’un organe élu. Cette question de la plus haute importance a déjà été examinée par l’Assemblée à diverses reprises et sa position à ce sujet est claire: les seuils supérieurs à 3 % sont difficilement légitimes dans une démocratie stable. Rien ne justifie que l’accès au parlement soit interdit à certains groupes de citoyens (petits partis). De nombreux Etats membres du Conseil de l’Europe prévoient différents types de seuils largement supérieurs à 3 %; il convient de les inviter à revoir leur réglementation, afin qu’elle soit davantage conforme aux normes démocratiques.
91. L’obligation de dépôt d’une caution offre un exemple flagrant d’une autre forme d’entrave à l’accès aux organes élus à laquelle se heurtent les candidats. Bien que nul ne mette en doute son utilité, le montant de cette caution est parfois disproportionné sans que rien ne le justifie et il convient de le revoir.
92. Comme je l’ai indiqué dans l’introduction, j’ai laissé à ma collègue de la commission sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes le soin d’examiner plus attentivement l’incidence du système électoral sur l’accès des femmes aux organes élus. Je dois cependant souligner que les femmes demeurent sous-représentées à toutes les étapes du processus électoral et qu’il importe de prendre, aux divers échelons et notamment sous forme de disposition légale ou de règlement intérieur des partis, des mesures destinées à remédier à cette situation. Il convient de réfléchir à des mesures transitoires, comme la mise en place de quotas.
93. Cela vaut également pour les personnes qui appartiennent à un groupe sous-représenté, comme les jeunes, les membres des minorités, les migrants ou les personnes handicapées. Le processus électoral devrait être source d’intégration et, s’il n’est pas toujours possible d’imposer certaines règles sous forme de dispositions légales (par exemple pour le choix et la désignation des candidats), il importe de promouvoir la lutte contre les exclusions et d’inciter les partis à adopter volontairement ces règles.
94. Le moment est également venu de rappeler les recommandations antérieures de l’Assemblée au sujet de la participation des étrangers au processus décisionnel politique. L’Assemblée a toujours été favorable au fait d’accorder le droit de vote aux résidents étrangers en situation régulière, au moins à l’échelon local ou régional.
95. Cela nous conduit à examiner une autre question capitale, dont les répercussions sur la composition finale et, partant, la représentativité des organes élus sont considérables: les procédures internes aux partis. Nous avons examiné un aspect de la question, la sélection et la désignation des candidats, mais il reste d’autres points essentiels à aborder: la transparence à chaque étape du processus électoral, l’existence de dispositions claires et équitables en matière de financement des campagnes électorales et l’occupation des sièges vacants par les suppléants.
96. La démocratie à l’intérieur des partis n’est que, dans une certaine mesure, une affaire interne aux partis; l’Etat peut et devrait veiller à ce que la législation nationale impose certaines dispositions internes aux partis. Cette nécessité se fait particulièrement sentir en matière de financement des campagnes électorales. Il importe que les dispositions normatives et réglementaires qui régissent la transparence, l’obligation de rendre compte, le financement et la communication des éléments financiers soient particulièrement claires et précises.
97. Là encore, je me réfère au Code de bonne conduite en matière de partis politiques adopté par l’Assemblée. Les membres de l’Assemblée parlementaire devraient contribuer à promouvoir les principes énoncés par ce code en engageant, dans leurs partis respectifs, un débat sur les divers aspects de leur fonctionnement.
98. L’équité de la campagne électorale est déterminante pour gagner la confiance des citoyens à l’égard du processus électoral. L’accès équitable de toutes les forces politiques concurrentes aux médias, la couverture médiatique impartiale des campagnes électorales, l’absence d’ingérence des pouvoirs publics dans les activités des journalistes, leur accès à l’information, leur indépendance et leur impartialité forment autant de principes qu’il convient de traduire dans un cadre réglementaire adéquat.
99. Les procédures de vote ne sont jamais parfaites et il convient de les réexaminer constamment, en vue de les améliorer et de les adapter aux nouvelles possibilités offertes par la technologie. L’utilisation des technologies de l’information et de la communication, les diverses formes de vote à distance, parmi lesquelles le vote électronique, représentent une partie des enjeux auxquels les systèmes électoraux sont aujourd’hui confrontés. Le Conseil de l’Europe offre une excellente plate-forme de mise en commun des données d’expérience et d’échange d’informations. Ses travaux dans le domaine de la démocratie électronique, et notamment les conclusions du Forum du Conseil de l’Europe pour l’avenir de la démocratie qui s’est tenu en 2008 à Madrid sur cette question, illustrent parfaitement le rôle que notre Organisation est en mesure de jouer.
100. L’existence de voies de recours efficaces est incontournable pour obtenir la confiance des citoyens à l’égard du système électoral.
101. La conformité du processus électoral avec les normes démocratiques devrait être garantie par les commissions électorales. Il convient qu’elles soient impartiales, indépendantes et compétentes pour pouvoir exercer convenablement leur mission. Il est par conséquent capital pour l’équité du processus électoral que des dispositions cohérentes et claires régissent le mode de désignation de leurs membres et que leur composition soit équilibrée.
102. Les observateurs aussi bien nationaux qu’internationaux jouent un rôle déterminant en contrôlant l’équité du déroulement des élections. Il est regrettable que, dans certains pays, la réglementation qui régit le statut des observateurs et garantit leurs droits laisse à désirer. Il convient de remédier à cette situation.
103. Le 27 octobre 2005, à New York, plus de 20 organisations et institutions internationales, dont le Conseil de l’Europe, ont approuvé la Déclaration de principe pour l’observation internationale d’élections et le Code de conduite à l’usage des observateurs électoraux internationaux. Il convient de promouvoir pleinement et de mettre intégralement en œuvre ces deux documents.

6. Conclusions

104. Comme nous l’avons déjà indiqué, le système électoral parfait qui pourrait être recommandé à chaque Etat n’existe pas. Mais il est indispensable de parvenir à une entente commune sur les principes dont le respect permet de qualifier des élections de «libres et équitables», conformément aux normes démocratiques.
105. Le respect scrupuleux de ces principes dans toute élection organisée sur le territoire du Conseil de l’Europe et dans les Etats qui aspirent à adhérer à l’Organisation ou à entretenir avec elle des rapports privilégiés fera du Conseil de l’Europe le plus vaste espace d’élections «libres et équitables». Cet objectif doit être atteint dans un proche avenir.
106. De nombreuses activités essentielles du Conseil de l’Europe, comme le contrôle du respect des engagements pris par les Etats membres au moment de leur adhésion ou l’observation parlementaire des élections, ont à l’évidence contribué et contribueront encore à relever cet ambitieux défi.
107. La dernière session du Forum pour l’avenir de la démocratie, tenue à Kiev du 21 au 23 octobre 2009 et consacrée aux systèmes électoraux, offre un excellent exemple de la part prise par le Conseil de l’Europe à la réflexion sur cette importante question. Les débats d’un grand intérêt et les conclusions générales auxquels il a donné lieu montrent la voie à suivre.
108. Il est désormais primordial que toutes les parties prenantes au forum, c’est-à-dire l’Assemblée parlementaire, le Comité des Ministres, le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe et la société civile, donnent suite aux recommandations formulées dans les conclusions et les traduisent en mesures concrètes.
109. J’ai, pour ma part, déjà pris l’engagement d’insérer ces conclusions dans les travaux de mon parlement et j’invite tous les membres de l’Assemblée à suivre mon exemple, si le règlement intérieur de leurs assemblées respectives prévoit cette possibilité.
110. L’Assemblée parlementaire offre également une tribune idéale pour approfondir la réflexion politique sur les différents aspects du processus électoral et les sources de préoccupation qu’il comporte; ces éléments ont été abordés dans le présent rapport et dans les conclusions: il s’agit notamment du financement des campagnes politiques ou de la sélection et de la désignation des candidats, ainsi que de leur succession. Ces questions devraient être traitées, conformément à notre Règlement intérieur, par le dépôt de propositions de recommandation.
111. Le Comité des Ministres devrait tirer parti de son rôle sans équivalent d’instance de coopération paneuropéenne pour parvenir à une entente commune sur les principes dont le respect permet de qualifier des élections de «libres et équitables». Il convient, notamment, de l’inviter à engager une réflexion et des travaux approfondis sur le cadre réglementaire et les dispositions spécifiques qui régissent le processus électoral dans les Etats membres du Conseil de l’Europe, en particulier pour les aspects suscitant des préoccupations.
112. Cette réflexion débouchera peut-être sur l’élaboration de lignes directrices relatives aux principes applicables au processus électoral, qui seraient recommandées à l’ensemble des Etats membres du Conseil de l’Europe.
113. La Commission de Venise, qui a jusqu’ici œuvré de manière remarquable dans ce domaine, devrait être encouragée à poursuivre son action.
114. Pour conclure, il est évident que les travaux et la réflexion consacrés aux incidences des systèmes électoraux sur la représentativité des parlements sont loin d’être achevés et qu’il reste encore beaucoup à faire. J’espère que ce rapport permettra de prendre conscience de la situation.

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Commission chargée du rapport: commission des questions politiques

Renvoi en commission: Doc. 11481, Renvoi 3432 du 14 avril 2008

Projet de résolution et projet de recommandation adoptés à l’unanimité le 15 décembre 2009

Membres de la commission: M. Göran Lindblad (Président), M. David Wilshire (1er Vice-Président), M. Björn von Sydow (2e Vice-Président) (remplaçante: Mme Kerstin Lundgren), Mme Fátima Aburto Baselga, M. Francis Agius (remplaçant: M. Joseph Debono Grech), M. Alexander Babakov (remplaçant: M. Sergey Markov), M. Viorel Badea, M. Denis Badré, M. Andris Bērzinš, M. Mevlüt Çavuşoğlu, M. Lorenzo Cesa, M. Titus Corlăţean, Mme Anna Čurdová, M. Rick Daems, Mme Maria Damanaki (remplaçant: M. Konstantinos Vrettos), M. Dumitru Diacov, M. Pol van den Driessche, Mme Josette Durrieu, M. Frank Fahey, M. Piero Fassino, M. György Frunda, M. Jean-Charles Gardetto, M. Marco Gatti, M. Andreas Gross, M. Michael Hancock, M. Davit Harutyunyan, M. Norbert Haupert, M. Joachim Hörster, Mme Sinikka Hurskainen, M. Tadeusz Iwiński, M. Bakir Izetbegović (remplaçant: M. Mladen Ivanić), M. Michael Aastrup Jensen, M. Miloš Jevtić, Mme Birgen Keleş, M. Victor Kolesnikov (remplaçante: Mme Olha Herasym’yuk), M. Konstantin Kosachev, M. Jean-Pierre Kucheida, Mme Darja Lavtižar-Bebler, M. René van der Linden, M. Dariusz Lipiński, M. Gennaro Malgieri, M. Dick Marty, M. Frano Matušić, M. Silver Meikar, M. Evangelos Meimarakis, M. Dragoljub Mićunović, M. Jean-Claude Mignon, Mme Nadezhda Mikhailova, M. Aydin Mirzazada, M. Juan Moscoso del Prado Hernández, Mme Lilja Mósesdóttir, M. João Bosco Mota Amaral, Mme Olga Nachtmannová, M. Gebhard Negele, Mme Miroslava Nĕmcová, M. Zsolt Németh, M. Fritz Neugebauer (remplaçant: M. Franz Eduard Kühnel), M. Aleksandar Nikoloski, M. Hryhoriy Omelchenko, M. Maciej Orzechowski, M. Ivan Popescu, M. Christos Pourgourides, M. John Prescott (remplaçant: M. John Austin), M. Gabino Puche, M. Amadeu Rossell Tarradellas, M. Ilir Rusmali, M. Ingo Schmitt (remplaçant: M. Eduard Lintner), M. Predrag Sekulić, M. Samad Seyidov, M. Leonid Slutsky, M. Rainder Steenblock, M. Zoltán Szabó (remplaçant: M. Mátyás Eörsi), M. Mehmet Tekelioğlu, M. Han Ten Broeke, M. Zhivko Todorov, Lord Tomlinson (remplaçant: M. Rudi Vis), M. Latchezar Toshev, M. Petré Tsiskarishvili, M. Mihai Tudose, M. Ilyas Umakhanov, M. José Vera Jardim, M. Luigi Vitali, M. Wolfgang Wodarg, Mme Karin S. Woldseth, Mme Gisela Wurm, M. Emanuelis Zingeris

Ex officio: M. Tiny Kox

N.B.Les noms des membres ayant participé à la réunion sont indiqués en gras

Secrétariat de la commission: Mme Nachilo, M. Chevtchenko, Mme Sirtori-Milner